M. Guy Fischer. Eh oui !

M. le président. L'amendement n° 262, présenté par M. Desessard et Mmes Blandin, Boumediene-Thiery et Voynet, est ainsi libellé :

Alinéa 77

Supprimer les mots :

pendant lequel un protocole de soins peut être établi en application du 2° de l’article L. 3211-2-1

Cet amendement n’est pas soutenu.

L'amendement n° 487, présenté par M. Lorrain, au nom de la commission des affaires sociales, est ainsi libellé :

Alinéa 77

Remplacer le mot :

protocole

par le mot :

programme

La parole est à M. le rapporteur.

M. Jean-Louis Lorrain, rapporteur. Il s’agit d’un amendement de cohérence.

M. le président. L'amendement n° 132, présenté par M. Le Menn, Mme Demontès, MM. Michel, Desessard, Kerdraon et Cazeau, Mmes Le Texier et Schillinger, M. Jeannerot, Mmes Alquier et Campion, M. Daudigny, Mme Ghali, MM. Gillot et Godefroy, Mme Jarraud-Vergnolle, M. S. Larcher, Mmes Printz et San Vicente-Baudrin, M. Teulade et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :

Alinéa 86, seconde phrase

Rédiger ainsi cette phrase :

Le présent alinéa n’est pas applicable aux personnes dont l’hospitalisation, ordonnée en application des articles L. 3213-7 du présent code ou 706-35 du code de procédure pénale ou dans une unité pour malades difficiles, a pris fin depuis dix ans au moins.

La parole est à M. Jacky Le Menn.

M. Jacky Le Menn. Il s’agit d’un amendement de coordination.

M. le président. L'amendement n° 135, présenté par M. Le Menn, Mme Demontès, MM. Michel, Desessard, Kerdraon et Cazeau, Mmes Le Texier et Schillinger, M. Jeannerot, Mmes Alquier et Campion, M. Daudigny, Mme Ghali, MM. Gillot et Godefroy, Mme Jarraud-Vergnolle, M. S. Larcher, Mmes Printz et San Vicente-Baudrin, M. Teulade et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :

Alinéa 89, seconde phrase

Rédiger ainsi cette phrase :

Le présent alinéa n’est pas applicable aux personnes dont l’hospitalisation, ordonnée en application des articles L. 3213-7 du présent code ou 706-35 du code de procédure pénale ou dans une unité pour malades difficiles, a pris fin depuis au moins dix ans.

La parole est à M. Jacky Le Menn.

M. Jacky Le Menn. Il s’agit également d’un amendement de coordination.

M. le président. L'amendement n° 59, présenté par M. Fischer, Mmes David et Pasquet, M. Autain, Mme Hoarau et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche, est ainsi libellé :

Alinéa 83

Supprimer cet alinéa.

La parole est à M. Guy Fischer.

M. Guy Fischer. L’alinéa 83, que nous proposons de supprimer, prévoit que l’expertise rendue par l’avis de deux psychiatres ouvre un nouveau délai de quatorze jours au plus avant que le juge des libertés et de la détention ne rende sa décision.

Ce délai est cumulable avec celui qui est prévu au 1°, c’est-à-dire à l’alinéa 80, qui pose le principe de l’intervention de ce même juge avant que ne se soit écoulé un délai maximal de quinze jours.

Il résulte de la juxtaposition de ces deux alinéas qu’un patient pourrait être hospitalisé contre son gré durant vingt-neuf jours au maximum, sans que le juge des libertés se soit prononcé sur l’opportunité ou non de lever la mesure de soins sans consentement imposée au patient.

De fait, le délai d’intervention de quinze jours défini par les juges du Conseil constitutionnel est largement dépassé, puisqu’il peut être doublé.

Nous nous opposons à cette disposition, qui aura pour conséquence de prolonger des mesures de privation de liberté de manière non conforme au principe toujours recherché d’une intervention dans les plus brefs délais du juge des libertés et de la détention. Nous considérons que cette expertise doit donc impérativement être diligentée et réalisée dans un délai n’excédant pas quatorze jours après que la mesure privative de liberté a été prononcée.

M. le président. Les amendements nos 62, 138 et 465 rectifié sont identiques.

L'amendement n° 62 est présenté par M. Fischer, Mmes David et Pasquet, M. Autain, Mme Hoarau et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche.

L'amendement n° 138 est présenté par MM. Michel et Le Menn, Mme Demontès, MM. Desessard, Kerdraon et Cazeau, Mmes Le Texier et Schillinger, M. Jeannerot, Mmes Alquier et Campion, M. Daudigny, Mme Ghali, MM. Gillot et Godefroy, Mme Jarraud-Vergnolle, M. S. Larcher, Mmes Printz et San Vicente-Baudrin, M. Teulade et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés.

L'amendement n° 465 rectifié est présenté par MM. Mézard et Barbier, Mme Escoffier, MM. Collin, Alfonsi, Baylet et Fortassin, Mme Laborde et MM. Milhau, Plancade, Tropeano, Vall et Vendasi.

Ces trois amendements sont ainsi libellés :

Alinéa 94

Supprimer cet alinéa.

La parole est à Mme Marie-Agnès Labarre, pour présenter l’amendement n° 62.

Mme Marie-Agnès Labarre. Par cet amendement, nous souhaitons modifier ce projet de loi, afin de le rendre applicable sur le terrain. Il s’agit de prendre en compte la nature particulière des troubles dont sont atteintes les personnes mentionnées dans ce texte.

Si l’application de nombreux points pose problème, ce sont les modalités de l’audition, par le juge des libertés et de la détention, du malade hospitalisé sans son consentement qui nous semblent particulièrement aberrantes.

En approuvant la mise en place de la « télé-audience », le législateur ferait preuve d’une totale méconnaissance des cas traités dans les hôpitaux psychiatriques. Or, une fois de plus, nous examinons un texte de loi qui se borne à aborder les maladies mentales comme des maladies physiques. Il est difficile d’imaginer un patient victime d’un délire de persécution ou d’un délire mystique se plier à une telle farce ! On lui demande en effet d’accepter un scenario l’obligeant à parler à une caméra ou à discuter avec un écran.

Au-delà des probables problèmes relatifs à son application, ce dispositif pourrait produire des effets négatifs sur l’état de santé du patient. On peut prévoir les effets anxiogènes qu’auront de telles mesures. Car non seulement on sort le patient du cadre des soins, mais on le place également dans une situation où la technique prend le pas sur l’humain.

Aussi, mes chers collègues, nous vous prions de reconsidérer les dégâts qu’entraînerait cette mesure sur la santé de nos concitoyens. Réintroduisons l’humain dans la médecine psychiatrique, sur le plan tant des traitements que des formalités administratives et judiciaires !

Bien que nous n’approuvions pas les modalités d’intervention du juge des libertés et de la détention, nous nous devons de vous proposer des solutions qui protégeront le malade. C’est la raison pour laquelle nous vous demandons d’adopter cet amendement visant à supprimer l’alinéa 94 de l’article 1er.

M. le président. La parole est à Mme Raymonde Le Texier, pour présenter l'amendement n° 138.

Mme Raymonde Le Texier. L’alinéa 94 de l’article 1er vise à offrir la possibilité de recourir à la visioconférence pour le déroulement de l’audience : « Après que le directeur de l’établissement d’accueil s’est assuré de l’absence d’opposition du patient, le juge des libertés et de la détention peut décider que l’audience se déroule dans une salle d’audience reliée par un moyen de télécommunication audiovisuelle à une salle située dans l’établissement […] ».

À titre liminaire, il convient de rappeler que la non-comparution devant le juge doit rester l’exception, comme le rappelle l’étude d’impact datant de janvier 2011.

Le Conseil d’État a estimé que la seule nécessité de réduire les coûts et les contraintes des services inhérents au transfèrement des patients devant le juge des libertés et de la détention ne pouvait justifier qu’il soit porté atteinte au droit de ces derniers de comparaître personnellement. Or l’étude d’impact précitée prévoit le recours à la visioconférence dans 75 % des cas, ce qui est excessif et contraire à la jurisprudence du Conseil d’État, en l’espèce protectrice des droits du patient.

En outre, d’un point de vue matériel, la visioconférence rend difficile, voire impossible, le dialogue entre le juge et le patient. Le recours à cette pratique peut exacerber l’incompréhension et la tension et, in fine, peser directement sur la décision du juge. En d’autres termes, le jugement sur la personne atteinte de troubles psychiatriques pourrait être fortement altéré par cette pratique susceptible d’engendrer des quiproquos.

Par ailleurs, n’oublions pas que l’objectif prioritaire dans le cadre des soins psychiatriques sans consentement devrait être la guérison du malade et non pas le maintien de l’ordre public, option retenue par ce gouvernement excessivement sécuritaire. Or le recours à la visioconférence peut se révéler malvenu, inadapté et dangereux pour la santé des personnes souffrant de troubles mentaux.

À titre d’exemple, sachez que certains patients peuvent être atteints de paranoïa et avoir un rapport particulier, déformé, avec la vidéo et les caméras. Par conséquent, la pratique de la visioconférence peut être en totale contradiction avec le traitement sanitaire prévu par l’équipe médicale ; elle peut nuire à la santé des personnes victimes de troubles mentaux, en aggravant leur pathologie.

Pour ces motifs d’ordre à la fois curatif, juridique et matériel, nous proposons de supprimer le recours à la visioconférence.

M. le président. La parole est à Mme Anne-Marie Escoffier, pour présenter l'amendement n° 465 rectifié.

Mme Anne-Marie Escoffier. À l’instar de nos collègues du groupe CRC-SPG et du groupe socialiste, nous souhaitons supprimer l’alinéa 94 de l’article 1er, qui vise à offrir la possibilité de recourir à la visioconférence.

Cette disposition, si elle était retenue, reviendrait tout simplement à méconnaître la nature particulière des troubles présentés par ces malades ainsi que leur situation de détresse et d’instabilité. Nous avons déjà exprimé, lors de l’examen d’autres textes, notre opposition à cette pratique, qui pose plus de problèmes qu’elle n’en résout.

Ainsi, le dialogue entre le juge et le patient sera rendu difficile, sinon impossible.

En outre, le problème de la place de l’avocat va se poser. Ne pouvant se trouver à la fois au tribunal et auprès de son client, celui-ci ne pourra exercer correctement sa fonction. Or sa place est auprès de son client.

Soyons réalistes, le recours à la visioconférence, procédure complexe encore très méconnue des juridictions, soulèvera des difficultés dans la tenue des auditions.

L’effectivité même du recours devant le juge étant compromise, cet amendement vise donc à supprimer cette faculté.

M. le président. L'amendement n° 279 rectifié, présenté par M. Desessard et Mmes Blandin, Boumediene-Thiery et Voynet, est ainsi libellé :

Alinéa 94

Rédiger ainsi cet alinéa :

« Lorsque la personne faisant l'objet de soins psychiatriques assiste à l'audience, celle-ci se déroule dans une salle située dans son établissement d'accueil, dans des conditions fixées par décret en Conseil d'État.

Cet amendement n'est pas soutenu.

L'amendement n° 466 rectifié, présenté par MM. Barbier et Mézard, Mme Escoffier, MM. Collin, Alfonsi, Baylet et Fortassin, Mme Laborde et MM. Milhau, Plancade, Tropeano, Vall et Vendasi, est ainsi libellé :

Alinéa 94

Rédiger ainsi cet alinéa :

« Le juge des libertés et de la détention statue au siège du tribunal de grande instance. Toutefois, si une salle d'audience a été spécialement aménagée sur l'emprise de l’établissement d’accueil pour assurer la clarté, la sécurité et la sincérité des débats et permettre au juge de statuer publiquement, il peut statuer dans cette salle. »

La parole est à Mme Anne-Marie Escoffier.

Mme Anne-Marie Escoffier. Il s’agit d’un amendement de repli, qui vise à ce que l’audience puisse se tenir dans une salle aménagée à cet effet au sein de l’établissement, et donc sans dispositif de visioconférence.

Cette pratique est utilisée dans d’autres pays, comme la Belgique, la Suède ou les Pays-Bas.

Elle soulève, certes, la question des moyens accordés à l’hôpital, mais elle a le mérite, par rapport à la visioconférence, de garantir un accès au juge et un véritable dialogue, dans le cadre d’un véritable face-à-face. Elle permet également de pallier certaines difficultés en termes d’accompagnement et de transfert des malades au tribunal, tant il est vrai que la mission des infirmières est de soigner les malades et non d’attendre dans un tribunal.

M. le président. L'amendement n° 14 rectifié, présenté par M. Lecerf, au nom de la commission des lois, est ainsi libellé :

Alinéa 94, première et deuxième phrases

Remplacer ces phrases par six alinéas ainsi rédigés :

« Le juge des libertés et de la détention statue au siège du tribunal de grande instance. Toutefois, si une salle d'audience a été spécialement aménagée sur l'emprise de l’établissement d’accueil pour assurer la clarté, la sécurité et la sincérité des débats et permettre au juge de statuer publiquement, celui-ci peut décider de statuer dans cette salle.

« Lorsque le juge des libertés et de la détention décide de statuer dans cette salle, le président du tribunal de grande instance peut, en cas de nécessité, autoriser qu'une seconde audience soit tenue le même jour au siège du tribunal de grande instance

« Le juge des libertés et de la détention peut également décider que l’audience se déroule dans la salle d'audience mentionnée au troisième alinéa du présent article avec l'utilisation de moyens de télécommunication audiovisuelle dans les conditions prévues par l’article L. 111-12 du code de l’organisation judiciaire lorsque les conditions suivantes sont réunies :

« 1° Un avis médical a attesté que l'état mental de la personne ne fait pas obstacle à ce procédé ;

« 2° Le directeur de l'établissement d'accueil s'est assuré de l’absence d’opposition du patient ;

« Il est alors dressé, dans chacune des deux salles d’audience ouvertes au public, un procès-verbal des opérations effectuées.

La parole est à M. le rapporteur pour avis.

M. Jean-René Lecerf, rapporteur pour avis. Cet amendement, dont l’objet est double, reprend un certain nombre des préoccupations qui viennent d’être exprimées tant par Mme Le Texier que par Mme Escoffier.

Tout d’abord, il s’agit de prévoir que, si une salle d'audience a été spécialement aménagée sur l'emprise de l’hôpital psychiatrique pour assurer la clarté, la sécurité et la sincérité des débats et permettre au juge de statuer publiquement, celui-ci peut statuer dans cette salle. Cet aménagement spécial, qui peut être sommaire – il suffit de prévoir l’accessibilité du lieu par le public, une signalétique adaptée et l’affichage du rôle à l'entrée de la salle –, est essentiel pour garantir que la salle est clairement identifiée en tant que lieu de justice.

Ensuite, l'amendement vise à encadrer et non à interdire le recours à la visioconférence.

En premier lieu, il tend à préciser que la visioconférence n'est possible que si l'hôpital psychiatrique a spécialement aménagé, en son sein, une salle d'audience, dans le respect des conditions que je viens d’évoquer. Autrement dit, que le juge soit physiquement présent dans cette salle ou qu'il intervienne à distance depuis le palais de justice, les exigences portant sur l'aménagement des lieux doivent être identiques.

En second lieu, l’amendement vise à prévoir que le juge des libertés et de la détention ne peut décider que l’audience se déroule par visioconférence que si un avis médical a attesté que l'état mental de la personne n'y fait pas obstacle. En conséquence, la personne doit être capable d’exprimer son opposition à ce procédé, conformément aux dispositions prévues par le projet de loi. Cet avis médical ne sera pas nécessairement réservé à cette procédure : il pourrait ainsi n'être qu'une mention de l'avis conjoint rendu par deux psychiatres qui accompagne la saisine du juge dans le cadre du recours de plein droit.

Aux yeux de la commission des lois, ce dispositif se justifie par le fait, d’une part, que les personnes atteintes de troubles mentaux pourraient être dans l’incapacité de comprendre les enjeux et le sens de la visioconférence et, d’autre part – situation encore pire ! –, que la présence d’un écran et d'une caméra pourrait aggraver les troubles, notamment des personnes schizophrènes ou paranoïaques.

En outre, si la visioconférence, telle qu'elle est pratiquée aujourd'hui, par exemple en matière pénale, ne pose pas de difficultés techniques particulières, certains défauts mineurs – voix légèrement déformée, échos, coupures, décalages de sons – pourraient prendre, chez certains patients, des proportions considérables et altérer l’échange avec le magistrat.

Connaissant relativement bien l’univers carcéral, je peux témoigner de la peur panique que rencontrent un certain nombre de détenus face à ce type de dispositif, lequel contribue à altérer leur discernement.

M. Guy Fischer. Eh oui !

M. Jean-René Lecerf, rapporteur pour avis. Il appartiendra ainsi au médecin d’évaluer, en fonction de l’état du patient, si les inconvénients de la visioconférence, qui ne permet pas un échange direct, humain, entre le juge et le justiciable, sont ou non contrebalancés par ceux d’un transport au palais de justice et d’une présentation devant le juge, lesquels peuvent constituer des expériences stigmatisantes, voire traumatisantes, surtout lorsqu’ils occasionnent des temps d’attente relativement longs.

M. le président. L'amendement n° 63, présenté par M. Fischer, Mmes David et Pasquet, M. Autain, Mme Hoarau et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche, est ainsi libellé :

Alinéa 94, première phrase

Remplacer les mots :

de l'absence d'opposition du patient

par les mots :

par écrit, de l’accord du patient

La parole est à Mme Annie David.

Mme Annie David. Avec cet amendement de repli par rapport à l’amendement n° 62 tendant à supprimer l’alinéa 94, il sera à nouveau question de visioconférence. En écoutant les différentes interventions, on mesure en effet à quel point un tel dispositif est loin de faire l’unanimité.

Pour notre part, nous sommes très réservés sur une mesure destinée, on le voit bien, à effacer le caractère irréalisable de ce projet de loi, à savoir l’intervention du juge des libertés et de la détention, à laquelle vous ne pouviez déroger compte tenu de la décision rendue par le Conseil constitutionnel.

Appliquée dans des conditions normales, cette mesure devrait entraîner la création massive de juges des libertés et de la détention et d’auxiliaires de justice, ce que vous vous interdisez pour respecter une doctrine fondée sur la rigueur budgétaire. Et ce ne sont pas les promesses faites hier soir par Mme la secrétaire d’État au sujet d’un plan santé qui peuvent nous rassurer ! Aussi avez-vous eu l’idée d’une « télé-audience », oubliant que celle-ci ferait également naître des difficultés financières importantes, puisqu’il faudra équiper en matériel les établissements psychiatriques.

Mais surtout, si nous sommes opposés à cette mesure, c’est parce que nous considérons que sa mise en œuvre pourrait avoir des effets inappropriés sur des personnes souffrant de pathologies lourdes, caractérisées parfois par un délire de persécution. M. le rapporteur pour avis vient d’ailleurs de témoigner de son expérience en la matière.

Il n’est pas acceptable d’appliquer à des personnes malades un accès au droit dérogatoire du droit commun à des fins économiques. Il aurait sans doute été préférable de prévoir un mécanisme de déplacement du juge des libertés et de la détention au plus près des malades, ce qui aurait été plus juste au regard des pathologies qui affectent ces derniers.

Pour ne pas tomber sous le coup de l’article 40 de la Constitution, cet amendement se limite à prévoir que la « télé-audience » ne peut être réalisée qu’avec l’accord écrit du patient, ce qui est à la fois gage du respect de sa volonté et mécanisme de preuve pour les équipes soignantes.

M. le président. L'amendement n° 15, présenté par M. Lecerf, au nom de la commission des lois, est ainsi libellé :

Alinéa 94, troisième à dernière phrases

Remplacer ces phrases par deux phrases ainsi rédigées :

Si le patient est assisté par un avocat, celui-ci se tient auprès de l'intéressé. Une copie de l'intégralité du dossier est mise à sa disposition dans les locaux de l'établissement, sauf si une copie de ce dossier lui a déjà été remise.

La parole est à M. le rapporteur pour avis.

M. Jean-René Lecerf, rapporteur pour avis. Cet amendement vise à prévoir un nouvel encadrement du recours à la visioconférence.

Si le patient est assisté par un avocat, celui-ci ne peut se tenir qu'auprès de l'intéressé. Est ainsi supprimée la faculté reconnue à l'avocat de se trouver auprès du magistrat. Aux yeux de la commission des lois, cette possibilité était incompatible avec le contact humain qui doit s'établir, lors d'une audience, entre un avocat et son client, lorsque ce dernier souffre de troubles mentaux.

Je me dois cependant de vous dire, mes chers collègues, que cet amendement, qui, dans un premier temps, avait été accepté par le Conseil national des barreaux, a suscité, dans un deuxième temps, des regrets de la part de ce même conseil, lequel estime, certes, préférable une proximité immédiate entre l’avocat et son client, mais préfère qu’une certaine souplesse soit retenue en la matière. J’entendrai donc avec beaucoup d’intérêt l’avis du Gouvernement sur cette question.

M. le président. L'amendement n° 16, présenté par M. Lecerf, au nom de la commission des lois, est ainsi libellé :

Alinéa 95

Rédiger ainsi cet alinéa :

« Art. L. 3211-12-3. – Le juge des libertés et de la détention, saisi concomitamment en application des articles L. 3211-12, L. 3211-12-1, L. 3211-12-1-1, du dernier alinéa du II de l'article L. 3213-1 ou du IV de l'article L. 3213-3, peut statuer par une même décision suivant la procédure prévue à l’article L. 3211-12-1.

La parole est à M. le rapporteur pour avis.

M. Jean-René Lecerf, rapporteur pour avis. Il s’agit d’un amendement de coordination avec des dispositions figurant à l’article 3. Si celles-ci étaient adoptées, je vous propose, mes chers collègues de laisser à l’Assemblée nationale le soin de satisfaire aux nécessités de la coordination.

Je retire donc cet amendement.

M. le président. L’amendement n° 16 est retiré.

L'amendement n° 17, présenté par M. Lecerf, au nom de la commission des lois, est ainsi libellé :

Alinéa 96

Remplacer cet alinéa par deux alinéas ainsi rédigés :

« Art. L. 3211-12-4. - L'ordonnance du juge des libertés et de la détention prise en application des articles L. 3211-12, L. 3211-12-1 ou L. 3211-12-1-1 est susceptible d'appel devant le premier président de la cour d'appel ou son délégué. Le débat est tenu selon les modalités prévues par l'article L. 3211-12-2.

« L'appel formé à l’encontre de l’ordonnance mentionnée à l’alinéa précédent n'est pas suspensif. Le premier président de la cour d'appel ou son délégué statue alors à bref délai dans les conditions définies par décret en Conseil d’État.

La parole est à M. le rapporteur pour avis.

M. Jean-René Lecerf, rapporteur pour avis. Il s’agit d’un amendement de clarification.

M. le président. Les amendements nos 64, 139 et 467 rectifié sont identiques.

L'amendement n° 64 est présenté par M. Fischer, Mmes David et Pasquet, M. Autain, Mme Hoarau et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche.

L'amendement n° 139 est présenté par Mme Demontès, MM. Le Menn, Michel, Desessard, Kerdraon et Cazeau, Mmes Le Texier et Schillinger, M. Jeannerot, Mmes Alquier et Campion, M. Daudigny, Mme Ghali, MM. Gillot et Godefroy, Mme Jarraud-Vergnolle, M. S. Larcher, Mmes Printz et San Vicente-Baudrin, M. Teulade et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés.

L'amendement n° 467 rectifié est présenté par M. Mézard, Mme Escoffier, MM. Collin, Alfonsi, Baylet et Fortassin, Mme Laborde et MM. Milhau, Plancade, Tropeano, Vall et Vendasi.

Ces trois amendements sont ainsi libellés :

Alinéas 97 et 98

Supprimer ces alinéas.

La parole est à Mme Nicole Borvo Cohen-Seat, pour présenter l’amendement n° 64.

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Le Conseil constitutionnel a décidé que le juge des libertés et de la détention, gardien des droits fondamentaux, devait intervenir avant l’expiration d’un délai de quinze jours pour statuer sur le bien-fondé d’une mesure d’hospitalisation sans consentement.

Nous avons déjà dit que nous jugions cette intervention bien tardive.

Reste que vous avez été contraints de la prévoir, car vous n’en vouliez pas. En effet, le fait que le juge des libertés et de la détention rende sa décision au bout de quinze jours, après une expertise psychiatrique, vous fait peur. La preuve que vous vous en méfiez : vous avez prévu la possibilité que cette décision fasse l’objet d’un recours.

Certes, toute décision doit être susceptible de recours. Mais le recours introduit par le procureur de la République revêt ici un caractère suspensif.

Vous considérez que les psychiatres, puis le juge des libertés et de la détention risquent fort de se tromper et que, à l’inverse, le procureur de la République est à même d’apprécier l’état pathologique du patient au terme d’une hospitalisation d’une durée de quinze jours.

Faire peser un tel soupçon sur la capacité du juge des libertés et de la détention à prendre la décision appropriée, après l’avis des psychiatres, est inacceptable. Il est surtout anormal, et contraire à l’esprit de la décision du Conseil constitutionnel, que le recours du procureur revête un caractère suspensif.

M. le président. L'amendement n° 139, présenté par Mme Demontès, MM. Le Menn, Michel, Desessard, Kerdraon et Cazeau, Mmes Le Texier et Schillinger, M. Jeannerot, Mmes Alquier et Campion, M. Daudigny, Mme Ghali, MM. Gillot et Godefroy, Mme Jarraud-Vergnolle, M. S. Larcher, Mmes Printz et San Vicente-Baudrin, M. Teulade et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :

Alinéas 97 et 98

Supprimer ces alinéas.

La parole est à Mme Christiane Demontès, pour présenter l'amendement n° 139.

Mme Christiane Demontès. Cet amendement vise à répondre à l’une des préoccupations majeures que nous inspire ce projet de loi sécuritaire et stigmatisant.

Je rappelle l’objet de nos griefs.

Aux termes de l’alinéa 97, le procureur de la République, soit d’office, soit à la requête du directeur de l’établissement d’accueil ou du préfet, peut demander que l’appel relatif à la décision de mainlevée d’une mesure de soins psychiatriques sans consentement par hospitalisation complète, prononcée par le juge des libertés et de la détention, soit suspensif.

Le premier président de la cour d’appel, qui « statue par une ordonnance motivée rendue contradictoirement qui n’est pas susceptible de recours », décide alors s’il y a lieu de suivre la demande du procureur.

Le mécanisme que prévoit le texte dans sa forme actuelle, et qui consiste à reconnaître au représentant de l’État et au directeur de l’établissement d’accueil un pouvoir d’appel par voie d’injonction au procureur, traduit parfaitement la défiance qu’éprouve le Gouvernement à l’égard des magistrats ; il permettrait un contrôle indirect de la décision rendue par le juge des libertés et de la détention.

Mes chers collègues, mesurez-vous la portée historique que revêtirait l’adoption de cet alinéa ? Une autorité administrative pourrait en effet adresser des injonctions au procureur, ce qui créerait un précédent particulièrement dangereux.

Soyons sérieux : aucun texte en vigueur ne prévoit la possibilité, pour une autorité administrative, d’adresser une demande au parquet dans le cadre d’un appel relatif à une ordonnance du juge des libertés et de la détention. L’introduction d’un tel pouvoir d’injonction du pouvoir exécutif sur l’autorité judiciaire constituerait une atteinte au principe de la séparation des pouvoirs : principe ordonnateur de notre République, constitutionnellement garanti par l’article 16 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen.

Rappelons au Gouvernement, dont nous connaissons la considération minime qu’il porte aux magistrats, que l’autorité judiciaire n’est pas un service de l’État soumis à l’autorité hiérarchique du préfet ! Plutôt que de remettre systématiquement en cause son rôle et ses décisions, le Président de la République devrait respecter les prérogatives de l’autorité judiciaire, consacrées par l’article 64 de la Constitution ; il devrait assumer sa mission de garant de l’indépendance de l’autorité judiciaire, aujourd’hui parent pauvre de notre démocratie.

Nous nous opposons également à l’alinéa 98, qui confère un caractère suspensif à l’appel susceptible d’être introduit par le procureur de la République.

En effet, pendant l’ensemble de la procédure précédemment décrite, le patient demeure en hospitalisation complète. En d’autres termes, alors que le juge des libertés et de la détention aurait prononcé, au terme d’une analyse approfondie du dossier, une mainlevée de la mesure de soins sans consentement prenant la forme d’une hospitalisation complète, le patient pourrait demeurer enfermé dans un hôpital psychiatrique.

Le dispositif, consistant à maintenir en hospitalisation complète, pendant une durée pouvant atteindre quatorze jours, une personne dont le juge des libertés et de la détention aurait estimé qu’elle devrait être remise en liberté, encoure un fort risque d’inconstitutionnalité. Une telle mesure, qui constitue une remise en cause explicite de la décision de l’autorité judiciaire et des libertés publiques, manifeste l’esprit qui anime votre projet de loi : la personne victime de troubles mentaux est nécessairement une menace pour la société et l’ordre public.

L’ensemble de ces remarques d’ordre juridique, politique et philosophique, particulièrement lourdes de sens et de conséquences, nous conduisent à demander la suppression des alinéas 97 et 98 de l’article 1er, dans lesquels nous voyons de véritables atteintes aux fondements de notre démocratie.