Mme la présidente. L'amendement n° 492, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :

Rédiger comme suit l'annexe B :

RAPPORT DÉCRIVANT LES PRÉVISIONS DE RECETTES ET LES OBJECTIFS DE DÉPENSES PAR BRANCHE DES RÉGIMES OBLIGATOIRES DE BASE ET DU RÉGIME GÉNÉRAL, LES PRÉVISIONS DE RECETTES ET DE DÉPENSES DES ORGANISMES CONCOURANT AU FINANCEMENT DE CES RÉGIMES AINSI QUE L'OBJECTIF NATIONAL DE DÉPENSES D'ASSURANCE MALADIE POUR LES QUATRE ANNÉES À VENIR

Hypothèses d'évolution moyenne sur la période 2009-2012

 

2009

2010

2011-2012

Produit intérieur brut en volume

0,5%

2,0%

2,5%

Masse salariale du secteur privé

2,75%

4,0%

4,6%

Objectif national de dépenses d'assurance maladie (en valeur)

3,3%

3,3%

3,3%

Inflation (hors tabac)

1,5%

1,75%

1,75%

Dans le cadre du projet de loi de programmation des finances publiques pour les années 2009 à 2012 délibéré en Conseil des ministres le 26 septembre 2008, le Gouvernement a présenté une trajectoire de retour à l'équilibre des finances sociales pour que le régime général revienne à l'équilibre en 2012. L'impact exceptionnel de la crise financière et économique conduit à modifier ce scénario comme l'a décrit le Gouvernement lors de la discussion du projet de loi de programmation des finances publiques au Sénat le 6 novembre 2008. Le Gouvernement propose de maintenir ses objectifs de dépenses, sans adopter de mesures augmentant les prélèvements obligatoires qui pourraient handicaper davantage la situation de l'économie.

Il convient de rappeler dans ce cadre que les efforts entrepris ces dernières années, et qui ont porté leurs fruits, seront poursuivis et approfondis, afin d'adapter le système de protection sociale aux enjeux de demain.

Le scénario économique retenu dans le cadre de la programmation pluriannuelle des finances publiques repose sur une hypothèse de croissance de 0,5 % en 2009, puis 2,0 % en 2010, puis 2,5 % par an à partir de 2011. Le rebond de croissance dès 2010 repose sur l'hypothèse conventionnelle d'un retour progressif de l'environnement international sur un sentier de croissance moyen, et un rattrapage partiel des retards de croissance accumulés en 2008 et 2009.

Dans ce contexte, avec une progression de la masse salariale de 2,75 % en 2009, puis 4,0 % en 2010 et 4,6 % les années suivantes, la stratégie de redressement financier du régime général d'ici 2012 repose sur trois leviers principaux :

- une maîtrise constante de la dépense pour accroître encore son efficience ;

- une adaptation des ressources au sein de la protection sociale, sans hausse de prélèvement, et une sécurisation des recettes par un meilleur encadrement des « niches » sociales ;

- un assainissement de la situation des comptes en 2009 afin de démarrer la période de programmation avec une situation apurée des déficits du passé.

1. Il faut tenir une progression de l'objectif national des dépenses d'assurance maladie qui ne peut être supérieur à 3,3 % en valeur sur la période 2009-2012. Cet effort de maîtrise des dépenses, réaliste, implique de mobiliser l'ensemble des marges d'efficience du système de santé.

Les efforts de maîtrise des dépenses devront donc porter sur plusieurs axes :

- la régulation des dépenses de soins de ville, notamment sur les postes qui connaissent une croissance forte (médicaments, dispositifs médicaux,...) avec une meilleure association des organismes complémentaires aux actions de maîtrise des dépenses ;

- la réforme de l'hôpital pour en améliorer l'efficience ;

- le renforcement de la gestion du risque dans l'ensemble des domaines, ambulatoire, hospitalier et médico-social.

2. Compte tenu du caractère ambitieux des objectifs de maîtrise de la dépense, la trajectoire cible de redressement des finances sociales ne pourra être respectée qu'à la condition que la ressource sociale évolue au même rythme que la richesse nationale.

Cet objectif impose tout d'abord que les ressources actuelles soient réparties au mieux entre les fonctions sociales et qu'elles soient notamment redéployées en direction de l'assurance vieillesse pour faire face au vieillissement de la population. Le redressement des comptes de l'assurance vieillesse repose donc sur une prise en charge par la branche Famille de dépenses de retraites à caractère familial : les majorations de pensions pour enfants, dont 1,8 milliard d'euros sont aujourd'hui à la charge du Fonds de solidarité vieillesse (FSV), seront donc intégralement prises en charge par la branche Famille d'ici 2011. Par ailleurs, comme envisagé lors des débats sur la loi du 21 août 2003, l'amélioration d'ores et déjà constatée de la situation financière de l'assurance chômage, et qui n'est pas radicalement remise en question pour l'avenir, pourrait permettre une baisse des cotisations d'assurance chômage qui viendrait neutraliser l'impact du relèvement progressif des cotisations vieillesse (0,3 point en 2009, 0,4 point en 2010 et 0,3 point en 2011).

Ces réallocations de ressources au sein de la protection sociale permettront de réduire de près de moitié le déficit de la Caisse nationale d'assurance vieillesse entre 2008 (-5,8 milliards d'euros) et 2012 (-3,1 milliards d'euros). Au-delà de l'apport de ressources nouvelles, la clef du redressement des comptes de l'assurance vieillesse repose sur l'amélioration de l'emploi des seniors : le Gouvernement propose plusieurs mesures fortes dans le cadre de la présente loi et prévoit de faire un nouveau bilan de leur efficacité et de la situation des comptes de l'assurance vieillesse en 2010.

Plus généralement, la préservation de ressources globales dynamiques pour la protection sociale, dans un contexte de stabilité des taux de prélèvement sur les salaires, exige d'éviter toute forme d'érosion de l'assiette du prélèvement, grâce à une lutte plus sévère contre la fraude, un encadrement des formes d'optimisation conduisant à des pertes de recettes trop importantes et également une meilleure maîtrise du développement des « niches » sociales. Le projet de loi de programmation des finances publiques prévoit trois règles pour mieux encadrer les dispositifs d'exonération, de réduction ou d'abattement d'assiette : une évaluation systématique des dispositifs trois ans après leur création, un objectif annuel de coût des exonérations, réductions ou abattements d'assiette et la mise en place d'une règle de gage en cas de création ou d'augmentation d'une niche.

3. La trajectoire de retour à l'équilibre repose enfin sur un effort significatif fait dès 2009 pour assainir et clarifier les comptes.

La reprise des déficits cumulés des branches Maladie et Vieillesse du régime général, ainsi que ceux du Fonds de solidarité vieillesse par la CADES, prévue par la présente loi, permet au régime général d'économiser des charges d'intérêt à hauteur de 1,1 milliard d'euros. Afin de respecter l'objectif de stabilisation du taux de prélèvements obligatoires et de ne pas allonger la durée de vie de la CADES, celle-ci bénéficie d'une partie de la contribution sociale généralisée aujourd'hui affectée au FSV. Le FSV, qui bénéficie, dès 2009, de la reprise de sa propre dette de 3,9 milliards d'euros, connaît un déficit temporaire qui se réduit à 200 millions d'euros à l'horizon 2012.

En outre, la question du financement du régime de protection sociale des exploitants agricoles est traitée dans le cadre de la loi de finances et de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2009, ce qui conduit à la suppression du fonds de financement des prestations sociales des non-salariés agricoles à partir de 2009. La dette accumulée par le fonds de financement des prestations sociales des non-salariés agricoles sera reprise par l'État. Par ailleurs, une garantie pérenne de financement sera assurée pour les prestations maladie, grâce d'une part à un apport de ressources nouvelles en provenance de l'État (1,2 milliard d'euros) et d'autre part à l'intégration financière de cette branche au régime général. La Mutualité sociale agricole, qui assure la gestion de l'ensemble des prestations, prend en charge le financement de la branche Vieillesse dans le cadre d'une autorisation d'emprunt à court terme donnée par la loi de financement de la sécurité sociale. Un bilan sera fait en 2010 sur les moyens de rééquilibrer aussi la branche Vieillesse de la protection sociale des exploitants agricoles, qui bénéficie dès 2009 des économies de 200 millions d'euros de frais financiers liés à la reprise de dette par l'État. 

 

Régime général

 

 

 

 

 

(en milliards d'euros)

 

2007

2008

2009

2010

2011

2012

Maladie

 

 

 

 

 

 

Recettes

144,4

150,8

156,0

162,1

169,2

176,7

Dépenses

149,0

155,0

160,6

166,3

172,4

178,7

Solde

-4,6

-4,2

-4,6

-4,2

-3,2

-2,0

AT/MP

 

 

 

 

 

 

Recettes

10,2

10,9

11,2

11,7

12,3

12,9

Dépenses

10,6

10,6

11,4

11,6

11,8

12,0

Solde

-0,5

0,3

-0,1

0,2

0,5

0,9

Famille

Recettes

54,6

56,7

58,2

60,4

62,9

65,5

Dépenses

54,5

56,4

58,7

60,8

62,8

64,4

Solde

0,2

0,3

-0,5

-0,3

0,1

1,1

Vieillesse

Recettes

85,7

89,8

94,7

100,7

107,2

111,6

Dépenses

90,3

95,6

100,0

104,9

109,7

114,6

Solde

-4,6

-5,8

-5,3

-4,2

-2,5

-3,1

Toutes branches consolidé

Recettes

290,0

303,0

314,3

328,9

345,4

360,2

Dépenses

299,5

312,3

324,9

337,4

350,4

363,4

Solde

-9,5

-9,3

-10,5

-8,6

-5,0

-3,1

Ensemble des régimes obligatoires de base

 

 

 

 

 

(en milliards d'euros)

 

2007

2008

2009

2010

2011

2012

Maladie

 

 

 

 

 

 

Recettes

167,6

175,2

181,8

188,0

195,9

204,3

Dépenses

172,7

179,4

185,6

192,1

199,0

206,2

Solde

-5,0

-4,1

-3,8

-4,1

-3,2

-1,9

AT/MP

 

 

 

 

 

 

Recettes

11,7

12,6

13,0

13,5

14,1

14,8

Dépenses

12,0

12,2

13,0

13,2

13,5

13,8

Solde

-0,4

0,4

0,0

0,3

0,6

1,0

Famille

 

 

 

 

 

 

Recettes

55,1

57,2

58,7

61,0

63,5

66,1

Dépenses

54,9

56,9

59,2

61,3

63,4

65,0

Solde

0,2

0,3

-0,5

-0,3

0,1

1,1

Vieillesse

 

 

 

 

 

 

Recettes

169,0

175,6

182,5

191,6

201,2

208,7

Dépenses

172,9

181,2

189,7

197,9

206,1

214,2

Solde

-3,9

-5,6

-7,2

-6,3

-4,9

-5,5

Toutes branches consolidé

 

 

 

 

 

Recettes

398,3

415,2

430,0

447,8

468,1

487,2

Dépenses

407,4

424,3

441,4

458,2

475,5

492,6

Solde

-9,1

-9,0

-11,4

-10,4

-7,4

-5,4

Fonds de solidarité vieillesse

 

 

 

 

 

(en milliards d'euros)

 

2007

2008

2009

2010

2011

2012

Recettes

14,5

15,3

14,0

14,2

14,7

15,2

Dépenses

14,4

14,5

15,0

15,2

15,3

15,4

Solde

0,2

0,8

-1,0

-1,0

-0,6

-0,2

 

Fonds de financement des prestations sociales agricoles

 

(en milliards d'euros)

 

2007

2008

Recettes

14,3

14,4

Dépenses

16,5

17,0

Solde

-2,2

-2,6

 

La parole est à Mme la ministre.

Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. Le présent amendement vise à tirer toutes les conséquences, pour l’annexe B, de la révision des hypothèses macroéconomiques quadriennales.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Alain Vasselle, rapporteur de la commission des affaires sociales pour les équilibres généraux et l’assurance maladie. Nous nous sommes largement expliqués sur l’annexe B lors de la discussion générale et à propos des motions.

Il ne me paraît donc pas utile d’y revenir. La commission émet un avis défavorable sur l’amendement n° 95 et un avis favorable sur l’amendement n° 492.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement sur l’amendement n° 95 ?

Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. Défavorable.

Mme la présidente. La parole est à M. Bernard Cazeau, pour explication de vote sur l'amendement n° 95.

M. Bernard Cazeau. S’agissant de l’annexe B, M. Fischer et moi-même sommes à peu près du même avis.

De toute façon, madame la ministre, il vous faudra revoir votre copie, en faisant peut-être montre d’un peu plus de réalisme…

Vos hypothèses d’évolution moyenne sur la période 2009-2012 relèvent à mes yeux, dans les circonstances actuelles, des prévisions de Mme Soleil. (Mme la ministre rit.)

Déjà, pour 2009, nous vous l’avons dit, vos projections sont optimistes. Elles pourraient cependant, à la limite, être justifiables, bien qu’un taux de croissance de l’ONDAM de 3,3 % soit considéré comme insuffisant par la plupart des observateurs du monde de la santé.

En tout état de cause, que dire de vos prévisions pour 2010, 2011 et 2012 ?

Mme Raymonde Le Texier. Madame Soleil !

M. Bernard Cazeau. Elles relèvent de la méthode Coué !

Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. Coué était pharmacien !

M. Bernard Cazeau. Vous fixez, en fait, un taux de croissance conforme à vos souhaits. Ensuite, Mme Lagarde ou M. Woerth le réviseront à la baisse, comme ils l’ont déjà fait ces dernières semaines en ce qui concerne 2008.

Escomptez-vous nous faire croire que le régime général sera équilibré en 2012, malgré une branche vieillesse encore très déficitaire ? MM. Douste-Blazy et Xavier Bertrand nous ont fait le coup avant vous ! Nous sommes persuadés que cet objectif ne pourra être atteint sans une modification profonde des structures, que rien aujourd’hui n’annonce.

Peut-être le projet de loi que vous nous présenterez en 2009, madame la ministre, bouleversera-t-il les choses et nous fera-t-il changer d’avis ? Si tel devait être le cas, nous saurions le dire.

Aujourd’hui, eu égard à la tendance naturelle au déficit affichée par les comptes sociaux depuis plusieurs années, encore accentuée par la crise économique grave que nous traversons, nous ne pouvons valider vos hypothèses pour 2009, et encore moins celles pour les années suivantes.

Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 95.

(L'amendement n'est pas adopté.)

Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 492.

(L'amendement est adopté.)

Mme la présidente. En conséquence, l’annexe B est ainsi rédigée.

Je mets aux voix l'article 9 et l’annexe B.

(L'article 9 et l’annexe B sont adoptés.)

Section 1

Reprise de dette

Article 9 et annexe B
Dossier législatif : projet de loi de financement de la sécurité sociale de financement de la sécurité sociale pour 2009
Article 10 (interruption de la discussion)

Article 10

I. - L'ordonnance n° 96-50 du 24 janvier 1996 relative au remboursement de la dette sociale est ainsi modifiée :

1° À l'article 2, les références : « II et II bis » sont remplacées par les références : « II, II bis et II ter » ;

2° Après le II bis de l'article 4, il est inséré un II ter ainsi rédigé :

« II ter. - La couverture des déficits cumulés au 31 décembre 2008 des branches mentionnées aux 1° et 3° de l'article L. 200-2 du code de la sécurité sociale et du fonds mentionné à l'article L. 135-1 du même code est assurée par des transferts de la Caisse d'amortissement de la dette sociale à l'Agence centrale des organismes de sécurité sociale effectués au cours de l'année 2009, dans la limite de 27 milliards d'euros. Ces déficits cumulés sont établis compte tenu des reprises de dette mentionnées aux I, II et II bis du présent article ainsi que des transferts résultant de l'application de l'article L. 251-6-1 du code de la sécurité sociale.

« Dans le cas où le montant total des déficits cumulés mentionnés à l'alinéa précédent excède 27 milliards d'euros, les transferts sont affectés par priorité à la couverture des déficits les plus anciens, et, pour le dernier exercice, dans l'ordre des branches et organismes fixé à l'alinéa précédent.

« Les montants et les dates des versements correspondants ainsi que, le cas échéant, de la régularisation au vu des montants définitifs des déficits de l'exercice 2008, sont fixés par décret.

« Sont considérées comme définitives les opérations de produits et de charges enregistrées de manière réciproque entre les branches du régime général et entre ces mêmes branches et le Fonds de solidarité vieillesse au titre de l'exercice 2008 et des exercices précédents, sauf si une disposition législative dispose qu'il s'agit d'acomptes. » ;

3° L'article 6 est complété par un III ainsi rédigé :

« III. - Est également affectée à la Caisse d'amortissement de la dette sociale une fraction du produit des contributions sociales mentionnées aux articles L. 136-1, L. 136-6, L. 136-7 et L. 136-7-1 du code de la sécurité sociale. Cette fraction est fixée au IV de l'article L. 136-8 du même code. »

II. - Le code de la sécurité sociale est ainsi modifié :

1° Au 2° du IV de l'article L. 136-8, le taux : « 1,05 % » est remplacé par le taux : « 0,85 % » et le taux : « 1,03 % » est remplacé par le taux : « 0,83 % » ;

2° Après le 4° du IV du même article, il est inséré un 5° ainsi rédigé :

« 5° À la Caisse d'amortissement de la dette sociale instituée par l'ordonnance n° 96-50 du 24 janvier 1996 relative au remboursement de la dette sociale, pour la part correspondant au taux de 0,2 %. » ;

3° Au 1° de l'article L. 135-3, les mots : « d'un taux de 1,05 % à l'assiette » sont remplacés par les mots : « des taux fixés au 2° du IV de l'article L. 136-8 aux assiettes ».

Mme la présidente. Je suis saisie de deux amendements identiques.

L'amendement n° 96 est présenté par M. Fischer, Mme David, M. Autain, Mme Hoarau et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen.

L'amendement n° 254 est présenté par M. Cazeau, Mmes Le Texier, Jarraud-Vergnolle, Demontès, Schillinger et Campion, MM. Teulade, Godefroy et Desessard, Mmes Printz et Chevé, MM. Le Menn, Daudigny et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés.

Ces deux amendements sont ainsi libellés :

Supprimer cet article.

La parole est à Mme Isabelle Pasquet, pour défendre l’amendement n° 96.

Mme Isabelle Pasquet. L’article 10 a pour objet de transférer à la CADES le déficit du Fonds de solidarité vieillesse et, dans le même temps, de réduire les ressources nécessaires au financement de ce dernier.

Vous vous contentez en fait de transférer aux générations futures le coût et le poids des politiques inconséquentes que vous menez depuis des années.

Contrairement à ce que vous voudriez faire croire, ce ne sont pas des dettes sociales ou le prix d’une politique sociale en grande difficulté que vous imposez aux futurs salariés d’assumer. Non, ce que vous leur faites subir, ce sont les conséquences du refus du gouvernement auquel vous appartenez de trouver des ressources nouvelles et pérennes. Ce que vous leur transférez, c’est le coût des cadeaux pharamineux que vous avez accordés aux employeurs et à quelques privilégiés.

Par exemple, les exonérations de cotisations sociales accordées aux entreprises en contrepartie de la création d’emplois précaires et sous-rémunérés s’élèveront à 42 milliards d’euros cette année, soit 10 milliards d’euros de plus que l’année précédente.

C’est à croire que vous n’avez pas mesuré les effets néfastes qu’engendre votre politique depuis des années ! Au travers de cet article, vous appliquez le principe des vases communicants, la dette remplaçant l’eau…

Sur le fond, rien ne changera. Le FSV demeurera déficitaire et ne pourra accomplir sa mission de solidarité au profit des retraités dont la situation est le plus précaire. Au moins pourrez-vous, grâce à l’effet d’optique que vous construisez, vous vanter de ne pas avoir creusé le déficit du FSV !

Se pose en fait le problème du financement des retraites et de notre protection sociale. Quelles réelles mesures de financement proposez-vous ?

Enfin, cet article ajoute encore à la complexité du dispositif.

Initialement, la contribution au remboursement de la dette sociale, la fameuse CRDS, était censée amortir la dette sociale accumulée les années précédentes.

Il faut se souvenir que, à l’époque où la gauche était aux responsabilités, le chômage a été considérablement réduit et les comptes sociaux étaient équilibrés. (M. Alain Gournac s’exclame.)

M. Guy Fischer. Eh oui !

Mme Isabelle Pasquet. La CRDS était affectée à l’apurement de la dette passée, la contribution sociale généralisée, la CSG, étant destinée, elle, à financer la protection sociale.

Or, au travers de cet article, vous prélevez une fraction de la CSG affectée au FSV pour financer la dette. Est-ce à dire que celle-ci est plus élevée que vous ne le prétendez ?

Il n’y aurait rien d’étonnant à cela, puisque telle est la conviction de la Cour des comptes, qui a refusé de valider les comptes de l'Agence centrale des organismes de sécurité sociale, l’ACOSS.

M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. Ce n’est pas pour ces raisons !

M. Jean-Jacques Jégou, rapporteur pour avis. Mélange des genres !

Mme Isabelle Pasquet. Une autre hypothèse pourrait être que, anticipant les conséquences de votre politique pour l’avenir, vous considérez qu’il est nécessaire de se préparer dès aujourd’hui à faire face à une croissance de la dette…

Quoi qu’il en soit, cet article 10 est un bel aveu de l’échec de votre politique. C’est pourquoi nous refusons de l’adopter et invitons nos collègues à voter notre amendement.

Mme la présidente. La parole est à M. Bernard Cazeau, pour présenter l'amendement n° 254.

M. Bernard Cazeau. L’article 10 a pour objet de transférer à la caisse d’amortissement de la dette sociale, la CADES, la charge d’un peu plus de 26 milliards d’euros de dettes accumulées par les différents régimes, notamment par les branches vieillesse et assurance maladie, en 2005 et en 2006.

Il est vrai qu’il faut bien trouver des solutions pour faire face à cette dette qui ne cesse d’augmenter. Les générations futures ne nous serons certainement guère reconnaissantes de notre attitude !

M. Jean-Jacques Jégou, rapporteur pour avis. Oh non !

M. Bernard Cazeau. Mais là n’est pas mon propos.

Je pose la question suivante : plutôt que de recourir à une tuyauterie digne du Fonds de financement de la réforme des cotisations patronales de sécurité sociale, le FOREC, que M. Vasselle critiquait abondamment à l’époque,…

M. François Autain. Il a changé d’avis !

M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. Dans le FOREC, il n’y a pas de tuyauterie !

M. Bernard Cazeau. … pourquoi ne pas utiliser la formule, claire et bien connue, du remboursement par la CRDS ?

Certes, comme l’a dit M. Woerth, il faut éviter de donner l’impression d’un accroissement des prélèvements obligatoires. À cette fin, vous privez le FSV de deux dixièmes de point de CSG, contribution dont il a pourtant bien besoin. Comme on le verra plus loin, il existe un autre système de tuyauterie, tout aussi compliqué, s’agissant du FSV.

En tout état de cause, cette démarche n’est pas très orthodoxe, et nous ne vous suivrons pas dans cette voie. C’est pourquoi nous demandons la suppression de l’article 10.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Alain Vasselle, rapporteur. Nos collègues auteurs des amendements nos 96 et 254 n’ont ni tout à fait raison ni tout à fait tort, au moins sur certains points.

M. Alain Vasselle, rapporteur. J’ai d’ailleurs abordé le sujet devant la commission, lorsque nous avons entendu les ministres, ainsi que pendant la discussion générale.

M. Guy Fischer. C’est vrai !

M. Alain Vasselle, rapporteur. Il est clair que, à ce jour, le Gouvernement et le Parlement sont liés par les dispositions de la loi organique relative aux lois de financement de la sécurité sociale, aux termes de laquelle toute nouvelle dette sociale prise en charge par la CADES doit être couverte par une recette à due concurrence, de manière à ne pas prolonger l’existence de cette structure au-delà de 2021.

M. Jean-Jacques Jégou, rapporteur pour avis. Heureusement !

M. Alain Vasselle, rapporteur. À l’origine, je le rappelle, l’échéance avait été fixée à 2014. Par la suite, la CADES s’étant vu affecter de nouvelles charges à deux reprises, elle a été repoussée à 2021. À l’avenir, cette date ne sera plus modifiée, puisque la loi organique protège désormais le dispositif.

Il reste que les dispositions de l’article 10, qui ne constitue pas le meilleur du projet de loi, vont inévitablement fragiliser encore davantage le FSV.

Dans la conjoncture difficile que nous connaissons, ce fonds se trouvera donc à nouveau en situation déficitaire en termes de flux et risque d’accumuler une nouvelle fois des déficits, que le gouvernement du moment devra sans doute transférer à la CADES.

Cela étant, M. Cazeau a eu raison de dire qu’il fallait bien, à un moment donné, prendre des mesures. On ne peut laisser les déficits s’accumuler, car cela pose des problèmes de trésorerie à l’ACOSS. Cette dernière est arrivée à la limite de ses possibilités, puisque la Caisse des dépôts et consignations a déclaré qu’elle ne pouvait plus assurer sa trésorerie au-delà de l’autorisation qui lui a été ouverte.

Se trouvant au pied du mur, le Gouvernement devait prendre une décision, et nous ne la contestons pas.

Cependant, je regrette tout comme vous, monsieur Cazeau, qu’il ponctionne la part de la CSG actuellement perçue par le FSV pour financer cette opération. Vous n’avez pas tort, mon cher collègue, de dénoncer la mise en place d’une « tuyauterie », comme je l’avais fait lors de la création du FOREC.

Le présent projet de loi tend en effet à recréer une tuyauterie afin de mettre à la charge de la branche famille les majorations de pensions pour enfants, ce que déplore M. Lardeux.

C’est l’une des raisons pour lesquelles je défendrai tout à l’heure un amendement visant à supprimer une partie de cette tuyauterie, afin d’établir un lien direct entre l'assurance vieillesse et la Caisse nationale des allocations familiales, sans détour par le FSV.

Cela étant dit, la commission est défavorable aux amendements identiques nos 96 et 254 pour les raisons que j’ai développées tout à l'heure, tout en partageant une partie des préoccupations de leurs auteurs.

M. Guy Fischer. Ah, voilà ! C’est honnête !

M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. On est toujours honnêtes à la commission des affaires sociales ! (Sourires.)

Mme la présidente. La parole est à M. le rapporteur pour avis.

M. Jean-Jacques Jégou, rapporteur pour avis de la commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation. Madame la ministre, vous allez entendre une nouvelle fois les mêmes observations, mais formulées sous un angle plus financier. J’émettrai également un avis quelque peu politique au sujet de ces amendements.

Je l’ai écrit dans mon rapport, les Français ont contracté une dette sociale et la CRDS a été mise en place pour l’amortir. En tant que président du conseil de surveillance de la CADES, et aidé dans ma réflexion par quelques collègues sénateurs, dont M. le rapporteur Alain Vasselle, j’ai considéré qu’il fallait tout naturellement, pour faire face aux 27 milliards de dettes accumulés au cours des années couvertes par la loi organique que nous avons adoptée, porter la CRDS au taux de 0,70 %. Sinon, on est amené à mettre en place la tuyauterie dont on a parlé à l’instant, avec toutes les difficultés que cela entraîne !

Mes chers collègues, quelquefois, pour contourner le débat sur la dette contractée par les Français, que l’on soit de droite ou de gauche, on s’abrite derrière un discours que je supporte mal d’entendre, moi à qui il est arrivé d’être, tour à tour, dans la majorité et dans l’opposition !

Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. Personne n’est parfait ! (Sourires.)