Mme Alima Boumediene-Thiery. C’est en quelque sorte la troisième édition sur la notion de dignité !

L’objet de cet amendement est en effet de préciser que les fouilles sont effectuées dans le respect de la dignité. Tout le monde parle de la dignité depuis tout à l’heure, or ce mot n’est pratiquement pas dans le texte. Il n’apparaît qu’une seule fois, et ce grâce à la discussion d’hier.

Je suis d’ailleurs surprise de ne pas retrouver dans le texte de la commission cette notion de dignité qui existait pourtant dans le projet de loi initial. Rien ne justifie cette disparition : le principe du respect de la dignité de la personne humaine doit être le socle même de toutes les fouilles, qu’elles soient intégrales ou non.

J’ai le souvenir d’un détenu qui, il n’y a pas très longtemps de cela, a été obligé de se mettre tout nu pour accéder au parloir. Comme l’agent de l’administration pénitentiaire qui était présent a oublié de fermer la porte, ce détenu s’est retrouvé dans le plus simple appareil devant des familles entières venues au parloir !

Il s’agit d’un exemple concret d’une atteinte intolérable à la dignité d’un détenu, mais je pourrais en citer beaucoup d’autres.

Les fouilles intégrales sont par nature dégradantes, mais il est possible d’éviter qu’elles soient également attentatoires à la dignité du détenu : tout dépend des conditions dans lesquelles elles sont organisées.

Dans son arrêt du 12 juin 2007 condamnant la France pour des fouilles subies par un détenu à Fresnes, la Cour européenne des droits de l’homme ne s’oppose pas au principe de la fouille ; elle précise seulement que la fouille doit être entourée de précautions.

C’est l’idée de notre amendement : prévoir que les fouilles s’exercent dans le respect de la dignité de la personne humaine.

M. le président. L'amendement n° 136 rectifié, présenté par M. Anziani et les membres du groupe socialiste et apparentés, est ainsi libellé :

Compléter cet article par une phrase ainsi rédigée :

Les fouilles sont pratiquées dans le respect de la personne.

La parole est à M. Alain Anziani.

M. Alain Anziani. Cet amendement de repli vise à compléter l’article 24 par une phrase assez claire. Cette précision est la moindre des choses !

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Jean-René Lecerf, rapporteur. Mes chers collègues, la commission propose déjà un encadrement des fouilles très strict. Interdire totalement les fouilles intégrales comme le prévoit l’amendement n° 235 – il n’est pas question ici des fouilles corporelles internes -, c’est pousser trop loin le curseur de la dignité au détriment de la sécurité.

Il est préférable, dans un premier temps, d’encadrer les fouilles intégrales de la manière la plus stricte qui soit.

Nous sommes donc défavorables à l’amendement n° 235.

Il y a une incompréhension entre nous au sujet de l’amendement n° 45 rectifié. Cela va de soi, le premier alinéa de l’article 24, où nous encadrons de manière générale les fouilles - la présomption d’infraction, les risques que fait courir l’attitude de tel ou tel détenu -, couvre l’ensemble des fouilles, y compris celles des cellules. Seuls les alinéas suivants ne concernent que les fouilles des détenus.

Mme Boumediene-Thiery a donc la réponse à la question qu’elle se posait.

En conséquence, je demande le retrait de cet amendement.

L’amendement n° 134 concerne un problème proche de celui du contrôle du courrier. Nous nous demandions si le contrôle du courrier devait être réalisé en présence des détenus. De la même manière, ces derniers doivent-ils être présents lors des fouilles des cellules ?

Nous l’avons indiqué plus tôt, cette présence pourrait susciter des vexations susceptibles d’aviver les tensions entre le personnel et les détenus, ce qui irait à rebours de l’objectif. En outre, cela peut poser des problèmes pratiques très simples : si le détenu travaille, s’il est au parloir, comment faudra-t-il procéder ?

Cette disposition poserait davantage de problèmes qu’elle n’en résoudrait. C’est pourquoi l’avis de la commission est défavorable.

Concernant l’amendement n° 135, la commission des lois a voulu un dispositif déjà très encadré. Nous souhaitons donc en rester à l’équilibre proposé. Nous demandons le retrait de l’amendement.

Au sujet de l’amendement n° 44, la rédaction du premier alinéa de l’article 24 met en avant les principes de proportionnalité et de nécessité des fouilles, ce qui implique nécessairement le respect de la dignité de la personne.

Nous demandons le retrait de cet amendement ; à défaut, la commission sera défavorable.

La commission demande également le retrait de l’amendement n° 136 rectifié et sera défavorable si cet amendement est maintenu. En effet, la notion de respect de la personne est incluse au premier alinéa de l’article qui, comme je le disais, met en avant le principe de proportionnalité et de nécessité des fouilles.

Sur le fond, nous sommes parfaitement d’accord, mais cet objectif est déjà pleinement satisfait.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Rachida Dati, garde des sceaux. Nous sommes favorables à l’amendement n° 303.

Concernant l’amendement n° 235, l’utilisation de moyens de détection électroniques, qui sont au nombre des modalités de mise en œuvre des fouilles, ne relève pas du domaine législatif.

Par ailleurs, le principe du respect de la dignité de la personne résulte des dispositions de l’article 10 du texte.

En outre, l’amendement tel qu’il a été rédigé prévoit une interdiction des fouilles intégrales ainsi qu’une décision spécialement motivée pour les fouilles des cellules. Or ces fouilles ont lieu pour la sécurité de l’établissement et ne sont pas une sanction. Imposer la motivation des fouilles à l’administration pénitentiaire alourdirait la gestion et l’organisation de l’établissement.

Nous sommes donc défavorables à l’amendement n° 235.

L’amendement n° 45 rectifié a pour objet le respect des biens et de la vie privée des détenus. Or, comme l’a dit le rapporteur, le premier alinéa de l’article 24 ne prévoit pas de distinction entre les fouilles corporelles et les fouilles de cellules ; il a vocation à s’appliquer à l’ensemble des cas.

En conséquence, l’amendement est satisfait. S’il est maintenu, nous y serons défavorables.

L’amendement n° 134 prévoit que les détenus assistent à la fouille de leur cellule et de leurs effets personnels. J’ai entendu les arguments du rapporteur, mais j’irai encore plus loin : je défends la dignité et la sécurité de l’administration pénitentiaire.

Mme Rachida Dati, garde des sceaux. Des faits divers tragiques sont survenus à une période où l’on aurait pu prendre des mesures ; pourtant, rien n’a été fait.

Nous prenons quant à nous les mesures pour avancer et permettre la réalisation des fouilles dans un cadre légal moderne. Mais je tiens aussi à la sécurité et à la dignité des personnels pénitentiaires, en conséquence, pour des raisons de sécurité, je ne souhaite pas que le détenu soit présent dans la cellule au moment de la fouille.

En conséquence, nous émettons un avis défavorable sur cet amendement.

Sur l’amendement n° 135 qui précise que les fouilles intégrales « doivent être spécialement motivées », je ferai les mêmes observations que pour l’amendement du groupe CRC.

L’avis du Gouvernement est défavorable.

Concernant l’amendement n° 44, les dispositions relevant du respect de la dignité sont déjà dans l’article 10 et s’imposent pour l’ensemble du texte.

Nous sommes donc défavorables à cet amendement.

L’amendement n° 136 rectifié ayant pratiquement le même objet que le précédent, nous y sommes défavorables, et pour les mêmes raisons.

M. le président. La parole est à Mme Alima Boumediene-Thiery, pour explication de vote sur l'amendement n° 303.

Mme Alima Boumediene-Thiery. Selon l’amendement de M. Lecerf, le médecin sera requis par l’autorité judiciaire. Or j’aurais aimé que « l’impératif spécialement motivé » soit lui aussi motivé par l’autorité judiciaire. En effet, la motivation doit pouvoir venir d’une autorité indépendante et l’autorité judiciaire semble la plus appropriée.

M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Sueur, pour explication de vote.

M. Jean-Pierre Sueur. Mon intervention va exactement dans le même sens que celle de Mme Boumediene-Thiery.

Nous comprenons très bien le souci de M. Lecerf quand il souhaite qu’il s’agisse d’une décision de l’autorité judiciaire. Nous considérons cela, monsieur Lecerf, comme un progrès.

Mais il existe un problème de coordination entre les phrases. L’alinéa est ainsi rédigé : « Les investigations corporelles internes sont proscrites, sauf impératif spécialement motivé. Elles ne peuvent alors être réalisées que par un médecin requis à cet effet. »

Vous proposez d’ajouter : « par l’autorité judiciaire ». Cet ajout ne porte donc que sur la seconde phrase.

M. Nicolas About, rapporteur pour avis. Bien sûr !

M. Jean-Pierre Sueur. Il n’est pas dit explicitement que, s’agissant d’un acte particulièrement grave – nous en avons parlé – l’investigation elle-même doit être décidée par l’autorité judiciaire.

C’est pourquoi je vous propose la rédaction suivante pour cet alinéa : « Les investigations corporelles internes sont proscrites, sauf décision de l’autorité judiciaire pour raisons impératives spécialement motivées. Elles ne peuvent alors être réalisées que par un médecin requis à cet effet par celle-ci. » (Mme Nicole Borvo Cohen-Seat approuve.)

Cette rédaction a le mérite d’être claire et elle montre que c’est l’autorité judiciaire qui, dans ce cas spécifique et particulièrement grave, pour des raisons impérieuses spécialement motivées, décide.

M. le président. La parole est à Mme Nicole Borvo Cohen-Seat, pour explication de vote.

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Je souscris aux observations des orateurs qui m’ont précédée. Si M. le rapporteur rejoint la conception exprimée par M. Sueur, nous soutiendrons cet amendement qui, en tout état de cause, constitue un progrès. En revanche, s’il ne s’agit que de faire requérir le médecin par l’autorité judiciaire, cela n’apporte pas grand-chose.

Nous considérons qu’il est important de poser des principes. Certes, il est toujours possible d’y déroger, et on le fait d’ailleurs souvent, mais on doit alors présenter une raison motivée. Je sais que vous contestez cette appréciation, madame le garde des sceaux, mais je considère pour ma part qu’il s’agit d’une question essentielle.

L’association des chrétiens pour l’abolition de la torture, l’ACAT, fait, chacun le sait, un travail remarquable pour dénoncer la torture. J’ai lu ses rapports.

M. Jean-Jacques Hyest, président de la commission des lois. Vous avez d’excellentes lectures !

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Bien sûr, comme nous tous, monsieur Hyest !

L’ACAT nous amène à réfléchir, à engager une démarche que nous n’aurions peut-être pas initiée seuls et qui nous conduit à considérer certains actes dégradants comme des actes de torture, la notion de « torture » ayant évolué au cours des siècles.

La sécurité est bien évidemment essentielle pour le bon fonctionnement d’un établissement pénitentiaire. Nous le savons et le sujet n’est pas là.La difficulté tient au rapport entre la nécessité d’assurer la sécurité des établissements, d’une part, et le respect de la dignité des détenus, d’autre part.

Les différentes mesures qui ont été prises pour renforcer la sécurité n’empêchent pas les évasions, les actes graves entre détenus. On doit donc s’interroger sur le rapport qu’il y a entre les moyens, très lourds, que l’on consacre à la sécurité et les conséquences qui en découlent en termes d’humiliation des personnes.

L’ACAT s’inquiète, dans son rapport, de la manière dont sont traités les « détenus particulièrement signalés », accusés d’actes de terrorisme, par exemple.

Cela m’amène à évoquer le cas de Julien Coupat, dont l’affaire prend à mon sens un tour tout à fait regrettable.

Julien Coupat a été placé en détention provisoire sous l’accusation de terrorisme, bien qu’aucune preuve n’ait été apportée à son encontre. C’est un détenu particulièrement signalé.

Selon les témoignages de sa famille – on peut toujours prétendre que les proches ne sont pas objectifs, mais il faut parfois savoir les écouter – Julien Coupat serait fouillé à corps à plusieurs reprises à chacune des visites de son avocate ou de ses déplacements au tribunal et contraint de se dénuder devant des policiers hilares. De telles situations ne nous honorent pas !

Je considère donc qu’il est essentiel de poser des principes, auxquels il est bien entendu possible de déroger en cas d’absolue nécessité, par décision spécialement motivée.

Pour toutes ces raisons, je suis favorable aux amendements de Mme Boumediene-Thiery en ce qui concerne tant les fouilles intégrales que les fouilles internes corporelles.

M. le président. La parole est à M. Pierre Fauchon, pour explication de vote.

M. Pierre Fauchon. Mes chers collègues, comme j’ai eu l’occasion de le rappeler ce matin, j’ai personnellement l’expérience d’événements qui touchent étroitement le sujet dont nous parlons. C’est peut-être l’une des raisons qui m’ont incité à rester en retrait. Il me semble néanmoins utile, à cet instant, d’apporter le témoignage de quelqu’un qui a personnellement connu l’angoisse de la détention, avec les menaces qui lui étaient liées, pendant les événements d’Afrique du Nord. Je n’ai pas besoin d’en dire davantage.

En août 1955, j’ai pris, non sans difficulté, non sans courir beaucoup de risques, des décisions qui ont permis d’éviter à plus de cent détenus les horreurs de la détention, entre les mains des militaires français de l’époque, qui n’étaient pas toujours des gens très délicats, c’est le moins que l’on puisse dire.

Je crois donc pouvoir apporter ici, en toute modestie, mais aussi en toute assurance, un certain témoignage. Il y a sans doute les exigences de la dignité, mais il y a aussi, qu’on le veuille ou non, c’est un fait, l’exigence de la sécurité. Nous en sommes aussi responsables, il ne faut pas l’oublier.

Les détenus, faut-il le rappeler, ne sont pas tous des anges. Leur imagination dépasse quelquefois l’imaginable. (Mme Éliane Assassi lève les bras.) Vous levez les bras au ciel, mais il s’agit malheureusement de vérités incontournables. Nous en mesurons tous les jours les résultats et les conséquences.

Je ne sais pas si certains êtres sont méchants. Je ne me permets pas de le dire, je suis trop avocat pour cela. Mais, ce que je sais, et que je dis, est que certains êtres sont dangereux. On ne peut pas l’ignorer.

M. Badinter évoquait tout à l’heure les horreurs de la fouille. Si j’étais aussi bon avocat que vous, mon cher collègue – ce n’est pas le cas, je le reconnais bien volontiers –, je pourrais évoquer les horreurs des conséquences de la criminalité et de la délinquance, et vous décrire la souffrance, l’humiliation, les douleurs de toutes les victimes. On pourrait aussi faire ce tableau et vous en seriez tout aussi épouvanté. (Exclamations sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.)

M. Alain Anziani. Nous l’avons dit !

M. Robert Badinter. Cela n’autorise pas d’autres horreurs !

M. Pierre Fauchon. Non, vous ne l’avez pas dit ! Vous l’avez minimisé. C’est trop commode de passer outre, car ces deux aspects des choses sont bien réels et toute la difficulté est d’assumer nos responsabilités en évitant les abus. Ce n’est pas facile !

Il y a ceux qui, comme M. Portelli, considèrent que ces mesures ne sont pas toujours efficaces. Certes ! Mais le code pénal dans son entier n’est pas toujours efficace. Il n’empêche pas la délinquance. Allez-vous pour autant l’abroger ? Est-ce que nous allons renoncer à toutes les dispositions qu’il prévoit sous prétexte qu’elles ne sont pas toujours efficaces ?

Mme Borvo Cohen-Seat regrettait elle aussi que ces mesures ne soient pas toujours efficaces. Il est en effet très difficile d’en mesurer l’efficacité, mais nous prenons des mesures parce qu’il est de notre devoir de les prendre. Même si elles ne sont pas toujours efficaces, elles sont malgré tout assez efficaces, et c’est toujours cela de sauvegardé.

Notre devoir est de faire le possible et non pas l’impossible.

Pour toutes ces raisons, considérant qu’il parvient à un équilibre assez sage, je voterai avec confiance l’amendement no 303.

M. le président. La parole est à M. Hugues Portelli, pour explication de vote.

M. Hugues Portelli. Monsieur Fauchon, nous faisons une loi sur les victimes tous les trois mois et une loi sur les prisons tous les cinquante ans ! (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.) Aujourd’hui, nous légiférons sur les prisons, donc sur les détenus, qui sont des personnes, je vous le rappelle.

M. Pierre Fauchon. Je vous ai déjà dit que j’ai fait plus que quiconque ici pour les détenus !

M. Hugues Portelli. Je ne le nie pas et je ne vous critique pas, mon cher collègue. Mais nous avons le droit de légiférer sur tous les sujets, et, puisque nous légiférons sur les prisons, nous avons le droit d’accorder au sort des détenus tout l’intérêt qu’il mérite. C’était un simple rappel sur notre façon de légiférer sur les prisons au cours des siècles.

Je partage le point de vue de M. Jean-Pierre Sueur, pour une raison très simple.

Imaginez un week-end ordinaire. Le malheureux substitut de service voit défiler de très nombreux dossiers au bout milieu desquels se trouve une demande d’autorisation de requérir un médecin afin de faire procéder à une fouille. Il traitera cette demande avec sérieux, certes, mais peut-être pas toujours avec le temps nécessaire pour réfléchir.

En revanche, si on lui demande de motiver sa décision, ce n’est plus la même chose. Il devra se donner le temps de la réflexion. D’un point de vue technique, motiver une autorisation de faire procéder à une fouille et saisir un médecin pour effectuer une fouille, c’est très différent. C’est pourquoi je préfère la rédaction proposée par M. Jean-Pierre Sueur.

M. le président. La parole est à M. le rapporteur, puis nous procéderons au vote.

M. Jean-René Lecerf, rapporteur. Mes chers collègues, nous avançons et le problème, essentiel, est extrêmement complexe.

Je ne partage pas l’appréciation de MM. Sueur et Portelli. Il me semble que chacun a, à sa place, son rôle à jouer pour assurer la sécurité dans les établissements pénitentiaires et garantir le respect de la dignité des personnes.

L’investigation corporelle interne est exceptionnelle. Celui qui la demande connaît la situation de la prison. Si l’autorité pénitentiaire l’estime nécessaire, elle formule une demande motivée de fouille corporelle interne qui est, en effet, la plus vexatoire.

Cette demande est adressée à l’autorité judiciaire, seule compétente pour réquisitionner éventuellement un médecin. Il est bien évident que l’autorité judiciaire ne le réquisitionnera que si elle a été convaincue par la motivation spéciale invoquée par l’autorité pénitentiaire.

Si l’autorité judiciaire estime que la raison invoquée n’est pas suffisante, elle n’ordonnera pas la réquisition et la fouille n’aura pas lieu.

Cette organisation correspond à une logique qui ne me paraît pas déraisonnable.

M. Robert Badinter. Je demande la parole, pour explication de vote.

M. le président. J’avais indiqué que nous passerions au vote après l’intervention de M. le rapporteur.

M. Jean-Pierre Sueur. M.  Badinter n’a pas expliqué son vote. Il peut donc le faire, c’est le règlement.

M. le président. Certes, mais il eût été préférable que M. Badinter expliquât son vote plus tôt, cela aurait permis à M. le rapporteur d’apporter à chacun les précisions qu’il estime nécessaires.

La parole est donc à M. Robert Badinter, pour explication de vote.

M. Robert Badinter. Je serai d’une grande concision, monsieur le président.

Monsieur le rapporteur, nous sommes très proches d’une solution sur le problème, gravissime, des fouilles corporelles internes.

Il est plus clair, y compris pour les personnels et pour les autorités pénitentiaires, d’avoir l’autorisation de l’autorité judiciaire lorsqu’ils se trouvent en présence de situations – et on conçoit lesquelles – qui font naître un soupçon : une arme cachée, par exemple.

Nous sommes au temps du téléphone portable, des e-mails. Nous vivons dans l’instantanéité. L’autorité pénitentiaire avise le parquet. L’autorité judiciaire donne une réponse immédiate : procéder ou ne pas procéder à la fouille. La première signale ; la seconde décide. Au final, la gardienne des droits fondamentaux, donc de la dignité de la personne, c’est bien l’autorité judiciaire.

Vous l’avez d’ailleurs démontré en affirmant que, si l’autorité judiciaire n’est pas convaincue que les circonstances le justifient, elle ne donnera pas l’autorisation de recourir à un médecin.

Il s’agit vraiment d’une question de rédaction.

Comme l’a évoqué M. Sueur, les investigations corporelles internes sont proscrites, sauf décision spécialement motivée de l’autorité judiciaire. Mais un simple e-mail suffit ; tout se fait en un instant.

La suite telle que vous l’avez écrite est parfaite : « Elles ne peuvent alors être réalisées que par un médecin requis à cet effet. » Ce n’est même plus la peine de faire apparaître l’autorité judiciaire. C’est la décision qui doit venir de l’autorité judiciaire, non le choix du médecin. C’est aussi simple que cela, ce n’est rien de plus.

Au fond, nous sommes d’accord : c’est à l’autorité judiciaire de prendre cette responsabilité, pas au personnel pénitentiaire. Et de quelle manière ? De la façon la plus simple que les techniques actuelles permettent. C’est tout, monsieur le rapporteur. Si vous reprenez cette rédaction, je crois que tout le monde votera l’amendement, et puis ce sera fini !

M. le président. La parole est à M. le rapporteur.

M. Jean-René Lecerf, rapporteur. Mes chers collègues, nous sommes effectivement sur le point de trouver un accord. Je souhaiterais cependant que, pour le moment, nous en restions à la proposition qui a été faite.

Pour cela, je vous donnerai un dernier argument, tiré de la comparaison – même si comparaison n’est pas raison – avec le même type de fouilles, effectuées cette fois lors d’une garde à vue ou lors d’un contrôle des services des douanes. Dans l’hypothèse de la garde à vue, la réquisition est faite par un officier de police judiciaire. Pour les fouilles effectuées par les douaniers, elle est faite par les autorités des douanes.

En l’espèce, l’hypothèse que nous avons adoptée est la plus protectrice, puisque la réquisition ne pourra être décidée que par l’autorité judiciaire. Nous avons déjà fait un grand pas.

Il faut aussi prévoir la possibilité, pour les uns et les autres, de pouvoir se rallier à une solution. Nous avons beaucoup avancé dans votre direction, monsieur Badinter. Nous souhaiterions que vous fassiez un petit pas vers nous.

M. le président. Je mets aux voix, par priorité, l'amendement n° 303.

(L'amendement est adopté à l’unanimité des présents.)

M. Jean-Pierre Sueur. C’est un progrès !

M. le président. En conséquence, l’amendement n° 235 n’a plus d’objet.

Madame Boumediene-Thiery, l'amendement n° 45 rectifié est-il maintenu ?

Mme Alima Boumediene-Thiery. Oui, monsieur le président, je le maintiens, car je considère que les fouilles des cellules, et pas seulement les fouilles corporelles, doivent figurer dans le texte.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 45 rectifié.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 134.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 135.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 44.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 136 rectifié.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'article 24, modifié.

M. Jean-Pierre Sueur. Le groupe socialiste s’abstient !

Mme Éliane Assassi. Le groupe CRC-SPG s’abstient également !

(L'article 24 est adopté.)