C. LA BANALISATION DU LIVRET A : UN CHIFFON ROUGE À NE PAS AGITER

Le duopole de distribution du livret A partagé entre La Poste et les Caisses d'Epargne est, battu en brèche par les banques au motif qu'il entraînerait des distorsions de concurrence 218( * ) .

On renverra également le lecteur à l'avis rendu par le Conseil de la Concurrence le 17 septembre 1996 219( * ) , et qui portait notamment sur ce point. Rappelons simplement que, pour le Conseil, le duopole de distribution du livret A ne constitue pas un abus de position dominante, même s'il relève par ailleurs que son maintien n'apparaît pas indispensable à l'accomplissement des missions d'intérêt général, qu'il s'agisse du développement de l'épargne populaire ou du financement du logement social.

Il n'en reste pas moins que la banalisation de la collecte du livret A emporterait des conséquences qui ne sont pas sans inquiéter votre Commission et votre groupe d'études. Cela justifie, selon eux, de ne pas modifier l'économie du dispositif en vigueur.

La généralisation de la collecte du livret A à l'ensemble du système bancaire serait, d'une part, financièrement difficilement supportable pour La Poste et risquerait, d'autre part, de porter atteinte au financement du logement social. Enfin, n'assiste-t-on pas, d'ores et déjà, à une banalisation rampante du livret A ?

1. Des conséquences difficilement supportables pour La Poste

On a vu que la collecte sur le livret A contribuait de façon non négligeable aux recettes de La Poste, puisque sa rémunération à ce titre -bien qu'en diminution- a atteint 4,29 milliards de francs en 1996.

Sa banalisation risquerait d'entraîner un phénomène brutal de décollecte et donc de déstabilisation financière de l'opérateur public. En effet, certaines banques ne seraient-elles pas alors tentées d'" écrêmer " le marché pour ne conquérir que la clientèle la plus " rentable ", c'est-à-dire disposant d'encours importants et effectuant des opérations peu nombreuses ?

Dans un tel scénario, La Poste garderait essentiellement les livrets modestes, qui représentent un coût élevé en termes de gestion, coût qui deviendrait financièrement extrêmement difficile à assurer et fragiliserait, de plus, l'activité déjà réduite de nombre de petits bureaux de poste en zone rurale. Serait alors compromis l'équilibre déjà précaire de gestion du livret A et l'alternative ouverte à La Poste se résumerait alors à abandonner sa fonction de " banque des pauvres " ou solliciter des subventions massives des budgets publics.

Une telle situation ne risquerait-elle pas, en outre, de porter atteinte à la cohésion sociale, si se profilait la perspective d'une exclusion financière de couches entières de la population ?

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