M. le président. La parole est à M. Michel Thiollière, pour explication de vote.

M. Michel Thiollière. Je reviendrai, pour conforter la position exprimée par Jacques Legendre, sur les motivations de la commission des affaires culturelles. J’étais en effet corapporteur, avec Mme Catherine Morin-Desailly, du texte relatif à la communication audiovisuelle et au nouveau service public de la télévision.

En ce qui concerne le timing et la chronologie des événements, je voudrais rappeler que nous avons proposé cette mesure dès le mois de décembre dernier, dans le cadre du débat budgétaire. On nous avait alors recommandé de réserver ce dossier pour l’examen du projet de loi sur l’audiovisuel public, ce que nous avons bien sûr accepté, parce que cela nous paraissait opportun.

Pour les raisons rappelées par Jacques Legendre, le Conseil constitutionnel a estimé que la question devait être revue dans le cadre du débat budgétaire. C’est ce que nous faisons ce soir ! Bien entendu, on peut aussi attendre la fin du passage au tout-numérique. À ce moment, le problème sera résolu de lui-même ! (Sourires.)

Cela étant, nous avons défendu la logique selon laquelle la redevance porte en elle-même une forme de dynamique du financement de l’audiovisuel public. Cette dynamique a été portée sans relâche par le Sénat depuis plusieurs années ; elle est maintenant actée dans la loi.

C’est la raison pour laquelle il nous a semblé, dans un souci de transparence comme de lisibilité du financement, que la redevance devait être affectée essentiellement au financement de l’audiovisuel public, et donc aux différentes sociétés nationales qui le composent.

Puisque nous avons aujourd’hui une loi qui inscrit la redevance comme l’un des modes de financement essentiels de l’audiovisuel public, ce qui n’était pas le cas auparavant, il nous semble à la fois cohérent, pertinent et équitable que la redevance soit bel et bien affectée à l’audiovisuel public et que l’on mette fin à la ponction qui était opérée avant la loi pour financer le GIP. Celui-ci doit être abondé par le budget de l’État.

Vous avez d’ailleurs raison de le rappeler, monsieur le ministre : cela veut dire que, puisque la redevance permet d’abonder davantage le budget de l’audiovisuel public, le budget de l’État n’aura évidemment pas à financer 450 millions d’euros, comme c’était le cas auparavant.

Il s’agit donc, d’un point de vue budgétaire et financier, d’une opération neutre, mais qui permet de décroiser des financements aujourd’hui embrouillés. Encore une fois, cela ne coûtera pas un euro de plus au budget de l’État, mais le financement de l’audiovisuel, d’une part, et celui du GIP, d’autre part, se trouveront clarifiés.

Effectivement, comme l’a rappelé M. le rapporteur général, les besoins du groupement sont évalués à 15 millions d’euros pour cette année, à 72 millions d’euros pour l’année prochaine et à 132 millions d’euros pour 2011. Ensuite, les montants iront décroissant, suivant le tracé d’une parabole.

N’attendons pas d’être arrivés au terme pour régler ce problème ! La loi est maintenant votée et, comme vous le savez, le Sénat a été patient. Nous avons bien compris qu’il fallait respecter un certain timing, mais nous sommes déterminés à camper sur cette position, car elle nous paraît cohérente aussi bien avec la loi qu’avec ce qu’a défendu le Gouvernement après la CMP.

M. le président. La parole est à Mme Catherine Morin-Desailly, pour explication de vote.

Mme Catherine Morin-Desailly. Pour compléter ce qu’a dit mon collègue Michel Thiollière, je préciserai que la commission des affaires culturelle, lors de l’examen du projet de loi sur l’audiovisuel public, avait souhaité que s’établisse une véritable pédagogie de ce qui s’appelle maintenant la « contribution à l’audiovisuel public ».

Cette pédagogie impliquait le décroisement des financements, pour que le téléspectateur sache exactement à quel service il contribue quand il s’acquitte de la redevance.

Or, on sait que ces services, tels que nous les avons souhaités – certains ont d’ailleurs été introduits par voie d’amendement ici même –, seront nombreux : il s’agit de la mise en place du global media, des programmes nouveaux, du multilinguisme, des programmes pour les sourds et malentendants et de la télévision de rattrapage, que nous avons voulue gratuite.

La pédagogie est aussi une condition sine qua non pour que la revalorisation et l’indexation de la redevance, que nous avons appelées de tous nos vœux ici, au Sénat, depuis de très nombreuses années, soient vécues par l’opinion non comme une hausse inique et un impôt injuste, mais comme une contrepartie effective de ces services immédiatement perceptibles.

Par ailleurs, nous avons affirmé ici la philosophie suivante : si nous voulons une télévision publique, il faut lui fournir des financements publics qui ne soient pas dépendants de taxes affectées selon le bon vouloir de l’État, année après année.

Cela renforcera cette indépendance  et évitera ainsi au Gouvernement lui-même de se justifier du montant de la subvention qu’il versera aux entreprises de l’audiovisuel public.

Je voulais aussi souligner, comme l’a fait Michel Thiollière, qu’il s’agit non pas de dépenses supplémentaires, mais simplement d’un fléchage permettant de clarifier la situation. Nous sommes tout à fait conscients de la nécessité d’étudier avec soin le financement de l’audiovisuel public. C’est pourquoi, je le rappelle, nous avons voté ici même des amendements tendant à mettre en place un comité de suivi, composé de quatre sénateurs et de quatre députés, qui a pour tâche, en collaboration avec la commission des finances, d’établir chaque année un rapport très précis sur les besoins de financement de l’audiovisuel public.

Rappelons également qu’un certain nombre d’économies seront réalisées à travers la mise en place de l’entreprise unique.

Encore une fois, il s’agit donc non pas de dépenses supplémentaires – nos collègues n’ont pas à s’inquiéter ! –, mais d’un fléchage permettant une meilleure lisibilité, au service d’une certaine philosophie : nous devons affecter à la télévision publique des financements publics pérennes et dynamiques.

M. le président. La parole est à M. Jack Ralite, pour explication de vote.

M. Jack Ralite. Nous soutenons nous aussi l’amendement défendu par le président de la commission des affaires culturelles.

Je dirai, premièrement, qu’il s’agit là de morale, car nous avons discuté longuement de cette question ! On se souvient des débats : la décision a été acquise et le Gouvernement n’a rien dit. Je rappelle d’ailleurs qu’un temps, avant la discussion, il avait déjà été question que le GIP soit financé par l’État.

Je résume : à un moment, il est question que le GIP soit financé par l’État ; après, on ne dit rien quand une autre solution est proposée ; et maintenant on fait marche arrière ! Finalement, quand nous votons, nous ne savons pas ce que nous votons ! (Sourires.) Il faut le souligner : il en va de l’équité et surtout de l’éthique !

Deuxièmement, le GIP sert autant pour le public que pour le privé. L’argument selon lequel la redevance sert à équiper est recevable, mais celle-ci n’a jamais été prévue pour équiper le privé, ou alors j’étais aveugle le jour où on l’a décidé ! (Nouveaux sourires.)

Troisièmement, je trouve tout de même curieux qu’on retire de l’argent par ce système, alors que nous avons eu un mal considérable à obtenir – par un vote du Sénat, retenu par la commission mixte paritaire – une augmentation, pourtant faible, de la redevance ! Aussi faible que soit le chiffre, il faut tout de même se rappeler les sommes prévues pour l’année prochaine et pour 2011. Et il s’agit quand même, d’une manière ou d’une autre, de gommer le résultat de nos efforts. Ce résultat, nous l’avions obtenu, la commission mixte paritaire l’avait soutenu, et le Gouvernement avait dû l’entériner.

Enfin, en votant cet amendement du président de la commission des affaires culturelles, nous marquerons aussi la volonté du Sénat de voir sa « coproduction législative » – je le dis sans ironie – respectée. Et Dieu sait si nombre de nos décisions ont été bafouées ! Or, sur cette question, on veut nous bafouer jusqu’au bout !

Dans l’intérêt du service public, je voterai donc vraiment sans hésitation, de même que mon groupe, en faveur de l’amendement n° 10, unanimement approuvé par la commission des affaires culturelles.

M. le président. La parole est à M. Philippe Dominati, pour explication de vote.

M. Philippe Dominati. Pour ma part, je n’avais pas la même vision qu’un certain nombre de mes collègues dans cet hémicycle sur le financement de l’audiovisuel public, au moment du débat sur le texte en question.

Mais, s’il m’est tout de même permis de soumettre un argument, je voudrais, à ce stade de la discussion, évoquer l’amendement que j’ai déposé en vue de créer un article additionnel après l’article 13, que je vous présenterai tout à l’heure.

Lors du débat sur le nouvel audiovisuel public, nous avons parlé d’un effet d’aubaine lié aux recettes nouvelles allant vers les chaînes du secteur privé.

Qu’en est-il de cet effet d’aubaine à l’heure actuelle ? En 2008, on a observé une baisse de 2 % à 3 % du marché publicitaire et des recettes afférentes pour les chaînes privées. Les estimations, pour l’année 2009, tablent sur une diminution de l’ordre de 13 % à 15 %.

En réalité, nous avons donc déséquilibré par cette loi la répartition des recettes qui prévalait auparavant entre les chaînes privées et les chaînes publiques, cette répartition passant de 53 % pour le secteur public et 47 % pour les chaînes privées à respectivement, à la fin de cette année, 60 % et 40 %. Voilà l’effet immédiat, dès la première année, de la loi sur l’audiovisuel.

M. Jacques Legendre et d’autres collègues auraient totalement raison si, tout à l’heure, dans le but de contrecarrer l’effet d’aubaine, nous réduisions le plancher sur les taxes nouvelles créées voilà quelques mois pour financer l’audiovisuel public par les chaînes privées. Tel sera le sens de l’amendement que je vous soumettrai tout à l’heure.

Dans ces conditions – et je pense que ce serait à la fois juste et nécessaire pour maintenir une compétition dans ce secteur –, l’argument de mes collègues me semble plus que justifié, car il y aurait une baisse de recettes supplémentaire.

Je souhaiterais donc établir un lien entre la discussion du présent amendement et celle de l’amendement que je présenterai tout à l’heure.

Je mets aux voix l'amendement n° 10.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. Monsieur le ministre, le gage est-il levé ?

M. Éric Woerth, ministre. Non, monsieur le président.

M. le président. La CMP fera son miel de tout cela !

M. Philippe Marini, rapporteur général. Il faut veiller à ce qu’elle ait de la substance…

M. le président. L’amendement n° 10 ayant été adopté, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi de finances rectificative, après l'article 8 D.

L'amendement n° 94, présenté par M. Marini, au nom de la commission des finances, est ainsi libellé :

Après l'article 8 D, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

L'article L. 259 du livre des procédures fiscales est ainsi modifié :

1° Au premier alinéa, les mots : « comptable du Trésor » sont remplacés par les mots : « comptable public ».

2° Il est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Le commandement interrompt la prescription de l'action en recouvrement. »

La parole est à M. le rapporteur général.

M. Philippe Marini, rapporteur général. Tout d'abord, cet amendement tire les conséquences de la création de la direction générale des finances publiques. Ensuite, il vise à corriger une erreur de coordination. Il pouvait y avoir en effet une ambiguïté du fait de la loi du 17 juin 2008. L’amendement tend donc à préciser que le commandement est un acte interruptif de l’action en recouvrement.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Éric Woerth, ministre. Le Gouvernement émet un avis favorable sur ce très bon amendement de la commission des finances.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 94.

(L’amendement est adopté.)

M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi de finances rectificative, après l’article 8 D.

Articles additionnels après l'article 8 D
Dossier législatif : projet de loi de finances rectificative pour 2009
Article 8

Articles additionnels avant l’article 8

M. le président. L’amendement n° 95, présenté par M. Marini, au nom de la commission des finances, est ainsi libellé :

Avant l’article 8, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I. - Le 1° de l’article 83 du code général des impôts est ainsi rédigé :

« 1° Les cotisations de sécurité sociale, y compris :

« a) les cotisations d’assurance vieillesse versées en exercice des facultés de rachat prévues aux articles L. 351-14-1 du code de la sécurité sociale, L. 9 bis du code des pensions civiles et militaires de retraite, ainsi que celles prévues par des dispositions réglementaires ayant le même objet prises sur le fondement de l’article L. 711-1 du code de la sécurité sociale ;

« b) les cotisations versées aux régimes de retraite complémentaire mentionnés au chapitre Ier du titre II du livre IX du code de la sécurité sociale ;

« c) les cotisations au régime public de retraite additionnel obligatoire institué par l’article 76 de la loi n° 2003-775 du 21 août 2003 portant réforme des retraites. »

II. - Les dispositions du I s’appliquent à l’impôt sur le revenu dû au titre de 2008 et des années suivantes.

III. - La perte de recettes résultant pour l’État de la déduction du revenu imposable des cotisations versées pour le rachat d’années d’étude est compensée à due concurrence par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.

La parole est à M. le rapporteur général.

M. Philippe Marini, rapporteur général. Cet amendement a pour objet de permettre aux salariés relevant d’un régime spécial de sécurité sociale de déduire de leur revenu imposable les cotisations versées en vue de leur retraite grâce à la faculté qui leur est offerte de racheter leurs années d’études.

Le Sénat avait déjà adopté ce dispositif dans le cadre de la discussion du projet de loi de finances rectificative pour 2008, sur l’initiative de notre collègue Auguste Cazalet et du groupe UMP, afin d’étendre aux régimes spéciaux de sécurité sociale la déduction du revenu brut des cotisations d’assurance vieillesse versées au titre du rachat d’années d’études prévu par le régime général d’assurance vieillesse, ainsi que par le régime des pensions civiles et militaires, les régimes complémentaires et le régime public de retraite additionnelle obligatoire. Mais la commission mixte paritaire l’avait finalement supprimé.

Ce dispositif s’insère donc dans le mouvement d’alignement des régimes spéciaux sur celui de la fonction publique. Or, en contrepartie des efforts consentis par les salariés des régimes spéciaux, il paraît équitable de leur accorder le droit à déduction des cotisations de rachat d’années d’études au même titre que ceux du régime général.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Éric Woerth, ministre. Le dispositif proposé dans cet amendement, qui permet à un certain nombre de salariés relevant des régimes spéciaux de déduire de leur revenu imposable les cotisations d’assurance vieillesse versées au titre du rachat de leurs années d’études, nous semble aller dans le sens de l’équité. Le Gouvernement y est donc favorable, et il lève le gage.

M. le président. Il s’agit donc de l’amendement n° 95 rectifié.

Je le mets aux voix.

(L’amendement est adopté.)

M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi de finances rectificative, avant l’article 8.

L’amendement n° 78, présenté par MM. Jégou et Vanlerenberghe, est ainsi libellé :

Avant l’article 8, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I. - L’article 199 septvicies du code général des impôts est ainsi modifié :

1° Le I est complété par deux alinéas ainsi rédigés :

« Toutefois, en cas d’acquisition de la nue-propriété d’un logement neuf ou en l’état futur d’achèvement et lorsque l’usufruit appartient à un organisme d’habitations à loyer modéré mentionné à l’article L. 411-2 du code de la construction et de l’habitation, à une société d’économie mixte ou à un organisme disposant de l’agrément prévu à l’article L. 365-1 du même code et lorsque le logement fait l’objet d’un prêt mentionné aux articles R. 391-1 et suivants ou R. 331-1 et suivants du même code, le nu-propriétaire peut bénéficier de la réduction d’impôt sur le revenu dans les conditions prévues au présent article.

« Un contribuable disposant de revenus fonciers générés par d’autres propriétés ne peut, pour un même logement en nue-propriété, bénéficier à la fois de la réduction d’impôt et de la faculté de déduction des intérêts d’emprunt visée au d du 1° du I de l’article 31. Dans ce cas la réduction d’impôt est accordée sur option irrévocable du contribuable entrainant renoncement à la prise en compte des charges financières correspondantes dans l’évaluation de ses revenus fonciers. » ;

2° Le III est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« En cas d’acquisition de la nue-propriété d’un logement neuf ou en l’état futur d’achèvement dans les conditions mentionnées au septième alinéa du I, la convention d’usufruit locatif visée aux articles L. 253-1 et suivants du code de la construction et de l’habitation vaut engagement de location pour la durée de la convention. »

3° Après le troisième alinéa du IV, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« Lorsque le droit de propriété du logement est démembré dans les conditions prévues au septième alinéa du I, le prix de revient du logement mentionné au premier alinéa s’entend du prix de revient de la seule nue-propriété. »

4° Après la première phrase du troisième alinéa du VIII, il est inséré une phrase ainsi rédigée :

« L’acquisition par la société de la nue-propriété de logements neufs ou en l’état futur d’achèvement  ne fait pas obstacle au bénéfice des dispositions du présent article lorsque les conditions fixées au septième alinéa du I sont satisfaites. »

II. - La perte de recettes résultant pour l’État du I ci-dessus est compensée à due concurrence par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.

La parole est à M. Jean-Marie Vanlerenberghe.

M. Jean-Marie Vanlerenberghe. La loi de finances rectificative pour 2008 a prévu de compléter le plan de relance par une mesure exceptionnelle en faveur de l’investissement locatif dans le secteur libre sous forme de réduction d’impôt, plus communément appelée « dispositif Scellier ».

Le présent amendement vise à faire bénéficier de cette mesure les investissements réalisés selon le dispositif de l’usufruit locatif, qui permet de développer une offre locative sociale complémentaire maîtrisée par les collectivités territoriales. Autrement dit, il s’agit d’instaurer un dispositif Scellier « social ».

L’usufruit locatif est un dispositif de cofinancement public-privé innovant, adapté aux zones tendues. Il a pour intérêt, au travers de l’investissement de particuliers en nue-propriété, de créer un parc privé de logements affectés pour un minimum de quinze années au secteur locatif social et gérés par les bailleurs sociaux, sans nécessiter de subventions, notamment de la part des collectivités locales. Ces dernières sont en effet souvent appelées à financer des surcoûts fonciers très importants dans ces zones tendues, qui concernent les cœurs de ville ou des endroits particulièrement chers sur le plan foncier.

Or, dans le contexte de crise et de baisse des volumes de transactions, les collectivités locales sur le territoire desquelles ces zones sont situées ont vu fondre leurs recettes liées aux droits de mutations. Mais les besoins en logements locatifs accessibles étant toujours aussi importants, elles ont plus que jamais besoin de faire appel à tous les outils disponibles pour relever le défi de la mixité, malgré le contexte défavorable.

À ce jour, les investisseurs en nue-propriété sont essentiellement des personnes disposant déjà de propriétés mises en location.

Par conséquent, en prévoyant l’impossibilité de cumul de la réduction d’impôt avec la faculté de déduction des intérêts d’emprunt, le dispositif proposé dans cet amendement cible les seuls contribuables « primo-investisseurs » et ne crée aucun effet d’aubaine. Il vise à démocratiser ce schéma en développant un « investissement socialement responsable » et en le rendant éligible à la réduction d’impôt en faveur de l’investissement locatif social.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Philippe Marini, rapporteur général. Nous avons déjà évoqué à différentes reprises dans ce débat le dispositif Scellier, qui est effectivement un dispositif puissant. Il nous est ici proposé d’en élargir le bénéfice en faveur de l’immobilier locatif aux nus-propriétaires dans le cadre de l’usufruit locatif social.

La commission, qui va s’en remettre à l’avis du Gouvernement sur cet amendement, n’est pas convaincue de l’absolue nécessité de revenir sur un régime qui vient à peine d’être défini. Elle s’interroge également sur l’opportunité d’un renforcement des avantages dévolus au type d’opérations qui a été décrit, sans méconnaître, bien entendu, l’importance qu’ils peuvent revêtir dans un projet urbain.

En effet, la loi de finances rectificative pour 2008 a prévu que les investisseurs particuliers qui acquièrent la nue-propriété de logements dont l’usufruit appartient à un organisme d’HLM pourront déduire de leurs revenus fonciers les intérêts d’emprunt contractés à cette occasion. Il s’agit donc d’une incitation fiscale récente. Faut-il en ajouter une nouvelle ? Il appartiendra au Sénat d’en juger !

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Éric Woerth, ministre. Monsieur Vanlerenberghe, pour vous le dire franchement, le Gouvernement est très opposé à cet amendement, car l’adoption de ce dernier reviendrait, au fond, à créer « une niche sur une niche ».

Outre d’être assez complexe, le dispositif proposé représente un avantage fiscal sur des montages qui sont eux-mêmes relativement compliqués. Aujourd’hui, aucune réduction d’impôt ne s’applique à des démembrements de propriété. En instaurer une serait donc une première.

Or les montages auxquels vous faites référence, qui font intervenir des nus-propriétaires, des usufruitiers et des organismes d’HLM – tout cela est bien compliqué ! –, bénéficient déjà d’un nombre non négligeable d’avantages fiscaux : l’investisseur bénéficie d’une TVA à taux réduit ; tout au long de la convention d’usufruit, il n’est pas redevable de la taxe foncière ; à l’extinction de l’usufruit temporaire, il devient plein propriétaire et la plus-value de cession est alors exonérée.

Dans la mesure où il existe déjà toute une cascade d’avantages fiscaux réservés à ce type de montages, il serait tout de même anormal d’en ajouter un nouveau, aussi puissant que le dispositif Scellier.

Par conséquent, le Gouvernement n’est vraiment pas favorable à cet amendement.

M. le président. La parole est à M. Jean-Marie Vanlerenberghe, pour explication de vote.

M. Jean-Marie Vanlerenberghe. Monsieur le ministre, votre réponse m’étonne. J’ai bien précisé tout à l’heure – et c’est expressément prévu dans l’amendement – qu’il n’y aurait aucun effet d’aubaine puisque la déduction des intérêts d’emprunt ne pourrait pas se cumuler avec la réduction d’impôt.

Vous êtes aussi le maire de Chantilly, et, à ce titre, vous devriez réfléchir à l’intérêt d’un tel dispositif !

M. Thierry Repentin. M. Woerth est là en tant que ministre !

M. Jean-Marie Vanlerenberghe. Monsieur Repentin, vous qui êtes le président de l’Union sociale pour l’habitat, représentant, au niveau national, de tous les bailleurs sociaux, vous devriez également y être sensible, tant il s’avère intéressant pour les cœurs de ville ou pour les secteurs tendus, dans lesquels la construction de logements sociaux est insuffisante.

Je rappelle que le dispositif de l’usufruit locatif est totalement ouvert, y compris aux PLUS, les prêts locatifs à usage social, et aux PLAI, les prêts locatifs aidés d’intégration. Vous ne semblez donc pas mesurer tout l’intérêt qu’il peut représenter, non seulement pour les investisseurs, mais également pour les collectivités locales, qui n’auront pas à payer le surcoût foncier. Vous savez très bien que celles-ci sont souvent conduites à consentir un important effort financier pour la construction de logements dans les cœurs de ville.

Monsieur le ministre, plaidant instamment pour ce nouveau dispositif, je maintiens cet amendement. Il est à mon sens réellement opportun d’ouvrir le dispositif Scellier, qui, c’est vrai, coûte cher pour le logement libre. Vous le refusez pour le logement social ; j’en prends note. J’espère que le Sénat exprimera un avis contraire. Le Scellier « social » que je propose s’inscrit dans la continuité du Borloo « social » et du Robien « social », tout en étant encore plus lisible et intéressant.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 78.

(L’amendement n’est pas adopté.)

M. le président. L’amendement n° 34, présenté par Mme Bricq, M. Marc, Mme M. André, MM. Angels, Auban, Demerliat, Frécon, Haut, Hervé, Krattinger, Masseret, Massion, Miquel, Rebsamen, Sergent, Todeschini et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :

Avant l’article 8, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I. - Après les mots : « la somme de », la fin de la première phrase du premier alinéa du 4 de l’article 200 quater du code général des impôts est ainsi rédigée : « 16 000 euros ».

II. - Le I n’est applicable qu’aux sommes venant en déduction de l’impôt dû.

III. - La perte de recettes pour l’État résultant de l’augmentation du plafond de la réduction d’impôt, est compensée à due concurrence par l’institution d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.

La parole est à Mme Nicole Bricq.