M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. Absolument.

Mme Nicole Bricq. Le Gouvernement s’est assis sur une disposition qu’il avait fait adopter par sa majorité. Je tenais à le rappeler, car personne ne l’a fait avant moi.

M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. C’est juste.

Mme Nicole Bricq. Comme vous, monsieur le président de la commission des finances, je crois qu’il vaut mieux trancher la queue du chien d’un seul coup, et donc supprimer purement et simplement la réduction de TVA dont bénéficie le secteur de la restauration.

Si nous devons mener ultérieurement une réflexion globale sur la TVA, nous le ferons. Toutefois, je souligne que, dans une période difficile, où le seul moteur de la croissance qui fonctionne encore dans notre pays est la consommation – sur ce plan, la situation n’est pas la même chez nous qu’en Allemagne –, une mesure de relèvement général du taux normal de TVA constituerait un coup de frein terrible pour notre économie.

M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. La contrepartie, c’est l’allégement des charges sociales !

Mme Nicole Bricq. Instaurer une TVA sociale ou anti-délocalisations, comme on voudra la nommer, reviendrait en fait à décider une augmentation générale des impôts pesant sur la consommation.

M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. Non ! Cette mesure doit être neutre sur le plan budgétaire.

Mme Nicole Bricq. Dans la période que nous traversons, une telle mesure ne serait pas adaptée. Mais tel n’est pas le sujet ici : ce soir, nous devons revenir sur une mesure dont le bilan est négatif à tous points de vue. Pourquoi la faire perdurer ?

M. le président. La parole est à M. Michel Houel, pour explication de vote. (Ah ! sur les travées de lUMP.)

M. Michel Houel. Je vais essayer de faire entendre une autre musique…

S’agissant de ce taux réduit de TVA applicable à la restauration, la confusion est grande depuis l’origine. On l’a encore constaté ce matin, lors de la présentation des neuf amendements actuellement en discussion : vous n’étiez même pas d’accord sur les montants en jeu, mes chers collègues.

On parle d’une perte de recettes de 3 milliards d’euros pour l’État, mais ce chiffre est faux. En effet, il faut déjà retirer 600 millions d’euros, somme qui correspond au coût des niches existant précédemment. En outre, sur les 2,4 milliards d’euros restants, 400 millions d’euros sont imputables non pas au secteur de la restauration proprement dit, mais aux restaurants des parcs de loisirs ou aux établissements implantés sur les aires d’autoroute, ainsi qu’aux remboursements de TVA liés aux notes de restaurant des entreprises.

On en arrive à 2 milliards d’euros, dont la moitié a été reversée en salaires, selon les données de l’INSEE, confirmées par les services de Bercy. Au final, mes chers collègues, notre débat ne porte donc, en vérité, que sur 1 milliard d’euros.

À l’occasion des états généraux de la restauration, en 2009, un contrat d’avenir a été signé pour une durée de trois ans. Comme l’a fort justement souligné notre collègue Philippe Adnot, quel signe adresserions-nous à cette profession si nous revenions, du jour au lendemain, sur la décision qui a motivé son engagement ?

Ce contrat d’avenir portait principalement sur les prix, l’emploi, l’investissement et les salaires.

Concernant les prix, en tant que consommateur, je suis moi-même d’abord tombé dans un piège : le taux de TVA passant de 19,6 % à 5,5 %, je ne comprenais pas pourquoi les prix ne baissaient pas de 14,1 %. Or, en fait, il ne pouvait en être ainsi, parce qu’une réduction de la TVA de 14,1 points équivaut à une baisse des tarifs toutes taxes comprises de 11,8 %. En outre, la réduction du taux de TVA n’a touché qu’une partie de l’offre de la restauration. Il faut donc retirer de ces 11,8 % une part du chiffre d’affaires, notamment celle qui est liée à la vente de boissons alcoolisées. Dans ces conditions, la baisse de prix TTC maximale théoriquement envisageable est de l’ordre de 7,5 %. D’ailleurs, certaines grandes chaînes ne s’y sont pas trompées, qui ont baissé les prix de certaines prestations à cette hauteur, pour produire un effet d’appel.

En contrepartie de cette réduction de la TVA, il était en outre demandé aux restaurateurs d’embaucher, ce qu’ils ont fait : 27 500 emplois ont été créés dans l’hôtellerie et la restauration. Au plan macroéconomique, ces 27 500 nouveaux salariés consomment, paient de la TVA et autres impôts, ainsi que des charges sociales.

Concernant les salaires, des efforts ont été accomplis, d’une façon très simple. Lors des auditions que j’ai conduites, il m’a été donné – pour la première fois, hélas ! – d’être complimenté par un syndicaliste, qui a reconnu que la réduction du taux de TVA avait permis le financement de mesures favorables aux salariés, comme le versement d’une prime de 500 euros au mois de juillet dernier, une augmentation de 2 % du salaire annuel, l’attribution de deux jours de congés payés supplémentaires et la création d’une mutuelle – c’est une innovation dans la profession – financée à parité par les employeurs et les salariés, sur la base de 15 euros par mois pour chaque partie.

S’agissant de l’investissement, il est encore beaucoup trop tôt pour que l’on puisse établir un bilan. En effet, avant d’investir, il faut amasser du capital, afin d’être en mesure de rassurer les banquiers. Cela étant, je relève que, à Paris, les architectes spécialisés dans la transformation des restaurants et des brasseries ont devant eux du travail pour deux ans ! Ils ne sont pas disponibles plus tôt ! La situation est analogue dans toutes les grandes villes de France.

Enfin, je voudrais souligner un fait peut-être négligé : la baisse de la TVA dans la restauration sert l’aménagement du territoire. J’ai une double origine dont je suis très fier : le Cantal et la Bretagne. Dans les départements du fin fond de la France, on trouve encore des petits restaurants ouvriers qui servent des menus entre 10 et 13 euros. Je ne veux pas qu’ils baissent leurs prix ; tout ce que je souhaite, c’est qu’ils puissent vivre, or l’application du taux de TVA de 5,5 % les y aide ! (Applaudissements sur les travées de lUMP, ainsi que sur certaines travées de lUnion centriste.)

M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Raffarin, pour explication de vote.

M. Jean-Pierre Raffarin. La brillante démonstration que nous venons d’entendre m’oblige à être bref. La lecture préalable du rapport de M. Houel explique d’ailleurs que nous soyons aussi nombreux ce soir.

J’ai relevé un paradoxe dans les propos de Mme Bricq, qui nous a dit craindre l’augmentation de la TVA en général,…

Mme Nicole Bricq. Non, l’augmentation générale de la TVA !

M. Jean-Pierre Raffarin. … mais souhaiter celle du taux applicable au secteur de la restauration !

Je tiens à témoigner mon respect à M. le ministre pour sa détermination. En effet, connaissant bien les services de Bercy, je sais qu’ils s’opposent avec obstination depuis des années à la réduction du taux de TVA pour la restauration, en se fondant sur une analyse qui n’est pas toujours pluriannuelle ni complète et omet de prendre en compte un certain nombre de paramètres, notamment celui de l’aménagement du territoire, mis en exergue à l’instant par M. Houel ; j’y reviendrai.

J’admire toujours la facilité de notre rapporteur général. De manière globale, je suis d’accord avec lui.

Cependant, il a affirmé tout à l’heure que la baisse de la TVA dans la restauration était une erreur à la fois politique, économique et budgétaire. Or, monsieur le ministre, il s’agit à mes yeux d’une bonne décision politique, économique et budgétaire.

C’est une bonne décision politique, car j’estime que tenir ses engagements est une question de dignité et d’honneur. Il est de bonne politique, à l’égard tant des citoyens que des professionnels, que nous avons poussés à s’engager, de tenir parole.

On est d’ailleurs souvent injuste avec les restaurateurs. En effet, avant même de bénéficier du taux réduit de TVA de 5,5 %, cette profession avait pris des engagements au travers de conventions collectives et consenti des efforts considérables en matière sociale.

Sur le plan économique, toutes les régions de ce grand pays touristique qu’est la France bénéficient de la réduction du taux de la TVA pour la restauration. Les pays forts sont ceux qui attirent les capitaux, les projets, les personnes, les emplois. L’attractivité est le premier critère d’évaluation de l’efficacité d’une politique économique. Comment se démarquer dans le contexte actuel de concurrence internationale ? La France y parvient parce que ses territoires sont attractifs, mais comment transformer les flux touristiques en flux économiques créateurs d’emplois, si l’on ne réalise pas localement des investissements susceptibles de valoriser la qualité des productions ? Il ne suffit pas d’obtenir que des voyageurs viennent admirer nos églises et circuler sur nos routes !

Il est clair que, dans cette perspective, nous devons pouvoir nous appuyer sur le secteur de la restauration. En tant qu’élu d’une région touristique, j’ai pu mesurer son importance, y compris d’ailleurs pour ceux de nos concitoyens qui doivent pouvoir trouver un repas à bon marché sur la route ou près de leur lieu de travail. Allons-nous manifester une sorte de dédain à l’égard de ces professionnels, au moment même où la qualité de leur travail a permis l’inscription du « repas gastronomique des Français » au patrimoine de l’UNESCO ?

J’ajoute qu’il n’est guère d’autres professions dans lesquelles l’ascenseur social fonctionne aussi bien ! On y voit des personnes munies d’une simple formation de base accéder aux rangs les plus élevés : tous les grands chefs qui font l’honneur de la gastronomie française ont été apprentis, puis ouvriers, avant de devenir de véritables artistes ! Peu de professions connaissent encore un tel dynamisme social et territorial. Le secteur de la restauration mérite notre respect ! Ses emplois sont enracinés dans notre territoire, il faut en tenir compte à une époque où les délocalisations sont nombreuses.

M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. On devrait mettre la TVA à 0 % !

M. Jean-Pierre Raffarin. C’est une question de justice que de manifester la considération de la nation pour des professionnels attachés à nos territoires, qui ne sont pas soumis aux vents des délocalisations.

Enfin, sur le plan budgétaire, il est vrai, monsieur Arthuis, que des efforts considérables sont nécessaires. Cela étant, ce n’est pas en grignotant ici, en rabotant là, en allant chercher des économies à droite et à gauche sans suivre une ligne cohérente que nous trouverons les moyens de réduire notre déficit. L’équation budgétaire est en effet très difficile à résoudre, et il nous faudra prendre des mesures de grande ampleur.

M. Jean Desessard. Lesquelles ?

M. Jean-Pierre Raffarin. Très franchement, je considère pour ma part que beaucoup d’argent est consacré Grand Paris…

M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. Il n’est pas encore dépensé !

M. Jean-Pierre Raffarin. … ou au financement des allégements de charges liés aux 35 heures ! Les circonstances ayant changé, une partie de ces moyens pourraient à mon sens être utilement réorientés vers la promotion de l’apprentissage, notamment dans les métiers de la restauration. (Applaudissements sur certaines travées de lUMP et de l’Union centriste.) Il me semble préférable de chercher à réaliser des milliards d’économies budgétaires, plutôt que de raboter des millions çà et là. Une réflexion globale est nécessaire pour dégager des solutions.

M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. C’est vrai !

M. Jean-Pierre Raffarin. Il faudra un jour ou l’autre transférer les charges sociales pesant sur les salaires vers la consommation. Nous devons procéder à une révision complète de notre système fiscal, sans laisser croire que l’on va régler les problèmes budgétaires en s’en prenant à une profession qui dynamise nos territoires ruraux. Il est au contraire à notre honneur de tenir la promesse faite par deux Présidents de la République, ce qui, en période de rupture, n’est pas si courant. (Applaudissements sur les travées de lUMP, ainsi que sur certaines travées de lUnion centriste.)

M. le président. La parole est à M. Hervé Maurey, pour explication de vote.

M. Hervé Maurey. Je suis quelque peu gêné de me sentir plus proche des propos qui viennent d’être tenus que de ceux de certains membres de mon groupe.

Comme l’a fort bien exposé M. Houel, la baisse de la TVA dans le secteur de la restauration a eu une incidence réelle, bien que limitée, sur les prix, l’emploi et l’investissement.

La Cour des comptes estime que cette mesure coûte cher et que l’on pourrait parvenir au même résultat autrement. Pourquoi pas, mais ce que l’on nous propose aujourd’hui, ce n’est pas, par exemple, de procéder à des baisses de charges sociales à cette fin, mais simplement de donner un coup de rabot à la baisse de la TVA accordée à la restauration.

Ce qui me gêne avant tout dans cette affaire, c’est que la mesure en cause a été prise voilà à peine dix-huit mois. Or, dans cet hémicycle, nous sommes très souvent amenés à déplorer l’instabilité des politiques fiscales ! Peut-être faudra-t-il revenir sur cette mesure à l’échéance de trois ans, mais, pour l’heure, cela me paraît tout à fait prématuré.

D’ailleurs, si nous le faisions, cela poserait de réels problèmes aux entreprises qui, se fondant sur la baisse de la TVA, ont embauché ou engagé des investissements. Que penseraient les entrepreneurs qui se sont engagés dans cette voie si, dix-huit mois à peine après la mise en place de la mesure, on leur retirait le tapis de dessous les pieds ?

Par conséquent, je ne voterai pas ces amendements, car nous ne devons pas renier la parole donnée. Je suis évidemment tout à fait d’accord avec le président Arthuis sur la nécessité de réduire nos déficits publics abyssaux, mais, comme il l’a dit lui-même, il convient pour cela de remettre à plat l’ensemble de notre fiscalité. (Applaudissements sur certaines travées de lUnion centriste, ainsi que sur les travées de lUMP.)

M. le président. La parole est à M. Antoine Lefèvre, pour explication de vote.

M. Antoine Lefèvre. Je voudrais remercier M. le ministre d’avoir rappelé le souci d’équité et de justice à l’origine de la mise en place du taux réduit de TVA de 5,5 % dans la restauration. Oui, c’est bien une question de justice et d’équité !

Je souhaite d’ailleurs, à cet instant, revenir sur les propos caricaturaux de notre collègue Jean-Jacques Jégou. Non, monsieur Jégou, les restaurateurs ne sont pas tous des margoulins ou des tricheurs. Ils ne recourent pas tous au travail au noir et ils paient leurs salariés autrement qu’à coups de pied aux fesses !

M. Raffarin l’a souligné, cette profession mérite notre considération et notre écoute, au moment où, comme d’autres secteurs industriels, elle traverse une crise particulièrement difficile.

M. Houel l’a rappelé, nombre de restaurateurs ont joué le jeu du contrat d’avenir, en créant des emplois, en revalorisant les salaires, en mettant en place une mutuelle et en engageant des investissements. Dans ce secteur, les salaires représentent en moyenne entre 40 % et 50 % des coûts des entreprises, ce qui est un taux élevé.

Enfin, il convient de mettre l’accent sur le rôle important que joue ce secteur dans la formation des jeunes, y compris ceux qui sont dépourvus de tout diplôme, notamment grâce à l’apprentissage.

Pour toutes ces raisons, il est nécessaire de maintenir le taux de TVA à 5,5 % pour l’ensemble du secteur de la restauration, qu’elle soit rapide ou traditionnelle, et, surtout, d’aller au terme du contrat d’avenir signé avec la profession. (Applaudissements sur les travées de lUMP, ainsi que sur certaines travées de l’Union centriste.)

M. le président. La parole est à M. Claude Biwer, pour explication de vote.

M. Claude Biwer. J’ai entendu beaucoup de belles vérités ce soir.

Au contraire d’autres catégories sociales ou professionnelles, les hôteliers et restaurateurs comptent peu de représentants dans cet hémicycle pour les défendre. Heureusement, les orateurs qui sont intervenus dans ce débat ont souligné avec beaucoup de bon sens les difficultés qu’ils rencontrent.

On a rappelé que les résultats n’étaient pas au rendez-vous et que les créations d’emplois étaient moins nombreuses que prévu, mais si le bénéfice du taux réduit de TVA n’avait pas été accordé à cette profession, des emplois auraient sans doute disparu et des investissements n’auraient pu être réalisés.

L’analyse fait apparaître l’apport du secteur de la restauration, notamment sur les plans économique et fiscal. Sur ce dernier point, il est encore trop tôt, comme l’a relevé M. le rapporteur général, pour établir un bilan définitif.

Étant l’un des rares restaurateurs que compte cette assemblée, je ne peux qu’applaudir aux propos tenus par nos collègues Jean-Pierre Raffarin, Michel Houel ou Hervé Maurey. Pour vivre concrètement les choses, je sais ce qu’il en est ! À Paris, on peut manger ou boire à n’importe quelle heure du jour ou de la nuit, mais il n’en va pas de même dans mon canton ! En milieu rural, où le risque de s’ennuyer existe, un restaurant est un extraordinaire foyer d’animation.

J’insiste sur le fait que le tourisme constitue l’un des pôles de notre économie, sur lequel la raréfaction des restaurateurs aurait de fortes répercussions. Quand il n’est plus possible de s’asseoir pour boire un verre ou manger, les Français ne sortent plus et les touristes étrangers disparaissent ! Pour être l’élu d’un département limitrophe du Luxembourg, je sais de quoi je parle !

Il me semble que le secteur de la restauration est en train de remonter la pente. Il serait donc tout à fait dommage que, sous prétexte d’équilibre budgétaire, on puisse envisager de porter gravement préjudice à une corporation.

Si l’on veut véritablement donner un nouveau souffle à notre politique économique en touchant à la TVA, il faut avoir le courage de relever son taux pour tous les secteurs ! (Applaudissements sur certaines travées de l’Union centriste, ainsi que sur les travées de lUMP.)

M. le président. La parole est à M. Laurent Béteille, pour explication de vote.

M. Laurent Béteille. Beaucoup de choses ont déjà été dites, aussi m’en tiendrai-je à deux remarques.

En premier lieu, cette baisse de la TVA, longuement attendue, est entrée en vigueur au moment même où la crise est survenue. Il faut en tenir compte : de ce fait, les touristes étrangers sont venus chez nous en moins grand nombre et les consommateurs français ont restreint leurs dépenses. Affirmer que cette mesure n’a pas donné les résultats escomptés est donc profondément injuste, car les restaurateurs ont tout fait, dans un contexte difficile, pour qu’elle profite à leurs clients, à l’emploi, à l’investissement.

En second lieu, nous sommes presque tous d’accord pour estimer qu’il fallait unifier les taux de TVA applicables à la restauration traditionnelle, qui fait l’honneur de notre gastronomie, et à la vente à emporter. Or, aujourd'hui, même les magasins d’alimentation ont une activité de restauration à emporter, souvent difficile à dissocier de leur métier traditionnel. Par conséquent, nous devons mener une réflexion globale sur la TVA, car certaines distinctions ne se justifient plus. Je souhaite pour ma part qu’un même taux de TVA s’applique à l’ensemble du secteur de l’alimentation.

M. le président. La parole est à M. Alain Fouché, pour explication de vote.

M. Alain Fouché. Si l’on invoque la justice fiscale, il conviendrait de s’en prendre à des catégories plus nanties que celle des restaurateurs. Je remercie M. Raffarin d’avoir mené, au côté du Président Chirac, le très long combat pour l’obtention d’un taux réduit de TVA en faveur du secteur de la restauration.

On ne va tout de même pas reprocher aujourd’hui au Gouvernement de tenir les engagements pris !

M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. Et les déficits ?

M. Alain Fouché. Du côté de la restauration, le rapport de M. Houel témoigne que des emplois ont été créés. Il faut en tenir compte.

En outre, nous devons être attentifs à la petite restauration, notamment en milieu rural. Si elle a pu tenir le choc, se maintenir et créer des emplois, c’est grâce à la réduction de la TVA. Il serait scandaleux de changer de politique aujourd'hui : le Gouvernement a raison de tenir le cap. (Applaudissements sur les travées de lUMP, ainsi que sur certaines travées de l’Union centriste.)

M. le président. La parole est à M. le président de la commission des finances.

M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. Je ne voterai pas l’amendement n° I-292, qui vise à rétablir le taux de TVA de 19,6 % pour le secteur de la restauration.

Nous venons d’avoir un débat tout à fait intéressant. Je ne voudrais pas que certains de nos collègues pensent que ceux qui, comme le rapporteur général ou moi-même, ont pris l’initiative de suggérer de retenir un taux de TVA intermédiaire nourrissent une quelconque acrimonie à l’encontre des restaurateurs. Je compte personnellement nombre d’amis dans cette profession, et je tiens devant eux le même discours que dans cette enceinte : notre système ne pourra pas perdurer avec des charges salariales aussi lourdes. Toute augmentation des taux de TVA devrait donc aller de pair avec un allégement des cotisations pesant sur les salaires,…

M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. … afin que nous puissions retrouver de la compétitivité.

Mes chers collègues, ce qui nous attend est d’une rugosité que nous avons peine à imaginer. La situation de nos finances publiques est assez dramatique. Il ne suffit pas d’espérer que la croissance reparte demain d’un coup de baguette magique. Il va falloir retrouver de la compétitivité. Nos efforts, quels qu’ils soient, n’entraîneront pas immédiatement une reprise industrielle sur l’ensemble du territoire national.

Nous devons donc nous préparer psychologiquement à prendre un certain nombre de dispositions qui ne sont pas d’emblée populaires. Il nous faudra faire preuve de beaucoup de pédagogie, en assurant une véritable transparence et une vision globale de nos finances publiques. C’est seulement ainsi que nous pourrons, dans un esprit de justice, avancer dans l’intérêt de tous les Français.

M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. Très bien !

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° I-292.

M. Thierry Foucaud. Le groupe CRC s’abstient !

(L'amendement n'est pas adopté. – Applaudissements sur les travées de lUMP.)

M. le président. La parole est à M. le rapporteur général.

M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. Je voterai l’amendement n° I-415.

J’ai écouté avec grand intérêt l’ensemble des intervenants. Certes, il n’est pas agréable d’être en contradiction avec le groupe politique auquel on appartient, mais c’est une question d’honneur que d’exprimer ses convictions. Je l’ai fait en toute transparence et en toute honnêteté.

Il me semble, mais on ne refera pas le passé, que nous nous porterions mieux aujourd'hui si le gouvernement de l’époque avait ramené le taux de TVA de 19,6 % à 12 % ou à 10 %. Cela aurait déjà constitué un énorme progrès et aurait été très bien accueilli par la profession. Je pense que l’on est allé trop loin en abaissant le taux à 5,5 %, au détriment des finances publiques, et il est naturellement très difficile de revenir en arrière : ce débat l’a prouvé.

Il est vrai que cette réduction de la TVA est entrée en vigueur en pleine crise, ce qui a eu le mérite de permettre à des entreprises de résister, de maintenir des emplois et, probablement, d’en créer.

M. Jean-Pierre Raffarin. Il aurait fallu changer tous les taux réduits !

M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. Absolument !

Le rapport de M. Houel a mis en évidence qu’il existe une dynamique dans cette profession. Même si les chiffres sont toujours sujets à discussion ou à interprétation, cela est incontestable. Cela étant, il est, je le crois, de notre devoir de déterminer le juste taux intermédiaire. Je souligne d’ailleurs que mon amendement visait également certaines prestations dans le secteur du bâtiment.

Je proposais de remonter les taux de façon modérée pour ces deux secteurs, mais ce n’était pas le moment, le message n’est pas bien passé.

M. Jean-Pierre Raffarin. Il y a aussi les produits de première nécessité, monsieur le rapporteur général !

M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. Tout à fait, mon cher collègue, et nous pouvons avancer en ce sens pour l’avenir. De ce point de vue, je suis certain que ce débat n’aura pas été inutile.

Il faut, en effet, éviter de commettre certaines erreurs au regard d’une profession. La maxime « donner et retenir ne vaut » suivie dans d’autres domaines s’applique aussi dans celui-ci.

Pour l’avenir, sans doute faudra-t-il veiller à sauvegarder nos recettes, même si l’amélioration des finances publiques repose plus sur le volet des dépenses fiscales.

Nous rencontrons ici toute l’ambiguïté de nos démarches. La dépense fiscale est-elle dépense ou prélèvement ? Raisonne-t-on en termes de dépenses ou de prélèvements ?

En tout cas, la réflexion sur les taux de TVA a été bien lancée. Il faudra, dans les mois à venir et d’ici aux prochaines échéances, y voit clair.

En effet, ne nous faisons pas d’illusion : ces questions que nous avons posées ce soir se poseront à nouveau et reviendront dans l’actualité. Nous devrons les régler en sortant par le haut et non en revenant sur la parole donnée à des professionnels honnêtes.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° I-415.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos I-150 rectifié et I-247 rectifié bis.

(Les amendements ne sont pas adoptés.)

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° I-293.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° I-294.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° I-295.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. La parole est à M. le président de la commission des finances.

M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. Sans vouloir prolonger le débat sur ce point, je rappelle toutefois qu’il s’est instauré ce matin à propos de la TVA sur le livre numérique et que nous avons voté le taux réduit de 5,5 %.

M. Jacques Legendre, président de la commission de la culture, de l'éducation et de la communication. À juste titre !

M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. En effet, mon cher collègue !

Je rends le Sénat attentif au fait que si nous ne pratiquons pas ce taux réduit à 5,5 %, toute offre de livre numérique quittera le territoire national. Cependant, si nous restons à 5,5 %, nous ne sommes pas au bon niveau de taxe.

C’est dire, monsieur le ministre, l’urgence de convenir d’un taux intermédiaire pour différentes prestations, notamment pour le livre numérique et d’autres prestations qui relèvent de l’économie immatérielle.

M. Jacques Legendre, président de la commission de la culture. Très bien !

M. le président. L'amendement n° I-146, présenté par Mmes Boumediene-Thiery, Blandin et Voynet et MM. Desessard et Muller, est ainsi libellé :

Après l'article 10, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

L'article 1011 bis du code général des impôts est ainsi modifié :

1° Le tableau du III est ainsi rédigé :

«

TAUX D'EMISSIONde dioxyde de carbone(en grammes par kilomètre)

TARIF DE LA TAXE(en euros)

Année d'acquisition

2008

2009

2010

2011

2012

 

Taux ≤ 150

0

0

0

0

0

 

151 ≤ taux ≤ 155

0

0

0

200

200

 

156 ≤ taux ≤ 160

0

0

200

750

750

 

161 ≤ taux ≤ 165

200

200

750

750

1600

 

166 ≤ taux ≤ 190

750

750

750

1600

1600

 

191 ≤ taux ≤ 195

750

750

1600

1600

1600

 

196 ≤ taux ≤ 200

750

750

1600

1600

1600

 

201 ≤ taux ≤ 240

1600

1600

1600

1600

1600

 

241 ≤ taux ≤ 245

1600

1600

1600

2600

2600

 

246 ≤ taux ≤ 250

1600

1600

2600

2600

2600

 

250 < taux 2 600

2600

2600

2600

2600

2600

» ;

2° Le IV est ainsi rédigé :

« IV. - Le produit de la taxe est affectée à l'Agence pour le financement des infrastructures de transport de France, pour le financement de projets de transports collectifs en site propre ou alternatifs à la route et à l'aérien (ferroviaires et voies d'eau). »

La parole est à M. Jean Desessard.