ANNEXE N° 2 - LE PACTE DE STABILITÉ ENTRE L'ÉTAT ET LES COLLECTIVITÉS TERRITORIALES

Le pacte de stabilité des relations financières entre l'État et les collectivités territoriales : des engagements à respecter, une réflexion à prolonger

Les discussions au sein de votre commission des Finances ont été l'occasion de rappeler au Gouvernement son engagement de respecter, pour 1996, 1997 et 1998, les termes du "pacte de stabilité" voté dans le cadre de la loi de finance initiale pour 1996. Le "pacte" recouvre l'ensemble des concours de l'État aux collectivités territoriales déjà indexés en vertu de dispositions de précédentes lois de finances ; la masse ainsi définie doit progresser selon l'indice prévisionnel d'évolution des prix, l'ajustement étant réalisé au moyen de la suppression de la première part de la dotation globale d'équipement et des ponctions opérées sur la dotation de compensation de la taxe professionnelle.

Quant aux différentes compensations placées hors "pacte" (FCTVA, compensation des dégrèvements et exonérations d'impôts locaux...), si leur montant ne peut, par nature, être préservé par un engagement formel du Gouvernement, leurs modalités de calcul doivent cependant bénéficier d'une stabilisation après les aménagements opérés dans la dernière loi de finances pour ralentir leur progression.

Il convient donc sans doute d'imputer à une maladresse l'insertion dans le rapport du Gouvernement (page 48), sous le titre "endiguer la déflation des recettes", d'une remarque d'ensemble sur l'évolution des prélèvements sur recettes au profit des collectivités locales. Votre commission souhaite en tout cas obtenir une confirmation claire que le Gouvernement ne reviendra pas sur la parole donnée à l'automne dernier.

Plus fondamentalement, le Sénat avait exprimé le regret que la notion de pacte de stabilité ne soit pas étendue à l'ensemble des contraintes financières imposées par l'État aux collectivités territoriales. La vision unilatérale défendue par le Gouvernement avait du reste empêché que ledit "pacte" fasse l'objet d'un accord conventionnel| signé par les associations représentant les élus locaux.

Ceux-ci ne peuvent toujours pas se satisfaire d'une situation caractérisée par la hausse inéluctable de quatre séries de charges procédant d'exigences formulées par l'État :

Après une année de pause, la question du financement de la caisse nationale de retraite des agents des collectivités locales (CNRACL) se posera à nouveau, en 1997, à défaut d'un abaissement significatif de la surcompensation. En effet, la stabilisation, en 1996, des cotisations employeur à la CNRACL n'a été acquise que par le report sur 1997 de 4,8 milliards de francs, représentant près de trois points de cotisation employeur, dus au titre des dispositifs de compensation et de surcompensation entre régimes de retraite. L'exercice en cours est d'ores et déjà caractérisé par une exécution extrêmement tendue en trésorerie.

En dépit du gel, cette année, de la valeur de l'indice de la fonction publique, les frais de personnel restent fondamentalement stimulés par l'application des accords Durafour : pour la seule année 1996, les mesures de revalorisation sont estimées à 1,5 milliard de francs par le Crédit Local de France. La progression d'ensemble des dépenses de personnel atteindrait, selon la même source. + 4,4 % sur le présent exercice, toutes collectivités confondues un peu plus pour les départements (+5-6 %). et + 8.6 % pour les seules régions.

Les dépenses d'aide social e continuent, elles aussi, de progresser à un rythme sensiblement supérieur à celui de la hausse des prix de détail. Leur taux d'évolution avoisine encore, cette année, 5 % pour la moyenne des départements et des contingents communaux Toutefois, des taux plus proches de 10 %, voire supérieurs sont observables, à la lecture des budgets primitifs, pour certains départements et les grandes villes

Enfin, l'investissement des collectivités territoriales va devoir se stabiliser à un niveau élevé dans le futur proche. Une étude récente du Crédit Local de France révèle, en effet, que celles-ci, pour satisfaire à diverses contraintes dans les domaines de l'environnement et de la sécurité, devront investir près de. 1.000 milliards de francs sur le quinquennat 1996-2000, soit environ 200 milliards de francs par an, alors que moyenne de ces dernières années s'établit plutôt autour de 150-160 milliards de francs :

- pour l'assainissement, une directive européenne oblige les villes à traiter les eaux usées d'ici 2005 au plus tard : de 1995 à 2005, la réalisation de nombreuses stations d'épuration devrait représenter 70 milliards francs d'investissements. Le traitement des eaux pluviales représente un besoin de 80 à 100 milliards de francs supplémentaires ;

- le traitement des déchets ménagers devrait se traduire par des investissements d'un montant de 50 milliards de francs d'ici 2002 ;

- les projets en cours de réalisation ou à l'étude dans le domaine des transports publics urbains représentent 30 milliards de francs d'ici l'an 2000 ;

- les collectivités ont déjà beaucoup investi dans le domaine de l'éducation et devraient encore injecter environ 25 milliards de francs par an dans le financement des travaux de rénovation et de sécurité dans les locaux scolaires (commission Schléret, décret amiante...).

L'effet de ciseaux, entre des charges accrues et des recettes qui sont, tendanciellement, en faible progression du fait, notamment, de la stagnation des concours de l'État, devrait ainsi aller en s'accentuant.

Les conséquences négatives de cette situation sont claires : les collectivités territoriales ont dû, cette année, comme leurs budgets primitifs en font foi, agir simultanément sur le levier fiscal et sur l'investissement, dans ce dernier cas en dépit des obligations qui s'imposent à elles dès 1996 et dont la liste a été dressée plus haut :

- Seuls 20 départements sur 100 et 5 grandes villes sur 45 n'ont pas augmenté les taux de leurs quatre impôts directs. En outre, 60 % des départements interrogés par l'assemblée des présidents de conseils généraux (APCG) envisagent, cette année, une nouvelle baisse de leurs droits de mutation.

- En termes d'investissement, les dépenses votées par les conseils généraux (équipement direct et subventions aux communes) seraient globalement en baisse de 1,1 %, mais 20 % des départements interrogés par l'APCG envisagent, dans leurs budgets primitifs, des pourcentages négatifs à deux chiffres. S'agissant grandes villes, frappées de plein fouet par la suppression de la première part de la DGE, une tendance à la baisse des budgets d'investissement est incontestable, même si ces collectivités présentent un profil moins homogène que celui des départements.

Les collectivités territoriales peuvent donc légitimement craindre d'être placées dans une situation intenable au cours des prochaines années, en continuant d'accroître les impôts locaux sans parvenir à satisfaire les exigences de tous ordres auxquelles elles demeurent confrontées.

Au-delà des termes du "pacte de stabilité", dont le respect par le Gouvernement constitue un minimum une remise à plat du rôle et des ressources des collectivités locales et de leur interaction avec le budget de l'État est ainsi devenue indispensable. L'ardente obligation de réduction du déficit budgétaire de l'État ne doit pas se conclure, en effet, par de nouveaux transferts de charges non compensés aux collectivités locales. Il faut souhaiter que la réflexion générale sur la réforme de l'État et la discussion sur le projet de loi de clarification de la répartition des compétences entre l'État et les collectivités territoriales seront l'occasion d'un débat qui n'avait pas pu trouver sa place lors de la remise des conclusions du rapport Delafosse.

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