M. le président. L'amendement n° I-185, présenté par Mme Henneron, est ainsi libellé :

I. - Après l'alinéa 8

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

« - destinés à être utilisés dans les conditions définies au 3° du 5 de l'article 266 quinquies B ;

II. -  Pour compenser la perte de recettes résultant du I ci-dessus, compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :

... - La perte de recettes résultant pour l'État du présent article est compensée, à due concurrence, par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.

La parole est à Mme Françoise Henneron.

Mme Françoise Henneron. Le projet de loi de finances pour 2010 prévoit l’instauration d’une taxe carbone sur l’ensemble des énergies fossiles. Cette taxation a pour objectif de créer un signal-prix sur le consommateur, afin de le décider à des changements de comportement et à des investissements pour réduire sa consommation.

L’application de cette taxe sur la consommation en charbon des foyers domestiques n’aura pas les effets escomptés. Les consommations de charbon pour le chauffage des habitations représentent environ 300 000 tonnes en France et sont très concentrées sur le Nord–Pas-de-Calais : de 60 % à 70 %. Ces consommations répondent aux besoins d’environ 120 000 foyers. Les tonnages de charbon à usage domestique se réduisent par ailleurs à un rythme de l’ordre de 15 % à 20 % l’an.

On réalise aisément que ce marché est voué à une disparition dans un avenir proche et qu’il serait donc vain de pénaliser davantage les consommateurs de charbon. De plus, le consommateur de charbon domestique est généralement âgé et dispose d’un revenu modeste, très modeste même. En effet, il s’agit pour l’essentiel de retraités des mines, ou de leur famille, ayant toujours connu ce mode de chauffage. Il apparaît illusoire d’attendre un effort financier de ce type de consommateur pour l’amélioration thermique de son habitat, plus préoccupé qu’il se trouve d’assurer ses besoins de première nécessité, dont le chauffage.

Le charbon est par ailleurs taxé au titre de la taxe intérieure de consommation sur le charbon. Toutefois, la consommation des particuliers en est exonérée. Cela s’explique par la faiblesse des volumes concernés. Il est ainsi proposé d’exonérer de la taxe carbone ces mêmes volumes de charbon.

Monsieur le président, je m’étonne et regrette qu’un certain nombre de collègues m’ayant assurée de leur soutien, allant jusqu’à cosigner cet amendement, ne figurent pas sur la liste des signataires.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. Chacun a pu se rendre compte, au travers des explications de Mme Françoise Henneron, que le sujet dont il s’agit est sensible et concerne une catégorie de population à laquelle beaucoup d’efforts sont demandés par ailleurs.

Toutefois, il est bon de rappeler que le charbon de ces ménages bénéficie actuellement d’une exonération totale de taxe intérieure de consommation sur les houilles, les lignites et les cokes.

Ces ménages bénéficieront du crédit d’impôt prévu par le présent projet de loi. J’ignore s’ils seront considérés comme ruraux ou urbains. C’est une question sur laquelle nous reviendrons. La limite entre les deux, qui est probablement arbitraire, est, si je ne me trompe, le périmètre de déplacement urbain. Mais quelqu’un qui habite dans un coron du Nord est-il dans un périmètre de déplacement urbain ? Selon le côté de la rue où il se trouve, il peut l’être ou non ! La différenciation entre les deux montants du crédit d’impôt n’est pas forcément de nature à répondre à toutes les situations rencontrées… Mais nous y reviendrons à l’occasion de l’examen d’autres amendements.

Enfin, on ne saurait omettre de rappeler, puisque le régime de la contribution carbone est un régime de défense de l’environnement, que les combustibles utilisés sont parmi les plus émetteurs de CO2. (Mme Françoise Henneron s’exclame.) Cela fait partie, dites-vous, ma chère collègue, des habitudes de vie, et la consommation diminuerait finalement assez rapidement d’année en année : 120 000 foyers dans le Nord–Pas-de-Calais consomment chaque année 300 000 tonnes de charbon, et ces quantités se réduiraient de 15 % à 20 % par an, avez-vous indiqué.

La question est peut-être de savoir quelles sont les aides disponibles pour inciter au moins une partie de cette population à transformer son mode d’alimentation de chauffage. La commission est donc embarrassée avec votre amendement.

M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. C’est pourquoi elle se retourne avec confiance vers le Gouvernement, qui va nous donner son avis.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Christine Lagarde, ministre. Madame Henneron, je comprends très bien le souci qui vous anime concernant la situation des populations auxquelles vous faites référence et qui ont l’habitude d’un chauffage au charbon. Pour elles, il s’agit presque d’une tradition de pays.

En même temps, je suis très gênée, car cela me rappelle un peu certains débats que nous avons eus, notamment avec nos collègues polonais. Se trouvant dans des situations homologues, ils ont compris assez rapidement qu’il fallait aussi donner un signal-prix pour un mode de chauffage particulièrement polluant.

Dans le cas présent, un certain nombre d’incitations fiscales pourraient être mises en faisceau, si j’ose dire : le crédit d’impôt dédié au développement durable, l’éco-prêt à taux zéro, la TVA à taux réduit sur les travaux, l’écosubvention de l’Agence nationale pour l’amélioration de l’habitat, l’ANAH, le prêt bonifié accordé aux HLM, le dégrèvement de taxe foncière sur les propriétés bâties. Il existe déjà toute une série d’exonérations, d’incitations.

Madame le sénateur, je vous propose donc de constituer un petit groupe interministériel entre le ministère de l’écologie, de l’énergie, du développement durable et de la mer, et mon ministère, groupe auquel vous participerez bien sûr. Cela nous permettrait à la fois de dresser la liste de ces incitations et de les rendre les plus accessibles possible, afin d’encourager ces populations à un changement de mode de chauffage. Dans ces conditions, je vous demande de retirer votre amendement.

M. le président. Madame Henneron, l’amendement n° I-185 est-il maintenu ?

Mme Françoise Henneron. Madame la ministre, vous me mettez dans l’embarras ! Il s’agit en effet d’une population à revenus très modestes. L’un n’empêchant pas l’autre, un groupe de réflexion peut être créé, et mon amendement adopté !

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° I-185.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. L'amendement n° I-440, présenté par MM. Revet, Bécot, Trillard, Bizet, Magras, Pointereau, Cléach, Merceron, Grignon, Nègre et César et Mme Henneron, est ainsi libellé :

I. - Après l'alinéa 9, insérer un alinéa ainsi rédigé :

« - destinés à être utilisés par des installations soumises volontairement au régime d'un projet relevant d'une méthodologie référencée conformément aux dispositions des articles 6 à 12 du protocole de Kyoto ;

II. - Pour compenser la perte de recettes résultant du I ci-dessus, compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :

... - La perte de recettes résultant pour l'État du présent article est compensée, à due concurrence, par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.

La parole est à M. Michel Magras.

M. Michel Magras. L’alinéa que je vous propose d’insérer à l’article 5 tend à prendre en considération la situation particulière des agents économiques s’engageant volontairement dans un processus de réduction de leurs émissions de gaz à effet de serre dans le cadre d’un mécanisme de projet domestique CO2 prévu aux articles 6 à 12 du protocole de Kyoto. La mise en place des projets domestiques CO2 s’appuie sur le principe de la mise en œuvre conjointe, mécanisme de projet prévu par le protocole de Kyoto.

Cette démarche innovante, lancée par la France et présentée lors de la dernière conférence des Nations-unies sur le climat à Nairobi en 2006, souligne notre détermination pour lutter concrètement contre le changement climatique grâce à des outils innovants et efficaces en facilitant l’agrégation de projets diffus. L’objectif des projets domestiques est de contribuer à la réduction des émissions de gaz à effet de serre sur le territoire national et de participer à l’engagement de notre pays quant à une diminution de nos émissions par quatre d’ici à 2050.

Cette démarche française innovante et volontariste doit donc être encouragée. Elle doit bénéficier, au même titre que les agents économiques relevant du système européen d’échanges de quotas de CO2 qui couvre moins de 30 % des émissions de gaz à effet de serre en France, d’une dispense de contribution carbone.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. Cet amendement traduit une intention louable visant à récompenser les efforts de réduction d’émissions de gaz à effet de serre entrepris par certains agents. Il semble toutefois paradoxal d’exonérer totalement de ces contributions des installations qui réduisent volontairement leurs émissions, puisque cette réduction entraîne déjà automatiquement une diminution de la contribution carbone. Supprimer totalement cette contribution serait même contre-productif puisque cela diminuerait l’incitation de l’opérateur à poursuivre son effort de réduction des émissions restantes.

Au bénéfice de ces observations, la commission sollicite le retrait de l’amendement.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Christine Lagarde, ministre. Monsieur le sénateur, le Gouvernement vous invite également, et pour les mêmes raisons, à retirer votre amendement.

M. le président. Monsieur Magras, l’amendement n°I-440 est-il maintenu ?

M. Michel Magras. Non, monsieur le président, je le retire.

M. le président. L’amendement n°I-440 est retiré

Je suis saisi de quatre amendements faisant l’objet d’une discussion commune.

L'amendement n° I-257, présenté par MM. Muller et Desessard et Mmes Blandin, Boumediene-Thiery et Voynet, est ainsi libellé :

Alinéa 14

Supprimer cet alinéa.

La parole est à M. Jacques Muller.

M. Jacques Muller. Le transport aérien est responsable de 3 % des émissions de gaz à effet de serre dans l’Union européenne. Or, ces émissions ont augmenté de 87 % entre 1990 et 2004, alors que des réductions sont observées dans d’autres secteurs.

En dépit du ralentissement dû à la crise actuelle, le transport aérien reste sur une courbe croissante. Il engendre la plus grande quantité de gaz à effet de serre par passager au kilomètre, ou par tonne au kilomètre lorsque l’on raisonne au niveau du fret. En moyenne, un individu, lorsqu’il est dans un avion, émet deux fois plus de gaz carbonique qu’en voiture, six fois plus qu’en train, en métro ou en bus. Pour les marchandises, le transport aérien produit six fois et demie plus de gaz carbonique qu’un camion, quatre-vingts fois plus qu’un train ou un bateau. Et ces éléments ne tiennent pas compte du bruit dont sont victimes les riverains des aéroports – les personnes luttant contre le projet d’aéroport de Notre-Dame-des-Landes ne me contrediront pas !

Ce transport émet aussi des oxydes d’azote – M. About en parlait tout à l’heure –, des particules et des vapeurs d’eau qui provoquent les traînées de condensation et la formation de Cirrus. Ces phénomènes ont un effet non négligeable sur le réchauffement climatique.

Au regard de ces constats, je vous propose de supprimer l’exonération de contribution carbone dans le transport aérien. Nous devons tout mettre en œuvre pour faire reculer la part du transport aérien dans notre pays. En tant qu’usager régulier du TGV, je sais que cela est possible. Les alternatives existent, et il faut les encourager par un meilleur signal-prix.

M. le président. L'amendement n° I-387, présenté par M. Beaumont, est ainsi libellé :

I. - Alinéa 14

Rédiger ainsi cet alinéa :

« - utilisés pour la navigation fluviale et maritime dans les eaux communautaires, y compris la pêche, les transports internationaux et intracommunautaires, à l'exclusion des bateaux de plaisance privés ; »

II. - Alinéa 3, tableau, huitième ligne

Rédiger ainsi cette ligne :

Gazole :

22

Hectolitre

1,13

III. - Pour compenser la perte de recettes résultant des I et II ci-dessus, compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :

... - La perte de recettes résultant pour l'État du présent article est compensée, à due concurrence, par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.

La parole est à M. René Beaumont.

M. René Beaumont. Tout à l’heure, le Sénat a adopté, sur l’initiative de M. le rapporteur général, l’amendement n° I-140 tendant à consentir au transport fluvial de marchandises une atténuation de taxe carbone égale à celle dont bénéficie le transport routier.

L’amendement n° I-387 vise à aller un peu plus loin, en poursuivant d’ailleurs le raisonnement de Mme la ministre s’agissant du transport routier. Il s’agit en effet de permettre aux pavillons fluviaux français de faire face à la concurrence des pavillons belges, hollandais ou allemands, lesquels ne sont pas soumis à une taxe carbone.

Si la contribution carbone a certes été déjà réduite, il reste cependant une part résiduelle qui ne peut être que discriminatoire par rapport aux transporteurs fluviaux étrangers : les gros porteurs qui traversent les mers iront non plus à Dunkerque ou au Havre, mais plutôt à Anvers ou à Rotterdam, où ils paieront le carburant beaucoup moins cher, d’où une baisse du prix du transport fluvial.

Je vous rappelle que, aujourd'hui, en France, plus de 35% des transports fluviaux sont déjà effectués par des compagnies étrangères. Si vous voulez que les choses continuent ainsi et que tous les Européens viennent naviguer sur nos fleuves avec du carburant détaxé acheté à l’étranger, il suffit de continuer ainsi !

Compte tenu du volume de carburant concerné, qui est relativement faible par rapport à celui du transport routier – c’est environ 100 fois moins –, un effort particulier pourrait être fait en faveur du transport fluvial, domaine qui n’a jamais été vraiment favorisé en France. Le Grenelle de l’environnement a décidé d’y remédier, mais ajouter aux paroles les actes serait encore mieux !

M. le président. L'amendement n° I-420, présenté par MM. Lambert et Garrec, est ainsi libellé :

I. - Alinéa 14

Rédiger ainsi cet alinéa :

« - utilisés pour les transports maritimes, autres qu'à bord de bateaux ou navires de plaisance privées ;

II. - Pour compenser la perte de recettes résultant du I ci-dessus, compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :

... - La perte de recettes résultant pour l'État du présent article est compensée, à due concurrence, par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.

La parole est à M. Alain Lambert.

M. Alain Lambert. Cet amendement tend à éviter que les transports maritimes nationaux n’entrent dans le dispositif de contribution carbone. Chacun s’accorde en effet à recommander que le cabotage maritime, mode moins polluant que d’autres à la tonne transportée, soit encouragé. Si les transports maritimes nationaux n’étaient pas exclus par le législateur du dispositif, les conséquences seraient les suivantes : une disqualification du mode maritime dans le report modal, un renchérissement du coût de la vie des îliens et une distorsion de concurrence supplémentaire avec les armateurs extérieurs et concurrents.

Enfin, madame la ministre, un dispositif international devrait, me semble-t-il, être mis en œuvre ; or, il ne me paraît pas sage d’empiler les dispositifs concernant ce type de transport.

M. le président. Le sous-amendement n° I-549 rectifié, présenté par M. Marc et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :

Amendement n° I-420

I. - Alinéa 3

Compléter cet alinéa par les mots :

; pour les transports nationaux assurant la continuité territoriale, l'exonération s'applique que ces transports soient gérés en régie directe ou qu'ils aient reçu délégation de service public maritime

II. - Compléter cet amendement par un alinéa ainsi rédigé :

La perte de recette pour l'État résultant de la non-application de la contribution carbone aux produits utilisés pour les transports nationaux assurant la continuité territoriale est compensée, à due concurrence, par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.

La parole est à M. Jean-Claude Frécon.

M. Jean-Claude Frécon. Monsieur le président, ce sous-amendement est identique au sous-amendement n° I-548 rectifié, à l’amendement n° I-179. Je les défendrai donc en même temps.

Ce sous-amendement de précision, déposé sur l’initiative de notre collègue François Marc, vise à remplacer les mots : « transports nationaux » par les mots : « transports nationaux assurant la continuité territoriale » – cela vise donc particulièrement les transports vers les îles –, que ces transports soient gérés en régie directe ou qu’ils aient reçu une délégation de service public maritime. L’objectif est que l’exonération prévue par les amendements nos  I-420 et I-179 s’applique aux transports maritimes visant à la continuité territoriale.

Prenons l’exemple du conseil général du Finistère : ce dernier participe déjà à hauteur de 3 millions d’euros en subvention d’équilibre au transport vers toutes les îles entourant la pointe de la Bretagne. Si ces transports étaient soumis à la contribution carbone, le conseil général devrait alors augmenter sa subvention !

M. le président. L'amendement n° I-179, présenté par MM. J.C. Gaudin et Gilles, Mlle Joissains et M. Revet, est ainsi libellé :

I. - Alinéa 14

Compléter cet alinéa par les mots :

, et pour les transports nationaux ayant reçu délégation de service public maritime

II. - Pour compenser la perte de recettes résultant du I ci-dessus, compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :

... - La perte de recettes résultant pour l'État du présent article est compensée, à due concurrence, par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.

Le sous-amendement n° I-548 rectifié, présenté par M. Marc et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :

Amendement n° I-179

I. - Alinéa 3

Rédiger ainsi cet alinéa :

«, et pour les transports nationaux assurant la continuité territoriale, que ces transports soient gérés en régie directe ou qu'ils aient reçu délégation de service public maritime.

II. - Compléter cet amendement par un alinéa ainsi rédigé :

La perte de recette pour l'État résultant de la non-application de la contribution carbone aux produits utilisés pour les transports nationaux assurant la continuité territoriale, est compensée, à due concurrence, par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.

L’amendement n° I-179 n’est pas soutenu, et le sous-amendement n° I-548 rectifié n’a donc plus d’objet.

Quel est l’avis de la commission ?

M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. L’amendement n° I-257 tend à supprimer l’exonération de contribution au profit du carburant utilisé par les aéronefs. Il y a sans doute une erreur de référence dans la mesure où, en l’état actuel de sa rédaction, il vise à supprimer l’exonération en faveur du transport maritime. L’avis de la commission ne peut donc pas être favorable.

L’amendement n° I-387 exonère de contribution les carburants utilisés par les transports maritimes et fluviaux nationaux ainsi que ceux qui sont utilisés pour la pêche. Il porte également à 1,13 euro par hectolitre, au lieu de 4,52 euros par hectolitre, le tarif de la contribution applicable au gazole. La aussi, un problème de coordination et de références tarifaires dans la rédaction de l’amendement se pose. Il s’agit probablement d’erreurs matérielles, mais elles empêchent la commission d’accompagner la démarche de M. René Beaumont. Je l’invite donc à retirer son amendement.

Cela étant, l’amendement n° I-387 est largement satisfait par l’amendement n° I-140 de la commission, qui a diminué le tarif de contribution carbone applicable au transport fluvial. En outre, je suggère à M. Beaumont de se rallier à l’amendement n° I-420 de nos collègues Alain Lambert et René Garrec, lesquels souhaitent exonérer de contribution carbone le transport maritime national. Vos intentions convergent, mes chers collègues, et, après le retrait de l’amendement n° I-387, il serait utile d’appuyer l’amendement n° I-420.

L’amendement I-420 étend aux transports maritimes nationaux l’exonération de contribution carbone dont bénéficie le transport maritime international et intra-communautaire. Je précise d’ailleurs que, d’un point de vue fiscal, les liaisons entre le continent et la Corse sont considérées comme des transports internationaux et qu’elles sont dès lors exonérées de la contribution carbone, ce qui ne va pas de soi pour la liaison entre La Tour-Fondue, à Hyères, et Porquerolles, ou la liaison vers l’Île-d’Yeu, qui suscitait récemment l’intérêt de notre collègue Bruno Retailleau.

J’ai bien écouté Alain Lambert et je l’ai trouvé convaincant, en particulier lorsqu’il a évoqué les distorsions de concurrence entre les armateurs nationaux et ceux qui opèrent sur tout le continent. La comparaison que j’ai faite entre les transports réguliers à destination de la Corse et les transports plus modestes vers des îles plus proches des côtes montre bien que quelque chose n’est pas tout à fait au point dans ce dispositif.

Sans doute, madame la ministre, allez-vous pouvoir répondre à ces préoccupations. En attendant, la commission comprend les intentions des auteurs de l’amendement et souhaiterait que les contradictions relevées puissent être éliminées.

Le sous-amendement n° I-549 rectifié vise à préciser que l’exonération de contribution s’applique aux transports gérés en régie directe ou ayant reçu délégation de service public. Je n’ai pas bien compris si l’exonération ne concernait que cette catégorie de transports.

M. Jean-Claude Frécon. Il s’agit des transports assurant la continuité territoriale vers les petites îles, notamment bretonnes !

M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. Je me demandais si l’exonération était limitée aux liaisons exercées dans le cadre d’un contrat avec une collectivité publique. Si tel n’est pas le cas, le sous-amendement n’est pas indispensable, l’amendement n° I-420 me semblant incontestablement englober ces liaisons.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Christine Lagarde, ministre. L’amendement n° I-257 vise à supprimer la disposition exonérant de la contribution carbone les produits énergétiques utilisés à bord des aéronefs, à l’exclusion des aéronefs privés.

Il a déjà été répondu à cette demande en faisant référence à la Convention de Chicago et à la directive européenne. Les mêmes arguments s’appliquant ici, le Gouvernement émet donc un avis défavorable.

Concernant l’amendement n° I-387, j’ai les mêmes réserves de forme que M. le rapporteur général. J’ai également une réserve de fond, que je développerai en donnant l’avis du Gouvernement sur l’amendement n° I-420. En tout cas, monsieur Beaumont, l’amendement de M. Lambert satisferait probablement pour l’essentiel le vôtre.

J’en viens maintenant à l’amendement n° I-420.

Si je comprends bien, monsieur Lambert, votre amendement vise à étendre l’exonération prévue pour les transports maritimes internationaux et intracommunautaires au carburant utilisé pour les opérations de cabotage. Chacun s’accorde à considérer que ces dernières ont beaucoup de vertus, notamment pour de courtes distances. Néanmoins, la contribution carbone que nous souhaitons instaurer ne doit pas être mitée par toute une série de dérogations. Nous voulons absolument que ce soit un signal-prix à destination du plus grand nombre en matière d’émissions de CO2.

Vous indiquez que le cabotage maritime est un moyen de transport écologiquement plus vertueux que les autres et que celui-ci s’inscrit parfaitement dans les objectifs du Grenelle de l’environnement.

Il nous semble que les atouts du transport maritime de courte distance sont déjà pris en compte par un dispositif fiscal favorable. Les produits énergétiques utilisés comme carburant ou combustible pour la navigation maritime bénéficient d’une exonération totale dans le cadre de la taxe intérieure sur les produits pétroliers. Vouloir ajouter une exonération de contribution carbone créerait une exonération dont la pertinence ne se justifie pas, même compte tenu du caractère environnementalement plus correct du transport maritime de type cabotage.

Notre volonté est non pas de sanctionner le transport maritime de proximité, en particulier le cabotage, mais d’éviter de créer des exonérations aujourd’hui pour le transport fluvial, au prétexte qu’il présente plus d’avantages que le transport routier, ou demain pour un autre secteur d’activité en raison de facteurs socio-économiques tels que, par exemple, des foyers qui continuent à se chauffer au charbon dans la région Nord.

Dans ces conditions, la contribution carbone, dont l’ambition est d’être générale et d’offrir un signal-prix à tout un chacun, deviendrait un morceau de dentelle, élégant certes, mais dont seraient exonérées les catégories ayant le mieux plaidé leur cause. (Mme Fabienne Keller acquiesce. – M. Alain Lambert sourit.)

Pour cette raison et malgré tout le respect que j’ai pour la qualité de votre amendement, le Gouvernement vous invite à le retirer. À défaut, il émettra un avis défavorable, ainsi que sur le sous-amendement n° I-549 rectifié.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° I-257.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Monsieur Beaumont, l’amendement n° I-387 est-il maintenu ?

M. René Beaumont. Je me trouve dans une situation un peu compliquée, puisque la commission me demande de me rallier à l’amendement n° I-420, dont le Gouvernement vient de demander le retrait. C’est sans issue !

Je veux bien accepter les arguments qui m’ont été opposés en ce qui concerne le transport fluvial ou le transport maritime pour l’exercice budgétaire à venir. Néanmoins, madame la ministre, ne serait-il pas possible de mettre l’année 2010 à profit pour étudier toutes les taxes qui touchent les transports fluvio-maritimes, maritimes et fluviaux européens ? Une véritable politique européenne en matière de carburants, non seulement pour la navigation commerciale mais également pour la navigation de plaisance, mettrait fin à cette concurrence sauvage et éviterait l’émiettement que vous redoutiez à l’instant.

Actuellement, les transports fluvio-maritimes, que je connais bien, sont très pénalisés par rapport à leurs concurrents européens. En lisant l’amendement n° I-420 de mon collègue Alain Lambert, on s’aperçoit que le cabotage maritime l’est aussi. Saisissons l’occasion de mettre un peu d’ordre et de faire disparaître les disparités notoires dans ce secteur.

En attendant, je retire mon amendement.