Articles additionnels après l'article 1er A
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Article 1er C

Article 1er B

Dans l'avant-dernier alinéa de l'article 18-1 de la même ordonnance, les mots : « le cinquième du nombre des auditeurs issus des concours prévus à l'article 17 et figurant dans la promotion » sont remplacés par les mots : « le tiers de l'effectif total de la promotion de l'École nationale de la magistrature ».

M. le président. L'amendement n° 1, présenté par M. Hyest, au nom de la commission, est ainsi libellé :

Rédiger comme suit cet article :

À l'avant-dernier alinéa de l'article 18-1 de la même ordonnance, le mot : « cinquième » est remplacé par le mot : « tiers ».

La parole est à M. le rapporteur.

M. Jean-Jacques Hyest, rapporteur. L'amendement prévoit un dispositif plus simple et plus lisible pour déterminer le nombre maximal de postes d'auditeurs susceptibles d'être recrutés sur titre.

L'Assemblée nationale a proposé de modifier la base de calcul utilisée pour fixer l'effectif maximal d'auditeurs recrutés sur titre. Actuellement, cette référence est claire puisqu'il s'agit du nombre des auditeurs de justice issus des trois concours d'entrée à l'ENM. Les députés prévoient de mentionner l'effectif total de la promotion de l'ENM, ce qui semble inclure également les auditeurs recrutés sur titre. Cette rédaction prête à ambiguïté, ainsi que l'a souligné le directeur de l'ENM, et pourrait même être interprétée comme créant l'obligation de recruter un tiers d'auditeurs sur titre par promotion.

Il vous est proposé de conserver la référence actuelle à l'effectif des auditeurs recrutés par concours sans pour autant remettre en cause la volonté des députés d'augmenter le plafond des recrutements d'un cinquième à un tiers.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. Pascal Clément, garde des sceaux. Favorable.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 1.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. En conséquence, l'article 1er B est ainsi rédigé.

Article 1er B
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Article additionnel après l'article 1er C

Article 1er C

Le dernier alinéa de l'article 19 de la même ordonnance  est ainsi rédigé :

« Sous réserve des dispositions de l'article 18-2, les auditeurs de justice effectuent, pendant la scolarité à l'École nationale de la magistrature, un stage d'une durée minimale de six mois comme collaborateur d'un avocat inscrit au barreau ou auprès d'un barreau. Leur activité à ce titre est bénévole. »

M. le président. L'amendement n° 2, présenté par M. Hyest, au nom de la commission, est ainsi libellé :

Rédiger comme suit le début du texte proposé par cet article pour le dernier alinéa de l'article 19 de l'ordonnance n° 58-1270 du 22 décembre 1958 portant loi organique relative au statut de la magistrature :

« Sans préjudice de l'avant-dernier alinéa de l'article 18-2,...

La parole est à M. le rapporteur.

M. Jean-Jacques Hyest, rapporteur. Il s'agit d'un amendement de précision.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. Pascal Clément, garde des sceaux. Favorable.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 2.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. L'amendement n° 3, présenté par M. Hyest, au nom de la commission, est ainsi libellé :

Dans la première phrase du texte proposé par cet article pour le dernier alinéa de l'article 19 de l'ordonnance n° 58-1270 du 22 décembre 1958 portant loi organique relative au statut de la magistrature, remplacer le chiffre :

six

par le chiffre :

cinq

La parole est à M. le rapporteur.

M. Jean-Jacques Hyest, rapporteur. Cet amendement vise à réduire de six à cinq mois la durée du stage d'immersion au sein de la profession d'avocat.

Cette réduction s'explique par le souci de ne pas allonger le temps global de la formation initiale, qui s'élève actuellement à trente et un mois.

Il paraît important d'éviter que l'allongement de la durée du stage d'avocat ne retarde l'arrivée des futurs magistrats dans les juridictions, d'autant plus que les départs à la retraite sont nombreux. Il sera peut-être possible d'allonger progressivement cette durée, qui nous paraît déjà largement significative.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. Pascal Clément, garde des sceaux. Je voudrais remercier le président Hyest de cet amendement qui prend en compte à la fois le désir partagé par de nombreux parlementaires ici même et à l'Assemblée nationale d'augmenter la durée du stage d'avocat et la nécessité d'intégrer ce stage dans la scolarité de trente et un mois, afin de ne pas allonger cette scolarité sous peine de décourager un certain nombre de candidats.

Nous l'avions déjà souligné dans le débat, il y a aujourd'hui plutôt moins de candidats à l'ENM qu'auparavant. Une scolarité trop longue pourrait être encore plus décourageante.

M. le président. La parole est à M. Michel Dreyfus-Schmidt, pour explication de vote.

M. Michel Dreyfus-Schmidt. Comme je l'ai fait observer dans la discussion générale sans obtenir de réponse, le stage existait avant la guerre. À cette époque, un avocat était un avocat. Aujourd'hui, ce n'est plus le cas. Des milliers d'avocats ne mettent jamais les pieds au tribunal. Ce sont des conseillers fiscaux qui s'occupent de tout autre chose que de droit, et en particulier de droit pénal.

Allons-nous obliger des magistrats à faire des stages chez ces avocats ? Je ne pense pas que ce soit utile. Mon observation mérite tout de même que l'on s'y arrête. Tel que l'amendement est rédigé, il ne me paraît pas possible de ne pas faire une distinction entre les avocats qui plaident et les nombreux avocats qui ne plaident pas.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 3.

(L'amendement est adopté.)

M. Michel Dreyfus-Schmidt. Et aucune réponse n'a été apportée à la question que j'avais posée !

M. le président. Je mets aux voix l'article 1er C, modifié.

(L'article 1er C est adopté.)

Article 1er C
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Article 1er D

Article additionnel après l'article 1er C

M. le président. L'amendement n° 55, présenté par M. Collombat et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :

Après l'article 1er C, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

L'article 19 de l'ordonnance n° 58-1270 du 22 décembre 1958 précitée est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Les auditeurs de justice effectuent un stage d'un mois au sein d'une commune petite ou moyenne afin de prendre conscience des missions du maire et des conditions dans lesquelles elles sont exercées. »

La parole est à M. Pierre-Yves Collombat.

M. Pierre-Yves Collombat. Cette proposition préconisant l'exécution par les auditeurs de justice d'un stage d'une durée d'un mois dans une collectivité locale de taille moyenne ou petite pourra paraître routinière et superfétatoire. Encore un stage, me direz-vous ! Sauf que la situation et le rôle des maires par rapport à la justice sont tout à fait particuliers.

D'abord, aux termes du projet de loi relatif à la prévention de la délinquance, les maires sont les coordonnateurs des politiques de prévention et de l'action de leurs divers acteurs. Destinataires d'informations sur les troubles à l'ordre public survenus sur le territoire de leur commune et des suites judiciaires qui leur sont données, ils seront amenés à travailler en concertation avec le procureur de la République et le juge des enfants tout particulièrement.

Sauf à considérer qu'il ne s'agit là que de dispositions décoratives, il serait très utile que, durant leur formation, les futurs magistrats puissent acquérir un minimum de connaissances sur la fonction municipale et ses conditions d'exercice.

Ensuite, comme chacun le sait, une politique efficace de lutte contre la récidive passe par l'organisation systématique de la sortie de prison, le pire étant la sortie sèche, sans préparation ni dispositif d'accompagnement.

En ce domaine, les collectivités locales peuvent et devraient jouer un rôle essentiel. Elles peuvent fournir des terrains quasi illimités pour la mise en oeuvre de chantiers de travaux d'intérêt collectif, socialement utiles, valorisés aux yeux de la collectivité et des détenus eux-mêmes, ce qui est essentiel.

Dans le Var, ont été mis en place de tels chantiers de débroussaillement de la forêt et de réhabilitation du patrimoine avec des détenus en fin de peine. Pour vous être rendu sur place, monsieur le garde des sceaux, vous savez qu'ils donnent entière satisfaction ; aussi avez-vous encouragé ce type d'action et son extension à d'autres territoires.

Le développement de ces actions suppose cependant que certaines préventions soient levées de part et d'autre, ce à quoi les stages que nous préconisons peuvent concourir fortement.

Enfin, pour les maires et nonobstant la loi du 10 juillet 2000 due à notre excellent collègue Pierre Fauchon, la question de la responsabilité pénale pour délit non intentionnel n'est toujours pas réglée de manière satisfaisante. Responsables de tout, les maires savent qu'ils seront un jour coupables de quelque chose.

Comme le souligne une étude de la jurisprudence postérieure à la loi du 10 juillet 2000 réalisée par le cabinet Landot pour le compte de l'Association nationale des élus de la montagne, la loi Fauchon a eu comme résultat non pas une meilleure prise en compte par le juge des conditions d'exercice réelles du mandat local, mais... un souci plus grand dans la motivation des décisions.

Je me limiterai à un seul exemple, la condamnation du maire d'une petite commune du sud de la France à la suite d'une électrocution lors d'un bal public. Non seulement le manque de moyens dont disposait le maire n'a pas été retenu à sa décharge, mais il l'a été à charge. Le jugement a été confirmé en cassation.

Pour la cour d'appel, en tant que « maire d'une commune de 870 habitants n'ayant que quatre employés, il se devait d'être d'autant plus présent que sa commune est petite » ! Cela ne s'invente pas et cette phrase signe à elle seule le fossé d'incompréhension actuel entre les magistrats et les élus locaux, fossé que le présent amendement vise à combler, au moins partiellement.

Au total, il y a donc au moins trois raisons majeures de réserver dans la formation des magistrats un moment - un mois, c'est très court - où ils pourront apprécier, directement et par eux-mêmes, les conditions d'exercice de la fonction de maire.

Quant au caractère peut-être réglementaire de cette disposition, que l'on va sans doute m'objecter, je répondrai par avance qu'un stage dans une commune n'est pas une disposition plus réglementaire qu'un stage dans un cabinet d'avocats.

M. le président. Quel est l'avis de la commission sur cet amendement ?

M. Jean-Jacques Hyest, rapporteur. Avec M. Collombat, je me méfie et j'essaye de ne pas faire preuve d'arguments d'autorité ! (Sourires.)

M. Pierre-Yves Collombat. Merci, monsieur le président !

M. Jean-Jacques Hyest, rapporteur. La disposition que vous proposez est en effet de nature réglementaire. L'exception pour le stage d'avocat est tout à fait justifiée, car on estime que ce stage est obligatoire. Si un auditeur de justice veut aller faire un stage dans une petite commune, rien ne l'interdit. Au contraire !

M. Pierre-Yves Collombat. Je veux le rendre obligatoire !

M. Jean-Jacques Hyest, rapporteur. Mais non ! Il faudrait alors faire un stage en entreprise, un dans les services d'un département, un en préfecture pour connaître l'administration, etc. Il y a des stages qui sont bien sûr obligatoires et indispensables comme dans l'administration pénitentiaire, dans un commissariat de police ou dans une brigade de gendarmerie. Mais si on multiplie les stages, la scolarité durera cinquante mois !

En tant que maire d'une petite commune, je ne sais d'ailleurs pas si j'arriverais à occuper un auditeur de justice pendant un mois, à moins que je ne lui fasse balayer les rues ou élaguer les arbres !

M. Jean-Jacques Hyest, rapporteur. En revanche, il me semblerait beaucoup plus profitable d'inciter les magistrats à rencontrer les représentants des maires et à dialoguer avec eux, dans le cadre de la formation continue.

Je vous demande donc de bien vouloir retirer votre amendement, monsieur Collombat. À défaut, la commission émettrait un avis défavorable.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. Pascal Clément, garde des sceaux. Défavorable.

M. le président. La parole est à M. Pierre-Yves Collombat, pour explication de vote.

M. Pierre-Yves Collombat. Je suis non pas surpris, mais un peu déçu par les réponses qui m'ont été apportées. Les arguments que j'ai développés sur plusieurs points sont pourtant assez forts.

Chacun jugera l'attention que le Sénat, qui représente les collectivités territoriales,...

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Cela n'a rien à voir !

M. Pierre-Yves Collombat. ...a portée à ce problème !

M. le président. La parole est à M. Christian Cointat, pour explication de vote.

M. Christian Cointat. La proposition de M. Collombat est intéressante mais, comme l'a indiqué M. le rapporteur, il est de nombreux autres endroits où les magistrats devraient effectuer des stages.

Nous en revenons au point de départ de notre discussion. Pierre Fauchon a soulevé une bonne question avec l'amendement n° 51, celle de la formation sur les choses de la vie du magistrat appelé à juger. Les « choses de la vie », cela couvre tous les domaines, mes chers collègues. Nous devons y réfléchir.

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Qu'ils fassent des gardes d'enfants !

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 55.

(L'amendement n'est pas adopté.)

Article additionnel après l'article 1er C
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Article 1er E

Article 1er D

Dans la dernière phrase du premier alinéa de l'article 21 de la même ordonnance, les mots : « sur les fonctions que cet auditeur lui paraît le mieux à même d'exercer » sont remplacés par les mots : « et, le cas échéant, de réserves sur les fonctions pouvant être exercées par cet auditeur, ».  - (Adopté.)

Article 1er D
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Articles additionnels avant l'article 1er

Article 1er E

Le premier alinéa de l'article 21 de la même ordonnance est complété par une phrase ainsi rédigée :

« Cette recommandation et ces réserves sont versées au dossier du magistrat lors de sa nomination. »

M. le président. Je suis saisi de deux amendements faisant l'objet d'une discussion commune.

L'amendement n° 4, présenté par M. Hyest, au nom de la commission, est ainsi libellé :

Rédiger comme suit le texte proposé par cet article pour compléter l'article 21 de l'ordonnance n° 58-1270 du 22 décembre 1958 portant loi organique relative au statut de la magistrature :

« Lors de la nomination de l'auditeur à son premier poste, cette recommandation, ces réserves et les observations, éventuellement formulées par ce dernier, sont versées à son dossier de magistrat. »

La parole est à M. le rapporteur.

M. Jean-Jacques Hyest, rapporteur. Cet amendement tend à permettre le versement au dossier des magistrats des observations qu'ils auraient formulées en réponse aux recommandations du jury de classement exprimées à la fin de la scolarité.

Dans un souci d'impartialité, il paraît important que figurent également dans le dossier des magistrats visés par ces recommandations et ces réserves les éventuelles observations qu'ils auraient eux-mêmes formulées à ce sujet.

M. le président. L'amendement n° 46, présenté par MM. Badinter, Collombat, Dreyfus-Schmidt, Sueur et Yung, Mme Boumediene-Thiery et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :

Compléter le second alinéa de cet article par une phrase ainsi rédigée :

Cette recommandation et ces réserves doivent être retirées du dossier à l'issue d'un délai de cinq ans.

La parole est à M. Robert Badinter.

M. Robert Badinter. Nous pensons qu'il n'y a pas lieu que les recommandations et les réserves du jury de classement soient conservées dans le dossier du magistrat durant toute sa carrière, même si ces observations sont intéressantes. Ces recommandations pourraient parfaitement être retirées de son dossier à l'issue d'un délai de cinq ans, afin de ne pas fausser l'appréciation que l'on portera sur lui par la suite, car, comme nous tous, le jeune magistrat changera.

M. le président. Quel est l'avis de la commission sur l'amendement n° 46 ?

M. Jean-Jacques Hyest, rapporteur. Le versement au dossier des magistrats des réserves ou des recommandations n'apparaît pas excessivement pénalisant, car le dossier, par nature évolutif, pourra contenir des éléments ultérieurs susceptibles de contrebalancer leur portée.

Vous l'avez dit, monsieur Badinter, la commission des lois apporte aux magistrats une garantie supplémentaire en prévoyant le versement au dossier des observations que l'auditeur formule éventuellement en réponse aux recommandations émises à son encontre

Le dispositif nous paraît équilibré et n'appelle pas de nouvelles modifications. La commission a donc émis un avis défavorable sur cet amendement.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement sur ces deux amendements ?

M. Pascal Clément, garde des sceaux. Le Gouvernement émet un avis favorable sur l'amendement n° 4. Ces éléments ne seront plus versés au dossier de l'auditeur de justice, ils trouveront place dans le dossier du magistrat. M. le rapporteur a eu une excellente idée.

En revanche, le Gouvernement est défavorable à l'amendement n° 46. Il n'y a pas lieu de prévoir le retrait du dossier du magistrat des réserves et des recommandations formulées lors de sa première nomination. Celles-ci constitueront, comme je l'ai indiqué devant l'Assemblée nationale, un élément d'information supplémentaire parmi d'autres, à la disposition de l'autorité de nomination et du CSM.

M. Robert Badinter. Pendant combien de temps ?

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 4.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. En conséquence, l'amendement n° 46 n'a plus d'objet.

Je mets aux voix l'article 1er Est, modifié.

(L'article 1er E est adopté.)

Article 1er E
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Article 1er

Articles additionnels avant l'article 1er

M. le président. L'amendement n° 31, présenté par Mmes Borvo Cohen-Seat,  Assassi,  Mathon-Poinat et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :

Avant l'article 1er, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le 1° du I de l'article 1er de l'ordonnance n° 58-1270 du 22 décembre 1958 portant loi organique relative au statut de la magistrature est complété par les mots : «, après avis du Conseil supérieur de la magistrature ».

La parole est à Mme Nicole Borvo Cohen-Seat.

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Le présent amendement prévoit que les nominations aux emplois de procureurs généraux, décidés en conseil des ministres, seront désormais soumises à un avis préalable du Conseil supérieur de la magistrature.

Si les pouvoirs du Conseil supérieur de la magistrature sont relativement étendus s'agissant des magistrats du siège - ils sont inamovibles et nommés soit sur proposition, soit sur avis conforme du Conseil -, en revanche, ils sont restés particulièrement modestes concernant les magistrats du parquet. Cela explique les multiples controverses qui ne cessent de se développer, comme nous l'avons encore vu récemment.

En effet, les procureurs sont actuellement nommés après un simple avis du Conseil supérieur de la magistrature, ce qui laisse au garde des sceaux toute latitude dans le choix de la hiérarchie du parquet avec laquelle il souhaite travailler.

Quant aux procureurs généraux, ils sont nommés directement en conseil des ministres, sans que le Conseil supérieur de la magistrature puisse donner son avis, serait-il « simple ».

Je rappelle que pour éviter les nominations susceptibles de prêter à controverse ou à discussion, le projet de loi constitutionnelle relatif au Conseil supérieur de la magistrature - débattu en 1998 par le Parlement avant d'être abandonné - prévoyait que toutes les nominations devaient être soumises à l'avis conforme du Conseil supérieur de la magistrature.

Si cette mesure avait été retenue - il est vrai que la majorité sénatoriale de droite y est particulièrement hostile -, elle aurait constitué un progrès par rapport à l'existant, même si le Conseil supérieur de la magistrature ne se voyait toujours pas accorder le pouvoir de proposition pour les parquetiers.

Nous souhaitons aller au bout de cette logique d'indépendance et, en conséquence, aligner les procédures de nomination des magistrats du parquet sur celles qui sont en vigueur pour les magistrats du siège.

Ainsi, en pratique, le fait que le garde des sceaux ait le pouvoir de proposition implique que si une personne n'est jamais proposée, elle pourra n'être jamais nommée. On le constate, l'indépendance de la justice trouve ici ses limites. Il n'y aura pas d'innovation notable ni de changements radicaux dans ces procédures de nomination.

Force est de constater que la grande réforme de la justice que la commission d'enquête parlementaire sur les dysfonctionnements de la justice dans l'affaire d'Outreau a laissé espérer butte sur des oppositions très importantes.

Nous considérons que l'indépendance des magistrats constitue avant tout un droit du justiciable.

En effet, au regard des principes constitutionnels, tels que l'égalité des citoyens devant la loi et la protection des libertés individuelles, l'indépendance des magistrats est la condition essentielle pour garantir le justiciable de toute forme d'injustice ou d'inégalité.

La nomination des magistrats du parquet devrait relever d'un organisme qui ne puisse pas être identifié à un pouvoir politique. Il faudrait alors distinguer le statut fonctionnel et le statut personnel des parquetiers afin de garantir l'équilibre nécessaire entre une politique pénale unitaire sur l'ensemble du territoire et une indépendance permettant aux magistrats du parquet de résister aux pressions du pouvoir exécutif. Leur statut fonctionnel les lierait directement au pouvoir exécutif pour la politique pénale et ses missions d'administration, leur statut personnel, calqué sur celui des magistrats du siège, leur assurerait une autonomie propre face au pouvoir politique.

Compte tenu de la part prépondérante que conservent le Président de la République et le garde des sceaux au sein du Conseil supérieur de la magistrature - ils continuent de participer à ses travaux et de voter -, l'exécutif, on le voit bien, a la mainmise sur le judiciaire. Une récente nomination l'a encore montré.

Il est donc, à notre sens, nécessaire de modifier les dispositions relatives au Conseil supérieur de la magistrature.

Tel est le sens de cet amendement, en attendant une éventuelle réforme.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Jean-Jacques Hyest, rapporteur. La réforme du statut des procureurs généraux ne peut être abordée sans faire l'objet d'un travail approfondi. Cette question dépasse largement le cadre du présent projet de loi organique, qui traite de la responsabilité des magistrats et des moyens permettant de remédier aux dysfonctionnements de l'institution judiciaire.

En outre, le dispositif est incomplet d'un point de vue technique, car les règles de nomination sont actuellement définies dans l'ordonnance n° 58-1136 du 28 novembre 1958 portant loi organique concernant les nominations aux emplois civils et militaires de l'État. Les spécialistes en droit public que sont les anciens étudiants des instituts d'études politiques devraient le savoir...

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. C'est vieux ! (Sourires.)

M. Jean-Jacques Hyest, rapporteur.  Il conviendrait donc de transférer ces règles dans l'ordonnance statutaire du 22 décembre 1958.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. Pascal Clément, garde des sceaux. Défavorable.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 31.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. L'amendement n° 41 rectifié, présenté par Mmes Borvo Cohen-Seat,  Assassi,  Mathon-Poinat et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :

Avant l'article 1er, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

L'article 5 de l'ordonnance n° 58-1270 du 22 décembre 1958 est ainsi rédigé :

« Art. 5 - Les magistrats du parquet sont placés sous la direction et le contrôle de leurs chefs hiérarchiques. À l'audience, leur parole est libre. »

La parole est à Mme Nicole Borvo Cohen-Seat.

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Cet amendement, qui s'inscrit dans la même logique que le précédent, vise à prévoir que les magistrats du parquet ne dépendent plus hiérarchiquement du ministre de la justice.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Jean-Jacques Hyest, rapporteur. La commission émet un avis défavorable sur cet amendement, parce qu'il dépasse largement l'objet du projet de loi organique. De plus, et c'est le moins que l'on puisse dire, cette proposition ne fait pas l'unanimité.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. Pascal Clément, garde des sceaux. Nous avons déjà eu ce débat dans d'autres enceintes : avis défavorable.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 41 rectifié.

(L'amendement n'est pas adopté.)

Articles additionnels avant l'article 1er
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Article 1er bis

Article 1er

L'article 21-1 de la même ordonnance est ainsi modifié :

1° Le sixième alinéa est ainsi rédigé :

« Les candidats admis suivent une formation probatoire organisée par l'École nationale de la magistrature comportant un stage en juridiction effectué selon les modalités prévues à l'article 19. Ils sont rémunérés pendant cette formation. » ;

2° Après le septième alinéa, sont insérés deux alinéas ainsi rédigés :

« Le directeur de l'École nationale de la magistrature établit, sous la forme d'un rapport, le bilan de la formation probatoire de chaque candidat et adresse celui-ci au jury prévu à l'article 21.

« Après un entretien avec le candidat, le jury se prononce sur son aptitude à exercer les fonctions judiciaires. » ;

3° La première phrase du huitième est ainsi rédigée :

« Les candidats déclarés aptes suivent une formation complémentaire, jusqu'à leur nomination, dans les formes prévues à l'article 28, aux emplois pour lesquels ils ont été recrutés. »

M. le président. L'amendement n° 5, présenté par M. Hyest, au nom de la commission, est ainsi libellé :

Dans le  texte proposé par le 3° de cet article pour modifier l'article 21-1 de l'ordonnance n° 58-1270 du 22 décembre 1958 portant loi organique relative au statut de la magistrature, après les mots :

déclarés aptes

insérer les mots :

à exercer les fonctions judiciaires

La parole est à M. le rapporteur.

M. Jean-Jacques Hyest, rapporteur. Il s'agit d'un amendement de précision.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. Pascal Clément, garde des sceaux. Favorable.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 5.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'article 1er, modifié.

(L'article 1er est adopté.)

Article 1er
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Article 1er ter

Article 1er bis

Dans l'article 25 de la même ordonnance, le mot : « cinquième » est remplacé par le mot : « quart ».  - (Adopté.)

Article 1er bis
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Article 2

Article 1er ter

Dans l'article 25-1 de la même ordonnance, le mot : « quinzième » est remplacé par le mot : « dixième ».  - (Adopté.)

Article 1er ter
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Article 2 bis

Article 2

L'article 25-3 de la même ordonnance est ainsi modifié :

1° Le premier alinéa est ainsi rédigé :

« Les candidats à une intégration au titre des articles 22 et 23 suivent, s'ils sont admis, une formation probatoire organisée par l'École nationale de la magistrature comportant notamment un stage en juridiction effectué selon les modalités prévues à l'article 19. » ;

2° Après le premier alinéa, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« La commission prévue à l'article 34 peut, à titre exceptionnel et au vu de l'expérience professionnelle du candidat, le dispenser de la formation probatoire prévue au premier alinéa. » ;

3° Dans le deuxième alinéa, les mots : « Le candidat admis en stage probatoire » sont remplacés par les mots : « Pendant la formation probatoire, le candidat » ;

4° Dans le troisième alinéa, les mots : « du stage » sont remplacés par les mots : « de la formation » ;

5° Dans le dernier alinéa, les mots : « un stage »  sont remplacés par les mots : « une formation ».

M. le président. L'amendement n° 6, présenté par M. Hyest, au nom de la commission, est ainsi libellé :

Dans le texte proposé par le 1° de cet article pour le premier alinéa de l'article 25-3 de l'ordonnance n° 58-1270 du 22 décembre 1958 portant loi organique relative au statut de la magistrature, après les mots :

sont admis

insérer les mots :

par la commission prévue à l'article 34

La parole est à M. le rapporteur.

M. Jean-Jacques Hyest, rapporteur. Le présent amendement vise à combler une lacune du texte adopté par les députés. Pour la clarté du dispositif, il est nécessaire d'y apporter une précision.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. Pascal Clément, garde des sceaux. Favorable.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 6.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. L'amendement n° 7, présenté par M. Hyest, au nom de la commission, est ainsi libellé :

Dans le texte proposé par le 1° de cet article pour le premier alinéa de l'article 25-3 de l'ordonnance n° 58-1270 du 22 décembre 1958 portant loi organique relative au statut de la magistrature, supprimer le mot :

notamment

La parole est à M. le rapporteur.

M. Jean-Jacques Hyest, rapporteur. Cet amendement vise à supprimer l'adverbe « notamment », car il est inutile et sans portée juridique véritable.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. Pascal Clément, garde des sceaux. Favorable.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 7.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. L'amendement n° 8, présenté par M. Hyest, au nom de la commission, est ainsi libellé :

Après  l'avant-dernier alinéa (4°) du texte proposé par cet article pour l'article 25-3 de l'ordonnance n° 58-1270 du 22 décembre 1958 portant loi organique relative au statut de la magistrature, insérer deux alinéas ainsi rédigés :

bis L'avant-dernier alinéa est complété par une phrase ainsi rédigée :

« Toute décision de la commission d'avancement défavorable à l'intégration d'un candidat admis à la formation probatoire visée au premier alinéa est motivée. »

La parole est à M. le rapporteur.

M. Jean-Jacques Hyest, rapporteur. Cet amendement vise à préciser que la décision de la commission d'avancement défavorable à l'intégration directe doit être motivée.

L'ouverture du corps de la magistrature constitue l'un des objectifs prioritaires de la présente réforme. Le présent amendement s'inscrit dans cette perspective et tend à renforcer l'impartialité de la procédure d'instruction des candidatures à l'intégration directe dans le corps judiciaire.

En effet, la motivation des avis de la commission d'avancement chargée de décider de l'intégration du candidat dans le corps judiciaire permettra à celui-ci de savoir ce que l'on attend de lui lors de la formation probatoire.

J'ajoute, monsieur le garde des sceaux, qu'il est important que les corps extérieurs ne fassent pas l'objet de trop nombreux rejets.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. Pascal Clément, garde des sceaux. Le Gouvernement est favorable à cet amendement important qui formalise une pratique de la commission d'avancement. Il doit être rapproché de l'amendement n° 13 rectifié.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 8.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. L'amendement n° 9, présenté par M. Hyest, au nom de la commission, est ainsi libellé :

Rédiger comme suit le 5° de cet article :

5° Après les mots : « sont assurées », la fin du dernier alinéa est ainsi rédigée : «, pendant leur formation probatoire, la rémunération et la protection sociale des candidats ».

La parole est à M. le rapporteur.

M. Jean-Jacques Hyest, rapporteur. C'est un amendement d'amélioration rédactionnelle.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. Pascal Clément, garde des sceaux. Favorable.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 9.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'article 2, modifié.

(L'article 2 est adopté.)