Mme la présidente. La parole est à Mme la ministre déléguée.

Mme Hélène Conway-Mouret, ministre déléguée auprès du ministre des affaires étrangères, chargée des Français de l’étranger. Monsieur le sénateur, la loi n° 2006-396 du 31 mars 2006 pour l’égalité des chances a introduit dans le code de la santé publique un article prévoyant, pour toute personne déclarant l’ouverture, la mutation, la translation ou le transfert d’un débit de boissons à consommer sur place de deuxième, troisième et quatrième catégories, l’obligation de se soumettre à une formation d’une durée minimale de vingt heures. Celle-ci porte sur les droits et obligations attachés à l’exploitation d’un débit de boissons. Cette formation est répartie sur trois jours au moins.

À l’issue de cette formation, le stagiaire se voit remettre par l’organisme formateur un permis d’exploitation, valable dix ans, qui doit être produit devant le maire lors de la déclaration. Cette dernière est obligatoire, quel que soit le statut juridique, personne physique ou personne morale, du propriétaire de la licence. Une commune peut ainsi se porter acquéreur d’une licence. Cette faculté revêt un réel intérêt lorsqu’il s’agit de la dernière licence présente dans la commune. Dans ce cas, l’article L. 3332-11 du code de la santé publique en interdit le transfert.

Comme vous le savez, une licence non exploitée durant trois ans cesse d’exister et, parfois, aucun investisseur ne souhaite la racheter. Pourtant, la présence de ce commerce constitue souvent un atout pour le tissu économique des communes, notamment en milieu rural. C’est pourquoi la disposition permettant à une commune d’acquérir une licence semble essentielle.

Le déclarant d’une licence communale sera la personne qui l’exploitera : soit un membre du conseil municipal agissant au nom de la commune propriétaire, soit la personne physique à qui la commune loue ou confie sa licence. Dans tous les cas, le déclarant doit suivre la formation, et donc être titulaire du permis d’exploitation au moment de la déclaration. Aucune dérogation n’est prévue, y compris lorsque la licence est détenue par une commune.

Cette formation vise à aider les exploitants d’une licence à adopter les comportements les plus adaptés s’agissant de la délivrance d’un produit qui n’est pas anodin. Les intéressés sont en effet confrontés à des problèmes de santé publique et d’ordre public, dont la méconnaissance est susceptible d’engager leur responsabilité pénale.

Cette formation, instaurée à la demande de la profession et en faveur des exploitants, leur permet d’appréhender au mieux l’ensemble des dispositions, souvent complexes, qui leur sont applicables. C’est pourquoi elle comporte une partie théorique visant à apporter aux stagiaires les connaissances juridiques nécessaires à l’exercice de leur activité et à décrire les bons usages à respecter.

La partie pratique permet, quant à elle, de mettre en œuvre ces connaissances au travers de cas concrets, par exemple en montrant comment réagir face à un mineur, une personne en état d’ébriété ou une femme enceinte souhaitant consommer une boisson alcoolique.

Comme tous les autres exploitants, ceux qui utilisent une licence communale, que ce soit en permanence ou lors des fêtes locales, ont tout avantage à connaître ces dispositions.

Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Jacques Filleul.

M. Jean-Jacques Filleul. Je vous remercie, madame la ministre, de ces précisions tout à fait utiles. De nombreux élus municipaux se demandent en effet si cette formation s’applique à leur commune et qui envoyer pour la suivre. Vous avez indiqué qu’il devait s’agir du maire ou du conseiller municipal chargé de cette question. Je vous suis reconnaissant d’avoir éclairci ce point de droit.

cumul d'un mandat parlementaire avec des fonctions exécutives locales

Mme la présidente. La parole est à M. Jean Louis Masson, auteur de la question n° 190, adressée à M. le ministre de l’intérieur.

M. Jean Louis Masson. Madame la ministre déléguée, le cumul de mandats et son corollaire, l’absentéisme parlementaire, nuisent au bon fonctionnement de la démocratie. Pour les parlementaires, le problème concerne avant tout le cumul de lourdes fonctions exécutives locales, telles que celles de maire de grande ville ou de président de conseil général, lesquelles correspondent elles aussi à une activité à temps plein.

À la veille de l’élection présidentielle, les députés et les sénateurs socialistes avaient tous cosigné une proposition de loi interdisant le cumul abusif d’un mandat parlementaire avec une fonction exécutive locale.

Il apparaît que, malgré cet engagement solennel de l’actuelle majorité, les élus qui profitent du système sont aussi nombreux à gauche qu’à droite. C’est ainsi qu’un combat d’arrière-garde est engagé par ceux qui s’accrochent au statu quo.

À titre d’exemple, je constate que l’actuel président du groupe socialiste du Sénat, par ailleurs maire d’une très grande ville, est en pointe pour défendre les cumulards, alors qu’il a cosigné la proposition de loi socialiste à laquelle je viens de faire allusion. Je comprends donc assez mal sa position actuelle !

De même, je suis indigné que, dans Le Figaro du 9 juillet 2012, certains parlementaires aient prétendu que seuls les titulaires d’un exécutif local étaient de bons sénateurs. Selon eux, les autres ne seraient que des « élus hors-sol, coupés de la gestion quotidienne des collectivités ». Ainsi, je serais un élu « hors-sol, coupé de la gestion quotidienne des collectivités », et tout cela parce que, à la suite de mon élection en 2001, j’ai refusé de conserver une fonction exécutive locale…

Il n’empêche que, lors des élections sénatoriales de 2011, et sans avoir reçu l’investiture d’aucun parti politique, j’ai très largement devancé les deux autres listes de droite qui, elles, avaient une investiture et étaient conduites par des « super-cumulards ». Conseiller général de base depuis trente ans, les réalités du terrain, je les connais ! Je n’ai pas besoin d’être président de conseil général ou maire de grande ville ! Je dirais même mieux : c’est parce que je n’ai pas d’exécutif local que j’ai le temps de m’occuper des réalités du terrain !

Enfin, certains prétendent que le Sénat peut bloquer le futur projet de loi organique sur le cumul de mandats au motif que, aux termes de l’article 46 de la Constitution, « les lois organiques relatives au Sénat doivent être votées dans les mêmes termes par les deux assemblées ». Ils sont donc prêts à se livrer à un chantage pour négocier un régime dérogatoire permettant aux sénateurs, et à eux seuls, de continuer à cumuler. Cela donnerait du Sénat une image désastreuse : nos concitoyens pourraient penser qu’il est un repaire de cumulards uniquement soucieux de préserver les avantages qui s’attachent à leur situation personnelle.

Quoi qu’il en soit, la majorité de gauche contrôle dorénavant l’Élysée, l’Assemblée nationale et le Sénat. Le Président de la République et le Gouvernement n’ont donc aucune excuse pour ne pas respecter leurs engagements, d’autant qu’il semble possible de passer outre à un éventuel blocage sénatorial. En effet, deux décisions du Conseil constitutionnel, respectivement en date du 3 mars et du 9 avril 2009, ont considéré que, si « chaque assemblée est concernée par les mêmes dispositions », la loi organique n’est alors pas « relative au Sénat » au sens de l’article 46 de la Constitution.

Le ministre de l’intérieur partage-t-il cette analyse ? Si oui, madame la ministre, je vous demande de confirmer que le Président de la République, le Gouvernement et la majorité parlementaire respecteront leurs engagements en matière de cumul.

Mme la présidente. La parole est à Mme la ministre déléguée.

Mme Hélène Conway-Mouret, ministre déléguée auprès du ministre des affaires étrangères, chargée des Français de l'étranger. Monsieur le sénateur, comme il a été indiqué en réponse à votre question orale lors de la séance du 24 juillet 2012, la politique que conduira le Gouvernement en matière de non-cumul des mandats est claire. C’est celle que le Premier ministre a définie dans son discours de politique générale et qu’il a réaffirmée devant la Haute Assemblée : « Pour permettre aux parlementaires de se consacrer pleinement à l’exercice de leur mandat, et conformément aux engagements du Président de la République, il sera mis fin au cumul entre un mandat de parlementaire et l’exercice de fonctions exécutives locales. »

Vous interrogez le ministre de l’intérieur sur les modalités d’adoption d’un projet de loi sur le cumul des mandats et demandez si un tel texte devra être considéré comme une loi organique relative au Sénat, rappelant que, dans un tel cas, la Constitution impose une procédure renforcée puisque le quatrième alinéa de son article 46 dispose que « les lois organiques relatives au Sénat doivent être votées dans les mêmes termes par les deux assemblées ».

Dans sa décision n° 85-195 DC du 10 juillet 1985, le Conseil constitutionnel a précisé le champ des lois organiques relatives au Sénat : « par les termes "lois organiques relatives au Sénat" employés par l’article 46 de la Constitution, il faut entendre les dispositions législatives qui ont pour objet, dans les domaines réservés aux lois organiques, de poser, de modifier ou d’abroger des règles concernant le Sénat ou qui, sans se donner cet objet à titre principal, n’ont pas moins pour effet de poser, de modifier ou d’abroger des règles le concernant ; qu’en revanche, si une loi organique ne présente pas ces caractères, la seule circonstance que son application affecterait indirectement la situation du Sénat ou de ses membres ne saurait la faire regarder comme relative au Sénat. »

Il apparaît que le caractère de loi organique relative au Sénat est lié à la nature des dispositions qu’elle contient. Or, à ce jour, les dispositions du texte du Gouvernement sur le cumul des mandats ne sont pas arrêtées.

En effet, le Gouvernement n’entend pas anticiper sur les travaux de la Commission de rénovation et de déontologie de la vie publique, présidée par M. Lionel Jospin. Le Président de la République a souhaité que la réforme de la législation sur le cumul des mandats entre dans le champ de travail de cette instance, dont les conclusions seront rendues publiques au mois de novembre prochain.

Mme la présidente. La parole est à M. Jean Louis Masson.

M. Jean Louis Masson. Madame la ministre, votre réponse relève un peu de la langue de bois, convenez-en !

Pour compléter mon propos, j’avancerai deux arguments qui militent en faveur d’une interdiction du cumul d’un mandat parlementaire et d’une fonction exécutive locale.

D’une part, la suppression du cumul permettrait un renouvellement du personnel politique, avec l’arrivée d’élus nouveaux, plus jeunes, ainsi que, probablement, une amélioration de la parité hommes-femmes.

D’autre part, et cet argument n’est pas suffisamment mis en avant, la super-concentration des pouvoirs qui résulte des cumuls abusifs est l’un des principaux facteurs de corruption.

Les statistiques montrent que 202 sénateurs sur 348 exercent actuellement des fonctions exécutives locales. Plus généralement, c’est le cas de 55 % des parlementaires.

J’ai recensé le nombre de parlementaires condamnés au cours des dix dernières années ou actuellement mis en examen pour détournement de fonds publics ou pour corruption : environ 90 % d’entre eux exercent une fonction exécutive locale. C’est mathématique : un parlementaire qui cumule son mandat national et une fonction exécutive locale a une probabilité 7,4 fois plus élevée d’être impliqué dans une affaire de corruption qu’un parlementaire qui ne cumule pas.

Cet élément mérite aussi d’être pris en compte. Dans un souci de moralisation de la vie publique, nous n’avons pas intérêt à laisser certains cumuler trop de pouvoirs et, en fin de compte, se soustraire à la loi.

restructuration du groupe sanofi-aventis

Mme la présidente. La parole est à Mme Marie-Thérèse Bruguière, auteur de la question n° 174, adressée à M. le ministre du redressement productif.

Mme Marie-Thérèse Bruguière. Monsieur le ministre, je souhaite appeler une fois encore votre attention sur la restructuration du groupe Sanofi-Aventis.

Cette restructuration de vaste ampleur concerne principalement le secteur de la recherche et développement du groupe. Pour ma part, je m’inquiète particulièrement du sort du site de Montpellier – l’un des plus importants du groupe en matière de recherche et développement –, pour lequel la disparition de près de 300 postes est aujourd'hui évoquée.

La direction du groupe français a annoncé au mois de juillet dernier une réflexion sur sa réorganisation, notamment dans le secteur de la recherche, sans donner de détails. Certes, depuis cette date, des réunions ont été organisées, mais il faut reconnaître que le flou demeure ; d’où l’inquiétude grandissante des salariés.

C’est pourquoi, même si Sanofi justifie son projet par la nécessaire réorientation de sa recherche pour la rendre plus efficace, ce que l’on peut admettre, en tant qu’élue je conteste que cela se fasse au détriment de l’image de l’industrie pharmaceutique de la France, au détriment de territoires aux atouts solides – disant cela, je pense plus particulièrement à ma région – et enfin au détriment des chercheurs, puisque de nombreuses suppressions d’emplois sont prévues.

Avec cette opération, c’est l’avenir de l’industrie pharmaceutique qui est en jeu, écornant l’image de la France à l’étranger.

Nous savons tous que ce groupe, qui emploie plus de 98 000 salariés dans le monde, dont 28 000 en France, enregistre des résultats très positifs et reste une entreprise performante : il se situe au 1er rang français et européen et au 4e rang mondial. Il est connu pour la qualité de ses recherches et la contribution active de ses chercheurs à la découverte et au développement des principaux médicaments. C’est une valeur sûre pour le secteur de l’industrie pharmaceutique et, au-delà, pour l’image de la France dans le monde.

La réduction du nombre des chercheurs sur notre sol risque donc de fragiliser la capacité d’innovation de cette industrie. Par ailleurs, elle aura de très graves conséquences économiques dans l’agglomération montpelliéraine.

Aujourd’hui, on annonce la suppression de 300 emplois d’un coup. Certes, cela prendra aussi la forme de départs à la retraite, mais tous les salariés licenciés ne retrouveront pas un poste équivalent dans la région. Ils seront donc contraints de quitter la région avec leur famille, ce qui aura des conséquences très lourdes sur l’économie locale.

Si l’on ajoute le transfert du département d’oncologie à Ivry et l’arrêt d’axes de recherche, la région montpelliéraine risque de voir son image altérée par ces annonces et, par là même, de devenir moins attractive pour l’implantation ou le développement d’entreprises dans ce secteur d’activité.

Enfin, au-delà de ces considérations économiques, je déplore dans cette restructuration la perte humaine et l’immense gâchis intellectuel. On ne peut s’empêcher de penser à l’investissement, tant en années d’études qu’en expériences professionnelles, qui est nécessaire dans le domaine de la recherche scientifique. Ce brusque arrêt représente une perte importante pour la science. De plus, par extension, on envoie en direction des jeunes un signal négatif pour les carrières scientifiques : comment expliquer à ceux qui se lancent dans cette filière que, au bout de x années d’études, ils auront le choix entre l’exil ou l’impossibilité d’exercer le métier pour lequel ils auront étudié durant de longues années ?

Depuis plusieurs mois, les salariés du site de Montpellier sont mobilisés et craignent d’être oubliés et noyés dans la longue liste de plans sociaux : Bouygues, Iveco, Peugeot... C’est pourquoi ils restent mobilisés et manifestent tant à Paris qu’à Montpellier.

Aujourd’hui encore, monsieur le ministre, je souhaite me faire le relais de leurs inquiétudes afin que vous vous engagiez pour préserver le développement et la recherche dans le domaine pharmaceutique.

Mme la présidente. La parole est à M. le ministre.

M. Arnaud Montebourg, ministre du redressement productif. Madame la sénatrice, le plan de restructuration annoncée par Sanofi quelques jours après les élections législatives fait partie de ces plans qui ont été opportunément dissimulés pendant la période électorale et qui ont ensuite déferlé par vagues sur le pays.

J’ai reçu Christian Lajoux, président de Sanofi France, et Christophe Viehbacher, directeur général de Sanofi monde. Ils m’ont expliqué que, malgré les 5 milliards d'euros de profits réalisés par cette entreprise l’année dernière, il était nécessaire de licencier entre 2 500 et 2 800 salariés en France.

Évidemment, la réaction du Gouvernement a été vive, pour ne pas dire musclée. Au mois de septembre dernier, après mûre réflexion et âpres discussions avec le groupe Sanofi, une réunion s'est tenue au palais de l'Élysée, rassemblant les conseillers du Président de la République, ceux du Premier ministre, mes collaborateurs et moi-même, au cours de laquelle Sanofi a accepté une réduction à hauteur de 1 390 suppressions de postes. Pour nous, c'était encore trop et Sanofi a finalement accepté de réduire encore ce nombre. Quelques jours plus tard, Sanofi m'a adressé une lettre que j'ai transmise à l'intersyndicale ; la direction du groupe y disait accepter zéro licenciement et la suppression nette de 914 postes.

Néanmoins, d'après l'intersyndicale et d'après les analyses du Gouvernement, le plan social ne traduit pas cet engagement tel qu'il a été exprimé, et par écrit. En conséquence, les discussions vont se poursuivre. Le Gouvernement ne peut pas accepter ce double langage : la lettre de M. Christian Lajoux, président de Sanofi France, engage moralement son groupe vis-à-vis de la République. Or, je le rappelle au passage, 90 % du chiffre d'affaires que Sanofi réalise en France sont « solvabilisés » par l'assurance maladie : Sanofi a donc des devoirs envers la France, à tout le moins celui de l'honnêteté et de la sincérité.

À l'heure où je vous parle, il y a des discussions fermes entre les pouvoirs publics et Sanofi. Je tiendrai informés à la fois les élus qui m'interrogeront et les acteurs présents sur les territoires concernés, notamment Toulouse et Montpellier. Un certain nombre de concessions ont été consenties concernant le site de Toulouse ; à Montpellier en revanche, où plusieurs centaines de chercheurs sont visés, la discussion doit avancer.

Le Gouvernement est particulièrement attentif au sort de la recherche sur notre territoire. Madame la sénatrice, ce n'est pas pour rien que le Gouvernement a décidé d'augmenter, d'amplifier, de pérenniser le crédit d'impôt recherche dans le projet de loi de finances pour 2013, tant critiqué sur les bancs de l'UMP à l'Assemblée nationale. En effet, l'attractivité de notre territoire en matière de recherche et développement constitue précisément l'un des éléments de la compétitivité de la France. Comment comprendre que, alors que beaucoup d'entreprises profitent de ce crédit d'impôt recherche, en sont satisfaites et le proclament, relocalisant même des activités de recherche sur notre territoire, Sanofi fasse exactement l'inverse ?

Madame la sénatrice, voilà où en sont les discussions entre Sanofi et le Gouvernement.

J’ai rencontré dernièrement l’ancien président de Sanofi-Aventis, Jean-François Dehecq. Je dois vous confier qu’il éprouve des sentiments plus que mitigés quant à l’attitude de ses successeurs… Je n’en dirai pas plus. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe écologiste.)

Mme la présidente. La parole est à Mme Marie-Thérèse Bruguière.

Mme Marie-Thérèse Bruguière. Je vous remercie de votre réponse, monsieur le ministre.

Sanofi-Aventis doit mettre en œuvre un véritable plan de restructuration. Envoyer à la retraite des salariés qui souhaiteraient continuer à travailler, cela pose tout de même un sérieux problème ! Le site de Montpellier est centré sur la recherche ; il faut donc absolument le sauvegarder, car sa disparition serait une catastrophe pour la région.

devenir du bâtiment de l'école d'architecture de nanterre

Mme la présidente. La parole est à M. André Gattolin, auteur de la question n° 143, adressée à Mme la ministre de la culture et de la communication.

M. André Gattolin. Monsieur le ministre, ma question porte sur le devenir du bâtiment de l’école d’architecture de Nanterre, dans les Hauts-de-Seine.

Construit en 1972, ce bâtiment est emblématique de l’architecture modulaire des années 1970. Ses architectes Jacques Kalisz et Roger Salem ont voulu favoriser les relations entre les étudiants par un réel décloisonnement du bâti, afin d’améliorer la fluidité des échanges et de l’information. Ils ont également voulu créer un lien entre le parc départemental André Malraux des Hauts-de-Seine, le quartier d’affaires de La Défense et les tours d’habitation Aillaud, du nom de l’architecte qui les a conçues.

Cependant, depuis le départ de l’école d’architecture en 2004, le bâtiment a été laissé à l’abandon et son état se dégrade. En 2005, la délégation permanente de la direction régionale des affaires culturelles d’Île-de-France s’est prononcée à l’unanimité en faveur du passage du bâtiment devant la commission régionale du patrimoine et des sites, la CRPS, dès qu’un nouveau propriétaire serait connu.

Deux associations, les Amis de l’école d’architecture de Nanterre et l’association pour la documentation et la conservation des sites architecturaux issus du mouvement moderne, DOCOMOMO France, se sont mobilisées pour sa sauvegarde, son classement et sa protection au titre des monuments historiques, en vue de refaire de ce bâtiment un lieu de vie et de rencontres, ouvert aux activités culturelles comme aux nécessités socio-économiques actuelles. Plus de 700 personnes, dont l’architecte Paul Chémétov et Franck Hammoutène, ancien président de l’Académie d’architecture, ont signé une pétition dans ce sens.

Des négociations ont été menées entre France Domaine et la mairie de Nanterre en vue de la cession du bâtiment à la commune. Cependant, en raison du prix demandé, aucun accord n’a pu être trouvé. Or le terrain de l’école d’architecture figure dans la liste, récemment diffusée par le ministère de l’égalité des territoires et du logement, des terrains que l’État envisage de céder à titre gratuit aux communes afin qu’elles puissent y bâtir des logements sociaux.

Sans remettre en cause l’absolue nécessité de construire des logements sociaux, on peut se demander s’il ne conviendrait pas de retirer de cette liste le terrain de l’école d’architecture et reconnaître la valeur culturelle du bâtiment construit dessus en procédant à son classement. N’est-il pas temps que l’État se donne les moyens de réutiliser le bâtiment conformément à sa destination d’origine, la formation à l’architecture ou à d’autres métiers ?

D’autres utilisations de ce bâtiment sont également possibles. On pourrait, par exemple, envisager son affectation au Fonds régional d’art contemporain d’Île-de-France, qui cherche des espaces pour aider des groupes de créateurs, ou sa cession à la Ville de Nanterre pour qu’elle y crée un espace culturel.

Je souhaiterais savoir ce qu’envisage Mme la ministre de la culture et de la communication pour ce bâtiment.

Mme la présidente. La parole est à M. le ministre.

M. Arnaud Montebourg, ministre du redressement productif. Monsieur le sénateur, je vais vous livrer les éléments de réponse que ma collègue et amie Aurélie Filippetti m’a demandé de vous transmettre.

Comme vous l’avez souligné à juste titre, l’école d’architecture de Nanterre, construite en 1972 par l’architecte Jacques Kalisz, a été désaffectée en 2004 et transférée au service des domaines en vue d’une cession. La Ville de Nanterre s’est montrée intéressée, envisageant d'abord un projet d’équipement culturel et associatif, puis une opération mixte intégrant des logements sociaux, conformément aux exigences présentées par la préfecture dans le cadre de la négociation du prix de vente. Dernièrement, la mairie s’est déclarée favorable au projet d’un centre dédié aux arts culinaires, proposé par le groupe Ducasse.

Une association, les Amis de l’école d’architecture de Nanterre, animée notamment par le fils de Jacques Kalisz, exige la protection intégrale du bâtiment et suggère des réutilisations coûteuses et peu pertinentes, comme le transfert des archives de l’Institut français d’architecture, l’IFA. L’utilisation du bâtiment par le FRAC d’Île-de-France nous paraît tout aussi peu appropriée.

Si la conservation intégrale est sans doute incompatible avec toute cession onéreuse à un prix satisfaisant, le ministère de la culture et de la communication s’est efforcé d’encourager la Ville, qui a fait part de son intérêt, à considérer des hypothèses de conservation au moins partielle et à se concerter avec les demandeurs de protection qui bénéficient d’un certain écho, notamment auprès de l’association DOCOMOMO France.

La position du ministère de la culture et de la communication n’a pas changé depuis 2005 : l’intérêt patrimonial de cette œuvre de Jacques Kalisz relève du label « Patrimoine du XXe siècle » plutôt que d’une protection au titre des monuments historiques. La recherche d’une solution de reconversion respectueuse de l’architecture doit donc être privilégiée.

Cette position est conforme à l’avis qu’a émis la CRPS en juillet 2005 en réponse à la demande de protection formulée par l’association les Amis de l’école d’architecture de Nanterre. La délégation permanente de la CRPS s’est prononcée en faveur de l’examen du dossier, à condition « que les négociations sur l’avenir du bâtiment se soient stabilisées et aient débouché sur un véritable projet de réhabilitation ». À nos yeux, cette condition n’est pas remplie pour le moment.

Le projet présenté par le groupe Alain Ducasse de créer un campus dédié aux arts culinaires, qui a la faveur de la municipalité, est en cours d’élaboration par un cabinet d’architectes. Tous les acteurs, en particulier le groupe Ducasse, avertis par le ministère de la culture et de la communication de l’intérêt patrimonial du bâtiment, y sont tout à fait sensibles et souhaitent le prendre en compte.

Concernant la liste des sites appartenant à l’État et susceptibles d’être mobilisés en faveur de la création de logements, le premier recensement a été effectué en 2005. Cet exercice a été mené par France Domaine en lien avec les ministères et les préfets. Dès cette date, le site de l’ancienne école d’architecture de Nanterre a été identifié. La liste de sites établie en 2005 continue à servir de base de travail.

La liste des opérations identifiées pour le programme 2012-2016 a été constituée par le ministère de l’égalité des territoires et du logement à partir des propositions des préfets de département et de région, mais aussi des sites déjà identifiés dans le programme précédent et dont la mise en chantier a été décalée au-delà de 2012. C’est ce qui explique que l’ancienne école d’architecture de Nanterre y figure toujours. Le ministère de la culture et de la communication n’avait pas été saisi à ce jour ; il l’est désormais.

Mme la présidente. La parole est à M. André Gattolin.

M. André Gattolin. Monsieur le ministre, je vous remercie de votre réponse, dont je ferai part à l’ensemble des professionnels et acteurs préoccupés par le devenir de ce bâtiment.

À travers cet exemple, je tenais à soulever la question de l’ensemble du patrimoine non protégé par l’État. Nous avons certes une logique de conservation patrimoniale globale, mais celle-ci concerne essentiellement un patrimoine considéré comme glorieux, le plus souvent antérieur au XIXsiècle. C’est ainsi que, dans les Hauts-de-Seine, l’ensemble du patrimoine scolaire et industriel et certains bâtiments récents font l’objet d’une moindre considération.

Pour ma part, en tant qu’écologiste, et sans être pour autant fermé à la mutation de la ville, qui doit répondre aux exigences tant culturelles qu’économiques de la société, j’estime que nous devons être capables de conserver des bâtiments de grande valeur architecturale construits dans un passé assez récent.

L’école d’architecture de Nanterre ne bénéficie de presque aucun gardiennage et n’est pratiquement pas entretenue. Plus le temps passe et plus le bâtiment se dégrade, ce qui menace à terme la possibilité même de le réutiliser.

dessertes ferroviaires du jura