M. Roland Courteau. Depuis la décision n°76-70 du 2 décembre 1976, relative au développement de la prévention des accidents du travail, les droits de la défense sont un principe fondamental reconnu par les lois de la République. En d’autres termes, ils ont un caractère constitutionnel, supralégislatif.

Parmi les principes cardinaux des droits de la défense figure celui de liberté de communication entre l’avocat et son client, qui sous-entend le respect de la confidentialité de leurs discussions.

À cet égard, dans un arrêt du 18 janvier 2006, la Cour de cassation a réaffirmé l’importance des principes de liberté de communication et de confidentialité entre l’avocat et son client.

En effet, il serait pernicieux de concevoir une application effective des droits de la défense tout en entravant la liberté de communication entre l’avocat et son client.

En l’espèce, l’alinéa 107 du présent article entre dans cette logique ; il porte atteinte au principe de liberté de communication entre l’avocat et le patient et, par conséquent, aux droits de la défense. Il prévoit que « si le patient est assisté par un avocat, celui-ci peut se trouver auprès du magistrat ou auprès de l’intéressé ».

Afin de mesurer la portée de cette disposition, rappelons que le Gouvernement envisage de recourir à la visioconférence dans 75 % des cas, ce qui est d’ailleurs contraire à la jurisprudence du Conseil d’État ; autrement dit, d’un point de vue matériel, l’avocat ne pourrait pas être simultanément présent auprès du juge et du patient.

L’éventuelle non-présence de l’avocat auprès de son client pendant l’audience entraverait nettement leur liberté de communication. Ils ne pourraient pas échanger librement pendant l’entretien conduit par le juge et la confidentialité de leurs propos ne serait pas garantie.

Dans le cadre de la défense de personnes souffrant de troubles psychiatriques, cela est d’autant plus préjudiciable et dommageable que le patient se trouve généralement dans une situation d’extrême fragilité, parfois sans famille et sans proches. Il a donc véritablement besoin d’une assistance, y compris pendant l’audience. Le dialogue confidentiel entre le patient et son avocat est essentiel, et doit être préservé.

Par ailleurs, de ce raisonnement découle une crainte juridique : puisque, en l’état, l’alinéa 107 porte indirectement atteinte aux droits de la défense, principe constitutionnellement garanti, il présente un fort risque d’inconstitutionnalité.

Par conséquent, cet amendement permettrait d’éviter la censure par le Conseil constitutionnel d’une disposition potentiellement inconstitutionnelle. Il vise à mieux garantir les droits de la défense en prévoyant que le patient soit automatiquement assisté de son avocat pendant l’audience.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Jean-Louis Lorrain, rapporteur. Cet amendement vise à mieux garantir les droits du malade lors de son audition en prévoyant que l’avocat soit automatiquement présent à ses côtés. Nous sommes dans le domaine du mieux, mais peut-être pas dans celui du possible. Il existe, en effet, des cas circonstanciés où l’avocat ne pourra pas se trouver auprès de son client, faute de temps, de moyens, etc.

Nous sommes réalistes en donnant un avis défavorable.

M. Roland Courteau. Réalistes ou réactionnaires ?

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Nora Berra, secrétaire d'État. Le Gouvernement émet également un avis défavorable.

L’avocat ne peut pas toujours être aux côtés du malade. Il ne faut pas oublier que certains avocats sont commis d’office et qu’ils ne le savent que peu de temps avant l’audience. Cette disposition n’est pas réaliste. Concrètement, il faut pouvoir laisser la liberté à l’avocat d’intervenir même s’il ne se trouve pas au même endroit que le malade.

M. le président. La parole est à M. Jean Desessard, pour explication de vote.

M. Jean Desessard. Au nom du réalisme, aurions-nous voté la loi DALO ? Certainement pas, car le droit au logement opposable est un souhait !

Par conséquent, nous ne nous contentons pas simplement d’être réalistes. Au nom du réalisme financier, au nom des moyens qui se réduisent, devrions-nous renoncer à nos objectifs politiques ? Devrions-nous tirer un trait sur les soins et sur l’amélioration de la santé puisque l’on est en déficit ? Au nom du réalisme, devrions-nous mettre en place une santé au rabais ?

Et vous, madame la secrétaire d'État, comme vous nous l’avez dit, au nom du réalisme, vous souhaitez réaliser des économies.

Mme Annie David. Bien sûr !

M. Jean Desessard. Au nom du réalisme, vous prévoyez de ne plus porter assistance, d’avoir recours à un avis médical et non plus à un certificat médical, d’autoriser la visioconférence…

On commence donc à mettre en place tout le kit de remplacement des moyens sanitaires de qualité. Au nom du réalisme, vous nous proposez le kit Ikea de la santé !

M. le président. La parole est à Mme Annie David, pour explication de vote.

Mme Annie David. Je partage le sentiment et la colère de mon collègue Jean Desessard.

Sous prétexte de réalisme et sous prétexte que l’avocat serait parfois commis d’office, il ne faudrait pas accorder au patient les mêmes droits qu’à n’importe quelle personne susceptible de passer devant un juge des libertés et de la détention !

Mme Annie David. Ces économies sont, pour le coup, vraiment insupportables, car elles se feront sur le dos de patients atteints de maladies psychiatriques. Cela signifie-t-il que ces patients ne sont pas des citoyens comme les autres et que, à ce titre, ils n’auraient pas droit à un respect minimum de leurs droits fondamentaux ? Ils doivent pouvoir être représentés, défendus et entendus dans les mêmes conditions que n’importe quelle autre personne susceptible de passer devant un juge des libertés et de la détention.

Tout à l’heure, à l’occasion de la présentation d’un amendement, vous nous avez dit que, si l’on devait faire intervenir le juge des libertés et de la détention tous les quinze jours, cela entraînerait des coûts insupportables. Peut-être ! mais il faut savoir ce que l’on veut !

On souhaite une hospitalisation d’office, on souhaite instituer un système de soins sans consentement, mais du coup on prive certains patients de leur droit le plus élémentaire, à savoir celui de pouvoir être présenté à un juge des libertés et de la détention. Le Conseil constitutionnel a été clair : respectez l’article 66 de la Constitution, qui traite des libertés individuelles de nos concitoyens !

Cet après-midi encore plus que ce matin vos réponses sont inacceptables ! Il est inadmissible, sous prétexte de pragmatisme, de vouloir faire des économies sur le dos de personnes déjà fragilisées !

M. Guy Fischer. Tout à fait !

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 52.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Les amendements nos 8 et 53 sont identiques.

L'amendement n° 8 est présenté par M. Fischer, Mmes David et Pasquet, M. Autain, Mme Hoarau et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche.

L'amendement n° 53 est présenté par Mme Demontès, MM. Le Menn, Michel, Desessard, Kerdraon et Cazeau, Mmes Le Texier et Schillinger, M. Jeannerot, Mmes Alquier et Campion, M. Daudigny, Mme Ghali, MM. Gillot et Godefroy, Mme Jarraud-Vergnolle, M. S. Larcher, Mmes Printz et San Vicente-Baudrin, M. Teulade et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés.

Ces deux amendements sont ainsi libellés :

Alinéas 111 et 112

Supprimer ces alinéas.

La parole est à Mme Nicole Borvo Cohen-Seat, pour présenter l’amendement n° 8.

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Il faut rappeler à chaque occasion, c’est pourquoi je le fais encore ici, que ce texte a un gros défaut : les mesures qui y sont contenues ne pourront pas être appliquées faute de moyens !

Voilà encore une décision du Gouvernement à laquelle ne sont pas alloués les moyens nécessaires, ce qui posera beaucoup de problèmes. Les magistrats, par exemple, ne savent pas du tout comment ils mettront en œuvre les décisions prises.

Cet amendement vise à supprimer les alinéas 111 et 112, lesquels prévoient de contourner ce que vous avez consenti à introduire dans le texte sur injonction du Conseil constitutionnel.

Après avoir prévu que le juge des libertés et de la détention, à l’issue de toute une procédure – expertises, avis, etc. – décide la mainlevée de l’hospitalisation, vous affirmez, à juste titre, que les appels de mesures libératoires ne peuvent être suspensifs et sont donc exécutoires. Je vous donne lecture de l’alinéa 110 : « L’appel formé à l’encontre de l’ordonnance mentionnée au premier alinéa n’est pas suspensif. » Voilà, ça, c’est le droit !

Or, aussitôt après, vous précisez que le procureur de la République peut demander que l’appel soit suspensif. Vous ouvrez toute grande la porte à l’intervention du procureur de la République, qui, en toutes circonstances, mêmes les plus casuelles, pourra déclencher une suspension, pour réagir, par exemple, à un fait divers qui n’aura rien à voir avec le patient, ce qui permettra de prolonger encore d’au moins quinze jours la mesure de privation de liberté.

Il est absolument aberrant d’introduire la possibilité de supprimer l’exécution automatique d’une mesure libératoire. C’est pourquoi nous proposons de supprimer ces deux alinéas.

M. le président. La parole est à Mme Christiane Demontès, pour présenter l'amendement n° 53.

Mme Christiane Demontès. Je vais ajouter quelques éléments à l’explication que vient de donner Mme Borvo Cohen-Seat sur l'amendement n° 8, auquel cet amendement n° 53 est identique.

Bien que l’amendement de M. Lecerf dont il a été question ait substantiellement modifié la procédure d’appel de l’ordonnance du juge des libertés et de la détention prononçant la mainlevée d’une mesure de soins psychiatriques sans consentement, plusieurs de nos craintes restent fondées.

Je rappelle que, dans la première mouture du texte, le représentant de l’État et le directeur d’établissement disposaient d’un pouvoir d’appel par voie d’injonction au procureur. Ce mécanisme, historique, traduisait parfaitement la défiance du Gouvernement à l’encontre de ses magistrats, permettant un contrôle indirect des décisions rendues par le juge des libertés et de la détention, et constituait une atteinte au principe ordonnateur de toute démocratie : la séparation des pouvoirs.

Si nous nous réjouissons de la suppression de ce dispositif, nous nous opposons toujours au caractère suspensif de l’appel formulé par le procureur. En effet, dès lors que l’appel est suspensif, le patient est maintenu en hospitalisation complète.

En d’autres termes, alors que le juge des libertés et de la détention aurait prononcé une mainlevée de la mesure de soins sans consentement prenant la forme d’une hospitalisation complète, après avoir mené une analyse du dossier et une investigation approfondies, le patient pourrait néanmoins rester enfermé dans un hôpital psychiatrique.

Ces dispositions encourraient un fort risque d’inconstitutionnalité dans la mesure où elles reviendraient à maintenir en hospitalisation complète, pendant une durée allant jusqu’à quatorze jours, une personne dont le juge des libertés et de la détention a estimé qu’elle devait être remise en liberté.

Ce serait, une nouvelle fois, méconnaître la valeur constitutionnelle de la liberté individuelle, ainsi que l’article 66 de la Constitution, qui dispose que « nul ne peut être arbitrairement détenu ». Il faut croire que le Gouvernement et la majorité n’apprennent rien de leurs erreurs !

Le Conseil constitutionnel – nous aurons l’occasion d’y revenir – par deux décisions du 9 juin, respectivement relatives au projet de loi sur l’immigration et à une question prioritaire de constitutionnalité qui concerne le présent projet de loi, vient de censurer plusieurs articles au motif qu’ils violaient l’article 66 de la Constitution.

Or, pour satisfaire leurs préoccupations sécuritaires, que font le Gouvernement et la majorité ? Ils ajoutent un nouveau dispositif qui porte atteinte à l’article 66 de la Constitution…

Mme Christiane Demontès. … et encourt donc – nous vous aurons prévenus – le risque d’inconstitutionnalité ! (Marques d’approbation sur les travées du groupe socialiste.)

Seriez-vous irresponsables au point de risquer d’essuyer un nouvel affront de la part du Conseil constitutionnel ? Seriez-vous tant habités par vos craintes sécuritaires que vous en oublieriez la primauté du droit ? II est vrai que, à force de brandir l’étendard de la peur, recouvert d’arguments spécieux et pernicieux, vous finissez par croire en vos propres inepties, en vos propres ignominies.

Vous souhaitez discuter de la psychiatrie, soit ; mais changez de paradigme et cessez de considérer que la personne victime de troubles mentaux est nécessairement une menace pour la société, pour l’ordre public.

M. Roland Courteau. C’est clair !

Mme Christiane Demontès. Ainsi, eu égard à ces remarques d’ordre juridique et politique, particulièrement lourdes de sens et de conséquences, nous requérons la suppression des alinéas 111 et 112 de l’article 1er.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Jean-Louis Lorrain, rapporteur. Devant la violence de tels propos, je me demande comment la conscience peut encore se libérer… (Sourires.)

Le recours suspensif sera utilisé dans des cas très exceptionnels. (Exclamations sur les travées du groupe CRC-SPG.) Il peut avoir une utilité dans des circonstances particulières, s’il existe des risques d’atteinte à la sécurité.

Mes chers collègues, peut-être devrions-nous prohiber le mot « sécurité » de notre langage… Mais, dans ces conditions, pourquoi ne pas supprimer aussi le code de la route ?

Mme Christiane Demontès. N’importe quoi !

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Nora Berra, secrétaire d'État. Le Gouvernement est défavorable à ces deux amendements identiques.

Je précise à Mme Demontès que le dispositif existe déjà pour d’autres décisions prises par le juge des libertés et de la détention et qu’il a été validé par le Conseil constitutionnel depuis le 20 novembre 2003. Cette position vient d’être récemment réaffirmée par le Conseil constitutionnel dans sa décision rendue le 9 juin dernier sur le projet de loi relatif à l’immigration.

Mme Nora Berra, secrétaire d'État. J’ajoute, comme vient de le rappeler M. le rapporteur, que le recours suspensif est l’exception puisque la règle est que la décision du juge des libertés et de la détention s’exécute dès sa notification, même si un appel est formé. Mais il faut prévoir cette exception, comme cela est d'ailleurs précisé dans l’alinéa 111 de l’article 1er, en cas de « risque grave d’atteinte à l’intégrité du malade ou d’autrui ». Par conséquent, l’application de cette procédure est encadrée.

M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 8 et 53.

J'ai été saisi d'une demande de scrutin public émanant du groupe CRC-SPG.

Je rappelle que l'avis de la commission est défavorable de même que celui du Gouvernement.

Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.

Le scrutin est ouvert.

(Le scrutin a lieu.)

M. le président. Personne ne demande plus à voter ?…

Le scrutin est clos.

J'invite Mmes et MM. les secrétaires à procéder au dépouillement du scrutin.

(Il est procédé au dépouillement du scrutin.)

M. le président. Voici le résultat du scrutin n° 248 :

Nombre de votants 310
Nombre de suffrages exprimés 308
Majorité absolue des suffrages exprimés 155
Pour l’adoption 151
Contre 157

Le Sénat n'a pas adopté. (Exclamations sur les travées du groupe CRC-SPG et du groupe socialiste.)

M. Guy Fischer. C’était chaud, les écarts se resserrent !...

M. le président. La parole est à Mme Nicole Borvo Cohen-Seat, pour explication de vote sur l'article 1er.

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Nous avons passé beaucoup de temps sur cet article 1er, qui est essentiel, et avons tenu à faire valoir un certain nombre d’arguments qui s’opposent à votre logique.

Je suis convaincue que de nombreux collègues de la majorité savent très bien que ce texte porte atteinte au respect des libertés et de la dignité de la personne.

M. Roland Courteau. C’est certain !

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. La dignité de la personne, je le sais, est un principe auquel nous sommes bon nombre, dans cette assemblée, à être attachés.

Mais le problème – même si, bien évidemment, nous savons qu’une deuxième lecture ne permettra pas de modifier fondamentalement le texte, puisque nous connaissons les positions de chacun –, c’est que vous ne faites même pas mine de modifier partiellement votre texte : vous n’y changez rien, c'est-à-dire que vous vous tenez strictement aux instructions qui vous ont été données ! Vous n’acceptez rien, vous ne voulez rien modifier et vous nous donnez des explications qui valent ce qu’elles valent, c'est-à-dire le plus souvent pas grand-chose.

En fait, les dogmes que l’on connaît bien s’appliquent.

Premier de ces dogmes : les malades mentaux sont des criminels potentiels. Le Président de la République ayant promis une société du risque zéro – en tout cas, il essaie de faire croire que cela est possible – en matière de maladie mentale, de délinquance, d’accident de la route, etc., c’est à ce risque zéro que vous vous accrochez.

Autre dogme : quand on a commis un délit, on en commettra d’autres, qui seront probablement de plus en plus graves.

Pour autant, vous oubliez que tout citoyen est avant tout sujet de droit, notion qui devrait pourtant nous être commune.

Et de fait, le vocabulaire utilisé s’apparente toujours au domaine répressif alors que nous traitons de la maladie mentale, de la psychiatrie, donc de la santé. Et l’on sait combien il est facile, hélas ! de basculer soudainement dans des problèmes de santé mentale !

Il y a la contrainte des 72 heures, qui s’apparente à une garde à vue psychiatrique. La prolongation au-delà des 48 heures, jusqu’à 72 heures, serait justifiée parce qu’il y aurait des risques plus importants !

L’hospitalisation d’office s’apparente à une sanction, d’autant qu’il peut très bien ne pas y avoir de soins.

Enfin, il y a la suspicion à l’égard des juges, qui perdure depuis des années, et je crains que cela ne soit pas fini, mais peut-être les choses vont-elles bientôt s’améliorer…

M. Guy Fischer. Encore une année !

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Les juges sont laxistes, dites-vous, ils mettent tout le monde dehors, en quelque sorte, et ne veulent pas emprisonner. C’est d’ailleurs pour cette raison qu’il y a tant de monde dans les prisons… Vous voulez donc encadrer le juge des libertés et de la détention, ne pas lui donner la possibilité de libérer ; vous mettez au contraire tout en œuvre pour retarder encore un peu son intervention.

Telle est votre logique, en tout cas celle qui vous est imposée, et vous vous y tenez.

Quel est dans tout cela l’avenir de la psychiatrie ? Que faites-vous des malades, des hôpitaux publics, des soins ? Comment, dans de telles conditions, mettre en œuvre une bonne politique de santé mentale, qui est loin d’exister aujourd'hui ? De toute façon, vous n’en avez rien à faire ; il n’y a pas d’argent et la RGPP fait qu’il y en a de moins en moins.

Les malades, ceux qui sont atteints de maladie mentale à un moment donné, sont plus souvent des victimes que des coupables. Je rappelle encore une fois que, par rapport à l’ensemble de la population, ces personnes sont douze fois plus victimes d’agressions physiques, 130 fois plus victimes de vols, que leur espérance de vie est plus courte et que seuls 2,7 % des actes violents sont commis par des personnes atteintes de troubles psychiatriques.

M. Guy Fischer. Voilà la réalité !

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Mettez-vous bien cela dans la tête !

Nous voulons éviter de nous laisser emporter dans le tourbillon de la politique de la peur. Nous sommes là pour vous empêcher de nous y entraîner et de vous y entraîner vous aussi par la même occasion ! (Applaudissements sur les travées du groupe CRC-SPG et du groupe socialiste.)

M. le président. La parole est à Mme Christiane Demontès, pour explication de vote.

Mme Christiane Demontès. Je le rappelle à l’intention de ceux qui seraient distraits, l’article 1er porte sur les droits des personnes faisant l’objet de soins psychiatriques. Au nom de mon groupe, je veux dire ici solennellement que cet article est une atteinte insupportable aux droits des personnes malades. Je ne développerai pas plus avant, Mme Borvo Cohen-Seat vient de le faire. Soins sans consentement, maintien en hospitalisation de matière arbitraire, visioconférence, effet non suspensif de l’appel : nous avons déjà tenté de montrer les méfaits de ces dispositions. Nous voterons donc contre cet article. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.)

M. le président. Je mets aux voix l'article 1er.

(L'article 1er est adopté.)

TITRE II

SUIVI DES PATIENTS

Article 1er (Texte non modifié par la commission)
Dossier législatif : projet de loi relatif aux droits et à la protection des personnes faisant l'objet de soins psychiatriques et aux modalités de leur prise en charge
Article 3 (Texte non modifié par la commission)

Article 2

(Non modifié)

Le chapitre II du titre Ier du livre II de la troisième partie du code de la santé publique est ainsi modifié :

1° L’intitulé est ainsi rédigé : « Admission en soins psychiatriques à la demande d’un tiers ou en cas de péril imminent » ;

2° L’article L. 3212-1 est ainsi rédigé :

« Art. L. 3212-1. – I. – Une personne atteinte de troubles mentaux ne peut faire l’objet de soins psychiatriques sur la décision du directeur d’un établissement mentionné à l’article L. 3222-1 que lorsque les deux conditions suivantes sont réunies :

« 1° Ses troubles mentaux rendent impossible son consentement ;

« 2° Son état mental impose des soins immédiats assortis soit d’une surveillance médicale constante justifiant une hospitalisation complète, soit d’une surveillance médicale régulière justifiant une prise en charge sous la forme mentionnée au 2° de l’article L. 3211-2-1.

« II. – Le directeur de l’établissement prononce la décision d’admission :

« 1° Soit lorsqu’il a été saisi d’une demande présentée par un membre de la famille du malade ou par une personne justifiant de l’existence de relations avec le malade antérieures à la demande de soins et lui donnant qualité pour agir dans l’intérêt de celui-ci, à l’exclusion des personnels soignants exerçant dans l’établissement prenant en charge la personne malade. Lorsqu’il remplit les conditions prévues au présent alinéa, le tuteur ou le curateur d’un majeur protégé peut faire une demande de soins pour celui-ci.

« La forme et le contenu de cette demande sont fixés par décret en Conseil d’État.

« La décision d’admission est accompagnée de deux certificats médicaux circonstanciés datant de moins de quinze jours, attestant que les conditions prévues aux 1° et 2° du I du présent article sont réunies.

« Le premier certificat médical ne peut être établi que par un médecin n’exerçant pas dans l’établissement accueillant le malade ; il constate l’état mental de la personne malade, indique les caractéristiques de sa maladie et la nécessité de recevoir des soins. Il doit être confirmé par un certificat d’un second médecin qui peut exercer dans l’établissement accueillant le malade. Les deux médecins ne peuvent être parents ou alliés, au quatrième degré inclusivement, ni entre eux, ni du directeur de l’établissement mentionné à l’article L. 3222-1 qui prononce la décision d’admission, ni de la personne ayant demandé les soins ou de la personne faisant l’objet de ces soins ;

« 2° Soit lorsqu’il s’avère impossible d’obtenir une demande dans les conditions prévues au 1° du présent II et qu’il existe, à la date d’admission, un péril imminent pour la santé de la personne, dûment constaté par un certificat médical établi dans les conditions prévues au troisième alinéa du même 1°. Ce certificat constate l’état mental de la personne malade, indique les caractéristiques de sa maladie et la nécessité de recevoir des soins. Le médecin qui établit ce certificat ne peut exercer dans l’établissement accueillant la personne malade ; il ne peut en outre être parent ou allié, jusqu’au quatrième degré inclusivement, ni avec le directeur de cet établissement, ni avec la personne malade.

« Dans ce cas, le directeur de l’établissement d’accueil informe, dans un délai de vingt-quatre heures sauf difficultés particulières, la famille de la personne qui fait l’objet de soins et, le cas échéant, la personne chargée de la protection juridique de l’intéressé ou, à défaut, toute personne justifiant de l’existence de relations avec la personne malade antérieures à l’admission en soins et lui donnant qualité pour agir dans l’intérêt de celle-ci.

« Lorsque l’admission a été prononcée en application du présent 2°, les certificats médicaux mentionnés aux deuxième et troisième alinéas de l’article L. 3211-2-2 sont établis par deux psychiatres distincts. » ;

3° L’article L. 3212-2 est ainsi rédigé :

« Art. L. 3212-2. – Avant d’admettre une personne en soins psychiatriques en application de l’article L. 3212-1, le directeur de l’établissement d’accueil s’assure de son identité. Lorsque la personne est admise en application du 1° du II du même article L. 3212-1, le directeur de l’établissement vérifie également que la demande de soins a été établie conformément au même 1° et s’assure de l’identité de la personne qui formule la demande de soins. Si la demande est formulée pour un majeur protégé par son tuteur ou curateur, celui-ci doit fournir à l’appui de sa demande un extrait du jugement de mise sous tutelle ou curatelle. » ;

4° L’article L. 3212-3 est ainsi rédigé :

« Art. L. 3212-3. – En cas d’urgence, lorsqu’il existe un risque grave d’atteinte à l’intégrité du malade, le directeur d’un établissement mentionné à l’article L. 3222-1 peut, à titre exceptionnel, prononcer à la demande d’un tiers l’admission en soins psychiatriques d’une personne malade au vu d’un seul certificat médical émanant, le cas échéant, d’un médecin exerçant dans l’établissement. Dans ce cas, les certificats médicaux mentionnés aux deuxième et troisième alinéas de l’article L. 3211-2-2 sont établis par deux psychiatres distincts.

« Préalablement à l’admission, le directeur de l’établissement d’accueil vérifie que la demande de soins a été établie conformément au 1° du II de l’article L. 3212-1 et s’assure de l’identité de la personne malade et de celle qui demande les soins. Si la demande est formulée pour un majeur protégé par son tuteur ou curateur, celui-ci doit fournir à l’appui de sa demande un extrait de jugement de mise sous tutelle ou curatelle. » ;

5° L’article L. 3212-4 est ainsi rédigé :

« Art. L. 3212-4. – Lorsque l’un des deux certificats médicaux mentionnés aux deuxième et troisième alinéas de l’article L. 3211-2-2 conclut que l’état de la personne ne justifie plus la mesure de soins, le directeur de l’établissement d’accueil prononce immédiatement la levée de cette mesure.

« Lorsque les deux certificats médicaux ont conclu à la nécessité de prolonger les soins, le directeur de l’établissement prononce le maintien des soins en retenant la forme de la prise en charge proposée par le psychiatre en application du même article L. 3211-2-2. Il joint à sa décision, le cas échéant, le programme de soins établi par le psychiatre.

« Dans l’attente de la décision du directeur de l’établissement, la personne malade est prise en charge sous la forme d’une hospitalisation complète.

« Lorsque le psychiatre qui participe à la prise en charge de la personne malade propose de modifier la forme de prise en charge de celle-ci, le directeur de l’établissement est tenu de la modifier sur la base du certificat médical ou de l’avis mentionnés à l’article L. 3211-11. » ;

6° L’article L. 3212-5 est ainsi rédigé :

« Art. L. 3212-5. – I. – Le directeur de l’établissement d’accueil informe sans délai le représentant de l’État dans le département ou, à Paris, le préfet de police, et la commission départementale des soins psychiatriques mentionnée à l’article L. 3222-5 de toute décision d’admission d’une personne en soins psychiatriques en application du présent chapitre et leur communique une copie du certificat médical d’admission et du bulletin d’entrée. Il leur transmet également sans délai copie de chacun des certificats médicaux mentionnés aux deuxième et troisième alinéas de l’article L. 3211-2-2.

« II. – Le directeur de l’établissement d’accueil notifie sans délai les nom, prénoms, profession et résidence habituelle ou lieu de séjour tant de la personne faisant l’objet des soins que, lorsque l’admission a été prononcée en application du 1° du II de l’article L. 3212-1 ou de l’article L. 3212-3, de celle les ayant demandés :

« 1° Au procureur de la République près le tribunal de grande instance dans le ressort duquel se trouve la résidence habituelle ou le lieu de séjour de la personne faisant l’objet de soins ;

« 2° Au procureur de la République près le tribunal de grande instance dans le ressort duquel est situé l’établissement.

« III. – Dans le cas où la personne malade a été admise en application du 1° du II de l’article L. 3212-1 ou de l’article L. 3212-3 et fait l’objet d’une prise en charge sous la forme d’une hospitalisation complète, le directeur de l’établissement d’accueil informe la personne ayant demandé les soins de toute décision modifiant la forme de la prise en charge. » ;

7° L’article L. 3212-6 est abrogé ;

8° L’article L. 3212-7 est ainsi rédigé :

« Art. L. 3212-7. – Après le cinquième jour et au plus tard le huitième jour à compter de l’admission d’une personne en soins psychiatriques, un psychiatre de l’établissement d’accueil établit un certificat médical circonstancié indiquant si les soins sont toujours nécessaires. Ce certificat médical précise si la forme de la prise en charge de la personne malade décidée en application de l’article L. 3211-2-2 demeure adaptée et, le cas échéant, en propose une nouvelle. Lorsqu’il ne peut être procédé à l’examen de la personne malade, le psychiatre de l’établissement d’accueil établit un avis médical sur la base du dossier médical.

« Au vu du certificat médical ou de l’avis médical mentionné au premier alinéa du présent article, les soins peuvent être maintenus par le directeur de l’établissement pour une durée maximale d’un mois. Au-delà de cette durée, les soins peuvent être maintenus par le directeur de l’établissement pour des périodes maximales d’un mois, renouvelables selon les modalités prévues au présent article ; le certificat est établi dans les trois derniers jours de la période en cause.

« Lorsque la durée des soins excède une période continue d’un an à compter de l’admission en soins, le maintien de ces soins est subordonné à une évaluation approfondie de l’état mental de la personne réalisée par le collège mentionné à l’article L. 3211-9. Ce collège recueille l’avis du patient. En cas d’impossibilité d’examiner le patient à l’échéance prévue en raison de son absence, attestée par le collège, l’évaluation et le recueil de son avis sont réalisés dès que possible.

« Le défaut de production d’un des certificats médicaux, des avis médicaux ou des attestations mentionnés au présent article entraîne la levée de la mesure de soins.

« Les copies des certificats médicaux, des avis médicaux ou des attestations prévus au présent article et à l’article L. 3211-11 sont adressées sans délai par le directeur de l’établissement d’accueil au représentant de l’État dans le département ou, à Paris, au préfet de police, et à la commission départementale des soins psychiatriques mentionnée à l’article L. 3222-5. Lorsque la personne malade est prise en charge sous la forme d’une hospitalisation complète, une copie du certificat médical ou de l’avis médical mentionnés au premier alinéa du présent article est également adressée sans délai au juge des libertés et de la détention compétent dans le ressort duquel se trouve l’établissement d’accueil. » ;

9° L’article L. 3212-8 est ainsi modifié :

a) Au premier alinéa, à la première phrase, les mots : « d’hospitalisation » sont remplacés par les mots : « de soins », les mots : « de l’hospitalisation sur demande d’un tiers » sont remplacés par les mots : « ayant motivé cette mesure » et, à la fin de la seconde phrase, les mots : « l’hospitalisation » sont remplacés par les mots : « les soins » ;

b) Au deuxième alinéa, les mots : « cette mesure d’hospitalisation » sont remplacés par les mots : « la mesure de soins », après le mot : « département », sont insérés les mots : « ou, à Paris, le préfet de police », la seconde occurrence du mot : « à » est remplacée par la référence : « au II de » et les mots : « l’hospitalisation » sont remplacés par les mots : « les soins » ;

c) Le dernier alinéa est ainsi rédigé :

« Le représentant de l’État dans le département ou, à Paris, le préfet de police peut ordonner la levée immédiate de la mesure de soins lorsque les conditions requises au présent chapitre ne sont plus réunies. » ;

10° L’article L. 3212-9 est ainsi rédigé :

« Art. L. 3212-9. – Le directeur de l’établissement prononce la levée de la mesure de soins psychiatriques lorsque celle-ci est demandée :

« 1° Par la commission départementale des soins psychiatriques mentionnée à l’article L. 3222-5 ;

« 2° Par une des personnes mentionnées au deuxième alinéa du 2° du II de l’article L. 3212-1.

« Dans le cas mentionné au 2° du présent article, le directeur de l’établissement n’est pas tenu de faire droit à cette demande lorsqu’un certificat médical ou, en cas d’impossibilité d’examiner le patient, un avis médical établi par un psychiatre de l’établissement et datant de moins de vingt-quatre heures atteste que l’arrêt des soins entraînerait un péril imminent pour la santé du patient. Le directeur de l’établissement informe alors par écrit le demandeur de son refus en lui indiquant les voies de recours prévues à l’article L. 3211-12.

« Dans ce même cas, lorsqu’un certificat établi par un psychiatre de l’établissement datant de moins de vingt-quatre heures atteste que l’état mental du patient nécessite des soins et compromet la sûreté des personnes ou porte atteinte, de façon grave, à l’ordre public, le directeur de l’établissement informe préalablement à la levée de la mesure de soins le représentant de l’État dans le département ou, à Paris, le préfet de police, qui peut prendre la mesure prévue à l’article L. 3213-6. » ;

11° L’article L. 3212-10 est abrogé ;

12° L’article L. 3212-11 est ainsi modifié :

a) Au premier alinéa, après le mot : « établissement », sont insérés les mots : « mentionné à l’article L. 3222-1 » et, après le mot : « transcrits », sont insérés les mots : « ou reproduits » ;

b) Au 1°, le mot : « hospitalisées » est remplacé par les mots : « faisant l’objet de soins en application du présent chapitre » ;

c) À la fin du 2°, les mots : « l’hospitalisation » sont remplacés par les mots : « l’admission en soins psychiatriques » ;

d) À la fin du 3°, les mots : « l’hospitalisation » sont remplacés par les mots : « les soins ou une mention précisant que l’admission en soins a été prononcée en application du 2° du II de l’article L. 3212-1 ou de l’article L. 3212-3 » ;

e) Le 4° est ainsi rédigé :

« 4° Les dates de délivrance des informations mentionnées aux a et b de l’article L. 3211-3 ; »

f) Les 6° à 8° sont ainsi rédigés :

« 6° Les avis et les certificats médicaux ainsi que les attestations mentionnés au présent chapitre ;

« 7° La date et le dispositif des décisions rendues par le juge des libertés et de la détention en application des articles L. 3211-12 et L. 3211-12-1 ;

« 8° Les levées des mesures de soins psychiatriques autres que celles mentionnées au 7° ; »

g et h) (Suppressions maintenues)

i) Il est ajouté un alinéa ainsi rédigé :

« Le présent article est applicable aux personnes admises en soins psychiatriques en application des chapitres III et IV du présent titre. »