M. Martial Bourquin. Tout à l’heure, Mme le secrétaire d’État nous a dit que le Gouvernement gardait la possibilité de dire non, cela sur toutes les décisions. Pourquoi ne garde-t-elle pas la décision complète ? Pourquoi la donne-t-elle à une commission pour pouvoir lui dire non si les choses ne conviennent pas ?

Je veux donner un exemple. J’ai là une lettre émanant d’un groupe de travail qui comprend des industriels de l’aluminium et des membres de la société civile. Dans cette lettre, ils nous disent que deux points sont essentiels pour eux. Le premier, c’est le prix de l’électricité : il faut de l’électricité pas chère pour que cette industrie reste dans notre pays. Le second, c’est la taille des entreprises : plus elle est importante, plus les frais fixes baissent.

Sur de tels problèmes, lorsque des sites industriels comme celui de la Maurienne sont concernés, le Gouvernement ne peut pas déléguer ses responsabilités à la CRE. C’est à lui de réunir les producteurs d’aluminium et de silicium, qui, selon leurs propres dires, seront contraints à la délocalisation en cas de tarifs trop élevés, pour savoir jusqu’où il est possible d’aller afin d’éviter pareille issue. Dans cette négociation « grandeur nature », le Gouvernement a la main pour décider d’une politique qui permette aux entreprises, notamment aux industries électro-intensives, de rester chez nous.

Que se passera-t-il si ces sites sont délocalisés en Chine ? Je le disais hier, l’aluminium y sera produit à partir du charbon et sera donc vingt-deux fois plus polluant. En termes d’empreinte carbone, ce serait catastrophique !

Par ailleurs, toutes ces entreprises emploient des centaines de personnes, soit autant d’emplois à préserver sur le territoire national. Il en va, notamment, de l’avenir de la vallée de la Maurienne.

Par conséquent, madame la secrétaire d’État, vous ne pouvez pas laisser une telle responsabilité à une commission. Vous ne pouvez pas simplement, serais-je tenté de dire, vous contenter de lui répondre « oui » ou « non ». Dans cette bataille pour conserver notre industrie, nous devons avoir la main. Et c’est au ministre de l’industrie et à ses services de mener la négociation, sans quoi il y aura des délocalisations en série.

Finalement, votre réponse n’est pas satisfaisante quand vous nous dites que le Gouvernement aura toujours le choix d’accepter ou de refuser. Non, il n’aura plus du tout la main ! Or la politique de l’industrie est une politique gouvernementale à part entière ! Et si le coût de l’électricité est bas en France, c’est parce que nous avons investi. Ce choix, on le doit au Conseil national de la Résistance, à Charles de Gaulle, à tous les gouvernements qui se sont succédé.

M. Roland Courteau. Il y a eu volonté politique !

M. Martial Bourquin. Absolument ! Gardons-la !

Le Gouvernement doit mener ce type de négociations et, surtout, ne pas laisser la décision à des commissions qui, parfois, n’auront qu’un regard très éloigné sur ces sujets, faute de bien les connaître. Le Gouvernement, lui, est en relation avec les élus. Et quand il arrive que ce ne soit plus le cas, ceux-ci savent se faire entendre et le rappeler à ses devoirs en la matière.

On est véritablement là dans la politique, et pas au sens partisan du terme. La fixation des tarifs de l’électricité, de l’énergie est une responsabilité, une prérogative fondamentale que l’on doit conserver.

Je le disais hier, l’énergie est à la base de tout. C’est elle qui fait qu’une société se développe, ou périclite.

M. Roland Courteau. C’est sûr !

M. Martial Bourquin. En France, nous avons une force extraordinaire avec EDF, avec la politique menée, avec le pacte qui a été mis en place. Pourquoi baisser la garde ? Je parlais tout à l’heure des entreprises manufacturières. Mais il y en a d’autres, fortement consommatrices d’électricité, qui ne peuvent pas fonctionner autrement. Inévitablement, si les coûts viennent à augmenter, elles se poseront la question d’une éventuelle délocalisation.

M. le président. Veuillez conclure, monsieur Bourquin.

M. Martial Bourquin. Mes chers collègues, il ne faudrait pas que, au détour d’articles ou d’amendements, nous votions des dispositions qui se traduiraient par des ravages économiques dont nous avons sous-estimé l’ampleur.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 184.

(L’amendement n’est pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l’article 4, modifié.

(L’article 4 est adopté.)

Article 4 (début)
Dossier législatif : projet de loi portant nouvelle organisation du marché de l'électricité
Discussion générale

5

Engagement de la procédure accélérée pour l’examen d’un projet de loi

M. le président. En application de l’article 45, alinéa 2, de la Constitution, le Gouvernement a engagé la procédure accélérée pour l’examen du projet de loi de programmation des finances publiques pour les années 2011 à 2014, déposé ce jour sur le bureau de l’Assemblée nationale.

Mes chers collègues, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à vingt et une heures trente.

La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à dix-neuf heures trente-cinq, est reprise à vingt et une heures trente, sous la présidence de M. Bernard Frimat.)

PRÉSIDENCE DE M. Bernard Frimat

vice-président

M. le président. La séance est reprise.

6

Conférence des présidents