Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Pierre Hérisson, rapporteur. La commission bien évidemment ne peut émettre d’avis favorable sur l’amendement de suppression.

À titre personnel, je suis favorable à l’amendement n° 278, et je souhaiterais entendre à son sujet l’avis du Gouvernement.

S’agissant des autres amendements posant le problème du financement du fonds de péréquation, je dirai qu’un amendement de M. Collombat que nous examinerons ultérieurement me paraît de nature à assurer l’intégralité du financement du fonds de péréquation, tout en respectant les limites qui nous ont été fixées par la directive européenne, afin de ne pas tomber sous le coup du subventionnement de l’aménagement du territoire et de bien en rester à une réduction de la fiscalité qui permette de couvrir, mieux que précédemment, l’ensemble de ce financement.

Par conséquent, la commission émet un avis défavorable sur les amendements nos 38, 378, 379, 380 et 542. Cependant, si le Gouvernement émet, comme je le pense, un avis favorable sur l’amendement n° 278, ce qui devrait entraîner l’adoption de ce dernier, je demanderai aux auteurs des autres amendements en discussion commune de les retirer, ce qui nous permettrait d’avoir une position cohérente et positive dans le cadre de la modernisation de l’entreprise postale.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Michel Mercier, ministre. La commission vient de faire une proposition globale au Sénat. Il appartiendra à la Haute Assemblée de se prononcer, dans sa sagesse.

S’agissant de l’amendement n° 38, je rappelle que le deuxième alinéa qu’il vise à supprimer, au sein de l’article 2, est ainsi rédigé : « La Poste et ses filiales constituent un groupe public qui remplit des missions de service public. » Le Gouvernement, très attaché au rappel du caractère public de La Poste dans le texte, est hostile à la suppression de cet alinéa.

M. Jean-Claude Danglot. Caricature encore une fois !

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Ce sera une société anonyme !

M. Michel Mercier, ministre. Je regrette, mais vous proposez une suppression et, moi, je vous dis que le Gouvernement est contre !

En ce qui concerne les amendements nos 378 et 379, qui visent à introduire, le premier, le mot « entièrement », le second, le mot « unique », je suis tout à fait d’accord pour dire que La Poste est entièrement publique.

Toutefois, sur le plan normatif, ces mots ne signifient malheureusement pas grand-chose ; ils ne veulent même rien dire du tout ! (M. Nicolas About rit.)

Je préfère l’amendement de M. Retailleau, qui a été adopté par le Sénat, visant à placer La Poste sous la protection de la loi et du Parlement, (M. Michel Teston s’exclame.) – écoutez-moi, monsieur Teston – et rappelant qu’elle constitue un service public national auquel seul le Parlement pourra apporter des modifications.

Une telle protection me semble plus efficace.

M. Pierre Hérisson, rapporteur. C’est exact !

M. Michel Mercier, ministre. J’émets donc un avis défavorable sur ces amendements.

Sur l’amendement n° 278, j’ai bien compris la position de M. le rapporteur.

L’expression « service public » est une formule en droit interne utilisée par le Conseil d’État et par nous tous. Nous savons ce qu’est un service public à la française. C’est une originalité, une particularité de notre droit public.

Par cet amendement, il est proposé d’utiliser la formule « intérêt général ».

M. Michel Mercier, ministre. En plus, bien sûr ! Mais laissez-moi finir, monsieur Desessard, vous serez gentil comme tout !

M. Jean Desessard. C’est dans ma nature d’être gentil !

M. Michel Mercier, ministre. Je ne doute pas un seul instant qu’elle soit généreuse ! (Sourires.)

Je veux seulement dire que la formule européenne « service d’intérêt général » est plus large que celle de « service public ».

Si la commission est favorable à cet amendement, le Sénat, dans sa sagesse, saura trancher. Dès lors, le mieux serait, en effet, que les autres amendements, nos 380 et 542, soient retirés, d’autant que l’amendement n° 380 me paraît satisfait, s’agissant du volume horaire d’ouverture au public des points contact. En effet, le contrat que signeront l’État et La Poste en 2010 mentionnera – c’est l’une des propositions du président de La Poste – un volume d’heures global par département.

À défaut du retrait des amendements n° 380 et 542, le Gouvernement émettra un avis défavorable.

Mme la présidente. La parole est à M. Martial Bourquin, pour explication de vote.

M. Martial Bourquin. Monsieur le ministre, j’ai bien entendu que l’amendement n° 380 serait ultérieurement satisfait par un futur contrat entre La Poste et le Gouvernement mentionnant un volume horaire d’ouverture.

Cette question de fond est au cœur de notre débat : nous préférons, nous, que cette disposition figure dans la loi, le contrat entre La Poste et le Gouvernement étant destiné à mettre en œuvre le contenu de la loi.

Si vous approuvez cette disposition, il est préférable de l’inscrire dans la loi, car, vous le savez bien, monsieur le ministre, les gouvernements se succèdent, les ministres n’ont que des CDD (Sourires), vous-même pouvez ne plus être là un jour, …

M. Michel Mercier, ministre. Cela, c’est sûr !

M. Martial Bourquin. … en tant que ministre, j’entends ! (Nouveaux sourires.)

En revanche, quels que soient les gouvernements et les ministres en place, une disposition qui figure dans la loi, c’est la loi, et nul n’est censé ignorer la loi.

Pour sa part, le contrat entre La Poste et le Gouvernement devra appliquer la loi.

Si donc vous êtes favorable à la mesure relative aux amplitudes horaires, et j’en serais très satisfait, parce que c’est le plus gros problème auquel sont confrontés les territoires à l’heure actuelle, écrivez-le, je vous le demande, car, comme l’on dit, cela va mieux en l’écrivant… Donnez-nous ainsi un signe positif pour nous encourager dans notre travail au cours des prochains jours.

Mme la présidente. La parole est à M. le ministre.

M. Michel Mercier, ministre. Monsieur Bourquin, vous touchez là, en effet, un sujet essentiel.

Je vous rappelle l’alternative : soit l’on s’en tient à une formule qui figure dans la loi et qui, de par son caractère législatif, sera forcément vague et générale ; soit l’on s’efforce de se doter de vraies garanties et, à cet égard, je vous répète la proposition que j’ai faite, car peut-être ai-je été un peu rapide. Dans le nouveau contrat que le Gouvernement et La Poste vont négocier en présence de l’Association des maires de France, La Poste se déclare prête à aller plus loin que par le passé et à inscrire un volume global d’heures d’ouverture par département.

Mme Marie-France Beaufils. Que signifie « global » ?

M. Michel Mercier, ministre. Il s’agit d’un nombre d’heures, par exemple dix mille ou cinq milles heures, dans un département.

Mme Marie-France Beaufils. C’est très ambigu !

M. Michel Mercier, ministre. La commission départementale de présence postale sera consultée pour l’application de cette mesure, bureau par bureau, et pour la répartition du volume global d’heures.

Le nombre d’heures n’a pas à figurer dans la loi, car cette disposition est d’ordre strictement réglementaire. En revanche, on peut fixer dans le contrat, pour chaque département, un volume d’heures global d’ouverture de tous les points de contact de La Poste, la répartition étant faite en collaboration avec les élus du département et la commission départementale de présence postale territoriale.

Monsieur Bouquin, ne nous faites pas manquer cette opportunité essentielle. La commission départementale de présence postale territoriale sera dotée d’un vrai pouvoir de gestion du volume horaire d’ouverture. Autrement, nous allons nous en tenir à une formule vague, qui n’apportera rien et qui n’aura pas mon soutien.

Je comprends votre demande et nous y répondons complètement, me semble-t-il. Essayez, vous aussi, de nous aider à proposer le meilleur texte possible.

Mme la présidente. La parole est à M. Michel Teston, pour explication de vote.

M. Michel Teston. Est-il logique d’examiner ces amendements divers en discussion commune ?

L’amendement n° 38 vise à supprimer deux alinéas de cet article. Les membres du groupe CRC-SPG ont expliqué pourquoi et nous respectons parfaitement leur argumentation. Nos amendements ont, quant à eux, pour objet de préciser les quatre missions de service public telles qu’elles sont décrites à l’article 2.

En conséquence, il faut dissocier le vote de l’amendement n° 38 de ceux des autres amendements qui me semblent très différents.

M. Nicolas About. Il ne s’agit pas d’un vote unique mais d’une discussion commune !

M. Michel Teston. Ah, j’avais cru comprendre qu’ils étaient en discussion commune et qu’on les voterait globalement. (Protestations.)

Mme la présidente. La parole est à M. le vice-président de la commission.

M. Gérard Cornu, vice-président de la commission de l'économie, du développement durable et de l'aménagement du territoire. Monsieur Teston, il s’agit d’une discussion commune parce que ces amendements portent sur le même alinéa. Mais le vote aura lieu amendement par amendement.

Mme la présidente. La parole est à M. Pierre-Yves Collombat, pour explication de vote.

M. Pierre-Yves Collombat. Vous le savez comme moi, la question du volume horaire constitue la véritable difficulté.

On nous bassine avec le nombre de points de contact de La Poste, mais l’important ce sont les heures d’ouverture des guichets qui servent de variable d’ajustement.

On ne peut effectivement pas inscrire dans la loi un nombre d’heures d’ouverture des guichets. Néanmoins, on peut inscrire un principe selon lequel il n’y aura pas de réduction des heures d’ouverture des guichets.

Cela ne doit pas faire l’objet d’un contrat, puisqu’il s’agit d’une obligation de service public. On aura beau avoir 36 000 points de contact,…

M. Nicolas About. 17 000 !

M. Pierre-Yves Collombat. … s’ils sont fermés, ça ne servira à rien du tout !

Arrêtez de nous enfumer avec ces points de contact ! (Protestations sur les travées de lUMP.)

Mme Isabelle Debré. Restez calme !

M. Pierre-Yves Collombat. Oui, c’est de l’enfumage perpétuel !

Les points de contact entre La Poste et ses usagers doivent être ouverts suffisamment souvent pour que chacun puisse s’y rendre.

Comme hier après mon intervention, M.  le ministre ne m’a pas répondu aujourd'hui – mais nous nous voyons tellement qu’il a dû être las de m’entendre et qu’il n’a pas eu envie de me répondre ! (Sourires.)

Je constate simplement que le rapporteur, le ministre et ceux qui voteront contre cet amendement ne veulent pas que le surcoût du service public assuré par La Poste soit financé de manière intégrale et pérenne. J’en prends note.

Jusqu’à présent, vous pouviez dire, lorsque nous protestions contre le changement de statut de La Poste : « Vous nous faites un procès d’intention, d’ailleurs le texte montrera notre véritable volonté ! »

Si vous êtes sincères, mettez donc en application vos prescriptions et engagez-vous à assurer de manière intégrale et pérenne les missions de service public de La Poste !

Si ce n’est pas le cas, tout ça est bidon ! (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.)

Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Claude Danglot, pour explication de vote.

M. Jean-Claude Danglot. Les missions de service public ont été arrêtées par la loi de régulation postale de 2005 en les réduisant à la notion de service universel. Nous avons déjà démontré la perversité de cette transformation qui réduit a minima le service rendu.

Vous souhaitez cette fois-ci les libéraliser un peu plus.

Par ailleurs, la tendance est au transfert sur les communes d’une partie du réseau. Aujourd’hui, plus de 3 600 agences postales communales sont à la charge des mairies.

M. Alain Fouché. Elles ne sont pas seulement à la charge des mairies, il y a des aides !

M. Jean-Claude Danglot. Ce chiffre ne fait qu’augmenter. Seuls 4 700 bureaux de plein exercice subsistent avec 7 300 bureaux de proximité.

L’éclatement en filiales, dont un certain nombre à statut privé, du groupe La Poste laisse à penser que l’unité du groupe et la complémentarité des services est toute relative. Leur mode de gestion séparée ne laisse la place à aucune péréquation possible.

Le risque de vente de ces filiales, comme on peut le constater dans de nombreux exemples étrangers, n’est pas exclu. La privatisation du groupe ainsi largement entamée pourrait permettre par acquisition – on l’a vu pour GDF – que la banque postale tombe dans les mains d’une banque privée. Ce scénario n’est pas impossible et vous n’y êtes pas hostile sur le fond.

En outre, la référence à la notion de mission de service public n’exclut en rien la privatisation du groupe. L’exemple calamiteux de France Télécom est là pour nous le rappeler : avec un État actionnaire minoritaire, le service universel a minima est assuré, mais seulement a minima, un service pour les pauvres, un service charitable.

Cela est bien éloigné de la notion de service public à la française à laquelle est attachée la grande majorité de nos concitoyens.

L’actualité récente ne peut que nous amener à réfléchir sur ce modèle désastreux pour les usagers comme pour le personnel.

La Poste, par son réseau fourni, même s’il s’étiole au fil des ans, reste un service public symbolique, fortement ancré dans la conscience des habitants. Quatre millions de personnes franchissent quotidiennement la porte d’un service postal.

La Poste, par sa présence ancienne sur le territoire représente pour les Français un modèle économique exemplaire pour son efficacité, le lien social créé au fil des ans, la qualité, la sécurité et la continuité du service, la confidentialité, la solidarité développée par son personnel et en particulier par les facteurs.

Cette capacité à s’adapter pour développer un service public postal de qualité est aujourd’hui largement compromise par ce projet de loi, qui oublie son histoire pour construire un modèle fondé sur un dogmatisme économique qui a fait la preuve de sa faillite partout où il s’est implanté.

Vous laissez à travers cet article et ses deux premiers alinéas la porte ouverte aux pires dérives, où les intérêts privés vont se substituer à l’intérêt général.

M. Roland Courteau. Très bien !

M. Jean-Claude Danglot. L’usager de La Poste n’est pas votre priorité. Votre seule mobile est l’appât du gain au profit d’une minorité de vos amis qui vont pouvoir s’approprier ce bien commun de la nation et de notre peuple.

M. Alain Fouché. C’est diffamatoire !

M. Jean-Claude Danglot. La spoliation de ce bien commun par une minorité d’actionnaires reste votre objectif !

Depuis que vous êtes arrivés au pouvoir en 2002, vous n’avez de cesse de détruire tout ce qui fait le lien de solidarité dans notre pays, la santé, l’éducation, l’énergie et aujourd’hui tout ce qui est du domaine de la communication. (Protestations sur les travées de lUMP.)

M. Roland Courteau. Exactement !

M. Jean-Claude Danglot. Voilà le véritable sens de l’idéologie que vous mettez en pratique dans tous vos actes politiques quotidiens. Ces méthodes sont inqualifiables !

Monsieur le ministre, vous caricaturez toujours notre demande de suppression des alinéas. Je vous rappelle la raison d’être de notre amendement visant à la suppression des alinéas 1 et 2 : nous considérons que les conditions dans lesquelles La Poste remplit ses missions de service public ne sont pas satisfaisantes.

Depuis le début des débats, vous nous parlez de statu quo. S’il y a bien un statu quo auquel vous êtes attaché, c’est celui de poursuivre, voire d’accélérer la politique actuelle de La Poste en matière de suppression d’emplois et de fermeture de bureaux de poste.

S’il y a des archaïques, ils sont bien de votre côté ! (Applaudissements sur les travées du groupe CRC-SPG.)

Mme la présidente. La parole est à M. le rapporteur.

M. Pierre Hérisson, rapporteur. Monsieur Collombat, la commission n’est pas opposée à votre amendement ; j’ai dit simplement que ce débat serait plus approprié à l’article 2 ter puisque nous ferons alors des propositions qui sont à la fois de nature à vous donner satisfaction et en conformité avec la directive européenne.

Mme la présidente. La parole est à Mme Marie-France Beaufils, pour explication de vote.

Mme Marie-France Beaufils. Je voudrais intervenir sur l’amendement n°  380.

Monsieur le ministre, quand on parle d’un nombre d’heures global par département négocié avec La Poste et les représentants de l’Association des maires de France, cela ne signifie pas une ouverture des guichets du lundi au samedi.

Le nombre global d’heures d’ouverture peut se répartir dans des horaires non compatibles avec la vie des habitants dans les communes concernées. Par exemple, dans certaines communes les guichets ont été fermés le mercredi, le jour où justement certaines familles peuvent s’y rendre !

L’amplitude des jours est importante dans les communes rurales pour tous ceux qui travaillent loin de chez eux. Or, le mercredi et le samedi sont, pour beaucoup, des jours de repos pendant lesquels ils peuvent plus facilement aller à La Poste.

Il existe une différence entre une masse globale d’heures et un nombre de jours d’ouverture dans la semaine. L’amendement n° 380 de M.  Bourquin n’a donc pas le même sens que votre proposition, monsieur le ministre.

Mme la présidente. La parole est à M. Alain Fouché, pour explication de vote.

M. Alain Fouché. M.  Bourquin a évoqué la commission de présence postale. Elle est ce qu’en font les élus.

Dans votre commission, monsieur Bourquin, vous interrogez les habitants pour connaître les plages horaires qui leur conviennent le mieux. Mais certaines commissions en France fonctionnent mal parce que les élus n’y sont pas assez présents. Si les élus s’y engagent fortement, la commission sera forte et La Poste sera bien obligée d’en tenir compte. La concertation avec les habitants pour connaître aux mieux les horaires souhaitables me paraît donc intéressante.

M. le ministre nous dit que des contrats fixant un certain nombre d’heures d’ouverture seront signés entre l'État et La Poste, sous le regard des représentants de l’Association des maires de France et en concertation avec la commission. En fait, le fonctionnement du dispositif reposera sur la volonté des uns et des autres.

Cette proposition me paraît satisfaisante, sécurisante et pratique, à condition que tout le monde y travaille.

Mme la présidente. La parole est à M. Yves Chastan, pour explication de vote.

M. Yves Chastan. Ne pourrait-on pas sous-amender l’amendement de M.  Bourquin en précisant que ces missions de service public sont nécessairement intégrées au contrat d’entreprise – je préférerais d’ailleurs le terme de « contrat de service public », qui était généralement employé ?

Ainsi, la formule que propose M. Bourquin serait inscrite dans la loi et le rôle du pouvoir réglementaire, qui est complémentaire, serait précisé.

Cette proposition me paraît de nature à rassembler les différentes positions, qui ne sont d’ailleurs pas si éloignées.

Mme la présidente. La parole est à Mme Nicole Borvo Cohen-Seat, pour explication de vote. (Marques d’agacement sur les travées de l’UMP.)

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. J’ai tout de même le droit de m’exprimer !

M. Jean-Pierre Fourcade. Un peu de décence, madame, le débat dure depuis déjà assez longtemps !

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Je souhaite juste souligner combien votre attitude, chers collègues de la majorité, est contradictoire.

À de multiples occasions, hier encore au moment de la discussion de l’amendement Retailleau soutenu par le Gouvernement, vous avez affirmé, en ne manquant d’ailleurs pas d’enfoncer le clou, votre volonté de voir La Poste rester un service public national. Ce à quoi nous vous avons répondu que, amendement Retailleau ou pas, il n’en serait rien !

Les amendements que nous sommes en train d’examiner, qui sont, bien évidemment, des amendements de repli puisque nous sommes résolument opposés au changement de statut, tendent justement à préciser dans la loi ce qu’est un service public national. Or – chose incroyable ! –, alors que vous affichez votre volonté de maintenir un service public national, vous en refusez tous les attributs !

Tout cela nous conforte dans l’idée que vous mentez à nos concitoyens. Dès lors que la libéralisation prônée par l’Union européenne entrera en vigueur, il ne fait aucun doute que vous vous empresserez de vider ce service public national de son contenu.

C’est la raison pour laquelle nous voterons l’ensemble de ces amendements ! (Applaudissements sur les travées du groupe CRC-SPG.)

M. Alain Fouché. Comment pouvez-vous être si sûre de vous alors que des engagements fermes ont été pris ? Vous lisez dans le marc de café ?

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Vous, peut-être, mais moi pas !

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 38.

(L’amendement n’est pas adopté.)

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 378.

(Après une épreuve à main levée déclarée douteuse par le bureau, le Sénat, par assis et levé, adopte l’amendement.) – (Marques de satisfaction sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.)

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 379.

(L’amendement est adopté.)

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 278.

(L’amendement est adopté.)

Mme la présidente. Monsieur Teston, l’amendement n° 380 est-il maintenu ?

M. Michel Teston. Madame la présidente, je ne peux que le maintenir puisque mon collègue Yves Chastan vient, à l’instant, d’exprimer le souhait de le sous-amender.

Mme la présidente. Monsieur Teston, plutôt que de proposer un sous-amendement, il aurait fallu rectifier l’amendement n° 380, mais, le vote sur celui-ci étant lancé, il est trop tard pour ce faire.

Je mets aux voix l’amendement n° 380.

(L’amendement est adopté.)

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 542.

(L’amendement est adopté.)

M. Jean Desessard. La preuve est faite que ce n’étaient pas des amendements d’obstruction !

Mme la présidente. L’amendement n° 369 rectifié, présenté par MM. Teston, Botrel, Bourquin, Chastan, Courteau, Daunis et Guillaume, Mmes Herviaux et Khiari, MM. Mirassou et Navarro, Mme Nicoux, MM. Patient, Patriat, Raoul, Raoult, Repentin, Collombat, Bérit-Débat, Berthou et Daudigny, Mme Bourzai, M. Rebsamen et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :

Après l’alinéa 2

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

Les réseaux postaux ont une dimension territoriale et sociale importante qui permet l’accès universel à des services locaux essentiels.

La parole est à M. Michel Teston.

M. Michel Teston. Cet amendement a pour objet de pallier l’absence d’une réflexion préalable à ce projet de loi sur le rôle des services publics, absence qui apparaît aujourd’hui comme une évidence.

Certes, il n’y a pas grand-chose à s’approprier dans la troisième directive postale 2008/6/CE, dont ce texte transpose certaines dispositions. Celle-ci a en tout cas le mérite de rappeler, dès le cinquième considérant de son exposé des motifs, que les « réseaux postaux ont une dimension territoriale et sociale importante qui permet l’accès universel à des services locaux essentiels ». C’est justement cette précision que nous proposons d’ajouter à l’article 2.

Toutes les grandes associations françaises d’élus locaux avaient estimé nécessaire, en juin 2007, à la veille de la première lecture de cette troisième directive au Parlement européen, de faire le rappel suivant : « Les services postaux, de par leur maillage territorial, constituent un service public essentiel pour la vitalité des territoires et un véritable vecteur de cohésion sociale ». Insistant sur le caractère impératif du maintien de ce service public « sur l’ensemble du territoire national, y compris dans les zones rurales éloignées et les quartiers urbains sensibles », elles avaient ajouté que le « rôle crucial des services postaux justifie de prendre le temps de mieux considérer les conséquences et les moyens de l’ouverture totale à la concurrence ».

Dans son rapport, adopté par la commission des transports et du tourisme du Parlement européen le 18 juin 2007, Markus Ferber estimait qu’il convenait de garantir que l’accès aux services postaux ne se détériore pas dans les régions rurales et périphériques et que la libéralisation ne mette pas en péril la cohésion territoriale. Les eurodéputés ont en effet considéré que le réseau postal rural, notamment dans les zones de montagne et les régions insulaires, jouait un rôle essentiel dès lors qu’il s’agissait d’intégrer les entreprises dans l’économie nationale et mondiale et de préserver la cohésion sociale, en particulier sur le plan de l’emploi.

Or l’ouverture totale à la concurrence du service postal menace la cohésion sociale et territoriale, même si elle est garantie dans le traité.

D’ailleurs, il y a quelque temps, notre collègue Hubert Haenel, dans un rapport sur les services d’intérêt général en Europe, redoutait que « les forces du marché » mettent en danger cette cohésion. La Commission européenne, occupée à élaborer la mise en concurrence totale des services postaux, n’a pas jugé bon, au préalable, d’évaluer les conséquences de cette libéralisation sur la cohésion sociale, économique et territoriale.

Regrettant vivement que le Gouvernement n’ait pas non plus procédé à une telle évaluation, nous nous opposons donc au principe même de ce projet de loi.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Pierre Hérisson, rapporteur. Monsieur Teston, cet amendement a déjà été présenté une première fois, avant l’article 1er. J’avais alors expliqué que nous aurions l’occasion d’en reparler au moment de l’examen de l’article 2 ; il avait été convenu de le rectifier dans ce but. C'est la raison pour laquelle il revient maintenant en discussion, et, sous réserve de connaître l’avis du Gouvernement, nous sommes prêts à y donner une suite favorable.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Michel Mercier, ministre. Monsieur Teston, si nous sommes probablement tous d’accord pour dire que les « réseaux postaux ont une dimension territoriale et sociale importante qui permet l’accès universel à des services locaux essentiels », je ne perçois pas bien le caractère normatif de cette disposition ni ce qu’elle imposerait.

D’après la définition donnée par Portalis, qui veille sur nous (M. le ministre désigne du doigt la statue de Portalis dominant l’hémicycle), « la loi ordonne, permet, ou interdit ». Et Portalis – n’est-ce pas, monsieur Collombat ? –, c’est le génie français ! (Sourires.)

Par conséquent, je suis défavorable à cet amendement.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 369 rectifié.

(L’amendement est adopté.)

Mme la présidente. Je suis saisie de seize amendements faisant l’objet d’une discussion commune.

L’amendement n° 206, présenté par M. Danglot, Mme Didier, M. Le Cam, Mmes Schurch, Terrade et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche, est ainsi libellé :

I. - Après l’alinéa 2

Insérer deux alinéas ainsi rédigés :

« À compter de la publication de la présente loi, un processus d’intégration au sein de La Poste de la filiale GeoPost est mis en œuvre.

« Cette intégration ne donne lieu au paiement d’aucun impôt, amende, salaire ou honoraire au profit de l’État, de ses agents ou de toute autre personne publique.

II. - Pour compenser la perte de recettes résultant du I ci-dessus, compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :

... - La perte de recettes résultant pour l’État du présent article est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.

La parole est à Mme Marie-France Beaufils.