Mme Marie-Noëlle Lienemann. Je me permets d'insister fortement : le mouvement HLM attend du Gouvernement qu’il prenne des engagements précis en la matière. Madame la ministre, je ne doute pas que vous aurez à cœur de satisfaire cette attente lors du prochain congrès de l’Union sociale pour l’habitat.

Au sein du mouvement HLM règne une certaine inquiétude. Dans l’esprit des dirigeants d’organismes d’HLM, le prélèvement au titre de 2013 est fondé sur le calcul inscrit dans la loi de 2012. Moyennant quoi, la plupart d’entre eux étaient convaincus qu’ils retrouveraient des marges de manœuvre de nature à leur permettre de mener à bien les projets que vous souhaitez, en vue d'atteindre l’objectif de 150 000 logements fixé par le Gouvernement. Je suggère que l'Union sociale pour l'habitat et le Gouvernement réfléchissent ensemble à cette question.

En outre, il est très important que le calcul de ce prélèvement soit bien équilibré entre les différents types d’organismes. En effet, aujourd'hui, le prélèvement est acquitté pour l’essentiel par les offices d’HLM, tandis que les ESH, souvent réunies au sein de grands groupes, en sont exonérées.

M. Daniel Raoul, président de la commission des affaires économiques. C'est exact !

Mme Marie-Noëlle Lienemann. Vous en conviendrez, cela ne peut guère satisfaire les représentants des collectivités locales que nous sommes !

Madame la ministre, je tenais à attirer à mon tour votre attention sur ce sujet. À l'instar de mon collègue Jacques Mézard, nous sommes un certain nombre ici à être persévérants et pugnaces…

M. le président. La parole est à Mme Bernadette Bourzai, pour explication de vote.

Mme Bernadette Bourzai. En tant que représentante d’un département rural où les acteurs du logement social sont principalement des offices d’HLM, j’appuie vigoureusement les déclarations de M. Mézard et de Mme Lienemann.

Le prélèvement prévu par la loi Boutin est une disposition scandaleuse, qui a privé les offices d’HLM ruraux de leurs capacités d'investissement. On a même vu une commune que je ne citerai pas ponctionner la trésorerie de l’office municipal pour que celui-ci échappe au prélèvement !

M. Philippe Dallier. Justement !

Mme Bernadette Bourzai. Avant même la discussion du projet de loi de finances pour 2013, il nous faut dès aujourd'hui adresser un signal clair au ministère du budget. Nos débats ont porté surtout sur les villes, mais le milieu rural est également concerné par la problématique du logement social ; nous n'avons pas suffisamment insisté sur ce point. Nous n'avons plus les moyens de maintenir en milieu rural des populations qui veulent y vivre.

En conséquence, j'invite mes collègues du groupe socialiste à voter cet amendement.

M. le président. La parole est à M. Philippe Dallier, pour explication de vote.

M. Philippe Dallier. Quand j’étais rapporteur spécial des crédits de la mission « Ville et logement », je me suis beaucoup démené pour essayer de trouver la meilleure solution possible. Cela étant, je ne voudrais pas que, aujourd'hui, on jette le bébé avec l'eau du bain.

La question des « dodus dormants », comme les appelait Mme Boutin, était une vraie question. En effet, certains offices ne faisaient rien de la trésorerie dont ils disposaient. L’idée était donc de mutualiser les moyens. On peut débattre de l’efficacité et de la justice du dispositif qui a été mis en place, mais une telle mutualisation est nécessaire. J’espère que nous allons retravailler sur ce sujet.

Il y a effectivement eu des manœuvres dilatoires. Ainsi, Mme Bourzai nous dit qu’une commune a ponctionné la trésorerie de l’office municipal pour qu’il échappe au prélèvement. Certains organismes ont même remboursé leurs emprunts par anticipation – cela prouve qu’ils avaient des moyens – pour éviter d’être mis à contribution au titre de la mutualisation.

Peut-être sommes-nous allés trop loin, mais l’intention de mettre en place une mutualisation était louable. Certains ont contourné le dispositif, il faut donc le revoir, mais que l’on ne dise pas que la mutualisation n’a aucun sens.

M. le président. La parole est à Mme Marie-Noëlle Lienemann.

Mme Marie-Noëlle Lienemann. La mutualisation ne doit pas conduire à la spoliation.

M. Philippe Dallier. Nous sommes d'accord !

Mme Marie-Noëlle Lienemann. Je vous invite à assister au congrès de l’USH, mon cher collègue. Vous pourrez y découvrir les nouvelles propositions du mouvement HLM en vue d’instaurer une mutualisation volontaire et contrôlée qui ne relève pas de la spoliation.

Par ailleurs, les organismes qui ont été soumis au prélèvement n’étaient pas nécessairement des « dodus dormants » : certains d’entre eux, en particulier, avaient dû mettre en réserve des fonds propres pour pouvoir les utiliser quand interviendraient les opérations de démolition et de reconstruction prévues dans le cadre du programme national de rénovation urbaine.

M. le président. Monsieur Mézard, l'amendement n° 135 rectifié est-il maintenu ?

M. Jacques Mézard. Oui, monsieur le président, je persévère dans cette voie.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 135 rectifié.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l’article 15, et l'amendement n° 136 rectifié n'a plus d'objet.

M. Philippe Dallier. On ne peut pas faire ça comme ça ! Et le financement de l’ANRU !

M. le président. L'amendement n° 99, présenté par Mme D. Gillot, est ainsi libellé :

Après l'article 15

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

À l'exclusion des publications par voie de presse, la vente de listes ou de fichiers relatifs à la location ou sous-location en nu ou en meublé d'immeubles bâtis est interdite.

Cet amendement n'est pas soutenu.

L'amendement n° 177, présenté par MM. Dallier, Gilles, Cambon, Bécot, Chatillon et Dassault, Mme Lamure, M. P. Leroy et Mmes Procaccia et Jouanno, est ainsi libellé :

Après l'article 15

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

L’article 4 de la loi n° 89-462 du 6 juillet 1989 tendant à améliorer les rapports locatifs et portant modification de la loi n° 86-1290 du 23 décembre 1986 est complété par un t ainsi rédigé :

« t) Qui impose au locataire le paiement mensuel, en surplus du loyer pour occupation du logement, d’un loyer pour les équipements. L’article L. 632-1 du code de la construction et de l’habitation s’applique à tout contrat de location comportant une telle clause. »

La parole est à M. Philippe Dallier.

M. Philippe Dallier. Il s'agit là encore d’un amendement d’appel. Madame la ministre, je souhaiterais que vous examiniez de près le problème que je vais soulever.

J’ai découvert qu’un certain nombre d’opérateurs construisent, en recourant aux dispositifs visant à développer le logement social, des logements qui sont ensuite loués à environ 20 euros par mètre carré. Je pourrais citer, à cet égard, un bel exemple en zone industrielle, à Melun. C’est dire si les loyers pratiqués sont excessifs !

Le système est relativement simple. Ces opérateurs font signer au preneur un bail relevant du dispositif de la loi de 1989 – le logement n’est donc pas un meublé –, tout en lui imposant de payer une indemnité pour des équipements censés être mis à sa disposition. Je ne pensais pas que cela était possible !

La publicité donne à penser qu’il s’agit d’une résidence étudiante, mais, au lieu d’un bail pour un logement meublé leur ouvrant la possibilité de le dénoncer avec un préavis raccourci, les candidats à la location se voient proposer un bail classique, assorti d’un préavis de trois mois. De plus, alors que la construction du logement a bénéficié des aides destinées au logement social, l’opérateur impose un loyer d’équipement ne correspondant à presque rien, de sorte que le montant du loyer avoisine les 20 euros par mètre carré.

À mon sens, il s’agit d’un détournement de la loi. Je vous transmettrai ce dossier dans les prochains jours, madame la ministre. Je vous invite à l’étudier, car il y a là un abus, que je tenais à dénoncer en séance publique. Cela étant fait, je retire l’amendement.

M. le président. L'amendement n° 177 est retiré.

Vote sur l'ensemble

Articles additionnels après l'article 15
Dossier législatif : projet de loi relatif à la mobilisation du foncier public en faveur du logement et au renforcement des obligations de production de logement social
Explications de vote sur l'ensemble (fin)

M. le président. Avant de mettre aux voix l'ensemble du projet de loi, je donne la parole à M. Vincent Capo-Canellas, pour explication de vote.

M. Vincent Capo-Canellas. Le logement doit être une priorité nationale. Oui, nous souffrons d’un déficit structurel de logements. En conséquence, il faut continuer de construire pour satisfaire une demande croissante et essayer de détendre le marché. En particulier, avec plus de 1,7 million de demandes en souffrance, il faut produire du logement social.

Si nous partageons ce constat avec vous, madame la ministre, nous sommes très sceptiques quant aux options que vous semblez avoir choisies. Trois caractéristiques du projet de loi nous gênent.

Premièrement, le texte ne vise pas à stimuler l’accession sociale à la propriété. C’est pourtant là une question clef. Le taux de ménages propriétaires de leur logement est anormalement bas dans notre pays comparé à ce qu’il est chez nos voisins européens. L’accession sociale à la propriété est l’aboutissement du parcours résidentiel, un gage de mixité sociale et un socle de sécurisation de la société. C’est pourquoi, à nos yeux, le passage à un taux minimal de 25 % de logements sociaux était acceptable, à condition que les logements destinés à l’accession sociale à la propriété soient inclus dans le champ du logement social défini par la loi SRU.

Or ce ne sera pas le cas. Cela est d’ailleurs paradoxal : votre projet de loi donne l’impression que vous vous arrêtez au milieu du gué.

En effet, l’accession sociale à la propriété est bien prise en compte dans les dispositions du titre Ier du texte, qui prévoient que l’État ou ses établissements pourront céder des terrains en vue de la réalisation de programmes comportant la construction de logements destinés à cet usage, mais le titre II, quant à lui, ne modifie pas la loi SRU en ce sens. Il s’agit là, selon nous, d’une curieuse et regrettable asymétrie. Il semble que, hier soir, vous ayez vous-même estimé que le sujet aurait mérité des engagements plus forts, mais vous avez renvoyé ce sujet à plus tard.

Deuxièmement, le présent projet de loi ne prend pas assez en compte les réalités locales. Comme je l’ai déjà souligné hier, en Seine-Saint-Denis se développe un habitat très social de fait dans le parc privé, dans des logements insalubres ou des pavillons du début du xxe siècle, où s’entassent des familles fort nombreuses.

Ce logement social de fait n’est aucunement pris en compte par la présente réforme. Or il nous paraît indispensable de moduler l’obligation imposée aux communes en fonction de ces réalités. L’un des meilleurs moyens de le faire aurait été d’apprécier le respect de l’obligation de réaliser au moins 25 % de logements sociaux non pas à l’échelon communal, mais à celui de la communauté de communes ou d’agglomération. C’est ainsi que nous aurions pu favoriser la mixité sociale, en donnant aux collectivités les outils leur permettant de mener les bonnes politiques aux bons endroits, pour construire du logement social là où il en manque tout en évitant d’aggraver les phénomènes de paupérisation de certaines communes.

On ne développe pas une vision d’ensemble en instaurant un taux unique : c’est sans doute l’une des principales critiques que l’on peut adresser à ce projet de loi. De plus, faute d’une prise en compte du taux SRU à l’échelle du territoire, l’une des mesures essentielles du texte, à savoir la mobilisation du foncier de l’État et de ses établissements publics, ne profitera qu’à un nombre très limité de communes, et peut-être pas à celles qui en auraient le plus besoin, c’est-à-dire les petites communes très urbanisées, où le foncier disponible est rare.

Troisièmement, l’esprit général du projet de loi est de contraindre et de sanctionner. Comme l’ont souligné Valérie Létard et Daniel Dubois, le bâton est bien visible, mais il n’y a pas de carotte. Vous n’accompagnez pas les collectivités, mais vous proposez une multiplication par cinq du prélèvement SRU, lequel paraît de surcroît confiscatoire, puisque son produit sera dorénavant prioritairement affecté à l’État. Cela, nous avons du mal à l’accepter.

En conclusion, madame la ministre, si nous vous approuvons d’adresser un signal fort en faisant du logement social une priorité nationale, si nous réaffirmons notre adhésion aux principes généraux posés par la loi SRU, nous ne pouvons, pour toutes les raisons que je viens d’évoquer, soutenir sans réserve ce projet de loi. Par conséquent, une grande majorité du groupe UCR s’abstiendra.

M. le président. La parole est à Mme Marie-Noëlle Lienemann, pour explication de vote.

Mme Marie-Noëlle Lienemann. Notre groupe est très satisfait du travail accompli par la Haute Assemblée sur ce texte. Nous soutenions pleinement le projet initial du Gouvernement, et nous pensons que les amendements qui ont été adoptés par le Sénat ont permis d’améliorer le dispositif. Ils apporteront certainement un éclairage utile aux débats de nos collègues députés.

Je retiendrai deux points en particulier.

En premier lieu, le projet de loi pose le principe d’une décote pouvant atteindre 100 % pour la cession de terrains publics destinés à la réalisation de programmes de logements sociaux.

En second lieu, le texte prévoit le plafonnement à 30 % de la part de logements financés en prêts locatifs sociaux et un plancher de 30 % pour la part de logements financés grâce à des prêts locatifs aidés d’intégration.

Sur ces deux points, nos travaux permettront, à mon sens, d’améliorer l’efficacité du dispositif et d’accroître les possibilités d’action des élus, afin de satisfaire aux principes d’équité sociale et d’accès au logement pour tous qui guident la réflexion du Gouvernement et celle de notre groupe.

Bien entendu, nous voterons ce projet de loi.

M. le président. La parole est à Mme Élisabeth Lamure, pour explication de vote.

Mme Élisabeth Lamure. Je ne reviendrai pas sur l’improvisation totale du Gouvernement dans cette affaire, qui nous a valu l’inscription en catastrophe de ce projet de loi en session extraordinaire. Pas d’étude préalable, pas de concertation, pas de travail parlementaire en amont : nous l’avons démontré très clairement au début de notre débat, le Gouvernement a délibérément bafoué les droits du Parlement et les prérogatives des commissions du Sénat, sans parler des droits élémentaires de l’opposition, qui ont été foulés aux pieds. C’est du jamais vu au Sénat : aucun des précédents gouvernements n’avait utilisé de tels procédés !

Le texte souffre également sur le fond de cette précipitation. En effet, il ne répond pas aux divers problèmes que connaît notre pays en matière de logement.

Tout d'abord, les règles qu’il prévoit imposeront une nouvelle répartition entre le logement social et les autres types de logement. En outre, la programmation en vigueur se situe déjà à un niveau très élevé pour les prochaines années, qu’il sera difficile de dépasser, surtout en période de crise. Comment comptez-vous atteindre votre objectif sur cinq ans en matière d’offre de logements ? Rien n’est proposé, sinon une annonce médiatique.

Vous êtes dans l’affichage politique, vous n’êtes pas dans la réalité des problèmes de logement.

M. Alain Bertrand. Nous sommes dans l’action, au moins !

Mme Élisabeth Lamure. Vous n’apportez pas de vraies réponses à la question du financement d’une politique ambitieuse en faveur du logement social. Les chiffres annoncés sont insuffisants et vous le savez.

Quant à l’affectation du produit des nouvelles pénalités à un nouveau fonds, il s’agit tout simplement de remplir les caisses de l’État à bon compte.

Quid de l’accession sociale à la propriété ? Nous souhaitions que les logements concernés soient pris en compte au titre du seuil de 25 % de logements sociaux, mais vous l’avez refusé, sans doute par idéologie. Tous les logements ayant un caractère social devraient être comptabilisés dans le calcul ; cela a également été refusé.

Jamais vous ne prenez en compte l’intercommunalité, alors que les EPCI jouent aujourd’hui un rôle majeur en matière de production de logements sociaux. Nulle part il n’est écrit que la mixité sociale doit jouer dans les deux sens.

Quant à la cession gratuite de terrains par l’État, quel sera le manque à gagner lié à cette mesure pour nos finances publiques, déjà si mal en point ? Comment feront les communes qui n’auront pas la chance de bénéficier de telles cessions ? Et que dire des maires bâtisseurs qui ont respecté leurs objectifs et qui vont se trouver dans l’impossibilité d’assumer leurs nouvelles obligations ? Feront-ils l’objet d’un constat de carence ? Ce n’est pas acceptable !

Nos légitimes interrogations sont restées sans réponse. Parce que vous êtes dans la précipitation, vous n’avez pas analysé la situation de près, en détail, et votre texte n’intègre pas les différents aspects du problème. Nous voterons donc contre ce projet de loi, pour des raisons tant de forme que de fond.

M. le président. La parole est à M. Joël Labbé, pour explication de vote.

M. Joël Labbé. Notre groupe votera ce texte dans un esprit très positif. Nous attendions le plafonnement de la part de logements financés en PLS et l’instauration d’un plancher pour les PLAI, et nous avons obtenu satisfaction, même si nous aurions préféré que l’ensemble des communes soient concernées.

Nous avons un petit regret : nous aurions aimé que la biodiversité soit prise en compte, mais on nous a opposé des considérations d’efficacité. Nous espérons que nos collègues députés reviendront sur ce sujet.

À nos yeux, ce texte contribuera à permettre à notre pays et à nos collectivités territoriales d’assurer le respect effectif du droit au logement, composante essentielle du droit fondamental de chacun à vivre dans la dignité.

M. le président. La parole est à Mme Mireille Schurch, pour explication de vote.

Mme Mireille Schurch. Tout au long de la discussion de ce projet de loi, nous avons apprécié, madame la ministre, votre volonté constructive.

Cependant, si nous partageons les préoccupations et les objectifs du Gouvernement, nous continuons de considérer que ce texte ne permettra pas de résoudre durablement les difficultés liées à la spéculation foncière.

En effet, les débats l’ont démontré, régler la question foncière est un préalable à l’élaboration d’une politique de construction. Plus précisément, sans intervention sur la structure même du marché foncier, l’action publique en la matière restera vaine. C’est d’ailleurs sur ce fondement, madame la ministre, que vous avez émis un avis favorable sur l’un de nos amendements, prévoyant la remise au Parlement d’un rapport sur l’élaboration d’un mécanisme permettant de réguler la valeur foncière et de définir des critères objectifs. Nous en prenons acte, et nous espérons être associés aux travaux du Gouvernement sur ce point.

À l’heure où l’on demande aux collectivités de fournir un effort supplémentaire dans le domaine de la construction, est-ce bien à celles-ci d’assumer les difficultés liées à l’acquisition foncière ? Nous ne le pensons pas. Selon nous, le dispositif de la proposition de loi que nous avons déposée le 30 juillet dernier constituait un mécanisme plus cohérent et pérenne.

Durant ces débats, vous avez opposé l’agence nationale foncière dont nous préconisons la création aux établissements publics fonciers, alors que leur vocation est différente : la première est propriétaire foncier et a pour domaine de compétence le logement, les seconds réalisent des opérations de portage et s’occupent plus généralement de l’ensemble des problématiques d’aménagement.

Aujourd’hui, les établissements publics fonciers jouent bien leur rôle au service de l’intérêt général ; il faut les conforter dans leurs missions tout en réfléchissant à la mise en place d’autres outils spécifiques pour le foncier affecté au logement.

Le dispositif de cession des terrains de l’État et des établissements publics avec décote s’apparente à une arme à un coup ; son application est limitée dans le temps et ne concerne que 930 parcelles, ce qui semble bien loin d’être à la hauteur de la demande sociale actuelle. Le présent texte ne constitue donc qu’une étape, et nous estimons nécessaire de revenir sur la question foncière par le biais d’un examen approfondi de notre proposition de création d’une agence nationale foncière.

Madame la ministre, vous nous avez assuré que la question du foncier serait au cœur du travail législatif des prochaines semaines. Dont acte ! Nous souhaitons être associés à la réflexion sur ce problème majeur.

Les collectivités, dont nous nous sommes faits les porte-parole, sont confrontées à des difficultés concrètes pour engager des programmes de construction de logements. Tout le monde en convient, construire plus et mieux est nécessaire. Mais comment, et avec quels crédits ? Demander des efforts supplémentaires en matière de construction à des collectivités déjà exsangues suppose que l’on facilite leur intervention dans ce domaine grâce à des dispositifs adaptés.

Madame la ministre, quel sera le rôle de la banque publique d’investissement dont la création est annoncée ? Accompagnera-t-elle les collectivités ? À quelle échéance ? Qu’en sera-t-il des crédits pour l’aide à la pierre dans la future loi de finances ? Nous attendons du Gouvernement qu’il prenne de véritables engagements sur ce point.

Nous approuvons le renforcement des objectifs et des sanctions de la loi SRU : il s’agit d’une avancée notable, d’un premier pas vers la reconnaissance de la nécessité de construire davantage de logements accessibles, c’est-à-dire de type PLAI, et vers une plus grande intransigeance envers les collectivités contrevenantes qui revendiquent cyniquement leur attitude. Nous regrettons que vous ayez refusé que les pouvoirs des préfets en la matière soient liés et que la prise d’un arrêté de carence soit une simple faculté.

Nous nous félicitons d’avoir tenu ferme quant à la défense de l’esprit de la loi SRU, non seulement en nous opposant aux velléités d’intégrer l’accession sociale à la propriété aux objectifs en matière de construction, mais également en affirmant que l’échelon de réalisation des objectifs doit rester celui de la commune, pour éviter que certains élus locaux ne se défaussent sur d’autres territoires au risque de susciter de véritables déséquilibres sociaux. Mon collègue Christian Favier a illustré ce point.

La construction de logements sociaux en cœur de ville n’est pas seulement une obligation morale et sociale ; c’est une exigence qui découle de notre détermination à lutter contre les fractures sociales et territoriales, ainsi que contre l’étalement urbain, qui défigure les campagnes. La ville de demain doit permettre la mixité des usages, en alliant développement économique, équipements publics et offre de logements accessibles. Assurer la mixité sociale est la condition d’un urbanisme réussi.

En conclusion, je souhaite réaffirmer, au côté d’acteurs du logement tels que le DAL ou la Fondation Abbé Pierre, la nécessité de redéfinir une politique publique nationale du logement.

Madame la ministre, nous vous rappelons solennellement l’exigence de renforcer les crédits alloués au logement. Mettre la rigueur en œuvre ne peut être un objectif politique. Cela constitue le meilleur moyen de ne pas se donner les moyens de garantir un véritable droit au logement.

Nous vous donnons acte que le présent projet de loi constitue un premier pas. C’est la raison pour laquelle nous le voterons.

M. le président. La parole est à M. Alain Fouché, pour explication de vote.

M. Alain Fouché. La liberté de vote existant au sein de notre groupe, je voterai pour ma part ce projet de loi.

La France connaît certes un manque important de logements sociaux ou à loyer modéré : on recense 1,7 million de demandeurs d’un tel logement, mais de 3,5 millions à 4 millions de personnes sont en réalité concernées.

Certes, ce texte n’est pas parfait, mais je ne connais pas de loi qui le soit. Il témoigne du moins d’une volonté d’inciter les communes à accueillir sur leur territoire, au titre de la mixité sociale, des personnes qui rencontrent des difficultés. La France souffre de la formation de ghettos où se développe la délinquance et se superposent les problèmes. Une telle incitation me paraît intéressante, s’agissant en particulier des communes qui refusent délibérément la construction de logements locatifs sociaux sur leur territoire.

La mise en œuvre de ce texte permettra aussi de mettre à disposition des collectivités ou des offices d’HLM des terrains bloqués depuis des années par des établissements publics qui en exigent un prix prohibitif. Comme je le faisais remarquer lors de la discussion générale, il faudrait sans doute étendre le champ de ce dispositif à certains ministères régaliens qui adoptent la même attitude.

Enfin, je souhaite qu’un effort plus important soit consenti pour favoriser l’acquisition de leur logement par les locataires, car la demande est très forte.

M. le président. La parole est à M. Philippe Dallier, pour explication de vote.

M. Philippe Dallier. Je voudrais tout d’abord me féliciter du climat dans lequel ce débat s’est déroulé, grâce notamment à votre attitude d’ouverture, madame la ministre, monsieur le rapporteur. Nous sommes sortis de l’imprécation, et c’est tant mieux !

Ayant déjà longuement exposé les raisons pour lesquelles je m’oppose à certaines dispositions du présent texte, je n’y reviendrai pas.

Je me bornerai à formuler un vœu : celui de voir le contrat primer sur la contrainte. (Mme Catherine Procaccia applaudit.) Sur un sujet aussi difficile, mieux vaudrait jouer la carte de la confiance envers les élus locaux, même s’il est bien entendu nécessaire de pouvoir sanctionner ceux qui font montre de mauvaise volonté.

Cela étant, on demande aux élus de construire davantage sans qu’aucune contrepartie soit prévue, en particulier pour les communes qui ne bénéficieront pas d’une cession de terrains de l’État avec décote. Je déplore cette situation, qui nuira à l’efficacité du dispositif.

Mme Sophie Primas. Très bien !

M. le président. La parole est à M. Alain Bertrand, pour explication de vote.

M. Alain Bertrand. À une exception près, les membres du RDSE voteront le présent projet de loi.

En effet, ce texte nous semble marquer une rupture bienvenue et permettre de répondre à une attente de la société française et des plus fragiles de nos concitoyens. Ce chantier extrêmement important devait être ouvert rapidement. Mme la ministre a réalisé un excellent travail, de même que le Sénat.

M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...

Je mets aux voix l'ensemble du projet de loi.

(Le projet de loi est adopté.) – (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste, du groupe CRC et du groupe écologiste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)

M. le président. La parole est à Mme la ministre.

Mme Cécile Duflot, ministre. Je voudrais remercier l’ensemble des sénatrices et sénateurs qui ont participé à la discussion de ce projet de loi, dans des conditions peut-être un peu difficiles… J’ai été très sensible à l’intérêt qu’ils ont porté à ce travail de fond.

Ce n’était qu’une première étape, car nous ne manquerons pas d’occasions de nous retrouver afin d’approfondir ensemble la réflexion, sans même devoir attendre le printemps prochain et l’examen du grand texte que je vous ai annoncé. Je ne doute pas que vous ferez alors preuve du même enthousiasme ! (Nouveaux applaudissements sur les mêmes travées.)

Explications de vote sur l'ensemble (début)
Dossier législatif : projet de loi relatif à la mobilisation du foncier public en faveur du logement et au renforcement des obligations de production de logement social