Mme Annie David. J’interviens pour compléter ce qui vient d’être dit par M. Godefroy.

Au cours des débats qui ont eu lieu en fin de semaine, nous avions demandé au Gouvernement de garantir aux personnels de cette équipe pluridisciplinaire une véritable indépendance, la même indépendance juridique que celle qui est accordée aux médecins.

Faire garantir cette indépendance par le directeur de service, au même titre que l’indépendance du médecin du travail, risque de constituer, en effet, une régression pour les médecins. De toute manière, la rédaction de cet amendement n’assurera en aucun cas l’indépendance juridique dont auront besoin les personnels de cette équipe pluridisciplinaire.

En ce sens, je voudrais remercier notre collègue Philippe Dominati : son intervention a au moins eu le mérite de nous éclairer tout à fait sur la nature de l’indépendance dont il est question ! Elle se situe exclusivement sur le plan technique et sur le plan médical. Il ne s’agit absolument pas de garantir aux médecins du travail l’indépendance telle qu’ils l’entendent, celle qui est la leur aujourd’hui, et qui s’apprécie sous l’angle juridique.

On le voit bien, les médecins du travail sont en danger.

Nous regrettons qu‘au cours du débat qui a eu lieu samedi vous n’ayez pas accepté les propositions que nous formulions visant à assurer l’indépendance juridique des personnels de cette équipe pluridisciplinaire. Mais qu’à cela ne tienne ! Peut-être pourrions-nous, monsieur le secrétaire d’État, saisir l’occasion de la seconde délibération qui aura bientôt lieu pour revenir sur la question ! (Applaudissements sur les travées du groupe CRC-SPG et du groupe socialiste.)

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 1243.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. La parole est à Mme Raymonde Le Texier, pour explication de vote sur l'article.

Mme Raymonde Le Texier. Monsieur le ministre, monsieur le secrétaire d’État, s’agissant de cet article 25 undecies, de toute évidence, vos propositions ne sont guère influencées par les pistes de réflexion élaborées par la mission d’information sur le mal-être au travail, qui a rendu son rapport le 7 juillet dernier.

M. Guy Fischer. Ils l’ont mis au placard !

Mme Raymonde Le Texier. Cette mission a fait des propositions et des recommandations précisément en ce qui concerne les acteurs de la prévention des risques professionnels.

Je cite le rapport : « Il convient surtout de renforcer la médecine du travail et les CHSCT. »

La mission défend, en effet, deux principes essentiels : d’abord, la nécessité de revaloriser la profession de médecin du travail ; ensuite, la réaffirmation de l’indépendance des services de santé au travail, ce qui pourrait être obtenu par leur rattachement à une structure paritaire.

Monsieur le ministre, monsieur le secrétaire d’État, à quoi ont servi ces entretiens, ces déplacements, ces déclarations et ce rapport ? Visiblement, à rien ! Les mesures contenues dans votre projet de loi ne tiennent absolument pas compte de ces propositions !

Encore un paradoxe : la médecine du travail connaît une forte pénurie contre laquelle il faut activement lutter, alors qu’elle présente pourtant un fondement d’avant-garde, dans la mesure où elle est une spécialité de la prévention axée sur une valeur fondamentale dans notre société, le travail !

Malgré cela, c’est le démantèlement de la médecine du travail que vous êtes en train de mettre en œuvre ! Et cet article 25 undecies lui porte le coup de grâce.

L’indépendance du médecin du travail sera garantie par le directeur du service de santé au travail, lui-même désigné par les employeurs !

Alors, monsieur le ministre, monsieur le secrétaire d’État, permettez-moi ces quelques questions : en quoi ce texte pallie-t-il la pénurie de médecins ? En quoi améliore-t-il la prévention des risques ? Comment pouvez-vous prétendre renforcer la prévention de la santé au travail en laissant s’éteindre la spécialité médicale de médecine du travail et en affaiblissant l’indépendance des médecins ?

L’essence même de la fonction de médecin du travail – la protection et la préservation de la santé des salariés – est en train de disparaître, et vous participez à la mise à mort !

L’indépendance du médecin du travail doit être attachée à sa fonction ; elle ne doit certainement pas dépendre de garanties données par un directeur, lui-même salarié !

Selon le rapporteur, « la mention de la garantie d’indépendance des médecins s’ajoute aux protections prévues aux articles L. 4623-4 à L. 4623-7 du code du travail et aux obligations déontologiques des médecins. » Eh bien, non ! Non seulement, les articles en question du code du travail ne font aucunement mention de l’indépendance des médecins du travail, laissant au code de déontologie médicale et à ses maigres articles 4 , 5 et 7 le soin d’en définir les contours, sans pour autant apporter de garanties solides, mais, en plus, cet article 25 undecies ne rajoute en rien une protection. Bien au contraire, il organise un véritable conflit d’intérêt.

Le médecin du travail voit son statut écorné, puisqu’il devient dépendant de l’employeur par le biais du directeur du service de santé au travail, alors qu’auparavant il était salarié protégé par l’inspecteur du travail.

Je reviens au rapport de la mission précitée : « La mention de la garantie d’indépendance des médecins doit être vue comme une manifestation explicite du fait que le directeur n’entravera pas les actions de santé au travail décidées par l’équipe en fonction de l’évolution des réalités de terrain, même si elles ne correspondent pas au programme d’action pluriannuel. »

Monsieur le ministre, l’indépendance des médecins du travail ne doit pas être altérée par de nouvelles règles de gouvernance des SST.

Avant que vous nous renvoyiez dans nos buts comme vous l’avez fait samedi, je tiens juste à vous rappeler ces éléments concernant la prétendue indépendance des services de santé au travail.

Une enquête de novembre 2007 fait apparaître que, dans 66 départements, les services de santé au travail avaient la même adresse que le MEDEF ! La bonne connaissance de ces circuits a montré qu’il y avait souvent des arrangements en matière de location, de prêts de matériel et de personnels.

En réalité, voici ce que vous nous proposez : au lieu d’un système de protection, c’est à un système d’influence que nous devrons faire face, et ce, bien sûr, au détriment du salarié et de sa santé.

Grâce à vous, quand on parlera de médecine du travail, de santé au travail, on aura immédiatement des doutes quant aux questions de confiance, d’indépendance, de confidentialité !

Nous voterons contre cet article ! (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.)

M. le président. La parole est à M. François Autain, pour explication de vote.

M. François Autain. J’ai déjà eu l’occasion de m’exprimer sur ce sujet lors de mon explication de vote sur l’article 25 quater, mais il n’est pas inutile d’y revenir à l’occasion de l’explication de vote sur cet article.

Il est patent que ce texte met fin à l’indépendance du médecin du travail à l’égard de son employeur. Cette dernière ne peut être garantie que par la loi et non par un directeur du service de santé dont on sait qu’il sera directement sous l’autorité du chef d’entreprise.

En outre, la référence à l’autonomie du médecin du travail, qui figurait dans le contrat liant ce dernier à l’entreprise dans laquelle il travaillait, disparaîtra.

C’est un élément de plus qui prouve bien que ce texte va changer radicalement le statut de la médecine du travail. Ce changement se fera au détriment des salariés, qui auront en face d’eux non plus un interlocuteur indépendant mais une personne liée au chef d’entreprise. Par conséquent, le médecin du travail ne pourra plus accomplir sa mission dans des conditions normales.

C’est la raison pour laquelle nous voterons contre cet article. (Applaudissements sur les travées du groupe CRC-SPG et du groupe socialiste.)

M. le président. Je mets aux voix l'article 25 undecies, modifié.

J’ai été saisi d'une demande de scrutin public émanant du groupe socialiste.

Je rappelle que la commission et le Gouvernement se sont prononcés en faveur de l’adoption de cet article.

Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.

Le scrutin est ouvert.

(Le scrutin a lieu.)

M. le président. Personne ne demande plus à voter ?…

Le scrutin est clos.

(Il est procédé au dépouillement du scrutin.)

M. le président. Voici le résultat du scrutin n° 57 :

Nombre de votants 337
Nombre de suffrages exprimés 335
Majorité absolue des suffrages exprimés 168
Pour l’adoption 182
Contre 153

Le Sénat a adopté.

Article 25 undecies
Dossier législatif : projet de loi portant réforme des retraites
Rappel au règlement

Article 25 duodecies

(Non modifié)

Le chapitre V du même titre II est ainsi modifié :

1° Après le mot : « médicale », la fin de l’intitulé est ainsi rédigée : « de catégories particulières de travailleurs » ;

2° Il est inséré un article L. 4625-1 ainsi rédigé :

« Art. L. 4625-1. – Un décret détermine les règles relatives à l’organisation, au choix et au financement du service de santé au travail ainsi qu’aux modalités de surveillance de l’état de santé des travailleurs applicables aux catégories de travailleurs suivantes :

« 1° Salariés temporaires ;

« 2° Stagiaires de la formation professionnelle ;

« 3° Travailleurs des associations intermédiaires ;

« 4° Travailleurs exécutant habituellement leur contrat de travail dans une entreprise autre que celle de leur employeur ;

« 5° Travailleurs éloignés exécutant habituellement leur contrat de travail dans un département différent de celui où se trouve l’établissement qui les emploie ;

« 6° Travailleurs détachés temporairement par une entreprise non établie en France ;

« 7° Travailleurs saisonniers.

« Pour tenir compte de spécificités locales en matière de recours à des travailleurs saisonniers, l’autorité administrative peut approuver des accords adaptant les modalités définies par décret sous réserve que ces adaptations garantissent un niveau au moins équivalent de protection de la santé aux travailleurs concernés. »

M. le président. La parole est à M. Guy Fischer, sur l’article.

M. Guy Fischer. Monsieur le président, monsieur le ministre, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, nous continuons l’examen des dispositifs dérogatoires applicables, en matière de santé au travail, à des catégories particulières de travailleurs, parmi lesquelles les salariés temporaires, les stagiaires de la formation professionnelle et les travailleurs des associations intermédiaires.

Nous réaffirmons que c’est d’une médecine du travail au petit pied qu’il est question avec cet article 25 duodecies.

Et la discussion vient de montrer, abondamment, précisément, que la loi se refusait à créer les conditions du nécessaire dialogue social quant à la mise en place de services de santé au travail performants et utiles. Voici, en effet, que plusieurs millions de salariés vont être privés d’une véritable médecine du travail. Il est là, le problème.

À qui va-t-on faire croire, dans les faits, qu’on ne peut mettre en œuvre quelques principes généraux dans la loi, permettant de répondre aux prétendues difficultés techniques qui imposeraient le recours au décret ?

Pour ne prendre qu’un exemple, l’agriculture – un des sujets que je connais très bien - est un secteur d’activité fortement utilisateur de main-d’œuvre saisonnière. Que ce soit pour les moissons, pour les vendanges ou encore pour la cueillette des pommes dans le Finistère sud ou celle des olives en basse Provence, ce secteur embauche des saisonniers de manière régulière.

Certains de nos collègues, issus du monde rural, nous ont rappelé que la Mutualité sociale agricole disposait de services de santé au travail qui, par leur nature, suffisaient à dispenser le secteur de l’application des dispositions générales dont nous débattons.

Eh bien, si ces services sont opérationnels pour traiter de la situation sanitaire des salariés permanents du secteur agricole, ils le sont aussi, de notre point de vue, pour assurer le suivi des saisonniers.

Simplement, dans ce cas-là, il faut demander aux professionnels de mettre un peu plus d’argent au pot pour financer le service de santé au travail et de bien vouloir attendre, pour embaucher tel ou tel saisonnier, d’avoir eu le feu vert de ce même service. À moins, justement, que le décret ne vise à se dispenser de cette visite médicale d’embauche. La même remarque vaut pour les saisonniers du tourisme, soit dit en passant.

À compter du moment où les agences de Pôle emploi des stations touristiques recueillent la plus grande partie des offres d’emploi du secteur, rien n’empêche de concevoir que l’ensemble des employeurs de la même station soient mis à contribution, de manière citoyenne mais restant modique, pour faire face au coût de fonctionnement d’un service de santé au travail qui pourrait presque partager les locaux administratifs du service public de Pôle emploi. Et non pas ceux du MEDEF !

M. Guy Fischer. Le problème du recours au décret, nous le voyons bien, c’est que le Gouvernement ne souhaite aucunement ouvrir un round de négociations entre partenaires sociaux dans des secteurs où le patronat est souvent rétif à l’ouverture du dialogue social. Il suffit de voir ce qu’il en est pour l’intérim pour s’en rendre compte.

Le Gouvernement se trouve aussi dans une sorte d’obligation de gérer la pénurie de médecins du travail qui explique, de fait, que l’on sacrifie dans la loi la situation de plusieurs centaines de milliers de salariés, et singulièrement de jeunes, au « principe de réalité ». C’est d’ailleurs l’un des problèmes majeurs ici.

Mais ce principe de réalité est inspiré par le MEDEF et la CGPME, qui veulent bien de la médecine du travail, mais à condition qu’elle ne leur coûte pas plus cher qu’avant et qu’elle serve au mieux les contraintes de la production, c’est-à-dire la constitution du profit.

Nous ne voterons évidemment pas cet inventaire d’exceptions qu’est l’article 25 duodecies. Il augure mal de la lutte pour l’amélioration de la situation sanitaire des salariés et vient remettre en cause tous les travaux et recommandations de la mission d’information sur le mal-être au travail. C’est pour cela que nous sommes fermement opposés à cet article 25 duodecies. (Applaudissements sur les travées du groupe CRC-SPG.)

M. le président. L'amendement n° 1034, présenté par Mme David, M. Fischer, Mme Pasquet, M. Autain, Mme Hoarau et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche, est ainsi libellé :

Supprimer cet article.

Madame David, pourriez-vous présenter en même temps les amendements déposés par votre groupe qui tendent à supprimer un à un les alinéas de l’article ?

Mme Annie David. Monsieur le président, je laisse à mes collègues le soin de défendre leurs amendements. (Protestations sur les travées de lUMP.)

M. Guy Fischer. C’est un sujet très important !

M. le président. Veuillez donc présenter l’amendement n° 1034, ma chère collègue.

Mme Annie David. En principe, les médecins du travail sont chargés de prévenir les risques liés aux conditions de travail et à l’emploi occupé afin d’éviter, je vous le rappelle, l’altération de la santé physique et mentale du salarié.

Pour près de 15 millions de salariés du secteur privé, il y a, en France, 6 00 médecins du travail, soit un médecin pour 2 300 salariés. Leur nombre est donc très largement insuffisant. À cela il faut ajouter que 75 % d’entre eux ont plus de 50 ans. Leur remplacement ne sera plus assuré dans quelques années.

Pour pallier ce manque, l’un des amendements déposés à l’Assemblée nationale et intégrés dans ce texte préconise le recours aux médecins de ville pour certaines professions comme les salariés à domicile, les artistes intermittents du spectacle, les VRP ou encore les mannequins. Rien que cela ! C’était l’objet de l’article 25 octies.

Guy Fischer vous a rappelé les catégories de salariés ici concernés : les salariés intérimaires, les stagiaires de la formation professionnelle, les saisonniers, les salariés détachés à l’étranger ou dans d’autres départements.

Une telle proposition pourrait - à l’extrême rigueur - avoir un sens si elle était temporaire, le temps de pallier la pénurie et de mettre en place un système de promotion des carrières de médecin du travail afin de permettre au contingent actuel de grossir et de retrouver une taille qui conduirait à un ratio médecin du travail-salarié plus élevé qu’aujourd’hui.

En inscrivant dans la loi de façon définitive cette dérogation, le Gouvernement ne fait qu’entériner cette pénurie en lui donnant une valeur normative.

On imagine assez facilement ce qui anime la majorité dans cette politique insensée : ne surtout pas générer de dépenses publiques supplémentaires en augmentant le contingent de médecins du travail. Nul besoin d’être particulièrement fin analyste pour le comprendre, puisque c’est le mot d’ordre du Gouvernement depuis deux ans.

Force est de constater que cette volonté de résorber les dépenses publiques frise la névrose obsessionnelle et, comme toute pathologie mentale, elle pousse le malade à commettre des actes incohérents et irrationnels.

Vous êtes-vous demandé combien coûtera à l’État le recours à des médecins de ville pour assurer ces missions en lieu et place des médecins du travail ? Nul ne le sait, puisque le Gouvernement ne voit que les postes qu’il ne crée pas.

En revanche, le Gouvernement semble ignorer les transferts de charge vers la médecine de ville, les effets différés d’un mauvais suivi médical sur les salariés et ses conséquences sur leur santé, et donc sur l’assurance maladie. Je regrette d’ailleurs que notre collègue Alain Vasselle n’ait pas plus posé de questions sur ce sujet à M. le ministre.

Nous nous opposons donc à cette politique incohérente, car nous jugeons que le seul moyen de garantir la santé des travailleurs, c’est d’augmenter le contingent et les moyens de la médecine du travail. (Applaudissements sur les travées du groupe CRC-SPG.)

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Dominique Leclerc, rapporteur. Avis défavorable !

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Georges Tron, secrétaire d'État. Avis défavorable !

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 1034.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. L'amendement n° 1035, présenté par Mme David, M. Fischer, Mme Pasquet, M. Autain, Mme Hoarau et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche, est ainsi libellé :

Alinéa 1

Supprimer cet alinéa.

La parole est à Mme Odette Terrade.

Mme Odette Terrade. Monsieur le président, monsieur le ministre, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, l’application de la règle du moins-disant social semble bel et bien le cœur de cet article 25 duodecies, qui procède à une sorte d’inventaire à la Prévert des statuts de salariés ouvrant droit, pour les employeurs, à la mise en œuvre de dérogations au droit commun.

Il s’agit en effet de permettre que des dérogations soient appliquées au principe de participation des entreprises au financement des services de santé au travail pour un nombre relativement important de salariés.

Je ne vais pas ici dresser la liste de ceux de ces salariés qui peuvent, de manière tout à fait objective, être traités à l’égal des autres salariés, mais prenons quelques exemples.

Dans le cas du travail saisonnier, notamment en station touristique d’été ou d’hiver, n’est-il pas possible de demander aux entreprises commerciales ou hôtelières, pour ne donner que deux exemples, de verser leur écot pour financer le fonctionnement d’un service de santé implanté dans la station et destiné à recevoir et à traiter les saisonniers, dont le cas est spécifique ?

De même, pour ce qui concerne les travailleurs éloignés du site principal de leur entreprise, pourquoi ne pas prévoir, notamment si l’entreprise est couverte par un accord de branche, qu’elle participe, même sous forme de financement proratisé, au fonctionnement du service de santé de sa branche d’activité implanté dans le département où travaille le salarié éloigné ?

La loi doit-elle systématiquement parer au plus pressé ? Doit-on adapter la loi aux modes de fonctionnement d’une partie de l’entreprise, alors même que, dans d’autres cas, ce mode de fonctionnement n’interfère aucunement sur le traitement de l’entreprise ?

Ainsi, une entreprise du bâtiment qui dispose d’un dépôt de matériel géré par quelques salariés à plusieurs dizaines ou centaines de kilomètres de son siège social est soumise à l’impôt local autant pour son siège social que pour la valeur de son établissement secondaire.

Ce sont donc de fausses raisons, présentées comme pratiques, qui sont à la base de ce qu’il faut bien appréhender comme une nouvelle illustration du moins-disant social.

Quand on sait que le travail de saison ou le contrat d’intérim représentent bien souvent les premières expériences professionnelles pour nombre de jeunes salariés, on mesure aisément les conséquences que peut avoir ce moins-disant social sur leurs conditions de travail et sur leur santé.

Nous ne pouvons donc, mes chers collègues, que vous inviter à adopter notre amendement pour réduire cet écart dans le traitement des salariés.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Dominique Leclerc, rapporteur. Avis défavorable !

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Georges Tron, secrétaire d'État. Avis défavorable !

M. le président. La parole est à Mme Odette Terrade, pour explication de vote.

Mme Odette Terrade. Je suis désolée que cet amendement recueille des avis défavorables.

Selon une stratégie désormais bien connue, sous couvert d’humanisme et de souci du bien-être individuel des travailleurs, vous nous proposez un certain nombre de régimes dérogatoires. On l’a vu depuis le début de cette discussion.

Encore une fois, vous habillez votre article des meilleures intentions mais, lorsque l’on y regarde de plus près, les dispositifs semblent beaucoup plus favorables aux employeurs qu’aux salariés qui produisent leur richesse.

Nous l’avons dit, nous ne souhaitons pas discuter de la question éminemment importante de la médecine du travail. L’article 25 duodecies, à mesure que nous en discutons, témoigne de la complexité du problème posé. La médecine du travail mérite mieux que ces approximations. Elle nécessite par la concertation, par le débat, une véritable loi qui ne viserait pas uniquement à donner plus de pouvoir et de marges de manœuvre aux seules directions d’entreprises.

Il s’agit en effet pour le MEDEF de contrôler la santé au travail. Cet objectif est préparé dans la loi que vous défendez aujourd’hui qui prévoit, de surcroît, son application par décrets. Le nouvel article L.4625-1 stipule clairement en effet qu’« un décret détermine les règles relatives à l’organisation, au choix et au financement du service de santé au travail ». Il détermine ensuite les catégories de travailleurs concernés.

Votre but réel, avec ce chapitre, consiste en fait à éviter que certaines dispositions réglementaires prévues par le protocole d’accord sur la modernisation de la médecine du travail, proposé par le patronat, ne soient refusées au motif qu’elles introduisent une inégalité de traitement entre salariés. Ce chapitre, qui énumère une série de catégories particulières de salariés, ne vise en effet qu’à donner une valeur légale aux revendications du MEDEF telles qu’elles sont exposées dans ce protocole d’accord.

Notre amendement vise donc à supprimer cet alinéa et nous vous demandons une nouvelle fois de le voter.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 1035.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. L'amendement n° 1036, présenté par Mme David, M. Fischer, Mme Pasquet, M. Autain, Mme Hoarau et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche, est ainsi libellé :

Alinéa 2

Supprimer cet alinéa.

La parole est à Mme Nicole Borvo Cohen-Seat.

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Cet article, ajouté par l’Assemblée nationale, prévoit la possibilité de dérogations réglementaires.

Nous nous y opposons, comme nous l’avons précisé précédemment. Ici, nous proposons la suppression de cet alinéa 2 dans le but d’empêcher ce que nous supposons inévitable.

Il paraît clair que les dérogations à la surveillance médicale des salariés se font toujours dans le sens d’un nivellement par le bas des prestations et de la surveillance offertes à ces salariés.

Les auteurs de cet article estiment qu’il pose les bases d’un régime de santé dont sont aujourd’hui dépourvues ces professions. Seulement, nous n’estimons pas cet argument suffisant, ni même valable quant à la légitimation d’éventuelles dérogations spécifiques propres à une catégorie de travailleurs. Accepter une telle différence de traitement c’est se justifier des inégalités que vous créez vous-mêmes.

Il faudrait, en effet, offrir un régime de santé et une médecine du travail similaires pour tous les salariés quel que soit leur statut. Il est techniquement, économiquement et socialement nécessaire de rendre possible cette volonté. La volonté suffit, nous l’avons, essayons de tous l’avoir pour point de départ !

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Dominique Leclerc, rapporteur. Avis défavorable !

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Georges Tron, secrétaire d’État. Avis défavorable !

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 1036.

(L’amendement n’est pas adopté.)

M. le président. L’amendement n° 1037, présenté par Mme David, M. Fischer, Mme Pasquet, M. Autain, Mme Hoarau et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche, est ainsi libellé :

Alinéa 3

Supprimer cet alinéa.

La parole est à Mme Odette Terrade.

Mme Odette Terrade. Nous vous l’avons déjà maintes fois expliqué, nous sommes opposés aux dérogations à la surveillance médicale des travailleurs, car nous savons bien qu’elles offrent toujours l’occasion d’un nivellement par le bas de la qualité de la médecine du travail due à ces salariés.

Monsieur le secrétaire d’État, monsieur le rapporteur, vous souhaitez déterminer par décret des règles qui, à l’évidence, vont à nouveau déroger au droit commun en matière d’organisation et de financement des services de santé au travail, ainsi que de suivi de l’état de santé des salariés qui, compte tenu des spécificités de leur contrat de travail, sont eux-mêmes placés en marge du droit commun du salariat.

Nous avons donc des raisons objectives d’être inquiets.

Nos approches de la médecine du travail sont diamétralement opposées : selon vous, votre projet de loi apporte un léger mieux, sous la forme d’un début d’ouverture de la médecine du travail aux catégories de travailleurs qui en étaient exclus ; selon nous, la même médecine du travail doit profiter à tous les travailleurs, quel que soit leur statut.

Nous défendons le développement et la consolidation des missions de la médecine du travail contre la dégradation et, encore une fois, la mise à mal d’un acquis social.

Nous sommes contre les régimes dérogatoires et il est donc nécessaire de supprimer cet alinéa.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Dominique Leclerc, rapporteur. Défavorable !

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Georges Tron, secrétaire d’État. Défavorable !

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 1037.

(L’amendement n’est pas adopté.)

M. le président. L’amendement n° 1038, présenté par Mme David, M. Fischer, Mme Pasquet, M. Autain, Mme Hoarau et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche, est ainsi libellé :

Alinéa 4

Supprimer cet alinéa.

La parole est à M. Guy Fischer.

M. Guy Fischer. Nous avançons dans un tunnel désespérant : les réponses…

Mme Annie David. Lapidaires !

M. Guy Fischer. … de M. le rapporteur et de M. le secrétaire d’État sont inexistantes, mais cela nous permet de nous ressourcer !

M. David Assouline. Cela fait des jours et des jours que nous subissons cela !