conséquences de l'interprétation de la directive européenne de l'eau (DCE 2000) sur les ouvrages hydrauliques anciens

M. le président. La parole est à Mme Catherine Morin-Desailly, en remplacement de M. François Zocchetto, auteur de la question n° 1161, adressée à Mme la ministre de l'écologie, du développement durable, des transports et du logement.

Mme Catherine Morin-Desailly. Monsieur le président, je souhaite, au nom de mon collègue François Zocchetto qui est malheureusement retenu en région, attirer l’attention du Gouvernement sur la directive européenne connue sous le nom de DCE 2000 et sur les conséquences de l’interprétation de cette directive sur les ouvrages hydrauliques anciens.

L’objectif, au demeurant louable, d’un retour au bon état écologique de nos rivières pour 2015 s’accompagne d’une circulaire ministérielle du 25 janvier 2010, qui désigne l’ensemble des aménagements de nos rivières comme coupables du mauvais état écologique actuel.

Cette analyse paraît un peu rapide et partisane. Elle met en péril les seuils, biefs, moulins et barrages et, par là même, ce qui constitue le patrimoine de nos campagnes.

Si certaines infrastructures peuvent représenter des obstacles à la continuité écologique, il ne faudrait pas qu’une lecture dogmatique de la directive conduise à la suppression systématique de tous les ouvrages au nom d’une idéologie et au détriment de la biodiversité, de l’équilibre hydraulique naturel et de l’identité de nos territoires.

La libre circulation des poissons, l’évacuation des sédiments et la préservation des zones humides sont des objectifs partagés par tous, mais les moyens de les réaliser divergent.

Tirons un enseignement des années soixante-dix, marqués par des remembrements excessifs, voire « sauvages », et des aménagements modernistes de nos barrages. Il ne faudrait pas se laisser imposer une vision unique qui consisterait à appliquer sans distinction aucune un remède identique à tous les ouvrages hydrauliques : la suppression ! S’il est incontestable que certains ouvrages peuvent ou doivent être détruits, d’autres méritent d’être conservés et restaurés.

Enfin, n’oublions pas que les moulins, qui émaillent le territoire français, constituent un potentiel d’énergie renouvelable non négligeable.

Pour toutes ces raisons, M. Zocchetto souhaite savoir si le Gouvernement a bien conscience des conséquences de cette interprétation de la directive et connaître les mesures envisagées.

M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'État.

M. Benoist Apparu, secrétaire d'État auprès de la ministre de l'écologie, du développement durable, des transports et du logement, chargé du logement. Madame la sénatrice, la directive-cadre sur l’eau impose d’appréhender la qualité de l’eau du point de vue non plus seulement chimique, mais également écologique. Cette nouvelle dimension implique une réorientation partielle de la politique de l’eau en France vers une meilleure prise en compte des incidences de nos actions sur la circulation des espèces aquatiques et les transports sédimentaires.

Vous le savez, on estime que les barrages et endiguements seraient responsables de quelque 50 % du risque de ne pas atteindre l’objectif d’un bon état écologique des eaux en 2015. La restauration de la continuité écologique est donc indispensable au respect des objectifs de la directive.

Toutefois, aucune réponse générale de principe, dans un sens comme dans l’autre, ne peut être apportée à la question du maintien ou non des barrages présents dans les rivières.

C’est pourquoi le Gouvernement a lancé, en novembre 2009, le plan national de restauration de la continuité écologique, dont la mise en œuvre progressive et hiérarchisée est encadrée par la circulaire du 25 janvier 2010. Celle-ci fixe les priorités d’intervention, qui sont fondées sur l’enjeu majeur de la protection des cours d’eau notamment pour les grands migrateurs, la réponse aux objectifs et aux programmes de mesures des schémas directeurs d’aménagement et de gestion des eaux, les SDAGE, et les gains écologiques attendus pour l’atteinte du bon état évoqué à l’instant.

Le plan de restauration de la continuité écologique ne saurait être réduit à un plan d’effacement systématique des moulins. Dans l’esprit du Grenelle de l’environnement, la circulaire fixe un objectif de 1 200 ouvrages dont l’influence sur la continuité écologique doit être prioritairement supprimée, soit par un aménagement, soit par un démantèlement d’ici à 2012. Cet objectif est à rapprocher des 60 000 ouvrages recensés sur les cours d’eau métropolitains, dont environ 10 % seulement ont un usage aujourd’hui identifié.

La circulaire ne prône évidemment pas une solution identique pour tous les ouvrages. Elle préconise au contraire des mesures hiérarchisées, concertées, adaptées au cas par cas, et visant en priorité le maintien des ouvrages, notamment lorsqu’ils sont hydroélectriques. L’arasement n’est qu’une solution parmi d’autres, réservée en priorité aux ouvrages abandonnés ou sans usage.

La circulaire insiste également sur l’importance de la prise en charge des opérations de restauration de la continuité écologique à l’échelle d’un cours d’eau par une collectivité publique, facilitant ainsi une approche globale et la conciliation plus adaptée des interventions sur chaque barrage.

Selon les témoignages des élus locaux porteurs de ces opérations, la concertation, l’information, l’écoute des riverains et des propriétaires ont été à chaque fois privilégiées et sont considérées comme indispensables à la réussite de ces projets.

De nombreuses expériences diversifiées en matière de restauration de cours d’eau ont déjà eu lieu. Elles sont toutes détaillées dans un recueil d’expérience sur l’hydromorphologie réalisé par l’Office national de l’eau et des milieux aquatiques, l’ONEMA, et accessible sur le site Internet de ce dernier.

La consultation de ces expériences par les acteurs intéressés devrait apporter des réponses à la plupart des questions qu’ils se posent.

publication du décret relatif à la commission scientifique nationale des collections

M. le président. La parole est à Mme Catherine Morin-Desailly, auteur de la question n° 1156, adressée à M. le ministre de la culture et de la communication.

Mme Catherine Morin-Desailly. Madame le secrétaire d’État, je souhaite attirer votre attention sur le décret permettant la constitution de la commission scientifique nationale des collections, dont nous attendons toujours la publication.

En vertu de la loi du 18 mai 2010 visant à autoriser la restitution par la France des têtes maories à la Nouvelle-Zélande et relative à la gestion des collections – texte d’initiative sénatoriale, voté à l’unanimité –, il est prévu, à l’article 2, que soit installée une commission scientifique nationale des collections. L’objet de cette dernière est de conseiller les personnes publiques ou les personnes privées dans l’exercice de leurs compétences, en matière de déclassement ou de cession de biens culturels appartenant à leurs collections. Pour ce faire, la commission émet des recommandations et donne son avis en la matière.

C’est un décret qui fixe les modalités de fonctionnement ainsi que la composition de cette commission : elle doit comprendre un député et un sénateur, nommés par leur assemblée respective, des représentants de l’État et des collectivités territoriales, des professionnels de la conservation des biens concernés et des personnalités qualifiées.

L’article 4 de ladite loi prévoit par ailleurs que cette commission « remet au Parlement un rapport sur ses orientations en matière de déclassement ou de cession des biens appartenant aux collections, dans un délai d’un an suivant la publication de la présente loi », soit au plus tard en mai 2011.

Cela fait neuf mois que la loi a été adoptée, et, à quelques mois de l’échéance prévue pour la remise du rapport, le décret permettant de constituer cette commission est toujours en attente de publication.

Cet exemple est malheureusement une parfaite illustration du dernier bilan de la mise en application des lois : dans les faits, ces dernières ne font pas l’objet d’un suivi systématique.

Madame le secrétaire d’État, pouvez-vous nous indiquer les mesures que compte prendre le Gouvernement pour que ce décret d’application soit publié et que le rapport prévu soit ainsi remis dans les délais au Parlement ?

M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d'État.

Mme Jeannette Bougrab, secrétaire d'État auprès du ministre de l'éducation nationale, de la jeunesse et de la vie associative, chargée de la jeunesse et de la vie associative. Madame la sénatrice, je vous prie tout d’abord de bien vouloir excuser l’absence de mon collègue Frédéric Mitterrand.

M. le ministre de la culture et de la communication souhaite vous rassurer quant aux intentions du Gouvernement concernant l’application de la loi du 18 mai 2010. Ce texte, dont vous êtes à l’origine avec une proposition de loi comprenant un article unique, visait à permettre le retour en Nouvelle-Zélande des têtes maories conservées dans les collections des musées de France.

Votre proposition a été complétée par Philippe Richert, alors rapporteur pour la commission de la culture du Sénat, de trois autres articles relatifs à la gestion des collections et prévoyant la création d’une commission scientifique nationale des collections compétente en matière de déclassement.

Les services du ministère de la culture et de la communication se sont attelés immédiatement, après la promulgation de la loi, à la rédaction du décret d’application prévu en Conseil d’État. Le projet a fait l’objet d’une concertation interministérielle avec le ministère de l’enseignement supérieur et de la recherche, qui exerce la tutelle sur les muséums d’histoire naturelle, et le ministère de la défense, responsable d’importantes collections nationales dans ses musées.

Le projet de texte a été adressé en novembre 2010 au Conseil d’État, qui l’examine aujourd’hui même. La publication de ce décret au Journal officiel est prévue au plus tard au mois de mars.

Le ministre de la culture et de la communication souhaite installer dès le mois d’avril 2011 la commission scientifique nationale des collections. Cette dernière sera composée de quatre collèges, qui comprendront évidemment les membres élus prévus par la loi ainsi que des professionnels de la conservation, indispensables au caractère scientifique affiché de la nouvelle commission. Le premier collège sera chargé de définir les recommandations prévues au 1° de l’article L. 115-1 du code du patrimoine et de répondre aux questions qui lui sont soumises en application de la même disposition.

Les trois autres collèges examineront des cas concrets, à la lumière des réflexions d’ordre général formulées par le premier collège, et rendront, selon les situations définies par la loi, des avis conformes ou simples sur les propositions de déclassement de biens appartenant aux collections publiques ou de cession des biens des Fonds régionaux d’art contemporain n’appartenant pas au domaine public.

Le rapport, qui sera la première tâche de la commission, est prévu dans un délai d’un an après la promulgation de la loi. Sans préjuger la décision de la commission sur le contenu de ce document, il pourra mettre en perspective les problématiques de déclassement des collections et proposer des orientations et des axes de recherche sur ces enjeux essentiels pour les collections publiques.

M. le président. La parole est à Mme Catherine Morin-Desailly.

Mme Catherine Morin-Desailly. Je tiens à remercier Mme le secrétaire d’État des précisions qu’elle nous a apportées. Je constate que les choses avancent. Néanmoins, pour que nos inquiétudes – je pense notamment à M. Richert, qui a beaucoup travaillé à la rédaction de ces articles additionnels à la proposition de loi initiale – soient dissipées, il est important que cette commission se mette rapidement au travail. Or, d’après les délais indiqués, elle n’aura guère qu’un petit mois pour rédiger le rapport.

conditions d'attribution des prêts du fonds national de revitalisation des territoires

M. le président. La parole est à M. Michel Boutant, auteur de la question n° 1149, adressée à M. le ministre de l'agriculture, de l'alimentation, de la pêche, de la ruralité et de l'aménagement du territoire.

M. Michel Boutant. Madame la secrétaire d’État, cette question est relative aux conditions entourant les prêts du Fonds national de revitalisation des territoires.

Ces prêts concernent des bassins d’emplois dans lesquels les entreprises ont des difficultés à revitaliser le territoire. Il s’agit donc de venir en aide à ces structures afin qu’elles puissent agir dans le sens du dynamisme économique, en somme qu’elles puissent redonner de la vie à des zones géographiques ayant particulièrement souffert.

Des conditions assez strictes encadrent l’obtention de ces prêts. Les bénéficiaires peuvent ainsi être des PME – au moins dix salariés –, des entreprises de moins de 500 salariés – à condition qu’elles ne soient pas détenues par un groupe de plus de 5 000 salariés – ou des entreprises créées par reprise d’actifs, sans reprise de passif, d’établissements de moins de 500 salariés. Il s’agit ensuite, avec le prêt obtenu, de lancer des investissements visant à créer ou à maintenir l’emploi dans l’entreprise.

Le montant du prêt doit être compris entre 100 000 et 1 000 000 euros : c’est là que, d’après les entreprises concernées, dont je me fais le porte-parole, se trouve le cœur du problème. Les deux tiers de la somme empruntée sont garantis par OSEO. Le tiers restant est prêté sans garantie par l’État. Il apparaît clair que la somme minimale prévue pour un prêt, à savoir 100 000 euros, est beaucoup trop élevée pour nombre d’entreprises.

Dans la mesure où ce sont justement les territoires les plus en difficulté qui sont généralement concernés par ces mesures, la plupart des entreprises qui auraient besoin d’un prêt n’ont pas la taille suffisante pour pouvoir prétendre emprunter au moins 100 000 euros.

Aussi, dans l’intérêt des territoires, notamment les plus ruraux, et de leur dynamisme économique, ne serait-il pas possible de revoir les conditions des prêts du Fonds national de revitalisation des territoires, notamment en abaissant le montant de la somme minimale à emprunter ?

M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d'État.

Mme Jeannette Bougrab, secrétaire d'État auprès du ministre de l'éducation nationale, de la jeunesse et de la vie associative, chargée de la jeunesse et de la vie associative. Monsieur le sénateur, je vous prie tout d’abord de bien vouloir excuser l’absence de mon collègue Bruno Le Maire, actuellement en déplacement avec le Président de la République.

La création du Fonds national de revitalisation des territoires vise à accompagner les territoires touchés par des restructurations économiques ne donnant pas lieu à la signature de conventions de revitalisation, par le soutien, sous la forme d’un dispositif de prêts sans garantie, confié à OSEO, des projets de développement, d’extension ou de reprise d’établissement.

Les territoires sont déclarés éligibles au vu de différents éléments économiques et statistiques présentés par les comités de pilotage locaux, concernant notamment les sinistres accumulés ainsi que la situation économique et sociale du territoire.

Le prêt pour la revitalisation des territoires est accordé par OSEO à des entreprises qui doivent répondre à un double critère : un critère de taille, puisqu’il s’agit d’aider des PME dont les effectifs sont compris entre 10 et 500 salariés et n’appartiennent pas à un groupe de plus de 5 000 salariés ; un critère de vitalité, les entreprises éligibles devant bénéficier d’une notation financière satisfaisante ou faible selon la classification de la Commission européenne.

Les projets éligibles doivent viser à créer ou à maintenir de 10 à 500 emplois dans l’entreprise, et le montant minimum du prêt – vous l’avez également rappelé – est de 100 000 euros.

Le cofinancement peut prendre la forme de prêts bancaires, de crédits-bails ou d’interventions en capital-risque.

Ces seuils ont été fixés, car l’objet du dispositif est de contribuer à la création d’un nombre d’emplois équivalent à celui que les entreprises ont supprimé. Même si tout emploi créé est important, l’objectif est bien de procéder à une revitalisation significative et relativement rapide des territoires concernés, ce qui implique donc de concentrer l’effort sur les projets les plus riches en emplois.

Concernant les territoires les plus en difficulté ou les zones rurales que vous évoquez, s’il est vrai que ce problème des seuils a pu être signalé, M. Bruno Le Maire relève que, dans la majorité des cas, la totalité des fonds qui leur avaient été alloués ont finalement été consommés.

Les prêts du Fonds national de revitalisation des territoires faisant l’objet d’une consommation très satisfaisante – 100,5 millions d’euros d’enveloppes allouées à 62 territoires à ce jour, sur un total de 135 millions d’euros qui doivent être attribués jusqu’en mars 2012 –, il n’est pas envisagé d’en modifier les critères.

Le comité stratégique d’orientation du 14 janvier 2011 a cependant prévu de procéder à une évaluation du Fonds national de revitalisation des territoires au cours du premier semestre 2011.

M. le président. La parole est à M. Michel Boutant.

M. Michel Boutant. Nous attendons effectivement de ce comité d’évaluation une analyse de la consommation. J’ai bien entendu les chiffres que vous venez de nous indiquer à l’instant, madame la secrétaire d’État : 100,5 millions d’euros sur 135 millions d’euros. J’attire particulièrement votre attention sur le fait qu’il s’agit d’un milieu rural où les industries sont en crise, et que la demande présentée émane non pas des hommes politiques, mais des chefs d’entreprise, des industriels et des artisans. Selon eux, on pourrait faire beaucoup plus encore en diminuant un peu le plafond du prêt, par exemple en le ramenant de 100 000 à 50 000 euros.

identification de la provenance des jouets en bois

M. le président. La parole est à M. Gérard Bailly, auteur de la question n° 1128, adressée à Mme la ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.

M. Gérard Bailly. Je souhaite attirer l’attention de Mme la ministre de l’économie, des finances et de l’industrie sur l’identification de la provenance des jouets en bois.

Le Jura est le premier département français par l’importance de sa production de jouets, principale production par le passé.

Actuellement, après une chute importante due aux concurrences des pays asiatiques et d’Europe de l’Est, cette production retrouve une certaine attention et la confiance des acheteurs qui recherchent la qualité et la sécurité, critères de choix lorsqu’il s’agit de nos enfants. Je constate d’ailleurs que la presse se fait régulièrement l’écho d’accidents survenus avec des jouets, et qu’il s’agit souvent d’objets importés.

Aujourd’hui, le marquage d’origine d’un produit revêt un caractère purement volontaire. Son application est laissée à l’appréciation des inspecteurs de la Direction départementale de la cohésion sociale et de la protection des populations, la DDCSPP, l’ex-Direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes, ou DGCCRF. En pratique, « l’analyse de la DDCSPP s’effectue au cas par cas, en examinant le produit et le discours commercial qui l’accompagne, pris dans sa globalité, afin d’y vérifier l’absence d’allégations trompeuses ou confusionnelles, qui tendraient à leurrer le consommateur quant au lieu de réalisation des opérations de fabrication ».

Cette démarche est louable, mais ce règlement est à l’origine de quelques incohérences : un certain nombre de fabricants du Jura – la problématique doit toutefois être la même dans les autres régions de France où l’on fabrique des jouets – sont également importateurs et commercialisent donc deux types de produits : des jouets made in Jura et des jouets importés. Pour ne pas tromper le consommateur final, qui pourrait penser que tous les jouets de cette boutique sont d’origine française, la DDCSPP impose le marquage « importé » sur les produits concernés. Or, ces mêmes jouets importés peuvent être commercialisés dans d’autres boutiques ou d’autres régions sans que la mention « importé » soit exigée ; mieux, ce dispositif peut même être utilisé de façon pernicieuse : certaines grandes marques françaises de jouets réputées uniquement importatrices, et connues comme telles au sein de la profession et de l’administration, commercialisent en toute légalité des jouets sans marquage du pays d’origine, mais sur lesquels figure l’adresse de leur siège social en France. Un consommateur non averti pourra donc se laisser abuser en pensant que ces objets sont fabriqués sur notre territoire national.

Partant de ce constat, je considère comme souhaitable que la mention « importé » figure sur chaque jouet, avec son pays d’origine, qu’il soit commercialisé par un fabricant implanté sur notre territoire, dans ses boutiques, avec ses propres productions, ou qu’il soit vendu dans tout autre magasin.

Cette transparence, souhaitée par les consommateurs, semble indispensable, mais ne doit pas devenir un handicap pour les fabricants de jouets qui commercialisent, pour partie, des jouets importés.

Mme la ministre de l’économie, des finances et de l’industrie ne considère-t-elle pas que cette obligation d’identification du pays de fabrication devrait devenir obligatoire à court terme, quel que soit le lieu ou le système de vente ? C’est l’avenir de notre filière française qui est en jeu.

M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'État.

M. Frédéric Lefebvre, secrétaire d'État auprès de la ministre de l'économie, des finances et de l'industrie, chargé du commerce, de l'artisanat, des petites et moyennes entreprises, du tourisme, des services, des professions libérales et de la consommation. Monsieur le sénateur, j’ai écouté vos propos avec beaucoup d’attention, d’autant que, comme vous le savez, le Gouvernement se bat pour améliorer l’information relative à l’origine des produits, qu’ils soient alimentaires ou non. Yves Jégo a d’ailleurs rendu un rapport sur cette question du made in France, et des initiatives ont également été prises au Parlement, à l’Assemblée nationale comme au Sénat.

Je crois toutefois utile de vous rappeler la réglementation actuelle. Le décret du 12 septembre 1989, qui s’applique jusqu’au 20 juillet 2011, impose d’indiquer sur le jouet, selon le cas, les coordonnées du fabricant, du mandataire ou de l’importateur. Évidemment, comme vous l’avez souligné, monsieur le sénateur, cette mention peut être source d’incertitude pour le consommateur.

En application de la future réglementation, à savoir le décret du 22 février 2010 relatif à la sécurité des jouets, lequel entrera en vigueur à compter du 20 juillet 2011, et notamment ses articles 11 et 13, figureront désormais sur le jouet le nom et l’adresse du fabricant, ainsi que le nom et l’adresse de l’importateur. Le consommateur sera donc informé plus clairement du lieu d’origine des produits.

Toutefois, dans le cas de figure où un importateur, voire un distributeur, vendrait un jouet sous son nom ou sa marque propre, l’article 15 du même décret admet que le nom et l’adresse du fabricant puissent ne pas figurer sur le jouet ou sur son étiquetage.

Dans ce cas, l’importateur ou le distributeur concerné sera considéré comme le fabricant légal du jouet et, à ce titre, devra en assumer toutes les responsabilités, notamment en matière de sécurité, ce qui n’était pas le cas jusqu’à présent.

De manière plus générale, si le code de la consommation prévoit qu’aucune indication d’origine ou autre mention ne doit être de nature à induire le consommateur en erreur sur l’origine réelle d’une marchandise, il n’impose pas, en revanche, que soit apposée la mention « importé ».

En tout état de cause, notre pays ne pourrait pas décider unilatéralement de rendre obligatoire une telle information, puisque la mention de l’origine des produits, notamment des jouets, relève de la compétence communautaire.

Si notre démarche s’inscrit dans la même logique que la vôtre, monsieur le sénateur, nous avons choisi d’aborder le problème d’une autre manière. Au lieu de faire figurer systématiquement la mention « importé » sur les produits étrangers – nous ne pouvons imposer cette mention, je le répète, puisque c’est une compétence communautaire –, nous préférons valoriser, en les identifiant, les produits français. Les consommateurs pourront ainsi, de manière positive, repérer les produits qui ont été fabriqués dans notre pays.

Comme vous l’aurez compris, monsieur le sénateur, le Gouvernement procède en deux temps : il fait tout d’abord évoluer la réglementation dans un sens plus protecteur, en renforçant l’obligation d’identification de l’importateur – son nom et son adresse figureront sur le jouet – ainsi que la responsabilité de ce dernier ; il cherche ensuite à valoriser l’origine « France » : nous travaillons actuellement sur cette question et je prendrai, le moment venu, des initiatives.

M. le président. La parole est à M. Gérard Bailly.

M. Gérard Bailly. Je vous remercie de votre réponse, monsieur le secrétaire d’État. Votre action va évidemment dans le bon sens, et les fabricants de jouets se réjouiront sans doute de l’évolution réglementaire qui interviendra au mois de juillet.

Je suis bien sûr conscient des contraintes imposées par la réglementation européenne. Néanmoins, l’idéal serait quand même, à mon avis, que le consommateur puisse, pour chaque produit, savoir où celui-ci a été fabriqué.

Tout en vous félicitant pour vos nouvelles responsabilités et en vous remerciant de votre action, monsieur le secrétaire d’État, je vous demande donc d’être particulièrement attentif au problème de l’identification du made in France, car nous avons tous intérêt à ce que nos productions soient valorisées.