Mme Christine Albanel, ministre. Je le répète, ce projet de loi dépasse, et de loin, la seule question de la publicité. En effet, il porte aussi sur la restructuration de France Télévisions, sur le principe même de la suppression de la publicité et sur ses modalités, qui devront être définies dans les prochaines années, sur la transposition de la directive « Télévision sans frontières » et sur la création de la holding Audiovisuel extérieur de la France.

Je suis très attentive à l’évolution de ce texte. De nombreuses dispositions nouvelles relatives à son nécessaire suivi ont d’ailleurs été adoptées par l'Assemblée nationale et le Sénat. Ainsi, l’article 18 dispose désormais que le Gouvernement présente au Parlement, au plus tard le 1er juin 2011, un rapport sur la mise en œuvre de la suppression de la publicité et « propose, la cas échéant, les adaptations nécessaires de la présente loi », formulation reprise par la commission de votre assemblée.

Il me semble en effet très important de tenir compte du paysage futur de l’audiovisuel public et de ses évolutions, que nous ne pouvons naturellement pas anticiper. En tout cas, nous serons très attentifs à ces évolutions, je le répète, et nous les évaluerons avec le Parlement, car l’enjeu est essentiel.

Nous avons une grande ambition pour l’audiovisuel public et voulons lui accorder les moyens de la réaliser. Il ne s’agit pas du tout de l’appauvrir, de l’étrangler, de le rendre exsangue ; nous voulons au contraire inventer un audiovisuel public exemplaire.

Mme Blandin a fait remarquer tout à l'heure que je n’avais pas justifié l’avis du Gouvernement – je la prie de m’en excuser – sur l’amendement no 291 rectifié, qui prévoit que la répartition des droits d’exploitation entre France Télévisions et le producteur privé s’effectuera proportionnellement aux apports de chacun. Le Gouvernement y est défavorable, car cette mesure figure dans des accords interprofessionnels qui ont déjà été signés : l’amendement est donc satisfait.

M. le président. La parole est à M. Jack Ralite, pour explication de vote.

M. Jack Ralite. Je tiens simplement à appuyer chaque mot des propos de Catherine Tasca ; j’ai même senti que notre collègue Jean-Pierre Fourcade y adhérait !

M. Henri de Raincourt. Cela n’arrivera jamais !

M. Jack Ralite. Mme la ministre a indiqué qu’un rapport sera présenté au Parlement. Mais nous avons tous l’expérience de rapports qui s’accumulent !

Il s’agit d’indiquer dès maintenant que cette question sera reconsidérée au moment du passage au numérique.

Personnellement, je suis favorable à la suppression de la publicité dès aujourd’hui, sans attendre demain. Je me rallie cependant à la position de Catherine Tasca, qui est dans le même état d’esprit. D’ailleurs, cette position serait susceptible de recueillir la majorité de cette assemblée. Mais il faut au moins, madame la ministre, une indication politique claire, similaire à celle qui concerne la redevance !

Souvenez-vous : a été retenue par la commission la proposition de préciser que la redevance constituait la ressource principale. Cette phrase toute simple veut dire beaucoup, n’enferme rien, et sauvegarde l’avenir et, en tout cas, le service public de la télévision. (Très bien ! et applaudissements sur les travées du groupe CRC-SPG et du groupe socialiste.)

M. le président. Je mets aux voix l'amendement no 356.

Je suis saisi d'une demande de scrutin public émanant du groupe CRC-SPG.

Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.

(Le scrutin a lieu.)

M. le président. Personne ne demande plus à voter ?…

Le scrutin est clos.

(Il est procédé au comptage des votes.)

M. le président. Voici le résultat du dépouillement du scrutin no 82 :

Nombre de votants 335
Nombre de suffrages exprimés 316
Majorité absolue des suffrages exprimés 159
Pour l’adoption 141
Contre 175

Le Sénat n'a pas adopté.

La parole est à M. Yannick Bodin, pour explication de vote sur le sous-amendement no 446.

M. Yannick Bodin. L’alignement de la durée des contrats d’objectifs et de moyens sur celle du mandat des présidents constitue, à nos yeux, une arme à double tranchant.

On peut effectivement, à l’instar de l’auteur de la disposition, estimer que l’alignement des durées sécurise l’action du président élu : celui-ci aura lui-même négocié son contrat d’objectifs et de moyens, qui ne pourra être renégocié durant son mandat.

À l’inverse, on a compris que les présidents, de par l’adoption de ce projet de loi, seraient désormais sur un siège éjectable. Dès lors, comment accepter que les contrats puissent être renégociés, à des fréquences diverses, concomitamment à l’arrivée d’un nouveau président dont la nomination pourra être assortie d’une injonction de l’exécutif de faire faire des économies à la société dont il aura la charge ?

Il convient de rappeler que l’État s’engage à fournir les moyens financiers convenus pour la durée du contrat d’objectifs et de moyens. En contrepartie de leurs engagements sur des objectifs de résultat et de maîtrise de leurs moyens, les organismes du secteur public audiovisuel ont une visibilité à moyen terme sur l’évolution de leurs ressources. Qu’adviendra-t-il de cette visibilité pluriannuelle si lesdits contrats sont remis en cause à chaque nomination ? Qu’en est-il, par ailleurs, de la logique de responsabilisation mutuelle entre l’État et les sociétés ?

Il faut maintenir la durée initiale du contrat d’objectifs et de moyens afin que les engagements pris par les signataires revêtent un caractère stable et pérenne.

Parce que nous ne voulons pas trop compromettre la pérennité du financement des sociétés de l’audiovisuel public, qui est déjà bien entamée du fait de la suppression de la collecte de la publicité par les chaînes publiques, il nous semble totalement inopportun de prévoir un alignement de la durée des contrats d’objectifs et de moyens sur celle du mandat des présidents.

M. le président. La parole est à M. David Assouline, pour explication de vote.

M. David Assouline. Je tiens à répondre à certains propos entendus à plusieurs reprises et qui sont faux.

Ce n’est pas la prétendue obstruction parlementaire à l'Assemblée nationale qui nous conduit aujourd'hui à délibérer de la suppression de la publicité alors même que celle-ci est déjà mise en œuvre. Je rappellerai à cet égard ce qui s’est passé en amont de nos débats.

Les socialistes avaient posé comme condition préalable à leur participation à la commission Copé l’assurance que ses travaux ne remplaceraient pas le débat parlementaire, condition acceptée sans difficulté par M. Copé. Voici donc venu, aujourd’hui, le temps du travail parlementaire.

La commission Copé a décidé, sur notre proposition, de fixer la suppression de la publicité après 20 heures au mois de septembre 2009, de façon que l'Assemblée nationale et le Sénat puissent discuter du nouveau dispositif législatif. Le choix de cette date ne déstabilisait en rien les chaînes du service public, puisque les rédactions ont l’habitude d’offrir une nouvelle grille de programmes au moment de la rentrée scolaire.

L’échéance de septembre 2009 nous permettait donc de travailler tranquillement, comme elle permettait à France Télévisions de préparer la disparition de la publicité sur ses antennes, dans des conditions meilleures que les conditions actuelles, en stabilisant le modèle économique et les dispositions à mettre en place en amont de cette évolution.

On nous a refusé cette possibilité ! Et ce rejet n’émane pas de la commission Copé, qui était unanime sur la date de septembre 2009. On nous a annoncé qu’il faudrait agir en janvier. Pour quelles raisons ? Nous ne le savons pas ! On nous a aussi expliqué que le travail parlementaire aurait lieu, car nous serions saisis du projet de loi dès l’été. Or nous en avons été saisis en novembre !

C’est le Gouvernement qui a agi ainsi, pas nous ! De plus, il a donné des ordres bien en amont à France Télévisions pour que la société se prépare à l’échéance de janvier. Cette dernière ne pouvait effectivement pas attendre le mois de novembre, madame la ministre ! Il ne faut pas maintenant venir nous donner des leçons sur le fait que France Télévisions devait préparer ce projet en amont. Nous ne le savions que trop bien !

Le fait que le projet de loi ait été présenté en novembre vient en outre contredire vos propos. L’Assemblée nationale n’ayant été saisie du texte qu’à cette date, il est évident que France Télévisions devait enclencher la réforme bien avant, donc bien avant les prétendues obstructions. Par conséquent, ce n’est pas la pseudo-obstruction à l’Assemblée nationale qui a contraint le Sénat à délibérer après l’entrée en application de la réforme !

J’aimerais que, sur ces sujets, on nous présente de réelles argumentations au lieu de nous assener des accusations !

Les propos que je viens de tenir ne sont ni idéologiques ni subjectifs.

M. Alain Gournac. Mais on les a déjà entendus !

M. David Assouline. Ils traduisent en toute bonne foi, fidèlement, ce qui s’est passé. Chers collègues, j’y étais ; et, si vous examinez le déroulement des événements, vous pourrez vérifier tous ces éléments !

Je fais donc cette mise au point notamment à votre attention, monsieur Fourcade. Vous pouvez juger comme bon vous semble ce qui s’est produit à l’Assemblée nationale. En réalité, non seulement nous ne présentons pas d’amendements d’obstruction, mais nous discutons sur le fond. (Protestations sur les travées de lUMP.)

Pour conclure, je veux signaler à ceux qui ne suivent pas très attentivement nos débats que la série d’amendements et de sous-amendements que nous examinons ce matin n’est pas constituée de propositions nouvelles.

M. Alain Gournac. C’est bien cela ! Ce sont les mêmes !

M. David Assouline. L’amendement no 34 a été rectifié, si bien que son adoption aurait rendu nos propres amendements caducs. Pour qu’ils puissent être débattus normalement, il fallait les transformer en sous-amendements. Cela a été fait en complet accord avec la commission, dont tous les membres ont pu constater – j’aurais aimé l’entendre rappeler un peu plus souvent – que nos discussions ont porté uniquement sur le fond : les amendements présentés par l’opposition socialiste et communiste ne sont pas des redites.

D’ailleurs, sans nous, le débat aurait été très succinct : même si Mme la ministre se tourne systématiquement vers vous quand elle nous apporte ses réponses, chers collègues de la majorité, c’est nous qui intervenons,…

M. Henri de Raincourt. Nous nous en sommes aperçus !

M. David Assouline. … et c’est à nos prises de position qu’elle répond.

M. le président. La parole est à M. le président de la commission des affaires culturelles.

M. Jacques Legendre, président de la commission des affaires culturelles. Puisque la commission a été citée, je voudrais apporter quelques précisions.

Si nous avons effectivement recherché avec M. Assouline des solutions qui nous permettent d’accepter certains de ses sous-amendements, d’autres n’ont obtenu aucun accord de la commission.

Par conséquent, on ne peut pas affirmer que ces changements ont été effectués avec l’aval de la commission.

M. le président. Je mets aux voix le sous-amendement no 446.

(Le sous-amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix le sous-amendement no 451.

(Le sous-amendement n'est pas adopté.)

M. le président. La parole est à M. Jack Ralite, pour explication de vote sur le sous-amendement n° 142 rectifié.

M. Jack Ralite. L’occasion m’est offerte de terminer mon intervention d’hier ! (Rires sur les travées de lUMP.)

Mme Catherine Tasca. Très bien !

M. Jack Ralite. Je tiens à dire à ceux qui font le cinéma français, notamment aux producteurs, que, pour notre part, nous rejoignons le vote de l’Assemblée nationale. En effet, l’unanimité ainsi obtenue peut permettre de construire un vrai rapport de force. J’appelle donc les producteurs et les personnels de France Télévisions à se retrouver pour inventer une responsabilité publique qui convienne aux uns et aux autres.

Cependant, il ne faut pas oublier que le Gouvernement n’a pas tenu compte de l’unanimité obtenue en 2007, tant au Sénat qu’à l’Assemblée nationale, sur la définition de l’œuvre patrimoniale.

Si vous me permettez un peu d’ironie, j’observerai qu’on ne joue pas à la pétanque avec des boules carrées ! (Sourires.) J’espère néanmoins que l’ensemble du Sénat rejoindra la position unanime de l’Assemblée nationale.

J’ai pu lire, madame la ministre de la culture, que vous aviez donné votre accord à l’Assemblée nationale, et j’imagine que vous le renouvellerez aujourd’hui. Mais, de grâce, prévoyez la rallonge nécessaire ! L’automobile « France Télévisions » a besoin de combustible, pour le secteur audiovisuel, pour le cinéma, pour son propre fonctionnement, pour ses personnels et pour les téléspectateurs !

Je retire le sous-amendement no 142 rectifié, mais je ne regrette pas de l’avoir écrit pour signifier aux cinéastes les risques qu’ils courent de ne pas obtenir ce qu’ils croient que ce vote leur procure et pour alerter les personnels de France Télévisions sur les conséquences de ce texte.

M. le président. Le sous-amendement no 142 rectifié est retiré.

La parole est à M. Yannick Bodin, pour explication de vote sur le sous-amendement no 453.

M. Yannick Bodin. Ce sous-amendement porte lui aussi uniquement sur le fond du dossier.

Comme nous l’avons amplement démontré durant ce débat, l’indépendance des organismes participant au service public de l’audiovisuel à l’égard du pouvoir exécutif et des puissances économiques ne sera réelle qu’à la condition que deux critères soient vérifiés, tous deux étant nécessaires mais insuffisants l’un sans l’autre.

En effet, si l’autonomie de gestion n’a aucun sens sans indépendance politique, l’indépendance politique est inversement vidée de sa substance si une tutelle financière s’exerce.

Nous appuyant notamment sur les exemples allemand et britannique, nous sommes nombreux sur les travées de cette assemblée à partager la position arrêtée depuis longtemps par la commission des affaires culturelles et à considérer que le produit de la redevance constitue la ressource la plus adaptée pour garantir au service public de l’audiovisuel un financement sûr, pérenne et adapté à ses besoins.

La redevance doit être vue non pas comme un impôt, mais comme une contribution au financement d’un service public, de la même manière que le produit de certains autres prélèvements est affecté au financement de services publics locaux bien connus dans cet hémicycle. C’est précisément ce qui a incité la commission à proposer une modification de la dénomination de cette redevance audiovisuelle.

Cette forme de financement répond parfaitement au besoin qu’ont les dirigeants des entreprises publiques du secteur de disposer d’une visibilité pluriannuelle sur l’évolution de leurs ressources. Ils disposent ainsi, au moins pour la durée de leurs fonctions, d’une réelle autonomie dans leurs choix de gestion.

La loi d’août 2000 avait introduit une innovation allant tout à fait dans ce sens puisqu’elle instituait une forme de contractualisation entre, d’une part, l’État et, d’autre part, France Télévisions, Radio France, Radio France Internationale, ARTE-France et l’Institut national de l’audiovisuel, chacun pris individuellement. Aux termes des actuelles dispositions de l’article 53 de la loi de 1986, les contrats d’objectifs et de moyens sont ainsi négociés pour trois à cinq ans et déterminent, pour cette durée, le montant des ressources publiques devant être affectées à chacun des organismes précités.

Alors que le Gouvernement a imposé à France Télévisions, dès avant le terme – et même avant le début ! – de ce débat, de supprimer la publicité de ses écrans entre 20 heures et 6 heures, bouleversant toute l’économie du paysage audiovisuel français d’un trait de plume, la responsabilité du législateur est d’apporter à notre radio et à notre télévision publiques, mais aussi à l’Institut national de l’audiovisuel, l’assurance qu’ils bénéficieront d’une ressource publique pérenne et sûre. L’adoption par le Sénat de notre amendement no 314, dont l’objet est d’inscrire dans la loi que le produit de la redevance constitue la principale ressource financière de France Télévisions, va dans ce sens.

En cohérence avec cette disposition, le Sénat devrait aussi approuver notre présente proposition, qui vise à préciser expressément dans les contrats d’objectifs et de moyens, parmi l’ensemble des ressources publiques devant être affectées à chacun des organismes couverts par ces contrats, le montant du produit de la redevance, et ce pour la durée de leur exécution.

Mes chers collègues, notre assemblée doit à la constance de sa commission des affaires culturelles, si longtemps soutenue par son ancien président, Jacques Valade, et notre ancien collègue Louis de Broissia, de faire bloc face aux ennemis irréductibles de la redevance. Si ces derniers sont peu nombreux sur nos travées, ils font beaucoup entendre leur voix depuis celles du groupe UMP, en particulier à l’Assemblée nationale.

Le sous-amendement no 453 donne au Sénat une occasion de réaffirmer cette position. Mes chers collègues, je vous en prie, saisissez-la !

M. le président. Je mets aux voix le sous-amendement no 453.

(Le sous-amendement n'est pas adopté.)

M. le président. La parole est à M. Ivan Renar, pour explication de vote sur le sous-amendement no 141 rectifié.

M. Ivan Renar. Bien évidemment, nous ne pouvons qu’espérer et souhaiter le retour à l’équilibre financier pour France Télévisions. Cependant, les mesures contenues dans le projet de loi seront pour cette société de véritables boulets et laissent plutôt augurer du contraire.

On ne peut pas maintenir certaines des dispositions majeures de l’article 18, dont la suppression de la publicité, et formuler simultanément le vœu pieux d’une perspective de retour à l’équilibre financier. C’est pourquoi, mes chers collègues, je vous invite à voter ce sous-amendement.

M. le président. Je mets aux voix le sous-amendement no 141 rectifié.

(Le sous-amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix le sous-amendement no 87 rectifié.

(Le sous-amendement est adopté.)

M. le président. La parole est à M. David Assouline, pour explication de vote sur les sous-amendements identiques nos 143 rectifié et 447.

M. David Assouline. Je vais également terminer mon intervention d’hier, que le président de séance a interrompue à juste titre… J’avais la parole depuis plus de cinq minutes !

M. Roland du Luart. Je vous avais à l’œil ! (Sourires.)

M. David Assouline. Dans mon esprit, les lois ont pour objet de satisfaire non pas des intérêts privés, mais l’intérêt général. Or, un examen attentif du marché de la publicité révèle que le manque à gagner de France Télévisions sera bien capté par le privé. Cependant, il faut le souligner, l’essentiel de cet apport n’ira pas aux diverses chaînes que nous offre la TNT et que nous apprécions : toutes les études montrent qu’il profitera avant tout à TF1 et, dans une moindre mesure, à M6.

Je ne dis pas que TF1 ne devrait pas obtenir de recettes de publicité supplémentaires. Le problème, c’est que, alors que cette chaîne capte déjà 50 % du marché publicitaire, c’est principalement à elle que profitera la publicité qui ne sera plus diffusée par le secteur public et très peu à l’ensemble des petites chaînes, qui sont pourtant source de la diversité et du dynamisme incontestable du paysage audiovisuel.

Cette réforme va mettre en péril tout le secteur public audiovisuel en supprimant le quart de son financement annuel garanti. En perdant la publicité, France Télévisions va en effet perdre 25 % de ses recettes. L’exécutif nous propose, pour les remplacer, de recourir à une usine à gaz faisant intervenir des taxes pour le moins contestables. Nous en reparlerons, mais je sais que, au-delà de l’opposition, bien des voix contestent déjà ce système.

Je voudrais pour terminer évoquer un point que Mme Tasca a déjà longuement développé et sur lequel elle reviendra tout à l’heure.

Il serait bon de prévoir une clause de revoyure avant la suppression totale de la publicité en 2011, nous a indiqué M. Fourcade, avec l’approbation de son groupe. Si vous avez lu les sous-amendements, mes chers collègues, vous n’avez pas manqué de constater que c’est précisément l’objet de notre sous-amendement no 448, qui sera mis aux voix dans un instant. Le principe de la suppression de la publicité après 20 heures ayant été adopté, ce n’est qu’un sous-amendement de repli qui ne remet pas tout en cause.

Nous pensons en effet qu’il ne sert à rien, avant d’affronter le double défi du passage au tout numérique, d’inscrire aujourd’hui dans la loi l’obligation d’arrêter toute publicité, toute la journée, sur France Télévisions.

Si le Sénat souhaite s’exprimer sur la possibilité d’une clause de revoyure, monsieur Fourcade, ce sous-amendement, dont c’est l’unique objet, lui en fournira l’occasion.

M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Fourcade, pour explication de vote.

M. Jean-Pierre Fourcade. Je ne résiste pas au plaisir de faire observer à M. David Assouline que le Sénat vient, par scrutin public, de repousser l’amendement de suppression de l’article 18. Or le sous-amendement sur lequel nous sommes sur le point de nous prononcer vise à supprimer la partie de l’article ayant trait à la suppression de la publicité sur France Télévisions.

M. Jean-Pierre Fourcade. Si, monsieur Assouline ! Vous avez annoncé un autre sous-amendement, mais c’est bien ce à quoi vise le sous-amendement sur lequel vous venez d’expliquer votre vote.

Par conséquent, s’il est vrai qu’elle ne se traduit pas par un important volume d’amendements, l’obstruction que je dénonçais tout à l’heure est bien réelle et ralentit effectivement la procédure. La preuve est manifeste, puisque le Sénat s’est prononcé.

M. Jean-Pierre Fourcade. Quant aux sous-amendements identiques, mon expérience sénatoriale me donne à penser qu’ils ne sont pas recevables puisqu’ils sont tout à fait contraires à l’amendement qu’ils modifient.

Vous voilà pris en flagrant délit, monsieur Assouline !

M. Alain Gournac. Très bien !

M. Jean-Pierre Fourcade. Je tenais à le faire observer à l’ensemble de notre Haute Assemblée. (Applaudissements sur les travées de l’UMP.)

M. le président. Les sous-amendements identiques nos 143 rectifié et 447 ont été déclarés recevables par le service de la séance, monsieur Fourcade !

Je les mets aux voix.

(Les sous-amendements ne sont pas adoptés.)

M. le président. La parole est à Mme Catherine Tasca, pour explication de vote sur le sous-amendement no 448.

Mme Catherine Tasca. Comme je suis d’un naturel optimiste, je reviens à la charge sur le calendrier de mise en œuvre de la réforme, notamment sur cette deuxième étape annoncée pour la fin 2011, et je renouvelle mes arguments afin que ce rendez-vous ne soit pas gravé aujourd’hui dans le projet de loi.

Je remercie M. Jean-Pierre Fourcade d’avoir au moins admis que la question se posait et d’avoir évoqué d’éventuelles clauses de revoyure. Mais, je l’ai expliqué tout à l’heure, la revoyure ne peut pas se réduire à l’accumulation de rapports dans les années à venir. Il faut que ce soit une vraie clause de revoyure, c’est-à-dire que le Parlement doit avoir demain la possibilité de prendre une autre position que celle qu’il adopte aujourd’hui à propos de la première étape.

Trois raisons conduisent à ne pas retenir ce rendez-vous de 2011 dans la rédaction de l’article 18.

La première raison est l’intérêt même de l’entreprise, auquel nous devons tous être attentifs. Celle-ci doit être en mesure de conduire une mutation réfléchie sans être en permanence cul par-dessus tête : on ne change pas les paramètres économiques et financiers d’une entreprise tous les trois ans ! Aucune grande entreprise, dans aucun secteur de l’économie, n’y survivrait.

La deuxième raison, qui a été reconnue sur tous les bancs, réside dans les inconnues absolument colossales concernant la transformation en cours du paysage audiovisuel, l’évolution du marché publicitaire et le passage au tout numérique, qui peut être une chance formidable, mais qui sera aussi un chantier gigantesque.

Je le répète, décréter aujourd’hui ce que sera l’économie de l’audiovisuel public après 2011, c’est mener une politique de gribouille ! Comme je ne veux pas croire que vous cherchez ici à fragiliser encore plus l’audiovisuel public, je vous conjure, mes chers collègues, de donner du temps au temps. Nous nous acheminons déjà vers une mutation très profonde.

La troisième raison de ne pas accepter ce rendez-vous déjà écrit et imposé, c’est l’attitude de l’État. Au moment du lancement de la réforme, j’ai entendu que la perte de recettes publicitaires serait compensée « à l’euro près ». Nous en sommes déjà très loin, puisqu’il est question de 450 millions d’euros alors que tous les chiffrages tournaient autour de 800 millions d’euros !

En contradiction avec l’engagement moral pris par l’État d’assurer cette compensation, vous avez refusé d’inscrire le qualificatif « intégral » dans le texte. C’est incompréhensible au regard de l’annonce de la réforme par le Président de la République. C’est également incompréhensible par rapport aux débats qui ont eu lieu avant l’été au sein de la commission ad hoc. Enfin, c’est encore plus incompréhensible aujourd’hui, car l’État non seulement ne prend pas d’engagement de compensation au-delà des trois premières années, mais voudrait que nous consacrions le rendez-vous de 2011 comme celui du passage à la seconde étape.

Je ne demande pas à la majorité de conversion philosophique. Je lui demande simplement d’agir de façon responsable à l’égard de cette entreprise, sans préjuger l’avenir, et de nous donner à tous, et d’abord à l’entreprise elle-même, les moyens de revoir cette question après trois ans de cette énorme mutation.

M. le président. La parole est à M. Jack Ralite, pour explication de vote.

M. Jack Ralite. Je sais bien que cela fait répétition, mais je tiens à dire que nous soutenons intégralement l’initiative de Catherine Tasca.

Actuellement, les États-Unis envisagent de différer le moment de passer au tout numérique, eux qui en auraient les moyens. Mais, en France, on sait tout ! Dans ces matières-là, mieux vaudrait pourtant emprunter les venelles que de se lancer directement sur l’autoroute qui est devant nous ! Il y a donc tout lieu de s’interroger.

Enfin, je commence à me demander si le rendez-vous de 2012 n’a pas été pensé stratégiquement. On peut en effet prédire dès aujourd’hui que la maison radio-télévision sera en péril. Sans doute certaines personnes seront-elles contentes de la cueillir !…

M. Ivan Renar. Des sauveurs suprêmes !

M. le président. Je mets aux voix le sous-amendement no 448.

Je suis saisi d'une demande de scrutin public émanant du groupe socialiste.

Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.

(Le scrutin a lieu.)

M. le président. Personne ne demande plus à voter ?…

Le scrutin est clos.

(Il est procédé au comptage des votes.)

M. le président. Voici le résultat du dépouillement du scrutin no 83 :

Nombre de votants 323
Nombre de suffrages exprimés 317
Majorité absolue des suffrages exprimés 159
Pour l’adoption 138
Contre 179

Le Sénat n'a pas adopté.

Je mets aux voix le sous-amendement no 457.

(Le sous-amendement n'est pas adopté.)