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SOUHAIT DE BIENVENUE AU PRÉSIDENT

DE LA COMMISSION EUROPÉENNE

DE LA CHAMBRE DES LORDS

M. le président. J'ai le plaisir et l'honneur de saluer la présence, dans notre tribune officielle, de lord Grenfell, président de la commission européenne de la Chambre des lords du Royaume-Uni de Grande-Bretagne et d'Irlande du Nord, que notre délégation pour l'Union européenne a eu le plaisir d'auditionner ce matin.

Je forme des voeux pour que cette visite contribue à renforcer les liens d'amitié qui unissent nos deux pays, au-delà de nos deux institutions. (Mmes et MM. les membres du Gouvernement, Mmes et MM. les sénateurs se lèvent et applaudissent.)

M. Claude Estier. Je demande la parole.

M. le président. La parole est à M. Claude Estier.

M. Claude Estier. Monsieur le président, je demande une suspension de séance d'un quart d'heure, afin de pouvoir réunir mon groupe avant la reprise du débat sur le projet de loi relatif aux responsabilités locales.

M. le président. Le Sénat va bien sûr accéder à votre demande, monsieur Estier.

Nous reprendrons la séance à seize heures quinze, pour la suite de l'examen du projet de loi relatif aux responsabilités locales.

La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à quinze heures cinquante-cinq, est reprise à seize heures vingt.)

M. le président. La séance est reprise.

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RESPONSABILITÉS LOCALES

Suite de la discussion d'un projet de loi

M. le président. Nous reprenons la discussion du projet de loi relatif aux responsabilités locales.

Dans la discussion des articles, nous en sommes parvenus à l'article 55.

Art. 54 (interruption de la discussion)
Dossier législatif : projet de loi relatif aux libertés et responsabilités locales
Art. 56

Article 55

L'article L. 1424-1 du code de la santé publique est ainsi rédigé :

« Art. L. 1424-1. - Dans le cadre des compétences qui lui sont reconnues par l'article L. 4221-1 du code général des collectivités territoriales, le conseil régional peut définir des objectifs particuliers à la région en matière de santé. Il élabore et met en oeuvre les actions régionales correspondantes. Il en tient informé le représentant de l'Etat dans la région. »

M. le président. La parole à Mme Marie-Christine Blandin, sur l'article.

Mme Marie-Christine Blandin. L'article 55 précise que « le conseil régional peut définir des objectifs particuliers à la région en matière de santé ».

Venant d'une région où l'espérance de vie est de deux ans inférieure à la moyenne nationale et où sévissent des pathologies spécifiques, je ne peux qu'être sensible à cette proposition. Encore faut-il des outils.

La connaissance de l'état de santé de la population est devenue un passage obligé dans l'élaboration et l'évaluation des politiques de santé, et l'observation en représente une dimension essentielle. Qu'il s'agisse de choisir des priorités de santé, d'assurer la veille, de planifier des équipements et des ressources, ou encore de mettre en oeuvre des actions de prévention et d'éducation pour la santé, il est indispensable de disposer d'informations sur les besoins des populations.

Et s'il est un domaine où l'approche régionale donne sens à la stratégie et au contenu, c'est bien la santé.

Unions de médecins libéraux, conférences et programmes de santé, agences de l'hospitalisation, unions des caisses d'assurance maladie, etc., on ne compte plus les instances infranationales pour qui la région peut être interface entre problématiques locales et choix nationaux.

Qui plus est, les liens étroits entre la santé d'une population et son environnement ne sont plus à démontrer.

Ce qui est en jeu, c'est la connaissance de l'évolution des problèmes de santé, la planification des équipements sanitaires et sociaux, l'allocation des ressources dans le domaine de la santé, la mise en oeuvre et l'évaluation des actions de prévention, notamment le dépistage, la démographie professionnelle et la formation.

Cette diversité des demandes s'accompagne d'un besoin de comparaisons et de synthèses nationales afin de vérifier l'équité entre régions.

De surcroît, toute action locale de prévention pour la santé doit pouvoir faire l'objet d'une évaluation, même simple, mais qui permette d'en mesurer non seulement le processus ou les effets, mais aussi la reproductibilité dans le temps ou l'espace.

Ce souci est assez récent. Le premier rapport de l'INSERM, l'Institut national de la santé et de la recherche médicale, date des années soixante-dix. Le VIe Plan fait apparaître la démarche épidémiologique consistant à mettre en regard les données sanitaires - mortalité, morbidité - et les facteurs qui déterminent l'état de santé - environnement, consommation et structures sanitaires existantes.

Au cours des années quatre-vingt, les ministères chargés des affaires sociales et de la santé ont renforcé leur dispositif statistique. Puis, des références systématiques aux indicateurs mis au point par l'Organisation mondiale de la santé ont été introduites. Des structures plus ou moins formelles sont apparues, notamment les ORS, les observatoires régionaux de la santé, qui font l'objet de certains de nos amendements à venir.

Parallèlement, on a assisté à une volonté de décliner les priorités à l'échelon des régions. Cela s'est trouvé conforté en 1996. Par la voie législative ont ainsi été créées des structures et des institutions à l'échelon régional, notamment des conférences régionales de santé, ces dernières ayant la mission de déterminer les priorités. Ces rencontres publiques ont fait une large place à la connaissance de l'état de santé de la population. Elles ont sollicité les ORS pour qu'ils présentent la situation sanitaire de la région, soit de façon globale, soit de façon thématique ou « populationnelle ». Les programmes régionaux de santé ont vu le jour et se sont développés.

Le budget et la production des ORS ont augmenté de près de deux tiers entre 1996 et 2002, montrant le besoin de plus en plus fort d'une observation indépendante en région et, parallèlement, à l'échelon national.

De plus, malgré une décentralisation qui n'a pas donné de compétence en santé aux conseils régionaux, ceux-ci ont apporté leur contribution à l'observation de la santé et aux ORS dans près de la moitié des régions, dans le cadre des contrats de plan 2000-2006.

Les besoins étant de plus en plus importants dans l'élaboration des choix de la politique de santé, une consolidation législative serait maintenant souhaitable afin de renforcer l'homogénéité des outils pour les décideurs locaux et nationaux, et donc particulièrement pour les conseils régionaux.

Mais si je viens d'une région où la santé se porte mal, je viens aussi d'une région pauvre et insuffisamment équipée.

La santé ne se brade pas au hasard de quelques articles.

Bien entendu, vous auriez trouvé dans les amendements du groupe socialiste matière à une vraie et juste décentralisation : adéquation, cadre national, cohérence, justice territoriale, écoute des besoins, volontés et savoir-faire locaux, mais déconcentration des moyens, péréquation et déconcentration des outils nationaux de veille.

Le sort que vous avez réservé, dans les précédents articles, à ces garanties obère, pour l'instant, toute perspective de soutien à votre texte.

M. le président. Je suis saisi de sept amendements qui peuvent faire l'objet d'une discussion commune.

Les trois premiers sont identiques.

L'amendement n° 146 est présenté par M. Schosteck, au nom de la commission des lois.

L'amendement n° 444 est présenté par Mme Bocandé, au nom de la commission des affaires sociales.

L'amendement n° 746 est présenté par M. Fischer, Mme Demessine, M. Muzeau et les membres du groupe communiste républicain et citoyen.

Ces trois amendements sont ainsi libellés :

« Supprimer cet article. »

L'amendement n° 1016, présenté par MM. Godefroy, Peyronnet, Frimat, Sueur, Cazeau, Chabroux, Domeizel, Krattinger, Lagauche, Dauge, Marc, Reiner, Mano, Bel, Mauroy, Courteau et Todeschini, Mme Blandin et les membres du groupe socialiste et apparenté, est ainsi libellé :

« Dans la première phrase du texte proposé par cet article pour l'article L. 1424-1 du code de la santé publique, après les mots : "le conseil régional peut définir" insérer les mots : "en cohérence avec la politique nationale de santé publique,". »

L'amendement n° 1017, présenté par M. Godefroy, Mme Blandin, MM. Peyronnet, Frimat, Sueur, Cazeau, Chabroux, Domeizel, Krattinger, Lagauche, Dauge, Marc, Reiner, Mano, Bel, Mauroy, Courteau, Todeschini et les membres du groupe socialiste et apparenté, est ainsi libellé :

« Après la première phrase du texte proposé par cet article pour l'article L. 1424-1 du code de la santé publique, insérer une phrase ainsi rédigée :

« Il s'appuie sur les données fournies par les observatoires régionaux de la santé. »

L'amendement n° 1018, présenté par MM. Godefroy, Peyronnet, Frimat, Sueur, Cazeau, Chabroux, Domeizel, Krattinger, Lagauche, Dauge, Marc, Reiner, Mano, Bel, Mauroy, Courteau et Todeschini, Mme Blandin et les membres du groupe socialiste et apparenté, est ainsi libellé :

« Remplacer la dernière phrase du texte proposé par cet article pour l'article L. 1424-1 du code de la santé publique par la phrase suivante :

« Il transmet au représentant de l'Etat dans la région le programme régional d'actions. »

L'amendement n° 1019, présenté par Mme Blandin, MM. Godefroy, Peyronnet, Frimat, Sueur, Cazeau, Chabroux, Domeizel, Krattinger, Lagauche, Dauge, Marc, Reiner, Mano, Bel, Mauroy, Courteau, Todeschini et les membres du groupe socialiste et apparenté, est ainsi libellé :

« Compléter le texte proposé par cet article pour l'article L. 1424-1 du code de la santé publique, par un alinéa ainsi rédigé :

« L'Etat déconcentre des outils opérationnels de veille sanitaire, qui avec les observatoires régionaux de la santé et les réseaux de médecins généralistes aident les régions qui le souhaitent à engager des actions de prévention dans le cadre de la politique de santé publique de l'Etat. »

La parole est à Mme Annick Bocandé, rapporteur pour avis, pour défendre les amendements n°s 146 et 444.

Mme Annick Bocandé, rapporteur pour avis de la commission des affaires sociales. L'article 55 vise à étendre les compétences attribuées aux régions, en leur confiant la possibilité de mener des actions complémentaires en matière de santé.

Cette mesure nous a semblé tout à fait pertinente dans son esprit et dans sa forme. Cependant, la commission des lois et la commission des affaires sociales ont choisi de déposer chacune un amendement de suppression. En effet, les dispositions de l'article 55 sont redondantes avec celles de l'article 2 du projet de loi relatif à la santé publique que nous examinerons au début de l'année 2004.

Dans ces conditions, la commission des lois et la commission des affaires sociales ont jugé préférable d'étudier ces mesures dans un contexte plus général de déclinaison à l'échelon régional des plans nationaux de santé publique, qui nous permettra de mieux appréhender la portée des dispositions visées.

Aussi, mes chers collègues, nous proposons de supprimer cet article.

M. le président. La parole est à M. Guy Fischer, pour présenter l'amendement n° 746.

M. Guy Fischer. Les dispositions de l'article 55 illustrent assez bien les paradoxes du texte sur les responsabilités locales.

Plus globalement, elles révèlent la grande difficulté du Gouvernement à mettre en cohérence entre eux des projets de loi multiples dans le domaine de la santé et de l'assurance maladie. Nous avons relevé une dizaine de projets de loi dans lesquels la santé et l'assurance maladie sont concernées.

Plus personne ne semble être en mesure de maîtriser l'ensemble du sujet, même pas l'assurance maladie pourtant concernée directement.

Le fait que le conseil d'administration de la CNAM, la Caisse nationale de l'assurance maladie, n'ait même pas été saisi du présent projet de loi témoigne au mieux de la précipitation dans laquelle le Gouvernement agit, au pire du mépris du Gouvernement pour cet organisme et du peu d'attention qu'il accorde à la concertation en général.

Le président de la CNAM a d'ailleurs tenu à rappeler cet état de fait à l'occasion de son audition par la commission des affaires sociales.

A titre liminaire, il a également insisté sur les conséquences de cet éparpillement du Gouvernement. Il résulte, selon lui, « de ces petites touches opérées sans vision d'ensemble, des équilibres de pouvoirs modifiés, des organisations déstabilisées, sans que soit garantie la reconstruction d'un système plus stable et plus performant ».

Je voudrais simplement que le Gouvernement m'explique comment il entend articuler la faculté qui est donnée aux régions de définir les objectifs qui leur seront propres en matière de santé et de mettre en oeuvre des actions régionales correspondantes avec les priorités de la politique nationale de santé arrêtées par l'Etat. Comment garantir la cohérence et la coordination des actions si chaque région définit et met en oeuvre librement des objectifs particuliers de santé ?

Alors que M. Mattei n'a eu de cesse de rappeler, défendant son texte relatif à la santé publique, que la politique de santé publique devrait être clairement assumée par l'Etat, dans le même temps, le présent article, aux termes duquel « le conseil régional tient informé le représentant de l'Etat dans la région », laisse à ces collectivités une autonomie certaine pour déterminer et exécuter des actions propres.

Manifestement, tout cela n'est ni clair ni précis. C'est la première raison pour laquelle nous demandons la suppression de l'article.

Une seconde raison, invoquée également par le rapporteur pour avis de la commission des affaires sociales et par le rapporteur de la commission des lois, milite en faveur de la suppression. Nous pensons que les dispositions incriminées ont plus leur place dans le projet de loi relatif à la politique de santé, que nous examinerons dans la première quinzaine de janvier.

M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Godefroy, pour présenter les amendements n°s 1016, 1017 et 1018.

M. Jean-Pierre Godefroy. Alors que l'espérance de vie y est l'une des plus élevées au monde, la France est aussi le pays d'Europe occidentale où les inégalités devant la mort sont les plus importantes.

Il y a d'abord les inégalités socio-économiques : à trente-cinq ans, les cadres et professions libérales ont une espérance de vie de six ans et demi supérieure à celle des ouvriers.

A cela s'ajoutent des inégalités géographiques tout aussi marquées : la mortalité n'est pas la même dans toutes les régions, les différences de conditions et de qualité de vie justifient ces écarts.

La diversité des situations sanitaires et la persistance d'inégalités géographiques fortes, tant du point de vue de l'état de santé que de l'offre et de la consommation de soins, est aujourd'hui une réalité reconnue par tous.

Cette différenciation justifie une « territorialisation » des politiques pour les adapter aux contextes locaux. Cette tendance a déjà été amorcée à l'échelon régional avec notamment les conférences régionales de santé qui sont chargées d'établir les priorités de santé publique de la région et de faire des propositions pour améliorer l'état de santé de la population avec les moyens sanitaires, médico-sociaux et sociaux. Mais on leur reproche souvent leur caractère non opérationnel.

L'article 55 permet donc à la région de concevoir et de mettre en oeuvre ses propres programmes et actions de santé, en tenant compte de ses spécificités locales. Il convient toutefois de noter que l'article L. 4221-1 du code général des collectivités territoriales donne déjà compétence à la région pour promouvoir son développement sanitaire et mener des actions de santé sur son territoire.

L'article 55 de ce projet de loi, s'il ne change pas vraiment la donne par rapport aux possibilités actuellement offertes à la région, a pour mérite d'afficher désormais clairement la compétence de la région et de lui permettre de concevoir des programmes plus cohérents.

Cela étant, les politiques régionales de santé qui seront élaborées devront s'articuler avec la politique nationale de santé publique et ses priorités. Cet article ne doit pas faire oublier que, d'abord et avant tout, c'est l'Etat qui définit et met en oeuvre la politique de santé publique.

Je redis qu'il est dommage que nous n'ayons pas pu examiner plus tôt le projet de loi de programmation de santé publique qui revient sur le rôle de l'Etat et sur la procédure d'élaboration des priorités de santé publique.

Cet amendement a donc pour objet de préciser le cadre dans lequel la région définit et met en oeuvre ses objectifs particuliers de santé. Il est en effet vivement souhaitable que la région puisse veiller à la prise en compte de spécificités régionales dans la mise en oeuvre de priorités ou dans l'expression de problèmes particuliers de santé publique. Mais ce travail régional doit rester cohérent avec la politique nationale de santé publique, ce que ne garantit pas en l'état l'article 55 du texte.

L'amendement n° 1017 a déjà été excellement défendu par Mme Blandin.

Quant à l'amendement n° 1018, il vise à renforcer l'information donnée au représentant de l'Etat dans la région.

Si chacun s'accorde sur la pertinence du niveau régional pour la définition et l'application d'une politique de santé, il est nécessaire de s'entendre sur le terme de régionalisation qui, selon nous, ne peut être qu'une décentralisation. Car la santé publique doit rester en France - qui n'est pas un pays fédéral - une compétence de l'Etat.

Les priorités de santé publique doivent être définies au niveau national par l'Etat, en sa qualité de responsable de la politique de santé publique, mais il est évident que ces priorités doivent s'adapter à chaque région en fonction de ses spécificités.

Si je prends le cas de ma région, le problème de l'amiante ou celui d'éventuelles maladies à venir liées à une forte implantation d'installations de production d'énergie nucléaire devra être pris en compte, par exemple par un registre des cancers. Oui, cela peut être un travail complémentaire de la région, qui est d'ailleurs déjà fait actuellement.

Il peut être opportun de fixer, à l'échelon régional, une priorité de santé publique plus importante que les autres pour faire diminuer la mortalité prématurée, soit par des actions sur les facteurs de risques individuels - environnement, contexte socio-économique, comportements - soit par des actions sur l'offre de soins : augmentation de crédits, répartition plus adaptée de l'offre.

Mais le représentant de l'Etat dans la région, qui est chargé d'y décliner les programmes nationaux de santé, doit pouvoir s'assurer de la cohérence avec la politique nationale des actions mises en oeuvre par le conseil régional.

C'est pourquoi nous proposons que, plus qu'une simple information, lui soit transmis le programme détaillé des actions de la région. En conséquence, je vous demande d'adopter cet amendement.

M. le président. La parole est à Mme Marie-Christine Blandin, pour présenter l'amendement n° 1019.

Mme Marie-Christine Blandin. J'ai déjà défendu cet amendement lorsque j'ai pris la parole sur l'article 55 : la pertinence de l'observation de l'état sanitaire est directement associée à la déconcentration des outils de veille.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Jean-Pierre Schosteck, rapporteur. La commission est bien sûr favorable aux amendements n°s 444 et 746, qui sont identiques à son amendement n° 146. Tous les autres amendements, si les amendements de suppression sont adoptés, n'auront plus d'objet.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. Patrick Devedjian, ministre délégué. Comme la commission, le Gouvernement est favorable aux trois amendements identiques de suppression de l'article, ceux qui ont été déposés par les deux commissions pour certaines raisons et par M. Fischer, pour d'autres raisons.

Le 2 octobre dernier, l'Assemblée nationale a en effet voté une disposition tout à fait similaire à celle que nous examinons aujourd'hui : la lettre est différente, mais le sens est très exactement le même.

Par conséquent, par souci de cohérence, le Gouvernement souhaite supprimer de ce projet de loi cette disposition qui figure déjà dans un autre texte. Cela répond d'ailleurs à la demande qui a été faite : ce sera traité dans la loi relative à la politique de santé publique.

Naturellement, les autres amendements, auxquels le Gouvernement est défavorable, n'auront plus d'objet.

M. le président. La parole est à Mme Marie-Christine Blandin, pour explication de vote sur les amendements identiques n°s 146, 444 et 746.

Mme Marie-Christine Blandin. Depuis deux semaines, monsieur le ministre, vous refusez un à un les amendements de l'opposition, qu'ils soient de suppression ou d'enrichissement... (Protestations sur les travées de l'UMP et de l'Union centriste.)

M. Patrick Devedjian, ministre délégué. Pas du tout !

Mme Marie-Christine Blandin. ... par l'ajout de garanties, en particulier sur les moyens.

Notre collègue M. Sueur vous a demandé des explications répétées sur la péréquation ; vos réponses ne nous ont pas satisfaits.

Sur cet article 55, les demandes de suppression sont multiples, mais elles sont d'inspirations politiques très différentes.

Je voudrais vous rappeler quelques-unes de vos réponses. Vous nous avez souvent dit : ces dispositions trouveront toute leur place dans la prochaine loi...

M. Patrick Devedjian, ministre délégué. Oui.

Mme Marie-Christine Blandin. ... sur l'eau pour les amendements défendus par M. Miquel, dans la prochaine loi sur la sécurité civile pour les amendements soutenus par M. Peyronnet, dans la loi sur le handicap pour les amendements de nos camarades. Vous nous dites que ces dispositions devraient figurer aujourd'hui dans la loi sur la santé publique. Vous avez raison : ces thèmes peuvent trouver leur place dans de véritables lois thématiques. Je propose d'ailleurs que nous ne parlions de décentralisation que lorsque nous serons d'accord sur les buts de ces politiques publiques.

M. Jean-Pierre Schosteck, rapporteur. Ça, c'est autre chose !

Mme Marie-Christine Blandin. Finalement, le renvoi à ces lois est peut-être pertinent. En revanche, ce qui ne l'est pas du tout, c'est cette loi sur la décentralisation avant que nous en connaissions et les orientations politiques et les moyens, à moins que les responsabilités locales ne soient le cheval de Troie de la libéralisation, de la privatisation.

M. Jean Chérioux. Eh bien, voyons !

M. le président. La parole est à M. Guy Fischer, pour explication de vote.

M. Guy Fischer. M. le ministre a admis les amendements de suppression, pour des raisons différentes des miennes cependant.

S'agissant du volet santé de ce projet de loi, nous nous interrogeons véritablement, d'autant plus que, comme vous venez de le reconnaître, monsieur le ministre, le contenu de cet article, à quelques mots près, se trouve dans le projet de loi relatif à la politique de santé publique adopté le 14 octobre par l'Assemblée nationale.

A propos de la protection sociale, il nous faut prendre en considération l'émiettement des textes qui nous sont soumis : au début de la semaine prochaine, nous examinerons le projet de loi de financement de la sécurité sociale ; le projet de loi relatif à la politique de santé publique a été adopté dès la rentrée parlementaire par l'Assemblée nationale.

Il y a également eu le plan Hôpital 2007 et le projet de loi autorisant le Gouvernement à procéder par ordonnances à l'adaptation de la partie législative d'un certain nombre de codes.

Le projet de loi sur la ruralité présenté par M. Gaymard comporte lui aussi des volets relatifs à la santé. Il en est de même de certains articles du projet de loi de finances pour 2004.

Par ces amendements de suppression, nous souhaitons attirer l'attention du Gouvernement et de la majorité qui le soutient sur l'émiettement du traitement de cette question.

M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques n°s 146, 444 et 746.

(Les amendements sont adoptés.)

M. le président. En conséquence, l'article 55 est supprimé et les amendements n°s 1016, 1017, 1018 et 1019 n'ont plus d'objet.

(M. Adrien Gouteyron remplace M. Christian Poncelet au fauteuil de la présidence.)

PRÉSIDENCE DE M. ADRIEN GOUTEYRON

vice-président

Art. 55
Dossier législatif : projet de loi relatif aux libertés et responsabilités locales
Art. 57

Article 56

Le code de la santé publique est modifié comme suit :

I. - Les articles L. 1423-1 et L. 1423-2 sont remplacés par les dispositions suivantes :

« Art. L. 1423-1. - Le département est responsable de la protection sanitaire de la famille et de l'enfance dans les conditions prévues au livre premier de la partie II.

« Art. L. 1423-2. - Le département peut, dans le cadre de conventions conclues avec l'État, participer à la mise en oeuvre des programmes de santé définis en application du titre premier du livre quatrième de la première partie, notamment des programmes de dépistage des cancers. »

II. - L'article L. 1423-3 est abrogé.

III. - Au premier alinéa de l'article L. 2112-1, les mots : « le 1° de » sont supprimés.

IV. - Dans la première phrase du premier alinéa de l'article L. 2311-5, les mots : « le dépistage et le traitement de maladies transmises par la voie sexuelle » sont remplacés par les mots : « le dépistage et le traitement ambulatoire des infections sexuellement transmissibles dont l'infection par le virus de l'immunodéficience humaine. »

Dans la deuxième phrase du même alinéa le mot « maladies » est remplacé par le mot « infections ».

V. - L'article L. 3111-11 est ainsi rédigé :

« Art. L. 3111-11. - Les collectivités territoriales peuvent exercer des activités en matière de vaccination, dans le cadre d'une convention signée avec l'État. Cette convention précise les objectifs poursuivis, les catégories de bénéficiaires, les moyens mis en oeuvre, les données dont la transmission à l'État est obligatoire, les modalités d'évaluation des actions entreprises ainsi que, le cas échéant, les relations avec les autres organismes intervenant dans le même domaine. »

VI. - Après l'article L. 3111-11, il est ajouté un article L. 3111-12 ainsi rédigé :

« Art. L. 3111-12. - La détermination des conditions de mise en oeuvre du présent chapitre est définie en tant que de besoin par voie réglementaire.

« La gratuité des vaccinations est assurée lorsque les actes sont réalisés par un établissement ou organisme habilité en application des dispositions du premier alinéa ou des conventions mentionnées à l'article L. 3111-11. »

VII. - L'intitulé du chapitre II du titre Ier du livre Ier de la troisième partie est ainsi rédigé : « Chapitre II : Lutte contre la tuberculose et la lèpre ».

VIII. - L'article L. 3112-2 est ainsi rédigé :

« Art. L. 3112-2. - La lutte contre la tuberculose et la lèpre relève de l'État.

« Les collectivités territoriales peuvent exercer des activités en ces domaines dans le cadre d'une convention signée avec l'État. Cette convention précise les objectifs poursuivis, les catégories de bénéficiaires, les moyens mis en oeuvre, les données dont la transmission à l'État est obligatoire, les modalités d'évaluation des actions entreprises ainsi que, le cas échéant, les relations avec les autres organismes intervenant dans le même domaine. »

IX. - L'article L. 3112-3 est ainsi rédigé :

« Art. L. 3112-3. - Les conditions de mise en oeuvre du présent chapitre sont, en tant que de besoin, définies par voie réglementaire.

« La gratuité de la vaccination, du suivi médical et de la délivrance des médicaments est assurée lorsque ces actes sont réalisés par un établissement ou organisme habilité en application des dispositions prévues à l'alinéa précédent ou des conventions mentionnées aux articles L. 3111-11 et L. 3112-2. Les dépenses afférentes au suivi médical et à la délivrance des médicaments sont prises en charge, pour les assurés sociaux, par les organismes d'assurance maladie dont ils relèvent et pour les bénéficiaires de l'aide médicale, dans les conditions fixées par l'article L. 111-2 et le chapitre 1er du titre Ier du livre Ier du code de l'action sociale et des familles et le cas échéant, selon les modalités prévues à l'article L. 182-1 du code de la sécurité sociale. »

X. - Les articles L. 3112-4 et L. 3112-5 sont abrogés.

XI. - L'intitulé du titre II du livre Ier de la troisième partie est ainsi modifié : « Titre II : Infection par le virus de l'immunodéficience humaine et infections sexuellement transmissibles ».

XII. - L'article L. 3121-1 est ainsi rédigé :

« Art. L. 3121-1. - La lutte contre le virus de l'immunodéficience humaine et contre les infections sexuellement transmissibles relève de l'État.

« Les collectivités territoriales peuvent exercer des activités en ces domaines dans le cadre d'une convention signée avec l'État.

« Cette convention précise les objectifs poursuivis, les catégories de bénéficiaires, les moyens mis en oeuvre, les données dont la transmission à l'État est obligatoire, les modalités d'évaluation des actions entreprises ainsi que, le cas échéant, les relations avec les autres organismes intervenant dans le même domaine. »

XIII. - Après l'article L. 3121-2, il est ajouté un article L. 3121-3 ainsi rédigé :

« Art. L. 3121-3. - Un arrêté du ministre chargé de la santé définit les conditions de mise en oeuvre de l'activité des établissements ou organismes destinés à assurer la prévention, le dépistage, le diagnostic et le traitement ambulatoire des infections sexuellement transmissibles.

« La gratuité et l'anonymat sont assurés lorsque ces activités sont réalisées par une structure habilitée en application de l'arrêté précité. »

M. le président. Je suis saisi de huit amendements qui peuvent faire l'objet d'une discussion commune.

L'amendement n° 747, présenté par M. Fischer, Mme Demessine, M. Muzeau et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :

« Supprimer cet article. »

Les amendements suivants sont présentés par M. Schosteck, au nom de la commission des lois.

L'amendement n° 147 est ainsi libellé :

« Rédiger comme suit les I et II de cet article :

« I. L'article L. 1423-1 est ainsi rédigé :

« Art. L. 1423-1. - Le département est responsable de la protection sanitaire de la famille et de l'enfance dans les conditions prévues au livre premier de la partie II. »

« II. Les articles L. 1423-2 et L. 1423-3 sont abrogés. »

L'amendement n° 148 est ainsi libellé :

« Supprimer le IV de cet article. »

L'amendement n° 149 est ainsi libellé :

« A. - Rédiger comme suit le V de cet article :

« V. - L'article L. 3111-11 est ainsi rédigé :

« Art. L. 3111-11. - Les vaccinations réalisées par les établissements et organismes habilités dans des conditions définies par décret sont gratuites. »

« B. En conséquence, supprimer le VI de cet article. »

L'amendement n° 150 est ainsi libellé :

« Supprimer le second alinéa du texte proposé par le VIII de cet article pour l'article L. 3112-2 du code de la santé publique. »

L'amendement n° 151 est ainsi libellé :

« Rédiger comme suit le texte proposé par le IX de cet article pour l'article L. 3112-3 du code de la santé publique :

« Art. L. 3112-3. - La vaccination, le suivi médical et la délivrance des médicaments sont gratuits lorsque ces actes sont réalisés par un établissement ou organisme habilité dans des conditions définies par décret.

« Les dépenses afférentes au suivi médical et à la délivrance des médicaments sont prises en charge, pour les assurés sociaux, par les organismes d'assurance maladie dont ils relèvent et pour les bénéficiaires de l'aide médicale, dans les conditions fixées par l'article L. 111-2 et le chapitre 1er du titre 1er du livre 1er du code de l'action sociale et des familles et, le cas échéant, selon les modalités prévues à l'article L. 182-1 du code de la sécurité sociale. »

L'amendement n° 152 est ainsi libellé :

« Supprimer les deux derniers alinéas du texte proposé par le XII de cet article pour l'article L. 3121-1 du code de la santé publique. »

L'amendement n° 153 est ainsi libellé :

« Rédiger comme suit le texte proposé par le XIII de cet article pour l'article L. 3121-3 du code de la santé publique :

« Art. L. 3121-3. - Les activités de prévention, de dépistage, de diagnostic et de traitement ambulatoire des infections sexuellement transmissibles sont gratuites et anonymes lorsqu'elles sont exercées par des établissements ou organismes habilités dans des conditions définies par décret.

La parole est à M. Guy Fischer, pour présenter l'amendement n° 747.

M. Guy Fischer. Allant à rebours du mouvement général de décentralisation des compétences, l'article 56 vise à transférer à l'Etat certaines compétences sanitaires détenues par les départements, notamment dans les domaines de la lutte contre la tuberculose, les infections sexuellement transmissibles et le cancer.

Il est intéressant de noter que l'exposé des motifs du projet de loi justifie cette recentralisation des compétences sanitaires par le souci « d'assurer une mise en oeuvre locale homogène des priorités définies au plan national et d'assurer la cohérence des politiques en matière de lutte contre les infections sexuellement transmissibles et le virus de l'immunodéficience humaine. »

Indiscutablement, la situation actuelle, marquée par une forte inégalité des Français devant la maladie et la mort, n'est pas satisfaisante. Tout le monde en convient.

Nous savons tous que les départements se sont impliqués à des degrés divers pour mettre en oeuvre des programmes de dépistage des cancers du sein chez la femme, par exemple. Il est vrai que la généralisation de ce dépistage reste encore un objectif à atteindre, ce à quoi M. le ministre de la santé s'est engagé pour l'année 2004.

Les causes de ces inégalités sont multiples.

On peut citer, tout d'abord, l'enchevêtrement des compétences, qui n'est effectivement pas sans incidence.

Il convient toutefois de ne pas négliger le fait, comme l'a rappelé dans son rapport la commission d'orientation sur le cancer en janvier 2003, que, structurellement, la France n'a pas su jusqu'alors prioriser la prévention. Faute de volonté politique et de moyens financiers, nous disposons d'un faible dispositif de prévention au niveau tant régional que départemental.

Une autre explication mérite d'être évoquée : si tous les départements n'ont pas réussi à mettre en place le dépistage systématique du cancer du sein, c'est peut être aussi parce qu'un blocage n'a pu être surmonté avec les radiologues. Songez à la résistance opposée par ces professionnels de la santé pour obtenir une revalorisation de leurs actes.

Si, aujourd'hui, nous envisageons de supprimer cet article, ce n'est évidemment pas parce que nous dénions à l'Etat sa responsabilité première pour lutter efficacement contre certaines épidémies, certains fléaux. C'est plutôt pour montrer du doigt l'inconstance du Gouvernement, qui n'admet les transferts de compétences que lorsque cela l'arrange. Pourtant, l'Etat est le garant du respect des droits fondamentaux de chacun.

Que l'on m'explique, par exemple, pourquoi ce qui serait admissible en matière de santé publique - échelon national et politiques locales - ne le serait pas de la même manière en matière de formation professionnelle, d'insertion ou de solidarité.

M. le président. La parole est à M. le rapporteur, pour défendre les sept amendements de la commission.

M. Jean-Pierre Schosteck, rapporteur. L'amendement n° 147 a pour objet de supprimer la disposition qui consacre la possibilité pour le département de participer à la mise en oeuvre des programmes de santé publique définis par l'Etat.

Il convient, me semble-t-il, de recentrer l'Etat sur sa responsabilité et de s'en tenir à ce partage clair : les problèmes de santé relèvent de l'Etat, la solidarité est du ressort du département.

L'amendement n° 148 a pour objet de supprimer une disposition qui n'a pas sa place dans un texte consacré à la décentralisation.

Quant aux amendements n°s 149, 150, 151, 152 et 153, ce sont des amendements de coordination.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. Patrick Devedjian, ministre délégué. Je répondrai d'abord à Mme Bocandé qui, dans la discussion générale, m'a interrogé sur les règles de transfert des moyens et des personnels : les règles de compensation des transferts de compétences sont applicables aussi bien lorsqu'il s'agit d'une décentralisation que dans le cas d'une recentralisation.

Les articles L. 1614-1 et suivants du code général des collectivités territoriales imposent en effet de compenser les charges nettes transférées.

Dans le cas qui nous intéresse, les départements devront donc supporter une diminution de leurs ressources équivalente à la diminution de charges qu'ils enregistreront. Les personnels concernés subiront le même sort que ceux de l'Etat qui seraient touchés par la décentralisation : le système fonctionne évidemment dans les deux sens.

M. Jean Chérioux. C'est logique !

M. Patrick Devedjian, ministre délégué. Il a en tout cas le mérite de la cohérence.

J'en viens aux amendements.

Le Gouvernement est défavorable à l'amendement n° 747.


M. le président. Voici le résultat du dépouillement du scrutin n° 30 :

Nombre de votants317
Nombre de suffrages exprimés315
Pour111
Contre204

Je mets aux voix l'article 2, modifié.

(L'article 2 est adopté.)

S'agissant de l'amendement n° 147, il s'en remet à la sagesse du Sénat, ce qui va sans dire allant toujours mieux en le disant !

Le Gouvernement s'en remet également à la sagesse de la Haute Assemblée sur l'amendement n° 148, qui tend à la suppression du paragraphe IV de l'article 56.

Enfin, par coordination, il s'en remet également à la sagesse du Sénat sur les amendements n°s 149, 150, 151, 152 et 153.

M. le président. La parole est à Mme Annick Bocandé, rapporteur pour avis.

Mme Annick Bocandé, rapporteur pour avis. Je remercie M. le ministre d'avoir répondu à une question que j'avais soulevée lors de la discussion générale.

Je connais bien la règle de recentralisation-décentralisation applicable aux fonds. Mais il se trouve que certains départements se sont énormément investi alors que d'autres n'ont rien fait. Ceux qui ont beaucoup investi se trouveront donc pénalisés, puisque l'Etat va profiter des ressources financières qu'ils avaient mis dans ces actions.

M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Sueur, pour explication de vote sur l'amendement n° 747.

M. Jean-Pierre Sueur. Nous ne comprenons pas très bien la logique d'ensemble du dispositif qui nous est proposé.

Nous assistons à un mouvement de renvoi vers l'Etat de prérogatives qui étaient fort bien exercées par les conseils généraux.

Ainsi, on nous explique que la vaccination, la lutte contre la lèpre et la tuberculose, la lutte contre les infections sexuellement transmissibles et le dépistage des cancers sont des grandes causes qui doivent relever de l'Etat et donc de la politique de santé publique.

Ce qui est tout à fait étonnant, c'est que, dans le même temps où cela est affirmé, dans bien d'autres articles est formulée toute une série de propositions renvoyant, vers telle ou telle collectivité locale plus ou moins définie, certains aspects de santé publique qui relèvent tout autant du droit universel à la santé et seraient de la responsabilité de l'Etat si l'on suivait le même raisonnement.

Voilà donc une nouvelle preuve du caractère extrêmement incohérent de ce texte, dans lequel il est bien difficile d'y voir clair. En fait, comme nous avons déjà eu l'occasion de le dire, ce désordre apparent dissimule une logique sous-jacente. Il s'agit de mettre en oeuvre une sorte de « République à la carte » dans laquelle chaque collectivité serait dotée, ou serait amenée à se doter, d'une série aléatoire de compétences, que l'Etat récupérerait parfois. Nous avons cherché en vain une conception d'ensemble lisible. C'est la raison pour laquelle nous nous abstiendrons sur cet amendement.

M. le président. La parole est à Mme Nicole Borvo, pour explication de vote.

Mme Nicole Borvo. Si nous souhaitons la suppression de cet article, ce n'est évidemment pas parce que nous sommes contre l'intervention de l'Etat en matière de santé publique, bien au contraire, c'est parce que, derrière son incohérence apparente, se profile la volonté de circonscrire l'intervention de l'Etat en matière de santé publique à un domaine limité.

Il serait tout de même souhaitable, et même nécessaire, de définir ce qu'est une politique de santé publique relevant de la compétence de l'Etat. Or ce genre d'article ajoute à la confusion en ne définissant rien.

Ainsi, la santé publique couvre tout l'espace très important de la prévention, domaine à propos duquel les ministres successifs ont reconnu le retard important de notre pays.

Je constate que les sénateurs de la majorité, qui ont d'ailleurs retiré leurs amendements et donnent l'impression de ne plus vouloir participer au débat pour des raisons que nous connaissons, ne se prononcent pas sur ce sujet.

M. Eric Doligé. Mais si !

M. Daniel Goulet. On est là !

Mme Nicole Borvo. Enfin, peut-on limiter l'intervention de l'Etat en matière de santé publique aux trois ou quatre questions mentionnées dans cet article ? C'est absolument inadmissible, car, s'il en est ainsi, peu de politiques de santé publique seront conduites à l'échelle nationale.

Je maintiens donc notre amendement de suppression et je demande qu'il soit mis aux voix par scrutin public.

M. le président. La parole est à M. Philippe Richert, pour explication de vote.

M. Philippe Richert. Deux raisons motivent la décision du Gouvernement de faire revenir au plan national les moyens et les politiques relatifs à la santé publique, en particulier toutes les actions de prévention mentionnées dans ce texte.

D'une part, c'est au plan national que sont définis les enjeux de santé publique, parce qu'il faut une politique nationale de santé publique. Bien entendu, nous comprenons cela.

D'autre part, dans notre pays, les différences sont grandes d'un territoire à l'autre. Nous pouvons donc parfaitement comprendre également que les diverses politiques de santé doivent être envisagées à l'échelon national.

Néanmoins, j'ai le sentiment que, lorsque l'Etat détermine une politique, c'est souvent sur le niveau le plus bas qu'il s'aligne. C'est la raison pour laquelle nous sommes de ceux qui souhaitent décentraliser.

Je ne suis pas persuadé que, dans les départements où de gros efforts ont été faits, la renationalisation permettra de faire un grand pas en avant.

M. Guy Fischer. Voilà !

M. Philippe Richert. Mon département est en train d'investir beaucoup en dispensaires spécialisés dans les traitements anti-tuberculeux, dans le domaine du contrôle des MST, dans la lutte ou la prévention contre les maladies comme le cancer. J'espère que, demain, l'Etat sera à la hauteur de la tâche et que la renationalisation n'entraînera pas une régression.

M. Jean-Pierre Sueur. Très intéressant !

M. le président. La parole est à M. Jean Chérioux, pour explication de vote.

M. Jean Chérioux. Pour ma part, je considère que la politique de santé relève de l'Etat. J'ai toujours été étonné que, par le passé, certaines responsabilités aient pu être confiées à des collectivités territoriales.

Mme Bocandé, comme notre ami Philippe Richert, a soulevé, avec raison, le délicat problème des collectivités ayant accompli un gros effort. Il est normal que tous les moyens matériels, humains ou financiers soient repris par l'Etat, mais à condition que ce dernier reprenne aussi tous les investissements qui ont été décidés et qu'il continue de les financer.

Si l'Etat ne reprend pas tout, il risque d'y avoir des doubles emplois. En matière de décentralisation, lorsque l'on crée des emplois d'un côté, il faut éviter d'en maintenir de l'autre !

M. le président. La parole est à M. Eric Doligé, pour explication de vote.

M. Eric Doligé. En demandant à intervenir je ne cherche pas à contredire Mme Borvo, je souhaite simplement participer au débat. (Sourires.)

On a parlé des départements qui faisaient de gros efforts, ce qui sous-entendrait que certains n'en font pas ! Je voudrais simplement ajouter que certains départements souhaiteraient faire de grands efforts, mais que, malheureusement, ils ne disposent pas du personnel médical nécessaire. Il y a un véritable problème d'équilibre médical à l'échelle du territoire national. La reprise par l'Etat permettrait peut-être d'avoir une vision plus globale et plus égalitaire !

Cela étant, un vrai problème de santé et de présence médicale sur le territoire national se pose. Il est regrettable qu'à certains départements qui ont eu la volonté de mettre en oeuvre les moyens dont ils disposaient, l'Etat ait dit : « Freinez un peu vos ardeurs, il n'y a pas les moyens d'y faire face ! »

M. le président. La parole est à M. André Boyer, pour explication de vote.

M. André Boyer. Certains départements parmi les plus dépourvus de moyens ont consenti des efforts considérables pour mener une politique de dépistage. C'est le cas dans mon département en ce qui concerne le dépistage du cancer du sein.

Après décision du conseil général, nous avons organisé la mise en place des structures nécessaires pour procéder à ce dépistage. Nous nous sommes heurtés à des difficultés multiples dont la moindre n'a pas été de trouver le personnel médical nécessaire.

A cette occasion, nous avons d'ailleurs constaté que les radiologues libéraux ont accepté spontanément de participer à ce dépistage alors que les radiologues médecins à temps plein des hôpitaux publics ont refusé de faire partie du système, et cela à l'instigation de leurs directeurs qui ne voulaient pas leur voir distraire une partie de leur temps de travail pour accomplir ces tâches.

Si, en reprenant cette compétence, l'Etat se trouve en mesure d'assurer la coopération de tous les médecins susceptibles d'intervenir dans ce domaine, nous nous en réjouirons.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 747.

Je suis saisi d'une demande de scrutin public émanant du groupe CRC.

Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.

(Le scrutin a lieu.)

M. le président. Personne ne demande plus à voter ?...

(Le scrutin est clos.)

(Il est procédé au comptage des votes.)


M. le président. Voici le résultat du dépouillement du scrutin n° 61 :

Nombre de votants317
Nombre de suffrages exprimés228
Majorité absolue des suffrages115
Pour24
Contre204

Je mets aux voix l'amendement n° 147.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 148.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 149.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 150.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 151.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 152.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 153.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'article 56, modifié.

(L'article 56 est adopté.)