PRÉSIDENCE DE M. CHRISTIAN PONCELET

M. le président. La séance est reprise.

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SOUHAITS DE BIENVENUE À

UNE DÉLÉGATION PARLEMENTAIRE DU MALI

M. le président. J'ai le plaisir et l'honneur de saluer la présence, dans notre tribune officielle, d'une délégation de parlementaires de l'Assemblée nationale du Mali, conduite par son président, M. Ibrahim Boubacar Kéita, invitée en France par le groupe interparlementaire du Sénat, présidé par notre ami Jacques Legendre.

Je formule des voeux pour que cette visite contribue à renforcer, s'il en était besoin, les liens d'amitié qui unissent nos deux pays et nos deux peuples. (Mmes et MM. les ministres, Mmes et MM. le sénateurs se lèvent et applaudissent.)

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QUESTIONS D'ACTUALITÉ

AU GOUVERNEMENT

M. le président. L'ordre du jour appelle les questions d'actualité au Gouvernement.

Je salue la présence au banc du Gouvernement de M. le Premier ministre qui nous fait l'honneur et le plaisir de participer à cette séance de questions d'actualité. Nous y sommes très sensibles.

Conformément à la règle posée à l'unanimité par la conférence des présidents, je rappelle que l'auteur de la question et le ministre qui lui répond disposent, chacun, de deux minutes trente. Je demande à chacun de faire un effort, d'être à la fois concis et précis.

Chaque intervenant aura à coeur, par courtoisie, de respecter le temps de parole qui lui est imparti, afin que toutes les questions et toutes les réponses puissent bénéficier de la retransmission télévisée.

PÉAGE SUR LES VOIES EXPRESS EN BRETAGNE

M. le président. La parole est à M. Gérard Le Cam.

M. Gérard Le Cam. Monsieur le ministre l'annonce du vote par le Sénat de l'article 14 du projet de loi relatif aux responsabilités locales, article qui permet désormais aux départements et aux communes d'instaurer un péage sur les voies express et les ouvrages d'art existants et à venir, a suscité un tollé général, en Bretagne tout particulièrement... (Exclamations sur les travées de l'UMP ?

Mme Hélène Luc. Pas seulement en Bretagne !

M. Gérard Le Cam. ... mais également dans tout l'Hexagone.

En effet, cette disposition impopulaire conduira les collectivités concernées à faire des choix contraints et forcés. Ce ne seront donc plus des choix ! Le volume et le coût des multiples transferts prévus dans ce projet de loi ne laisseront obligatoirement que les alternatives suivantes : faire flamber les impôts, instaurer des péages ou, à défaut, ne pas moderniser les infrastructures qui pourtant, en ont tant besoin. Mais peut-être s'agit-il de réduire artificiellement le montant et le niveau des prélèvements obligatoires locaux, comme le soulignait récemment mon ami Thierry Foucaud dans cet hémicycle ?

Des millions d'usagers, notamment de salariés, n'auront demain d'autres choix que celui de payer toujours plus pour aller travailler. Leur salaire, déjà trop modeste, en sera d'autant plus amputé. Alphonse Allais plagiait-il Joseph Caillaux quand il écrivait : « Il faut prendre l'argent là où il se trouve, c'est-à-dire chez les pauvres. Bon d'accord, ils n'ont pas beaucoup d'argent, mais il y a beaucoup de pauvres. » ?

Inspiré par cette maxime, le Gouvernement taxe « la France d'en bas ». Décidément, cela devient une habitude, après les déremboursements médicaux, la hausse des prix des carburants, du tabac, le jour férié travaillé non payé...

M. Jean-Pierre Raffarin, Premier ministre. ... La baisse du prix du gaz !

M. Gilles de Robien, ministre de l'équipement, des transports, du logement, du tourisme et de la mer. La hausse du SMIC !

M. Gérard Le Cam. Cette disposition législative aura d'autres effets pervers, monsieur le ministre. Outre le fait que les parlementaires ne sont même pas informés de la liste des voies à transférer, cette disposition provoquera un véritable effet d'asphyxie économique des départements situés à la périphérie de l'Hexagone, mais également de ceux de la région Centre.

La majorité sénatoriale disposait des moyens politiques pour rejeter cette disposition relative aux péages. M. de Rohan, qui préside le groupe UMP, lequel est majoritaire dans cet hémicycle a préféré céder aux injonctions du Gouvernement. C'est très regrettable !

M. Guy Fischer. C'est vrai !

M. Gérard Le Cam. Mais je lui fais confiance pour expliquer demain aux Bretons pourquoi il dit non en Bretagne et oui à Paris. (Applaudissements sur les travées du groupe CRC et du groupe socialiste.)

Ma question est simple : monsieur le ministre, avez-vous, oui ou non, l'intention, au cours de la navette parlementaire, de retirer la disposition concernant les péages contenue dans l'article 14 du projet de loi relatif aux responsabilités locales, péages qui constitueront un nouvel impôt local à géométrie variable, et de donner à la France les moyens en infrastructures nécessaires ? (Très bien ! et applaudissements sur les travées du groupe CRC et du groupe socialiste.)

M. le président. La parole est à M. le ministre.

M. Gilles de Robien, ministre de l'équipement, des transports, du logement, du tourisme et de la mer. Monsieur le sénateur, vous avez évoqué l'idée d'une redevance sur les poids lourds. Cette idée est à replacer dans le contexte du financement général des infrastructures de transport.

Vous le savez, monsieur le sénateur, nous avons eu sur ce sujet, au printemps, un beau débat, tant à l'Assemblée nationale qu'au Sénat.

M. Gérard Larcher. Absolument !

M. Gilles de Robien, ministre. Encore hier, sur l'initiative de M. Oudin, nous avons débattu dans cet hémicycle de l'avenir des infrastructures de transport dans notre pays. Je rappelle également que nous avons fait réaliser un audit par le conseil général des ponts et chaussées et l'inspection générale des finances, qui a fait apparaître que les promesses faites par le gouvernement précédent - des promesses tous azimuts ! - n'avaient pas été financées à hauteur de 15 milliards d'euros. (Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'Union centriste, ainsi que sur certaines travées du RDSE. - Protestations sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.)

Monsieur Le Cam, parmi les pistes évoquées dans les pays européens pour financer le développement du secteur du transport figure l'idée d'une redevance sur les poids lourds.

M. Daniel Raoul. Et alors ?

M. Gilles de Robien, ministre. Ce système fait actuellement l'objet d'une analyse dans tous les pays européens, qui suivent attentivement l'expérience en cours en Allemagne. Comme les autres, nous nous intéressons de près à ce système.

Mme Hélène Luc. Ce n'est pas le problème !

M. Gilles de Robien, ministre. Il faut en tout cas éviter d'en tirer des conclusions prématurées. Les difficultés qu'il pose actuellement - même si elles ne sont sans doute que temporaires - nous confortent dans notre prudence.

M. Bussereau et moi-même avons toujours posé deux conditions fortes à la mise en place d'une éventuelle redevance : d'abord, il faut préserver la compétitivité et de nos territoires et de nos entreprises. Ensuite, si redevance il devait y avoir un jour, son produit devrait être intégralement affecté au développement de nos infrastructures de transport.

Enfin, monsieur Le Cam, vous savez que M. de Rohan, que vous avez cité, s'est beaucoup mobilisé sur le sujet. Naturellement, je vous confirme la réponse que le Premier ministre lui a faite ici même. (Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'Union centriste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)

MESURES D'ACCOMPAGNEMENT EN FAVEUR

DES BURALISTES

M. le président. La parole est à M. Jean-Louis Lorrain.

M. Jean-Louis Lorrain. Monsieur le secrétaire d'Etat, le tabagisme est le premier facteur de mortalité et la première cause de cancer dans notre pays. La guerre contre ce fléau est donc une nécessité de santé publique.

L'augmentation des prix du tabac est aujourd'hui une solution efficace pour diminuer la consommation, comme le montrent les exemples étrangers. Pour autant, elle a ses limites.

Je soutiens totalement la politique que le Gouvernement a engagée dans ce sens. Avec cette politique courageuse, il prend le risque de l'impopularité au nom de l'efficacité et de l'intérêt national. Cela mérite d'être salué. Néanmoins, nous devons tenir compte de la situation des buralistes. (Exclamations amusées sur les travées du groupe socialiste.)

La sécurisation des bureaux de tabac doit être prise en compte. La lutte contre la contrebande des cigarettes, qui n'est pas nouvelle, doit être renforcée.

Les buralistes jouent un rôle important dans la vitalisation de nos villages et de nos quartiers. Ils forment un réseau de proximité que nous devons absolument préserver. C'est un enjeu national dont on aurait tort de sous-estimer l'importance.

Nous devons absolument réagir face à l'augmentation des achats de cigarettes à l'étranger, qui touche de plein fouet les buralistes des départements frontaliers et menace l'existence même de leur activité. C'est particulièrement le cas en Alsace, notamment dans le Haut-Rhin.

Je sais que le Gouvernement a parfaitement conscience des difficultés des buralistes, mais pourriez-vous, monsieur le secrétaire d'Etat, faire le point sur les mesures d'accompagnement prises en leur faveur, notamment dans les régions frontalières, même si la réponse n'est pas immédiate ?

Les buralistes sont aujourd'hui très inquiets pour leur avenir. Ils doivent pouvoir vivre décemment de leur activité, qui peut se diversifier dans le cadre du service public. Le groupe UMP soutiendra toutes les mesures dont vous pourriez nous faire part. (Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'Union centriste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)

M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'Etat.

M. Jean-François Copé, secrétaire d'Etat aux relations avec le Parlement. Monsieur Lorrain, vous l'avez rappelé, la lutte contre le cancer est l'une des priorités majeures de l'action gouvernementale en matière de santé publique. Or, chacun sait que le tabac est l'une des premières causes de mortalité par cancer.

C'est la raison pour laquelle le Gouvernement a engagé une politique de prévention tout en augmentant la fiscalité sur les tabacs et, par conséquent, les prix. Néanmoins - les choses doivent être parfaitement claires - il n'est naturellement pas question que les 33 000 buralistes français soient les victimes de ces décisions.

M. le Premier ministre, après avoir réuni hier les ministres concernés, a rencontré ce matin même le président de la fédération des buralistes et, à cette occasion, lui a proposé d'ouvrir des discussions afin d'élaborer un contrat d'avenir pour cette profession.

M. Raymond Courrière. Il faut mettre en place une commission !

M. Jean-François Copé, secrétaire d'Etat. L'idée est de travailler selon trois grandes orientations.

Il convient tout d'abord d'assurer la sécurité des buralistes et de lutter contre la contrebande. A cette fin, un certain nombre de mesures seront présentées par M. le ministre de l'intérieur.

Ensuite, un travail approfondi devra être mené sur la viabilité de ces entreprises, sur leur développement économique et sur l'évolution du métier de buraliste.

Enfin, une réflexion sera conduite et une initiative sera prise à l'échelon européen concernant, en particulier, l'évolution de la fiscalité dans ce secteur.

Dès demain, M. le Premier ministre recevra les représentants de cette profession et engagera des discussions en vue de conclure ce contrat d'avenir. Cette profession étant associée aux missions de service public, l'Etat sera particulièrement attentif à ce contrat. (Applaudissements sur les travéees de l'UMP et de l'Union centriste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)

M. Michel Dreyfus-Schmidt. Il fallait commencer par là !

TVA DANS LE SECTEUR DU BÂTIMENT

M. le président. La parole est à M. Fernand Demilly.

M. Fernand Demilly. Monsieur le président, monsieur le Premier ministre, mesdames, messieurs les ministres, mes chers collègues, ma question s'adresse à M. Francis Mer, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie, et concerne l'application de la directive sur le taux réduit de TVA dans le secteur de la construction.

La sixième directive européenne de 1999 avait autorisé les Etats membres de l'Union européenne à appliquer un taux réduit de TVA aux services à forte intensité de main-d'oeuvre.

M. Michel Dreyfus-Schmidt. C'était le gouvernement Jospin !

M. Fernand Demilly. Cette mesure, applicable jusqu'à la fin de 2002, a été prorogée jusqu'au 31 décembre 2003.

Le gouvernement français a exprimé à plusieurs reprises sa satisfaction face à ce dispositif qui favorise la création d'emplois et la diminution du travail au noir.

M. Jean-Pierre Sueur. Merci, Lionel Jospin !

M. Fernand Demilly. Il a en effet permis la création de 50 000 emplois et entraîné une hausse du chiffre d'affaires de 1,5 milliard d'euros par mois dans le secteur du bâtiment.

Pour pérenniser ce dispositif, une décision communautaire doit être prise, mais les négociations et les interrogations, qui retardent l'accord final, inquiètent les artisans du bâtiment et ont des conséquences néfastes sur les commandes de la clientèle, qui diffère ou renonce à ses projets de travaux.

Il est évident qu'un éventuel retour en arrière au 1er janvier 2004 concernant le taux de TVA risquerait de provoquer la dégradation de la conjoncture dans le secteur du bâtiment.

Il est donc nécessaire que le Gouvernement réaffirme sa volonté de maintenir ce taux de TVA à 5,5 %.

Pouvez-vous, monsieur le ministre, rassurer les artisans, première entreprise de France, qui soutiennent activement l'économie de notre pays ? (Applaudissements sur les travées du RDSE, ainsi que sur celles de l'Union centriste et de l'UMP.)

M. le président. La parole est à M. le ministre.

M. Francis Mer, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie. Monsieur Demilly, je suis effectivement en mesure de rassurer la profession, car il est possible que dès le 25 novembre 2003, donc très bientôt, lors du prochain conseil ECOFIN, nous puissions obtenir un accord de consolidation, définitif ou non, mais peu importe, sur le taux réduit de la TVA applicable aux travaux dans les logements.

Je vous confirme que la Commission européenne elle-même a émis un jugement favorable sur l'élasticité prix-quantité de cette mesure, qui présente les mérites que vous venez d'évoquer.

Cela s'inscrit dans le cadre d'une réflexion plus générale sur nombre de sujets. C'est d'ailleurs peut-être ce qui a compliqué la tâche du conseil. En effet, la Commission a souhaité, à cette occasion, « toiletter » d'autres textes concernant les TVA à taux réduit ou à taux très faible.

Quoiqu'il en soit, soyez assuré que nous ferons le maximum pour être aussi convaincants que nécessaire, dans ce domaine comme dans les autres. Il est très probable que d'ici à la fin de l'année, le problème sera réglé !

Je suis sensible à ce que vous venez de dire sur les hésitations d'un certain nombre de clients à l'approche de la fin de l'année. Notre objectif commun est donc de les rassurer afin que cette profession, qui travaille bien dans une conjoncture favorable, puisse continuer à développer ses talents ! (Très bien ! et applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'Union centriste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)

SITUATION DANS LE CAUCASE ET

ÉLECTIONS EN AZERBAÏDJAN

M. le président. La parole est à M. Daniel Goulet.

M. Daniel Goulet. Je suis parfaitement conscient, monsieur le président, mes chers collègues, de l'importance des problèmes franco-français qui nourrissent l'actualité et qui, de ce fait, suscitent prioritairement l'intérêt.

Pour autant, je pense que nous devons aussi porter notre regard sur l'actualité au-delà de nos frontières. Je viens d'effectuer deux missions pour le compte du Conseil de l'Europe, au titre de rapporteur de la commission ad hoc d'observation des élections présidentielles en Azerbaïdjan.

Entouré de puissants voisins - la Russie au nord, l'Iran au sud -, l'Azerbaïdjan suscite de nombreuses convoitises, y compris celle des Etats-Unis, tant en raison de sa situation géostratégique que de ses très importantes ressources en gaz et en pétrole.

Par ailleurs, la stabilité de toute la région peut être remise en cause à tout instant, tant que ne sera pas réglée la question du Haut-Karabakh.

Or le président élu, M. Hahm Aliev, est un européen convaincu, et la France a un rôle déterminant à jouer pour soutenir sa volonté d'ancrage européen. Chacun sait que les six premiers mois d'un nouveau mandat sont les plus déterminants.

Monsieur le ministre des affaires étrangères, la France a-t-elle l'intention, dans le cadre d'accords bilatéraux, de proposer à l'Azerbaïdjan des coopérations techniques, notamment en matière d'infrastructures ou de formation par exemple, besoins que j'ai nettement ressentis chez mes interlocuteurs, qui attendent beaucoup de notre pays ?

La France a-t-elle l'intention de reprendre l'initiative au sein du groupe de Minsk afin de résoudre le problème du Haut-Karabakh et de permettre ainsi à tous les Etats du Caucase de se développer de manière durable et stable ? L'Azerbaïdjan est en effet appelée à jouer un rôle majeur dans cette région, et ce n'est pas le président Poncelet qui me démentira ! (Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'Union centriste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)

M. le président. La parole est à M. le ministre.

M. Dominique de Villepin, ministre des affaires étrangères. Monsieur le sénateur, nous avons été attentifs au déroulement des élections présidentielles en Azerbaïdjan. Grâce à vous, grâce au Conseil de l'Europe, notre pays a été impliqué dans l'observation de ces élections. Le Président de la République a été l'un des premiers à féliciter le président Aliev qu'il avait reçu au printemps dernier à Paris. Il l'a d'ailleurs invité à se rendre en visite officielle en France dès que possible.

La France est aux côtés de l'Azerbaïdjan pour l'appuyer dans ses efforts de développement économique, et nous sommes décidés à renforcer notre coopération bilatérale, déjà active avec ce pays.

Nos entreprises du secteur pétrolier et parapétrolier sont présentes dans les domaines de l'exploitation et du transit des hydrocarbures. Nous mettons en place des programmes de formation pour les cadres du pays, notamment dans le domaine administratif, et je tiens à saluer ici le concours que le Sénat apporte à cette coopération.

La France est décidée à accorder son appui au nouveau président afin que celui-ci puisse relever les nombreux défis qui se présentent à lui : celui, bien sûr, des réformes démocratiques, à travers, notamment, la nécessaire ouverture d'un dialogue avec l'opposition, celui de la paix, qui conditionne le développement de la région. La France qui, vous l'avez rappelé, copréside le groupe de Minsk avec les Etats-Unis et la Russie, réaffirme qu'elle est disponible pour contribuer à une solution pacifique au conflit du Haut-Karabakh. (Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'Union centriste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)

M. le président. Monsieur le ministre, je vous remercie de l'hommage que vous rendez au Sénat pour ses interventions dans ce domaine géographique de l'Europe.

conférence intergouvernementale

et élargissement de l'union européenne

M. le président. La parole est à M. Claude Estier.

M. Claude Estier. Ma question s'adresse également à M. le ministre des affaires étrangères, mais elle porte sur un tout autre sujet.

Monsieur le ministre, vous êtes venu hier devant la commission des affaires étrangères et la délégation pour l'Union européenne. Nous avons apprécié les indications que vous nous avez données sur les travaux de la conférence intergouvernementale, qui restent très obscurs pour l'opinion publique. Nous sentons bien que les choses ne sont pas faciles, et vous-même avez déclaré, il y a quelques jours, que mieux vaudrait un échec que l'affadissement des positions élaborées par la Convention.

Cette situation mériterait pour le moins un ample débat au sein du Parlement, débat que nous réclamons d'ailleurs depuis plusieurs mois et qui serait conforme à la volonté exprimée par la Convention d'accroître le rôle des parlements nationaux.

Vous avez souhaité avec raison qu'un débat européen puisse avoir lieu avant la ratification de la future constitution. Mais ce ne serait qu'un débat sur les résultats de la conférence intergouvernementale, auxquels le Parlement et, à travers lui, les citoyens n'auraient nullement été associés, ce qui risque d'accroître encore leur désintérêt, pour ne pas dire plus, à l'égard de la construction européenne.

Je dirai la même chose au sujet de l'élargissement, dont on doit d'ailleurs déplorer qu'il ait lieu avant que l'on soit vraiment fixé sur ce que seront les futures institutions européennes, ce qui est une façon de mettre la charrue devant les boeufs.

Le commissaire européen Günter Verheugen, que nous avons entendu hier juste après vous, nous rappelait que cet élargissement sans précédent par le nombre des nouveaux adhérents est un événement de portée historique dans la mesure où il consacre l'unification de l'Europe. Je dis tout de suite que nous y sommes tout à fait favorables. Mais, avant qu'il devienne officiel le 1er mai 2004, cet élargissement de quinze à vingt-cinq, en attendant de passer un peu plus tard à vingt-sept et peut-être davantage, pose un certain nombre de problèmes dont certains sont lourds de conséquences et dont il serait normal de débattre sérieusement.

Or on veut contraindre le Parlement à une sorte de ratification en catimini. Ici, au Sénat, seulement deux heures de débat sont prévues, le 10 décembre, dans le cadre de l'examen d'une série de conventions internationales. Cela est sans rapport avec l'enjeu de l'événement, et, je le répète, cette frilosité n'est pas de nature à mobiliser les Français en faveur de cette grande idée qu'est l'Europe et à laquelle est lié l'avenir de la France.

J'insiste donc, monsieur le ministre, pour qu'un vrai débat européen ait lieu au Parlement dans les meilleurs délais. (Très bien ! et applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.)

M. le président. La parole est à M. le ministre.

M. Dominique de Villepin, ministre des affaires étrangères. Monsieur le sénateur, vous avez raison, l'Europe mérite un grand débat, et il n'est pas question, pour les Français, de rester frileux quand il s'agit de l'Europe.

La réforme des institutions et l'élargissement sont des échéances capitales. Ces rendez-vous appellent à un rassemblement de tous les Français, en particulier de tous les responsables politiques, car il s'agit de définir ensemble l'Union européenne dans laquelle nous voulons vivre.

Dans cet esprit, la Convention, sous la conduite du président Giscard d'Estaing, a élaboré un projet de Constitution. Les parlements nationaux ont été associés à ses travaux, ce qui constitue une grande innovation par rapport à la pratique antérieure. Deux des éminents représentants de votre assemblée, MM. Hubert Haenel et Robert Badinter, ont été particulièrement actifs dans ces débats.

La volonté du Gouvernement d'associer étroitement le Parlement à ce processus constitutionnel ne s'arrête pas là. Le Président de la République vient de consulter tout les dirigeants des formations politiques représentées au Parlement. Le Premier ministre, je vous le confirme, monsieur le sénateur, vous recevra le 26 novembre avec les présidents des groupes politiques des assemblées.

Pour ma part, j'ai toujours été à la disposition de la représentation nationale, tout comme Noëlle Lenoir, pour vous informer de manière régulière sur l'évolution des travaux de la conférence intergouvernementale. Hier après-midi, vous l'avez rappelé, j'ai répondu aux questions des membres de la commission des affaires étrangères et de la délégation pour l'Union européenne.

Quant à l'élargissement, le projet de loi autorisant la ratification du traité d'adhésion sera soumis le 25 novembre à l'Assemblée nationale et le 10 décembre au Sénat, selon des modalités qui ont été fixées par la conférence des présidents, à laquelle vous participez vous-même, monsieur Estier.

Je vous indique que le Premier ministre ouvrira la discussion personnellement. Conformément à vos voeux, ce sera l'occasion d'un véritable débat où chacun pourra exprimer ses convictions sur l'Europe.

Sachez par ailleurs que tous les membres du Gouvernement seront toujours disponibles pour poursuivre le dialogue à propos de l'Europe, qui demeure, vous le savez, le grand défi de notre continent. (Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'Union centriste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)

CONDUCTEURS SANS PERMIS DE CONDUIRE

M. le président. La parole est à M. Dominique Braye.

M. Dominique Braye. Monsieur le président, mesdames, messieurs les ministres, mes chers collègues, ma question s'adresse à M. le ministre de l'équipement, des transports, du logement, du tourisme et de la mer.

Monsieur le ministre, les dramatiques accidents survenus ces derniers jours dans le Morbihan, avec le décès d'un gendarme de vingt-cinq ans, et dans le Val-d'Oise, avec la mort d'un adolescent de treize ans, ont de nouveau mis en lumière un grave problème de sécurité routière : nombreux semblent être les chauffards circulant sans permis de conduire, menaçant ainsi la vie d'autrui par leur inaptitude à la conduite et par leur totale inconscience, et d'autant plus nuisibles qu'ils ne sont évidemment pas assurés !

Certaines estimations sont très alarmantes : ils seraient ainsi 2,5 millions de conducteurs à rouler en toute illégalité, soit 7,5 % des conducteurs selon vos services, monsieur le ministre, et peut-être 10 % selon d'autres sources.

Monsieur le ministre, vous que nous pouvons féliciter d'avoir fait de la lutte contre la violence routière une action phare de votre ministère en menant une politique déterminée qui commence à porter ses fruits, comment expliquez-vous une telle situation ?

Pouvez-vous préciser si les chiffres avancés correspondent à la réalité ?

Qui sont ces automobilistes qui n'ont jamais passé leur permis ou qui continuent de conduire bien que leur permis leur ait été retiré ?

Peut-on améliorer le fonctionnement du fichier national des permis de conduire ?

Comment entendez-vous, monsieur le ministre, lutter contre cette forme intolérable de violence et de délinquance routière qui semble, hélas ! en plein essor ? (Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'Union centriste ainsi que sur certaines travées du RDSE.)

M. le président. La parole est à M. le ministre.

M. Gilles de Robien, ministre de l'équipement, des transports, du logement, du tourisme et de la mer. Monsieur Braye, vous me permettrez évidemment d'exprimer d'abord, au nom du Gouvernement, toute ma compassion pour les familles qui ont été touchées par les terribles accidents de Sannois et de Quéven.

Il y aurait - je mets le verbe au conditionnel - 2,5 millions de conducteurs qui prendraient le volant sans permis de conduire, ce qui représenterait 7,5 % de l'ensemble des conducteurs. Nous disposons pour notre part des statistiques de l'Observatoire interministériel de la sécurité routière. Je peux donc vous donner des chiffres précis. En 2002, très exactement 3 542 conducteurs impliqués dans un accident corporel n'avaient pas ou n'avaient plus de permis de conduire, soit 3,4 % des conducteurs impliqués dans un accident corporel.

Cela démontre qu'il ne peut pas y avoir 7,5 % de conducteurs sans permis sur les routes, sauf à admettre que ceux qui n'ont pas de permis conduisent plutôt mieux que ceux qui ont un permis. Je n'ose pas imaginer cela ! (Sourires.)

Mon collègue Dominique Perben pourra vous confirmer par ailleurs que, pour ce qui est des sanctions hors accidents, 29 843 personnes ont été condamnées en 2002 pour absence ou pour non-validité de permis. Elles étaient passibles d'une contravention de la cinquième classe et de 1 500 euros d'amende.

En outre, 8 593 personnes ont été sanctionnées pour conduite malgré l'annulation ou la suspension de leur permis de conduire. Elles encouraient, elles, jusqu'à deux ans de prison, une amende de 3 770 euros et la confiscation du véhicule.

Je crois cependant que nous devons nous montrer plus sévères envers ceux qui se placent délibérément en situation de conduire sans permis, ne serait-ce que pour l'excellente raison que vous avez évoquée, monsieur le sénateur : il n'y a pas d'assurance sans permis de conduire. On croit souvent que les victimes seront indemnisées par le fonds de garantie, mais c'est à tort, car le fonds se retournera contre les responsables d'accident qui conduisaient sans permis ; ils seront obligés de le rembourser, ce qui peut créer des situations dramatiques.

Pourquoi, dès lors, ne pas ériger le défaut de permis de conduire en délit dès la première condamnation, laquelle pourrait être assortie, le cas échéant, d'une confiscation du véhicule ? C'est cette piste qu'en concertation avec le garde des sceaux nous allons étudier. (Très bien ! et applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'Union centriste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)

M. le président. Merci, monsieur le ministre ; nous vous encourageons dans cette voie.

FISCALITÉ ÉNERGÉTIQUE ET BIOCARBURANTS

M. le président. La parole est à M. Yves Détraigne.

M. Yves Détraigne. Monsieur le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie, le débat national sur les énergies qui s'est déroulé au printemps dernier a clairement mis en évidence l'intérêt qu'il y a à engager notre pays dans une politique énergétique durable répondant notamment à des impératifs de diversification de l'offre, de respect de l'environnement et d'indépendance, par le développement des énergies renouvelables au détriment des énergies fossiles.

Il y a huit jours, en présentant en conseil des ministres son plan de lutte contre la pollution de l'air, Mme la ministre de l'écologie et du développement durable a insisté sur la nécessité d'abaisser fortement les émissions polluantes des véhicules.

L'accroissement de la production des biocarburants est précisément un des moyens incontournables, pour notre pays, de répondre à ces impératifs.

Outre son intérêt évident pour le maintien d'une agriculture forte et pour l'occupation de notre espace rural, le développement des biocarburants constitue, en effet, aujourd'hui et pour plusieurs décennies encore, le principal moyen pour le secteur des transports routiers de réduire ses émissions de gaz à effet de serre et, pour notre pays, de respecter les engagements qu'il a pris au travers du protocole de Kyoto.

Par l'importance des investissements et des emplois qu'elle représente, la production de biocarburants est aussi le moyen de développer une nouvelle filière industrielle au moment même où la France est confrontée à un véritable mouvement de désindustrialisation. C'est également un moyen de conforter l'avenir de notre industrie automobile, et on sait quel rôle important elle joue dans notre pays.

Alors qu'une directive européenne du 8 mai 2003 fixe aux Etats européens l'objectif d'incorporer 5,75 % de biocarburants dans leurs essences d'ici à 2010 et que des pays voisins, comme l'Espagne et l'Allemagne, mettent en place des politiques très volontaristes dans ce domaine, la France va-t-elle, monsieur le ministre, devoir se résigner à exporter sa matière première agricole pour la faire transformer à l'étranger et la réimporter en biocarburants ? Le Gouvernement a-t-il, au contraire, la volonté de favoriser le développement de cette filière, notamment par la mise en place d'une fiscalité adaptée à cette énergie renouvelable et beaucoup moins polluante que les énergies fossiles ? (Applaudissements sur les travées de l'Union centriste et de l'UMP, ainsi que sur certaines travées de RDSE.)

M. le président. La parole est à M. le ministre.

M. Francis Mer, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie. Monsieur le sénateur, il est clair que le développement des biocarburants fait partie de la stratégie de la France, et d'ailleurs de l'Europe, visant à la fois à garantir l'indépendance énergétique de notre pays et à lutter contre le CO2.

Il est non moins clair que nous ne sommes qu'au début d'une longue marche technologique pour rendre cette filière aussi compétitive que possible par rapport à d'autres filières qui ont aussi leurs mérites appliquées au domaine des transports terrestres.

Nous consacrons actuellement 175 millions d'euros de dépenses fiscales au développement des biocarburants, cette filière ne représentant que 1 % de notre consommation de fioul et de gasoil, soit 500 000 tonnes, alors que, comme vous l'avez rappelé, monsieur le sénateur, nous devons atteindre 5 % en 2010.

L'écart entre ces pourcentages montre qu'il est nécessaire d'accélérer le développement de la filière.

Sur le plan commercial, nous envisageons d'introduire une obligation de consommer, pour partie, des biocarburants, mais ce qui entrave le développement de la filière elle-même, malgré ses mérites, est principalement la non-compétitivité relative des biocarburants par rapport aux autres sources énergétiques.

La tonne de CO2 « économisée » grâce aux biocarburants coûte actuellement près de 180 euros ; c'est beaucoup par rapport aux prix du « marché gris » qui est en train de se développer en Europe et où le permis d'émettre du CO2 s'échange à environ 40 ou 50 euros.

Un effort technologique doit donc être entrepris sur toute la filière des biocarburants, y compris sur la partie distribution.

Il suffit de chercher pour trouver, et, monsieur le sénateur, nous devrions donc rattraper assez rapidement notre retard, ce qui est en effet indispensable, car il nous serait tout à fait désagréable d'être contraints d'exporter des matières premières pour réimporter des produits finis afin de tenir nos engagements européens.

Mais, rassurez-vous, monsieur le sénateur, nous arriverons, je le pense, à développer une technologie compétitive qui ait des mérites à la fois sur le plan agricole, sur celui de la sécurité des approvisionnements et, bien sûr, sur celui de l'environnement. (Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'Union centriste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)

SÉCURITÉ MARITIME

M. le président. La parole est à M. Jacques Oudin.

M. Jacques Oudin. Ma question s'adresse à M. le secrétaire d'Etat aux transports et à la mer.

Nous ne pouvons oublier le triste anniversaire du naufrage du Prestige, il y a un an, sur les côtes atlantiques. Cette catastrophe faisait suite à celle de l'Erika et à tant d'autres que nous avons tous en mémoire.

Je vous interrogeais déjà à ce sujet le 16 juin dernier, en soulignant la réaction rapide et efficace du Gouvernement.

En effet, loin d'atermoyer à l'instar de vos prédécesseurs, monsieur le secrétaire d'Etat, vous avez, en toute justesse, choisi de traiter la question dans sa globalité et le plus en amont possible.

Les populations du littoral sont traumatisées et excédées par des catastrophes et des pollutions à répétition. Elles attendent des pouvoirs publics et du Gouvernement une action ferme et volontariste.

Le Président de la République a montré le chemin à suivre par son appel très clair à lutter contre ceux qu'il appelle « les voyous des mers ».

Le bilan de votre action, que vous avez présenté hier en conseil des ministres, fait plus que nous donner satisfaction : il atteint l'excellence. En un an, les choses ont beaucoup avancé, ce qui prouve votre détermination.

Il faut cependant, monsieur le secrétaire d'Etat, doter la France de moyens de surveillance, de contrôle et de sanction à la hauteur des enjeux et, après ce satisfecit, deux interrogations demeurent.

Premièrement, alors que nous avons décidé la mise en place du registre international français, le RIF, l'encadrement des pavillons de complaisance est un impératif que la communauté internationale se doit de traiter rapidement. Où en sont les négociations, en la matière ?

Deuxièmement, l'indemnisation sur le terrain prend du retard et se révèle très insuffisante. Très concrètement, de quels moyens financiers disposez-vous, monsieur le secrétaire d'Etat, pour indemniser les victimes, qu'il s'agisse des professionnels ou des collectivités, de cette catastrophe ? Je souhaite que votre réponse puisse tout particulièrement m'éclairer sur le sort qui sera réservé au département de la Vendée, qui m'est cher, ainsi qu'aux communes et aux communautés de communes du littoral vendéen.

M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'Etat.

M. Dominique Bussereau, secrétaire d'Etat aux transports et à la mer. Comme vous venez de le souligner, monsieur Oudin, la sécurité maritime est une priorité essentielle pour le Gouvernement. A cet égard, un an après le naufrage du Prestige, d'importants progrès ont été réalisés, comme cela a été rappelé hier en présence du Président de la République. La France contrôle maintenant les navires à risque à hauteur de 31 %, contre 9 % en mai 2002, et ce alors même que l'Europe lui demande de le faire à hauteur de 25 %. Nous éliminons les pétroliers à simple coque et nous renforçons les sanctions en cas de pollution.

A l'échelon européen, nous avons transposé les directives communautaires, mis en place l'Agence européenne de sécurité maritime, pour l'accueil de laquelle la ville de Nantes reste candidate, et défini une méthodologie concernant les zones refuges.

Cela étant, se pose, à l'échelle mondiale, le problème des pavillons de complaisance. Si nous voulons peser sur l'Organisation maritime internationale, encore faut-il que des bateaux soient immatriculés en nombre sous pavillon français. Or l'excellent rapport de votre collègue Henri de Richemont a montré que notre flotte se réduisait à 211 navires. Une proposition de loi sera prochainement soumise en premier lieu au Sénat en vue de créer le registre international français, qui nous permettra d'augmenter le nombre de bateaux sous pavillon français et d'attirer à nouveau des navires qui avaient quitté celui-ci.

Naturellement, cela ne nous empêche pas d'agir à l'échelon de l'Organisation maritime internationale. Nous mettons en place des moyens pour mieux contrôler les navires immatriculés sous pavillon de complaisance, ainsi que les fameuses sociétés de classification, et pour éliminer les bateaux dangereux et les armateurs malhonnêtes, que M. le Président de la République a qualifiés, à juste titre, de « voyous des mers ».

En ce qui concerne l'indemnisation, monsieur Oudin, elle est confiée au FIPOL, le Fonds international d'indemnisation pour les dommages dus à la pollution par les hydrocarbures. S'agissant de la catastrophe résultant du naufrage du Prestige, le montant initialement prévu était de 171 millions d'euros, somme absolument ridicule au regard de l'ampleur des dommages, estimés à environ 1 milliard d'euros, dont 200 millions d'euros pour notre seul pays.

Nous nous sommes donc battus sur le plan international et nous avons pu obtenir que le plafond d'intervention du FIPOL soit relevé à 920 millions d'euros, ce qui permettra des indemnisations plus correctes, même si elles ne sont pas toujours à la hauteur des attentes de nos concitoyens du littoral.

Dans le cas particulier de votre département, la Vendée, je ne dispose pas encore des chiffres exacts, mais il bénéficiera au minimum de 3 millions d'euros, et s'il se révèle nécessaire de faire plus, nous agirons en conséquence.

Quoi qu'il en soit, monsieur Oudin, je vous remercie d'avoir rendu hommage aux efforts déployés par le Gouvernement pour lutter contre les « voyous des mers ». C'est là un objectif national, autour duquel nous devons tous nous rassembler. (Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'Union centriste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)

PLAN « DÉPENDANCE » ET PÉRÉQUATION FINANCIÈRE

ENTRE DÉPARTEMENTS POUR

LES PERSONNES ÂGÉES DÉPENDANTES

M. le président. La parole est à M. Michel Moreigne.

M. Michel Moreigne. Trois mois après la canicule, M. le Premier ministre a présenté, jeudi dernier, une réforme du dispositif de solidarité en faveur des personnes âgées et des handicapés, avec l'ambition d'apporter une pierre à notre système de protection sociale.

De la journée de travail offerte aux employeurs aux incantations compassionnelles et à la copie bâclée, en passant par l'absence de concertation et l'agression caractérisée contre les 35 heures, les critiques ont fusé. L'épiscopat s'insurge ainsi contre la suppression du lundi férié de Pentecôte. (Vives exclamations ironiques sur les travées de l'UMP.)

Un sénateur de l'UMP. C'est faux !

M. Gérard Larcher. Monseigneur Moreigne !

M. Michel Moreigne. Avec les professionnels de la prise en charge de la dépendance, je ne peux que déplorer le manque d'ambition de cette réforme et l'insuffisance du financement prévu, qui ne représenterait que le montant estimé de la baisse de l'impôt sur le revenu pour 2004.

M. Raymond Courrière. Très bien !

M. Michel Moreigne. Alors que le Gouvernement prône la simplification des règles administratives et l'autonomie financière des collectivités locales, il est envisagé de créer une nouvelle branche de la sécurité sociale, ne devant pas gérer elle-même, semble-t-il, le risque dépendance. Les départements alimenteraient cette caisse nationale de solidarité pour l'autonomie avant qu'une redistribution n'intervienne, dont on ne connaît pour l'heure ni la teneur ni les modalités, puisqu'une projection est en cours d'élaboration.

C'est là une source d'inquiétude pour les départements, en premier lieu pour le plus défavorisé d'entre eux, que je représente ici et dont la population compte le pourcentage de personnes âgées le plus élevé.

Je suis de ceux - ils sont nombreux ici - qui ont insisté pour que soit instaurée, en 2003, la dotation spécifique de solidarité dans le cadre du fonds de financement de l'APA. Malgré cette dotation, le rapport de la charge nette de l'allocation personnalisée d'autonomie sur le potentiel fiscal varie de 3 % pour les départements les plus riches à 34,3 % pour la Creuse.

M. Jean-Pierre Schosteck. Mais quelle est donc la question ?

M. Michel Moreigne. Qu'en sera-t-il en 2004 ? Comment les conseils généraux pourront-ils, sans disposer de davantage d'informations, préparer et voter leur budget avant la fin de l'année 2003 ? Que prévoyez-vous pour améliorer la péréquation, afin que s'estompe le risque d'explosion de la fiscalité locale départementale en 2004 ?

Bref, le Gouvernement tiendra-t-il compte des appréciations négatives portées sur ses propositions initiales et reverra-t-il sa copie en conséquence ? (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)

M. Raymond Courrière. Très bien !

M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'Etat. Ecoutons-le religieusement, mes chers collègues ! (Rires.)

M. Hubert Falco, secrétaire d'Etat aux personnes âgées. Monsieur le sénateur, M. le Premier ministre a effectivement présenté une grande réforme sociale. (Exclamations amusées sur les travées du groupe socialiste.) Elle permettra de financer l'APA dans les années à venir, ce que, je le rappelle, le précédent gouvernement, que vous souteniez, n'avait pas prévu ! (Marques d'approbation sur les travées de l'UMP.)

M. Raymond Courrière. Arrêtez !

M. Paul Raoult. Il suffisait d'augmenter la CSG !

M. Hubert Falco, secrétaire d'Etat. Dans ce cadre, nous allons bien sûr renforcer la solidarité au profit des départements les plus en difficulté. Cette réforme permettra d'améliorer les conditions de vie des personnes âgées, à domicile ou en établissement. L'accent sera mis sur le maintien au domicile.

M. Paul Raoult. On ne votera pas votre budget !

M. Hubert Falco, secrétaire d'Etat. S'agissant des seules personnes âgées, les crédits prévus atteignent 4,2 milliards d'euros,...

M. Raymond Courrière. Et alors ?

M. Hubert Falco, secrétaire d'Etat. ... soit plus de 28 milliards de francs. Le groupe socialiste, tant à l'Assemblée nationale qu'au Sénat, a réclamé pendant des mois l'inscription de 180 millions d'euros de crédits, qui n'avaient jamais été budgétés ! (Très bien ! et applaudissements sur les travées de l'UMP. - Protestations sur les travées du groupe socialiste.) Pour la seule année 2004, nous allons, pour notre part, inscrire 480 millions d'euros !

M. Paul Raoult. De combien aviez-vous réduit les crédits auparavant ? Soyez sérieux !

M. Hubert Falco, secrétaire d'Etat. Ce montant, réellement budgété, est à comparer, je le répète, aux illusoires 180 millions d'euros que j'évoquais et que la gauche n'avait jamais inscrits au budget ! (Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'Union centriste.)

Mesdames, messieurs les sénateurs de l'opposition, garantir la qualité de vie des personnes âgées, leur permettre de vivre dans la dignité, telle est notre ambition.

M. Bernard Piras. Ce n'est pas sérieux !

M. Paul Raoult. Vous aviez fait des économies sur le dos des personnes âgées auparavant !

M. Hubert Falco, secrétaire d'Etat. La différence entre vous et nous, c'est que nous agissons tandis que, pour votre part, vous n'avez fait que susciter des illusions ! (Vifs applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'Union centriste. - Protestations sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.)

M. Jacques Valade. C'est vrai ! Ce sont des marchands d'illusion !

M. Raymond Courrière. Repartez au Canada !

M. Paul Raoult. C'est scandaleux !

VOTE ÉLECTRONIQUE

DES FRANÇAIS DE L'ÉTRANGER

M. le président. La parole est à M. Christian Cointat.

M. Christian Cointat. Monsieur le président, mesdames, messieurs les ministres, mes chers collègues, la date de clôture des listes électorales approche à grands pas. Or, pour les scrutins où notre pays est considéré comme une circonscription unique - et pour ces seuls scrutins - la loi permet aux Français de l'étranger de voter dans les consulats. Si ces électeurs sont également inscrits dans une commune en France, la liste électorale de la commune mentionne expressément, afin d'éviter tout risque de double suffrage, que leur droit de vote est suspendu pour ces élections, puisqu'ils exercent ce droit ailleurs. Jusqu'à présent, trois types de consultations étaient concernées par ces dispositions : les élections présidentielles, les référendums et les élections européennes.

La création de huit circonscriptions électorales pour les élections européennes, afin de rapprocher les élus de leurs électeurs et de donner ainsi davantage de poids à la représentation française au Parlement européen, a changé ce dispositif. Elle ne permet plus aux Français de l'étranger, faute de circonscription unique, de voter pour les candidats français dans les consulats de France. Ils devront donc, comme pour les élections législatives par exemple, voter dans leur commune en France.

Cela suppose, tout d'abord, que la suspension locale de droit de vote qui les frappe quand ils sont inscrits dans une commune soit expressément levée, puisqu'ils ne pourront plus faire leur devoir civique dans les consulats.

Cela signifie, ensuite, que tous les électeurs inscrits dans le centre de vote d'un consulat devront être officiellement informés de ces nouvelles dispositions, afin de pouvoir s'y conformer.

Cela implique, en outre, que les électeurs non inscrits dans une commune en France soient invités à s'y inscrire au plus vite, puisque la clôture des listes électorales est fixée au 31 décembre. Il y a donc urgence.

Cela souligne, enfin, que les efforts entrepris par le Gouvernement pour répondre à un voeu, formé de longue date par nos compatriotes expatriés, de voir faciliter, élargir et simplifier leur inscription sur les listes électorales en France, sont particulièrement opportuns et bienvenus. Je vous en remercie, monsieur le ministre.

Mes questions seront donc les suivantes.

Premièrement, quelles mesures entendez-vous prendre, monsieur le ministre, pour que les communes de France soient effectivement, et en temps utile, appelées à lever la suspension de droit de vote pour les élections européennes qui frappe les Français de l'étranger inscrits sur leur liste électorale ? En effet, de nombreux témoignages récents, sur ce sujet, sont alarmants, bien des compatriotes concernés s'étant heurtés à une fin de non-recevoir de la part de municipalités mal informées.

Deuxièmement, comment comptez-vous informer nos compatriotes inscrits sur les listes de vote des consulats des changements intervenus dans leurs droits pour les élections européennes et inviter ceux d'entre eux qui ne sont pas inscrits en France à le faire dans les délais prescrits, sachant qu'il ne leur reste plus beaucoup de temps ?

Troisièmement, estimez-vous possible de rendre opérationnelles avant la clôture du 31 décembre les nouvelles dispositions en cours de préparation, qui donneront lieu à la prise d'une ordonnance visant à faciliter l'inscription des Français de l'étranger sur les listes électorales en France ? Ces mesures constituent une avancée importante, qui honore le Gouvernement. (Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'Union centriste.)

M. le président. La parole est à M. le ministre délégué.

M. Patrick Devedjian, ministre délégué aux libertés locales. Monsieur Cointat, je voudrais d'abord vous rassurer : les Français de l'étranger ne font actuellement l'objet d'aucune suspension de droit de vote. La mention qui figure effectivement sur les listes électorales des communes, s'agissant des électeurs inscrits sur une liste d'un centre de vote consulaire, ne fait pas et ne fera pas obstacle à l'exercice du droit de vote. Une circulaire du ministre de l'intérieur, M. Nicolas Sarkozy, est d'ailleurs en cours de diffusion, qui permettra de mettre les choses au point à cet égard.

Cela étant précisé, je vous remercie, monsieur le sénateur, de vos propos aimables à l'égard du Gouvernement. Le projet d'ordonnance que vous avez évoqué est actuellement examiné par le Conseil d'Etat. Ce texte vise à permettre à un Français de l'étranger de s'inscrire sur la liste électorale d'une commune dès lors que lui-même ou un de ses parents jusqu'au troisième degré y aura été inscrit, ce qui ouvrira un choix en matière d'ancrage territorial.

Dès que le Conseil d'Etat aura rendu son avis, le Gouvernement pourra prendre l'ordonnance. Cela ne devrait pas être très long, mais on ne bouscule pas le Conseil d'Etat !

Par ailleurs, dans le même temps, M. Dominique de Villepin, ministre des affaires étrangères, fera parvenir à nos représentations à l'étranger une circulaire tendant à informer les Français de l'étranger.

Enfin, le Gouvernement a également inscrit, dans son projet d'ordonnance, des dispositions visant à faciliter le vote par procuration. A l'avenir, une simple déclaration sur l'honneur suffira. (Très bien ! applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'Union centriste.)

M. le président. Mes chers collègues, nous en avons terminé avec les questions d'actualité au Gouvernement.