M. Robert del Picchia. Je vous ai bien écouté, monsieur le secrétaire d'État. Ce n'est pas la première fois que j'entends un ministre parler ainsi : les ministres passent, et j'entends toujours les mêmes propos. Comme l'a rappelé Monique Cerisier-ben Guiga, plusieurs réunions de sénateurs ont eu lieu, auxquelles ont participé, entre autres, Mme Brisepierre et M. Cantegrit. Il y en a eu suffisamment, me semble-t-il, et il faut maintenant aller plus loin !

Je veux bien que l'on se préoccupe de l'aspect technique du paiement des retraites, mais je ne pense pas qu'une nouvelle réunion permettrait de progresser en la matière.

Maintenant, les choses sont claires. ! Un audit a été réalisé par un grand institut international, sur la demande du ministère des affaires étrangères, qui dispose de tous les chiffres. S'agissant du Congo, vous pouvez donc agir tout de suite.

Vous dites que l'on ne signera pas le DCP tant qu'un accord ne sera pas intervenu. Je préfèrerais entendre que vous ne verserez rien au Congo tant que la question ne sera pas réglée.

M. Michel Charasse, rapporteur spécial. On ne peut rien verser tant que ce n'est pas signé !

M. Robert del Picchia. Le DCP prévoit 81 millions d'euros.

Cela dure depuis tellement longtemps ! Le seul moyen est de dire, comme votre prédécesseur l'a fait avec le Cameroun, monsieur le secrétaire d'État : nous n'envoyons pas le chèque tant que les retraites ne sont pas payées. Quatre semaines après cet avertissement, les retraites étaient payées ! Il faut utiliser les mêmes arguments. Je vous renvoie notamment à un discours du Président de la République.

Nous devons être beaucoup plus fermes ! Si vous me donnez cette assurance, monsieur le secrétaire d'État, je veux bien retirer cet amendement.

M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'État.

M. Jean-Marie Bockel, secrétaire d'État. Monsieur le sénateur, il n'y aura pas de nouveau programme tant que ce problème ne sera pas réglé ! Pour autant, les affaires en cours sur le terrain ne seront pas suspendues ; nous n'irons pas à l'encontre de l'éthique que nous partageons. Je ne parle même pas de la signature du DCP !

M. le président. La réponse de M. le secrétaire d'État vous satisfait-elle, monsieur del Picchia ?

M. Robert del Picchia. Oui, monsieur le président. Je retire donc mon amendement.

M. le président. L'amendement n° II-64 est retiré.

M. Michel Charasse, rapporteur spécial. Cela veut dire : pas de nouvel engagement. Si des programmes sont prévus lors d'une nouvelle réunion de l'Agence française du développement ou du fonds spécial FSP, ils sont renvoyés à la séance ultérieure tant que l'affaire n'est pas réglée.

M. Jean-Marie Bockel, secrétaire d'État. Oui !

M. le président. L'amendement n° II-35, présenté par M. Charasse, au nom de la commission des finances, est ainsi libellé :

Modifier comme suit les crédits des programmes :

(en euros)

Programmes

Autorisations d'engagement

Crédits de paiement

 

+

-

+

-

Aide économique et financière au développement

 

 

 

 

Solidarité à l'égard des pays en développementDont Titre 2

 

1.440.660

1.440.660

 

1.440.660

1.440.660

Codéveloppement

1.440.660

 

1.440.660

 

TOTAL

1.440.660

1.440.660

1.440.660

1.440.660

SOLDE

0

0

La parole est à M. le rapporteur spécial.

M. Michel Charasse, rapporteur spécial. Cet amendement vise à réduire de 1 440 660 euros les autorisations d'engagement au titre de la solidarité à l'égard des pays en développement pour les basculer sur le codéveloppement.

Il s'agit de diminuer les moyens de la Direction générale de la coopération internationale et du développement, la DGCID, qui emploie, en 2007, 485 emplois équivalents temps plein, dont plus des deux tiers sont imputés sur le programme 209 de la mission APD.

L'évolution de l'aide publique au développement française, désormais confiée de manière croissante aux services de coopération et d'action culturelle, les SCAC, dans les ambassades, et à des opérateurs extérieurs au ministère, au premier rang desquels figurent l'AFD, Egide et CulturesFrance, plaide clairement en faveur d'un recentrage de cette direction générale sur des fonctions d'état-major, de pilotage et de coordination des nombreux intervenants.

J'ai souvent décrit, dans le passé, la DGCID comme un monstre ingérable, malgré ou à cause de la réforme de la coopération en 1998, qui n'a pas calibré comme il le fallait - et Charles Josselin s'en rappelle - cette direction énorme, très difficilement gouvernable, quelle que soit, d'ailleurs, la qualité de ceux qui ont été nommés à sa tête, et qui est souvent très grande : je pense, notamment, à M. François Nicoulaud.

Or moins du quart des actions financées sur le programme 209, en 2008, sont ainsi directement conduites par la DGCID, le solde étant « délégué » aux organismes multilatéraux, aux opérateurs LOLF et à l'AFD. Cela fait donc cher pour une si faible part.

Si l'on tient compte des crédits délégués au réseau, la part des actions conduites par la DGCID stricto sensu est en réalité très réduite. Elle repose essentiellement sur les projets FSP mobilisateurs, quelques programmes de bourse et les subventions octroyées par la mission d'appui à l'action internationale des ONG. L'aide d'urgence de la délégation à l'action humanitaire n'est même pas intégrée à la DGCID.

Si la création opportune, en 2006, d'un bureau de la tutelle des opérateurs et du contrôle, au sein du service des moyens et du réseau, répondait à une réelle nécessité, la DGCID ne dispose pas encore d'effectifs cohérents avec cette vocation, calibrés et adaptés au caractère assez restreint de sa mission. En outre, les bureaux géographiques de la Direction des politiques du développement tendent à doublonner les directions et sous-directions régionales du Quai d'Orsay.

Vous avez, d'un côté, les directions du Quai d'Orsay - Asie, Moyen-Orient, Afrique, etc - et, de l'autre, les mêmes sous-directions, ou à peu près, à la DGCID. On ne va pas nous faire croire que ces services ne peuvent pas se parler, se rapprocher et essayer de mutualiser leurs actions et leurs attributions !

Cet amendement prévoit donc une réduction de 20 emplois équivalents temps plein au sein de la DGCID, afin d'initier le mouvement de mutation de cette direction en une administration « de mission », comme va bientôt le réclamer la RGPP en cours, qui sera sans doute beaucoup plus sévère que la commission des finances

Cet amendement va de pair avec celui qui a été présenté par notre collègue Adrien Gouteyron et adopté par la commission des finances au titre des crédits du budget des affaires étrangères que le Sénat examinera samedi matin. Ces 20 emplois représentent seulement 6 % des emplois de la DGCID financés sur le programme 209. On est donc loin de l'objectif de non-remplacement d'un fonctionnaire sur trois.

Cet amendement vertueux va dans le sens de la réforme de l'État. Il est extrêmement modéré et vise à inciter fortement la DGCID à se réformer.

L'heure étant tardive et M. Karoutchi pressé d'en finir, je n'insisterai pas davantage. Mais, tout de même, lorsque l'on regarde l'organigramme de la DGCID et que l'on voit que le bureau de la mobilité étudiante représente onze emplois à plein temps, on se demande ce qu'ils font et à quoi cela sert ! Quant au bureau des questions européennes, il compte cinq emplois. Comme si, monsieur Jouyet, aucun autre service, en dehors de la DGCID, ne traitait des questions européennes !

Soyons raisonnables, ce n'est pas la mort du petit cheval !

Nous renforçons, en outre, les crédits du codéveloppement, car nous avons compris qu'ils sont certainement beaucoup plus utiles et efficaces sur le terrain.

M. Brice Hortefeux, ministre. Très bien !

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. Jean-Marie Bockel, secrétaire d'État. J'ai expliqué très clairement ma position dans la perspective de la révision générale des politiques publiques : j'ai dit pratiquement mot pour mot ce qu'a rappelé Michel Charasse, au début de son propos, sur l'intérêt de concentrer la DGCID sur ses missions stratégiques.

Ce n'est pas un débat facile, et vous pouvez imaginer les tensions et les craintes que suscite chaque changement. Vous pourrez le constater lors de la définition de la mise en oeuvre de cette révision générale : nous sommes engagés dans une démarche qui ira très loin dans ce domaine.

Si nous perturbons aujourd'hui cette démarche en faisant des propositions, certes intéressantes et astucieuses, mais qui peuvent avoir l'effet inverse de celui que nous souhaitons, nous risquons de susciter, alors que cette réforme n'est ni mise en oeuvre ni même organisée, une tension susceptible d'être utilisée pour bloquer toute réforme. Cela ne nous rendra pas service en termes de méthode, bien que je comprenne l'objectif poursuivi.

La question n'est pas de soutenir les actions de codéveloppement ; j'ai dit tout le bien que j'en pensais. Le jour où les crédits alloués, d'un commun accord, auront été consommés de telle manière qu'il faudra les revoir à la hausse, je serai le premier, et Brice Hortefeux le sait, à soutenir cette démarche. Mais nous n'en sommes pas là. Il s'agit, en l'occurrence, d'une question de méthode.

Comme vous l'avez dit, monsieur Charasse, nous avons les mêmes objectifs. Mais, au niveau de la RGPP, les mesures que nous prendrons iront plus loin que celles que vous proposez. Dans ces conditions, votre amendement ne nous facilite pas la tâche. C'est la raison pour laquelle j'émets, au nom du Gouvernement, un avis défavorable.

M. le président. La parole est à M. Charles Josselin, pour explication de vote.

M. Charles Josselin. Je souhaite à mon tour exprimer les réserves que m'inspire l'amendement de Michel Charasse.

J'ai compris qu'il lui était difficile de le retirer. C'est justement en me plaçant dans l'hypothèse où il ne le ferait pas que je souhaite expliquer les raisons de mon opposition.

Tout d'abord, et cela vient d'être dit, cet amendement me paraît prématuré. Le Quai d'Orsay bruisse de projets de réorganisation et de restructuration considérables.

Chacun s'attend, au mois de mars ou un peu plus tard, au vu de la révision générale des politiques publiques, que de grands mouvements soient organisés, dont je ne préjuge ni l'importance ni la qualité. Ce sera certainement le cas au Quai d'Orsay.

Or, avant même que soient rendues les conclusions de la RGPP, on nous dit qu'il faut supprimer vingt emplois à la DGCID !

M. Michel Charasse, rapporteur spécial. Vingt plus dix !

M. Charles Josselin. Disons trente en tout !

Quant aux intervenants extérieurs, notamment l'AFD, ils sont montés en puissance.

Pour autant, n'utilisons pas des arguments comme celui du bureau des actions européennes ! À qui fera-t-on croire que la DGCID, en particulier dans le cadre de ses actions de développement, n'entretient pas, à coté de la Direction des affaires européennes, de relations spécifiques avec l'Europe ? Cette relation est nécessaire dans nombre de dossiers, comme le Fonds européen de développement ou les accords APE.

J'ai eu l'occasion, dans le passé, de regretter que le couloir de la DCE, la Direction de la coopération européenne, soit un passage obligatoire pour établir une relation entre l'administration française et la Direction du développement, à Bruxelles.

Aujourd'hui, les choses vont mieux et une relation directe est possible. Tant mieux ! C'est indispensable, car cette situation nous affaiblit par rapport à nos partenaires britanniques : leurs organisations de développement ont une relation directe avec le commissaire européen au développement.

Je suis opposé à cet amendement pour toutes ces raisons, mais aussi en raison de l'objectif affiché.

Monsieur le ministre de l'immigration, de l'identité nationale - j'oublie toujours le troisième  « i » - et du codéveloppement, j'ai entendu M. Sarkozy dire aux forces de l'ordre, ce matin - je suis très attentif aux propos du Président de la République -, que vous étiez, mais peut-être était-ce un lapsus, « le ministre de l'immigration, de l'identité nationale et de la coopération ».

M. Brice Hortefeux, ministre. Il a dit cela ? (Sourires.)

M. Charles Josselin. Oui, il l'a dit ! Je voulais l'annoncer avec tristesse à Jean-Marie Bockel, mais peut-être déjà féliciter Brice Hortefeux...

Je ne sais pas ce qui se passera au mois de mars, mais je suis de ceux qui ont encore du mal à faire le lien entre politique migratoire et politique du développement, ...

M. Brice Hortefeux, ministre. C'est une nouveauté, et la nouveauté fait parfois peur !

M. Charles Josselin. ... car elles ne correspondent pas à la même horloge : d'un côté, des milliers de personnes sont concernées par les politiques migratoires, tandis que, de l'autre, les aides au retour ne concernent toujours que quelques cas isolés.

Dans ce domaine, comme dans d'autres, c'est à l'usage que je verrai le résultat de ces politiques, et en particulier celui des accords de gestion concertée des flux migratoires et de codéveloppement, dont certains viennent d'être signés ; mais il est encore trop tôt pour en mesurer les conséquences concrètes.

M. Brice Hortefeux, ministre. Ils sont été signés hier !

M. Charles Josselin. J'invite d'ailleurs nos rapporteurs à suivre avec un soin extrême l'application de ces accords et à être attentifs aux résultats qu'ils vont produire, notamment sur le plan des flux migratoires et plus encore celui du développement.

Mais je reviens à mon argumentation de départ, qui me conduit à craindre, au moment présent, l'inopportunité de la mesure et à regretter le caractère probablement un peu trop rapide de la proposition de Michel Charasse, qui, sur beaucoup de dossiers, comme j'aurai l'occasion de le redire dans un instant à propos d'un autre amendement, est plus radical que socialiste... (Sourires.)

M. Philippe Marini, rapporteur général. Ne croyez pas cela !

M. le président. La parole est à M. le président de la commission des finances.

M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. Je voudrais rassurer Charles Josselin : c'est au terme d'une très longue discussion en commission des finances que Michel Charasse a emporté la conviction de la majorité d'entre nous.

Nous considérons que la réforme de l'État est à l'oeuvre, qu'elle est difficile et que c'est aussi la responsabilité du Parlement que d'aider les ministres à mettre leurs services, leurs administrations sous tension.

C'est dans cet esprit très constructif, très positif, que la commission s'est résolue à adopter cet amendement portant suppression de vingt emplois à la DGCID.

J'ajoute que cet amendement est le fruit d'une longue réflexion. Michel Charasse ne s'est pas, en effet, saisi hier du dossier : il rapporte, avec opiniâtreté, depuis des années, les crédits de cette mission, dont il a une large connaissance.

Michel Charasse a, je le disais, emporté notre conviction et, tout en y étant très attentifs, nous ne pouvons nous rendre aux arguments développés par notre ancien collègue Jean-Marie Bockel.

Ce faisant, je crois, monsieur le secrétaire d'État, que nous vous rendons service en créant l'un de ces petits électrochocs dont les administrations ont peut-être parfois besoin.

C'est la raison pour laquelle il me semble judicieux de maintenir cet amendement, que j'invite le Sénat à voter.

M. le président. La parole est à Mme Catherine Tasca, pour explication de vote.

Mme Catherine Tasca. J'irai dans le sens de M. Bockel, que j'encourage à maintenir sa position de réserve à l'égard de l'amendement n  II-35.

Je m'étonne d'ailleurs que cet amendement provienne de la commission des finances, dont on sait qu'elle a toujours une approche stratégique du budget. S'efforçant d'avoir une vision globale, elle tend à prendre les problèmes de haut, et il est curieux qu'elle présente des amendements qui, au total, portent sur trente emplois à temps plein.

M. Philippe Marini, rapporteur général. Si vous avez plus à proposer, n'hésitez pas !

Mme Catherine Tasca. Au contraire ! Mais je vous fais confiance pour faire plus...

Quoi qu'il en soit, je suis étonnée que la commission des finances se livre à un tel travail de broderie et je cherche donc à savoir pour quelles raisons elle emprunte cette voie.

Pour ma part, je rejoins tout à fait les propos de Charles Josselin : cette mesure me paraît très inopportune.

D'abord, il y a l'annonce, à l'issue de la RGPP, d'une réforme de l'État. Fort bien ! Mais ce qui nous importe, à nous partenaires, c'est de comprendre le sens de cette réforme. À l'heure qu'il est, à moins que le Gouvernement n'ait consigné les résultats dans ses tiroirs et ne sache déjà quels changements il va mettre en oeuvre - ce qui signifierait que nous sommes ici dans un jeu d'ombres -, le sérieux voudrait qu'on laisse la démarche se développer avant de déduire quels services de l'État devront voir leur organisation révisée...

M. Jean-Marie Bockel, secrétaire d'État. Absolument !

Mme Catherine Tasca. ...et, évidemment, la DGCID sera alors concernée.

En revanche, une mesure ponctuelle comme celle-ci ne peut être qu'incompréhensible pour les services, mais ce n'est pas le plus grave...

M. Michel Charasse, rapporteur spécial. Ce n'est pas notre problème : nous ne sommes pas au service des services !

Mme Catherine Tasca. C'est aussi notre problème, monsieur le rapporteur spécial, car si nous ne sommes pas au service des services, nous devons avoir le souci de la lisibilité des réformes des services par les parlementaires, par les citoyens et, accessoirement, par les services eux-mêmes.

De ce point de vue, cette proposition me paraît absolument injuste.

Et puisque mon collègue et ami Charles Josselin, en citant une petite anecdote, a déjà mis les pieds dans le plat, je ne vais pas hésiter à en faire autant. Une autre question relative à l'organisation des services de l'État ne semble pas avoir été tranchée : quels domaines relèveront demain - ou après-demain - de la politique étrangère et du ministère des affaires étrangères, quels autres relèveront du nouveau ministère de l'immigration, de l'intégration, de l'identité nationale et du codéveloppement ?

Cette proposition laisse en effet présager un transfert plus important des compétences. J'estime que c'est mettre la charrue avant les boeufs. Un tel transfert méritera, dans son principe, un vrai débat au Parlement : le Gouvernement devra, lorsqu'il aura tiré ses propres conclusions de la RGPP, venir, en responsable, exposer ses projets devant celui-ci. En tout cas, ce n'est pas à l'occasion de l'examen de ces crédits et d'une mesure, je le répète, assez peu compréhensible que l'on doit bloquer l'avenir alors même que l'on ne sait pas encore dans quel sens l'on souhaite aller.

M. Charles Josselin. Très bien !

M. le président. La parole est à M. le rapporteur spécial.

M. Michel Charasse, rapporteur spécial. Sans vouloir prolonger indéfiniment la discussion, je tiens à dire que, dans cette affaire, je m'insère dans une logique que, dans sa majorité, la commission des finances a décidé d'appliquer et que je le fais loyalement ; je le fais aussi avec conviction lorsque je suis convaincu, et il se trouve que je le suis.

Mes chers collègues, nous ne détournons pas les crédits : nous proposons de les donner aux pays pauvres en supprimant des dépenses administratives qui nous paraissent superflues au sein de cette énorme direction qu'est la DGCID.

Mme Catherine Tasca. Mais non ! Il faut arrêter de dire cela !

M. Michel Charasse, rapporteur spécial. Je veux bien que l'on me dise tout ce qu'on voudra, mais il faudra que l'on m'explique à quoi servent le bureau des questions européennes, qui emploie cinq personnes, et le bureau Europe occidentale et communautaire, qui en emploie encore cinq autres, et que l'on m'explique aussi à quoi servent les vingt-huit personnes en poste dans les sous-directions de la DGCID : Europe continentale, Afrique du Nord...

M. Philippe Marini, rapporteur général. C'est un quai d'Orsay bis !

M. Michel Charasse, rapporteur spécial. Charles Josselin connaît très bien ce ministère ! Il sait qu'il y a au Quai des directions sectorielles - direction Amérique, direction Asie... - et que la DGCID a ses propres sous-directions identiques. Pour faire quoi ?...

M. Charles Josselin. Elles ne font pas le même travail !

Mme Catherine Tasca. C'est l'image culturelle et scientifique de la France !

M. Michel Charasse, rapporteur spécial. Par conséquent, la commission des finances propose la suppression de vingt emplois à la DGCID et elle proposera de même, avec M. Gouteyron, la suppression de dix postes dans le budget des affaires étrangères, ce qui fera trente en tout, afin de transférer sur l'aide au développement des crédits qui financeront des projets pour les pauvres. Mes chers collègues, vous n'avez donc qu'à choisir entre les bureaux et les pauvres !

M. Philippe Marini, rapporteur général. Très bien !

Mme Catherine Tasca. Ce n'est pas cela le codéveloppement !

M. le président. La parole est à M. le président de la commission des finances.

M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. Madame Tasca, nous ne voyons pas les problèmes d'en haut...

Mme Catherine Tasca. Avec hauteur...

M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. C'est justement lorsqu'on les voit avec une certaine hauteur que l'on finit par ne rien décider. Trop souvent, nos discussions budgétaires étaient tellement générales qu'en définitive nous ne changions rien.

La seconde mission naturelle du Parlement est sans doute le contrôle sur place et sur pièces, et c'est parce qu'ils sont allés au contact des réalités que les rapporteurs spéciaux peuvent avoir des convictions, qu'ils tentent alors de faire partager à la commission des finances, laquelle essaie ensuite de les faire partager au Sénat.

Nous nous efforçons, madame Tasca, de tendre vers le terrain et la réalité humaine.

M. le président. La parole est à Mme Monique Cerisier-ben Guiga, pour explication de vote.

Mme Monique Cerisier-ben Guiga. Je tiens à dire d'abord que, si nous ne sommes pas au service des services, nous avons le devoir de les respecter.

La tension est déjà extrême dans les services. La DGCID est complètement dégarnie...

M. Michel Charasse, rapporteur spécial. Avec 485 emplois ?...

Mme Monique Cerisier-ben Guiga. ...et, dans un certain nombre de secteurs, elle a beaucoup de mal à réaliser les tâches qui lui sont confiées.

Ensuite, j'ai le souvenir qu'après que nous avons supprimé les directions géographiques il a fallu les reconstituer parce que, dans les postes, on ne savait plus à qui s'adresser ; il n'y avait plus d'interlocuteur.

Prétendre que 300 agents sont en nombre excessif quand il s'agit de gérer trois programmes de la LOLF, d'assurer la coordination avec la DRH sur les personnels, d'évaluer les actions de coopération bilatérale, de réaliser la coordination géographique - qui est indispensable -, d'orienter la politique française de développement dans tous les secteurs d'intervention, d'impulser la coopération pour la gouvernance, de coordonner nos actions avec les organisations européennes et multilatérales est inacceptable. Une fois de plus, il s'agit de dégarnir un ministère des affaires étrangères qui n'y peut mais !

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° II-35.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. L'amendement n° II-34, présenté par M. Charasse, au nom de la commission des finances, est ainsi libellé :

Modifier comme suit les crédits des programmes :

(en euros)

Programmes

Autorisations d'engagement

Crédits de paiement

 

+

-

+

-

Aide économique et financière au développement

 

1.000.000

 

1.000.000

Solidarité à l'égard des pays en développementDont Titre 2

1.000.000

 

1.000.000

 

Codéveloppement

 

 

 

 

TOTAL

1.000.000

1.000.000

1.000.000

1.000.000

SOLDE

0

 

La parole est à M. le rapporteur spécial.

M. Michel Charasse, rapporteur spécial. J'espère que cet amendement suscitera moins de controverse que le précédent !

Il vise le groupement d'intérêt public, ou GIP, « assistance au développement des échanges en technologies économiques et financières », dit ADETEF.

L'ADETEF relève du ministère de l'économie, des finances et de l'emploi, et assure, pour faire simple, la gestion des coopérants en même temps qu'un organisme qui, lui, relève du quai d'Orsay et s'appelle FCI, ou France coopération internationale.

Il s'agit de réduire de 1 million d'euros les crédits alloués à l'ADETEF, qui est l'unique « opérateur LOLF » du ministère de l'économie, des finances et de l'emploi pour renforcer la dotation « solidarité à l'égard des pays en développement », c'est-à-dire le budget de M. Bockel.

L'ADETEF bénéficie en effet en 2008 de la reconduction d'une subvention de fonctionnement de 4,2 millions d'euros, imputée sur l'action 2 du programme 110, sans compter la valorisation des avantages en nature - personnel mis à disposition, locaux, informatique, etc. - pour 2,66 millions d'euros.

Aucun équivalent temps plein relevant du plafond d'emploi du ministère n'est financé sur le programme, mais il est prévu que soixante-quinze emplois hors plafond soient rémunérés par l'ADETEF en 2008.

Cette association déploie une importante activité de coopération dans les pays émergents et son budget prévisionnel en 2007 s'élève à 17,98 millions d'euros.

Le GIP bénéficie cependant d'un montant nettement supérieur de ressources, montant évalué à 21 millions d'euros en incluant les avantages en nature.

Il en résulte, mes chers collègues, une réelle aisance financière, qui témoigne des succès remportés par l'ADETEF dans plusieurs appels d'offres, en particulier auprès de l'Union européenne.

Dans ces conditions, se pose la question du maintien à un haut niveau de la subvention de l'État, qui, à l'évidence, ne se justifie pas.

Le GIP a vocation à s'autofinancer à terme, comme c'est le cas pour le GIP France coopération internationale, qui a été créé beaucoup plus récemment, qui n'atteint pas encore le même volume d'affaires et dont le ministère des affaires étrangères réduit d'ores et déjà la subvention, qui passe de 500 000 euros en 2007 à 300 000 euros en 2008.

Celui de ces deux organismes qui est dans le « nid » de Bercy voit donc la subvention qu'il reçoit s'accroître alors qu'il n'en a manifestement pas besoin, tandis que celui qui est au quai d'Orsay, qui, lui, peut en avoir besoin, voit sa subvention diminuer !

La commission des finances en a déduit qu'il était possible, sans aucun inconvénient, de réduire la subvention de l'ADETEF à hauteur de 1 000 000 euros, par parallélisme avec FCI.

J'ajoute, cher Charles Josselin, que si l'on appliquait les mêmes critères à FCI, organisme que vous connaissez bien, le niveau actuel de sa subvention devrait être neuf fois plus élevé.

M. Charles Josselin. Eh bien, allons-y !

M. Michel Charasse. Autrement dit, selon que vous relevez du ministère de l'économie ou du quai d'Orsay, « selon que vous serez puissant ou misérable, les jugements... »

Surtout, mes chers collègues, j'appelle votre attention sur le fait que, contrairement à ce qui se passe dans nos relations avec les autres ministères, qu'il s'agisse des affaires étrangères ou du codéveloppement, pour ce qui concerne cette partie du budget consacrée à l'aide au développement, je n'ai jamais pu obtenir du ministère de l'économie, des finances et de l'emploi les renseignements que j'avais demandés - et j'ai pourtant répété mes demandes pendant des mois - sur l'ADETEF : renseignements sur les exercices passés et sur l'exercice actuel, sur les crédits de fonctionnement, sur les crédits d'investissement, sur le fonds de roulement, bref, des renseignements tout à fait « basiques » qu'un rapporteur budgétaire a le droit et le devoir de connaître et que c'est même son rôle de connaître s'il est le rapporteur spécial.

Cette rétention d'informations alliée à la volonté absolue de surdoter cette association alors que France coopération internationale, au Quai d'Orsay, est traitée d'une façon beaucoup plus sévère, a paru intolérable à la commission des finances, qui vous propose de réduire la subvention en question de 1 million d'euros. L'ADEFEF en aura encore suffisamment et ce transfert permettra de renforcer les crédits alloués aux pays pauvres.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. Jean-Marie Bockel, secrétaire d'État. L'ADETEF a besoin d'une subvention de l'État. En effet, toutes ses dépenses ne peuvent être couvertes par l'activité commerciale, laquelle se réduira si la subvention de l'État diminue. (M le rapporteur spécial fait un signe dubitatif.)

Les excédents de l'ADETEF sont indispensables à sa croissance. Certes, un léger excédent a été constaté en 2007, de 430 000 euros et non pas de 1 million d'euros, mais la croissance de l'activité de l'ADETEF doit impérativement être accompagnée par une croissance du fonds de roulement.

L'ADETEF doit fournir des cautionnements pour mettre en oeuvre les missions. En cas de non-succès de la mission, une pénalité financière est appliquée et l'ADETEF doit provisionner.

La subvention est une dépense publique qui finance un produit d'appel, c'est-à-dire des prestations financées par l'État garantissant la visibilité de l'expertise française sur la scène internationale. Grâce à ces prestations, des appels d'offres sont gagnés et l'activité commerciale se développe.

Vous pouvez réduire la subvention, mais vous feriez alors le choix d'entraver le développement de l'activité commerciale de l'ADETEF, qui est essentielle.

C'est la raison pour laquelle le Gouvernement est défavorable à cet amendement.

M. le président. La parole est à M. le rapporteur spécial.

M. Michel Charasse, rapporteur spécial. J'ai écouté M. le secrétaire d'État avec beaucoup d'attention, mais je voudrais redire que les ressources non budgétaires de l'ADETEF augmentent avec le volume de ses activités commerciales. Il n'est donc pas logique de continuer à lui servir une subvention en augmentation, alors que l'Association n'en a pas vraiment besoin.

En revanche, monsieur le secrétaire d'État, si l'ADETEF requiert une dotation en capital, il faut la financer correctement. Or le financement que vous envisagez grâce à cette subvention est irrégulier. Raison de plus pour supprimer un million d'euros !

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° II-34.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. L'amendement n° II-36, présenté par M. Charasse, au nom de la commission des finances, est ainsi libellé :

Modifier comme suit les crédits des programmes :

(en euros)

Programmes

Autorisations d'engagement

Crédits de paiement

 

+

-

+

-

Aide économique et financière au développement

 

 

 

 

Solidarité à l'égard des pays en développementDont Titre 2

 

620.000

 

620.000

Codéveloppement

620.000

 

620.000

 

TOTAL

620.000

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SOLDE

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La parole est à M. le rapporteur spécial.

M. Michel Charasse, rapporteur spécial. Cet amendement vise à supprimer un crédit de 620 000 euros du programme « Solidarité à l'égard des pays en développement » pour basculer la même somme sur le programme 301 « Codéveloppement ».

Il s'agit purement et simplement de supprimer les crédits du Haut Conseil de la coopération internationale, dont la commission des finances ignore toujours l'utilité.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. Jean-Marie Bockel, secrétaire d'État. Le point d'accord que nous avons avec l'interpellation un peu provocatrice...

M. Jean-Marie Bockel, secrétaire d'État. ...radicale, effectivement, sur la suppression du HCCI, est que nous devons nous demander régulièrement, au-delà même de la RGPP, comment améliorer le fonctionnement de ce Haut Conseil.

En revanche, le faire disparaître sans autre forme de procès en supprimant son budget, pose un certain nombre de questions.

Il a d'ailleurs été dirigé jusque très récemment par l'un des sages du Sénat que nous avons tous beaucoup apprécié, le regretté Jacques Pelletier.

Pour avoir souvent été en relation avec Ce Haut Conseil, je peux témoigner des services qu'il a rendus et, disons-le, de l'utilisation insuffisante que nous avons pu faire de ses avis.

Il doit certainement évoluer, tenir compte d'un certain nombre de critiques, mais la méthode que vous proposez n'est pas forcément la meilleure.

Il faudrait engager une concertation avec tous les partenaires : les ONG, le secteur privé, les entreprises, les élus.

L'adoption d'un amendement de suppression de crédits ne me semble pas être le meilleur moyen de faire progresser cette instance.

Je peux entendre un certain nombre de critiques, mais je ne suis pas favorable à cet amendement.

M. le président. La parole est à M. Charles Josselin, pour explication de vote.

M. Charles Josselin. Jacques Pelletier présidait cet organisme depuis cinq ans, jusqu'au 3 septembre dernier, lorsqu'il a eu la fâcheuse idée de nous quitter. S'il était vivant, je ne suis pas certain que la commission des finances aurait fait cette proposition.

La manière de présenter le dossier me gêne beaucoup. Vous parlez, monsieur le rapporteur spécial, de 620 000 euros de crédits, alors que les frais de fonctionnement du HCCI représentent 61 000 euros ; le reste concerne des actions conduites en application de ses missions.

M. Michel Charasse, rapporteur spécial. Et des voyages !

M. Charles Josselin. Mais non, très peu de voyages ; je peux en témoigner ! C'est trop facile !

M. Jean-Marie Bockel, secrétaire d'État. En la matière, il faut bien voyager !