Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. Luc Chatel, secrétaire d'État. Monsieur Billout, le Gouvernement a pris la décision de mener à bien l'opération de fusion entre GDF et Suez en recentrant les activités du groupe sur l'énergie.

Le nouveau groupe sera l'un des plus grands acteurs multiénergies sur les plans européen et mondial, pour le plus grand bénéfice de la sécurité d'approvisionnement du territoire, et au meilleur prix.

Avant de prendre cette décision, le Gouvernement a examiné de manière approfondie l'ensemble des solutions envisageables. Toutes les options concernant l'avenir de GDF ont été examinées. Parmi celles-ci, figurait celle d'une fusion entre GDF et EDF. Le Gouvernement a décidé d'écarter cette option parce qu'elle n'aurait pu être acceptée par la Commission européenne qu'au prix d'un démantèlement des deux entreprises, et probablement du parc nucléaire français. Il n'était pas envisageable que le Gouvernement accepte de telles contreparties.

Je voudrais également rappeler que le projet de fusion GDF-Suez ne remet pas en cause les dispositions de la loi relative à la fixation des tarifs réglementés de vente et de gaz. L'État continuera de fixer ces tarifs après avis de la Commission de régulation de l'énergie. Par ailleurs, je rappelle à M. Billout que l'obligation de séparation juridique des gestionnaires de réseaux de transport et de distribution des entreprises exerçant des activités de nature concurrentielle résulte des directives européennes de 2003.

Le Gouvernement émet donc un avis défavorable sur l'amendement n° 5.

Mme la présidente. La parole est à M. Gérard Longuet, pour explication de vote.

M. Gérard Longuet. Même si je n'ai pas l'intention de voter cet amendement, je considère qu'il soulève un réel problème. Monsieur le secrétaire d'État, l'État va être actionnaire de deux sociétés concurrentes. Comment va-t-il gérer cette schizophrénie ? (Rires sur les travées de l'UMP.)

Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 5.

(L'amendement n'est pas adopté.)

Articles additionnels avant l'article 1er
Dossier législatif : proposition de loi relative aux tarifs réglementés d'électricité et de gaz naturel
Article additionnel après l'article 1er

Article 1er

L'article 66 de la loi n° 2005-781 du 13 juillet 2005 de programme fixant les orientations de la politique énergétique est complété par un IV et un V ainsi rédigés :

« IV. - Lorsqu'un consommateur final domestique d'électricité a exercé pour la consommation d'un site la faculté prévue au I de l'article 22 de la loi n° 2000-108 du 10 février 2000 précitée depuis plus de six mois, il peut, sous réserve d'en faire la demande avant le 1er juillet 2010, à nouveau bénéficier des tarifs réglementés de vente d'électricité mentionnés au premier alinéa du I de l'article 4 de la même loi.

« V. - Un consommateur final non domestique souscrivant une puissance électrique égale ou inférieure à 36 kilovoltampères qui en fait la demande avant le 1er juillet 2010 bénéficie des tarifs réglementés de vente d'électricité pour la consommation d'un site, à condition qu'il n'ait pas lui-même fait usage pour ce site de la faculté prévue au I de l'article 22 de la loi n° 2000-108 du 10 février 2000 précitée. »

Mme la présidente. Je suis saisie de sept amendements faisant l'objet d'une discussion commune.

L'amendement n° 1, présenté par M. Pintat, est ainsi libellé :

Rédiger ainsi cet article :

L'article 66 de la loi n° 2005-781 du 13 juillet 2005 de programme fixant les orientations de la politique énergétique est ainsi modifié :

1° Le I est ainsi rédigé :

« I - Un consommateur final domestique d'électricité bénéficie des tarifs réglementés de vente d'électricité mentionnés au premier alinéa du I de l'article 4 de la loi n° 2000-108 du 10 février 2000 précitée, pour la consommation d'un site pour lequel il a souscrit un abonnement avant le 1er juillet 2010 et pour lequel il n'a pas fait usage de la faculté prévue au I de l'article 22 de la même loi, ou pour lequel il n'use plus de cette faculté après l'avoir exercée, sous réserve, dans ce cas, de l'écoulement d'un délai minimum de six mois avant que le bénéfice des tarifs réglementés ne lui soit à nouveau accordé. »

2° Il est complété par un IV ainsi rédigé :

« IV - Un consommateur final non domestique souscrivant une puissance souscrite électrique égale ou inférieure à 36 kilovoltampères qui en fait la demande avant le 1er juillet 2010 bénéficie des tarifs réglementés de vente d'électricité pour la consommation d'un site, à condition qu'il n'ait pas lui-même fait usage de la faculté prévue au I de l'article 22 de la loi n° 2000-108 du 10 février 2000 précitée. »

La parole est à M. Xavier Pintat.

M. Xavier Pintat. Mon intervention vaut pour l'amendement n° 1 et pour le sous-amendement n° 12.

L'amendement n° 11 de la commission répond au problème, que j'ai soulevé, des consommateurs domestiques basculant, sans le vouloir, dans le marché. C'était d'ailleurs l'objet de la proposition de loi initiale de notre collègue Ladislas Poniatowski.

Mais la rédaction de l'article 66 de la loi de 2005 qui résulterait de son adoption pourrait apparaître entachée d'une contradiction entre le paragraphe I et les paragraphes IV, V et VI.

Mon sous-amendement n° 12 permettrait de lever ce problème. Par conséquent, si ce dernier était adopté, je me rallierais avec enthousiasme à l'amendement de la commission, qui répond aux objectifs de mon propre amendement n° 1.

Mme la présidente. L'amendement n° 11, présenté par M. Poniatowski, au nom de la commission, est ainsi libellé :

A. - Remplacer le texte proposé par cet article pour le IV de l'article 66 de la loi n° 2005-781 du 13 juillet 2005 de programme fixant les orientations de la politique énergétique par deux paragraphes ainsi rédigés :

« IV. - Un consommateur final domestique d'électricité qui en fait la demande avant le 1er juillet 2010 bénéfice des tarifs réglementés de vente d'électricité pour la consommation d'un site, à condition qu'il n'ait pas lui-même fait usage pour ce site de la faculté prévue au I de l'article 22 précité.

« V. - Lorsqu'un consommateur final domestique d'électricité a fait usage pour la consommation d'un site de cette faculté depuis plus de six mois, il peut, sous réserve d'en faire la demande avant le 1er juillet 2010, à nouveau bénéficier des tarifs réglementés de vente d'électricité pour ce site. »

B. - En conséquence, au début du dernier alinéa de cet article, remplacer la référence :

V. -

par la référence :

VI. -

C. - Compléter cet article par deux alinéas ainsi rédigés :

II. Le 5° de l'article L. 121-87 du code de la consommation est ainsi rédigé :

« 5° La mention du caractère réglementé ou non des prix proposés et de la possibilité pour une personne ayant renoncé aux tarifs réglementés de vente pour un site donné de revenir ou non sur ce choix ; »

D. - En conséquence, faire précéder le premier alinéa de cet article de la mention :

I

La parole est à M. le rapporteur.

M. Ladislas Poniatowski, rapporteur. Comme je l'ai annoncé lors de la discussion générale, cet amendement vise à corriger un bug juridique du texte adopté par l'Assemblée nationale. Avec la réversibilité, les députés ont instauré un bon système, mais ils ont au passage oublié les malheureux Français qui déménagent. Ces derniers peuvent se retrouver liés par le choix d'un occupant précédent, et donc condamnés à choisir le tarif libre si le locataire précédent avait opté pour celui-ci.

Mon amendement tend donc à ajouter au système de réversibilité proposé par les députés la rédaction que nous avions adoptée à l'unanimité en première lecture au Sénat.

Par ailleurs, j'indique d'ores et déjà que la commission émet un avis favorable sur le sous-amendement de précision de Xavier Pintat, ce qui permettra à ce dernier de retirer son amendement n° 1. J'ai bien entendu une très nette préférence pour l'amendement n° 11 de la commission, qui reprend, je le rappelle, la rédaction adoptée à l'unanimité par le Sénat en première lecture.

Mme la présidente. Le sous-amendement n° 12, présenté par M. Pintat, est ainsi libellé :

Après le B de l'amendement n°11, insérer un  paragraphe ainsi rédigé :

B bis. - En conséquence, compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :

... - Au début du premier alinéa du I du même article, sont ajoutés les mots : « Sous réserve des dispositions prévues au IV, V et VI du présent article, ».

Ce sous-amendement a été défendu.

L'amendement n° 7, présenté par M. Zocchetto, est ainsi libellé :

I. - Dans le deuxième alinéa de cet article, supprimer le mot :

domestique

II. - Supprimer le dernier alinéa de cet article.

Cet amendement n'est pas soutenu.

L'amendement n° 3, présenté par MM. Billout et Danglot, Mme Didier, M. Le Cam, Mme Terrade et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :

I. - Dans le deuxième alinéa de cet article, supprimer les mots :

, sous réserve d'en faire la demande avant le  1er juillet 2010,

II. - Dans le dernier alinéa de cet article, supprimer les mots :

qui en fait la demande avant le 1er juillet 2010

La parole est à M. Michel Billout.

M. Michel Billout. Avec cet amendement, nous souhaitons revenir sur le point à notre avis crucial de cette proposition de loi. Ce texte organise la réversibilité totale de l'accès aux tarifs réglementés, objectif que nous partageons dans l'intérêt des consommateurs. Cependant, nous ne nous satisfaisons pas de l'instauration d'une date butoir, en l'occurrence le 1er juillet 2010.

En effet, vous conviendrez avec nous que l'avenir des tarifs réglementés dans le cadre de la libre concurrence apparaît plus que menacé.

La Commission a engagé deux procédures communautaires d'infraction contre la France : l'une pour manquement, l'autre pour aide d'État, concernant, notamment, la mise en place du TaRTAM.

Selon la Commission, ces tarifs sont anticoncurrentiels, soit parce qu'ils constituent des barrières inacceptables pour les nouveaux entrants, soit parce qu'ils sont considérés comme des aides d'État.

Dans la lettre de mise en demeure qu'elle a adressée à la France pour transposition incorrecte des directives, la Commission estimait, en outre, que le « mode de fixation étatique des prix ayant un tel caractère de [...] rigidité, dénué de transparence dans son mode d'attribution [...] ne peut être présumé indispensable dans un système où le libre jeu de la concurrence entraîne en principe la fixation de prix compétitifs ».

Dans ce contexte, quel sens donner à la date butoir du 1er juillet 2010 ?

M. le rapporteur nous a expliqué, lors de la première lecture, qu'il fallait y voir non pas la fin des tarifs régulés, mais plutôt un signe destiné à ne pas « braquer » la Commission. Histoire de passer en douce, un peu...

Il est néanmoins difficile de croire que la Commission sera plus favorable au maintien des tarifs régulés après le 1er juillet 2010. Votre argument selon lequel il ne s'agirait là que de « temporiser en attendant de négocier le maintien des tarifs » paraît bien faible !

Si cette date butoir est susceptible de « décrisper » la Commission, n'est-ce pas plutôt parce que vous apportez là à cette dernière une preuve de bonne volonté, permettant d'éviter une condamnation de la France ?

De plus, pour justifier ce dispositif transitoire, vous arguez de la possibilité donnée au marché de « mûrir ».

Dès lors, comment ne pas voir en cette limite temporelle la programmation d'un rendez-vous préalable à une nouvelle étape de la dérégulation du marché énergétique ?

Les distributeurs énergétiques ont d'ailleurs bien compris que, après 2010, la donne allait changer. À cet égard, l'exemple de Direct Énergie est parlant : ce fournisseur indépendant promet à ses clients de « conserver un prix compétitif inférieur au tarif réglementé en vigueur au minimum jusqu'au 1er juillet 2010 ». Après, on verra ! Troublante coïncidence...

De plus, l'ouverture du capital des entreprises publiques a entériné le passage à une nouvelle politique d'entreprise, tournée vers la réalisation de bénéfices permettant la rémunération des actionnaires.

Ainsi, il est stipulé dans le contrat de service public liant l'État à Gaz de France jusqu'au 31 décembre 2007 - il est aujourd'hui caduc, on verra le prochain - qu'il convient « de rechercher, à l'occasion de chaque mouvement tarifaire, la convergence entre les tarifs et les prix de vente en marché ouvert, et ce pour chaque type de clients, dont les ménages ». Dans un même mouvement, les nouveaux entrants pratiqueront donc des tarifs particulièrement bas pour séduire les consommateurs, et les entreprises historiques augmenteront leurs tarifs.

Ce processus permettra de justifier en 2010 la suppression des tarifs réglementés, qui ne garantiront plus aux consommateurs des prix abordables pour l'accès à ce bien de première nécessité.

Dans ce contexte, la récente décision du Conseil d'État tombe à pic : elle annule l'arrêté qui gelait la hausse du tarif du gaz pris en décembre 2005 par le Gouvernement.

Contrairement à ce que l'on pourrait penser, cette requête a été introduite non par GDF, mais par un fournisseur privé, Poweo. Le dépôt de cette requête s'explique par le fait que le maintien d'un tarif régulé modéré gêne la concurrence et l'implantation de concurrents privés.

À terme, il est donc fort à craindre que les tarifs libres, ainsi que les tarifs réglementés, n'augmentent considérablement, ce qui est dans l'intérêt des actionnaires des grands groupes, mais non dans celui des consommateurs.

Par ailleurs, comment ne pas rapprocher également de la question du maintien des tarifs réglementés l'obligation faite à EDF de vendre au moindre coût son énergie nucléaire à la concurrence, et ce alors même que cela constitue pour elle un risque majeur ? En effet, la mise en place d'un bas tarif de cession d'électricité en gros pourrait compromettre à terme les investissements nécessaires en France. De plus, la mise en place d'un droit de tirage sur le parc nucléaire d'EDF permet de transférer à des concurrents la compétitivité du nucléaire sans effet bénéfique pour les consommateurs et sans que ces concurrents n'assument ni l'investissement, ni le risque de l'exploitation, ni l'aval du cycle, qui comporte les difficultés que nous connaissons.

Tous ces éléments imbriqués concourent à l'instauration au plus vite des conditions d'un marché libre dans lequel les tarifs réglementés n'auraient plus de raison d'être et dans lequel ils ne pourront plus être tenus.

Nous estimons donc que l'instauration d'une date butoir pervertit les objectifs de réversibilité et ne change rien à terme concernant leur disparition programmée.

Si les autres articles de la proposition de loi étaient encore en discussion, nous aurions déposé ce même amendement concernant le gaz ou les nouveaux logements.

Nous continuons donc de penser que les tarifs réglementés dans le cadre d'entreprises intégralement publiques sont le gage du bon accomplissement du service public.

Telles sont, mes chers collègues, les raisons pour lesquelles nous vous demandons d'adopter cet amendement.

Mme la présidente. L'amendement n° 10, présenté par MM. Raoul, Pastor, Courteau, Bel et Dussaut, Mme Herviaux, MM. Madrelle, Piras, Raoult, Reiner, Ries, Lejeune, Repentin, Sergent, Teston et les membres du groupe Socialiste et apparentés, est ainsi libellé :

Dans les deuxième et troisième alinéas de cet article, supprimer les mots :

avant le 1er juillet 2010

La parole est à M. Jean-Marc Pastor.

M. Jean-Marc Pastor. Notre amendement ressemble comme un frère jumeau à celui que vient de défendre notre collègue Michel Billout.

De quoi s'agit-il ? Pourquoi ne sommes-nous pas favorables au maintien dans ce texte de la date butoir du 1er juillet 2010 ? Parce qu'un certain nombre de précédents nous inquiètent ! Depuis trois ans, en effet, les pouvoirs publics proposent régulièrement d'augmenter les tarifs d'EDF, mais également ceux de GDF, afin de rapprocher le tarif régulé du prix du marché.

Nous savons très bien que, avec le temps, l'écart entre le tarif régulé et le prix du marché deviendra infime, au point que, en 2010, la question n'aura naturellement plus besoin d'être posée. Il ne sera alors plus question de maintenir un tarif régulé ; nous passerons, comme le propose la Commission, au prix du marché et au marché libre, avec tout ce que cela suppose de désagréments. C'est le sens de l'histoire. Ainsi, en trois ans, les entreprises passées au prix du marché ont connu une augmentation de 117 %, ce qui n'est tout de même pas rien ! Telle est la première raison pour laquelle nous sommes contre cette date butoir.

La seconde raison de notre opposition tient à l'actualité. M. Jean-François Cirelli, président-directeur général de GDF, essaie en effet de conforter le capital de GDF par une simple participation de près de 1 milliard d'euros - tout de même ! - afin de faciliter la fusion entre GDF et Suez. Or c'est grâce au fruit des augmentations prélevées chez le consommateur - le milliard d'euros en question - qu'un tel rapprochement est facilité ! Cela nous gêne. Nous n'avons donc pas confiance en ce qui nous est proposé.

En revanche, nous le crions haut et fort, nous sommes d'accord avec le texte qui nous est présenté par M. le rapporteur et avec l'objectif de maintenir un tarif régulé. Nous partageons pleinement ses inquiétudes et ses interrogations.

Nos divergences viennent d'un certain nombre d'éléments qui nous ont fait perdre confiance dans les choix opérés.

Certes, comme l'a déclaré M. le secrétaire d'État au cours de la discussion générale, rien n'empêchera de maintenir les tarifs régulés après 2010, car aucun texte européen n'impose leur suppression.

M. Bruno Sido. Pour l'instant !

M. Jean-Marc Pastor. Si nous sommes tout à fait d'accord avec lui, nous préférons néanmoins qu'aucune date butoir ne soit fixée. Nous souhaitons que le Gouvernement et le Parlement français unissent leurs efforts auprès de la Commission afin que les prix régulés soient maintenus, puisque rien, dans les textes européens, n'interdit leur maintien. Annoncer une date butoir, c'est accepter dès aujourd'hui de basculer, en juillet 2010, au prix du marché.

On peut délibérément choisir la libéralisation complète et l'ouverture du marché. C'est un choix politique, que je comprends et que je respecte. Mais quand on nous demande de nous faire hara-kiri, je dis : « Non ! »

Essayons plutôt de déterminer une position française afin de préserver le tarif régulé, car c'est le seul moyen de permettre au consommateur de base d'être protégé et d'être rassuré, à un moment où il est beaucoup question du pouvoir d'achat. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.)

Mme la présidente. L'amendement n° 6, présenté par MM. Sido, Mortemousque et Nachbar, est ainsi libellé :

Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :

... - Le I de l'article 30-1 de la loi n° 2004-803 du 9 août 2004 relative au service public de l'électricité et du gaz et aux entreprises électriques et gazières est ainsi modifié :

1° Dans la seconde phrase du premier alinéa, les mots : « pour une durée de deux ans » sont remplacés par les mots : « jusqu'au 1er juillet 2010 » ;

2° La dernière phrase du second alinéa est supprimée.

La parole est à M. Bruno Sido.

M. Bruno Sido. Les raisons invoquées à juste titre pour justifier la suppression de la règle dite du « non-retour » pour les consommateurs privés sont également valables pour les consommateurs professionnels, car, alors qu'ils ont cru aux vertus du marché - ils ont raison d'y croire en général, sauf en la circonstance ! -, ils subissent son injustice bien plus encore que les particuliers, en raison de leur consommation importante.

Quant aux industriels qui sont restés aux tarifs réglementés, la règle du non-retour les empêche, en pratique, comme les consommateurs domestiques, de conclure des contrats sur le marché libre avec des concurrents d'EDF, de peur de ne pas pouvoir renouveler ces contrats à des conditions intéressantes et de ne pas pouvoir revenir aux tarifs réglementés.

La France, en énonçant la règle du non-retour aux tarifs réglementés pour les sites considérés comme ayant exercé leur éligibilité, s'est infligé une contrainte particulièrement pénalisante, dont se sont au contraire exonérés de nombreux autres pays européens. Selon une étude publiée au mois de juin 2007 par l'ERGEG, le Groupe des régulateurs européens de l'électricité et du gaz, quatorze États membres ont conservé pour leurs industriels des tarifs réglementés à côté du marché libre, tandis que trois autres États membres seulement se limitent aux petits consommateurs. La règle du non-retour n'a été instaurée que par trois États, dont la France.

Heureusement, grâce à l'initiative du Gouvernement - en la personne de François Loos, si ma mémoire est bonne -, les consommateurs professionnels disposent déjà du TaRTAM, mais ce dernier est bien plus élevé - jusqu'à 23 % ! - que les tarifs réglementés. En outre, il n'est que provisoire jusqu'en 2008.

Cependant, je ne propose pas d'étendre les dispositions de la proposition de loi à l'ensemble des consommateurs finals d'électricité, même si cela aurait l'avantage de la cohérence en évitant de faire une distinction entre le régime des anciens sites de consommation et celui des nouveaux sites, à l'instar de l'article 66-2 inséré par la loi n° 2007-290 du 5 mars 2007 dans la loi n° 2005-781 du 13 juillet 2005 de programme fixant les orientations de la politique énergétique

Il est nécessaire de sécuriser les consommateurs professionnels d'électricité en prolongeant dès maintenant le TaRTAM et en alignant logiquement sa durée sur celle qui est prévue pour les tarifs réglementés.

Le TaRTAM n'étant plus applicable après le 31 décembre 2008 pour les premiers sites ayant demandé le bénéfice de ce dispositif, le risque est grand pour les entreprises qui en ont bénéficié de se retrouver, début 2009, sans solution face à des prix de marché qui atteignent des records historiques.

Permettez-moi de vous donner quelques chiffres. Aujourd'hui, hors transport et distribution, le mégawatheure réglementé vaut 30 euros. Le mégawatheure TaRTAM vaut, lui, un tiers de plus, soit 40 euros. Aujourd'hui, le prix sur le marché à terme pour le 1er janvier 2009 est de 63,50 euros.

Monsieur le secrétaire d'État, vous qui êtes chargé de la consommation, vous avez bien compris qu'il y a derrière tout cela de l'inflation, de la délocalisation.

M. Jean Arthuis. Évidemment !

M. Bruno Sido. Certes, le dépôt et l'examen d'un rapport du Gouvernement au Parlement sur l'application du TaRTAM sont prévus au plus tard - je précise bien « au plus tard » - à la fin de l'année 2008, avant de décider d'une éventuelle prolongation.

Mais il est d'ores et déjà avéré que le TaRTAM est un véritable succès. En effet, 3 600 sites industriels, représentant 72 % de la consommation des clients professionnels - de la consommation, et non des consommateurs - en offre de marché, sont passés au TaRTAM.

Surtout, les raisons qui ont conduit à la mise en place de ce dispositif perdurent encore aujourd'hui puisque les tensions constatées sur les marchés de l'énergie en Europe ne font que s'aggraver.

Aussi, afin d'éviter le risque que j'évoquais pour les entreprises, tout en laissant le temps nécessaire aux parties prenantes de mettre en place une solution pérenne, il est nécessaire d'aligner dès maintenant la durée d'application du TaRTAM sur celle des tarifs réglementés et de prévoir son maintien jusqu'au 1er juillet 2010.

Alors que, selon la loi, le rapport doit être remis au plus tard à la fin de l'année 2008, le Gouvernement a, paraît-il, l'intention de ne le déposer qu'au début, voire dans le courant de l'année 2009, à moins qu'il ne décide finalement de le remettre courant 2008. Cela laisserait à tout le monde, notamment aux industriels, le temps de réfléchir.

Mon amendement permettra au Gouvernement de consacrer ce temps à dégager des solutions - telle est bien en effet la question - pour l'après-TaRTAM.

Mme la présidente. L'amendement n° 8, présenté par M. Zocchetto, est ainsi libellé :

Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :

... - À la fin de la première phrase du premier alinéa du I de l'article 30-1 de la loi n° 2004-803 du 9 août 2004 relative au service public de l'électricité et du gaz et aux entreprises électriques et gazières, l'année : « 2007 » est remplacée par l'année : « 2010 ».

Cet amendement n'est pas soutenu.

Quel est l'avis de la commission sur les divers amendements ?

M. Ladislas Poniatowski, rapporteur. Je rappelle que la commission souhaite le retrait de l'amendement n° 1, et qu'elle émet un avis favorable sur le sous-amendement n° 12.

Les amendements nos 3 et 10 ont pour objet la suppression de la date butoir du 1er juillet 2010.

Mes chers collègues, comme je l'avais rappelé à l'occasion de l'examen de la présente proposition de loi en première lecture, c'est-à-dire au mois d'octobre 2007, il existe actuellement un contentieux entre notre pays et la Commission européenne sur la question du tarif réglementé.

Nous avions décidé de fixer une date butoir afin de ne pas provoquer la Commission européenne. J'avais alors souligné que le retour au principe d'une réversibilité quasi-totale pourrait être interprété par cette dernière comme une « déclaration de guerre ».

En l'occurrence, l'institution de la date butoir au 1er juillet 2010 nous laisse du temps.

En effet - et, à cet égard, les arguments des amendements nos 3 et 10 sont plutôt justifiés, monsieur le secrétaire d'État -, notre divergence avec la Commission européenne concerne la réglementation de nos tarifs. Comme vous le savez, cette dernière n'accepte pas un tel principe, car elle considère que le tarif d'électricité français est un tarif « subventionné ».

Il nous appartient donc de profiter du délai dont nous disposons pour expliquer à la Commission que ce tarif correspond simplement au coût réel de fabrication de l'électricité en France.

M. Charles Revet. Bien sûr ! Il faut l'expliquer !

M. Ladislas Poniatowski, rapporteur. En effet, notre pays bénéficie d'un grand atout : son parc de centrales nucléaires.

Nous pouvons utiliser le délai pour convaincre la Commission européenne que notre tarif d'électricité n'est pas subventionné. Il s'agit d'un tarif réel, qui comprend tous les coûts, à savoir les coûts de production, d'amortissement, de désengagement de nos centrales nucléaires et - je me tourne vers nos collègues Bruno Sido et Gérard Longuet - de traitement de nos déchets à haute radioactivité.

Ne provoquons pas Bruxelles. La date butoir paraît astucieuse et intelligente, et il ne semble donc pas opportun de la supprimer.

Aussi, même si je ne pense pas parvenir à les convaincre, je demande aux auteurs respectifs des amendements nos 3 et 10 de bien vouloir les retirer, faute de quoi l'avis de la commission sur ces deux amendements serait défavorable.

L'amendement n° 6 concerne le TaRTAM, que nous avons institué dans le cadre de la loi du 7 décembre 2006 relative au secteur de l'énergie.

J'approuve totalement notre collègue Bruno Sido quand il rappelle qu'il s'agit là d'un véritable sujet.

En effet - à l'époque, vous n'étiez pas notre interlocuteur, monsieur le secrétaire d'État -, c'est sur mon initiative qu'un tel dispositif avait été adopté. C'est donc bien le Sénat qui l'a institué. Nous avons inséré une disposition précise dans le texte législatif. En effet, l'article 15 de la loi du 7 décembre 2006 dispose ceci : « Le Gouvernement présente au Parlement, avant le 31 décembre 2008, un rapport sur la formation des prix sur le marché de l'électricité et dressant le bilan de l'application de la création du tarif réglementé transitoire d'ajustement du marché. »

Un tel rapport devra analyser les effets du TaRTAM et pourra notamment envisager sa prolongation dans le temps, ainsi que M. Bruno Sido vient de l'évoquer.

Certes, monsieur le secrétaire d'État, la demande de Bruno Sido me semble un peu précipitée. Dans la mesure où il est prévu que l'application du TarTAM sera définitivement terminée à compter du 1er juillet 2009, il serait anormal de décider brutalement de prolonger le dispositif jusqu'au 1er juillet 2010 sous le seul prétexte que cette date est mentionnée dans la proposition de loi. Attendons de connaître le bilan d'une telle mesure avant d'envisager de la proroger.

Toutefois, et j'appuie la demande de M. Bruno Sido sur ce point, la loi du 7 décembre 2006 relative au secteur de l'énergie dispose bien que le rapport doit être remis non pas au début de l'année 2009, mais bien à la fin de l'année 2008.

Il faut donc que nous ayons des éléments d'information dès le mois de septembre ou le mois d'octobre de l'année 2008, afin de vérifier si les chiffres indiqués par notre collègue sont exacts.

M. Bruno Sido a évoqué des prix moyens. En fait, la loi du marché est beaucoup plus dure. Il existe des milliers - je dis bien des milliers - de situations. Dans certains cas de figure, il s'agit bien des prix que notre collègue a annoncés. Ainsi, le TaRTAM peut représenter 20 % ou 30 % de plus que les tarifs réglementés. En outre, le coût de 63,5 euros, qui a été mentionné, est effectivement prévisible dans les accords déjà signés pour l'année 2009. (M. Bruno Sido acquiesce.)

Dès lors, si nous disposons d'un rapport au mois de septembre ou d'octobre 2008, nous aurons de telles informations. Si le consommateur ne paie pas actuellement 63,5 euros le mégawatheure, il est prévu dans les contrats signés aujourd'hui qu'ils acquitteront un tel montant en 2009. Nous avons donc besoin que le bilan du dispositif soit dressé.

Par conséquent, monsieur le secrétaire d'État, avant de demander à M. Bruno Sido de retirer son amendement, je sollicite de votre part l'engagement, au nom du Gouvernement, que la loi du 7 décembre 2006 relative au secteur de l'énergie sera bien respectée et qu'un rapport dressant le bilan du dispositif sera remis au Parlement avant la fin de l'année 2008.

Sous le bénéfice d'un tel engagement, je demande à notre collègue Bruno Sido de bien vouloir retirer son amendement.

Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. Luc Chatel, secrétaire d'État. L'amendement n° 1 vise à clarifier les conditions dans lesquelles les consommateurs peuvent bénéficier de tarifs réglementés dans deux situations particulières, c'est-à-dire l'emménagement dans un logement et la réversibilité au tarif dans un même logement, sous réserve d'un délai de six mois.

Nous avons déjà eu un tel débat et nous partageons ce souci de clarification. De ce point de vue, je tenais à saluer le travail que vous avez effectué sur le sujet, monsieur Xavier Pintat.

Pour autant, à mon sens, le dispositif que l'amendement n° 11, présenté par la commission, vise à instituer permet d'atteindre le même objectif, et ce en maintenant au-delà du 1er juillet 2010 la règle en vertu de laquelle le bénéfice du tarif est attaché au site de consommation, règle que l'amendement n° 1 a l'inconvénient de supprimer.

Monsieur Pintat, vous avez déposé un sous-amendement à l'amendement n° 11. Par conséquent, le Gouvernement émet un avis favorable sur ces deux textes. Ainsi, comme l'a rappelé M. le rapporteur, nous en reviendrons à la rédaction qui avait été adoptée lors de la première lecture.

Les amendements nos 3 et 10 visent à supprimer la date butoir du 1er juillet 2010.

Messieurs Michel Billout et Jean-Marc Pastor, sans vouloir polémiquer, je dois dire que j'ai un peu de mal à vous suivre.

En effet, vous souhaitez inscrire le tarif réglementé dans la durée. Pour cela, vous voulez supprimer la date butoir du 1er juillet 2010.

Vous vous inquiétez pour l'avenir du tarif réglementé. Or le commissaire européen en charge de ce dossier, qui a été auditionné récemment par la commission des affaires économiques de l'Assemblée nationale, ne s'en préoccupe pas, lui.

Pour défendre un tel tarif, vous voulez supprimer la date du 1er juillet 2010. Or c'est précisément le problème de la date qui avait abouti à la censure du texte législatif par le Conseil constitutionnel. Par conséquent, si la date butoir était supprimée, la proposition de loi risquerait de faire également l'objet d'une censure.

C'est la raison pour laquelle le Gouvernement émet un avis défavorable sur les amendements nos 3 et 10.

D'ailleurs, comme l'a très bien indiqué M. le rapporteur, le maintien de la date butoir du 1er juillet 2010 ne présage absolument pas de ce qui se passera ensuite.

J'en viens à l'amendement n° 6, qui a été présenté par M. Bruno Sido. Monsieur le sénateur, vous avez contribué aux travaux sur la question des tarifs. Aujourd'hui, le TaRTAM constitue une réponse adaptée à l'augmentation des prix que nous avons connue sur le marché des entreprises.

Le Parlement a prévu une durée maximale de la fourniture au TaRTAM de deux ans, puisqu'il considérait que le dispositif devait être évalué avant d'envisager sa prolongation. En outre, la loi du 7 décembre 2006 dispose que le Gouvernement présentera au Parlement avant le 31 décembre 2008 un rapport dressant le bilan de son application.

Monsieur le sénateur, je comprends bien la volonté qui est la vôtre. Puisque nous examinons, dans le cadre de la présente proposition de loi, l'instauration d'un délai prenant fin le 1er juillet 2010, vous souhaitez aligner le TaRTAM sur cette date.

J'attire votre attention sur le fait que, à l'époque, le Parlement avait voulu légiférer progressivement pour considérer l'évaluation de la situation.

Au nom du Gouvernement, je peux m'engager à la remise au Parlement d'un rapport dressant le bilan du TaRTAM à la fin de l'été de l'année 2008 - en septembre 2008, par exemple -, afin que la Haute Assemblée dispose de suffisamment de temps pour envisager, si cela se révélait nécessaire, l'aménagement ou la prolongation du TaRTAM. Elle pourra en tout cas examiner les dispositions nécessaires, en tenant compte de la mise en oeuvre de la première phase.

Par conséquent, monsieur Sido, sous le bénéfice de cet engagement, je vous suggère de retirer l'amendement n° 6.