c) Les rapports de la Commission européenne

· Conformément aux engagements pris, la Commission européenne a présenté, chaque année, à partir de 1993, un rapport sur la mise en oeuvre du principe de subsidiarité :

- le rapport présenté en novembre 1993 rappelle l'analyse du principe de subsidiarité présentée par la Commission en octobre 1992, réaffirme l'engagement de celle-ci de motiver ses propositions législatives au regard de ce principe et de retirer ou réviser certains textes, et met principalement l'accent sur la refonte et la simplification de la législation en vigueur, non sans indiquer au passage qu'un accroissement de ses propres compétences d'exécution participerait de la simplification recherchée,

- le rapport présenté en novembre 1994 indique que la Commission se montre plus " sélective " dans ses propositions et recherche, chaque fois que possible, " des solutions alternatives à la législation, voire à l'action communautaire ". La Commission précise également qu'elle " fait un plus ample recours à la consultation en amont de l'évaluation de ses propositions ". L'essentiel du rapport porte, à nouveau, sur l'adaptation de la législation existante, devenue le principal aspect de la mise en oeuvre du principe de subsidiarité,

- le rapport présenté en novembre 1995 manifeste une certaine difficulté de renouvellement : on y retrouve les mêmes indications que l'année précédente, et il devient d'ores et déjà manifeste que le rapport annuel de la Commission européenne manquera de ces rebondissements qui tiennent le lecteur en haleine. La Commission met donc l'accent sur la sélectivité de ses initiatives, sur les consultations préalables, et sur la rationalisation de la législation en vigueur,

- enfin, le " rapport d'étape " préparé en vue du Conseil européen de Florence, reprend à nouveau le triptyque " sélectivité, consultation, adaptation de la législation existante " sans apporter d'éléments nouveaux.

· Il est difficile de considérer que, au fil de ces rapports, se dessine une évolution vers une Communauté faisant de la subsidiarité un " principe directeur " de son action ; à vrai dire, l'exercice poursuivi au nom de ce principe relève en réalité plutôt de la notion " d'amélioration de la législation " telle qu'elle a été retenue par le Parlement français lors de la création récente d'un " office parlementaire " chargé de cette tâche.

Votre rapporteur se félicite au demeurant de l'effort entrepris dans ce sens par la Commission européenne : clarifier et simplifier la législation applicable répond assurément au voeu des citoyens de pouvoir se repérer plus facilement dans la masse des obligations qu'ils sont censés respecter. Mais cet effort ne saurait tenir lieu de mise en oeuvre du principe de subsidiarité.

Examinant le rapport de la Commission pour 1995 dans un " document de travail " de la commission juridique du Parlement européen, Mme Ana Palacio Vallelersundi écrit à cet égard : " Après avoir lu avec attention et à plusieurs reprises le rapport " Mieux légiférer ", votre rapporteur est incapable d'en tirer une conclusion sur " l'application du principe de subsidiarité " qui, il faut le rappeler même si la Commission ne le mentionne pas, constitue le mandat confié en l'occurrence, au moins formellement, à la Commission. " (Doc. PE 214.182 du 6 février 1996).

Il est vrai que la Commission se montre avare de précisions sur ce qui fait en principe l'objet de son rapport. Ainsi, le rapport pour 1995 résume comme suit son propos : " Ce dont l'Union a besoin, c'est d'une législation décidée au niveau adéquat, accessible, résistante à la fraude et qui fournit les solutions les moins coûteuses pour le citoyen, les entreprises et les administrations, tout en assurant des niveaux de protection élevée pour la santé et la sécurité, les consommateurs et l'environnement. " Qui ne souscrirait à de tels objectifs ? L'intérêt du rapport annuel de la Commission devrait plutôt être de préciser comment ces objectifs doivent se traduire dans les activités de la Communauté (5( * )) .

De même, votre rapporteur considère avec un certain scepticisme les affirmations de la Commission concernant la sélectivité de ses propositions. Cette dernière fait état d'une importante et régulière diminution du nombre de textes nouveaux :

Nombre de propositions de législation nouvelle adoptées par la Commission

au titre de ses programmes de travail annuels depuis 1990

* situation au 10.11.95

** prévision (COM(95)512)

Source rapport CSE(95)80, p.4

On observera tout d'abord qu'une telle approche quantitative n'assure que de manière très approximative le respect du principe de subsidiarité. A supposer que la Commission propose, à l'année n, quatre-vingt textes tous conformes à ce principe, et à l'année n + 1, vingt textes qui lui seraient tous contraires, y aurait-il progrès dans la mise en oeuvre de la subsidiarité, malgré la diminution du nombre de textes ?

Par ailleurs, il est difficile d'attribuer la diminution du nombre des initiatives législatives à la seule prise en compte du principe de subsidiarité : l'achèvement du vaste programme législatif jugé nécessaire à la réalisation du marché unique est un autre facteur explicatif non dénué d'importance.

Enfin, la " décrue législative " mise en avant par la Commission semble concerner seulement les propositions entièrement nouvelles : les nombreux textes pouvant être reliés à des initiatives antérieures en paraissent exclus. Ceci explique sans doute que, du point de vue du Parlement français, destinataire, en application de l'article 88-4 de la Constitution, des propositions de la Commission européenne ayant un caractère législatif selon les catégories du droit français, la " décrue " revendiquée soit difficile à percevoir : d'août 1992 (entrée en vigueur de l'article 88-4 de la Constitution) à août 1996, ce sont 683 propositions d'actes communautaires qui ont été à ce jour soumises aux Assemblées, sans qu'une baisse sensible s'observe au fil du temps : leur nombre a été de quarante en 1992 (5 mois), 143 en 1993, 171 en 1994, 207 en 1995, 122 en 1996 (8 mois).

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