Mme Catherine Dumas. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'État, messieurs les rapporteurs, mes chers collègues, la sécurité est aujourd’hui l’une des préoccupations majeures des Français, qui considèrent à juste titre qu’il est du devoir de l’État de leur garantir ce droit fondamental et inaliénable.

Ce que constatent aujourd’hui nos concitoyens, c’est que les formes de délinquance et de criminalité s’accroissent et se diversifient sans cesse. Nos compatriotes sont désormais bien conscients qu’ils peuvent être, partout et à tout moment, confrontés à l’insécurité, que ce soit dans les lieux publics, sur la route, dans leurs loisirs, et même au sein de leur propre foyer, avec le développement des nouvelles technologies, quotidiennement utilisées par toute la famille.

Le texte du ministre de l’intérieur définit les grands axes de la politique de sécurité pour les années à venir et prévoit des réponses adaptées à ces nouvelles formes de délinquance.

Je souhaite insister sur plusieurs points qui m’apparaissent essentiels.

Tout d’abord – et vous savez, mes chers collègues, combien ces sujets me sont chers –, je me félicite des nouvelles dispositions du texte permettant de défendre la propriété intellectuelle, les marques prestigieuses et l’excellence française. Le renforcement des sanctions encourues pour l’importation et la vente de produits contrefaits et l’extension de ce dispositif à la contrefaçon de marques via Internet vont assurément dans le bon sens.

Le Web est, et doit rester, un espace de liberté. Mais il ne doit pas être un espace de non-droit, et l’article 3, qui fait de l’utilisation d’Internet une circonstance aggravante de ces trafics, doit permettre de dissuader efficacement la diffusion des produits contrefaits. Nos métiers d’art et du luxe français, qui sont l’un des fleurons de notre économie, sont menacés par la copie : ils ont véritablement besoin de ces mesures de protection.

De même, j’approuve totalement les dispositions tendant à élever la vente à la sauvette au rang de délit, et celles qui répriment l’exploitation en réseau de ces pratiques frauduleuses. Je préside l’Amicale parlementaire des foires, salons, congrès de France. Les professionnels du secteur ont attiré mon attention sur ces ventes à la sauvette, phénomène malheureusement en plein essor.

Perpétré par de véritables bandes organisées, ce trafic entraîne des conséquences économiques et sociales importantes dans la mesure où il nuit à l’image de qualité attachée à ces manifestations dans toute la France, et en particulier à Paris.

Il était donc urgent, pour préserver le dynamisme, le prestige et l’attractivité de la capitale, de lutter fermement contre ces pratiques, qui pénalisent tant les usagers que les professionnels du secteur. Je soutiens pleinement ces dispositions introduites à l’Assemblée nationale par mon collègue député Philippe Goujon et qui font écho à la proposition de loi de notre collègue Jacqueline Panis.

L’élue de Paris que je suis ne peut également que soutenir l’élargissement des compétences dont dispose le préfet de police en matière de coordination des forces de sécurité intérieure au sein de l’agglomération parisienne.

L’article 32 bis A complète en effet utilement la loi du 2 mars 2010, en confiant désormais au préfet de police de Paris la coordination de l’ensemble des dispositifs de sécurité dans les départements de la Petite couronne. Cette nouvelle organisation est assurément une bonne mesure, qui devrait réjouir mes collègues siégeant au Conseil de Paris, lesquels attendent une meilleure présence des forces de police sur le terrain ; je pense ici à Patrick Trémège, dans le xiiiarrondissement, et au maire du vie arrondissement, Jean-Pierre Lecoq, qui espère l’implantation prochaine d’un hôtel de police. Quant au maire du viiie arrondissement, François Lebel, il souhaite plus de visibilité de la police sur les grandes artères touristiques comme les Champs-Élysées, afin de dissuader les vagabonds et mendiants qui envahissent littéralement les lieux jour et nuit.

M. Jean-Patrick Courtois, rapporteur. C’est vrai !

Mme Catherine Dumas. Ce partenariat renforcé avec la préfecture de police est également un atout pour la mise en œuvre efficace des contrats locaux de sécurité. Il doit en outre permettre de répondre à l’inquiétude de Jean-Jacques Giannesini, conseiller de Paris du xixarrondissement, face au retour des trafics de drogues et des réseaux de prostitution dans les cités sensibles de l’est parisien.

Qu’il me soit d’ailleurs permis de féliciter ici le préfet de police de Paris, Michel Gaudin, qui vient récemment d’étendre l’action du service d’exécution des décisions de justice de la police judiciaire aux départements des Hauts-de-Seine, de la Seine-Saint-Denis et du Val-de-Marne. Voilà une bonne illustration du type de progrès qui vont être permis, grâce à ce texte, dans la lutte contre les réseaux de délinquants en Île-de-France.

Monsieur le secrétaire d'État, les délinquants d’aujourd’hui considèrent la police comme une bande adverse. Ils le disent et le montrent, n’hésitant pas à « caillasser » les véhicules, voire, maintenant, à tirer à l’arme à feu. C’est proprement scandaleux !

C’est la raison pour laquelle j’approuve les mesures que vous proposez pour renforcer les peines à l’encontre de ceux qui attentent à la vie des policiers, des gendarmes ou des policiers municipaux.

C’est aussi pourquoi nous avons eu raison de voter la loi du 2 mars 2010 permettant de réprimer avec sévérité le phénomène des bandes violentes.

Il fallait adapter nos moyens juridiques : je souhaite que nous continuions en ce sens. Pour ce faire, vous avez mis au point un plan « anti-bandes ». Ce plan est ciblé, et il permet déjà de mieux connaître la réalité du phénomène.

D’abord, on constate que quelques milliers d’individus – 5 000 environ – perturbent la vie de millions d’autres. Et parmi eux, beaucoup de mineurs, environ 40 %.

Cette situation justifie, d’une part, que nous votions un couvre-feu pour les mineurs, afin de protéger les jeunes dans les secteurs où l’influence des bandes est encore forte et, d’autre part, que nous ne baissions pas la garde mais que nous agissions pour éviter qu’une minorité de dangereux délinquants ne fasse la loi dans les quartiers.

J’approuve également les mesures permettant de lutter contre toutes les formes de délinquance violente et collective, notamment à l’occasion des manifestations sportives.

Monsieur le secrétaire d'État, il y a encore quelques mois, la violence gangrenait nos stades de football. De nombreux élus, comme mon collègue Claude Goasguen, député-maire du xvie arrondissement, dénoncent depuis plusieurs années les dérives malheureuses qui entourent certains matchs et la sortie des concerts événementiels.

Le début de la saison 2010-2011 montre que les mesures que vous avez mises en place ont un véritable effet dissuasif. La Ligue française de football et les clubs jouent le jeu. Vous avez créé une division nationale de lutte contre le hooliganisme et expérimenté diverses réponses juridiques et opérationnelles. Notre commission des lois a introduit dans la LOPPSI un certain nombre de mesures très utiles : l’interdiction pour les supporters turbulents de se déplacer pour assister à certains matchs à risque et l’information des clubs sur les mesures d’interdiction de stade prononcées.

Vous nous proposez d’ajouter un couvre-feu au moment des matchs à risque. Ces mesures administratives, qui me semblent nécessaires, s’ajoutent à celles qui existent, comme les interdictions administratives ou judiciaires de stade. Nous devons donc poursuivre.

Comme dans d’autres domaines, votre politique est lisible, concrète et efficace.

Enfin, j’ai souhaité prendre une initiative afin que soient poursuivis et condamnés les délinquants qui utilisent des faisceaux laser de forte puissance pour déclencher des incendies ou commettre des car-jackings, ainsi que ceux qui les utilisent aux abords des aéroports pour aveugler les pilotes d’avion en phase d’atterrissage.

M. Jean-Patrick Courtois, rapporteur. Très bien !

Mme Catherine Dumas. L’actualité récente et l’arrestation, la semaine dernière, de l’un de ces délinquants aux abords d’Orly montrent qu’il y avait urgence à agir. On a en effet recensé près de 600 plaintes de pilotes de ligne depuis le début de la seule année 2010 ! Ces agissements sont éminemment dangereux et intolérables !

M. Jean-Patrick Courtois, rapporteur. Bien sûr !

Mme Catherine Dumas. Je proposerai donc à la Haute Assemblée un amendement visant à créer, dans le code pénal, une infraction réprimant ces délits.

En définitive, monsieur le secrétaire d'État, le texte permet d’adapter efficacement notre arsenal de lutte contre les nouvelles formes de délinquance et de criminalité, en appuyant utilement la politique volontariste du Gouvernement et en répondant aux aspirations légitimes de nos concitoyens. Je lui apporterai donc tout mon soutien. (Applaudissements sur les travées de lUMP.)

M. le président. La parole est à M. Charles Gautier.

M. Charles Gautier. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, huit ans après la LOPSI 1, voici enfin venue cette loi, qui devrait prendre le relais en présentant, pour les années à venir, l’orientation et la programmation pour la sécurité intérieure. Je dis bien « qui devrait », car, en fait, sous la dictature des événements, vous avez fait de ce texte une addition de dispositions hétéroclites et de toutes les idées à la mode pour remédier, soi-disant, aux travers quotidiens de notre société.

Or une addition de mesures de circonstance ne fait pas une stratégie. La seule véritable programmation annoncée est la poursuite de la baisse constante des effectifs au titre de la révision générale des politiques publiques, avec le recrutement d’un seul agent pour le départ à la retraite de deux fonctionnaires.

Avec ses quarante-huit articles, le projet de loi se présente donc comme un bric-à-brac de mesures d’importance différente et, comme dans tous les vide-greniers, on peut trouver de tout, parfois même ce qui peut être utile…

Le monde ayant beaucoup changé et les technologies apportant aujourd’hui des facilités et des innovations quasiment illimitées qui font fi de tous les impératifs moraux et du respect d’autrui, il était de bon sens d’apporter des inflexions aux mesures de parade pour la protection des personnes, des mineurs en particulier, et de la société en général.

C’est pourquoi nous n’entraverons pas la mise en œuvre de certaines prérogatives en matière de lutte contre la cybercriminalité, la pédopornographie et la contrefaçon. Toutefois, nous serons extrêmement vigilants afin que ces mesures ne débordent pas de leur champ d’action et ne débouchent un jour sur des dérives possibles. Il convient donc de bien délimiter toutes ces mesures et de les encadrer précisément.

En revanche, il y a d’autres domaines pour lesquels les mesures prévues dans le texte nous semblent beaucoup plus discutables.

Il en est ainsi de votre manie de généraliser la vidéosurveillance. L’outil même et sa technologie ne sont pas ici en cause. Le rapport d’information que j’ai cosigné avec M. le rapporteur reste tout à fait d’actualité mais, s’il souligne que la vidéo est un outil envisageable, voire utile, il n’en fait pas la solution miracle que vous semblez préconiser.

Ce choix du néologisme de « vidéoprotection » en est d’ailleurs un signe. Quel besoin de changer le vocabulaire, sinon pour céder à la pression du marketing politique ?

M. Charles Gautier. La « protection » se vendrait mieux que la « surveillance » ! Je vous rappelle que les plus réticents s’appuient justement sur la revendication d’une présence humaine accrue, donc d’une surveillance…

Vouloir changer les mots pour une même signification, c’est montrer un manque de confiance dans ce que vous énoncez. Vidéosurveillance et vidéoprotection ne sont qu’une seule et même chose ! Ni l’une ni l’autre ne sont d’ailleurs dans le dictionnaire. Un seul mot existe : la vidéo, et c’est bien de cela qu’il s’agit.

Monsieur le rapporteur, vous avez rompu l’équilibre droite-gauche qui ressortait du rapport parlementaire auquel je viens de faire allusion.

Alors que nous affichions, dans la recommandation n°1, celle que nous avions jugée ensemble comme étant la plus importante, la volonté de réunir sous une seule autorité, celle de la CNIL, les compétences d’autorisation et de contrôle, vous vous en détournez aujourd’hui, laissant au seul préfet le pouvoir d’autoriser, après avis de la commission départementale, l’installation de tout nouveau système.

Par cette proposition, vous dénaturez complètement notre « production commune », pourtant approuvée à l’unanimité par la commission des lois de notre assemblée.

Concernant la vidéo, je dois ajouter, monsieur le secrétaire d'État, qu’il y a souvent désaccord entre nous quant au mode de financement de l’investissement.

Selon moi, celui qui décide, paie ! Si vous souhaitez développer ce dispositif, il est alors normal que vous le preniez en charge, et pas seulement en « confisquant » le Fonds interministériel pour la prévention de la délinquance, qui a précisément dans ce domaine bien d’autres choses à financer !

Mais, mes chers collègues, il y a plus grave à mes yeux ! Tout le volet relatif aux fichiers ne manque pas de nous inquiéter. Nous allons devenir les champions hors catégorie d’un « flicage » qui tend à se généraliser. Les fichiers se multiplient constamment. Le Conseil constitutionnel a même dû s’en mêler à propos du fichier Edvige. Le champ des personnes concernées ne cesse de s’étendre. Les connections inter-fichiers sont en route. S’il y a un domaine dans lequel les libertés publiques sont menacées, c’est bien celui-là !

Puisque vous aimez les néologismes, monsieur le secrétaire d'État, alors, oui, nous pouvons parler de la mise en place d’un système de « fichéo-surveillance ». Mais nous ne vous suivrons pas sur ce chemin-là.

Mes chers collègues, de nombreuses autres mesures proposées dans ce texte soulèvent dans l’opinion des réactions diverses tant l’objet qu’elles visent ou les circonstances qui les ont inspirées suscitent chez beaucoup de nos concitoyens critiques et interrogations.

Que dire, par exemple, des couvre-feux pour mineurs, des confiscations automatiques de véhicules, des captages à distance des données informatiques ? Nous serons amenés à en reparler au cours des prochains jours, et vous savez bien qu’il y aura un blocage.

Mais, comme souvent, il y a le texte et le contexte. Du texte, je viens de parler ; du contexte, je dirai deux mots.

Rarement un texte sera venu ici en débat précédé d’autant de mois de polémiques.

Tout l’été a été émaillé de propos émanant des uns et des autres, mais surtout du Président de la République, des propos de nature à monter les unes contre les autres des communautés entières.

La stigmatisation des gens du voyage et des Roms a été le parachèvement d’une méthode tendant à masquer l’échec d’une politique suivie uniformément depuis longtemps.

M. Sarkozy, premier flic de France depuis près de dix ans, ne sait pas tirer les leçons de l’échec de son action. Alors, il désigne des coupables. Le fait que, depuis 2002, ce soit, selon le mode de comptage retenu, le dix-septième ou le vingt-quatrième texte sécuritaire est bien la preuve de l’inefficacité de cette politique constante.

Et que dire des propos de M. Estrosi qui, suivant sans doute en cela la même méthode, étend cette fois la stigmatisation aux maires, qu’il rend coupables de ne pas agir dans un domaine qui relève pourtant de la compétence régalienne de l’État ?

De telles attaques sont inadmissibles, mais constituent aussi une offense à la République, car elles émanent d’un homme à la fois maire et ministre : maire, il sait que les élus relèvent de leurs électeurs ; ministre, il s’immisce dans un domaine qui n’est pas le sien.

Je comptais sur la présence de M. le ministre de l’intérieur ce soir.

M. Jean-Luc Fichet. Il regarde le football !

M. Jean-Pierre Sueur. Il regarde le match !

M. Charles Gautier. Je pense qu’il aurait pu commenter très heureusement l’initiative de son collègue.

Par ces propos, c’est toute la politique de la ville qui est visée. Nous le savons pourtant, les problèmes se posent de façon extrêmement diversifiée d’une ville à l’autre, selon l’histoire de leur population et de leur urbanisme. Alors, donner ainsi des leçons est tout à fait inacceptable !

À moins qu’il ne s’agisse tout simplement d’un acte de candidature. Mais je pense que, par ces propos, M. Estrosi s’est tout à fait disqualifié. Il devrait tirer les leçons d’une telle bévue et démissionner du Gouvernement de la République, au sein duquel il vient de perdre toute crédibilité.

Il est vrai que ce gouvernement est déjà démissionné par le Président de la République en personne…

C’est donc dans le contexte d’une grave crise de régime et de société que ce débat sur la LOPPSI 2 s’instaure. Alors, ne soyez pas étonnés, monsieur le secrétaire d’État, chers collègues, que cette toile de fond, tissée par le Gouvernement lui-même, soit omniprésente tout au long de ces journées. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)

M. le président. La parole est à M. Louis Nègre.

M. Louis Nègre. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, le projet de loi d’orientation et de programmation pour la performance de la sécurité intérieure, dite LOPPSI 2, s’inscrit dans la démarche gouvernementale initiée par la loi du 29 août 2002 dite LOPSI 1, arrivée à échéance à la fin de 2007.

Cette dernière loi, n’en déplaise à certains esprits chagrins, a produit des résultats incontestables.

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Bravo ! (Sourires.)

M. Louis Nègre. L’application de la LOPSI 1 a conduit, entre 2002 et 2008, à une diminution sensible, de 14 %, des faits de délinquance, et le taux d’élucidation, qui témoigne de l’efficacité des services, est passé de 25 % à plus de 37 % !

M. Louis Nègre. Ces succès ont inversé le cours catastrophique des événements de la décennie précédente et confirment qu’il n’y a pas de fatalité, y compris s’agissant de délinquance, quand la détermination du politique est totale ! (Rires et exclamations ironiques sur les travées du groupe CRC-SPG et du groupe socialiste.)

Pour autant, malgré la qualité des résultats obtenus, et si les atteintes aux biens ont diminué de 27 % depuis 2002, les violences contre les personnes, quant à elles, ont malheureusement continué à progresser.

Ce projet de loi d’orientation vient donc à point nommé ! Contrairement à la LOPSI 1, qui était fondée sur une problématique de moyens, le texte qui nous est proposé aujourd’hui met l’accent sur une nouvelle logique, particulièrement ambitieuse, à savoir une logique de performance, le tout dans un environnement budgétaire et financier contraint, ce qui constitue un double défi pour les pouvoirs publics !

Face à une délinquance qui évolue constamment, le Gouvernement agit, et, monsieur le secrétaire d’État, votre démarche volontariste ne peut qu’être approuvée et soutenue, car nos concitoyens attendent des gestes forts dans ce domaine.

En ce sens, je me félicite de l’augmentation des crédits qui, mieux que tout autre critère, souligne la volonté gouvernementale d’agir concrètement.

Les actions prévues dans le projet de loi en faveur d’une meilleure coordination entre les acteurs de la sécurité, la création d’une police d’agglomération, la lutte contre les violences aux personnes, qui constitue le dossier le plus sensible à l’heure actuelle, la lutte contre l’insécurité routière, l’utilisation des nouvelles technologies, le développement d’une police scientifique et technique de masse ou de la vidéoprotection, dispositif dont l’efficacité n’échappe plus à personne, et, enfin, les mesures contre les mineurs délinquants, tout cela constitue un dispositif complet adapté aux évolutions de la délinquance actuelle.

Ces orientations, comme la volonté réaffirmée du Président de la République de traquer la délinquance sous toutes ses formes, répondent à l’attente de nos concitoyens qui, contrairement au politiquement correct de certains milieux bien-pensants,…

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Mais où sont-ils, ces « milieux bien-pensants » ?

M. Louis Nègre. … attendent que nous combattions sans relâche les dérives criminelles qui affectent le bon fonctionnement de notre société.

À cet égard, je m’inscris en faux contre certains propos défaitistes ou pessimistes entendus dans cette enceinte.

Je peux porter témoignage, en tant que maire, qu’une excellente coordination entre la police nationale et la police municipale, le recours à la vidéoprotection, l’établissement de conventions spécifiques avec le parquet et le conseil général, comme l’application intégrale de la loi du 5 mars 2007 ou le couvre-feu des mineurs, ont conduit, au cours des huit derniers mois, à une baisse de 20 % de la délinquance de proximité dans ma commune.

Tels sont les résultats, sur le terrain, d’une politique que nous défendons.

Je terminerai cependant, après cette large approbation, en vous proposant, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, de renforcer encore la recherche de la performance souhaitée par la LOPPSI 2, et ce sur deux points.

Le premier point concerne une difficulté récurrente qui ne concerne pas uniquement le sénateur-maire de Cagnes-sur-Mer !

Bien que les maires aient pour mission de « réprimer les atteintes à la tranquillité publique […] et les rassemblements nocturnes qui troublent le repos des habitants », concrètement, monsieur le secrétaire d’État – je dis bien « concrètement » –, les textes actuels ne permettent ni aux maires, ni aux préfets, de faire cesser les graves troubles à la tranquillité publique dont sont victimes les riverains de certaines activités commerciales, notamment les épiceries de nuit.

M. Louis Nègre. Je demande donc, monsieur le secrétaire d’État – et c’est tout le sens de l’amendement n° 14 – que la législation en la matière évolue, avec votre aide, pour nous donner enfin les moyens d’intervenir efficacement.

Le second point que je veux évoquer concerne la police municipale.

Il est quelque peu surprenant, surtout quand on se donne comme objectif public une meilleure coordination des forces de sécurité, qu’il ait fallu une initiative, au demeurant bienvenue, du rapporteur à l’Assemblée nationale, Éric Ciotti, pour qu’apparaisse un chapitre concernant la police municipale, le chapitre VII bis.

Le ministre, en évoquant la police municipale, qui compte 18 000 agents, l’a qualifiée de « troisième force de sécurité intérieure ». Le Président de la République, Nicolas Sarkozy, le 26 mai dernier, a lui aussi parlé de la police municipale en tant que troisième force de police de notre pays, ajoutant que la police municipale constitue, « au plus près du terrain, le premier rempart de notre sécurité et de nos libertés ».

Dans ces conditions, je me félicite que la commission des lois du Sénat, sous l’égide de son président, Jean Jacques Hyest, et de notre excellent collègue rapporteur, Jean-Patrick Courtois, ait validé les avancées proposées par l’Assemblée nationale.

Je suis très heureux de pouvoir compléter ce texte en proposant que soit créée une médaille d’honneur pour la police municipale, que la tenue des agents des communes chargés de la surveillance sur la voie publique soit définie par un décret en Conseil d’État et, surtout, que les directeurs de police municipale puissent bénéficier de la qualité d’agent de police judiciaire, ou APJ.

Ces avancées sont incontestables et bienvenues.

Néanmoins, monsieur le secrétaire d’État, toujours animé de cette volonté de donner encore plus d’efficacité à l’action publique, je souhaiterais que la qualité d’APJ soit également accordée aux policiers municipaux, aujourd’hui simples agents de police judiciaire adjoints, ou APJA, c’est-à-dire que nous allions au-delà du texte en discussion, l’article 32 ter en l’état ne concernant de fait qu’une poignée de directeurs sur des dizaines de milliers d’agents.

Je le précise, et j’y insiste, monsieur le secrétaire d’État, cette qualité d’APJ serait uniquement accordée aux agents dans leurs domaines de compétence actuels, soit le code de la route, le règlement sanitaire départemental, etc.

Il s’agit donc, dans notre démarche, non pas de « doublonner » le travail des policiers nationaux, mais, bien au contraire, de soulager dans ces seuls domaines la police nationale et donc de faire œuvre de parfaite complémentarité pour obtenir une plus grande efficacité sur le terrain, préoccupation qui, en tant que maire, m’intéresse au plus haut point.

Par ailleurs, dans un même esprit d’efficacité, il serait éminemment souhaitable que les policiers municipaux – je le précise à nouveau, uniquement pour les procédures dans lesquelles ils sont habilités – soient autorisés à consulter directement les bases de données informatisées concernant notamment l’identification des véhicules ou, autre exemple, le fichier des véhicules volés.

Enfin, toujours dans l’idée de parfaire l’efficacité de la troisième force de sécurité de ce pays, j’avais proposé un amendement tendant à créer une école nationale supérieure de la police municipale, à l’instar de ce qui prévaut pour les autres corps de sécurité – police, gendarmerie, sapeurs-pompiers –, qui disposent tous d’écoles supérieures destinées à la formation de leurs cadres.

La commission des finances, en application de l’article 40 de la Constitution, a déclaré cet amendement irrecevable. J’en prends acte, mais, monsieur le secrétaire d’État, je reviens à la charge : je souhaiterais que cette proposition retienne toute votre attention et fasse l’objet d’un suivi particulier.

En conclusion, je voterai bien entendu votre texte, monsieur le secrétaire d’État,…

M. Jean-François Voguet. Ah bon ? (Sourires.)

M. Louis Nègre. … et je termine en félicitant le Gouvernement pour l’action volontariste et courageuse qu’il mène afin de maintenir au mieux la sécurité dans notre pays et la tranquillité de nos concitoyens dans une France juste, sereine et apaisée. (Très bien ! et applaudissements sur les travées de lUMP.- Rires sur les travées du groupe CRC-SPG et du groupe socialiste.)

M. le président. La parole est à Mme Virginie Klès.

Mme Virginie Klès. Monsieur secrétaire d’État, errare humanum est, perseverare diabolicum…

Pourquoi, au nom de quel dogme, en raison de quel étrange aveuglement ou animé de quelles certitudes votre Gouvernement persiste-t-il sur ce chemin où il va toujours plus vite, toujours plus fort, alors que, manifestement, il ne conduit nulle part ?

Pourquoi n’écoutez-vous pas ? Pourquoi ne faites-vous pas différemment, mieux, plus efficacement, en tentant d’entendre nos critiques et nos objections qui, pourtant, dans ce domaine de la sécurité, se veulent forcément constructives ?

Enfin, monsieur le secrétaire d’État, quel maire, quel élu souhaite l’insécurité pour sa ville et pour ses concitoyens ?

M. Roland Courteau. Évidemment !

Mme Virginie Klès. Quel maire, quel élu n’a pas envie d’amener plus de sécurité et moins de délinquance chez lui, contrairement aux affirmations de certain ministre ?

Oui, évidemment, il est inadmissible d’entendre insultés, de voir volés, agressés, tués notamment les représentants des forces de l’ordre, notamment les représentants des forces de sécurité, notamment les représentants de l’autorité.

Oui, bien évidemment, chacun d’entre nous a droit à la sécurité et à la tranquillité.

Mais il est tout aussi inadmissible et inacceptable de perdre un frère, un mari, ou un père, qui se suicide en prison, là où il s’est retrouvé condamné à purger une peine ferme pour non-port réitéré de ceinture de sécurité, grâce à vos peines planchers !

Alors, oui, enfin, les dirigeants, les politiques, ont un devoir particulier d’humilité et ont le devoir de faire le constat d’échec quand le constat d’échec est nécessaire à faire.

Dix-sept textes plus tard, que sont les chiffres de la délinquance ? Ô mon Dieu, que j’aimerais m’en réjouir, moi aussi, des chiffres de la délinquance, que j’aimerais pouvoir reprendre à mon compte le « Oui, la délinquance a baissé », que claironne votre gouvernement !

J’ai pourtant malheureusement l’impression que tout ce dont on peut se réjouir, c’est du retraitement statistique d’un certain nombre de chiffres.

M. Roland Courteau. Très bien !

Mme Virginie Klès. Ah, le formulaire 4001 ! Oui, le formulaire 4001 ! Et la rubrique 108, dans le formulaire 4001 ? Personne ne nous dit comment sont comptabilisés les faits de délinquance. Un portefeuille volé ? Non, monsieur, non, madame, il n’est pas volé, il est perdu : on n’a pas trouvé l’auteur des faits ; il n’est donc pas démontré que le portefeuille a été volé. C’est alors enregistré dans la rubrique 108, celle des pertes. Ce n’est donc pas une infraction, ce n’est pas un délit, cela ne figure pas dans les faits constatés !

Un même auteur qui a volé dix fois, cela fait dix faits constatés, dix faits élucidés, quand il est retrouvé ; mais un seul délit est inscrit dans le formulaire 4001 !

Voilà comment on traite les statistiques ! Voilà comment on traite les chiffres ! Alors, on peut se réjouir d’une baisse de la délinquance, dans de telles conditions…

Mme Virginie Klès. Personnellement, j’ai beaucoup de mal à m’en réjouir.

Je pense que les résultats seraient totalement différents si vous nous présentiez enfin des données statistiques homogènes dans le temps.

Comment, d’ailleurs, en serait-il autrement ? La délinquance ne peut qu’augmenter, puisque vous consacrez votre temps et votre énergie à diminuer les effectifs de la police et de la gendarmerie.

M. Roland Courteau. Très bien !