CONCLUSION
En
présentant ce rapport d'étape, la mission a voulu contribuer
pleinement aux réflexions en cours sur les moyens de porter
remède à l'insécurité juridique qui frappe la
gestion locale et d'améliorer le statut de l'élu, en distinguant,
parmi les diverses pistes de solutions évoquées tant par ses
interlocuteurs qu'au cours des débats parlementaires récents,
celles qui lui paraissaient mériter d'être
privilégiées.
La mission d'information a fait quelques choix clairs. Elle a formulé
plusieurs propositions de nature à rénover le cadre juridique de
l'action publique locale, dans le respect des principes de la
décentralisation. Elle a écarté, en matière de
responsabilité pénale des élus, les solutions qui auraient
pour effet d'établir en leur faveur un régime dérogatoire
au droit commun. Elle a donné sa préférence à des
mesures, pour la plupart de portée générale, qui peuvent
assurer la conciliation nécessaire entre les exigences du mandat local
et la pénalisation accrue de la société. S'agissant des
droits et moyens attachés à l'exercice des mandats, les
réflexions de la mission d'information sont restées inscrites
dans le respect de la tradition du principe de gratuité et de refus de
la professionnalisation. Les aménagements qu'elle propose, même
s'ils peuvent paraître modestes, ont un coût, ce qui incline
à une certaine prudence.
Quelles suites la mission d'information peut-elle espérer voir
données à ses réflexions ?
Certaines -et non des moindres- devraient trouver une issue législative
prochaine. En effet, plusieurs des propositions privilégiées par
la mission sont déjà ou vont être soumises à
débat public au Parlement.
Ainsi, des amendements ont déjà été adoptés
par le Sénat, lors de la discussion du projet de loi tendant à
renforcer la présomption d'innocence et les droits des victimes,
notamment pour prévenir les mises en examen injustifiées et
élargir le recours à la procédure du témoin
assisté. De même, la discussion prochaine par le Sénat de
la proposition de loi n° 9 rectifié de notre collègue
Pierre Fauchon va être l'occasion de débattre des moyens de mieux
circonscrire le champ des délits involontaires, ainsi que de
l'éventuel élargissement de la responsabilité
pénale des collectivités locales. Le projet de loi sur le
référé administratif, également en discussion
devant les assemblées, pourrait permettre de favoriser le recours
à la voie civile en accélérant la procédure devant
les tribunaux administratifs. Il est souhaitable que le Sénat examine
dans des délais rapprochés la proposition de loi de nos
collègues Jean-Paul Amoudry et Jacques Oudin relative aux chambres
régionales des comptes qui, comme on l'a rappelé, prévoit
aussi des mesures de nature à mettre en place des moyens de conseil
juridique propres aux collectivités locales. S'agissant du statut de
l'élu, le projet de loi ordinaire relatif au cumul des mandats
revalorise les indemnités de fonction et étend le système
de garantie offert aux élus qui interrompent leur activité
professionnelle, mesures qui constituent des avancées non
négligeables.
Au-delà de ces initiatives législatives déjà
engagées -plusieurs d'entre elles grâce à l'impulsion du
Sénat-, des projets de loi tendant à clarifier les règles
en matière de marchés publics et d'interventions
économiques sont toujours attendus. On peut aussi espérer
l'accélération du processus de codification.
Il restera aux parlementaires, mais aussi au Gouvernement, à faire
preuve d'imagination pour traduire dans des textes ce qui doit l'être. Il
leur appartiendra de veiller à s'abstenir de multiplier les
incriminations pénales et d'alléger celles qui figurent dans les
lois et règlements en vigueur, après en avoir fait l'inventaire.
Le législateur ne peut cependant tout résoudre. Il faudra, en
matière de sécurité juridique, une volonté
politique ferme du Gouvernement pour faire évoluer les pratiques
administratives, en sorte de renforcer la qualité du contrôle de
légalité et mieux maîtriser les normes techniques. Les
collectivités locales devront pour leur part faire un effort pour
développer et mettre en commun leurs propres forces de conseil. Tout
cela exige détermination, méthode et, aussi, des moyens
financiers, afin de sortir l'élu local d'un sentiment de solitude trop
souvent ressenti.
Dans son rapport final, la mission d'information aura l'occasion de se pencher
de plus près sur des questions telles que le partage des
compétences entre l'Etat et les collectivités locales, la
solidité de l'outil contractuel, l'avenir du système de
financement local, ou encore les moyens en personnel des collectivités,
qui conditionnent, d'une manière ou d'une autre, l'adaptation des
collectivités locales à un environnement juridique
rénové.