M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. René Vandierendonck, rapporteur. L’amendement n° 30 est satisfait par le texte de la commission sur la question de l’aménagement local et d’offres et d’accès aux services publics de proximité. En outre, la transition énergétique n’est pas juridiquement une compétence, la commission ayant choisi la notion de climat et d’énergie et décidé d’en confier le chef de filat à la région.

Sur le sujet abordé par les auteurs de l’amendement n° 580 rectifié bis, il faut avoir une vision claire. Comme le soulignait mon collègue Bruno Sido, il est normal que le maire, qui est élu, ou l’établissement public de coopération intercommunale soient consultés sur la localisation des services publics.

M. Jean-Jacques Filleul, rapporteur pour avis de la commission du développement durable, des infrastructures, de l'équipement et de l'aménagement du territoire. Bien sûr !

M. René Vandierendonck, rapporteur. Certes, le département peut avoir une politique en la matière ; elle est d’ailleurs déjà largement visible. Comme j’ai pu m’en rendre compte lors de mon récent déplacement en Franche-Comté avec mon collègue Yves Krattinger, l’action départementale en faveur de la création de maisons de service public contribue puissamment à la présence des services publics. Loin de moi l’idée, au titre de la solidarité des territoires, de nier cette réalité, d’ailleurs très ancienne.

Toutefois, être chef de file signifie avoir l’assurance de pouvoir organiser une discussion avec les maîtres d’œuvre, par exemple le département pour la création de maisons de service public, et d’être entendu. C’est d’ailleurs l’intérêt des maires ! Lors de l’examen du projet de loi pour l’accès au logement et un urbanisme rénové, vous me rappellerez vous-mêmes qu’il n’est pas question de porter atteinte à la compétence exclusive du maire en matière de délivrance de permis de construire.

Peut-être pourriez-vous donc lâcher un peu de lest sur ce point ! (Sourires.)

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Anne-Marie Escoffier, ministre déléguée. L’amendement n° 30 est effectivement en grande partie satisfait par le texte de la commission. Et la transition énergétique est un objectif, non une compétence. Par conséquent, le Gouvernement émet un avis défavorable sur cet amendement.

J’en viens à l'amendement n° 580 rectifié bis. Aux termes du dispositif prévu dans le deuxième texte sur la décentralisation, l’accès aux services publics est une compétence organisée au bénéfice du département, qui semble l’échelon le plus à même d’exercer la solidarité territoriale. Cela étant, j’entends les arguments de M. le rapporteur. C'est la raison pour laquelle le Gouvernement s'en remet à la sagesse de la Haute Assemblée sur cet amendement.

M. le président. Mademoiselle Joissains, l'amendement n° 30 est-il maintenu ?

Mlle Sophie Joissains. Non, je le retire, monsieur le président. D’une part, il est partiellement satisfait. D’autre part, comme la transition énergétique n’est pas considérée comme une compétence juridique, le bloc communal pourra facilement s’en emparer en tant qu’objectif.

M. Louis Nègre. Très bien !

M. le président. L'amendement n° 30 est retiré.

La parole est à M. Bruno Sido, pour explication de vote sur l'amendement n° 580 rectifié bis.

M. Bruno Sido. Je regrette beaucoup de ne pas être intervenu plus en amont, au début de l’examen de l’article 3. Après avoir écouté avec attention les propos de Michel Mercier, nous commençons à nous entendre sur la notion de chef de file et sur la souplesse qu’il faut lui accorder. C’est tout l’intérêt de discuter tard le soir entre gentlemen et gentlewomen ! (Sourires.)

Toutefois, après l’adoption du projet de loi et de ses décrets d’application et la transmission des différents textes transmis aux préfectures et sous-préfectures, le chef de filat désignera le patron, et rien d’autre ! On saura qui aura le droit d’agir et qui ne l’aura pas. D’ailleurs, le préfet interviendra en ce sens. (Mme la ministre déléguée fait un signe de dénégation.) Vous le savez bien, madame la ministre, vous qui avez été préfet !

M. Jacques Mézard. Dans une vie antérieure ! (Sourires.)

M. Bruno Sido. En pratique, une ségrégation s’opérera.

Par exemple, pour le numérique, il a été décidé qu’il n’y aurait pas de chef de file. C’est habile !

Définir des chefs de file signifie que certains auront le droit d’agir et d’autres non. Je souhaitais appeler l’attention de mes collègues sur ce sujet. Ils avaient certainement compris depuis longtemps de quoi il retourne ; moi, il m’a fallu attendre la fin de l’examen de cet article pour saisir les conséquences pratiques lourdes qui se cachent derrière de telles dispositions.

M. le président. La parole est à M. Louis Nègre, pour explication de vote.

M. Louis Nègre. Cher Bruno Sido, je suis beaucoup moins inquiet que vous. Tout à l’heure, on a expliqué qu’un chef de file n’était justement pas un patron. C’est en tout cas ce que j’ai cru comprendre. Ce n’est pas lui qui décide : il coordonne. (M. Bruno Sido manifeste son scepticisme.)

Il suffit de lire le rapport de la commission, qui fait référence à « l’accès aux services publics de proximité ». Si l’on retire ce chef de filat au bloc communal, que lui restera-t-il ? La logique doit prévaloir.

Je n’ai pas non plus de craintes pour les départements ! S’ils veulent intervenir, les communes n’auront qu’à se féliciter de leur aide et de leur soutien. Dans mon département, il n’y a aucun souci à cet égard. Travailler dans cet esprit ne pose a priori aucune difficulté.

M. le président. La parole est à M. André Reichardt, pour explication de vote.

M. André Reichardt. J’irai dans le même sens que mon collègue Louis Nègre.

La commune est la cellule de base de notre société. Comme le savent bien ceux qui ont été maires, qui le sont encore ou qui le seront, le citoyen qui a un besoin particulier se tourne vers sa commune ou, à défaut, vers l’établissement public de coopération intercommunale, qui sauront trouver le bon partenaire : département, préfecture, etc.

Il est de notre devoir d’édicter le principe selon lequel c’est bien à la commune que doit revenir un tel rôle dans le cadre du chef de filat.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 580 rectifié bis.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. L'amendement n° 413, présenté par M. Favier, Mmes Assassi, Cukierman et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :

Alinéa 22

Rétablir cet alinéa dans la rédaction suivante :

« III bis. - La mission de chef de filât ne peut avoir pour effet l’établissement ou l’exercice d’une tutelle du chef de file, sous quelque forme que ce soit, sur les autres collectivités territoriales.

La parole est à M. Christian Favier.

M. Christian Favier. Cet amendement vise à rétablir un alinéa supprimé par l’Assemblée nationale. Il s’agit de mieux définir les missions du chef de filat, ce qui permettra peut-être de répondre aux interrogations et aux inquiétudes de notre collègue Sido.

Dans sa rédaction actuelle, le texte ne définit pas le chef de file, mais prévoit qu’il vise à organiser l’action de l’ensemble des collectivités intervenant dans la mise en œuvre d’une politique publique dont la compétence est partagée. Voilà qui ouvre un flou juridique dangereux.

En effet, personne ne connaît les conditions qui seront mises en œuvre pour appliquer une telle mesure. Tous les risques sont donc devant nous. De plus, la notion est tellement mal encadrée que l’organisation de l’action commune pourra être différente d’une région à l’autre.

Aussi, il nous semble nécessaire de rappeler au moins la limite constitutionnelle assurant à chaque collectivité qu’aucune autre ne peut exercer sur elle une quelconque forme de tutelle. Cela nous semble utile, tant pour les futurs chefs de file chargés de mettre en œuvre une telle disposition que pour ceux dont la liberté sera réduite.

Le Sénat avait introduit une telle précision en première lecture, mais l'Assemblée nationale l’a malheureusement supprimée. Nous demandons donc au Sénat de la réintroduire, en reprenant, certes dans une nouvelle rédaction, le texte précédemment adopté.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. René Vandierendonck, rapporteur. La commission émet un avis défavorable sur cet amendement purement déclamatoire, quelle que soit la pertinence de son énoncé.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Anne-Marie Escoffier, ministre déléguée. Le texte proposé est en effet la copie conforme de la Constitution. Je pense donc que les garanties demandées existent déjà et que l’ajout d’une telle précision n’en apporterait aucune nouvelle.

C’est pourquoi je vous suggère de retirer cet amendement, monsieur le sénateur.

M. le président. La parole est à M. Bruno Sido, pour explication de vote.

M. Bruno Sido. Je remercie M. Favier de me donner l’occasion de reprendre la parole. Cela me permettra de préciser ma pensée, puisque j’ai manifestement été mal compris.

Mon intervention précédente était d’ordre général. Elle ne visait pas spécialement les communes.

Comme je l’ai rappelé, Mme la ministre a auparavant exercé des fonctions à la tête de préfète. Chacun le sait, le diable se cache dans les détails. Lorsque les services de la préfecture proposent au préfet de prendre telle ou telle décision, ils s’appuient sur les circulaires.

J’ai moi aussi eu le bonheur d’être rapporteur, notamment sur le projet de loi relatif à la mise en œuvre du Grenelle de l’environnement. Je puis vous le dire, entre les déclarations de Mmes et MM. les ministres – quatre ou cinq ministres se sont succédé entre le texte sur l’eau et celui sur le Grenelle ! – dans l’hémicycle et l’application sur le terrain, notamment avec les circulaires, c’est le jour et la nuit !

M. Jean-Claude Lenoir. Les circulaires contredisent même parfois la loi !

M. Bruno Sido. Je n’irai pas jusqu’à dire que les circulaires tordent systématiquement la loi. Mais elles le font effectivement parfois…

Les propos de M. Favier sont intéressants. Personnellement, je ne voterai pas son amendement, car, quel que soit le sens de notre vote, c’est la circulaire qui s’appliquera sur le terrain.

J’ai souvent demandé au préfet ou à ses services de relire le compte rendu intégral des séances, l’exposé des motifs ou l’étude d’impact d’une loi. Mais, sur le terrain, seule la circulaire d’application compte.

M. Alain Richard. Mais non ! Ce n’est pas vrai !

M. Bruno Sido. Quand nous revenons dans nos départements, nos concitoyens nous interpellent. Certes, ils ont bien vérifié que nous avons effectivement tenu tel ou tel propos en séance, mais M. le préfet leur certifie que ce n’est pas ainsi que le texte s’applique. Et, dans l’est de la France, ce que dit M. le préfet, c’est parole d’évangile !

Il faut quand même faire très attention à ce que l’on vote ici. Pour une compétence donnée, le chef de file sera le patron sur le terrain.

M. le président. La parole est à M. Michel Mercier, pour explication de vote.

M. Michel Mercier. Je comprends très bien ce qu’a voulu dire M. Favier, et je ne crois pas que son amendement soit purement déclamatoire.

D’ailleurs, il faudrait savoir : un amendement ne peut pas à la fois être déclamatoire et reprendre le texte de la Constitution. En l’occurrence, je pense que l’amendement de notre collègue reprend la Constitution.

À vrai dire, je pense qu’il vaut mieux ne pas voter cet amendement. Car, en l’adoptant, nous offririons à nos collègues de l’Assemblée nationale l’occasion de supprimer une telle disposition. Il n’y aurait alors plus véritablement qu’un seul chef de file, ce qui serait très grave.

En revanche, madame la ministre, je pense qu’il vous appartient d’indiquer par voie de circulaire aux préfets, chargés de l’application de la loi sur l’ensemble du territoire, ce qu’est vraiment le chef de filat, en vous appuyant sur la Constitution et la jurisprudence du Conseil constitutionnel. Vous ne pouvez pas rester les bras ballants face à une mauvaise application de la Constitution et de la loi. Vous devez prendre l’engagement d’indiquer par voie de circulaire aux préfets ce qu’est juridiquement le chef de filat.

M. Bruno Sido. Parfaitement !

M. Jean-Pierre Sueur, président de la commission des lois. Les préfets connaissent la Constitution !

M. le président. Monsieur Favier, l'amendement n° 413 est-il maintenu ?

M. Christian Favier. Non, j’accepte bien volontiers de le retirer, monsieur le président.

Toutefois, le débat a été utile. Il a montré que la notion restait entourée d’un grand flou. Sa mise en œuvre future suscite beaucoup d’appréhensions. Sans doute des précisions pourront-elles être apportées par voie de circulaire, mais il faudra de toute évidence faire preuve de beaucoup de vigilance pour que le chef de filat n’aboutisse pas à une forme de tutelle d’une collectivité sur une autre.

M. le président. L'amendement n° 413 est retiré.

Je suis saisi de quatre amendements identiques.

L'amendement n° 127 est présenté par M. Besson.

L'amendement n° 134 est présenté par MM. Pintat, B. Fournier, Poniatowski et D. Laurent, Mme Des Esgaulx et MM. César et Doublet.

L'amendement n° 375 rectifié est présenté par MM. Requier, Mézard, Collombat, Alfonsi, Baylet, Bertrand, C. Bourquin, Collin et Fortassin, Mme Laborde et MM. Mazars, Plancade, Tropeano, Vall et Vendasi.

L'amendement n° 567 est présenté par MM. Merceron et Amoudry.

Ces quatre amendements sont ainsi libellés :

Alinéa 23

Remplacer les mots :

et de leurs établissements publics de coopération intercommunale à fiscalité propre

par les mots :

et de leurs groupements

Les amendements nos 127 et 134 ne sont pas soutenus

La parole est à M. Jean-Claude Requier, pour présenter l'amendement n° 375 rectifié

M. Jean-Claude Requier. Il s’agit d’un amendement de précision juridique et de cohérence.

En effet, l’article L. 5111-1 du code générale des collectivités territoriales précise bien que les établissements publics de coopération intercommunale, ou EPCI, sont inclus dans la catégorie des groupements de collectivités territoriales, aux côtés notamment des syndicats mixtes.

Or le premier paragraphe de l’article L. 1111-9, dans la rédaction proposée par l’article 3 du projet de loi, énumère les compétences pour l’exercice desquelles la région est chargée d’organiser, en qualité de chef de file, les modalités de l’action commune des collectivités territoriales et de leurs établissements publics, le IV de cet article prévoyant que ces modalités doivent être débattues par la conférence territoriale de l’action publique.

Cette conférence a donc vocation à débattre avec l’ensemble des groupements des collectivités, et non les seuls EPCI, comme le laisse supposer le texte proposé pour le IV de l’article L. 1111-9, dont la rédaction doit par conséquent être modifiée.

M. le président. L’amendement n° 567 n’est pas soutenu.

Quel est l’avis de la commission sur l’amendement n° 375 rectifié ?

M. René Vandierendonck, rapporteur. La commission a émis un avis favorable sur cet amendement.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Anne-Marie Escoffier, ministre déléguée. Le Gouvernement se rallie également à cette proposition.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 375 rectifié.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. L'amendement n° 303, présenté par MM. Patriat, Besson et Fauconnier, est ainsi libellé :

Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :

« ... - Afin de satisfaire l’objectif d’intérêt général d’efficacité et de coordination des actions publiques, le chef de file adopte, après concertation avec les autres collectivités concernées et débat en conférence territoriale de l’action publique, un schéma définissant les priorités générales de l’action commune. Les décisions des autres collectivités concernées par cette action commune devront être compatibles avec ce schéma. »

Cet amendement n'est pas soutenu.

L'amendement n° 500 rectifié, présenté par Mme Lipietz et les membres du groupe écologiste, est ainsi libellé :

Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :

« …. - La qualité de chef de file, lorsqu’elle est reconnue à une collectivité territoriale ou à un établissement public de coopération intercommunale, inclut la capacité à adopter des documents à portée prescriptive, opposables à l’ensemble des acteurs intervenant dans ces domaines. La portée prescriptive des schémas et documents élaborés dans ce cadre implique notamment une obligation de compatibilité des documents établis aux échelons inférieurs avec les règles qui y figurent.

« Ces documents à portée prescriptive sont élaborés en concertation avec les collectivités et établissements concernés. »

La parole est à Mme Hélène Lipietz.

Mme Hélène Lipietz. Nous proposons là une version moins souple de l’amendement n° 303 ; vous savez tous que je ne suis pas particulièrement souple, mes chers collègues ! (Sourires.)

Il s’agit de se demander ce qu’est réellement le chef de filat, et jusqu’où il est possible d’aller.

Dans cet amendement, nous proposons, non sans un soupçon de provocation, que la qualité de chef de file, lorsqu’elle est reconnue à une collectivité, inclue la capacité à adopter des documents à portée prescriptive.

M. Lenoir nous a rappelé tout à l’heure qu’il recevait des schémas régionaux le 15 juin de chaque année, schémas réputés adoptés si les départements ne répondaient pas dans les trois mois, selon le principe « qui ne dit mot consent ». Il y a donc bien là une volonté de développer des schémas prescriptifs.

En même temps, comme M. le rapporteur le faisait remarquer, nous assistons à une inflation de schémas qui minent la visibilité de l’aménagement et du développement de nos territoires.

Nous devrions peut-être, par exemple lors de l’examen de la prochaine loi de décentralisation, prendre le temps de nous interroger sur une définition précise de la notion de chef de filat. Jusqu’où peut-on aller ? Comment les différentes politiques doivent-elles s’ordonner au niveau des territoires ? Cette réorganisation ne s’opérera pas forcément au profit de la région, puisque le chef de filat a été aussi reconnu aux communes ou aux groupements communaux.

Les bases d’une future discussion étant à présent posées, je retire mon amendement, monsieur le président. (M. Alain Richard applaudit.)

M. Bruno Sido. Tant mieux ! (Sourires.)

M. le président. L’amendement n° 500 rectifié est retiré.

Je mets aux voix l'article 3, modifié.

(L'article 3 est adopté.)

Section 2

La conférence territoriale de l’action publique

Article 3
Dossier législatif : projet de loi de modernisation de l'action publique territoriale et d'affirmation des métropoles
Article 4 (interruption de la discussion)

Article 4

Après l’article L. 1111-9 du code général des collectivités territoriales, il est inséré un article L. 1111-9-1 ainsi rédigé :

« Art. L. 1111-9-1. – I. – Une conférence territoriale de l’action publique est instituée dans chaque région.

« La conférence territoriale de l’action publique débat et rend des avis sur tous les sujets relatifs à l’exercice des compétences et les politiques publiques nécessitant une coordination ou une délégation de compétences entre différents niveaux de collectivités territoriales et de leurs groupements. Elle peut débattre de tout sujet présentant un intérêt local.

« Elle débat de toute question relative à la coordination des relations transfrontalières avec les collectivités territoriales étrangères situées dans le voisinage de la région.

« II. – Sont membres de la conférence territoriale de l’action publique :

« 1° Le président du conseil régional ou de l’autorité exécutive de la collectivité territoriale régie par l’article 73 de la Constitution ;

« 2° Les présidents des conseils généraux ou un représentant de l’autorité exécutive des collectivités territoriales exerçant les compétences des départements sur le territoire de la région ;

« 3° Les présidents des établissements publics de coopération intercommunale à fiscalité propre de plus de 30 000 habitants ayant leur siège sur le territoire de la région ;

« 4° Un représentant élu des établissements publics de coopération intercommunale à fiscalité propre de moins de 30 000 habitants ayant leur siège sur le territoire de chaque département ;

« 5° Un représentant élu des communes de plus de 30 000 habitants de chaque département ;

« 6° Un représentant élu des communes comprenant entre 3 500 et 30 000 habitants de chaque département ;

« 7° Un représentant élu des communes de moins de 3 500 habitants de chaque département ;

« 8° Le cas échéant, un représentant des collectivités territoriales et groupements de collectivités des territoires de montagne, au sens de l’article 3 de la loi n° 85-30 du 9 janvier 1985 relative au développement et à la protection de la montagne.

« Un décret en Conseil d’État précise les modalités d’élection ou de désignation des membres de la conférence territoriale de l’action publique.

« III. – La conférence territoriale de l’action publique organise librement ses travaux. Elle établit son règlement intérieur. Elle est présidée par le président du conseil régional.

« Elle est convoquée par son président, qui fixe l’ordre du jour de ses réunions. Chaque membre peut proposer l’inscription à l’ordre du jour de questions complémentaires relevant des compétences exercées par la personne publique ou la catégorie de personnes publiques qu’il représente ou pour lesquelles cette personne publique est chargée d’organiser les modalités de l’action commune des collectivités territoriales.

« Elle assure la publicité de ses travaux auprès de l’ensemble des collectivités territoriales de la région par les moyens matériels qu’elle juge les plus appropriés.

« Elle peut associer à ses travaux le représentant de l’État dans la région ou les représentants de l’État dans les départements concernés, ainsi que tout élu ou organisme non représenté, en fonction de l’ordre du jour. Elle peut solliciter l’avis de toute personne ou de tout organisme.

« IV. – À l’issue de la conférence territoriale de l’action publique, les collectivités territoriales et leurs groupements organisent, par convention, les modalités de leur action commune pour l’exercice des compétences prévues à l’article L. 1111-9. Au moins une fois par an, la collectivité territoriale chargée d’organiser les modalités de l’action commune adresse à l’organe délibérant des collectivités territoriales et aux établissements publics concernés un rapport détaillant les actions menées dans le cadre de cette convention, ainsi que les interventions financières intervenues. Ce rapport fait l’objet d’un débat. »

M. le président. L'amendement n° 359 rectifié, présenté par MM. Mézard, Alfonsi, Barbier, Baylet, Collin, Collombat et Fortassin, Mme Laborde et MM. Plancade, Requier, Tropeano, Vall, Vendasi, Bertrand et C. Bourquin, est ainsi libellé :

Supprimer cet article.

La parole est à M. Jacques Mézard.

M. Jacques Mézard. Cet amendement, qui n’est, lui, nullement provocateur, vise à supprimer l’article 4.

Comme nous l’avons exprimé dès la première lecture, nous sommes opposés à la création des conférences territoriales de l’action publique.

Avec la multiplication des structures, nous allons passer notre temps – je parle de ceux qui resteront élus locaux… – en réunions, concertations et discussions, dans le flou artistique le plus total.

Je connais mal la définition du vide, si ce n’est que c’est là où il n’y a rien ! En revanche, du point de vue de l’accumulation de certaines usines à gaz, qui ne fabriquent d’ailleurs pas beaucoup de gaz, on est en train de faire assez fort !

Le Sénat a, contre le vote de certains d’entre nous, y compris de ma modeste personne, rétabli la clause de compétence générale. Dans le même temps, est créée cette notion de chef de filat, dont on voit bien qu’elle pose un problème par rapport à l’interdiction constitutionnelle de toute tutelle d’une collectivité sur une autre.

Nous avons donc à la fois la clause de compétence générale pour tout le monde et un chef de filat qui ne peut pas contredire la Constitution, c'est-à-dire aboutir à la tutelle d’une collectivité sur une autre. Et l’on essaye de faire fonctionner le tout au sein d’une conférence territoriale dont les capacités d’action seront tout de même limitées…

J’ai surtout le sentiment qu’aucun gouvernement, quelle que soit sa sensibilité politique, n’est en mesure d’imposer une véritable simplification de nos institutions territoriales. On procède donc à des modifications qui permettent de discuter, mais sans donner de véritable capacité aux uns et aux autres. On incite tout le monde à se mettre autour d’une table pour décider, sans donner à quiconque la possibilité d’imposer quoi que ce soit.

Ces conférences seront extrêmement lourdes sur le plan administratif, et elles prendront énormément de temps. Certes, ceux qui ne seront plus parlementaires en gagneront, mais ils pourraient, me semble-t-il, occuper plus utilement leur temps libre ! (Sourires.)

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. René Vandierendonck, rapporteur. Sans être provocateur, je vous ferai part d’un constat : les discussions que nous avons eues montrent qu’il n’est quand même pas inutile de prévoir des réunions pour organiser les modalités de l’action commune.

Je rejoins toutefois M. Mézard sur un point. Nous avons veillé, et cela ne m’a d’ailleurs pas valu que des amis, à reprendre à quelques modifications près – soyons aussi honnêtes, et reconnaissons que l’Assemblée nationale a apporté des précisions utiles –, la version light de la conférence territoriale. (M. Jacques Mézard acquiesce.)

Comme M. de Legge l’avait souligné au moins de juin dernier, des conférences territoriales existent déjà en plusieurs endroits. Il y a, certes, des conditions. Mais elles ne fonctionnent pas si mal !

M. Dominique de Legge. Apparemment, vous m’avez mal compris ! J’ai dit exactement le contraire !

M. René Vandierendonck, rapporteur. J’avais cru entendre dans vos propos un témoignage positif.

M. Dominique de Legge. Relisez donc le compte rendu de nos débats !

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Anne-Marie Escoffier, ministre déléguée. L’article 4 concerne les conférences territoriales de l’action publique, un sujet qui nous a particulièrement occupés, voire préoccupés précédemment, tant les points de vue ont divergé.

Je rappellerai simplement la philosophie du Gouvernement – et par philosophie, je fais référence à la sophia, c’est-à-dire à la sagesse – sur ce dispositif.

Comme nous l’avons acté, la clause de compétence générale, qui est la traduction de ce qui existe aujourd’hui, nécessite une véritable organisation. Nous devons rompre avec le désordre et la complexification que certains ont dénoncés à plusieurs reprises.

Le Gouvernement présente une version simplifiée. Les conférences territoriales sont des lieux de dialogue ; tous les élus pourront s’y retrouver, afin de déterminer ensemble les meilleures conditions de mise en œuvre des compétences des différents acteurs.

Une telle proposition a pour corollaire – c’est, me semble-t-il, un élément important – la mutualisation. Nous devons rechercher la complémentarité entre les actions des différentes collectivités, la cohérence et l’intelligence des territoires. L’intelligence, dans notre esprit, ce n’est pas seulement l’aspect intellectuel ; c’est la construction de relations fortes entre les différents acteurs, dans un souci de compréhension réciproque.

Nous sommes là pour nous rassembler, nous réunir et trouver ensemble des solutions permettant de répondre concrètement à la diversité de nos territoires. Nous avons réaffirmé à maintes reprises le principe constitutionnel de l’unité de la République. Pour autant, il ne doit pas conduire à nier la diversité. Nous ne pouvons pas apporter des réponses identiques aux problématiques rencontrées en Alsace, en Auvergne ou en Midi-Pyrénées. (Approbations sur les travées du groupe socialiste et au banc de la commission.)

Or l’objectif des conférences territoriales de l’action publique est précisément d’apporter des solutions adaptées aux situations locales. C’est en ce sens que nous avons retenu le principe des chefs de file.

À mon sens, les conférences territoriales, dans la version envisagée par le texte de la commission, apportent une réponse équilibrée aux objections qui ont été formulées. Notre intention est d’en faire non un carcan autoritaire, mais un lieu de débat, notamment des collectivités entre elles, avec l’État comme garant. Cela a d’ailleurs été souligné. Certains orateurs ont évoqué les préfets. Je vous précise que, en principe, ces derniers appliquent les circulaires en conformité avec nos règles constitutionnelles…

Le dispositif proposé apporte donc à la fois la souplesse attendue et une capacité de régulation efficace et de maîtrise de la gestion des collectivités locales.