M. André Reichardt. Très bien !

Mme Christiane Taubira, garde des sceaux. Ce principe de laïcité est essentiel. On peut d’ailleurs considérer qu’il prend sa source dans l’idée même de la République. C’est ce que nous pouvons déduire de l’article 10 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen, mais il fallut des décennies de combat pour aboutir à cette loi de 1905 qui établit très clairement la séparation de l’État et des Églises et définit le cadre, que nous connaissons aujourd’hui encore, de la vie commune dans la cité, dans le rapport public et privé aux religions.

Le Président de la République l’a dit très clairement : il y aura d’autres réformes constitutionnelles. Il est certain que la question de la laïcité renvoie aux influences sur les institutions de l’État, ce qui n’est pas mineur. Vous l’avez mentionné, madame la sénatrice, dans une récente décision, le Conseil constitutionnel, saisi d’une question prioritaire de constitutionnalité, a renforcé les principes fondamentaux de la loi de 1905 : rappelant que le principe de laïcité relevait des droits et des libertés, il a consolidé ce qui est contenu dans notre loi de 1905.

Au mois de décembre dernier, le Président de la République s’est engagé à faire installer prochainement l’Observatoire national de la laïcité qui, créé par un décret de 2007, n’a pourtant pas encore vu le jour. Le Gouvernement fait en sorte qu’il soit mis en place dans les prochaines semaines pour l’assister dans le respect du principe de laïcité dans tous les services publics.

L’ensemble de ces dispositions nous aideront à avancer vers l’élaboration d’une bonne réforme constitutionnelle, qui tiendra compte de l’engagement 46 du Président de la République. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste, du groupe CRC et du groupe écologiste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)

grand paris

M. le président. La parole est à M. Roger Karoutchi.

M. Roger Karoutchi. Ma question s'adresse à M. le ministre de l'économie et des finances.

L’Île-de-France veut redevenir ce qu’elle était dans le passé, le moteur de la croissance de notre pays.

Le projet du Grand Paris, lancé par Nicolas Sarkozy, devait à la fois améliorer les transports et la vie quotidienne des Franciliens et recréer cette dynamique.

Les arbitrages rendus la semaine dernière par le Premier ministre sont connus. Sur les tracés, il peut y avoir débat, mais, globalement, tout le monde est d’accord.

En revanche, monsieur le ministre, des réserves s’expriment : les miennes, mais aussi de nombreuses autres ! Elles portent sur le phasage jusqu’en 2030 ou au-delà et sur le fait que, curieusement, les pôles de développement essentiels – Roissy, Orly, La Défense – sont prévus dans la dernière phase.

Le Grand Paris Express coûte 26 milliards d’euros. Il s’agit d’un projet sur lequel, je le dis d’emblée afin de rassurer le président Gaudin, l’État se déclare prêt à mettre 1 milliard d’euros si besoin est. Cela signifie qu’en réalité l’essentiel de la dépense – pour ne pas dire la totalité – est assuré par les collectivités franciliennes, par les Franciliens et par les entreprises.

M. François Rebsamen. Cela a toujours été ainsi !

M. Roger Karoutchi. Il n’y a donc pas de demande de la part des Franciliens envers l’État, et c’est bien ainsi !

Monsieur le ministre, l’Île-de-France, c’est 19 % de la population, 30 % de la recette fiscale. Le projet du Grand Paris, c’est 150 000 emplois, un point de croissance, 50 milliards d’euros de ressources fiscales supplémentaires pour l’État dans les trente prochaines années. Il va de soi que l’ensemble de ces recettes ne reviennent pas à l’Île-de-France. Ainsi, comme toujours, sur les 30 % de la recette fiscale provenant de l’Île-de-France, 22 % sont consacrées à nouveau par l’État à cette région, le reste – et c’est bien normal – est affecté à une péréquation d’État, indépendamment des péréquations législatives qui existent.

Monsieur le ministre, nous avons le sentiment que le fait de pouvoir réaliser ce projet, de mettre très rapidement en avant les grands pôles de développement, de faire en sorte d’accélérer le démarrage des travaux représente un élément de croissance, de création d’emplois et d’enrichissement pour l’État et, par conséquent, pour l’ensemble du pays.

Nous vous demandons d’intervenir, en votre qualité de ministre de l’économie, vous qui êtes conscients des aspects budgétaires et financiers du projet, pour inciter à démarrer le projet ou pour activer les secteurs qui, par définition, sont ceux qui peuvent enclencher le mouvement le plus rapidement. Employons-nous à créer la dynamique ! Le Premier ministre reconnaît ne pas être très sûr du financement après 2020. J’attire pour ma part votre attention : faisons en sorte de réussir tous ensemble ce grand projet national qu’est le Grand Paris ! (Applaudissements sur les travées de l'UMP, ainsi que sur certaines travées de l'UDI-UC.)

M. le président. La parole est à M. le ministre de l’économie et des finances.

M. Pierre Moscovici, ministre de l'économie et des finances. Monsieur le sénateur, je vous prie d’excuser le Premier ministre qui, vous le savez tous, est en déplacement au Canada et qui m’a demandé de vous répondre.

Mercredi 6 mars, le Premier ministre a présenté l’ambition du Gouvernement pour l’Île-de-France. Lorsque je dis « l’ambition du Gouvernement », je précise que c’est bien l’ambition de tout le Gouvernement que le Premier ministre a portée.

Vous avez raison, monsieur le sénateur, le Grand Paris est un défi francilien, mais c’est plus largement un enjeu de développement économique pour la France entière. Nous souhaitons, comme vous – et je pense que cette aspiration est partagée sur toutes les travées –, que l’Île-de-France soit un pôle extrêmement important, le principal dans le développement du pays.

En tant que ministre de l’économie et des finances, je sais l’importance du Grand Paris dans le développement économique de notre pays.

Le projet du Gouvernement incarne un modèle de développement et une politique d’investissement que nous défendons. C’est vrai, c’est un modèle de croissance, mais qui n’oublie ni la solidarité entre les Franciliens ni le désenclavement des territoires et au sein duquel la mobilité va de pair avec un effort pour le logement des Français et pour leur cadre de vie.

Le Premier ministre a en particulier présenté les décisions du Gouvernement pour le schéma des transports du nouveau Grand Paris, qui articule la rénovation du réseau existant et la création de nouvelles lignes dans un schéma global, sans distinction entre ce qui a été d’usage d’appeler « le plan de mobilisation » et le Grand Paris Express.

D’ici à 2030, l’ensemble du réseau du Grand Paris Express sera réalisé, les lignes étant lancées en parallèle et faisant l’objet d’une réalisation continue. C’est un chantier très important. C’est à cela que vous avez appelé et vous serez satisfait au-delà de vos espérances, puisque les capacités d’ingénierie des bureaux d’études, des entreprises de travaux publics, de l’outil industriel seront mobilisées pour plus de cinq ans. Plus concrètement, d’ici à 2017, 2 milliards d’euros supplémentaires seront affectés à la modernisation de lignes existantes. Ils permettront de porter les engagements possibles à 7 milliards d’euros.

C’est un effort sans précédent. Bien sûr, des discussions seront poursuivies qui permettront aux Franciliens de disposer sans attendre de transports de qualité au quotidien. Ils conforteront l’attractivité de la région Île-de-France pour les entreprises, la recherche universitaire et privée, la qualité de vie. Je peux vous assurer que l’ensemble des pôles de la région Île-de-France seront pris en compte.

Pour que tout cela se réalise, il faudra une réforme institutionnelle, notamment en matière de logement et d’aménagement. Vous le savez, le Gouvernement propose une intercommunalité renforcée en Île-de-France,…

M. Gérard Larcher. Il n’y aura plus de communes !

M. Pierre Moscovici, ministre. … la création de la métropole de Paris, ainsi que des pouvoirs accrus à l’échelle régionale pour garantir davantage de justice et d’équilibre dans nos politiques d’habitat.

Je voulais donc vous rassurer, monsieur le sénateur.

M. le président. Veuillez conclure, monsieur le ministre !

M. Pierre Moscovici, ministre. Il y a là un choix ambitieux, à la hauteur de l’enjeu, qui a été fait par le Gouvernement. Il appartiendra au Parlement de s’en saisir, mais vous pouvez faire confiance à la volonté du Gouvernement et à celle du Premier ministre, personnellement. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.)

réformes constitutionnelles (conseil supérieur de la magistrature)

M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Sueur.

M. Jean-Pierre Sueur. Ma question s'adresse à Mme la garde des sceaux.

Madame la ministre, nous voulons ardemment la modernisation de la vie publique, tellement nécessaire dans ce pays. Elle concerne par exemple l’indépendance du parquet, que vous respectez scrupuleusement, comme le fit naguère Mme Marylise Lebranchu.

Quelles sont vos intentions pour que cette indépendance soit la plus complète, la plus totale possible, ce qui n’exclura pas les circulaires pénales que vous produisez régulièrement ?

De même, quand viendra ce statut juridictionnel du chef de l’État, qui a tellement attendu ? À quand la suppression de la Cour de justice de la République de manière à instituer une procédure plus conforme au droit commun pour les ministres ?

Par ailleurs, il est nécessaire d’aller plus loin en matière de décentralisation. Nous voulons une réforme simple, claire, lisible, offensive et dynamique pour la France du XXIe siècle.

M. Alain Gournac. Oh là là !

M. Henri de Raincourt. C’est mal parti !

M. Jean-Pierre Sueur. Nous pensons notamment au cumul des mandats sur lequel il faudra avancer de manière passionnée et sans hésitation ! (Applaudissements sur quelques travées du groupe socialiste et du groupe écologiste. – Exclamations sur les travées de l'UMP.)

M. Gérard Larcher. Il faudra vous expliquer avec M. Rebsamen !

M. Jean-Pierre Sueur. Je m’adresse à tout le monde, monsieur Larcher, vous le voyez bien !

Je pense, enfin, à la démocratie sociale qu’il importe d’inscrire au sein de notre Constitution.

Sur tous ces sujets, des décisions ont été prises. D’autres le seront. (Exclamations amusées sur les travées de l'UMP.)

Madame la ministre, pouvez-vous nous éclairer sur le calendrier qu’entend mettre en œuvre le Gouvernement afin que cette nécessaire modernisation de la vie publique intervienne sans tarder, ici et maintenant ? (Applaudissements sur certaines travées du groupe socialiste et du groupe écologiste.)

M. le président. La parole est à Mme la garde des sceaux.

Mme Christiane Taubira, garde des sceaux, ministre de la justice. Monsieur le sénateur, monsieur le président de la commission des lois… (Exclamations sur les travées de l'UMP.) Oui, j’ai bien dit « monsieur le président de la commission des lois » ! Vous pouvez me faire grief de nombre de choses, messieurs, mais pas de manquer de courtoisie, en particulier devant nos assemblées ! (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste, du groupe CRC et du groupe écologiste.)

Monsieur le sénateur, comme vous avez abordé plusieurs sujets, je ne pourrai vous répondre que par des pétitions de principe ; en deux minutes trente, il ne me sera pas permis de faire mieux.

Le Premier ministre a présenté hier en conseil des ministres les quatre projets de loi de réforme constitutionnelle qui seront présentés au Parlement. Dès lors, il appartient au Parlement de les inscrire à son calendrier. Ces débats devraient normalement avoir lieu aux environs de l’été.

Je vous rappelle le contenu de ces projets de loi.

Vous avez insisté sur l’importance de respecter l’engagement du Président de la République quant à l’indépendance du parquet. La première réforme constitutionnelle concerne le Conseil supérieur de la magistrature. Le Président de la République l’a clairement exprimé : pour lui, la confiance des citoyens dans les institutions, en particulier dans l’institution judiciaire, relève du pacte républicain et en constitue une condition vitale.

Ce ne sera pas une réforme a minima. Elle sera audacieuse. (Exclamations sur les travées de l'UMP.) Il appartiendra au Parlement – Assemblée nationale et Sénat – d’en préciser le contenu et les contours. Le projet de loi indique bien d’ores et déjà qu’il faut mettre un terme à l’ère du soupçon, consolider la légitimité des magistrats, en particulier ceux du parquet, renforcer les conditions de l’impartialité et assurer cette indépendance, non pour le confort des juges, mais pour la sécurité des justiciables.

Dans cette perspective, un certain nombre de conditions doivent être réunies.

D’abord, il convient de revoir la composition du Conseil supérieur de la magistrature, qui ne comptera plus de personnalités qualifiées désignées par le pouvoir politique.

Ensuite, il s’agit de moderniser les conditions de nomination des magistrats. Ces nominations interviendront sur avis conforme du Conseil supérieur de la magistrature, qu’il s’agisse des magistrats du parquet ou des magistrats du siège.

Enfin, il faut aligner le régime disciplinaire.

Tout cela conforte ce qui est déjà inscrit dans la Constitution : l’unité du corps.

Le Gouvernement s’est déjà imposé le respect de ces dispositions, puisqu’il ne donne plus d’instructions individuelles. Évidemment, nous continuons à assurer la responsabilité de la politique pénale sur l’ensemble du territoire. Bien sûr, nous allons consolider tout cela dans la loi ! (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste, du groupe CRC et du groupe écologiste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)

M. Alain Gournac. Au suivant !

retraites

M. le président. La parole est à Mme Catherine Procaccia.

Mme Catherine Procaccia. Ma question s'adresse à Mme la ministre des affaires sociales et de la santé.

Après avoir tant critiqué la réforme des retraites engagée par François Fillon en la qualifiant d’injuste et de non financée,…

Mme Catherine Procaccia. … le Président de la République annonce – et je m’en réjouis – que le Gouvernement est enfin prêt à faire « des choix courageux » pour assurer « l’avenir de nos régimes de retraite ».

Mme Catherine Procaccia. Ces choix, quels seront-ils ? Le rapport du Conseil d’orientation des retraites souligne que, pour éviter la faillite du système, il nous faut trouver 20 milliards d’euros d’ici à 2020. J’insiste sur ce montant, car ce sont 47 milliards d’euros qui auraient été nécessaires si nous n’avions pas engagé la réforme en 2010.

Mme Catherine Procaccia. Je vous demande donc d’abandonner vos attaques !

Vous reconnaissez enfin que l’allongement de l’espérance de vie doit être pris en considération. Ce fait ne date pourtant ni d’hier ni de mai 2012 !

Madame la ministre, vous avez déclaré dimanche que des efforts seraient demandés à tous les Français. Puisque toucher à l’âge des départs à la retraite semble complètement tabou, à quels efforts pensez-vous ? Le Gouvernement doit être clair et honnête envers les Français. Oserez-vous leur annoncer qu’ils devront cotiser plus de 41,5 années ? Ils ne sont pas idiots ! Ils vont faire le calcul et ils verront que les 62 ans ne sont qu’un leurre ! Pourtant, cela ne suffira pas, vous le savez !

En faisant sauter, le verrou des 62 ans l’été dernier, vous avez donné un signal contradictoire aux Français et dépensé 3 milliards d’euros. Vous avez ainsi contraint les régimes complémentaires à décider de désindexer les pensions.

Après avoir instauré à l’automne une nouvelle contribution à la charge des retraités, allez-vous continuer à les paupériser ? Contrairement à ce que vous aimez faire croire, ils sont loin d’être des nantis.

Madame la ministre, je vous poserai trois questions précises.

Premièrement, que comptez-vous faire avec les salariés des régimes spéciaux ? (Applaudissements sur certaines travées de l'UDI-UC.) Vont-ils continuer à être exemptés des futurs efforts, à pouvoir partir à la retraite à 52 ans, comme les cheminots, ou à 57 ans, comme les autres agents de la SNCF et de la RATP ?

Deuxièmement, prendrez-vous aujourd’hui l’engagement de présenter votre réforme devant le Parlement, et non de légiférer par ordonnance, comme le suggère le porte-parole du Gouvernement ? (Très bien ! et applaudissements sur les travées de l'UMP.)

M. Gérard Cornu. Bonne question !

Mme Catherine Procaccia. Troisièmement, lorsque vous étiez députée, vous souhaitiez une réforme garantie financièrement jusqu’en 2030. Celle que vous allez nous proposer aura-t-elle les ambitions de celle que vous nous réclamiez ? (Très bien ! et applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UDI-UC.)

M. le président. La parole est à Mme la ministre des affaires sociales et de la santé.

Mme Marisol Touraine, ministre des affaires sociales et de la santé. Oui, madame la sénatrice, la réforme du précédent gouvernement n’était ni juste ni financée. (Vives protestations sur les travées de l'UMP.) Si tel avait été le cas, nous n’aurions pas besoin aujourd’hui de remettre l’ouvrage sur le métier ! (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.)

M. Rémy Pointereau. N’importe quoi !

Mme Marisol Touraine, ministre. C’est parce que votre réforme était injuste que nous avons pris et tenu l’engagement, dès notre arrivée aux responsabilités, de permettre à celles et ceux qui ont commencé à travailler jeunes et cumulent la totalité de leurs annuités cotisées de partir à la retraite dès l’âge de 60 ans.

C’est parce que votre réforme n’était pas financée que nous avons dû engager des travaux nous permettant d’amorcer une nouvelle réforme. (Protestations sur les travées de l'UMP.)

Vous me permettrez, madame la sénatrice, de saisir l’occasion que vous me donnez pour saluer l’engagement des partenaires sociaux et leur sens des responsabilités (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste), qui leur ont permis d’aboutir cette nuit à un compromis.

M. Jean-Claude Lenoir. Répondez à la question !

M. Gérard Cornu. La réponse !

Mme Marisol Touraine, ministre. Ils se sont engagés à ce que les régimes complémentaires de retraite, qui contribuent pour une part significative à la retraite des salariés du privé, soient assurés dans la durée.

Le Gouvernement a en effet pour exigence, madame la sénatrice, de faire en sorte que nos régimes de retraite par répartition soient garantis dans la durée… (Exclamations sur les travées de l'UMP.)

Mme Marisol Touraine, ministre. … et que les Français puissent compter sur une retraite versée grâce à la solidarité nationale. (Mme Sophie Primas s’exclame.)

Or, aujourd’hui, les jeunes générations sont inquiètes. Nous avons donc commandé un rapport au Conseil d’orientation des retraites. (Vives exclamations sur les travées de l'UMP.)

M. Alain Gournac. Ben voyons !

Mme Marisol Touraine, ministre. Il fait état d’un déficit de l’ordre de 20 milliards d’euros d’ici à 2020. (Nouvelles exclamations sur les mêmes travées.)

Une commission a été mise en place ; elle auditionnera notamment les partenaires sociaux et soumettra des pistes de propositions...

Mme Marisol Touraine, ministre. … qui devraient permettre au Gouvernement d’agir dans trois directions : le financement à court terme de nos régimes de retraite pour que les Français soient assurés de la pérennité de nos régimes ; la consolidation dans la durée des régimes de retraite par répartition ; l’introduction de mesures d’équité, que nous nous sommes engagés à prendre et sur lesquelles nous allons travailler.

M. Didier Guillaume. Voilà une bonne réponse !

M. François Rebsamen. C’est clair !

Mme Marisol Touraine, ministre. Je ne doute pas, madame la sénatrice, que vous y apporterez une contribution utile pour l’ensemble des Français. (Vifs applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe écologiste. – Exclamations sur les travées du l’UMP.)

lgv paris–orléans–clermont-ferrand–lyon (polt)

M. le président. La parole est à M. Jean-François Mayet.

M. Jean-François Mayet. Ma question s’adresse à Mme la ministre de l’écologie, du développement durable et de l’énergie, qui n’est hélas ! pas présente, ce que je regrette.

L’Indre fait partie des dix départements du Centre sinistrés au plan ferroviaire. Dans ce domaine, la ligne Paris-Orléans-Limoges-Toulouse, le POLT, constitue notre seul moyen actuel de transport ferroviaire, mais sa fiabilité, sa vitesse et son confort ressemblent à ceux des années soixante. Elle est aussi notre seule raison d’espérer l’établissement d’une liaison confortable et rapide entre Paris et Toulouse et ainsi la connexion au réseau LGV national et européen. Sa rénovation et sa connexion à la future LGV Paris-Orléans-Clermont-Lyon, le POCL, sont pour nous essentielles.

L’exigence légitime de la Haute-Vienne d’atteindre Paris en deux heures sera ainsi respectée. Nous pourrons alors du Lot, au sud, jusqu’au Cher, au nord, proposer à nos habitants des temps de parcours et un confort dignes de notre époque, dont nos entreprises aussi bénéficieront.

Malheureusement, une partie des élus de la Haute-Vienne ont imaginé, avec ceux de la Vienne, une échappatoire vers Poitiers. De cet accord est né le projet de LGV monovoie Limoges-Poitiers, la contrepartie étant la participation du Limousin au financement du segment LGV manquant entre Poitiers et Bordeaux.

Ce projet est tellement fragile en termes de prévision d’activités que vous avez imaginé pouvoir fausser le débat public en asséchant arbitrairement le POLT pour rendre plus crédible le projet de LGV monovoie Limoges-Poitiers. Le courrier émanant du ministère de l’écologie, du développement durable et de l’énergie, mendiant l’accord des élus financeurs pour cette manœuvre de détournement, est cynique, injuste et totalement déplacé.

Ces procédés sont contraires aux règles de la République. Où est l’exigence d’aménagement équitable du territoire ? Où est le respect de l’intérêt public ? Où est le respect de l’environnement ? Où est le respect de la bonne utilisation de l’argent public ?

M. Alain Gournac. Voilà de bonnes questions !

M. Jean-François Mayet. Dans l’arborescence LGV nationale, le projet de monovoie Limoges-Poitiers est certes une « brindille », mais il coûte tout de même 1,5 milliard d’euros, voire 3 milliards d’euros au moment de sa réalisation.

Dans le cadre des contraintes budgétaires et de respect de l’environnement qui sont les nôtres, la rénovation du POLT et sa connexion au POCL satisfont parfaitement aux directives gouvernementales, ce qui n’est pas du tout le cas du projet de détournement par Poitiers.

Un projet moins coûteux, plus équitable, techniquement et commercialement plus productif : tels sont les critères qui doivent être la priorité des élus et du Gouvernement.

Les départements concernés attendent le maintien d’un axe POLT rénové et connecté au POCL, ce qui impliquera le non-détournement de sa clientèle géographiquement naturelle. Nous comptons sur le Gouvernement pour y parvenir. (Applaudissements sur les travées de l'UMP.)

M. le président. La parole est à M. le ministre délégué chargé des relations avec le Parlement.

M. Alain Vidalies, ministre délégué auprès du Premier ministre, chargé des relations avec le Parlement. Monsieur le sénateur, je vous prie de bien vouloir excuser l’absence de Mme Delphine Batho, qui accompagne le Premier ministre en voyage officiel au Canada.

M. Gérard Longuet. Elle est coincée sur l’autoroute ! (Sourires sur les travées de l'UMP.)

M. Alain Vidalies, ministre délégué. Vous évoquez deux projets de LGV : d’une part, les lignes Poitiers-Limoges et Paris-Orléans-Clermont-Ferrand-Lyon, dite POCL, d’autre part, la ligne Paris-Orléans-Limoges-Toulouse, dite POLT.

L’ensemble de ces questions fait l’objet d’une attention particulière de la part du Gouvernement, étant donné leur importance en termes d’aménagement et de développement de nos territoires.

Le projet de LGV Poitiers-Limoges est actuellement en phase préalable à l’enquête publique. Il s’agit d’une étape importante, qui nécessite que les collectivités territoriales co-financeuses soient étroitement associées à l’élaboration du dossier qui sera présenté au public. C’est la raison pour laquelle les hypothèses concernant les différentes possibilités de desserte tenant compte des nouveaux services permis par la LGV ont fait l’objet d’échanges entre l’État, Réseau ferré de France et les collectivités territoriales.

L’enquête publique est une phase d’échange démocratique visant à recueillir les expressions de l’ensemble des acteurs, à l’issue de laquelle le projet peut être amené à évoluer. Les hypothèses de desserte présentées dans le dossier d’enquête sur l’avenir des dessertes de la ligne POLT sont une base de travail permettant d’éclairer le débat à venir. Elles ne préjugent pas des circulations sur cette ligne, qui relèvent de la convention conclue entre l’État et la SNCF portant sur l’exploitation de l’ensemble des trains d’équilibre du territoire.

M. Jean-Pierre Sueur. Très bien, on ne supprime pas de trains !

M. Alain Vidalies, ministre délégué. La LGV POCL vient quant à elle de faire l’objet d’un débat public, achevé depuis 2012, et une nouvelle phase d’étude vient d’être engagée. Il s’agira de définir les conditions de la faisabilité financière du projet, d’approfondir son évaluation socio-économique et de préciser les performances des dessertes envisageables.

La commission « Mobilité 21 » est chargée d’examiner les différents projets d’infrastructures de transport, dont ces deux LGV, et de proposer les orientations pour une politique de transport soutenable. Les conclusions de cette commission sont attendues d’ici à la fin du mois de juin prochain.

À notre sens, les LGV et la ligne existante doivent être considérées comme des infrastructures non pas concurrentes, mais complémentaires. Il n’est en effet pas question d’opposer les infrastructures qui n’assurent pas les mêmes services. La ligne POCL devra ainsi continuer à assurer une desserte fine des territoires situés sur cet axe nord-sud essentiel à l’aménagement de notre pays.

Ces différentes démarches sont engagées dans une approche responsable et sont un préalable nécessaire pour permettre d’éclairer les décisions à prendre pour l’avenir de notre réseau ferroviaire et l’aménagement de nos territoires. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.)

dépendance

M. le président. La parole est à M. Vincent Eblé.

M. Vincent Eblé. Ma question s’adresse à Mme la ministre des affaires sociales et de la santé. (Ah ! sur les travées de l'UMP.)

La France a le privilège d’avoir une population âgée en croissance et nous savons la chance que représente l’allongement de la vie. Mais avons-nous réellement imaginé le visage de la France dans une dizaine d’années ? Les plus de 60 ans représenteront un tiers de la population en 2035, alors qu’ils sont un cinquième aujourd’hui.

Nous sommes dans une position enviable, puisque, en parallèle de ce vieillissement, la France est l’une des rares nations européennes à voir sa population augmenter, ce qui constitue un véritable atout. Encore faut-il que nous soyons capables d’anticiper ce changement afin d’adapter notre société, plus particulièrement les politiques publiques, et ainsi de profiter de l’opportunité qui nous est offerte.

Avant d’être une charge, cette opportunité est humaine, transgénérationnelle, culturelle, mais également économique. Je pense au développement de la croissance et des emplois dans les secteurs liés aux services à la personne, aux nouvelles technologies dédiées et au bâtiment avec l’adaptation des logements, nécessaire au maintien à domicile.

Hélas ! nous devons constater que cette réalité démographique n’a pas été encore prise en considération et que la société française accuse un sérieux retard.

Promise par Nicolas Sarkozy en 2007 (Exclamations sur les travées de l'UMP), la réforme de la dépendance a été repoussée tout au long du quinquennat et définitivement abandonnée au mois de septembre 2011.