M. Philippe Marini, rapporteur général. C'est le cas des amendements nos I-161, I-163 et I-160 visant à insérer un article additionnel après l'article 10.

M. le président. Retirez-vous l'amendement n° I-161, monsieur Haut ?

M. Claude Haut. Oui, monsieur le président.

M. le président. Retirez-vous l'amendement n° I-163, monsieur Domeizel ?

M. Claude Domeizel. Oui, monsieur le président.

M. le président. Et l'amendement n° I-160, monsieur Charasse ?

M. Michel Charasse. Je le retire également, monsieur le président.

M. le président. Les amendements nos I-161, I-163 et I-160 sont retirés.

Veuillez poursuivre, monsieur le rapporteur général.

M. Philippe Marini, rapporteur général. L'amendement n° I-165 rectifié portant article additionnel avant l'article 12 est dans le même cas.

M. le président. L'amendement est-il maintenu, monsieur Moreigne ?

M. Michel Moreigne. Évidemment, M. le rapporteur général a pris soin de distiller les poisons avec une grande habileté ! (Sourires.)

M. Philippe Marini, rapporteur général. Ce ne sont pas des poisons, ce sont des potions !

M. Jean-François Copé, ministre délégué. On n'est pas en Russie !

M. Michel Moreigne. Monsieur le rapporteur général, avec toute l'autorité que je vous reconnais et le respect que je vous porte, puis-je vous demander de me donner une idée du coefficient de sympathie que vous portez à mon amendement ? (Rires.)

M. Philippe Marini, rapporteur général. Pour cela, il faudra que vous l'exposiez !

M. Michel Moreigne. J'attendrai donc la seconde partie !

M. le président. L'amendement n° I-165 rectifié est retiré.

M. Philippe Marini, rapporteur général. Monsieur le président, à l'article 12, l'amendement n° I-173 est passible d'irrecevabilité financière.

M. Michel Charasse. Il n'est pas gagé ! Eh bien, n'en parlons plus !

M. le président. L'article 40 de la Constitution étant applicable, l'amendement n° I-173 n'est pas recevable.

Veuillez poursuivre, monsieur le rapporteur général.

M. Philippe Marini, rapporteur général. L'amendement n°I-179 et l'amendement n°I-180 visant à introduire un article additionnel après l'article 12 devraient également être reportés en seconde partie.

M. le président. L'amendement n° I-179 est-il maintenu, monsieur Marc ?

M. François Marc. Je le retire, monsieur le président.

M. le président. L'amendement n° I-180 est-il maintenu, monsieur Haut ?

M. Claude Haut. Je le retire, monsieur le président.

M. le président. Les amendements n°s  I-179 et I-180 sont retirés.

Veuillez poursuivre, monsieur le rapporteur général.

M. Philippe Marini, rapporteur général. L'amendement nos I-25 visant à introduire un article additionnel après l'article 14 devrait également être reporté en deuxième partie. Mais nous attendrons que son auteur soit présent pour décider de son sort.

Quant à l'amendement n° I-184, il est passible de l'article 40.

M. le président. L'article 40 de la Constitution étant applicable, l'amendement n° I-184 n'est pas recevable.

Veuillez poursuivre, monsieur le rapporteur général.

M. Philippe Marini, rapporteur général. Les amendements nos I-195, I-194 et I-193 visant à introduire des articles additionnels après l'article 14 bis devraient également être reportés en seconde partie du projet de loi de finances, mais M. Thiollière nous dira quelles sont ses intentions.

Enfin, l'amendement n° I-84, qui vise à introduire un article additionnel avant l'article 15, devrait lui aussi être reporté.

M. le président. Retirez-vous l'amendement n°I-84, monsieur Foucaud ?

M. Thierry Foucaud. Oui, monsieur le président.

M. le président. L'amendement n° I-84 est retiré.

Je vous remercie, monsieur le rapporteur général, d'avoir fait le point sur la situation, comme je remercie M. Charasse de nous avoir suggéré de procéder ainsi.

II. - RESSOURCES AFFECTÉES

A. - Dispositions relatives aux collectivités territoriales (suite)

Articles additionnels après l'article 10
Dossier législatif : projet de loi de finances pour 2007
Articles additionnels avant l'article 12

Articles additionnels avant l'article 12 ou avant l'article 15

M. le président. Je suis saisi de six amendements faisant l'objet d'une discussion commune.

L'amendement n° I-82, présenté par M. Foucaud, Mme Beaufils, M. Vera et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :

Avant l'article 15, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I. - Les dispositions de l'article 85 de la loi de finances pour 2006 (loi n° 2005-1719 di 3 décembre 2005) sont abrogées.

II. - Les pertes de recettes pour l'État résultant du I ci-dessus sont compensées à due concurrence par le relèvement des droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.

La parole est à Mme Marie-France Beaufils.

Mme Marie-France Beaufils. L'an dernier, à la même époque, lors de l'examen du projet de loi de finances pour 2006, le Gouvernement faisait voter le plafonnement de la taxe professionnelle à 3,5 % de la valeur ajoutée des entreprises. Cette mesure devait, selon les propos de M. le ministre, faciliter la vie de nos entreprises et renforcer leur dynamisme.

À l'époque, nous avions averti que la portée de cette disposition concernait surtout les entreprises les plus importantes. J'ajoutais qu'elle aurait des conséquences dangereuses : « Le blocage à 3,5 % de la valeur ajoutée représentera une baisse brutale de rentrées fiscales pour les collectivités territoriales et sera une charge budgétaire pour l'État. »

Cette réforme devait entrer dans sa phase active en 2007. Elle a soulevé, lors de son annonce, de lourdes inquiétudes et elle est aujourd'hui rejetée par une grande partie des élus. Les résultats de la première simulation, qui date de février 2006, sont éloignés de ceux que vous venez de mettre en ligne sur le site du ministère des finances concernant la réforme de la taxe professionnelle pour l'année 2007. Ces écarts, certes dus à des différences de méthode d'analyse, posent également la question d'éventuelles erreurs, lesquelles semblent avoir été relevées par des spécialistes. Nul doute que cette situation révèle la complexité de la situation, les déclarations des entreprises concernées évoluant au fur et à mesure de la prise en compte, par leurs services spécialisés, de ces nouveaux textes, pour adapter leurs déclarations.

Les collectivités et les EPCI concernés par un ticket modérateur se verraient ainsi contraintes d'abaisser leur taux de taxe professionnelle en 2007 si elles ne veulent pas que 526 millions d'euros soient ponctionnés sur leurs ressources fiscales au titre du partage du plafonnement, alors que les entreprises n'obtiendront un remboursement qu'en 2008.

Pour nombre de budgets locaux, les conséquences sont lourdes. En effet, la dégradation de la situation financière de certaines collectivités sera inéluctable. Comme je l'ai dit tout à l'heure, 22 des 25 régions sont concernées par l'application du ticket modérateur. Cela représente 216 millions d'euros avant réfaction et 210,8 millions d'euros après réfaction, soit 3,45 euros par habitant. Par ailleurs, 83 des 98 départements sont également concernés par ce ticket modérateur, pour un montant global de 184,626 millions d'euros. Parmi ces derniers, un grand nombre possède des taux de taxe professionnelle se situant en dessous de la moyenne nationale, voire très en dessous, ce qui montre bien que l'analyse faite en amont de la réforme se révèle assez particulière pour ces collectivités.

Quant aux établissements publics de coopération intercommunale, un journal spécialisé note qu'« il convient tout d'abord d'observer qu'aucune synthèse d'ensemble n'est faite en ce qui concerne les communes et les établissements publics de coopération intercommunale à fiscalité propre et qu'ainsi il est impossible d'apprécier l'impact prévisionnel de cette réforme ».

Vous vous étiez pourtant engagé, monsieur le ministre, à présenter des mesures législatives visant à limiter les possibilités d'optimisation de l'impôt par les contribuables. Nombreux sont les spécialistes en question fiscale à avoir observé que l'article 85 du projet de loi de finances pour 2006, qui devait entrer en application en janvier 2007, laisse la porte ouverte à toutes les interprétations permettant aux entreprises de payer une taxe professionnelle la moins élevée possible, et ce au détriment de l'État.

En effet, le calcul de la taxe professionnelle au titre de l'année 2007 se réfère aux immobilisations figurant au bilan des entreprises au 31 décembre 2005. Ce décalage de deux ans permet d'imaginer toutes les possibilités d'« optimisations fiscales ». Vous savez comme moi que les conseillers fiscaux feront preuve d'imagination pour permettre à chaque entreprise de choisir entre deux solutions. Il s'agira soit de payer sur les immobilisations si l'entreprise est sous-capitalisée - c'est le cas des entreprises de main-d'oeuvre -, soit d'invoquer le plafonnement à la valeur ajoutée, si, au contraire, elle dispose de fortes bases taxables.

D'une façon inexorable, les groupes vont créer des filiales sous-capitalisées, qui serviront de support de facturation, pour éponger la taxe professionnelle consolidée due par lesdits groupes.

Ce système favorisera également la précarisation de l'emploi, puisque les entreprises auront ainsi intérêt fiscalement, comme le prévoit l'article 85 précité, à développer l'intérim au lieu de recruter du personnel permanent. Vous permettez ainsi, monsieur le ministre, que les sociétés d'intérim soient utilisées pour réduire la valeur ajoutée des entreprises et, donc, le plafond de leur taxe professionnelle.

Vous pourrez ainsi déplorer que les caisses de l'État soient quasiment, voire complètement vides, car, une fois de plus, votre politique autorisera, en toute légalité, des manipulations comptables qui appauvrissent l'État et mettent en difficulté les collectivités locales, en favorisant encore les entreprises qui en ont le moins besoin.

Telles sont les raisons pour lesquelles nous vous demandons, mes chers collègues, d'adopter, par scrutin public, l'amendement n° I-82, qui vise à abroger l'article 85 de la loi de finances pour 2006.

M. le président. L'amendement n° I-166, présenté par MM. Massion,  Masseret,  Angels et  Auban, Mme Bricq, MM. Charasse,  Demerliat,  Frécon,  Haut,  Marc,  Miquel,  Moreigne,  Sergent et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :

Avant l'article 12, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

L'article 85 de la loi de finances pour 2006 (nº 2005-1719 du 30 décembre 2005) est abrogé.

La parole est à M. Michel Sergent.

M. Michel Sergent. Cet amendement vise également à abroger l'article qui met en place la réforme de la taxe professionnelle.

Cette réforme, qui a été adoptée au moment de l'examen du projet de loi de finances pour 2006, aura des conséquences désastreuses sur l'équilibre financier des collectivités locales. En se résumant à un plafonnement absolu à la valeur ajoutée, elle conduit à supprimer toute marge de manoeuvre, en termes de recettes de taxe professionnelle, sur la partie plafonnée de l'assiette.

En quelques mots, voici les constats qui nous conduisent à appeler de nos voeux la suppression de cette réforme, dont, finalement, personne ne veut, si ce n'est le MEDEF.

Tout d'abord, la réforme est inique par ses conséquences mécaniques. Avec le plafonnement à la valeur ajoutée, les inégalités territoriales s'accroîtront automatiquement. Le pourcentage de bases plafonnées étant extrêmement différent d'un territoire à l'autre, les inégalités - déjà fortes - vont s'intensifier et influer sur les capacités futures de modulation des taux. Certaines communes verront ainsi la quasi-totalité de leurs bases plafonnées.

Le pourcentage de bases plafonnées se situe en effet entre 3 % et 99 % pour les communes, entre 30 % et 82 % pour les départements, et entre 26 % et 61 % pour les régions.

En effet, le plafonnement fondé sur la valeur ajoutée frappera prioritairement les entreprises du secteur industriel, qu'il s'agisse des zones rurales ou industrielles, et touchera à un moindre niveau les entreprises de services. Ainsi, les zones qui peuvent déjà accuser un moindre dynamisme économique et, par conséquent, fiscal seront pénalisées par le plafonnement du produit de la taxe professionnelle.

Les grandes entreprises seront favorisées au détriment des PME. Celles-ci, en effet, seront les grandes perdantes de ce dispositif, car les entreprises échappant au plafonnement de la taxe professionnelle à la valeur ajoutée sont principalement des PME.

Les conséquences économiques de la réforme sont mal mesurées.

Tout d'abord - et cela a déjà été souligné -, le nouveau dispositif pourrait inciter, aux fins d'évasion fiscale, à la précarisation des postes de travail, à travers un recours accru à l'intérim notamment.

Un autre risque tient à la possibilité de nomadisation accrue des bases taxables, puisqu'il sera dorénavant dans l'intérêt des grandes entreprises d'adopter des stratégies d'optimisation fiscale, notamment en répartissant à discrétion la valeur ajoutée entre les différentes filiales d'un même groupe consolidé. Un éminent consultant en finances locales, M. Michel Klopfer, l'a rappelé récemment dans la presse. Selon lui, ce type de comportement serait de nature à attiser la concurrence fiscale entre les territoires.

Les collectivités locales sont ainsi condamnées à une impasse financière.

Le principe constitutionnel d'autonomie financière est foulé aux pieds. L'atteinte à l'autonomie fiscale des collectivités est manifeste car, de facto, le mécanisme du plafonnement limite strictement la marge de manoeuvre des élus locaux.

Rappelons à cet effet que la taxe professionnelle représente la principale marge de manoeuvre des collectivités sur le plan de la fiscalité directe locale : 24 milliards d'euros en 2005, soit environ la moitié des recettes de la fiscalité directe locale.

Elle constitue donc un levier indispensable pour les collectivités dans un contexte de montée en charge des transferts de compétences et d'incertitude quant à l'évolution de leurs recettes.

De manière générale, la réforme condamne les collectivités à la modération fiscale et les impacts escomptés sont redoutables. Toute hausse de taux sera, à l'avenir, sanctionnée, que les taux appliqués soient élevés ou bas, que l'on ait ou non bien géré sa collectivité...

L'intercommunalité est stoppée net dans son élan. En effet, les intercommunalités, en particulier les groupements ayant un régime de taxe professionnelle unique, TPU, subiront de pleins fouets les effets de cette réforme. Une étude de la DGCL souligne d'ailleurs que de nombreux groupements à TPU ont déjà fait jouer leur possibilité de mettre en place une fiscalité mixte.

Inévitablement, cette réforme aura un effet inflationniste sur la fiscalité locale. Cet effet inéluctable est loin de l'objectif recherché ! Les collectivités devront, sans nul doute, financer cette perte de recettes par une augmentation de la pression fiscale sur les ménages et les entreprises non plafonnées. Or chacun reconnaît le caractère injuste des impôts ménages, reposant sur des bases obsolètes et injustes.

Les collectivités se retrouvent ainsi enferrées dans une logique d'accroissement de l'injustice du système fiscal français.

Enfin - et ce n'est pas négligeable ! -, cette réforme a un coût élevé pour les finances de l'État. Ce dernier, qui est déjà le premier contribuable local, verra sa contribution à la taxe professionnelle encore augmentée. Le coût du rattrapage 1995 - 2004 s'élève en effet à 1,3 milliard d'euros. L'État impécunieux peut-il vraiment se permettre de telles largesses ?

Pour toutes ces raisons, il est essentiel de supprimer cette réforme, inique et dangereuse pour l'équilibre du système financier local.

M. le président. L'amendement n° I-168, présenté par MM. Massion,  Masseret,  Angels et  Auban, Mme Bricq, MM. Charasse,  Demerliat,  Frécon,  Haut,  Marc,  Miquel,  Moreigne,  Sergent et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :

  Avant l'article 12, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I. Au quatrième alinéa du b) du 2 du C du III de l'article 85 de la loi de finances pour 2006 (n° 2005-1719 du 30 décembre 2005), le pourcentage : « 20% » est remplacé par le pourcentage : « 50%. »

 

II. Les pertes de recettes pour l'État résultant du I sont compensées à due concurrence par l'institution d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.

La parole est à M. Michel Sergent.

M. Michel Sergent. Monsieur le président, vous aurez compris qu'il s'agit d'un amendement de repli. Je souhaite évidemment que le précédent soit adopté.

Dès la fin de 2005, la Cour des comptes s'alarmait et soulignait dans son rapport public particulier intitulé L'intercommunalité en France : « La réforme annoncée de la taxe professionnelle est néanmoins susceptible d'affecter la principale recette de fonctionnement des groupements à fiscalité propre. Cette perspective fait peser une hypothèque sur la pérennité du financement par l'impôt des intercommunalités. »

Il ne faut pas oublier que plus de 90 % des ressources fiscales des EPCI proviennent de la taxe professionnelle. La grande révolution de ces derniers temps en matière administrative a été le développement de l'intercommunalité, et dans ce cadre, le recours accru au système de la taxe professionnelle unique. Ainsi, 1 103 groupements, qui regroupent 14 000 communes et 40 millions d'habitants, sont sous ce régime. Comment fonctionneront-ils avec une taxe plafonnée ?

Nous le savons bien, la dynamique intercommunale sortira très affaiblie de la réforme de la taxe professionnelle. Les groupements en régime de taxe professionnelle unique seront, de fait, les premiers touchés. Dans ce contexte, le BIS, Bulletin d'informations statistiques, de la DGCL, publié en octobre dernier, souligne que de nombreux groupements à TPU sont passés en régime de fiscalité mixte. C'est ainsi que l'on peut lire : « Plus de la moitié des groupements nouvellement à fiscalité mixte en 2006 sont d'anciens groupements à TPU. »

Un dispositif de réfaction supplémentaire du « ticket modérateur » spécifique aux groupements à TPU avait finalement été annexé l'an dernier à la réforme de la taxe professionnelle adoptée en loi de finances, afin de limiter les effets négatifs de cette réforme sur la dynamique d'intégration intercommunale.

Pour autant, afin de limiter les effets négatifs de la réforme de la TP sur la dynamique d'intégration intercommunale, incarnée par le régime fiscal de TPU, il nous semble nécessaire de renforcer ce dispositif.

Le présent amendement précise donc que, lorsque le pourcentage de bases de TP plafonnées dépasse 50 %, la réfaction du « ticket modérateur » est systématiquement de 50 % et non de 20 % comme cela était prévu initialement.

Afin de rassurer les intercommunalités, nous vous invitons, mes chers collègues, à adopter cet amendement au cas où le précédent ne le serait pas.

M. le président. L'amendement n° I-169, présenté par MM. Haut,  Massion,  Masseret,  Angels et  Auban, Mme Bricq, MM. Charasse,  Demerliat,  Frécon,  Marc,  Miquel,  Moreigne,  Sergent et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :

  Avant l'article 12, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I. Le 2 du 1° du B. du III. de l'article 85 de la loi de finances pour 2006 (n° 2005-1719 du 30 décembre 2005) est ainsi rédigé :

« 2°. Pour les départements, le plus faible des trois taux suivants : le taux de l'année 2006, le taux de l'année 2005 majoré de 7,3 % ou le taux de l'année d'imposition. »

II. Les pertes de recettes pour l'État résultant du I sont compensées à due concurrence par l'institution d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.

La parole est à M. Claude Haut.

M. Claude Haut. Cet amendement vise à déterminer le taux de référence de taxe professionnelle pris en compte pour compenser les pertes de recettes de taxe professionnelle des départements, sur la base des taux 2005, et non 2004 comme le prévoit le texte adopté en loi de finances pour 2006.

Cela devrait permettre de minorer les conséquences du caractère rétroactif de la réforme de la taxe professionnelle, qui entrera en vigueur en 2007.

Cette réforme pénalise fortement les départements ayant eu à augmenter leurs taux entre 2004 et 2005, afin notamment de prendre en compte le coût de compétences transférées - par exemple, les TOS, le RMI, les routes, etc. - sous-compensé par des recettes qui, de surcroît, sont insuffisamment dynamiques, comme la TIPP et la TSCA.

Il s'agit également de corriger l'atteinte portée au principe de libre administration des collectivités locales, les motivations de l'article 85 visant explicitement à pénaliser les collectivités ayant voté des hausses de taux entre ces deux exercices.

Monsieur le ministre, je vous ai entendu dire que vous ne vouliez pas opposer la gestion des collectivités territoriales et l'État ; c'est pourquoi je demande à la Haute Assemblée de bien vouloir adopter l'amendement, afin d'éviter l'impasse financière des départements.

M. le président. L'amendement n° I-170, présenté par MM. Haut,  Massion,  Masseret,  Angels et  Auban, Mme Bricq, MM. Charasse,  Demerliat,  Frécon,  Marc,  Miquel,  Moreigne,  Sergent et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :

 

Avant l'article 12,  insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I. Au deuxième alinéa du b) du 2 du C du III de l'article 85 de la loi de finances pour 2006 (n° 2005-1719 du 30 décembre 2005), remplacer le nombre : « dix » par le chiffre : « cinq».

II. Les pertes de recettes pour l'État résultant du I sont compensées à due concurrence par l'institution d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.

La parole est à M. Claude Haut.

M. Claude Haut. Il s'agit, bien sûr, d'un amendement de repli, mais tout comme M. Michel Sergent tout à l'heure, je préfère que le précédent soit adopté.

À l'occasion des débats parlementaires sur la réforme de la TP, un dispositif de minoration du ticket modérateur a été adopté, visant les collectivités dont le taux de bases de TP plafonné est supérieur à la moyenne nationale. Mais ce dispositif est très réducteur, puisqu'il ne s'adresse qu'aux collectivités dont les bases plafonnées sont supérieures de 10 points à la moyenne nationale.

Les dernières simulations sur l'impact de la réforme de la taxe professionnelle publiées par le ministère de l'économie, des finances et de l'industrie révèlent ainsi que peu de collectivités bénéficieraient finalement de ce dispositif de minoration du ticket modérateur. Seuls douze départements et quatre régions y seraient éligibles.

Or l'impact de la réforme sera probablement plus sensible que ne le montrent les simulations réalisées. En effet, beaucoup d'entreprises n'ont pas encore demandé de dégrèvement de la taxe professionnelle au titre de 2004, ce qui n'est pas pris en compte dans ces simulations. Par ailleurs, le risque est fort que les entreprises entrent progressivement dans une logique d'optimisation fiscale par la création de filiales sous-capitalisées, instrumentalisant ainsi à loisir leur valeur ajoutée de manière à payer le moins de TP possible.

Il est donc proposé d'élargir l'éligibilité des collectivités les plus pénalisées au dispositif de minoration du ticket modérateur, en retenant un pourcentage des bases prévisionnelles des établissements plafonnés supérieur de cinq points, et non de dix points, à la moyenne nationale de l'année n-1.

Ainsi, les effets néfastes de la réforme de la taxe professionnelle sur l'autonomie financière des collectivités seront, au moins en partie, minorés.

M. le président. L'amendement n° I-171, présenté par M. Charasse et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :

  Avant l'article 12, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le 2° du A du III de l'article 85 de la loi de finances pour 2006 (nº 2005-1719 du 30 décembre 2005) est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Lorsque les bases d'imposition d'un établissement font l'objet d'un prélèvement au profit du fonds départemental de péréquation de la taxe professionnelle visé aux articles 1648 A et 1648 AA du code général des impôts, les bases afférentes à cet établissement restant à la disposition de la commune ou du groupement concerné évoluent comme l'évolution de l'ensemble des bases dudit établissement. »

La parole est à M. Michel Charasse.

M. Michel Charasse. Il s'agit d'une question qui a déjà été évoquée l'année dernière, mais qui n'a pu être réglée alors pour diverses raisons. J'y reviens donc cette année, notamment à la lumière de la décision du Conseil constitutionnel, qui a statué sur la conformité de l'article 85 de la loi de finances pour 2006.

« Des communes ne pourront pas augmenter leur taux, puisqu'elles seront au plafond, mais elles auront l'effet ?base? », avez-vous dit l'année dernière, monsieur le ministre, en présentant votre réforme de la taxe professionnelle. « Par conséquent, si vous n'avez pas l'effet ?taux?, vous aurez au moins l'effet ?base?. »

Or il se trouve qu'en France 200 ou 300 communes, peut-être un peu plus, n'ont ni la possibilité de faire varier le taux, car celui-ci est plafonné, ni l'effet « base », car les bases sont écrêtées au titre des établissements exceptionnels au profit du fonds départemental de péréquation de la taxe professionnelle. Ces collectivités sont donc privées du droit ou de la possibilité d'augmenter leur taux, sauf à rembourser l'année suivante à l'entreprise concernée, et ne peuvent pas non plus bénéficier de l'évolution des bases, car celles-ci sont écrêtées.

Dès lors que le Conseil constitutionnel a dit clairement que, dans cette réforme, aucune collectivité ne devait être ni lésée ni perdante, mon amendement vise simplement à préciser que, lorsque les bases sont écrêtées et que le taux est plafonné, les bases de la commune ou du groupement - car cela joue aussi pour les groupements de communes - évoluent, dans ce cas-là, comme la moyenne des bases de l'établissement concerné.

Actuellement, les bases évoluent tous les ans d'environ 1 % ou 2 %. On divise les bases par le nombre d'habitants pour obtenir le montant par habitant et quand on dépasse le montant maximum fixé par voie réglementaire, on écrête tout ce qui dépasse. Tous les ans, l'ajustement du montant par habitant suit, en gros, l'inflation.

Ainsi, avec mon amendement, il y aurait une évolution parallèle des bases de l'établissement et de celles restant à la disposition de la commune ou du groupement, car cela joue aussi pour les communautés, et ce d'autant plus que l'écrêtement continue à être calculé par rapport à la population communale et non par rapport à la population de la communauté. Ainsi, les collectivités et les groupements concernés ne seraient plus privés de toute possibilité d'évolution, ni de la possibilité d'ajuster le taux, parce qu'il est plafonné, ni du bénéfice de l'effet « base », comme le disait le ministre l'an dernier.

Tel est l'objet de cet amendement n° I-171.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Philippe Marini, rapporteur général. Sur cette séquence de six amendements, cinq suppriment ou modifient substantiellement la réforme de la taxe professionnelle ; le dernier, l'amendement n° I-171, pose le problème spécifique du prélèvement au profit des fonds départementaux de péréquation de la taxe professionnelle.

Sur les cinq premiers amendements, ma réponse sera très brève. En effet, lors du débat, j'ai développé toutes les raisons pour lesquelles je pensais que cette réforme était indispensable, qu'elle était bonne et qu'elle devait vivre. En cohérence avec ce discours, vous le comprendrez, la commission ne peut qu'être défavorable aux deux amendements de suppression et aux trois amendements visant à remettre substantiellement en cause cette réforme.

L'initiative de M. Charasse, avec l'amendement n° I-171, mérite des précisions supplémentaires.

Je rappelle que le même amendement a été présenté par le même auteur lors de la discussion du projet de loi de finances pour 2006. La commission avait alors demandé l'avis du Gouvernement, qui avait émis un avis défavorable, l'amendement étant contraire à la péréquation. M. Charasse avait alors accepté de retirer son amendement après que le président Arthuis eut évoqué une possible revoyure.

La proposition de M. Charasse aurait eu mécaniquement pour conséquence de limiter les ressources attribuées au fonds départemental de péréquation de la taxe professionnelle et donc de réduire la péréquation qui est - on nous le rappelle souvent sur vos travées ! - un objectif constitutionnel.

M. Michel Charasse. On n'a droit à rien !

M. Philippe Marini, rapporteur général. Je n'ai pas terminé !

M. Philippe Marini, rapporteur général. En outre, M. Charasse affirme que ces communes ne peuvent pas bénéficier comme les autres collectivités de l'évolution positive des bases, puisque celles-ci sont écrêtées. Si cet argument est recevable, il doit être nuancé.

En effet, le seuil au-delà duquel les bases sont écrêtées est révisé tous les ans et évolue en moyenne de plus de 2 %. Pour être tout à fait précis, l'évolution a été de 2,33 % entre 2004 et 2005 et de 2,15 % entre 2005 et 2006. Puisque ce seuil évolue, à population et à taux constants, les communes profitent donc mécaniquement de l'évolution de leurs bases de taxe professionnelle.

Enfin, les modifications au texte initial de l'article du projet de loi de finances pour 2006 réformant la taxe professionnelle, adoptées sur l'initiative de la commission des finances du Sénat, ont fait perdre au problème posé une grande partie de sa portée. Il convient de le rappeler, l'amendement initial de M. Charasse avait été déposé et défendu avant que nous ne votions un dispositif très sensiblement modifié.

En effet, les communes ayant une forte proportion de bases plafonnées, c'est-à-dire de dix points au-dessus de la moyenne, voient dorénavant leur ticket modérateur réduit dans une proportion variant entre 20 % et 50 %.

En définitive, sur cet amendement n° I-171, la commission souhaite de nouveau entendre l'avis du Gouvernement, auquel elle se conformera.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. Jean-François Copé, ministre délégué. En ce qui concerne les cinq premiers amendements, j'émettrai brièvement un avis commun, car je ne souhaite pas trop alourdir le débat : tout comme M. le rapporteur général, j'ai déjà eu plusieurs fois l'occasion de m'exprimer sur cette réforme.

Je rappelle simplement à leurs auteurs que, de toute évidence, nous avons une divergence de fond : à nos yeux, la réforme a été engagée avant tout pour alléger la charge fiscale des entreprises, ce qui nous semble absolument capital dans le contexte économique actuel.

Certaines objections ont été avancées, concernant notamment les risques par rapport aux bases plafonnées. Or l'adoption, l'an dernier, d'un amendement de la commission des finances, que je vous invite à relire si vous ne l'avez pas encore fait, a tout de même permis d'apporter des réponses très significatives. Ainsi, pour ne prendre qu'un seul exemple, les EPCI à taxe professionnelle unique bénéficient d'une atténuation automatique de 20 % du montant de leur participation si le pourcentage des bases plafonnées est supérieur à 50 %.

Pour 90 % des communes, le montant du ticket modérateur à payer sera inférieur à mille euros, ce qui, vous en conviendrez, est extrêmement faible, d'autant que ne sont concernées que des collectivités ayant augmenté leur taux.

Certes, j'ai bien entendu les observations et les propositions d'amodiation dans ce domaine, et je suis prêt à envisager des correctifs en fonction de l'évolution de la situation. Cependant, à ce stade de la réforme, je préfère que nous en restions à sa philosophie générale.

C'est la raison pour laquelle le Gouvernement émet un avis défavorable sur les amendements nos I-82, I-166, I-168, I-169 et I-170.

En ce qui concerne l'amendement n° I-171, monsieur Charasse, je suis sensible à l'intérêt de votre proposition, qui est le fruit d'une longue réflexion : dans votre esprit, il s'agit bien de veiller à ce que les communes et les EPCI qui connaissent des évolutions significatives de leurs bases de taxe professionnelle puissent bénéficier intégralement du système dans certaines conditions.

Je le répète encore une fois, je suis ouvert, par principe, à toutes les propositions, a fortiori lorsqu'elles émanent de personnalités qui, comme vous, connaissent bien le sujet. Je tiens simplement à attirer votre intention sur deux points.

D'une part, sur le fond, la discussion du projet de loi de finances ne me paraît pas être le moment approprié pour ouvrir « la boîte de Pandore » par le biais de l'adoption d'amendements successifs. Je rejoins en cela les propos de M. le rapporteur général : si des modifications doivent être envisagées, la meilleure méthode est d'en discuter lors du collectif budgétaire.

Au demeurant, mesdames, messieurs les sénateurs, que les choses soient claires : il ne s'agit ni de refaire le débat ni de bouleverser la réforme. Tout au plus pouvons-nous envisager d'apporter, à la marge, quelques amodiations. Or tel est bien l'objet d'un projet de loi de finances rectificative.

D'autre part, monsieur le sénateur, si nous suivons la logique que vous proposez dans cet amendement, j'attire votre attention sur les conséquences réelles à en attendre du point de vue de la péréquation, notamment pour les petites communes rurales défavorisées.

Il faut donc étudier ce dispositif de près et, notamment, procéder à certains calculs financiers. C'est la raison pour laquelle je vous propose de reporter cet amendement à la discussion du collectif budgétaire.