pouvoir d'achat

M. le président. La parole est à Mme Annie Jarraud-Vergnolle.

Mme Annie Jarraud-Vergnolle. Monsieur le président, mesdames et messieurs les ministres, mes chers collègues, ma question s'adresse à Mme Lagarde, ministre de l'économie, des finances et de l'emploi.

Je souhaite poser une question simple.

Je vous épargnerai, mes chers collègues, les chiffres et les pourcentages au profit d'un seul, qui aura la valeur symbolique que vous voudrez bien lui donner.

Le candidat Sarkozy déclarait qu'il voulait être le président du pouvoir d'achat. Sans doute fallait-il comprendre qu'il voulait être le président de ces 2000 familles qui ont un fort pouvoir d'achat.

Quelques cadeaux fiscaux, les révisions à la baisse d'une improbable politique sociale, une conjoncture difficile, une croissance en berne et une forte inflation auront eu raison de vos bonnes intentions de campagne, au point de vous y faire renoncer, madame la ministre.

Pour l'élue de terrain que je suis, qui a créé et dirigé pendant plus de trente ans des structures d'insertion par l'emploi, quotidiennement confrontée à la pauvreté ordinaire, celle qui ne se voit pas, qui est pourtant la plus nombreuse, ce renoncement est écoeurant de mépris envers tous ceux qui n'ont pas de copains propriétaires de yacht et de jet privés pour partir en vacances.

De nombreux retraités, salariés, smicards, jeunes diplômés, petits commerçants, artisans, handicapés, demandeurs d'emploi, parents isolés et autres familles touchées par la maladie et qui commencent à déchanter, se reconnaîtront sans doute dans cette description.

Pour tous ceux-là, l'inefficience du « travailler plus pour gagner plus », aggravée par le fait que vous avez vidé les caisses, vous fait renoncer à un engagement majeur concernant le pouvoir d'achat, celui-ci devenant, de l'aveu du Président lui-même, un luxe dont les Français vont devoir se passer dans une civilisation qui les engage à penser que l'argent ne fait pas le bonheur.

Ce qui revient à dire que le pouvoir d'achat serait le simple pouvoir des ménages à faire face aux dépenses contraintes et non la possibilité de disposer de la capacité d'améliorer leur qualité de vie par l'accession à plus de services, à de meilleurs produits, à la culture et aux loisirs, bref, à ce bonheur auquel ils auraient droit.

Si ce n'est pas le cas, il faudrait nous dire quelle est, selon le Gouvernement, l'unité plancher de revenu pour laquelle serait dégagée une réelle marge de pouvoir d'achat.

Quelle est la hauteur de cette marge ? En somme, à partir de quel niveau de revenu estimez-vous que l'on cesse de survivre pour vivre, de subsister pour exister, sans confondre, je vous en prie, un revenu minimum décent avec le plancher du bonheur ?

Je ne vous demande qu'un chiffre, qui devrait nous servir de repère, voire de définition, de ce pouvoir d'achat propre à la civilisation que vous nous préparez : pas un discours, un chiffre !

À défaut, un objectif chiffré devrait nous éclairer, en tant qu'indicateur de performance du ministère que vous dirigez. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.)

M. le président. La parole est à Mme la ministre.

Mme Christine Lagarde, ministre de l'économie, des finances et de l'emploi. Madame le sénateur, vous me demandez un chiffre. Pardonnez-moi de vous en donner plusieurs. Et ces chiffres-là, ce sont ceux qui m'obsèdent en permanence : ce sont mes objectifs.

Mon objectif prioritaire est de gagner au moins un point supplémentaire de croissance et d'atteindre la moyenne européenne.

Les autres chiffres qui m'obsèdent sont ceux qui contribuent à l'amélioration du pouvoir d'achat. Or la meilleure façon d'avoir du pouvoir d'achat, c'est d'avoir un salaire, et la meilleure façon d'avoir un salaire, c'est d'avoir un emploi.

Les chiffres qui m'obsèdent aujourd'hui tiennent aux objectifs que je me suis fixés : un taux de chômage de 5 % au plus à l'horizon 2012, un taux d'emploi de 70 %. C'est dans cet objectif qu'est discuté actuellement dans votre assemblée le projet de fusion entre l'ANPE et l'UNEDIC, qui vise justement à améliorer le fonctionnement du marché de l'emploi.

Oui, ce sont ces chiffres qui importent pour moi : 5 % de chômage et 70 % d'emploi ! Rassurez-vous, l'économie française est sur la bonne voie. En 2007, ce sont plus de 312 000 emplois et plus de 300 000 entreprises qui ont été créés. On voit très clairement que le projet est en route ; il ne s'arrêtera pas là.

Réduire le chômage, encourager l'emploi, ce sont les premiers chantiers qui nous occupent pour améliorer le pouvoir d'achat. Il en est d'autres, mais je vous épargnerai une batterie de chiffres.

Nous essayons aussi de peser sur les prix lorsque nous traitons les questions de concurrence. Permettre de répercuter sur les prix au consommateur les remises obtenues par les grands distributeurs, c'est aussi une façon de lutter pour le pouvoir d'achat.

Quoi qu'il en soit, la première façon de faire bénéficier nos concitoyens de pouvoir d'achat,...

M. Yannick Bodin. C'est d'augmenter les salaires !

Mme Christine Lagarde, ministre... c'est de faciliter le travail ; c'est de réduire le chômage ; c'est de favoriser l'accomplissement d'heures supplémentaires ; c'est, évidemment, de peser par la concurrence sur le niveau des prix. (Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UC-UDF.)

service minimum à l'école

M. le président. La parole est à M. Paul Girod.

M. Paul Girod. Ma question s'adresse à M. le ministre de l'éducation nationale.

Monsieur le ministre, au mois de décembre dernier, vous avez présenté vos programmes pour le premier trimestre 2008 et vous avez fait allusion à la garde des enfants en cas de grève scolaire.

Ce projet est bien accueilli par un certain nombre d'élus locaux, conscients que, dans ce cas-là, ce sont les familles les plus modestes qui sont les plus pénalisées. En effet, il leur faut s'organiser, quelquefois à la hâte, pour assurer la garde de leurs enfants, les confier à quelqu'un et, à défaut, renoncer à une journée de travail. La tâche est donc assez compliquée pour les familles modestes.

Dans ces conditions, un certain nombre de maires ont donc accueilli votre suggestion avec intérêt. Ils se penchent aujourd'hui sur le cas de ces familles défavorisées pendant que d'autres, laissant couler quelques larmes de crocodiles et tenant des propos irresponsables à l'égard du droit de grève - que nous ne contestons pas puisqu'il est constitutionnel - négligent totalement les conséquences, qui pèsent sur les plus modestes de nos concitoyens.

Au nom des maires intéressés, j'ai toutefois quelques questions à vous poser.

Les premières portent sur le financement. Comment les mairies peuvent-elles organiser les choses, alors qu'a priori ce serait plutôt à l'État d'organiser la garde des enfants en cas de grève du système public de l'éducation nationale ? Comment les mairies peuvent-elles financer les moyens qu'elles vont être amenées à engager dans ce domaine ?

Les secondes portent sur le mouvement de grève, important, nous dit-on, qu'on nous annonce pour le 24 janvier prochain et qui va immédiatement poser le problème de façon cruciale. Quelles mesures envisagez-vous de prendre, dans un délai qui va être extrêmement court, pour faire un premier pas vers cette garde des enfants, spécialement ceux des familles les plus modestes, en cas de grève de l'éducation nationale ? (Applaudissements sur les travées de l'UMP.)

M. le président. La parole est à M. le ministre.

M. Xavier Darcos, ministre de l'éducation nationale. Monsieur le sénateur, en proposant que l'État finance l'organisation d'un service minimum d'accueil dans les écoles, nous avons surtout voulu répondre à une difficulté que connaissent, comme vous l'avez dit, les familles les plus modestes. Ces familles sont en effet pénalisées par la situation difficile qui leur est faite : leurs enfants n'étant pas acceptés dans les écoles, ils risquent de se retrouver dans la rue ; elles ne savent pas comment les faire garder et peuvent se trouver dans l'obligation de renoncer à se rendre à leur travail.

Il s'agit donc d'éviter que la grève ne vienne les pénaliser en faisant peser sur elles une fatalité supplémentaire.

Bien entendu, il ne s'agit pas de remettre en cause le droit de grève (Ah ! sur les travées du groupe CRC et du groupe socialiste.),...

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Jamais de la vie !

M. Xavier Darcos, ministre... cela va de soi. Il ne s'agit pas non plus de briser la grève, qui consiste pour un enseignant - nombreux sont les anciens enseignants dans cette enceinte - à ne pas enseigner sa discipline, à ne pas enseigner du tout, à ne pas transmettre le savoir pendant le temps de la grève. Pour autant, que je sache, la grève ne consiste pas à nuire aux familles ni à compliquer la vie des enfants et de leurs parents.

J'ai d'ailleurs été extrêmement surpris d'entendre le maire de Paris et ses adjoints dire que ce n'était pas leur affaire, que c'était celle des familles, que celles-ci n'avaient qu'à se débrouiller. (Protestations sur les travées du groupe CRC et du groupe socialiste.

Aucun maire ne peut réagir de la sorte ! (Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UC-UDF.)

Mme Bariza Khiari. Il n'a pas dit cela !

M. Xavier Darcos, ministre. Si, c'est exactement ce qui figure dans Le Figaro daté d'hier, auquel je vous renvoie. Vous y trouverez l'exacte formule utilisée : « Que les familles se débrouillent ! ».

Que la grève ait lieu, oui ! Mais que les familles se débrouillent par elles-mêmes, non ! Les maires se sentent responsables de ce qui arrive dans les locaux municipaux qui accueillent les classes.

M. Xavier Darcos, ministre. Il faut les encourager à assurer ce service minimum d'accueil.

Comment faire concrètement ? C'est la question que vous posez, monsieur Girod. Nous proposons que les communes organisent comme elles l'entendent ce type d'accueil, soit dans les locaux scolaires avec du personnel volontaire, soit dans des centres de loisirs, soit par les formules d'accueil les plus diverses. Nous rembourserons les frais engagés par les communes à cette occasion, à hauteur de 90 euros par groupe de dix à quinze élèves, pour les six heures de la journée pendant lesquelles ils seront gardés.

Je crois que cette mesure est saine. Elle reçoit d'ailleurs un accueil très favorable de la part de nombreux maires, y compris du reste de ceux qui ne soutiennent pas la majorité. J'en ai eu quelques-uns hier au téléphone.

Mais, je le répète, si ce dispositif, fragile et qui se fonde sur la volonté des communes, ne suffisait pas, je suis déterminé à aller plus loin, parce que ce n'est pas parce qu'il y a grève qu'il faut pénaliser les familles, faire du tort aux enfants et les abandonner à la rue ! (Très bien ! et applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UC-UDF.)

câble sous-marin en Nouvelle-Calédonie

M. le président. La parole est à M. Robert Laufoaulu.

M. Robert Laufoaulu. Ma question s'adresse à M. le secrétaire d'État chargé de l'outre-mer.

Monsieur le secrétaire d'État, en octobre dernier, s'est tenu, à Nuku'Alofa, aux îles Tonga, le trente-huitième forum des îles du Pacifique. Aux côtés des délégations de Nouvelle-Calédonie, de Polynésie française et de Wallis-et-Futuna, vous êtes venu porter haut et fort la voix de la France.

Depuis de nombreuses années, notre pays n'était plus représenté au niveau ministériel lors des réunions annuelles du forum, et votre venue n'en a été que plus appréciée. J'étais fier de la France, dont la place dans la région se trouve renforcée et fortement désirée.

Lors de ce forum, les chefs d'État et de Gouvernement présents ont évoqué le projet de câble sous-marin transpacifique qui relierait l'Australie à Papeete, en passant par la Nouvelle-Calédonie.

Ce câble permettrait de relier les trois territoires français du Pacifique et de desservir neuf pays insulaires de la région, offrant le haut débit nécessaire aujourd'hui à tout développement économique et social.

Dans votre allocution, vous aviez alors utilisé des mots très forts pour dire combien il était inadmissible que les hommes et les femmes du Pacifique subissent une si injuste fracture numérique et pour exprimer le souhait de la France de s'impliquer dans le domaine des technologies de télécommunication dans la région.

Vous aviez affirmé également que la France, « qui est d'ores et déjà prête à s'engager aux côtés de ses propres territoires, est prête à participer à ce projet si les autres bailleurs de fonds partagent cette analyse et peuvent apporter leur concours ».

Je souhaiterais donc savoir, monsieur le secrétaire d'État, d'une part, si vous disposez à ce jour d'éléments nouveaux sur l'état d'avancement de ce projet et si la France entend être en première ligne pour convaincre d'autres bailleurs de fonds, comme l'Australie ou l'Union européenne, d'y participer, et, d'autre part, si vous pouvez me confirmer que, dans le cas où le projet se réaliserait, la France serait bien financièrement aux côtés de Wallis-et-Futuna, car notre connexion au câble, qui passerait non loin de nos îles, aurait un coût que notre territoire, qui ne dispose pas de ressources propres, ne serait pas en mesure d'assumer. (Applaudissements sur les travées de l'UMP.)

M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'État.

M. Christian Estrosi, secrétaire d'État chargé de l'outre-mer. Monsieur le sénateur, je vous remercie du fond du coeur d'avoir rappelé notre rencontre au forum du Pacifique, au Tonga. À mon tour, je veux vous exprimer ma reconnaissance pour l'accueil que vous m'avez réservé lorsqu'en ce même mois d'octobre j'ai posé le pied sur le sol de Futuna, avant d'aller à Wallis. (Murmures ironiques sur les travées du groupe socialiste.)

M. Jacques Mahéas. Que de salamalecs... (Protestations sur les travées de l'UMP.)

M. Christian Estrosi, secrétaire d'État. Je voudrais simplement dire, avec modestie, que l'on mesure là, à 23 000 kilomètres de Paris, que, malheureusement, la France à deux vitesses existe encore et que le grand concept de l'égalité des chances n'est pas une réalité pour tous nos concitoyens.

M. Jacques Mahéas. Elle ne l'est pas non plus dans nos banlieues !

M. Jean Desessard. Ni dans toute la France !

M. Christian Estrosi, secrétaire d'État. Voilà pourquoi, avec le Président de la République et le Premier ministre, nous avons souhaité rattraper les retards de l'outre-mer dans le domaine de la couverture numérique.

Monsieur le sénateur, j'ai eu l'occasion de vous répondre, ainsi qu'au nouveau vice-président de la collectivité territoriale de Wallis-et-Futuna Victor Brial, que nous mettrions toute notre énergie pour que le câble numérique arrive de la Nouvelle-Calédonie jusqu'à Wallis-et-Futuna, puisqu'il relie depuis quelque temps Nouméa à Sidney. Vous le savez, cela représente 200 millions d'euros à l'échéance 2010,...

M. Paul Raoult. Les caisses sont vides !

M. Christian Estrosi, secrétaire d'État.... notre objectif étant de desservir non seulement Wallis-et-Futuna et tout le Pacifique, mais également Saint-Pierre-et-Miquelon, la Guyane et la Réunion.

Je saisis cette occasion pour dire que, dans la loi de programme que je suis en train de finaliser, nous mettrons en place d'importantes dispositions de défiscalisation qui engageront financièrement très lourdement l'État français et que nous irons beaucoup plus loin.

Je viendrai chez vous de nouveau au mois d'avril prochain, d'abord pour la mise en place du deuxième Twin Otter qui desservira Wallis-et-Futuna, ensuite pour qu'enfin cette collectivité dispose de la téléphonie mobile par France Télécom.

J'en profite pour ajouter qu'il y aura dans la loi de programme un volet spécifique à la couverture numérique pour accélérer l'arrivée de la téléphonie mobile de troisième génération, de la télévision numérique terrestre et, enfin, l'arrivée non pas seulement du haut débit mais aussi du très haut débit.

Ainsi, grâce à cet engagement, nous pourrons assurer outre-mer une qualité de service ainsi qu'une offre tarifaire équivalentes à celles dont bénéficient tous nos compatriotes de métropole. C'est, pour le Gouvernement et pour le Président de la République, une question de justice et d'équité à l'égard de nos compatriotes d'outre-mer. (Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UC-UDF.)

zones d'attente

M. le président. La parole est à M. Jean Desessard.

M. Jean Desessard. Ma question s'adresse à M. le ministre de l'immigration, de l'intégration, de l'identité nationale et du codéveloppement.

Monsieur le ministre, alerté par le syndicat CGT de l'aéroport Roissy - Charles-de-Gaulle et l'association Réseau éducation sans frontières de la transformation de la salle B33 en zone d'attente pour passagers en instance, j'ai usé, vendredi 4 janvier, de mon droit de visite parlementaire afin de constater par moi-même les conditions d'accueil.

Ce jour-là, soixante-huit hommes et femmes de toutes nationalités, notamment tchétchène et somalienne, y attendaient le traitement de leur dossier de demande d'asile, certains depuis plus de quatre jours.

Monsieur le ministre, les conditions d'accueil de cette salle sont épouvantables et ne correspondent absolument pas à un accueil prolongé : pas de lit, pas de douche, pas de table, pas de téléphone pour les contacts extérieurs et le suivi des dossiers, peu de place pour circuler ; bref, une promiscuité scandaleuse pour des personnes qui séjournent en moyenne trois ou quatre jours dans ce hall d'embarquement inadapté à l'hébergement.

Quelques instants plus tard, alerté de nouveau par les associations de soutien aux demandeurs d'asile, j'ai visité deux salles de maintien au poste de police de la zone A et j'ai été scandalisé par le manque d'hygiène de ces locaux qui accueillent des familles avec enfants. Les WC et la douche étaient dans un état de saleté indescriptible. Je vous conseille de faire cette visite, monsieur le ministre, et, si possible, de la faire à l'improviste.

J'en viens à ma question : est-ce l'illustration de cette nouvelle « politique de civilisation » défendue par le Président de la République que d'accueillir des étrangers en demande d'asile politique dans de telles conditions ?

Monsieur le ministre, l'ensemble de vos déclarations montre votre souci permanent de la comptabilité des sorties du territoire : 22 000, 23 000, 24 000, 25 000... Peut-on espérer que vous anticipiez aussi les entrées afin de prévoir des conditions d'accueil dignes pour les entrants, qui n'ont d'autre tort que d'espérer une vie décente ou de vouloir échapper à la torture ou à la mort dans leur pays ? (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.)

M. le président. La parole est à M. le ministre.

M. Brice Hortefeux, ministre de l'immigration, de l'intégration, de l'identité nationale et du codéveloppement. Monsieur le sénateur, vous m'interrogez sur les conditions d'accueil dans la zone d'attente de Roissy.

Comme vous le savez, cette zone permet d'accueillir des ressortissants étrangers qui, à leur arrivée sur le territoire français, soit ne disposent pas de visa, soit ne remplissent pas les conditions pour séjourner légalement en France.

Ils peuvent y être accueillis, vous l'avez évoqué, pour des durées variables, qui peuvent aller jusqu'à vingt jours, naturellement sous le contrôle des juges et selon une procédure qui a été définie par la loi ; au terme de la période d'attente, il est possible de déterminer si l'étranger doit être refoulé ou si, au contraire, il peut être admis.

Cela dit, vous avez raison, monsieur le sénateur, et je ne le conteste absolument pas, il y a eu une évolution, due à un phénomène constaté depuis, grosso modo, le 15 ou le 20 décembre : il s'est produit une augmentation du nombre de ressortissants étrangers, majoritairement soit russes, c'est-à-dire d'origine tchétchène, ayant souvent transité par l'Ukraine - et il faudrait sans doute mener une réflexion à propos d'une agence de voyage ayant organisé ces déplacements -, soit somaliens, provenant donc de la corne de l'Afrique.

Quelle était, ce matin-même, la situation dans la zone d'attente ? Il y avait 267 étrangers, ce qui est au-delà de la capacité d'accueil puisque celle-ci est de 164 personnes.

Naturellement, ce n'est pas la situation que vous avez sans doute connue en 2000 - je ne doute en effet pas une seule seconde que, alerté aussi à l'époque par la CGT et par RESF, vous vous soyez rendu sur place à l'époque - alors qu'il y avait, régulièrement, de 400 à 500 personnes dans la zone d'attente. Nous n'en sommes pas aujourd'hui à ce stade, mais il est vrai qu'il y a une centaine de personnes surnuméraires.

Cependant, ne croyez pas que nous sommes restés les bras ballants : nous avons tenté d'agir le plus rapidement et le plus efficacement possible, mais, vous le savez, ce n'est pas simple.

D'abord, sur le plan pratique, j'ai fait réquisitionner des locaux qui appartiennent à Aéroports de Paris et, avec le concours de la sécurité civile et celui de la Croix-Rouge, nous avons essayé d'aménager au mieux les lits et les équipements sanitaires, mais aussi d'installer des cabines téléphoniques pour que les communications puissent être établies.

Ensuite, sur le plan juridique, l'OFPRA, l'office français de protection des réfugiés et des apatrides, dont relèvent ces dossiers étant engorgés, j'ai renforcé ses moyens pour qu'il puisse exercer une permanence accrue et pour que les dossiers soient examinés le plus rapidement possible.

Je rappelle, mais vous le savez, que je n'ai pas d'influence sur l'OFPRA, qui ne dépend pas de moi et se prononce en toute indépendance. (Exclamations sur les travées du groupe CRC.)

Très concrètement, il y a effectivement une situation particulière, et nous faisons le maximum pour la résoudre ; nous le faisons avec le souci de respecter les droits et les libertés individuels, mais aussi les règles d'un État de droit. (Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UC-UDF.)

M. le président. Nous en avons terminé avec les questions d'actualité au Gouvernement.

Mes chers collègues, nous allons maintenant interrompre nos travaux quelques instants.

La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à seize heures, est reprise à seize heures quinze, sous la présidence de M. Guy Fischer.)

PRÉSIDENCE DE M. Guy Fischer

vice-président

M. le président. La séance est reprise.

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Article 4 (interruption de la discussion)
Dossier législatif : projet de loi relatif à la réforme de l'organisation du service public de l'emploi
Article 5

Service public de l'emploi

Suite de la discussion et adoption d'un projet de loi déclaré d'urgence

M. le président. Nous reprenons la discussion du projet de loi, déclaré d'urgence, relatif à la réforme du service public de l'emploi.

Dans la discussion des articles, nous en sommes parvenus à l'article 5.

Discussion générale
Dossier législatif : projet de loi relatif à la réforme de l'organisation du service public de l'emploi
Article 6

Article 5

I. - Une instance nationale provisoire est chargée de préparer la mise en place de l'institution mentionnée à l'article L. 311-7 du code du travail. À cette fin, elle élabore notamment le projet d'organisation des services de cette institution. Elle établit le budget de l'institution pour son premier exercice, qui commence à la date de la création de cette institution. Elle veille à la mise en oeuvre des procédures obligatoires d'information et de consultation des instances représentatives du personnel concernées, notamment en application du livre IV du code du travail.

Cette instance nationale est composée d'un conseil et d'un délégué général.

II. - Le conseil de l'instance nationale comprend :

1° Cinq représentants de l'État ;

2° Cinq membres représentant les employeurs et cinq membres représentant les salariés ;

3° Trois personnalités qualifiées choisies en raison de leurs compétences dans les domaines d'activités de l'institution mentionnée à l'article L. 311-7 du code du travail.

Les représentants des employeurs et les représentants des salariés sont désignés par les organisations syndicales de salariés et d'employeurs représentatives au niveau national et interprofessionnel mentionnés à l'article L. 352-2 du code du travail.

Les personnalités qualifiées sont désignées par le ministre chargé de l'emploi.

Les membres du conseil sont nommés par arrêté du ministre chargé de l'emploi. Leur mandat prend fin à la date d'installation du conseil d'administration de l'institution mentionnée à l'article L. 311-7 du code du travail.

Le président est élu par le conseil en son sein.

III. - Le délégué général est nommé par décret, après avis du conseil. Pour accomplir les missions que lui confie le conseil, dans la limite des missions dévolues à l'institution mentionnée à l'article L. 311-7 du code du travail, il dispose des services de l'Agence nationale pour l'emploi et des services de l'Unédic et des Assédic. Il reçoit mandat du conseil pour négocier et, le cas échéant, conclure la convention collective prévue à l'article L. 311-7-7 du même code ainsi qu'un accord préalable à la négociation de cette convention collective qui en fixe le cadre, et tous autres accords ou conventions nécessaires à la mise en place de l'institution mentionnée à l'article L. 311-7.

IV. - À compter de sa création, l'institution prévue à l'article L. 311-7 du code du travail reprend les engagements souscrits au nom de l'instance nationale prévue au I, qui sont alors réputés avoir été dès l'origine contractés par celle-là.

M. le président. L'amendement n° 14, présenté par Mme Procaccia, au nom de la commission, est ainsi libellé :

Compléter la deuxième phrase du premier alinéa du I de cet article par les mots :

et engage la procédure aboutissant au choix du nom de l'institution

La parole est à Mme le rapporteur.

Mme Catherine Procaccia, rapporteur de la commission des affaires sociales. Nous avons évoqué, pendant la discussion générale, cet amendement auquel je tiens, et je sais déjà que j'ai réussi à convaincre Mme la ministre.

Il s'agit du nom de la nouvelle institution. Comme je le disais hier, beaucoup de personnes que nous avons auditionnées ont souhaité que nous baptisions cette institution, estimant qu'une dénomination telle qu'« institution définie à l'article L. ... » n'avait rien de très mobilisateur.

Pour ma part, je considère que l'une des premières tâches de la nouvelle instance qui va être mise en place consistera précisément à se donner un nom, puis à choisir un logo, une identité graphique, voire une musique spécifique pour l'attente téléphonique, afin que l'ensemble des salariés qui relèveront encore de l'ANPE ou de l'UNEDIC puissent s'approprier ce nom et avoir vraiment le sentiment de participer à la naissance de l'institution, éventuellement en étant associés à ces choix que je viens d'évoquer.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme Christine Lagarde, ministre de l'économie, des finances et de l'emploi. Je n'ai rien à ajouter aux propos de Mme le rapporteur : je suis totalement d'accord avec son analyse. L'avis du Gouvernement est favorable.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 14.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. Je suis saisi de deux amendements faisant l'objet d'une discussion commune.

L'amendement n° 103, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :

I. - Dans le quatrième alinéa (3°) du II de cet article, remplacer le mot :

trois

par le mot :

deux

II. - Après ce même alinéa, insérer un alinéa ainsi rédigé :

4° Un représentant des régions, des départements et des communes, désigné conjointement par l'Association des régions de France, l'Assemblée des départements de France et l'Association des maires de France.

La parole est à Mme la ministre.

Mme Christine Lagarde, ministre. Cet amendement tire les conséquences des modifications adoptées à l'article 2 afin de conserver la même composition à la fois au conseil de l'instance nationale provisoire et au conseil d'administration de la nouvelle institution.

M. le président. L'amendement n° 84, présenté par Mmes Demontès et Jarraud-Vergnolle, M. Godefroy, Mmes Printz, Schillinger et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :

Après le 3° du II de cet article, insérer un 4° ainsi rédigé :

4° un représentant de chaque niveau de collectivité territoriale.

La parole est à Mme Christiane Demontès.

Mme Christiane Demontès. Je prends acte de l'avancée qui est réalisée concernant la représentation des collectivités territoriales, même si je souhaitais que l'on aille un peu plus loin à cet égard. Cependant, compte tenu de la modification précédemment apportée et de la nécessaire correspondance des formes, je vais retirer mon amendement.

Toutefois, j'aimerais que, auparavant, Mme la ministre veuille bien nous confirmer qu'un représentant titulaire et un représentant suppléant des collectivités territoriales seront bien désignés sur proposition conjointe des associations des collectivités concernées, ainsi qu'elle l'a affirmé ce matin.

Mme Christine Lagarde, ministre. Je confirme, madame la sénatrice, qu'il y aura bien un titulaire et un suppléant.

Mme Christiane Demontès. Dans ces conditions, je retire mon amendement, monsieur le président.

M. le président. L'amendement n° 84 est retiré.

Quel est l'avis de la commission sur l'amendement n° 103 ?

Mme Catherine Procaccia, rapporteur. Favorable.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 103.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. L'amendement n° 60, présenté par Mme David, MM. Fischer et Autain, Mme Hoarau et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :

I. Dans la première phrase du III de cet article, supprimer les mots :

, après avis du conseil

II. Après le mot :

négocier

rédiger comme suit la fin de la troisième phrase du même III :

avec les organisations syndicales représentatives du personnel de l'Agence nationale pour l'emploi et des ASSEDIC et, le cas échéant, conclure le statut public du personnel prévu à l'article L. 311-7-7.

La parole est à Mme Annie David.

Mme Annie David. Cet amendement tend simplement à rappeler le statut public des agents de la future institution.

Nous savons, depuis le début de ce débat et après les échanges que nous avons eus, que telle n'est pas votre volonté, madame la ministre, ce qui revient à dire que l'institution sera publique, tandis que les modalités de fonctionnement, les règles de comptabilité et de gestion seront privées, ainsi que, progressivement, le statut du personnel.

L'institution qui va donc être créée sera un « OJNI », un objet juridique non identifié. Il semble que, dans les projets du Gouvernement, la vérité est ailleurs.

Nous vous avons offert, tout au long de ce débat, la possibilité de constituer un réel service public, reconnu comme tel, en précisant qu'il s'agit d'un établissement public administratif. Je déplore donc votre décision et je souhaite que mon amendement soit voté.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

Mme Catherine Procaccia, rapporteur. La commission est défavorable à cet amendement qui va dans le sens inverse d'une disposition précédemment votée.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme Christine Lagarde, ministre. Même avis que la commission.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 60.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'article 5, modifié.

(L'article 5 est adopté.)