M. Michel Charasse. Comment, mais non ? Je lis « ou ». Dans ce cas, mettez « et », ce sera plus simple ! Si vous ne voulez pas, c’est que le « ou » est un « Ouh ! Ouh ! Au secours ! »

M. le président. Quel est l’avis de la commission sur le sous-amendement n° 518 ?

M. Jean-Jacques Hyest, rapporteur. Je souhaite que le Sénat se prononce sur les amendements de suppression. Ensuite, je le répète, je demanderai la priorité de vote de l'amendement n° 118, car en voilà assez ! (Exclamations sur certaines travées du RDSE, ainsi que sur les travées du groupe socialiste.)

M. Roger Karoutchi, secrétaire d'État. Très bien !

M. Jean-Jacques Hyest, rapporteur. Monsieur Charasse, vous avez assisté à l’ensemble de la discussion sur l'article 18. J’ai déjà précisé que, dans le cadre des procédures simplifiées d’examen en séance publique de textes portant sur des sujets techniques qui seraient autorisées par la conférence des présidents, l’examen en commission aurait valeur délibérative et il ne serait pas nécessaire de reprendre en séance publique les amendements rejetés en commission. Voilà pourquoi nous sommes obligés d’introduire le « ou ».

M. Roger Karoutchi, secrétaire d'État. Évidemment !

M. Jean-Jacques Hyest, rapporteur. Cette procédure ne s’appliquera que dans ce cadre-là !

Vous imaginez bien que le droit d’amendement s’exercera à la fois en commission et en séance publique pour les débats complexes.

Je pensais avoir été suffisamment clair. Certes, on peut rejeter la procédure simplifiée d’examen des textes en séance publique et refuser la modernisation du Parlement, mais je doute que ce soit votre point de vue, mon cher collègue ! (M. Michel Charasse s’exclame.)

C’est pourquoi la commission émet un avis défavorable sur le sous-amendement n° 518.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Roger Karoutchi, secrétaire d'État. Même avis !

M. le président. La parole est à M. Michel Charasse, pour explication de vote sur le sous-amendement n° 518.

M. Michel Charasse. Je ne veux pas me fâcher avec vous, monsieur Hyest. Mais admettez que le rapport de la commission est beaucoup trop succinct sur cette question et que, s’il avait été explicité comme vous venez de le faire, il n’y aurait plus de doute.

Si cette disposition ne s’applique que dans le cadre des débats simplifiés, je n’ai plus de problème et je peux retirer mon sous-amendement.

M. le président. Le sous-amendement n° 518 est retiré.

Je mets aux voix les amendements identiques nos 204 et 473.

Je suis saisi d'une demande de scrutin public émanant du groupe socialiste.

Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.

(Le scrutin a lieu.)

M. le président. Personne ne demande plus à voter ?…

Le scrutin est clos.

(Il est procédé au comptage des votes.)

M. le président. Voici le résultat du dépouillement du scrutin n° 112 :

Nombre de votants 327
Nombre de suffrages exprimés 327
Majorité absolue des suffrages exprimés 164
Pour l’adoption 126
Contre 201

Le Sénat n'a pas adopté.

La parole est à M. le rapporteur.

M. Jean-Jacques Hyest, rapporteur. Monsieur le président, je demande le vote par priorité de l'amendement n° 118.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement sur cette demande de priorité formulée par la commission ?

M. Roger Karoutchi, secrétaire d'État. Favorable !

M. le président. La priorité, de droit, est ordonnée.

Je mets aux voix le sous-amendement n° 338.

(Le sous-amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix le sous-amendement n° 514.

Je suis saisi d'une demande de scrutin public émanant du groupe CRC.

Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.

(Le scrutin a lieu.)

M. le président. Personne ne demande plus à voter ?…

Le scrutin est clos.

(Il est procédé au comptage des votes.)

M. le président. Voici le résultat du dépouillement du scrutin n° 113 :

Nombre de votants 326
Nombre de suffrages exprimés 319
Majorité absolue des suffrages exprimés 160
Pour l’adoption 118
Contre 201

Le Sénat n'a pas adopté.

Je mets aux voix le sous-amendement n° 508.

(Le sous-amendement n'est pas adopté.)

M. le président. La parole est à M. Pierre Fauchon, pour explication de vote sur l'amendement n° 118.

M. Pierre Fauchon. Les membres de mon groupe, comme tous ceux qui siègent dans cette assemblée, d’ailleurs, considèrent que la pleine liberté de proposition et de vote des amendements ainsi que leur débat en public constituent l’élément essentiel du pouvoir législatif.

M. Jean-Jacques Hyest, rapporteur. Oui !

M. Pierre Fauchon. Nous ne l’ignorons pas.

Pour autant, nous sommes de ceux qui pensent depuis longtemps que, si nous parvenions à élaborer une procédure d’examen simplifiée, nous aurions en commission des débats tout aussi riches. Ils le seraient même plus, parce qu’ils seraient plus sereins sur les questions qui s’y prêtent. Il faudrait, naturellement, qu’ils répondent aux critères et modalités décrits en détail aux pages 137 à 139 de l’excellent rapport de notre très excellent rapporteur. (Sourires.)

Cela suppose de définir très précisément les conditions d’examen en commission,...

M. Jean-Jacques Hyest, rapporteur. Bien sûr !

M. Pierre Fauchon. ...si nous voulons évacuer le problème et nous dispenser de l’examen en séance publique, ce que vous n’allez pas jusqu’à proposer, d’ailleurs, monsieur le rapporteur. Mais ce débat deviendrait en quelque sorte une formalité et on peut supposer, la bonne foi régnant entre tous, qu’il ne serait généralement pas demandé et que l’on se contenterait de la commission.

D’ailleurs, d’un point de vue matériel, je ne sais pas très bien comment de telles discussions pourraient avoir lieu dans nos salles de commission. Cette nouvelle procédure suppose en effet la publicité des débats, la présence d’intervenants extérieurs, l’accueil du public. Je souhaite beaucoup de plaisir aux questeurs s’ils doivent se charger de cette organisation : ils auront quelques difficultés ! (M. René Garrec sourit.)

Il n’en reste pas moins que ce nouveau dispositif est tout à fait souhaitable, car il permettrait de restaurer la qualité de nos débats sur des textes importants. Peut-être même faudra-t-il introduire dans le règlement des mesures qui allègent quelque peu le déroulement de l’examen en séance publique, c'est-à-dire qui découragent les procédures dilatoires.

Mes chers collègues, je prends l’exemple du texte que nous examinons actuellement : autant le débat auquel nous assistons depuis quelques jours est excellent, autant la discussion préalable de trois motions de procédure à laquelle nous avons consacré toute une soirée ne nous a pas laissé un souvenir aussi satisfaisant, c’est le moins que l’on puisse dire ! (Marques de désapprobations sur les travées du groupe CRC et du groupe socialiste.)

C’est donc dans cet esprit d’ouverture que mon groupe votera cet amendement.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 118.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. En conséquence, les amendements nos 207, 206 et 205 n'ont plus d'objet.

Je mets aux voix l'amendement n° 474.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'article 18, modifié.

(L'article 18 est adopté.)

M. le président. Mes chers collègues, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à vingt et une heures quarante-cinq, avec l’examen par priorité de l’article  33.

La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à dix-neuf heures quarante-cinq, est reprise à vingt et une heures cinquante, sous la présidence de M. Christian Poncelet.)

PRÉSIDENCE DE M. Christian Poncelet

M. le président. La séance est reprise.

Mes chers collègues, nous poursuivons la discussion du projet de loi constitutionnelle, adopté par l’Assemblée nationale, de modernisation des institutions de la Ve République.

Comme nous en sommes convenus vendredi dernier, le Sénat va examiner, par priorité, l’article 33

Article 18
Dossier législatif : projet de loi  constitutionnelle de modernisation des institutions de la Ve République
Articles additionnels après l'article 18

Article 33 (priorité)

Dans l'article 88-5 de la Constitution, après les mots : « Communautés européennes », sont insérés les mots : «, lorsque la population de cet État représente plus de cinq pour cent de la population de l'Union, ».

M. le président. La parole est à M. Jacques Blanc, sur l'article.

M. Jacques Blanc. Monsieur le président, madame le garde des sceaux, mes chers collègues, l’article 33 suscite des interrogations de notre part. J’ai souhaité intervenir afin de bien marquer que ce texte, tel qu’il ressort des travaux de l’Assemblée nationale, nous paraît inacceptable. Et ce n’est pas seulement en ma qualité de président du groupe d’amitié France-Turquie du Sénat que je le dis. Certes, je ne cache pas mes sentiments à l’égard de ce grand pays, qui a entrepris des réformes considérables, qui se transforme, mais qui est trop souvent encore méconnu en France et victime de préjugés.

Mais il ne s’agit pas de dire aujourd'hui si nous sommes favorables ou opposés à l’entrée de la Turquie dans l’Union européenne. Le débat n’est pas là : aujourd’hui, il s’agit de savoir si l’on inscrit dans la Constitution des règles qui s’appliquent à tous ou si l’on y introduit un cas d’espèce, en contradiction, à mon avis, avec le caractère général de tout texte constitutionnel.

Mes chers collègues, je ne voudrais pas que l’on interprète mon propos comme une plaidoirie en faveur de la Turquie, que j’aime, que je défends, certes, mais qui, quand bien même on ne l’aimerait pas autant, mérite mieux que cet article 33. Ce pays accepte de se soumettre à des procédures que lui impose l’Union européenne, au cours de négociations longues, huit chapitres sur trente-cinq étant d’ores et déjà ouverts.

Personne ne sait si la question de l’entrée de la Turquie dans l’Union européenne sera posée dans dix ans, quinze ans, voire davantage. Personne ne peut d’ailleurs prévoir ce que les Turcs eux-mêmes souhaiteront alors.

En cet instant, je voudrais que l’on ne montre pas du doigt un pays ami, qui est associé à la grande ambition que représente l’Union pour la Méditerranée, lancée par le Président de la République. Je me trouvais, tout à l’heure, à Marseille, où se tient le Forum des autorités locales et régionales de l’Union européenne et de la Méditerranée, au cours de laquelle a été prononcée une intervention très forte à cet égard.

Mes chers collègues, pour ne rien vous cacher, j’ai été tenté de déposer un amendement tendant à appliquer aux traités relatifs aux adhésions à l’Union européenne les mêmes règles que celles qui concernent tout traité, en vertu de la Constitution. Mais, par respect pour les différentes sensibilités, j’y ai renoncé.

En revanche, je soutiens totalement les amendements identiques, présentés par le président de la commission des affaires étrangères du Sénat et par le président de la délégation du Sénat pour l’Union européenne, qui nous permettent de revenir à la proposition sage et équilibrée formulée par le comité Balladur selon laquelle tout élargissement à quelque pays que ce soit doit être ratifié selon la procédure mise en œuvre à l’occasion de toute révision constitutionnelle. Il s’agit d’apporter des sécurités et des garanties.

Une telle mesure respecte un principe de la Ve République en vertu duquel le Président de la République peut décider, après le vote par les deux assemblées d’un projet de loi constitutionnelle, soit de recourir à un référendum, soit de convoquer le Parlement réuni en Congrès, la majorité des trois cinquièmes étant alors requise.

N’allons pas blesser un grand pays ami. Respectons la Constitution. Tel est mon souhait ! (Très bien ! et applaudissements sur les travées de lUMP.)

M. le président. La parole est à Mme Alima Boumediene-Thiery, sur l’article.

Mme Alima Boumediene-Thiery. Monsieur le président, madame le garde des sceaux, mes chers collègues, l’article 33, tel qu’il a été adopté par l’Assemblée nationale, est tout à fait inacceptable, comme vient de l’indiquer M. Jacques Blanc.

Comment peut-on, dans la Constitution, mettre en place un barrage contre l’entrée de la Turquie dans l’Union européenne ? Cette disposition est scandaleuse, indigne et méprisante pour ce pays.

Que l’on soit pour ou contre l’entrée de la Turquie dans l’Union européenne, le projet de loi autorisant la ratification d’un traité d’adhésion doit être adopté dans une forme qui soit la même pour toutes les adhésions. C’est une question de justice.

Prévoir l’organisation automatique d’un référendum pour entériner l’adhésion de la Turquie à l’Union européenne est inique. Pourquoi agir ainsi à l’égard de ce pays et pas d’un autre ? Comment vont réagir les Turcs ? Ils peuvent très légitimement se demander s’ils ne sont pas en butte à une forme de racisme.

Lors du débat relatif à la modification du titre XV de la Constitution, la majorité et le Gouvernement nous ont refusé la possibilité de recourir au référendum pour la ratification du traité de Lisbonne, en prétextant que cette procédure devait rester une prérogative du Président de la République. Cette majorité et ce gouvernement reviennent aujourd’hui sur leur position, en imposant le référendum pour la Turquie. Cette volte-face n’est pas digne de la France, ni sur le plan interne ni d’un point de vue diplomatique.

N’oublions pas deux des principes fondateurs de la Ve République : égalité et universalité. Nous les piétinerions si nous adoptions une disposition qui ne vise qu’un seul pays.

Comme la commission l’a proposé, nous voterons la suppression de cette procédure, au profit de celle, au besoin retouchée, de l’article 89.

M. le président. La parole est à M. Bernard Frimat, sur l’article.

M. Bernard Frimat. Monsieur le président, madame le garde des sceaux, mes chers collègues, les négociations engagées avec la Turquie avancent. C’est la présidence française qui, à partir du 1er juillet prochain, aura la responsabilité de les poursuivre. La décision de les ouvrir a été prise, en son temps, et elle n’a pu être prise qu’à l’unanimité ; cette unanimité aujourd'hui nous engage.

Même si je ne suis pas membre du groupe d’amitié France-Turquie, je pense qu’il faut avoir le courage de dire les choses dans la vie politique.

On a le droit d’être opposé ou favorable à l’adhésion de la Turquie. En revanche, on n’a pas le droit de se cacher derrière une rédaction hypocrite, qui vise une fin bien précise, tout en la dissimulant.

Nous sommes particulièrement à l’aise pour traiter de ce sujet, puisque c’est la deuxième fois que nous avons à en connaître. Nous l’avons abordé au mois de février 2005, lors d’une précédente révision constitutionnelle. Il avait déjà fait l’objet d’une discussion dure au sein de la majorité. En effet, la solution trouvée à l’époque – mes chers collègues siégeant à droite de cet hémicycle, vous l’aviez majoritairement adoptée, alors que, pour notre part, nous nous y étions opposés – consistait à dessaisir tout à la fois le Président de la République de la possibilité de choix qui lui était offerte et le Parlement, réuni en Congrès, de la possibilité de ratifier un traité d’adhésion.

Aujourd’hui, il s’agit de revenir au projet de loi initial – nous avons d’ailleurs déposé un amendement en ce sens – et également à la position que les membres du groupe CRC comme du groupe socialiste avaient défendue et que vous aviez refusée.

Nous sommes pleinement satisfaits de constater que, après trois ans et demi de réflexion, vous êtes maintenant convaincus par les arguments que nous avions présentés à l’époque !

Si nous voulons que nos concitoyens comprennent la situation, il est indispensable d’exposer clairement les données du problème. Deux solutions s’offrent à nous : celle que nous avions proposée dès 2005, qui figure dans le projet de loi, ou celle qui consisterait à maintenir la rédaction actuelle de la Constitution. Il n’y a pas d’autres solutions, et surtout pas l’adoption de l’insupportable rédaction qui nous est soumise, insupportable parce qu’elle vise un pays, sans avoir le courage de l’assumer.

Tels sont les propos que je souhaitais tenir, monsieur le président, afin d’exposer le point de vue des membres du groupe socialiste, au début de ce débat spécifique sur l’article 33.

M. le président. Je suis saisi de neuf amendements faisant l’objet d’une discussion commune.

L’amendement n° 241, présenté par Mmes Borvo Cohen-Seat, Assassi, Mathon-Poinat et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :

Supprimer cet article.

La parole est à M. Bernard Vera.

M. Bernard Vera. Initialement, le projet de loi visait à revenir sur la disposition qui avait été introduite dans la Constitution, en 2005, sur l’initiative de Jacques Chirac.

Nous avions souligné, à l’époque, le caractère politicien de la mesure tendant à rendre obligatoire l’organisation d’un référendum sur l’adhésion de nouveaux États à l’Union européenne, indépendamment de l’entrée en vigueur du traité établissant une Constitution pour l’Europe. Il s’agissait en effet d’une disposition d’opportunité destinée à rassurer une partie de la majorité hostile à l’entrée de la Turquie dans l’Union européenne.

Il n’empêche, surtout après le refus d’organiser un référendum sur le traité de Lisbonne, que le fait de prévoir une automaticité de la consultation revêt un caractère démocratique positif.

Le projet de loi initial de modernisation des institutions de la Ve République tendait à revenir sur cette disposition en prévoyant que toute loi autorisant la ratification d’un traité élargissant l’Union européenne était adoptée après un vote en termes identiques des deux chambres, selon deux procédures alternatives : soit la voie référendaire, soit la voie du Parlement réuni en Congrès, avec la nécessité d’obtenir la majorité des trois cinquièmes des suffrages exprimés.

Mais l’Assemblée nationale a décidé l’organisation obligatoire d’un référendum préalable à l’entrée éventuelle de la Turquie dans l’Union européenne, tout en écartant cette obligation pour d’autres pays candidats. S’est ensuivie une rédaction compliquée et confuse faisant appel à la démographie et rendant obligatoire le référendum pour les seuls États dont la population représente plus de 5 % de la population de l’Union.

Cette disposition témoigne d’une certaine duplicité de la part du Président de la République, farouche opposant à l’entrée de la Turquie dans l’Union européenne !

Le fait que le Gouvernement se soit finalement rallié à cette solution proposée par les députés de l’UMP montre bien a posteriori toute l’hypocrisie de la version initiale du projet de loi de révision constitutionnelle.

La disposition de l’article 33 qui formalise un traitement discriminatoire réservé à la Turquie est proprement scandaleuse ! C’est pourquoi le groupe communiste républicain et citoyen souhaite que cet article soit supprimé du projet de loi constitutionnelle.

Mais soyons clairs : si le groupe communiste républicain et citoyen est opposé à l’instauration d’un référendum obligatoire spécifiquement pour l’entrée dans l’Union européenne de la Turquie, ce qui constituerait une discrimination inacceptable, il estime que le peuple doit pouvoir se prononcer directement sur l’entrée dans l’Union de tout État.

M. le président. L’amendement n° 242, présenté par Mmes Borvo Cohen-Seat, Assassi, Mathon-Poinat et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :

Rédiger comme suit cet article :

Dans l'article 88-5 de la Constitution, les mots : « à l'adhésion d'un État » sont supprimés.

La parole est à M. Bernard Vera.

M. Bernard Vera. Notre amendement vise à donner la parole aux Françaises et aux Français pour tout projet de loi autorisant la ratification d’un traité relatif à l’Union européenne et aux Communautés européennes.

Faut-il rappeler que, par référendum en date du 29 mai 2005, le peuple français a massivement refusé d’autoriser la ratification du traité établissant une Constitution pour l’Europe ? Par cet acte de souveraineté, le peuple a signifié de la manière la plus forte qui soit son rejet de l’Europe libérale consacrée par ce texte.

Confrontés à leur échec, les dirigeants européens ont alors décidé la « relance » de l’Union européenne en contournant la volonté des peuples. Les États membres ont tout orchestré sans consulter ni informer les citoyens européens.

Le traité de Lisbonne devait passer coûte que coûte, à n’importe quel prix ... démocratique ! Telle était l’idée commune à tous les tenants de la « Constitution européenne » et de son prolongement, le traité de Lisbonne !

En France, comme dans les autres États membres de l’Union européenne, le choix de la ratification par la voie parlementaire est éminemment politique. Il exprime le manque de courage de nos dirigeants dès lors qu’il s’agit de soumettre la question directement au peuple.

Le traité a été conçu pour éviter le recours au référendum, mais surtout pour éviter que l’on ait à expliquer son contenu. Le refus d’organiser un référendum a attesté de la volonté de soustraire ce texte au débat public.

En France, on aurait pourtant pu penser, à la lecture de la Constitution française, que le recours au référendum allait de soi sur une telle question. En effet, si la procédure normale de ratification d’un traité relève du Parlement, l’article 11 de la Constitution de 1958 dispose que, lorsqu’un traité, sans être contraire à la Constitution, est susceptible d’avoir des incidences sur le fonctionnement des institutions, le Président de la République peut demander l’accord du suffrage universel.

C’était le cas pour le traité constitutionnel européen et, évidemment, pour le traité de Lisbonne, puisque ce dernier reprenait les principales dispositions novatrices prévues par le traité constitutionnel de 2004.

On aurait donc pu légitimement s’attendre à l’organisation d’un référendum en vue de la ratification du traité de Lisbonne. Cela n’a été le cas ni en France ni dans vingt-cinq autres États membres de l’Union européenne. Seul le gouvernement irlandais a dû recourir au référendum, la constitution de la République irlandaise lui en faisant obligation.

Le résultat était clair et prévisible : lorsque le peuple se prononce directement sur la construction européenne qu’on lui propose, il s’exprime massivement et la refuse.

Aussi faut-il bien comprendre que le déficit démocratique originel dont souffre la construction européenne ne se résorbera pas en écartant le peuple et en ne le consultant pas sur les orientations décidées par les dirigeants européens !

Chacun doit comprendre que l’utilisation de la démocratie représentative pour échapper à l’expression directe du peuple dénature le rôle du Parlement, qui se trouve ainsi, une nouvelle fois, instrumentalisé par l’exécutif.

M. le président. Les six amendements suivants sont identiques.

L’amendement n° 133 est présenté M. Hyest, au nom de la commission des lois.

L’amendement n° 142 est présenté par M. de Rohan, au nom de la commission des affaires étrangères.

L’amendement n° 292 rectifié est présenté par MM. Mercier, Arthuis, Amoudry, Badré et Biwer, Mme Dini, M. Fauchon, Mmes Férat, Gourault et Payet, MM. Soulage, Deneux et Merceron, Mme Morin-Desailly, MM. Nogrix, J.L. Dupont, Dubois, C. Gaudin, Zocchetto, Pozzo di Borgo et les membres du groupe Union centriste - UDF.

L’amendement n° 395 est présenté par MM. Baylet, A. Boyer, Collin, Delfau et Fortassin.

L’amendement n° 396 rectifié est présenté par MM. Haenel, de Raincourt, Courtois, Dulait, J. Blanc, Alduy, P. André, Balarello, Beaumont, Bécot, Bernard-Reymond, Besse, Béteille et Bourdin, Mme Bout, MM. Braye, de Broissia, Brun, Buffet, Cambon, Cantegrit, Carle, Cazalet, César, Chauveau, Cléach et Couderc, Mme Debré, MM. del Picchia, Demuynck, Doligé et Doublet, Mme B. Dupont, MM. Duvernois, Émin, Emorine, Etienne, Faure, Ferrand, Fouché, Fourcade, Gaillard et Garrec, Mmes Garriaud-Maylam et G. Gautier, MM. J. Gautier, Gélard, Gérard, Girod, Gournac, Grignon, Gruillot, Guené et Guerry, Mmes Henneron et Hermange, MM. Houel, Huré et Juilhard, Mmes Keller et Lamure, MM. G. Larcher, Leclerc, Le Grand, Leroy, Loueckhote et du Luart, Mmes Malovry et Mélot, M. Milon, Mmes Panis et Papon, MM. Pierre, Pinton, Portelli, Puech, Raffarin, Revet, de Richemont, Richert et Romani, Mme Rozier, MM. Saugey et Sido, Mme Sittler, M. Trillard, Mme Troendle et MM. Trucy, Valade, Vasselle et Vial.

L’amendement n° 493 est présenté par MM. Frimat, Badinter, Bel, Dreyfus-Schmidt, C. Gautier, Mauroy, Peyronnet, Sueur, Yung et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés.

Ces amendements sont ainsi libellés :

Rédiger comme suit cet article :

L'article 88-5 de la Constitution est ainsi rédigé :

« Art. 88-5. - Tout projet de loi autorisant la ratification d'un traité relatif à l'adhésion d'un État à l'Union européenne et aux Communautés européennes est adopté selon la procédure prévue aux deuxième et troisième alinéas de l'article 89. »

La parole est à M. le rapporteur, pour défendre l’amendement n° 133.

M. Jean-Jacques Hyest, rapporteur. C’est M. le rapporteur pour avis, auteur d’un amendement identique, qui défendra les deux amendements, monsieur le président.

M. le président. La parole est donc à M. le rapporteur pour avis, pour présenter l’amendement n° 142.

M. Josselin de Rohan, président de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées, rapporteur pour avis. Cet amendement vise à revenir au texte initial du Gouvernement, qui prévoyait la possibilité pour les pays sollicitant l’adhésion à l’Union européenne d’obtenir une ratification soit par la voie référendaire, soit par la voie parlementaire.

Il tend donc à la suppression de l’amendement voté par l’Assemblée nationale, que je qualifierai, comme les orateurs précédents, de discriminatoire, d’offensant à l’égard d’un pays ami et allié, mais également d’inutile. En effet, s’agissant de l’ouverture des négociations d’adhésion de la Turquie, les mesures de précaution sont telles que cette adhésion, si jamais elle a lieu un jour, n’aboutira pas avant une dizaine ou une quinzaine d’années, à moins que la Turquie, comme le faisait remarquer Jacques Blanc, ne se désintéresse en cours de route de ce processus et n’y renonce.

Par ailleurs, nous souhaitons que l’on cesse de lier les mains du Président de la République qui doit, en l’occurrence, avoir le choix de la procédure. S’il estime qu’il est conforme aux intérêts du pays de procéder par référendum, il décidera de mettre en œuvre cette procédure. S’il considère, en revanche, que la voie parlementaire est préférable, il décidera d’une ratification parlementaire.

Je précise que la ratification par la voie parlementaire suppose que le Parlement se réunisse en Congrès et se prononce pour l’adhésion à la majorité des trois cinquièmes, ce qui représente la quasi-unanimité du Parlement. (Mme Nicole Borvo Cohen-Seat s’exclame.)

Dans ces conditions, je vous invite, mes chers collègues, à voter la suppression de l’article 33 issu de la rédaction de l’Assemblée nationale.

Mais je souhaite aller plus loin en vous disant qu’il me paraît indispensable, compte tenu de l’état de profonde détérioration des relations franco-turques, que nous renouions des liens avec ce pays. (Bravo ! et applaudissements sur les travées de lUMP.)

Nous avons à nous prononcer, ce soir, non pas sur une éventuelle adhésion de la Turquie à l’Union européenne, mais sur une procédure constitutionnelle, et sur rien d’autre !

Je souhaite que nous adressions un témoignage d’amitié à ce grand pays. En effet, s’il est possible de discuter de la légitimité de son adhésion à l’Union européenne, on ne peut nier le rôle extrêmement positif que joue la Turquie dans les relations internationales.

Si des contacts ont été noués entre la Syrie et Israël, c’est à la Turquie qu’on le doit ! (Applaudissements sur les travées de lUMP.)