Sommaire

Présidence de M. Jean-Claude Carle

Secrétaires :

Mme Michelle Demessine, M. Jean Desessard.

1. Procès-verbal

2. Communication d'un avis sur une nomination

3. Candidatures à une mission commune d'information

4. Lutte contre la contrefaçon. – Discussion en procédure accélérée d’une proposition de loi dans le texte de la commission

Discussion générale : MM. Richard Yung, auteur de la proposition de loi ; Michel Delebarre, rapporteur de la commission des lois ; Mme Nicole Bricq, ministre du commerce extérieur.

MM. Gérard Le Cam, Yvon Collin, Mme Hélène Lipietz.

5. Nomination des membres d’une mission commune d’information

6. Lutte contre la contrefaçon. – Suite de la discussion en procédure accélérée et adoption d’une proposition de loi dans le texte de la commission modifié

Discussion générale (suite) : MM. Jean-Jacques Hyest, Yves Détraigne, Mme Nicole Bonnefoy.

Mme Nicole Bricq, ministre du commerce extérieur.

Clôture de la discussion générale.

Articles additionnels avant le chapitre Ier

Amendement n° 4 rectifié bis de M. Joël Guerriau. – M. Joël Guerriau.

Amendement n° 21 rectifié de M. Joël Labbé. – M. Joël Labbé. – Retrait.

Amendement n° 10 rectifié de Mme Cécile Cukierman. – M. Gérard Le Cam.

Amendement n° 11 rectifié de Mme Cécile Cukierman.

Amendement n° 1 rectifié ter de M. Philippe Adnot. – M. Bernard Fournier.

Amendement n° 18 rectifié bis de M. Yvon Collin. – M. Yvon Collin.

Amendement n° 13 rectifié de Mme Cécile Cukierman. – M. Gérard Le Cam.

M. Michel Delebarre, rapporteur de la commission des lois ; Mme Nicole Bricq, ministre ; MM. Jean-Pierre Sueur, président de la commission des lois ; Yvon Collin, Bernard Fournier, Joël Guerriau, Gérard Le Cam. – Retrait des amendements nos 18 rectifié bis, 1 rectifié ter, 4 rectifié bis, 11 rectifié et 13 rectifié ; rejet, par scrutin public, de l’amendement n° 10 rectifié.

Amendement n° 12 rectifié de Mme Cécile Cukierman. – M. Gérard Le Cam. – Retrait.

Amendement n° 22 rectifié de M. Joël Labbé. – M. Joël Labbé. – Retrait.

Article 1er

M. Roland Courteau.

Amendement n° 25 de Mme Hélène Lipietz. – Mme Hélène Lipietz, M. le rapporteur, Mme Nicole Bricq, ministre. – Rejet.

Amendement n° 5 du Gouvernement. – Mme Nicole Bricq, ministre. – Retrait.

Amendement n° 31 de la commission. – M. le rapporteur. – Adoption.

Amendement n° 26 de Mme Hélène Lipietz. – Mme Hélène Lipietz, M. le rapporteur, Mme Nicole Bricq, ministre. – Rejet.

Adoption de l'article modifié.

Article 2

Amendement n° 27 de Mme Hélène Lipietz. – Mme Hélène Lipietz, M. le rapporteur, Mme Nicole Bricq, ministre. – Rejet.

Adoption de l'article.

Article additionnel après l'article 2

Amendement n° 17 de M. Richard Yung. – MM. Richard Yung, le rapporteur, Mme Nicole Bricq, ministre ; M. Jean-Jacques Hyest. – Retrait.

Article 3. – Adoption

Article 4

Amendement n° 19 de Mme Hélène Lipietz. – MM. Joël Labbé, le rapporteur, Mme Nicole Bricq, ministre ; M. Jean-Jacques Hyest. – Rejet.

Amendement n° 32 de la commission. – M. le rapporteur, Mme Nicole Bricq, ministre. – Adoption.

Amendement n° 28 de Mme Hélène Lipietz. – Mme Hélène Lipietz, M. le rapporteur, Mme Nicole Bricq, ministre. – Rejet.

Adoption de l'article modifié.

Article 5. – Adoption

Article 6

Amendement n° 9 de Mme Nicole Bonnefoy. – Mme Nicole Bonnefoy, M. le rapporteur, Mme Nicole Bricq, ministre. – Adoption.

Adoption de l'article modifié.

Article 7

Amendements nos 8 rectifié et 7 rectifié du Gouvernement. – Mme Nicole Bricq, ministre.

Amendement n° 33 rectifié de la commission. – M. le rapporteur.

Amendement n° 20 de Mme Hélène Lipietz. – Mme Hélène Lipietz. – Retrait.

M. Richard Yung. – Adoption des amendements nos 8 rectifié, 7 rectifié et 33 rectifié.

Amendement n° 6 rectifié du Gouvernement. – Adoption.

Adoption de l'article modifié.

Articles 8 à 12. – Adoption

Article 13

Amendement n° 29 de Mme Hélène Lipietz. – Mme Hélène Lipietz, M. le rapporteur, Mme Nicole Bricq, ministre. – Retrait.

Amendement n° 34 de la commission. – M. le rapporteur, Mme Nicole Bricq, ministre. – Adoption.

Adoption de l'article modifié.

Articles 14 à 16 bis (nouveau) et 17 à 20. – Adoption

Vote sur l’ensemble

MM. Robert del Picchia, Yvon Collin, Richard Yung, Jean-Claude Lenoir.

Adoption de la proposition de loi dans le texte de la commission, modifié.

Mme Nicole Bricq, ministre.

Suspension et reprise de la séance

PRÉSIDENCE DE M. Jean-Patrick Courtois

7. Organisme extraparlementaire

8. Demande de création d'une mission commune d'information

9. Prévention des inondations. – Adoption d'une proposition de loi dans le texte de la commission

Discussion générale : MM. Pierre-Yves Collombat, auteur de la proposition de loi ; Louis Nègre, rapporteur de la commission du développement durable ; Mme Anne-Marie Escoffier, ministre déléguée chargée de la décentralisation.

Suspension et reprise de la séance

PRÉSIDENCE DE M. Didier Guillaume

MM. André Vairetto, Philippe Esnol, Mme Hélène Lipietz, M. Jean-Jacques Lasserre, Mme Évelyne Didier, MM. Jean-Paul Fournier, Maurice Antiste, Michel Houel.

Clôture de la discussion générale.

Article 1er (supprimé)

M. Pierre-Yves Collombat.

Articles 2 à 5 (supprimés)

Article 6. – Adoption.

Article 7

MM. Pierre-Yves Collombat, Yves Pozzo di Borgo, Mme Marie-France Beaufils, M. François Fortassin, Mme Virginie Klès.

Amendements nos 1 et 2 de M. Pierre-Yves Collombat. – MM. Pierre-Yves Collombat, le rapporteur, Mme Marylise Lebranchu, ministre de la réforme de l'État, de la décentralisation et de la fonction publique. – Rejet des deux amendements.

Adoption de l’article.

Article 8

Amendement n° 11 du Gouvernement. – Mme Marylise Lebranchu, ministre ; MM. le rapporteur, André Vairetto, Pierre-Yves Collombat. – Rejet.

Adoption de l’article.

Articles additionnels après l'article 8

Amendement n° 7 de Mme Hélène Lipietz. – Mme Hélène Lipietz, M. le rapporteur, Mme Marylise Lebranchu, ministre. – Adoption de l’amendement insérant un article additionnel.

Amendement n° 8 de Mme Hélène Lipietz. – Mme Hélène Lipietz, M. le rapporteur, Mme Marylise Lebranchu, ministre. – Rejet.

Amendement n° 9 de Mme Hélène Lipietz. – Mme Hélène Lipietz, M. le rapporteur, Mme Marylise Lebranchu, ministre ; MM. Pierre-Yves Collombat, Charles Revet, Yves Pozzo di Borgo, Jean-Jacques Filleul, Mmes Marie-France Beaufils, Virginie Klès. – Rejet.

M. le président.

Article 9. – Adoption.

Article 10

Amendement n° 3 de M. Pierre-Yves Collombat. – MM. Pierre-Yves Collombat, le rapporteur, Mme Marylise Lebranchu, ministre. – Rectification de l’amendement.

M. le rapporteur, Mme Marylise Lebranchu, ministre. – Adoption de l'amendement n° 3 rectifié rédigeant l'article.

Article 11

M. Pierre-Yves Collombat.

Adoption de l’article.

Article 12

M. Pierre-Yves Collombat.

Adoption de l’article.

Articles 13 et 14 (supprimés)

Article 15

M. Pierre-Yves Collombat.

Adoption de l’article.

Article 16 (supprimé)

Amendement n° 4 de M. Pierre-Yves Collombat. – MM. Pierre-Yves Collombat, le rapporteur, Mme Marylise Lebranchu, ministre. –Rejet.

L’article demeure supprimé.

Article 17 (supprimé)

Amendement n° 5 de M. Pierre-Yves Collombat. – MM. Pierre-Yves Collombat, le rapporteur, Mme Marylise Lebranchu, ministre. –Rejet.

L’article demeure supprimé.

Articles 18 à 20. – Adoption.

Article 21 (supprimé)

Amendement n° 6 de M. Pierre-Yves Collombat. – MM. Pierre-Yves Collombat, Mme Marylise Lebranchu, ministre. – Retrait.

L’article demeure supprimé.

Article 22. – Adoption.

Vote sur l'ensemble

MM. Pierre-Yves Collombat, Charles Revet, André Vairetto, le rapporteur.

Adoption de la proposition de loi dans le texte de la commission, modifié.

MM. le président, Jacques Mézard.

10. Ordre du jour

compte rendu intégral

Présidence de M. Jean-Claude Carle

vice-président

Secrétaires :

Mme Michelle Demessine,

M. Jean Desessard.

M. le président. La séance est ouverte.

(La séance est ouverte à quatorze heures trente.)

1

Procès-verbal

M. le président. Le compte rendu analytique de la précédente séance a été distribué.

Il n’y a pas d’observation ?…

Le procès-verbal est adopté sous les réserves d’usage.

2

Communication d'un avis sur une nomination

M. le président. Conformément à la loi organique n° 2010-837 et à la loi n° 2010-838 du 23 juillet 2010 relatives à l’application du cinquième alinéa de l’article 13 de la Constitution, la commission du développement durable, des infrastructures, de l’équipement et de l’aménagement du territoire a émis, à l’unanimité des votants, un vote favorable – seize voix pour – sur le projet de nomination de M. Jean-Marc Lacave aux fonctions de président-directeur général de Météo-France.

Acte est donné de cette communication.

3

Candidatures à une mission commune d'information

M. le président. L’ordre du jour appelle la désignation des trente-trois membres de la mission commune d’information intitulée « Quels nouveau rôle et nouvelle stratégie pour l’Union européenne dans la gouvernance mondiale de l’Internet ? », et créée sur l’initiative du groupe Union des Démocrates et Indépendants – UC en application de son droit de tirage.

En application de l’article 8 de notre règlement, la liste des candidats présentés par les groupes a été affichée.

Cette liste sera ratifiée si la présidence ne reçoit pas d’opposition dans le délai d’une heure.

4

 
Dossier législatif : proposition de loi tendant à renforcer la lutte contre la contrefaçon
Discussion générale (suite)

Lutte contre la contrefaçon

Discussion en procédure accélérée d’une proposition de loi dans le texte de la commission

Discussion générale (début)
Dossier législatif : proposition de loi tendant à renforcer la lutte contre la contrefaçon
Discussion générale (interruption de la discussion)

M. le président. L’ordre du jour appelle, à la demande du groupe socialiste, la discussion, de la proposition de loi tendant à renforcer la lutte contre la contrefaçon, présentée par M. Richard Yung et les membres du groupe socialiste et apparentés (proposition n° 866 [2012-2013], texte de la commission n° 134, rapport n° 133).

Dans la discussion générale, la parole est à M. Richard Yung, auteur de la proposition de loi.

M. Richard Yung, auteur de la proposition de loi. Monsieur le président, madame la ministre, monsieur le président de la commission des lois, monsieur le rapporteur, mes chers collègues, la présente proposition de loi est issue d’un travail que j’ai entrepris, en 2011, avec notre ancien collègue Laurent Béteille, à qui je souhaite, à ce titre, rendre aujourd’hui hommage.

Selon l’Organisation de coopération et de développement économiques, l’OCDE, le trafic mondial des produits contrefaisants produirait de l’ordre de 250 milliards de dollars de revenus par an. En France, la valeur des marchandises saisies par la douane a considérablement augmenté au cours de la dernière décennie.

Je le souligne d’emblée, la contrefaçon est un mal profond, un véritable cancer. Elle enraye l’activité économique. Elle détruit l’innovation de nos entreprises. Elle constitue une menace pour le développement durable, dans la mesure où les entreprises qui s’y livrent emploient des matériaux non recyclés et, évidemment, ne respectent aucune règle en matière de pollution et de protection de l’environnement.

J’ajoute que la contrefaçon, c’est le travail clandestin, l’exploitation des êtres humains et notamment des enfants.

En outre, comme vous le savez, depuis une dizaine d’années environ, la contrefaçon est aux mains d’organisations criminelles, de réseaux mafieux. Il est question ici non plus d’artisanat et de bricolage, mais bien de la grande criminalité, et ce pour deux raisons.

Premièrement, ces grands réseaux criminels ont compris que les profits, en la matière, étaient colossaux. Ils ont mesuré combien le fait d’attaquer une banque, un pistolet à la main, appartenait désormais au passé, dans la mesure où il est beaucoup plus lucratif de fabriquer de faux médicaments !

Deuxièmement, la contrefaçon permet évidemment de recycler l’argent sale et, ce faisant, de le rendre « propre », si je puis m’exprimer ainsi !

Dans ce domaine, l’événement le plus marquant survenu en France en 2013 a certainement été la découverte par les douaniers du Havre de plus d’un million de sachets d’aspirine de contrefaçon, qui ne contenaient que du sucre…

M. Michel Delebarre, rapporteur de la commission des lois. Ce n’est pas forcément mauvais pour la santé… (Sourires.)

M. Richard Yung. Cela ne coûte pas cher ! On met du sucre en sachets, et on le fait passer pour une molécule de grande qualité !

Produites en Chine, ces marchandises devaient être livrées à une société-écran des Baléares, en vue d’être vendues dans le sud de l’Europe – plus exactement le sud de la France – et en Afrique francophone.

J’ajoute que, tout récemment – la semaine dernière –, 10 000 faux tickets restaurants, également en provenance de Chine, ont été saisis à l’aéroport de Bâle-Mulhouse. Des tickets restaurants… Qui l’aurait imaginé ? Mais, au fond, c’est très simple : imprimer de tels titres ne coûte pas cher, et chaque ticket se vend environ 8 euros.

À mon sens, l’exemple des médicaments est symptomatique de l’évolution du phénomène que constitue la contrefaçon. Une fois produits, les biens concernés sont commandés facilement sur internet et acheminés sous forme de petits colis postaux ou de fret express. Cette dernière méthode est courante, elle est relativement anonyme, et, pour la douane comme pour la police, il est difficile de se concentrer sur cette activité.

M. Michel Delebarre, rapporteur. Il leur sera plus facile d’agir avec ce texte !

M. Richard Yung. Or celle-ci compte parmi les plus lucratives qui soient !

Au total, on estime que la vente mondiale de médicaments contrefaisants a représenté environ 55 milliards d’euros en 2010. Je précise que ces faux médicaments, à l’instar de nombreux autres produits contrefaisants, mettent en danger la santé des consommateurs. C’est d’ailleurs pour cette raison que le Sénat a décidé, en 2007, d’alourdir les sanctions relatives aux contrefaçons dangereuses pour la santé et portant atteinte à la sécurité. (M. Jean-Jacques Hyest acquiesce.) Je constate que M. Hyest opine !

Mes chers collègues, pour mener la bataille, la France s’est dotée d’un arsenal juridique étoffé, et ce dès le XVIIIe siècle. Sans rappeler cette histoire dans le détail, je souligne que notre pays a figuré parmi les pionniers dans ce domaine, notamment en matière de droits d’auteur. C’est précisément avec cet enjeu qu’a commencé la protection des droits de propriété intellectuelle.

La dernière loi en date est celle du 29 octobre 2007, que je viens d’évoquer. Elle a constitué un progrès – nous l’espérons, comme pour tous les textes que le Parlement adopte ; on peut parfois en douter mais, en l’espèce, je suis persuadé que tel est le cas. Elle a notamment permis de renforcer la lutte contre les atteintes portées à la propriété intellectuelle.

Ces dispositions n’en restent pas moins perfectibles. C’est ce que Laurent Béteille et moi-même avons tâché d’établir à travers le rapport d’information que nous avons publié en 2011, et auquel la présente proposition de loi fait suite.

Premièrement, le renforcement des dédommagements civils accordés aux victimes de contrefaçons est sans doute la mesure la plus avancée au sein du dispositif que je soumets aujourd’hui à votre examen. Comme je l’ai indiqué, la contrefaçon demeure une faute lucrative, car elle permet de s’enrichir très confortablement et en ne courant que peu de risques, malgré la réforme des modalités de calcul du préjudice. Tel est le bilan qui doit constituer notre point de départ !

La loi de 2007 indique que le montant des dommages et intérêts versés doit résulter de la prise en considération de trois éléments : les conséquences économiques négatives, les bénéfices réalisés par le contrefacteur et le préjudice moral subi par la partie lésée.

Néanmoins, la notion de « conséquences économiques négatives » n’a pas été définie. Seul le manque à gagner est mentionné à l’article L. 331-3-1 du code de la propriété intellectuelle.

Pour la prise en considération des bénéfices réalisés, les titulaires de droits n’apportent pas toujours la preuve de l’étendue du préjudice subi du fait de la contrefaçon. En effet, ils ont souvent du mal à le faire. Au surplus, ils peuvent se montrer réticents à communiquer à la partie adverse des informations confidentielles concernant leurs marchés, les prix de leurs produits et leur chiffre d’affaires.

Au reste, la prise en considération des bénéfices réalisés par le contrefacteur n’est pas suffisante, car ce critère ne tient pas compte des économies d’investissements qu’il a retirées de la contrefaçon. Je présenterai d’ailleurs dans quelques instants un amendement visant à aller plus loin que la réforme des modalités de calcul des dommages et intérêts, c’est-à-dire, en définitive, à transposer dans ce domaine les dispositions en vigueur pour le trafic de drogue et la grande criminalité. Il s’agit de pouvoir saisir tout ou partie du patrimoine des contrefacteurs. Le principe est simple : frappons-les au portefeuille !

Enfin, le principal problème réside dans le fait que la loi de 2007 n’impose pas à la juridiction de distinguer les différents éléments d’appréciation. En matière de contrefaçon, une amende forfaitaire globale est souvent fixée par le juge sans que l’on sache comment elle a été calculée. Or, pour mieux cerner la question, il faudrait pouvoir en décomposer les différents éléments !

J’ajoute que la France est malheureusement connue pour fixer des dommages et intérêts plus bas que ses principaux voisins et concurrents économiques. Sans même évoquer les États-Unis, je songe en particulier à l’Allemagne.

Face à ce constat, je propose d’obliger les juridictions à « ventiler » les trois chefs de préjudice introduits par la loi de 2007. Les magistrats devront ainsi procéder à une analyse précise du préjudice subi.

Le présent texte permet également de mieux définir les conséquences économiques négatives induites par la contrefaçon, en précisant qu’elles recouvrent non seulement le gain manqué mais aussi la perte subie par la partie lésée.

Il convient parallèlement d’obliger les juridictions à prendre en considération les économies d’investissements intellectuels, matériels et promotionnels en cause. Si vous n’investissez pas dans la recherche, si vous vous contentez d’exploiter le résultat de la recherche menée par autrui, vous en tirez un avantage économique manifeste. C’est on ne peut plus clair dans le domaine des médicaments, que j’ai déjà évoqué : la mise au point d’une molécule coûte des sommes considérables !

En conséquence, je propose d’améliorer le dispositif de la redevance forfaitaire. La loi de 2007 a permis à la partie lésée de demander à la juridiction de lui allouer, par substitution au mécanisme de dédommagement reposant sur les trois chefs prévus, une somme forfaitaire qui ne saurait être inférieure au montant des redevances ou droits qui auraient été dus si l’auteur de l’atteinte avait demandé une autorisation. Cette somme correspond peu ou prou au niveau des royalties qu’il aurait dû acquitter.

Je propose également de préciser que le montant des dommages et intérêts forfaitaires doit être supérieur au montant des redevances ou droits qui auraient été dus en l’absence de contrefaçon. Nous débattrons certainement de cette question avec M. le rapporteur dans la suite de nos discussions. L’idée fondamentale reste la suivante : on ne doit pas pouvoir s’enrichir indûment en se livrant à la contrefaçon. Or, dans le système actuel, si le chiffre d’affaires ou les bénéfices de la victime s’élèvent à une somme donnée, les dommages et intérêts s’établissent précisément à ce montant, même si le contrefacteur présente un chiffre d’affaires ou un bénéfice dix fois supérieur. Par conséquent, il en empoche 90 % ! Voilà ce que cela signifie ! C’est ce à quoi il faut mettre fin.

À cet égard, la mise en œuvre du dispositif prévu dans le présent texte devrait conduire à une augmentation des dommages et intérêts accordés au titulaire des droits. Dans le même temps, elle devrait permettre d’enrayer une pratique répandue : le « forum shopping », ou le « tribunal shopping ». De fait, pour les raisons que je viens d’indiquer, si l’on apprend que les tribunaux d’Hambourg ou de Ludwigshafen versent des dommages et intérêts d’une certaine importance dans tel ou tel domaine, les personnes lésées auront tendance à se présenter devant eux !

Concernant la spécialisation des juridictions civiles en matière de propriété intellectuelle, je note que M. le rapporteur a supprimé – à mon corps défendant – la disposition permettant la concentration, au sein du tribunal de grande instance de Paris, du contentieux relatif aux indications géographiques.

Je n’insisterai pas sur ce sujet, qui peut sembler secondaire. Quatre ou cinq affaires de ce type sont jugées chaque année et, à nos yeux, la présence de juges spécialisés au tribunal de grande instance de Paris aurait été préférable. Toutefois, cette disposition n’est pas le cœur du présent texte. Je suis persuadé que nous aboutirons à un accord sur ce sujet.

Pour autant, il me semble nécessaire de réfléchir à la possibilité de renforcer encore la spécialisation des juridictions dans le domaine de la propriété intellectuelle.

Nous avions proposé, à l’origine, de limiter fortement le nombre des tribunaux de grande instance compétents en matière de contentieux, et de le fixer à quatre ou cinq, voire à un seul.

La Chancellerie est en désaccord avec nous sur ce point, pour des raisons que je respecte : cette proposition ne correspond pas à sa philosophie, plutôt orientée vers une généralisation des affaires à travers les tribunaux. En effet, le ministère de la justice n’est pas favorable à la spécialisation des juges et considère qu’ils doivent pouvoir exercer successivement plusieurs types de pratiques.

Sans me prononcer sur ce point, j’estime que nous avons tout de même intérêt à disposer, en France, de juges et de juridictions susceptibles de traiter ces dossiers souvent complexes et de créer des jurisprudences ensuite respectées.

J’évoque rapidement le droit à l’information : la proposition de loi tend à offrir à la victime plus de possibilités d’obtenir des informations de nature économique sur le contrefacteur, avec des clarifications procédurales sur lesquelles nous reviendrons durant la discussion.

Afin de faciliter l’établissement de la preuve de la contrefaçon, je propose également de préciser que le juge peut ordonner la production d’éléments de preuve détenus par les parties, quelles qu’elles soient, indépendamment de la saisie de contrefaçon, qui est l’outil de base en matière de lutte dans ce domaine. Cela n’est pas possible aujourd’hui.

Il convient en outre de renforcer les capacités d’intervention des services douaniers, qui sont aux avant-postes dans la lutte contre la contrefaçon. Tel est l’objet des articles 6 à 15, portant notamment sur la retenue douanière, sur l’infiltration des réseaux, sur l’opération dite « de coup d’achat » consistant à faire des propositions d’achat, ainsi que sur le contrôle des locaux des opérateurs. Ces dispositions sont très attendues par les douaniers, dont je tiens ici à saluer le dévouement et le travail remarquable.

La présente proposition s’inscrit dans la droite ligne du plan national de lutte contre la contrefaçon, élaboré au début de l’année par la ministre du commerce extérieur, que je souhaite remercier pour son soutien, et le ministre de l’économie et des finances.

Le dispositif que je vous propose d’adopter vise, par ailleurs, à conforter la bonne réputation et l’attractivité juridique de notre pays dans le domaine de la lutte contre la contrefaçon. Je rappelle que nous discuterons demain matin de la création d’une nouvelle juridiction européenne unifiée des brevets qui aura compétence exclusive pour connaître de l’ensemble des litiges touchant à ces questions.

La plupart d’entre nous se réjouissent de ce grand progrès, d’autant que Paris a été choisi comme siège de cette nouvelle juridiction. Mais il nous faut être à la hauteur de notre réputation, et faire en sorte que la place de Paris soit reconnue comme lieu d’excellence en matière de jurisprudence. En outre, nos juges doivent être valorisés ; ils seront, si j’ose dire, en « concurrence » avec des juges allemands ou hollandais, extrêmement bien formés.

Ce texte est également cohérent avec la stratégie européenne en matière de propriété intellectuelle. Il vient compléter le règlement de 2013 concernant le contrôle, par les autorités douanières, du respect des droits de propriété intellectuelle, qui entrera en vigueur le 1er janvier prochain.

Par ailleurs, la révision de la directive du 22 octobre 2008 rapprochant les législations des États membres sur les marques permettra, je l’espère, de neutraliser la funeste jurisprudence dite « Nokia-Philips », qui a mis un terme à la possibilité, pour la douane, de retenir les marchandises présumées contrefaisantes qui ne font que transiter par le territoire français ou communautaire.

Cet arrêt nous place dans une situation paradoxale : les douaniers savent très précisément qu’un conteneur est rempli de marchandises contrefaites, mais ils le regardent passer, car il part pour une autre destination, alors même que nous savons que, souvent, son contenu revient en France, sous une autre forme et par d’autres moyens. Telle est aujourd’hui la jurisprudence de la Cour de justice de l’Union européenne.

Il faudrait également évoquer la contrefaçon numérique, mais il s’agit d’un autre sujet, très important, que nous espérons pouvoir traiter dans le cadre du Comité national anti-contrefaçon, le CNAC. Je proposerai à cette occasion une réforme du statut des hébergeurs.

Je n’évoquerai pas non plus la question des semences de ferme, qui a beaucoup agité certains milieux agricoles et dont beaucoup d’entre nous ont été saisis. J’ai d’ailleurs été quelque peu stupéfait de l’être, dans la mesure où cette proposition de loi ne traite en aucun cas des certificats d’obtention végétale et des semences, qui y sont liées. La question du droit, pour les agriculteurs, d’utiliser une partie de leur récolte pour réensemencer leurs champs, que l’on appelle « le privilège de l’agriculteur », correspond à une autre législation qui n’entre pas dans le cadre de la présente proposition de loi.

Tel est l’essentiel du dispositif de cette proposition de loi que je souhaitais vous exposer. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste, du groupe CRC, du groupe écologiste et de l’UDI-UC, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)

M. le président. La parole est à M. le rapporteur.

M. Michel Delebarre, rapporteur de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d'administration générale. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, avant d’aborder le contenu de la proposition de loi, je tiens à rappeler ici le travail considérable que Richard Yung, avec notre ancien collègue Laurent Béteille, a conduit sur ce sujet difficile de la contrefaçon.

Ils ont mené, au nom de la commission des lois, des travaux d’information en 2010 et 2011, afin d’évaluer la loi du 29 octobre 2007 de lutte contre la contrefaçon. Ces travaux avaient débouché sur le dépôt d’une proposition de loi par Laurent Béteille, rapportée par Richard Yung en juillet 2011, mais restée sans suite. Pour relancer cette initiative, Richard Yung a déposé en septembre dernier la proposition de loi que nous examinons aujourd’hui.

Cette situation me fait dire que je suis moi aussi, en quelque sorte, en situation de contrefacteur, puisque je reprends la responsabilité d’une initiative préparée par d’autres. (Sourires.) Je me rassure en me disant que les rapports parlementaires sont couverts par l’immunité ! Je ne risque donc rien.

M. Richard Yung. Exactement ! Il n’y a pas de droit d’auteur sur les rapports parlementaires. (Nouveaux sourires.)

M. Michel Delebarre, rapporteur. Plus sérieusement, l’adoption de cette proposition de loi est une urgence, tant la contrefaçon constitue un fléau qui se développe et devient protéiforme.

Je ne répéterai pas ce qu’a déjà fort bien exposé Richard Yung. Nous connaissons l’impact économique de la contrefaçon, qui se paye pour notre pays en dizaine de milliers d’emplois mis en cause. Je veux surtout insister sur le fait que la contrefaçon, aujourd’hui, a changé de nature.

Avec le développement du commerce mondial, elle s’est internationalisée, en lien de plus en plus souvent avec des organisations criminelles, qui y trouvent une activité bien plus rentable et bien moins risqué, pénalement et financièrement, que, par exemple, le trafic de drogue.

Les marchandises faisant l’objet de contrefaçon ont elles aussi évolué, en se diversifiant considérablement. Autrefois, on appréhendait la question de la contrefaçon à travers le seul prisme des produits de luxe, ce qui expliquait sans doute une certaine tolérance à l’égard du phénomène, au motif que les entreprises qui en étaient victimes devaient vraisemblablement avoir les moyens de le supporter.

Aujourd’hui les choses ont changé. La contrefaçon porte non plus seulement sur des sacs à main ou des vêtements de marque, mais d’abord sur des pièces détachées d’automobiles, dans tous les sens, des médicaments, des produits cosmétiques, des éléments de construction pour le bâtiment ou encore des jouets d’enfants. Nous approchons de Noël, période bénie pour la contrefaçon ! Ce phénomène, qui se développe rapidement, pose un grave problème pour la sécurité et pour la santé des consommateurs.

Dans ces conditions, la proposition de loi, appuyée par un réel engagement du Gouvernement, et de vous-même, depuis l’origine, madame la ministre, a pour vocation de rendre notre législation plus efficace pour combattre la contrefaçon.

La lutte s’effectue selon deux axes : d’une part, par la voie de l’action civile des entreprises lésées, qui cherchent à obtenir réparation, et, d’autre part, par la voie pénale, moins souvent employée. Dans cette lutte, l’action des services des douanes, qui s’exerce dans un cadre communautaire précis, est, par construction, primordiale.

La proposition de loi adapte donc, et harmonise, les mécanismes civils existant dans le code de la propriété intellectuelle et renforce les moyens d’action et de contrôle des douanes. Elle comporte aussi quelques dispositions pénales. Il s’agit d’adaptations et d’ajustements de la réforme opérée par la loi du 29 octobre 2007 au regard de la pratique constatée depuis, ainsi que d’une meilleure mise en cohérence des divers dispositifs régissant la protection des différentes catégories de droit de la propriété intellectuelle.

Avant d’entrer davantage dans le détail, je tiens à rappeler que ce texte reprend entièrement, à quelques ajustements rédactionnels près, le contenu du texte que notre commission avait adopté sur la proposition de Laurent Béteille en juillet 2011. Cela représente seize articles dans la présente proposition de loi, pour lesquels la commission s’en est tenue, à quelques détails près, au texte de 2011. S’y ajoutent quatre articles contenant des dispositions nouvelles, qui intéressent directement les douanes.

La logique de la commission a été la cohérence avec sa position consensuelle de 2011 et la recherche de l’efficacité afin de permettre l’adoption rapide de ce texte.

Premièrement, la proposition de loi tendait à renforcer la spécialisation des tribunaux en matière de propriété intellectuelle. La commission n’a pas confirmé ce point. L’enjeu réside bien davantage, à nos yeux, dans le renforcement de la formation et de la spécialisation des magistrats en matière de propriété intellectuelle. Cela relève non du pouvoir législatif, mais bien de la pratique de la Chancellerie.

Deuxièmement, la proposition de loi vise à améliorer les dédommagements civils en matière de contrefaçon. Cette question fait l’objet de débats. Depuis la loi de 2007, en effet, afin de fixer le montant des dommages et intérêts, le juge doit prendre en considération, comme l’a dit Richard Yung, « les conséquences économiques négatives, dont le manque à gagner, subies par la partie lésée, les bénéfices réalisés par l’auteur de l’atteinte aux droits et le préjudice moral causé au titulaire de ces droits du fait de l’atteinte ». La proposition de loi vise à apporter des précisions à cet égard : il est désormais indiqué que le juge prend en compte distinctement ces trois chefs de préjudice, et que les bénéfices réalisés par le contrefacteur peuvent comprendre les économies d’investissements qu’il a retirées de la contrefaçon.

La commission a préféré supprimer une disposition à la portée incertaine, visant à la confiscation des recettes tirées de la contrefaçon en cas de réparation insuffisante du préjudice, qui pouvait ouvrir la voie aux dommages et intérêts punitifs.

La commission des lois, partagée sur cette question, a jugé que l’on ne pouvait pas introduire dans notre droit civil un concept aussi débattu à l’occasion d’un texte de cette nature.

Le concept de dommages et intérêts punitifs est d’origine anglo-saxonne et consiste à fixer un montant de dommages et intérêts au profit de la personne lésée supérieur au montant du préjudice réellement subi par celle-ci, dans le but de « punir » la personne responsable du préjudice. Serait alors à craindre l’extension d’un tel mécanisme en droit français de la responsabilité.

J’indique que les représentants des entreprises directement victimes de la contrefaçon sont hostiles à ce principe, quand bien même celles-ci en retireraient des dommages et intérêts d’un montant supérieur.

Au surplus, je rappelle ce que je viens d’indiquer : le droit en vigueur permet déjà de prendre en compte, depuis 2007, les bénéfices réalisés par le contrefacteur. Une fois que seront adoptées dans notre droit les précisions apportées par cette proposition de loi, le reste, c’est-à-dire la pratique de fixation du montant des dommages et intérêts, relèvera de l’appréciation des juges, qui devront apprécier les trois catégories de reproches adressés au contrefacteur.

La réflexion doit se poursuivre sur les moyens de supprimer le caractère lucratif d’une faute sans basculer forcément dans les dommages et intérêts punitifs. Il serait envisageable d’explorer la voie de l’amende civile pour récupérer l’éventuel chiffre d’affaires indu, mais au bénéfice du Trésor public. Il s’agit, à mon avis, d’une orientation intéressante.

Troisièmement, la proposition de loi tend à ajuster et harmoniser de façon bienvenue différentes procédures prévues par le code de la propriété intellectuelle en matière de collecte de preuves de contrefaçon : droit à l’information, procédure de saisie-contrefaçon, etc. Je vous proposerai un amendement ponctuel pour compléter le travail déjà réalisé par la commission.

Quatrièmement, la proposition de loi tend à renforcer les moyens d’action des douanes, qui sont particulièrement intéressées par ce texte et sont au cœur de tous nos dispositifs.

Elle vise à harmoniser la procédure de retenue douanière pour les différents droits de propriété intellectuelle, en conformité avec le droit communautaire. Le Gouvernement présentera, en outre, des amendements pour tenir compte du règlement européen adopté en juin dernier en matière de contrôle douanier des droits de propriété intellectuelle, qui appelle des modifications dans notre droit interne. Concernant la retenue, je vous présenterai, en complément, un amendement de précision.

Par ailleurs, ce texte vise encore à autoriser plus largement les douanes à mener des opérations d’infiltration en matière de contrefaçon, ainsi qu’à faciliter la constatation de l’infraction de contrefaçon, en leur permettant de solliciter un vendeur, selon la technique dite du « coup d’achat », qu’elles mettent en œuvre dans un certain nombre de cas.

Il est également prévu d’étendre de façon encadrée l’accès des douanes à l’ensemble des locaux des prestataires de services postaux et des entreprises de fret express. Il s’agit là d’une harmonisation, puisque cette disposition ne concerne aujourd'hui que La Poste. Cela permettra aussi aux douanes d’accéder aux locaux à usage d’habitation qui sont à l’intérieur de locaux professionnels, avec l’autorisation de l’occupant. Sans autorisation, il faudra, comme aujourd’hui, solliciter une autorisation du juge des libertés et de la détention.

En matière de moyens d’action des douanes, une disposition, que la commission a approuvée dans son principe, et pour laquelle je vous proposerai un amendement afin de mieux l’encadrer, est, en revanche, controversée. Il s’agit de l’obligation de transmission aux douanes par les prestataires de services postaux et les entreprises de fret express, que l’on appelle « les expressistes », de toutes leurs données relatives à l’identification des expéditeurs, des destinataires et des marchandises transportées dans les colis. Cette obligation existe en droit communautaire pour le contrôle des colis de provenance extracommunautaire. En l’espèce, tous les colis – je dis bien : tous les colis ! – sont ici visés. Ce dispositif ne concerne donc pas que la contrefaçon, il vise également quelques autres infractions douanières.

L’objectif des douanes est de pouvoir appliquer, à partir de critères de risque, des traitements automatisés à ces données pour cibler les contrôles. Pour justifier cette disposition, est invoqué le développement du commerce électronique, à partir de l’étranger notamment, le trafic diffus de colis pouvant dissimuler – c’est de plus en plus le cas – de nombreuses marchandises interdites.

J’ai demandé au Gouvernement de poursuivre un dialogue technique avec les expressistes, qui sont très hostiles à cette nouvelle obligation, laquelle représenterait un coût pour eux et pourrait créer, selon eux, des distorsions de concurrence avec les autres États de l’Union européenne.

Se posent également la question de l’atteinte à la vie privée et aux données personnelles et celle de la proportionnalité de cette atteinte avec l’objectif de contrôle poursuivi, d’autant que nous sommes dans un contexte particulier : celui du secret des correspondances.

Le Conseil constitutionnel est très sensible à ces questions, comme l’a montré sa décision du 22 mars 2012 sur la loi relative à la protection de l’identité, dans laquelle il a censuré le fichier d’identité biométrique. Bien sûr, nous ne sommes pas dans le cas d’un fichier comparable, mais, face à la multiplication du nombre de fichiers en tous genres à des fins de contrôle, le législateur doit être très attentif à l’encadrement de ceux-ci, au nom de la protection de la vie privée. C’est d’ailleurs le sens de l’un des amendements qui seront présentés sur ce sujet.

Cinquièmement, la proposition de loi vise à aligner les délais de prescription en matière de propriété intellectuelle sur le délai de droit commun de cinq ans, issu de la réforme de 2008, engagée sur l’initiative de notre collègue Jean-Jacques Hyest.

Enfin, sixièmement, la proposition de loi comporte quelques dispositions éparses, notamment en matière pénale, qui figuraient déjà dans le texte de 2011. Il est notamment prévu d’aggraver les sanctions pénales encourues en matière de contrefaçon lorsque celle-ci porte sur des produits présentant un danger pour la santé ou la sécurité : on passerait ainsi de trois à cinq ans de prison et de 300 000 à 500 000 euros d’amende, afin de prendre en compte les nouvelles formes de contrefaçon.

Avant de conclure, je souhaite dire un mot sur les nombreux amendements déposés sur la question des certificats d’obtention végétale en matière de semences de ferme.

En acceptant de rapporter sur le texte de notre ami Richard Yung, j’ai découvert qu’il s’agissait, en réalité, d’un texte de politique agricole, une dimension que je n’avais pas saisie de prime abord. (Sourires.) Ce qui m’a motivé, ce sont les milliers d’emplois mis en cause,…

M. Jean-Pierre Sueur, président de la commission des lois. Des dizaines de milliers d’emplois !

M. Michel Delebarre, rapporteur. … sur lesquels M. le président de la commission des lois avait attiré mon attention. Alors que je suis présenté comme un parlementaire s’intéressant plutôt à l’industrie et à l’activité économique,…

M. Jean-Pierre Sueur, président de la commission des lois. Absolument !

M. Michel Delebarre, rapporteur. … je me suis retrouvé – sincèrement, je l’ai découvert ! – à devoir traiter la question des semences de ferme ! Je pensais que ce texte allait être utile et produire les résultats escomptés, mais j’ai été surpris de constater que je posais, paraît-il, problème à l’agriculture de notre pays. Combien de parlementaires m’ont sollicité, dans le seul but de m’aider – il n’y avait là aucune mauvaise intention de leur part ! –, de me soutenir et d’enrichir ce texte,…

M. Yvon Collin. Bien sûr !…

M. Michel Delebarre, rapporteur. … – vous, la première, madame Lipietz ! –,…

M. Michel Delebarre, rapporteur. … afin que soient prises en compte les semences de ferme !

Je n’ai trouvé qu’une solution, que la commission partage : traitons les problèmes dans leurs domaines respectifs !

M. Jean-Pierre Sueur, président de la commission des lois. Très bien !

M. Michel Delebarre, rapporteur. Nous examinons aujourd’hui un texte visant à lutter contre la contrefaçon. Des projets de loi concernant l’agriculture verront le jour,…

Mme Nicole Bricq, ministre. Très bientôt !

M. Michel Delebarre, rapporteur. … qui confirmeront que les semences de ferme n’ont rien à voir avec la contrefaçon. (Mme Hélène Lipietz fait une moue dubitative.) Ils pourront, eux, servir éventuellement de support à une réflexion approfondie sur les semences de ferme.

Madame Lipietz, veuillez m’excuser, par avance, de l’avis défavorable que j’émettrai sur un certain nombre de vos amendements, après, je le reconnais, de nombreuses discussions et, je tiens à le dire, des heures d’introspection, mais vous aurez compris les raisons qui m’animent.

Nous sommes aujourd'hui saisis d’un texte ayant pour objet de renforcer nos moyens de lutte contre la contrefaçon, essentiellement des moyens de procédure. Je le répète, plusieurs dizaines de milliers d’emplois sont concernés. C’est cet objectif que nous avons voulu respecter.

J’ajoute que la proposition de loi ne modifie en rien le contenu et la portée des droits de propriété intellectuelle, en particulier des certificats d’obtention végétale. La commission a très largement considéré que nous devions nous en tenir à la question de la lutte contre la contrefaçon, de sorte qu’elle a demandé le retrait de tous les amendements traitant d’un autre sujet.

La commission a elle-même estimé, dans un souci d’efficacité et de cohérence, qu’il convenait de s’en tenir au plus près du texte qu’elle avait déjà adopté en juillet 2011. C’est un effort de discipline dans l’intérêt de la cause que sert cette proposition de loi.

Au demeurant, la commission des lois n’est sans doute pas la plus compétente dans le domaine agricole… Mais je commence à en douter après tout ce que j’ai entendu ! (Sourires.) À vrai dire, elle me semble tout de même très compétente ! C’est un effort de discipline que nous avons voulu respecter.

Ce débat pourra pleinement avoir lieu dans le cadre du projet de loi d’avenir pour l’agriculture, l’alimentation et la forêt, qui a été déposé par le Gouvernement sur le bureau de l’Assemblée nationale le 13 novembre dernier.

Sous le bénéfice de ces observations et en ayant bien conscience que j’ai tenté prudemment de mettre mes pas dans ceux de Richard Yung, je vous propose, mes chers collègues, d’adopter cette proposition de loi, bienvenue, me semble-t-il, qui n’a que trop attendu d’être examinée par le Sénat et que nous devons accompagner jusqu’à son terme. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste, du groupe CRC, du groupe écologiste et de l’UDI-UC, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)

M. le président. La parole est à Mme la ministre.

Mme Nicole Bricq, ministre du commerce extérieur. Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, je tiens tout d’abord à saluer l’initiative de la Haute Assemblée, singulièrement la commission des lois, d’avoir précédé le Gouvernement dans la réflexion à mener sur la question de la contrefaçon. Pour avoir siégé au Sénat, je connais le sérieux de cette instance, qui l’emporte souvent sur celui de la commission des finances ! (Sourires.)

Mme Nicole Bricq, ministre. Vous vous êtes attelés très tôt à cette question très importante, et je veux vraiment vous en remercier, car la contrefaçon constitue un fléau planétaire en pleine expansion : elle représente environ 250 milliards de dollars dans le monde, soit 30 % des revenus du crime organisé.

En France, ce trafic est responsable de la destruction de 38 000 emplois, en nette augmentation depuis la précédente loi de 2007 de lutte contre la contrefaçon, et de 6 milliards d’euros de manque à gagner par an pour notre économie.

En violant les droits de la propriété intellectuelle, en menaçant la créativité et l’inventivité, si grandes, des entreprises françaises, la circulation de marchandises contrefaites toujours plus nombreuses menace directement la compétitivité de la France et fait obstacle – ce n’est pas le seul obstacle, mais c’en est un ! – à l’équilibre de notre balance commerciale. Près de 20 % de la population active est employée par des entreprises dont l’activité est directement liée à la protection des droits de la propriété intellectuelle.

Vous l’avez dit, monsieur Yung, monsieur le rapporteur, la menace est croissante. Alors que le nombre d’articles de contrefaçon interceptés par les services douaniers en 1994 était de 200 000, il est passé à 2,3 millions en 1998, pour atteindre 8,6 millions en 2011, une année record pour les saisies effectuées par la douane française.

La baisse importante des saisies en 2012 – la moitié par rapport à 2011 – s’explique par les effets désastreux de l’arrêt Nokia-Philips rendu par la Cour de justice de l’Union européenne, qui a réduit les pouvoirs de contrôle de la douane sur les flux en transit en Europe. La France a été particulièrement active pour trouver une solution qui redonne aux douanes la capacité d’exercer un contrôle.

Nous avons obtenu une première satisfaction dans le cadre du nouveau règlement européen du 12 juin 2013, qui encadre l’action de la douane en matière de contrefaçon. Nous poursuivons notre engagement dans le cadre du travail entrepris par la Commission européenne pour la révision du système des marques, puisque la proposition de la Commission du 27 mars 2013 tient compte des préoccupations de la France. Nous œuvrons donc pour que les négociations en cours à Bruxelles permettent de restaurer les capacités d’intervention de la douane sur les flux en transit, car la France est particulièrement concernée.

Vous l’avez dit, la sécurité des populations est en jeu. La contrefaçon prend des formes nouvelles, ce qui rend encore plus difficile la lutte que nous menons contre elle. En témoigne le rapport d’information sur le rôle des douanes dans la lutte contre la fraude sur internet remis récemment par MM. Montgolfier et Dallier, au nom de la commission des finances. Le développement du e-commerce entraînera, de fait, une explosion de la contrefaçon.

Comme vous l’avez indiqué, monsieur le rapporteur, la contrefaçon ne concerne plus seulement les produits de luxe ; elle touche aussi des produits de consommation courante, tels que les produits du bâtiment, les produits alimentaires, les jouets, les pièces automobiles, les lunettes de soleil, les cosmétiques ou les médicaments. Tous ces produits sont dangereux.

J’ajoute – j’en ai été le témoin ce matin, arrivant d’Afrique – que la contrefaçon est très active dans le domaine des pièces d’identité, des permis de conduire et des cartes grises. Nous avons fort heureusement des entreprises innovantes capables, au travers de nouveaux procédés, de produire des documents infalsifiables. Toutefois, nous connaissons l’habileté des fraudeurs, qui se tiennent toujours informés des innovations.

Le cas des faux papiers est très frappant, mais tous les produits contrefaits dont je viens de parler sont très dangereux. Les saisies de médicaments de contrefaçon, par exemple, ont augmenté de 45 % en 2012, ce qui est particulièrement inquiétant en raison des dangers qu’ils représentent pour la santé. Nous devons donc absolument adapter nos capacités de réaction.

La loi du 29 octobre 2007 a été portée par Mme Lagarde, ancienne ministre de l’économie et des finances : ayant perçu, lorsqu’elle était ministre du commerce extérieur, l’importance du problème de la contrefaçon lié aux échanges commerciaux internationaux, elle a manifesté sa ferme volonté d’agir – je veux saluer l’opiniâtreté dont elle a fait preuve en la matière –, afin de parvenir à une évolution du droit, dont la présente proposition de loi marque une nouvelle étape.

Monsieur le président de la commission des lois, vous avez choisi, de manière fort opportune, d’évaluer l’application de la loi adoptée en 2007. À cet égard, il convient de saluer le travail accompli par MM. Yung et Béteille : dans leur rapport d’information publié en 2011, ils ont mis en évidence la nécessité, face à l’ampleur du phénomène de la contrefaçon, d’améliorer encore la protection de la propriété intellectuelle en France, afin de conforter la réputation d’excellence de notre pays et son attractivité juridique.

Cette dimension est très importante pour les investisseurs et pour les entreprises,…

Mme Nicole Bricq, ministre. … et dans la mesure où elle est une composante de l’attractivité du territoire, qui relève de ma responsabilité, j’y suis particulièrement attachée.

Au demeurant, en raison de la concurrence entre les États dans ce domaine, nous devons être les meilleurs ! (M. Jean-Jacques Hyest acquiesce.) La directrice des douanes est très soucieuse que la France conserve son leadership sur ce sujet dans tous les projets européens.

Le travail du Sénat a conduit à l’élaboration, en 2011, d’une première proposition de loi : renvoyée à la commission des lois, celle-ci n’a jamais été examinée en séance publique.

Tenace, M. Yung a repris ce travail et l’a enrichi ; je remercie le groupe socialiste d’avoir inscrit sa proposition de loi à l’ordre du jour des travaux du Sénat.

Mesdames, messieurs les sénateurs, vous avez tous la volonté de renforcer la lutte contre la contrefaçon. Votre intention rejoint les objectifs du Gouvernement. Un ancien ministre parlait de la nécessité, pour écrire de bonnes lois, d’une coproduction entre l’exécutif et le législatif : c’est exactement la méthode suivie dans le domaine de la lutte contre la contrefaçon.

Le 3 avril dernier, avec mon collègue Pierre Moscovici, ministre de l’économie et des finances, j’ai présenté en conseil des ministres un plan en trois volets pour améliorer cette lutte.

Le premier volet consiste à renforcer l’action des douanes, notamment sur internet. Je pense à la procédure du coup d’achat, dont MM. Yung et Delebarre ont déjà parlé. Cette technique, rendue possible par une disposition législative adoptée à la fin de 2012, permet de prendre le contrefacteur en flagrant délit ; un plan d’action a été défini par secteurs : santé, commerce électronique, culture.

Le deuxième volet de notre plan correspond à la politique active de la France à Bruxelles pour obtenir une révision du droit des marques en réponse à la situation créée par l’arrêt Nokia-Philips ; sur ma proposition, le Premier ministre a confié à M. Yung une mission consistant à identifier les moyens susceptibles d’améliorer la coordination et l’harmonisation des pratiques douanières au niveau européen.

Le troisième volet du plan est une défense active de la propriété intellectuelle et des indications géographiques, qui ne sont pas une particularité française. Néanmoins, nous avons été particulièrement prompts à les préserver.

À cet égard, je suis particulièrement bien placée pour savoir que, dans les négociations de libre-échange que la Commission européenne, dont c’est la compétence exclusive, mène sous l’œil exercé des États membres l’ayant mandatée, la propriété intellectuelle fait l’objet de conceptions divergentes. Les États-Unis, en particulier, ne l’envisagent pas de la même façon que nous.

Le réseau des dix-sept attachés douaniers déployés dans soixante-dix pays ainsi que les conventions techniques et administratives ont démontré leur efficacité dans la lutte internationale contre la contrefaçon ; en effet, 10 millions d’articles de contrefaçon ont été saisis en 2012 aux Émirats arabes unis, grâce à des informations de la douane française. Le détachement par l’Institut national de la propriété industrielle, l’INPI, d’experts de la propriété intellectuelle dans certaines ambassades bien ciblées est également fort utile pour organiser les contrôles.

Pour ce qui est de la proposition de loi, elle présente, à mon sens, trois vertus principales.

En premier lieu, elle vise à dissuader la contrefaçon par l’augmentation des dédommagements civils accordés aux victimes. De fait, trop souvent encore, le préjudice n’est pas indemnisé à sa juste valeur : aussi est-il fréquent que les contrefacteurs, même condamnés, réalisent un profit substantiel. Le système actuel n’est donc pas dissuasif.

En deuxième lieu, elle opère certaines clarifications et simplifications, s’agissant notamment de la procédure du droit à l’information et du droit de la preuve.

En troisième lieu, elle renforce les moyens d’action de la douane. Je suis très attachée à cet objectif, puisque j’exerce une compétence partagée sur les douanes : je suis chargée, en particulier, de la lutte contre la contrefaçon.

Ce renforcement est assuré par l’alignement de l’ensemble des branches de la propriété intellectuelle sur le droit le plus protecteur et par l’extension, à l’ensemble des marchandises contrefaisantes, des opérations d’infiltration et de la procédure dite du « coup d’achat », ainsi que par la création d’un pouvoir spécifique d’intervention chez les opérateurs de fret express et par la modernisation du contrôle postal.

Si la Haute Assemblée adopte cette proposition de loi, elle fera œuvre très utile en rendant la lutte contre la contrefaçon plus efficace, sans être plus coûteuse pour les services douaniers.

Un travail commun de la douane et des opérateurs de fret est nécessaire pour augmenter l’efficacité des contrôles efficaces sans nuire à la rapidité des flux, qui est très nécessaire à nos entreprises. En effet, nous devons veiller à ne pas provoquer de retards ou de frais supplémentaires sans raison valable.

M. Michel Delebarre, rapporteur. Bien sûr !

Mme Nicole Bricq, ministre. C’est la raison pour laquelle j’ai demandé aux douanes de mener, dès à présent, une concertation en vue de la conclusion de conventions de coopération. Un tel partenariat a été conclu en 2012 avec la société Chronopost, filiale de La Poste ; il a fait ses preuves.

Je souhaite également que les opérateurs de fret et les douanes travaillent à la préparation des futurs décrets d’application, s’agissant notamment de l’encadrement du transfert des données ; je souhaite que le Sénat, particulièrement M. le rapporteur, soit associé à ce travail.

Mesdames, messieurs les sénateurs, si vous adoptez la proposition de loi,…

M. Jean-Claude Lenoir. C’est bien parti ! Tout dépend de la majorité !

Mme Nicole Bricq, ministre. Je l’espère en tout cas !

… vous ferez, je le répète, une œuvre législative tout à fait utile : grâce à vous, notre droit sera mis en conformité avec le droit de l’Union européenne, le Comité national anti-contrefaçon, présidé par M. Yung, sera refondé, et la France sera dotée d’un arsenal beaucoup plus efficace pour lutter contre le trafic de marchandises contrefaisantes.

Monsieur le rapporteur, vous avez déclaré, avec votre humour toujours fort à propos, que vous faisiez preuve de grande prudence. À la vérité, vous avez pris la relève d’un travail très important : ne sous-estimez pas le vôtre, car il n’est pas toujours facile d’être le rapporteur d’une proposition de loi ! Cette tâche, vous avez su la mener à bien, avec votre commission comme avec le Gouvernement.

Je sais que, en tant que sénateur du Nord, vous êtes porté à vous intéresser particulièrement à ces questions. Il faut le dire : Dunkerque est un grand port français et doit le rester ! (M. le rapporteur acquiesce.)

M. Jean-Pierre Sueur, président de la commission des lois. Il le restera !

Mme Nicole Bricq, ministre. Aussi bien, nous souhaitons que son trafic se développe.

Monsieur Delebarre, vous étiez spécialement destiné à être le rapporteur de cette proposition de loi. (M. le rapporteur rit.) Je vous remercie, ainsi que le Sénat tout entier ! (Applaudissements.)

M. Michel Delebarre, rapporteur. Merci, madame la ministre !

M. le président. La parole est à M. Gérard Le Cam.

M. Gérard Le Cam. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, la contrefaçon représente environ 10 % du commerce mondial. Tous les secteurs d’activité sont touchés par ce fléau, qui provoque chaque année la disparition de milliers d’emplois en France, alimente les filières du travail clandestin et entraîne des pertes de recettes pour l’État.

Surtout, la contrefaçon représente une menace pour la santé et la sécurité des consommateurs, et en raison de ses conséquences sanitaires et sociales, il est particulièrement important de lutter contre elle.

Toutefois, la protection des marques contre la contrefaçon ne doit pas occulter la nécessité de porter un regard critique sur les entreprises de marques qui délocalisent leurs activités dans des pays à bas coûts, aggravant ainsi le dumping social et la diminution des emplois industriels. Au nom des mêmes exigences de protection sanitaire et sociale, nous devons adopter une position ferme à l’égard de ces entreprises.

Selon nous, la lutte contre la contrefaçon doit viser surtout à préserver l’emploi et à protéger les consommateurs contre les produits dangereux comme les médicaments, les jouets et les pièces automobiles contrefaits. Telles sont, à nos yeux, les priorités.

Il faut toujours garder à l’esprit que la douane est une administration de service public, qui assure des missions régaliennes : en d’autres termes, elle ne doit pas être le bras armé des grandes marques privées. Du reste, très souvent, celles-ci ne poursuivent pas en justice les détenteurs de marchandises.

Après vous avoir présenté notre position générale au sujet de la lutte contre la contrefaçon, j’en viens à la proposition de loi soumise à notre examen. Nous estimons qu’elle va globalement dans le bon sens, en étoffant l’arsenal juridique à la disposition des douaniers pour lutter contre la contrefaçon. Toutefois, nous souhaitons formuler deux remarques importantes.

Premièrement, nous nous interrogeons sur l’intérêt d’adopter de nouvelles mesures juridiques lorsque l’administration n’a plus les moyens de les appliquer.

Nous ne nions pas la nécessité de parfaire notre corpus législatif, mais nous constatons que, aujourd’hui, le vrai problème de l’administration des douanes réside dans les baisses d’effectifs et de moyens : cette évolution est telle que les douaniers ne sont matériellement pas en mesure d’appliquer toute la législation existante dans des conditions optimales.

De fait, le service des douanes ressort particulièrement meurtri de la révision générale des politiques publiques, la RGPP, qui s’est traduite, concrètement, par la disparition d’un emploi douanier par jour. Le nombre des agents, qui s’élevait à 22 000 au début des années 1980, est aujourd’hui d’à peine plus de 16 000. Les effectifs ont donc fondu d’un quart, au moment même où les services douaniers étaient bouleversés en profondeur.

Sans prétendre à l’exhaustivité, je ne peux pas passer sous silence des phénomènes comme l’accélération de la mondialisation, qui entraîne une explosion des échanges, la désindustrialisation de l’Europe et le développement exponentiel du fret aérien, en particulier du fret express, ainsi que du fret maritime, désormais totalement « conteneurisé », ou presque, pour les produits industriels.

Vous en conviendrez, la présence de douaniers sur le terrain pour procéder aux contrôles est primordiale. Pourtant, non seulement les conséquences des dégâts provoqués par la RGPP n’ont pas été tirées, mais l’avenir de l’administration des douanes à l’heure de la modernisation de l’action publique ne s’annonce pas plus brillant que son passé récent. En effet, une nouvelle diminution des postes est prévue cette année.

À la veille de l’examen par le Sénat du projet de loi de finances pour 2014, je tiens à insister sur ce sujet, avec l’espoir que des réponses suffisantes seront apportées aux revendications des douaniers, dont les syndicats appellent à une mobilisation, demain, à Paris.

En somme, s’il est important de renforcer notre arsenal juridique, il l’est encore plus d’augmenter ou de maintenir les moyens humains et budgétaires alloués à son application ; on comprend facilement que l’efficacité du premier dépend du niveau des seconds ! Or si les orientations suivies sont maintenues, elles auront des conséquences directes et immédiates sur la santé, la sécurité, l’emploi et l’économie.

Deuxièmement, nous estimons que la lutte contre la contrefaçon doit viser, avant tout, à assurer la protection sanitaire et sociale de nos concitoyens. En d’autres termes, l’État, sa justice et sa police ne doivent pas être au service direct des entreprises privées.

De ce point de vue, il est fondamental de mener une réflexion globale sur le champ d’application du droit de la propriété intellectuelle, dont la violation détermine la qualification de contrefaçon.

Je sais que le débat n’est pas particulièrement souhaité, mais le fait est que les agriculteurs, qui sont souvent accusés de contrefaçon, voire condamnés à des amendes, dénoncent notamment les dangers d’une appropriation du vivant et la remise en question non seulement des semences de ferme, mais également des variétés paysannes.

Droit de propriété intellectuelle et contrefaçon sont intimement liés, et même si nous porterons de nouveau les exigences qui sont les nôtres en matière de non-appropriation du vivant lors de l’examen du projet de loi d’avenir pour l’agriculture, nous tenons, dans le présent texte, à présenter des amendements, afin d’exclure expressément un certain nombre de productions et de pratiques fermières, sous certaines conditions, de la qualification de contrefaçon.

Enfin, je voudrais déplorer encore une fois le mandat donné à la Commission européenne dans le cadre des négociations de l’accord de libre-échange transatlantique. Cet accord portera sur des questions liées aux droits de propriété intellectuelle. Or nous pensons qu’il devrait exclure toutes les dispositions afférentes, y compris celles qui sont relatives aux brevets, copyrights, marques et protections des données.

Nous ne souhaitons pas importer un système dans lequel des firmes de l’industrie chimique polluent les cultures et attaquent ensuite les agriculteurs pour contrefaçon. La Cour suprême des États-Unis a donné raison, en mai dernier, au géant de l’agrochimie Monsanto,…

M. Gérard Le Cam. … dans un litige qui l’opposait à un producteur de soja de l’Indiana, accusé d’avoir enfreint ses brevets par l’utilisation de graines transgéniques. La Haute Cour a pris cette décision à l’unanimité, considérant que la protection intellectuelle « ne permet pas à un agriculteur de reproduire des graines brevetées en les plantant et en les récoltant sans détenir une permission du propriétaire du brevet ». Voilà à quoi nous nous exposons. À ceux qui nous opposeraient que l’on serait protégé par le certificat d’obtention végétale, le COV, je rappelle que ce type d’accord de libre-échange prévoit généralement un mécanisme de règlement des différends entre les investisseurs et l’État, introduisant donc la possibilité pour les entreprises et les investisseurs de porter plainte contre les États dont la réglementation serait considérée comme contraire à leurs intérêts, et ce afin d’obtenir des dommages et intérêts.

C’est pourquoi notre inquiétude est grande pour notre agriculture, face à la tendance actuelle d’accepter de breveter, non des inventions, mais des découvertes, et de les transformer en outil mercantile, alors même qu’elles devraient être au service de la recherche agricole, afin de favoriser la construction, avec les agriculteurs, d’un modèle agricole alternatif vertueux sur les plans social et environnemental. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe écologiste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)

M. le président. La parole est à M. Yvon Collin.

M. Yvon Collin. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, je tiens au préalable à saluer la persévérance de notre collègue Richard Yung, qui a repris ici un travail engagé dès 2011 par notre ancien collègue Laurent Béteille, que j’associe d’ailleurs à cet hommage, sur un sujet très important pour notre économie en ces temps de crise.

Les effets néfastes de la contrefaçon sur notre économie sont aujourd’hui bien connus. Des chiffres ont déjà été cités. Pour ma part, je rappellerai que le rapport de l’Union des fabricants remis au ministre de l’économie en 2010 avançait que la contrefaçon coûtait près de 100 milliards de dollars par an aux économies des pays industrialisés, dont près de 70 milliards de dollars en pertes de taxes, sans compter la destruction de 100 000 emplois pour la seule Europe.

La France est bien entendu directement touchée par ce phénomène, avec un coût annuel de 35 000 emplois et près de 6 milliards d’euros de perte de chiffre d’affaires pour nos entreprises, auquel il faut ajouter les pertes en matière d’innovation induites par le non-investissement. Le seul secteur du luxe souffrirait ainsi de pertes représentant 4 % à 7 % de son chiffre d’affaires.

Toutefois, cela a été dit, la contrefaçon ne se réduit pas aux produits de luxe qui assurent la renommée de notre économie. Elle touche aussi des produits de consommation courante comme les jouets, les cosmétiques, les médicaments, les pièces automobiles ou les produits alimentaires. Elle constitue de ce fait non seulement une atteinte aux droits de propriété intellectuelle, mais aussi, potentiellement, un danger pour la santé du consommateur, trompé sur la qualité d’une marchandise et des normes y afférant.

Face à ce fléau, les entreprises ont bien du mal à faire face et les États eux-mêmes sont impuissants s’ils n’agissent pas de façon concertée. Je veux d’ailleurs saluer, madame la ministre, la prochaine ratification de l’accord européen relatif à une juridiction unifiée du brevet, qui constitue, après de longues négociations, une nouvelle avancée dans la protection uniforme des brevets au niveau européen.

En tout état de cause, de puissants réseaux criminels se cachent bien souvent derrière les producteurs de produits contrefaisants : n’oublions pas que la contrefaçon est également une manière pour des groupes terroristes ou mafieux de diversifier leurs sources de revenus, dans le cadre de sanctions pénales plus faibles.

L’importation ou la contrebande de marchandises contrefaisantes sont en effet moins sanctionnées que le trafic de stupéfiants, et constituent à cet égard une prime de moindre risque pour des bénéfices équivalents, voire supérieurs.

Dans un monde toujours plus ouvert, où les flux commerciaux se démultiplient parfois sans contrôle, la présente proposition de loi apporte aujourd’hui de précieuses améliorations à la loi du 29 octobre 2007, qui transposait elle-même la directive du 29 avril 2004 relative au respect des droits de propriété intellectuelle.

Elle s’inscrit ainsi dans les quatre axes qui s’étaient dégagés de la loi de 2007 et que je me permets de rappeler : renforcement de la spécialisation des juridictions ; renforcement des procédures simplifiées et accélérées devant le juge civil ; consécration d’un droit à l’information pour contraindre les personnes en possession de marchandises contrefaisantes à fournir des informations sur leur provenance ; enfin, amélioration de la réparation du préjudice pour les victimes.

Elle vise également à compléter utilement d’autres pans du droit de la contrefaçon, à commencer par la précieuse procédure de saisie-contrefaçon, qui avait besoin d’être adaptée aux évolutions des pratiques et de la jurisprudence.

Par ailleurs, le présent texte tend enfin à procéder aux nécessaires harmonisations des différents dispositifs régissant les diverses catégories de droits protégés par la propriété intellectuelle, même si nous aurons tout à l’heure un débat sur la protection spécifique des droits de propriété sur les semences. Notre collègue Michel Delebarre a, semble-t-il, découvert la dure réalité rurale par le biais de ce problème. (Sourires.)

Mme Françoise Laborde. C’est très important !

M. Yvon Collin. Je tiens en outre, au passage, à saluer l’engagement du Gouvernement à s’opposer fermement, en collaboration avec la Commission européenne et les autres États membres, à toute extension de l’enregistrement des noms de domaine en .wine ou « .vin » tant que les indications géographiques européennes ne feront pas l’objet d’une meilleure protection sur le plan international.

Contrairement au texte initial, qui retenait, en matière de dédommagement, les notions de fautes lucratives et de dommages et intérêts punitifs, la commission a prudemment choisi de procéder à un retour en arrière, afin de ne pas créer une brèche dans notre édifice juridique, qui ne reconnaît pas, jusqu’à présent, la notion de dommages et intérêts punitifs.

En l’état, cette position nous paraît la plus raisonnable, afin de ne pas créer de précédent fâcheux, d’autant que la partie lésée ne doit pas à son tour bénéficier d’un enrichissement indu, qui résulterait d’un dédommagement dont le montant serait supérieur à celui du préjudice subi. Si de nombreux contrefacteurs estiment que la charge des dommages et intérêts à régler sera toujours inférieure aux bénéfices réalisés, il revient plutôt à l’État de sanctionner pécuniairement ces fraudeurs par le biais d’une amende civile.

Nous nous réjouissons par ailleurs des avancées importantes que permet ce texte pour les services des douanes, qui sont, madame la ministre, le fer de lance de l’État dans la lutte contre la contrefaçon et auxquels je tiens à rendre l’hommage qui leur est dû.

L’ensemble des mesures proposées va dans le sens attendu par la direction générale des douanes. Il s’agit en effet d’affiner son arsenal juridique, en particulier pour ce qui concerne l’harmonisation du régime de retenue avec le droit communautaire et les opérations d’infiltration ou de coup d’achat, qui sont un gage d’efficacité accrue. Le Gouvernement nous soumettra en outre dans quelques instants des amendements visant à tirer les conséquences du règlement du 12 juin dernier.

S’agissant du régime des visites domiciliaires, le dispositif retenu, qui tend à les rendre possibles sans autorisation préalable du procureur, mais avec l’accord de la personne concernée, nous paraît équilibré et proportionné aux objectifs poursuivis.

Enfin, s’agissant du renforcement des pouvoirs spécifiques d’intervention chez les opérateurs de fret, nous suivrons également l’attentisme prudent du rapporteur, qui a préféré s’en tenir aux garanties d’usage en matière de fichiers, tant que l’État, la Commission nationale de l’informatique et des libertés, la CNIL, et les entreprises de fret n’auront pas avancé ensemble sur cette question.

Je dirai un dernier mot, enfin, pour regretter que ce texte n’ait pas été l’occasion d’aller plus loin sur la question aujourd’hui essentielle de la cyber-contrefaçon. Il n’est plus à démontrer que l’explosion du commerce électronique sert aussi aux réseaux criminels à masquer leurs activités au milieu d’un flux d’informations complexe à réguler. Sans doute est-il aujourd'hui indispensable d’adopter les mesures de cette proposition de loi. Toutefois, madame la ministre, nous estimons qu’il faudra rapidement se pencher sur ce problème spécifique. J’ai bien noté que vous avez, au cours de votre intervention, pris acte de notre préoccupation, puisque le Gouvernement devrait travailler rapidement sur ce sujet.

Quoi qu’il en soit, les membres du RDSE remercient l’auteur de cette proposition de loi, qui leur paraît aller dans le bon sens et à laquelle ils apportent leur entier soutien. (Applaudissements sur certaines travées du RDSE et de l’UDI-UC, ainsi que sur les travées du groupe écologiste, du groupe socialiste et du groupe CRC.)

M. le président. La parole est à Mme Hélène Lipietz.

Mme Hélène Lipietz. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, permettez-moi de citer quelques vers du Jardinier et son Seigneur :

« […] et les chiens et les gens

« Firent plus de dégâts en une heure de temps

« Que n’en auraient fait en cent ans

« Tous les lièvres de la province.

« Petits princes, videz vos débats entre vous ;

« De recourir aux rois vous seriez de grands fous.

« Il ne les faut jamais engager dans vos guerres,

« Ni les faire entrer sur vos terres. »

N’est-ce pas ce qui risque d’arriver avec les pouvoirs que cette proposition de loi s’apprête à donner aux douanes, comme nous le montre l’exemple canadien suivant ?

Un agriculteur bio découvre avec horreur que son champ est pollué par les semences OGM de son voisin, rendant ainsi sa production invendable sous le label bio. Il ne veut pas de cette semence devenue plante, il n’en a jamais voulu. Il en appelle à la justice pour faire condamner son voisin, le pollueur. Mais, en réponse, le détenteur du brevet OGM estime que l’agriculteur bio a utilisé une semence protégée. En conséquence, le pollueur fait détruire le champ du pollué, et récupère en prime des dommages et intérêts !

Voilà quelle pourrait être la situation des petites exploitations d’agriculteurs en culture biologique à l’égard des produits sous certificat d’obtention végétale. Breveter le vivant, les graines, les semences, les levains, est déjà une décision étonnante, dangereuse et contraire à toute humanité. Mais permettre une saisie quelque peu arbitraire, sans que la justice n’ait rien eu à statuer, sur simple décision des douanes ou, pire encore, d’un groupe d’intérêts, fait basculer de l’intérêt général et de la présomption d’innocence à la défense d’intérêts très particuliers s’exerçant contre des personnes présumées coupables par les pouvoirs publics.

Que deviendra en effet la petite entreprise qui sera saisie de ses biens, de ses semences, de ses logiciels ou de tout autre élément soupçonné d’être une contrefaçon, face à des géants à la trésorerie bien remplie, qui pourront ainsi écraser un potentiel concurrent, uniquement par une demande de saisie, à laquelle l’administration sera obligée d’obéir ?

Certes, la proposition de loi tend à prévoir des indemnisations en cas d’erreur. Mais, entre-temps, la petite entreprise ne pourra pas livrer, honorer ses commandes, ne sera plus considérée comme fiable par ses acheteurs, perdra ses clients et sa réputation et, au bout du compte, fera faillite. Les indemnisations n’en pourront mais, le mal sera irréparable.

Pendant que nous votons sur ces saisies douanières attentatoires à la présomption d’innocence, l’espionnage industriel, à bien plus grande échelle, avec la complicité au plus haut niveau des États, s’amplifie. Sont en jeu des sommes autrement plus importantes, à tout le moins aussi importantes.

Les écoutes téléphoniques de l’Agence nationale de sécurité américaine, la NSA, révélées par le lanceur d’alerte Edward Snowden, qui mériterait l’asile politique par la patrie des droits de l’homme, ont fait perdre des marchés à des entreprises françaises telles Thalès ou Airbus, comme le contait le palmipède de la semaine passée.

Faut-il rappeler que c’est grâce à la contrefaçon indienne que des malades séropositifs ont pu se soigner à des prix acceptables, alors même que certains empêchaient cette entreprise de santé publique, sous prétexte de brevets et d’investissements dans la recherche médicale ? Que des brevets ou des droits de propriété intellectuelle, inventés d’ailleurs par Mirabeau, existent, pour permettre à leurs auteurs d’en vivre, c’est tout à fait normal. Que cela devienne une rente de situation, parfois au détriment de la santé des plus pauvres, des plus démunis et des plus fragiles, voilà qui devrait nous interpeller et nous faire réfléchir à une autre manière de penser la rémunération de l’innovation, pour un autre modèle de société.

Toutefois, le petit État qu’est la France n’a aucun pouvoir de faire modifier les règles du commerce mondial ni même d’enrayer les pratiques mafieuses, auxquelles nous sommes extrêmement sensibles, parce que les contrefaçons peuvent être mortelles, qu’il s’agisse de médicaments, de pièces mécaniques, de jouets, etc.

Nous voterons ce texte, malgré tout le mal que je viens d’en dire. (Bravo ! et applaudissements sur les travées du groupe écologiste et du groupe CRC.)

M. Jean-Pierre Sueur, président de la commission des lois. C’est difficile à comprendre !

Discussion générale (suite)
Dossier législatif : proposition de loi tendant à renforcer la lutte contre la contrefaçon
Discussion générale (suite)

5

Nomination des membres d’une mission commune d’information

M. le président. Mes chers collègues, je rappelle que les groupes ont présenté une liste de candidats pour la mission commune d’information sur « Quels nouveau rôle et nouvelle stratégie pour l’Union européenne dans la gouvernance mondiale de l’Internet ? »

La présidence n’a reçu aucune opposition.

En conséquence, ces listes sont ratifiées, et je proclame M. Philippe Adnot, Mme Michèle André, MM. Dominique Bailly, Michel Billout, Jean Bizet, Mme Maryvonne Blondin, MM. Jean-Marie Bockel, Pierre Camani, Jacques Chiron, Philippe Dallier, Robert Del Picchia, Mmes Michelle Demessine, Marie-Hélène Des Esgaulx, MM. Yves Détraigne, Claude Dilain, Jean-Jacques Filleul, Christophe-André Frassa, Mme Joëlle Garriaud-Maylam, MM. André Gattolin, Gaëtan Gorce, Pierre Hérisson, Melle Sophie Joissains, Mme Françoise Laborde, MM. Jean-Yves Leconte, Jean-Pierre Leleux, Philippe Leroy, Jacques-Bernard Magner, Philippe Marini, Rachel Mazuir, Mme Catherine Morin-Desailly, MM. Jean-Pierre Plancade, Bruno Retailleau, Mme Patricia Schillinger, membres de la mission commune d’information sur « Quels nouveau rôle et nouvelle stratégie pour l’Union européenne dans la gouvernance mondiale de l’Internet ? »

6

Discussion générale (interruption de la discussion)
Dossier législatif : proposition de loi tendant à renforcer la lutte contre la contrefaçon
Discussion générale (suite)

Lutte contre la contrefaçon

Suite de la discussion en procédure accélérée et adoption d’une proposition de loi dans le texte de la commission modifié

Discussion générale (suite)
Dossier législatif : proposition de loi tendant à renforcer la lutte contre la contrefaçon
Articles additionnels avant le chapitre Ier

M. le président. Nous reprenons la discussion de la proposition de loi tendant à renforcer la lutte contre la contrefaçon.

Dans la suite de la discussion générale, la parole est à M. Jean-Jacques Hyest.

M. Jean-Jacques Hyest. Monsieur le président, madame la ministre, monsieur le président de la commission, monsieur le rapporteur, mes chers collègues, je salue particulièrement notre collègue Richard Young, expert en propriété intellectuelle.

M. Richard Yung, auteur de la proposition de loi. Ancien expert ! (Sourires.)

M. Jean-Jacques Hyest. Il en reste toujours quelque chose ! (Mêmes mouvements.) D’autres sont spécialisés dans les semences : chacun son métier !

Le Sénat, plus particulièrement sa commission des lois, a depuis longtemps joué un rôle moteur dans le renforcement de la lutte contre la contrefaçon. Richard Young s’en souvient, notre assemblée a beaucoup contribué à l’élaboration de la loi du 29 octobre 2007 de lutte contre la contrefaçon et, surtout, à l’évaluation qui en a été faite, grâce à la mission d’information qu’il a conduite avec notre ancien collègue Laurent Béteille : leur rapport, rendu après six mois de travail en février 2011, a révélé la nécessité d’apporter des compléments indispensables pour perfectionner la protection de la propriété intellectuelle en France.

Outre les enjeux économiques considérables de la lutte contre la contrefaçon, il ne faut pas négliger combien il est essentiel de conforter la réputation d’excellence et d’attractivité juridique de notre pays dans un domaine très concurrentiel marqué par ce phénomène dit du « forum shopping ». Richard Young et Mme la ministre l’ont rappelé.

Comme il paraît possible que deux sénateurs de sensibilités politiques différentes puissent cosigner un rapport d’information – à défaut d’une proposition de loi –, la proposition de loi de notre ancien collègue Laurent Béteille fut rapportée le 12 juillet 2011 par Richard Yung, sans qu’elle soit examinée par le Sénat. Ce fut l’un des derniers textes rapportés par la commission des lois avant le changement de majorité sénatoriale.

Aussi, on ne peut bien sûr que se féliciter du dépôt par Richard Yung et nos collègues du groupe socialiste de cette nouvelle proposition de loi, qui reprend quasi intégralement le texte élaboré en 2011 par la commission des lois. De fait, cet exemple est une bonne illustration de la capacité du Parlement à légiférer sur des sujets complexes, sans assistance a priori, comme le Sénat l’a démontré à maintes reprises dans le passé.

Les propositions de loi ne sont pas obligatoirement anecdotiques et sans doute la révision constitutionnelle de 2008 permet-elle plus facilement de conforter l’initiative parlementaire, à condition de disposer d’un peu de temps.

Comme M. le rapporteur l’a souligné, il s’agit non pas de bouleverser la loi du 29 octobre 2007, mais plutôt de lui apporter des améliorations, d’harmoniser les mécanismes existants, tant en matière civile qu’en matière de répression pénale, et de renforcer les moyens d’action des douanes.

La proposition de loi tend à ouvrir un large champ – d’autant que le Gouvernement a ajouté quelques pages à ses nombreux articles –, qui va de la répartition des contentieux à la prescription. Il convient de l’analyser sur chacun de ces points pour respecter à la fois la cohérence des données juridiques et la nécessité de ne pas modifier de façon excessive les règles existantes.

C’est ainsi que la commission de lois vous propose de ne pas bouleverser la répartition actuelle du contentieux de la propriété intellectuelle, mais plutôt de clarifier la compétence exclusive du tribunal de grande instance de Paris. C’est également l’intention du Gouvernement.

Ce qui est important, en revanche, c’est que les tribunaux de grande instance compétents en matière de propriété intellectuelle disposent des ressources humaines nécessaires à leur efficacité, en particulier des magistrats spécialisés.

En ce qui concerne les dédommagements civils en matière de contrefaçon, si la commission a amélioré la rédaction de la loi de 2007, il est sans doute sage de ne pas introduire dans notre droit de la responsabilité la notion de dommages et intérêts punitifs.

Si M. Anziani était là, je lui dirais qu’il ne faut pas céder à cette tentation !

M. Richard Yung. Ce n’est pas la mienne, en tout cas !

M. Jean-Jacques Hyest. D’une manière générale, on pourrait creuser la question de l’amende civile – j’y crois beaucoup –, souvent bien préférable en matière de droit économique à la voie pénale. Une mesure touchant au porte-monnaie est toujours plus efficace qu’une vague sanction pénale, surtout quand celle-ci n’est presque jamais exécutée.

Je passerai sur les améliorations apportées par le texte sur les procédures du droit à l’information et du droit de la preuve, qui donnent au juge des moyens d’action plus larges.

Il y a lieu aussi de se féliciter de l’harmonisation opérée entre la procédure de saisie-contrefaçon et des procédures connexes pour tous les droits de propriété intellectuelle.

Un des chapitres les plus importants de la proposition de loi vise à renforcer les moyens d’action des douanes, dont le rôle est essentiel pour la lutte contre la contrefaçon. Outre l’extension et l’harmonisation avec le droit communautaire de la procédure de retenue douanière, les nombreuses dispositions visées notamment aux articles 9 à 14 ne peuvent qu’améliorer l’efficacité des services des douanes, dont il faut saluer la qualité de l’action et leur engagement très fort dans la lutte contre la contrefaçon.

Vous ne m’en voudrez pas, enfin, de me féliciter de l’alignement sur le droit commun des délais de prescription de l’action civile en matière de contrefaçon. La réforme de la prescription de l’action civile, engagée et menée à bien par le Sénat, a en effet permis la modernisation d’un pan entier du code civil, laquelle, je le crois, est unanimement appréciée par les juristes. C’est suffisamment rare pour le signaler !

La contrefaçon, qui, pour l’opinion publique concerne avant tout des produits de luxe, s’étend à tous les domaines : industriels, agricoles, mais aussi ceux de la santé et de la sécurité humaine et animale. C’est pourquoi, devant les risques particuliers que suscitent ces contrefaçons, l’aggravation des sanctions pénales s’avère utile.

Mes chers collègues, après M. le rapporteur, je vous lance à mon tour un appel : certes, la question de l’authenticité des sculptures ou des tableaux est intéressante, mais ce sont des problèmes annexes ; aussi, je vous en supplie, concentrons-nous sur l’essentiel ! Ce texte est si important que le Gouvernement, chose rare s’agissant d’une proposition de loi, a engagé la procédure accélérée, ce qui démontre sa volonté de le voir adopter rapidement.

Si j’en juge par plusieurs amendements qui ont été déposés, je suis tout de même frappé de constater que certains sujets qu’on pensait avoir réglés reviennent régulièrement. Ainsi, il me semble que, il n’y a pas si longtemps, nous avons adopté une loi relative aux certificats d’obtention végétale ; de fait, pour moi, le problème des semences était réglé.

M. Gérard Le Cam et Mme Hélène Lipietz. Il n’a pas été bien réglé !

M. Jean-Jacques Hyest. Il n’empêche qu’il revient !

J’ai eu le sentiment que certains orateurs, prenant prétexte de la lutte contre la contrefaçon, soulevaient de nouveau ce problème dans leur intervention.

Ce sujet est important, j’en conviens, mais, comme la commission des lois, j’estime qu’il doit être traité dans un autre cadre. Aujourd’hui, nous avons d’autres problèmes plus urgents à régler.

En conclusion, le groupe UMP votera cette proposition de loi, heureux aboutissement d’une démarche d’évaluation et de proposition du Sénat.

Madame la ministre, ce texte sera en outre agrémenté des amendements du Gouvernement visant à mettre en cohérence le droit national avec le règlement de l’Union européenne adopté le 12 juin 2013 et qui entrera en vigueur le 1er janvier 2014. C’est là un record de rapidité – nous serons même en avance –,…

Mme Nicole Bricq, ministre. C’est exact !

M. Jean-Jacques Hyest. … alors que l’Europe nous reproche toujours d’être à la traîne dans ce domaine. (Applaudissements sur les travées de l'UMP, de l'UDI-UC et du groupe socialiste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)

M. le président. La parole est à M. Yves Détraigne.

M. Yves Détraigne. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, la contrefaçon représente un manque à gagner non négligeable pour notre économie et, plus largement, pour l’économie mondiale. La problématique abordée par le texte présenté par notre collègue Richard Yung est donc d’une importance capitale et concerne beaucoup d’entreprises de notre pays.

La contrefaçon, jadis artisanale et relativement localisée, est devenue aujourd’hui un phénomène industriel et planétaire qui emporte des conséquences négatives très lourdes.

Les chiffres sont éloquents : la contrefaçon représenterait environ 10 % du marché mondial. En outre, on considère que les entreprises de l’Union européenne qui sont engagées dans des activités internationales perdent entre 400 millions et 800 millions d’euros sur le marché intérieur, et autour de 2 milliards d’euros en dehors de l’Union.

Selon l’OCDE, la contrefaçon aurait également pour conséquence directe la suppression de 200 000 emplois dans le monde, dont 100 000 en Europe.

À elle seule, la France perdrait chaque année plus de 6 milliards d’euros. On estime également que la contrefaçon détruit chaque année plus de 30 000 emplois dans notre pays et que plus d’une entreprise sur deux a été confrontée à ce problème.

Dans la période de crise économique aiguë que nous subissons aujourd’hui, ces chiffres ne peuvent pas nous laisser indifférents. Nous devons utiliser tous les outils permettant de faire reculer le chômage, tous les moyens pour lutter contre la destruction d’emplois dans notre pays.

La contrefaçon a beaucoup évolué. Au départ, elle concernait principalement les produits de luxe, comme la joaillerie, l’horlogerie, les parfums, les cosmétiques ou la maroquinerie. Aujourd’hui, elle s’étend à presque tous les domaines et à la quasi-totalité des biens de consommation, ce qui pose de véritables problèmes de sécurité pour l’usager, en particulier s’agissant des jouets, des médicaments, des produits alimentaires, des appareils domestiques ou encore des pièces détachées, dans le secteur automobile.

En 2009, la commission des lois avait décidé de créer une mission d’information sur l’évaluation de la loi du 29 octobre 2007 de lutte contre la contrefaçon. Il s’agissait de vérifier si les avancées contenues dans cette loi, dont beaucoup sont d’ailleurs issues de la commission des lois du Sénat, avaient produit les effets escomptés, en matière tant civile que pénale ou douanière.

Le rapport d’information de notre collègue Richard Yung et de notre ancien collègue Laurent Béteille, publié en février 2011, soulignait que la loi de 2007 a globalement constitué un net progrès dans la lutte contre les atteintes à la propriété intellectuelle. Ce rapport d’information avait mis en évidence la nécessité, d’une part, d’apporter certaines précisions ou clarifications souhaitées par les professionnels et, d’autre part, d’améliorer encore la protection de la propriété intellectuelle dans notre pays. En effet, il apparaît essentiel de conforter la réputation d’excellence et l’attractivité juridique de la France dans un domaine très concurrentiel marqué par le phénomène dit du « forum shopping ».

Le présent texte traduit donc les propositions issues de ce rapport sénatorial, dans le respect de la directive du 29 avril 2004 relative au respect des droits de propriété intellectuelle.

Pour renforcer la lutte contre la contrefaçon, le texte aborde essentiellement quatre grands domaines : la spécialisation des tribunaux, le calcul et la détermination des dommages et intérêts, le droit à l’information et le droit de la preuve, enfin, le renforcement significatif du pouvoir de la douane.

Au nom de mon groupe, je tiens à saluer le travail important réalisé par M. le rapporteur. Cette matière est extrêmement technique et son rapport a permis à ceux d’entre nous – dont je suis – qui ne sont pas des spécialistes de la propriété intellectuelle de mieux l’appréhender.

Nous saluons les amendements qui ont été adoptés en commission. Je veux dire un mot sur celui qui a été adopté à l’article 2, qui concerne le mode de fixation des dommages et intérêts en matière de contrefaçon.

M. le rapporteur a opportunément proposé de supprimer la disposition selon laquelle le juge peut ordonner la confiscation des recettes procurées par une contrefaçon au profit du titulaire d’un droit de propriété intellectuelle victime de cette contrefaçon, lorsqu’il considère que le montant des dommages et intérêts, tel qu’il résulte des critères fixés par le texte, ne répare pas l’intégralité du préjudice.

Une telle disposition pourrait effectivement s’apparenter à l’introduction dans notre droit de dommages et intérêts punitifs, ce qui nous semble non pertinent et peu conforme à notre tradition juridique.

Pour finir, je dirai un mot des nouveaux moyens juridiques dont la présente proposition de loi tendra à doter l’administration des douanes. Cette administration, souvent mal connue alors même que son travail est particulièrement efficace, joue un rôle absolument déterminant en matière de lutte contre la contrefaçon et contre les réseaux criminels qui l’organisent à l’échelle mondiale.

Certes, la douane dispose à ce jour de moyens de lutte contre les actions des sites internet étrangers proposant des contrefaçons à des acheteurs situés en France, via ses pouvoirs traditionnels de contrôle au moment du dédouanement.

Toutefois, ces modalités de contrôle sont aujourd’hui insuffisantes pour lutter efficacement contre la contrefaçon qui se développe sur internet. La nature particulière de ce vecteur de fraude nécessite la mise en œuvre de possibilités de contrôle optimisées, portant notamment sur les envois postaux et de fret express utilisés pour l’expédition des marchandises achetées en ligne.

Le texte tend donc à introduire des améliorations importantes, en particulier en ce qui concerne les procédures d’infiltration et celle du coup d’achat qui a été mentionnée par plusieurs intervenants avant moi. Ces modifications sont attendues par les douaniers et rendront leur action plus efficace.

Ce texte constitue donc un complément indispensable de la loi du 29 octobre 2007 de lutte contre la contrefaçon. Nous soutiendrons donc cette proposition de loi et plaidons pour qu’elle puisse rapidement être inscrite à l’ordre du jour de l’Assemblée nationale et qu’elle ne reste pas, comme de trop nombreuses propositions votées au Sénat, en déshérence entre les deux assemblées. (Applaudissements sur les travées de l'UDI-UC, du groupe écologiste, du groupe socialiste, et sur certaines travées du RDSE. – Très bien ! au banc des commissions.)

M. le président. La parole est à Mme Nicole Bonnefoy.

Mme Nicole Bonnefoy. Monsieur le président, madame la ministre, monsieur le président de la commission des lois, monsieur le rapporteur, mes chers collègues, la présente proposition de loi déposée par notre collègue Richard Yung reprend très largement une proposition de loi de l’ancien sénateur UMP Laurent Béteille, à la suite d’un rapport d’information qu’ils menèrent conjointement pour dresser une évaluation de la loi de lutte contre la contrefaçon du 29 octobre 2007.

Déposée et adoptée en commission des lois en 2011, elle n’avait pu être inscrite à l’ordre du jour et ainsi poursuivre son parcours législatif. La large approbation dont elle fit l’objet en commission démontrait pourtant la pertinence de cette proposition.

La loi de 2007 a constitué un net progrès dans la lutte contre les atteintes à la propriété intellectuelle par le biais de la contrefaçon. Cette avancée a été mise en évidence dans le rapport d’information.

Toutefois, il est apparu qu’il convenait, d’une part, d’apporter aux dispositifs de lutte contre la contrefaçon des précisions et clarifications attendues par les professionnels, et d’autre part, de renforcer encore la protection de la propriété intellectuelle en France. C’est ce double objectif que cette proposition de loi a enfin l’occasion de remplir.

Le fléau de la contrefaçon a en effet explosé ces dernières années, sous l’effet notamment de la mondialisation des échanges et de l’arrivée d’internet. D’après l’OCDE, le commerce de produits contrefaits a doublé depuis 2000 et représente aujourd’hui environ 10 % du commerce mondial. Dans le même temps, le volume des marchandises saisies en France par la douane a, quant à lui, a été multiplié par six. La contrefaçon touche ainsi, avec une acuité particulièrement féroce, notre pays et nos concitoyens.

En effet, le prix à payer pour le commerce de produits frauduleux est élevé.

Ce sont d’abord nos entreprises qui sont touchées, du fait de la baisse de leur chiffre d’affaires. Par répercussion, ce sont des dizaines de milliers d’emplois qui disparaissent – près de 40 000 en France selon les estimations –, les recettes fiscales de l’État qui sont, elles aussi, grièvement amputées. Chaque année, plus de 6 milliards d’euros manquent aux deniers publics : tel est le coût pour l’État de la contrefaçon.

La sécurité et la santé des consommateurs sont, quant à elles, sévèrement mises en danger.

Sans évoquer les risques causés par la circulation de jouets défectueux, d’appareils domestiques ne répondant à aucune norme ou de produits alimentaires non autorisés, je m’en tiendrai au fait que les ventes de médicaments contrefaits dans le monde ont doublé entre 2005 et 2010, et que la France n’est, bien sûr, pas en reste, puisque les saisies ont plus que triplé dans le pays entre 2011 et 2012.

Les risques d’accidents deviennent lourds lorsque les molécules de produits tels qu’aspirines ou anticancéreux sont remplacées par du sucre, voire par des substances nocives en elles-mêmes.

Hors de tout cadre légal, la fabrication et le commerce de produits contrefaits participent en outre à l’exploitation d’êtres humains et au travail illicite, et sert dans bien des cas à financer les activités d’organisations mafieuses et terroristes.

À l’occasion de mon travail de rapporteur de la mission commune d’information sur les pesticides, j’ai pu mesurer les effets potentiellement délétères pour la société que comporte la contrefaçon, à travers l’étude d’un exemple concret, celui du trafic de produits phytosanitaires frauduleux qui prospère en Europe.

Au cours d’une table ronde organisée dans le cadre de nos auditions, magistrats et juristes, douanes, répression des fraudes, veille sanitaire et alimentaire, responsables de l’administration, tous ont à leur tour insisté sur la .gravité des conséquences de la contrefaçon sur la santé des agriculteurs comme des consommateurs, sur les atteintes à l’environnement et le préjudice pour l’économie des entreprises touchées.

L’ensemble de ces acteurs concernés nous ont fait part de leurs attentes : accroître les moyens accordés à la justice et aux douanes, unifier les normes de sanctions pour une meilleure lisibilité juridique en matière de contrefaçon et accorder un niveau de sanctions pénales et civiles plus adéquat à la gravité des infractions.

Bien que la France possède déjà un arsenal juridique de lutte contre la contrefaçon important, il convient, pour contrecarrer ce fléau qui ne cesse de prospérer, d’aiguiser les moyens accordés à ce dispositif global.

Celui-ci fait intervenir de nombreux acteurs publics : douane, direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes, police, gendarmerie, huissiers, magistrats.

Se dessine donc, à travers cette proposition de loi, un ensemble de dispositions s’appliquant diversement aux juridictions spécialisées dans le traitement des affaires de contrefaçon, aux moyens d’inspection accordés aux inspecteurs des douanes et à la justice, à l’arsenal répressif prévu à l’égard des contrefacteurs, aux mesures de réparation accordées aux personnes dont la propriété intellectuelle a été violée.

Cet ensemble cohérent permettra de manifester la volonté des pouvoirs publics de ne tolérer aucune forme de contrefaçon, et aucun des dommages qui y sont liés.

En renforçant la spécialisation des magistrats et juridictions traitant des affaires relevant de la contrefaçon, il s’agit d’affermir l’expertise des dossiers pour décider, avec la fermeté adéquate, des sanctions pénales et des indemnisations civiles les plus justes. Il est important de maintenir ainsi la réputation d’excellence et l’attractivité juridique de la France dans le domaine très concurrentiel de la propriété intellectuelle.

La réforme du calcul des dédommagements versés aux victimes d’actes de contrefaçon dont les auteurs ont été condamnés devrait permettre d’écarter enfin la possibilité de « fautes lucratives ». Cette expression désigne les situations fréquentes dans lesquelles l’auteur, malgré les dommages et intérêts qu’il est condamné à verser, conserve une marge bénéficiaire de son délit suffisante pour qu’il n’ait aucune raison de ne pas récidiver.

Or, lorsqu’un délit de contrefaçon est constaté et condamné, la sanction doit servir à dissuader de manière forte, sinon définitive – cela va de soi –, la personne qui s’est rendue coupable d’un tel forfait. Elle doit en même temps dédommager à la hauteur des méfaits subis les personnes dont la propriété intellectuelle a été violée, avec toutes les conséquences que cela comporte en termes de préjudices financiers, moraux et d’image. C’est en frappant directement au cœur des contrefacteurs, c’est-à-dire à leur portefeuille, que la dissuasion sera forte.

M. Jean-Pierre Sueur, président de la commission des lois. C’est sûr !

Mme Nicole Bonnefoy. En clarifiant la procédure du droit à l’information, il sera permis aux autorités judiciaires civiles d’accéder à un plus large éventail d’informations et documents détenus par les défenseurs et ainsi de mieux identifier les acteurs des réseaux de contrefaçon.

Les précisions apportées en matière de droit de la preuve, élargissant les pouvoirs du juge pour ordonner la production d’éléments de preuves détenues par les parties, contribueront elles aussi à élargir l’éventail des outils à disposition de la justice pour accomplir au mieux sa mission nécessaire à la préservation de l’intérêt général.

L’ensemble des dispositions tendant à renforcer les moyens d’action des douanes permettra de les doter d’un arsenal juridique complet pour lutter contre tous les types de contrefaçon, quels que soient le domaine de propriété intellectuelle concerné et les circonstances dans lesquelles se trouvent les marchandises contrefaites : import, export, ou transit sur notre territoire.

Il est ainsi nécessaire de réformer les pouvoirs des douanes en tenant compte des situations nouvelles issues de l’intégration européenne et de l’accroissement des échanges extra-communautaires, de repousser les freins à leurs capacités d’investigation tout en les encadrant dans le respect des droits et libertés des individus, et de les doter des moyens nécessaires à l’identification des réseaux de contrefaçon.

Un des grands mérites de ce texte est enfin d’harmoniser les dispositions applicables aux différents droits de la propriété intellectuelle en matière de contrefaçon. En homogénéisant les moyens de lutte dans les différents champs auxquels s’applique ce fléau, le législateur donnera plus de lisibilité et d’efficacité aux actions de justice.

Récompenser l’effort, le talent, le dévouement, l’inventivité des individus qui bénéficient à l’ensemble de la société est l’une des facettes majeures du projet républicain, fondé notamment sur cette belle notion de méritocratie.

Cette récompense doit aussi être accompagnée de la garantie d’une protection contre ceux qui souhaitent s’emparer indûment des idées, du travail, de l’investissement d’un autre sans son autorisation et sans éprouver la moindre gêne pour lui voler les fruits qui lui reviennent légitimement.

La présente proposition de loi s’inscrit avec justesse et efficacité dans la poursuite de cet objectif. J’appelle donc, avec le groupe socialiste, à voter avec enthousiasme cette proposition de loi. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)

M. Michel Delebarre, rapporteur. Très bien !

M. le président. La parole est à Mme la ministre.

Mme Nicole Bricq, ministre du commerce extérieur. Monsieur le président, avec votre permission, je souhaiterais répondre sur le sujet certes important des certificats d’obtention végétale, qui a été évoqué par tous les intervenants au cours de la discussion générale.

M. Hyest a rappelé que l’objet principal de la proposition de loi était la lutte contre la contrefaçon, et qu’une loi sur les certificats d’obtention végétale a déjà adopté le 8 décembre 2011. En outre, un projet de loi d’avenir pour l’agriculture sera prochainement soumis à l’examen du Parlement et défendu par mon collègue Stéphane Le Foll.

J’ai écouté vos interventions avec attention, et je souhaiterais dissiper tout malentendu lors de l’examen des amendements.

La proposition de loi dont nous discutons aujourd’hui, je tiens à le préciser, respecte le cadre des dispositions prévues par la loi du 8 décembre 2011 – ce n’est pas si ancien –relative aux certificats d’obtention végétale. Elle maintient les restrictions prévues au droit de l’obtenteur du certificat : l’exemption du sélectionneur, qui permet la recherche, et le privilège de l’agriculteur, ce qu’on appelle la pratique des semences de ferme.

La France, comme l’Union européenne, a fait, contrairement au brevetage du vivant, le choix stratégique de l’obtention. Ce choix permet de préserver une liberté essentielle pour conserver notre indépendance face à ceux qui se rémunèrent sur la recherche. D’autres pays, comme les États-Unis, ont fait le choix du brevet.

À cet égard, monsieur Le Cam, vous avez évoqué les négociations en cours entre l’Union européenne et les États-Unis en vue d’aboutir dans quelques années à un partenariat transatlantique. La France en particulier – elle n’est pas la seule – s’efforce de préserver les droits européens, notamment les droits de propriété intellectuelle comme les indications géographiques. J’insiste sur le fait que les Français ne sont pas seuls : me déplaçant dans le monde entier, je constate que, jusqu’en Asie, on reprend la notion d’abord française, puis européenne, d’appellation contrôlée. Cela devient un enjeu universel.

Au-delà de ce choix, la France dispose d’un secteur économique des semences très dynamique, et je suis particulièrement bien placée pour en faire l’éloge. En effet, nous disposons notamment de variétés de semences animales, pour les porcs comme pour les bovins, qui n’existent dans nul autre pays au monde. Nous exportons et nos innovations sont suivies avec beaucoup d’intérêt.

Il faut défendre ce secteur économique, qui est composé d’un tissu important de petites et moyennes entreprises et d’entreprises intermédiaires. En matière végétale, nous avons des très grands groupes internationaux qu’il faut aussi défendre ; ils sont à l’offensive dans beaucoup de pays. Ces savoir-faire sont très recherchés et reconnus pour leur qualité. Nous sommes évidemment présents à l’échelle internationale.

Protéger les certificats d’obtention végétale en luttant contre leur contrefaçon contribue au dynamisme de nos entreprises et de nos emplois. C’était aussi l’objectif de la loi adoptée en 2011.

Le dispositif du COV permet de financer la recherche publique et privée.

Comme l’a rappelé mon collègue ministre Stéphane Le Foll lors du débat organisé au Sénat le 27 mars dernier sur l’initiative du groupe CRC, il faut préserver l’équilibre entre, d’une part, notre capacité à disposer d’un secteur économique de production de semences qui fonctionne très bien et à financer une recherche qui permet à notre pays d’être reconnu à l’échelle mondiale, et, d’autre part, la liberté laissée aux agriculteurs de faire des choix.

Tels sont les principes qui guident le Gouvernement dans l’application de la loi du 8 décembre 2011 relative aux certificats d’obtention végétale. Outre les décrets d’application obligatoires, qui seront pris prochainement, le Gouvernement a choisi d’utiliser toutes les souplesses permises par la réglementation internationale.

Ainsi, un premier décret a pour objectif d’étendre la liste des espèces autorisées pour utilisation en « semence de ferme ». Le projet est en cours de discussion finale auprès des instances professionnelles pour transmission au Conseil d’État avant la fin de l’année.

Un deuxième décret définira l’indemnité due à l’obtenteur du certificat par l’agriculteur qui utilise des semences de ferme, dans les cas où aucun accord interprofessionnel n’a été conclu. Pour ce faire, le ministre de l’agriculture a décidé de laisser toute sa place à la discussion interprofessionnelle. Deux ingénieurs généraux ont été mandatés pour faciliter la conclusion rapide de tels accords. Un premier accord interprofessionnel a été signé dans le domaine des céréales à paille le 14 juin 2013.

Le Gouvernement, toujours au travers de l’action énergique de Stéphane Le Foll, est ouvert à la discussion. Vous aurez l’occasion de poursuivre ces débats dans le cadre de l’examen, au premier trimestre de l’année 2014 et, je l’espère, dès le mois de janvier, du projet de loi d’avenir pour l’agriculture. C’est le véhicule législatif adapté pour aborder cette question, dont je ne nie pas l’importance.

La présente proposition de loi ne remet pas en cause le droit existant.

M. Michel Delebarre, rapporteur. Absolument !

Mme Nicole Bricq, ministre. Je peux en informer dès à présent votre Haute Assemblée : le Gouvernement émettra un avis favorable sur l’amendement que Mme Nicole Bonnefoy a déposé au nom du groupe socialiste – il sera examiné dans quelques instants –, car cet amendement rappelle utilement que les dispositions relatives aux semences de ferme seront préservées. Ce point me paraît essentiel dans le cadre de l’examen de la présente proposition de loi. (Très bien ! et applaudissements sur les travées du groupe socialiste et sur certaines travées du RDSE, ainsi qu’au banc de la commission.)

M. le président. La discussion générale est close.

Nous passons à la discussion des articles du texte de la commission.

Discussion générale (suite)
Dossier législatif : proposition de loi tendant à renforcer la lutte contre la contrefaçon
Article 1er

Articles additionnels avant le chapitre Ier

M. le président. Je suis saisi de sept amendements faisant l'objet d'une discussion commune.

L'amendement n° 4 rectifié bis, présenté par MM. Guerriau, Arthuis et Amoudry, Mmes Morin-Desailly et Goy-Chavent et MM. Roche et Jarlier, est ainsi libellé :

Avant le chapitre Ier

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

L'agriculteur qui produit à la ferme ses semences, ses plants, ses animaux reproducteurs ou ses préparations naturelles à base de micro-organismes ou d'autres éléments naturels issues de sa ferme ou de l'environnement naturel et destinées à ses productions fermières ou aux soins de ses cultures et de ses animaux, n'est pas concerné par le code de la propriété intellectuelle au titre des lois naturelles inaliénables.

La parole est à M. Joël Guerriau.

M. Joël Guerriau. La présente proposition de loi renforce des mesures applicables de lutte contre la contrefaçon. Pour nous, cela ne peut évidemment qu’aller dans le bon sens.

Pour autant, le texte soulève tout de même un certain nombre d’inquiétudes, notamment au sein du monde agricole.

Monsieur Yung, dans vos propos liminaires, vous avez affirmé que l’agriculture n’était en aucune manière concernée par la proposition de loi, dont les dispositions étaient sans effet sur ce secteur.

Nous souhaitons en être véritablement convaincus, car cette crainte a été largement exprimée dans un contexte de forte tension économique pour le marché agricole. Ce qui inquiète au premier plan le monde agricole, ce sont les conséquences éventuelles du texte sur la production de semences et de plantes à la ferme, dont Mme la ministre a rappelé à juste titre qu’il s’agissait d’un élément important – notons d’ailleurs que la France est le troisième marché de semences dans le monde. Sont également visées les préparations à base de micro-organismes ou encore la reproduction animale.

Par cet amendement, nous proposons de conforter par écrit toutes les garanties qui sont prises en matière de liberté d’action et de respect des méthodes ancestrales de reproduction des animaux et des plantes dans le monde agricole. En d’autres termes, nous voulons être certains que ces activités seront bien exclues du champ d’application de la loi, afin de rassurer les agriculteurs.

M. le président. L'amendement n° 21 rectifié, présenté par M. Labbé, Mme Lipietz et les membres du groupe écologiste, est ainsi libellé :

I. – Avant le chapitre Ier

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

La production à la ferme, par un agriculteur, de ses semences, de ses plants ou de ses animaux pour les besoins de son exploitation agricole, ne constitue pas une contrefaçon.

La production à la ferme, par un agriculteur, de ses ferments, levains, levures et autres préparations naturelles à base de micro-organismes ou d'autres éléments naturels issus de sa ferme ou de l'environnement naturel, et destinés à ses productions fermières ou aux soins de ses cultures ou de ses animaux, ne constitue pas une contrefaçon.

II. – En conséquence, faire précéder cet article d’une division additionnelle et son intitulé ainsi rédigés :

Chapitre...

Limitation de la définition de la contrefaçon

La parole est à M. Joël Labbé.

M. Joël Labbé. Je veux relayer ici les préoccupations d’un certain monde agricole paysan ; elles rejoignent celles de l’ensemble de la société, s’agissant d’enjeux qui ont une échelle planétaire.

Nous en avons conscience, la définition de ce qui relève ou non de la contrefaçon n’est pas l’objet de cette proposition de loi ; notre amendement apparaît, dès lors, comme un cavalier législatif.

Nous savons également que la loi du 8 décembre 2011 relative aux certificats d’obtention végétale a permis de préciser que les agriculteurs ont « le droit d’utiliser sur leur propre exploitation, sans l’autorisation de l’obtenteur, à des fins de reproduction ou de multiplication, le produit de la récolte qu’ils ont obtenu par la mise en culture d’une variété protégée ».

Tout en rappelant une telle spécificité, la loi de 2011 n’est pas allée jusqu’à indiquer que cette production à la ferme ne constitue pas une contrefaçon. De même, elle est restée imprécise sur l’étendue du « produit de la récolte ».

C’est pourquoi il nous est apparu opportun de profiter de l’examen de la présente proposition de loi, qui vise à renforcer la lutte contre la contrefaçon, pour apporter ces précisions.

Il faut y inclure, les semences, les plants, les animaux, mais également les ferments, les levures et les préparations naturelles. C’est d’autant plus nécessaire que se font chaque jour plus prégnantes les conséquences de l’érosion de la biodiversité, qu’elle soit cultivée ou non, et du changement climatique sur les ressources agricoles et alimentaires.

Reprenons quelques chiffres-clés. Depuis les débuts de l’agriculture, 10 000 espèces environ ont été cultivées sur Terre. Aujourd’hui, il ne reste plus que 150 espèces végétales couramment cultivées. En France, il ne reste plus que 30 variétés de vaches laitières, tant la diversité génétique a été, disons-le, combattue au profit de races « Formule 1 », machines à faire du lait !

C’est la diversité des espèces qui a permis de résister aux aléas. Je pense, entre autres, aux aléas climatiques.

La diminution du nombre d’espèces cultivées et la standardisation des espèces et variétés ont fragilisé l’agriculture et appauvri la qualité de notre régime alimentaire.

Or que défendons-nous à travers cet amendement ? La diversité agricole et alimentaire, l’adaptation aux territoires et l’adaptation au changement climatique ! La diversité agricole est une nécessité d’autant plus essentielle face à un horizon brouillé.

Pour nous, le travail des agriculteurs et des éleveurs, qui améliorent leurs semences, les adaptent aux réalités de leur territoire et produisent chez eux ce qui est utile aux besoins de leur exploitation, est un travail d’utilité publique. Ce travail est pourtant contrecarré par la domination sans équivoque des agro-industriels et leur velléité de protection de leur prétendue « création », aidés en cela par une législation qui, sous couvert de protéger, donne trop souvent les pleins pouvoirs à la catégorie d’acteurs la plus à même d’exercer sa prépondérance.

Voilà qui fait selon moi écho au sujet dont nous débattions hier dans cet hémicycle : les pesticides. Je pense aussi aux procédures de reconnaissance et d’autorisation de mise sur le marché, qui sont tout bonnement inaccessibles aux promoteurs des produits les plus naturels.

Le repréciser dans cette loi et l’étendre à l’ensemble des produits nécessaires à la conduite de l’exploitation, cela relèverait non pas du luxe, mais d’une légitimation de cette activité utile, voire indispensable à la réalisation du droit à l’alimentation.

Toutefois, j’ai entendu les déclarations de l’auteur de la proposition de loi, Richard Yung, de M. le rapporteur et de Mme la ministre. Nous avons besoin de garanties, et nous y tenons. Nous en reparlerons lors de l’examen du texte sur l’avenir de l’agriculture. En attendant, je retire cet amendement. (Très bien ! et applaudissements sur les travées du groupe écologiste et du groupe socialiste.)

M. le président. L'amendement n° 21 rectifié est retiré.

L'amendement n° 10 rectifié, présenté par Mme Cukierman, M. Le Cam, Mme Assassi, M. Favier et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :

Avant le chapitre 1er

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le I de l’article L. 623-4 du code de la propriété intellectuelle est complété par une phrase ainsi rédigé :

« La protection du certificat d’obtention végétale ne s’étend aux semences ou plants reproduits par un agriculteur à partir de sa propre récolte sur sa propre exploitation que s’il effectue une sélection conservatrice visant à reproduire uniquement les caractères distinctifs de la variété protégée et s’il commercialise sa récolte sous la dénomination de la variété protégée. »

La parole est à M. Gérard Le Cam.

M. Gérard Le Cam. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, je profite de la présentation de cet amendement n° 10 rectifié pour vous exposer de manière liminaire les motifs ayant conduit le groupe CRC à déposer quatre amendements relatifs à la propriété intellectuelle dans le domaine agricole dans le cadre de l’examen de la présente proposition de loi.

Le 27 mars, le Sénat a organisé, sur l’initiative de notre groupe, un débat sur le droit de semer et la propriété intellectuelle. Il s’agissait pour nous d’ouvrir la discussion pour déterminer comment il est possible, dans le domaine agricole et, au-delà, dans celui du vivant, de concilier les droits de propriété au regard de la recherche et les droits que l’ensemble des hommes détiennent sur ce patrimoine naturel commun.

Comme vous le savez, la propriété intellectuelle dans le secteur agricole voit s’opposer deux systèmes : le certificat d’obtention végétale et le brevet. Nous préférence pour le certificat d’obtention végétale, qui garantit l’exception du sélectionneur, est sans ambiguïté. Cependant, nous considérons aujourd’hui que le COV ne devrait pas couvrir certaines pratiques, comme les semences de ferme ou les semences paysannes.

En outre, nous réitérons ici nos craintes sur l’acceptation de l’idée selon laquelle le vivant pourrait être breveté. Lors du débat, au mois de mars, nous avions expliqué que le COV ne protégeait pas l’obtenteur ou les agriculteurs contre le dépôt d’un brevet sur un gène de la plante. Personne dans cette Haute Assemblée ne semblait s’émouvoir de l’affaire du gène de résistance de la laitue au puceron. Quelques semaines plus tard, lors de son audition par la commission des affaires économiques, le président de l’Office européen des brevets a éludé la question que je lui avais posée sur la politique de l’Office en matière de brevetage du vivant. Pourtant, le 12 juin dernier, l’Office a accordé à une entreprise détenue par Monsanto un brevet sur un brocoli issu d’un procédé de sélection conventionnelle.

Selon les revendications du brevet, les droits du détenteur s’étendent aux plantes, aux graines, aux « têtes de brocolis coupées », ainsi qu’à une « pluralité de plantes de brocolis cultivées dans un champ ».

Aujourd’hui on assiste à la montée d’une vision ultralibérale de l’agriculture en faisant de la recherche dans le domaine du végétal une véritable bulle spéculative. Parallèlement, on assiste à une montée en puissance de la protection juridique de ces opérations commerciales.

C’est pourquoi, même si nous partageons l’objectif des auteurs de la proposition de loi de défendre la propriété intellectuelle, nous considérons que, avec la loi de 2011 relatives aux certificats d’obtention végétale et les dérives du brevet, le patrimoine naturel, bien commun, n’est, en l’état actuel, pas suffisamment protégé.

En ce sens, par nos amendements, nous souhaitons soustraire à la qualification de contrefaçon certaines pratiques agricoles et les produits qui en sont issus. (Applaudissements sur les travées du groupe CRC et du groupe écologiste.)

M. le président. L'amendement n° 11 rectifié, présenté par Mme Cukierman, M. Le Cam, Mme Assassi, M. Favier et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :

Avant le chapitre 1er

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

À l’article L. 623-24-1 du code de la propriété intellectuelle, les mots : « pour les espèces énumérées par le règlement (CE) n° 2100/94 du Conseil du 27 juillet 1994 instituant un régime de protection communautaire des obtentions végétales ainsi que pour d’autres espèces qui peuvent être énumérées par décret en Conseil d’État », sont remplacés par les mots : « pour toutes les espèces ».

La parole est à M. Gérard Le Cam.

M. Gérard Le Cam. Il est défendu.

M. le président. L'amendement n° 1 rectifié ter, présenté par MM. Adnot, Retailleau, B. Fournier, Laménie, Bernard-Reymond, Lenoir, Guerriau et Masson, Mlle Joissains et MM. Beaumont et Reichardt, est ainsi libellé :

Avant le chapitre 1er

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le premier alinéa de l'article L. 623-25 du code de la propriété intellectuelle est complété par une phrase ainsi rédigé :

« Ne constitue pas une contrefaçon la reproduction, par un agriculteur, de semences de ferme, ferments, levains, levures et autres préparations naturelles à base de micro-organismes ou d'autres éléments naturels issus de sa ferme ou de l'environnement naturel et destinés à ses productions fermières ou au soin de ses cultures ou de ses animaux. »

La parole est à M. Bernard Fournier.

M. Bernard Fournier. L'article L. 623-25 du code de la propriété intellectuelle définit de façon très large la contrefaçon : « toute atteinte volontaire portée aux droits du titulaire d’un certificat d’obtention végétale tels qu’ils sont définis à l’article L. 623-4 constitue une contrefaçon qui engage la responsabilité civile de son auteur. »

Par cet amendement, nous proposons un ajout permettant de circonscrire de façon plus précise ce qui ne relève pas de la contrefaçon à l'échelle commerciale, afin d'exclure toute possibilité d'étendre cette notion aux semences de ferme et autres éléments issus et destinés à cette dernière. Il s'agit d'éviter de revenir sur un droit ancestral des agriculteurs de ressemer librement leur propre récolte et de préserver ainsi la survie de nos exploitations agricoles et leurs savoir-faire.

M. le président. L'amendement n° 18 rectifié bis, présenté par MM. Collin, Alfonsi, Baylet, Bertrand, C. Bourquin, Chevènement, Collombat, Esnol, Fortassin et Hue, Mme Laborde et MM. Plancade, Requier, Tropeano, Vall et Vendasi, est ainsi libellé :

Avant le chapitre 1er

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le premier alinéa de l’article L. 623-25 du code de la propriété intellectuelle est complété par une phrase ainsi rédigée :

« La production à la ferme par un agriculteur de ses semences pour les besoins de son exploitation agricole ne constitue pas une contrefaçon et ce, quelle que soit l’origine de ses semences. »

La parole est à M. Yvon Collin.

M. Yvon Collin. Par cet amendement, il s’agit de protéger une pratique ancestrale que le texte sur la lutte contre la contrefaçon pourrait, aux yeux de certains, remettre en cause : le droit pour les agriculteurs de ressemer leur récolte.

La semence à la ferme concerne encore aujourd’hui 300 000 agriculteurs et 50 % des surfaces céréalières en France. Beaucoup d’exploitations sont fragiles, et cette possibilité de reproduire les semences est indispensable à leur équilibre.

Or, en harmonisant les procédures civiles existantes en matière de contrefaçon, le texte ouvre la possibilité de contester la légalité de la semence à la ferme. Les agriculteurs pourront voir leurs sélections saisies par les services des douanes.

Sans méconnaître la nécessité d’endiguer la contrefaçon, nous estimons que cette lutte ne doit pas conduire à assimiler les agriculteurs à des fraudeurs : ils ne font que leur métier, un métier, on le sait, difficile, et qui n’a surtout pas besoin d’être entravé par une législation retirant un droit millénaire à ceux qui l’exercent.

Le droit de resemer figure d’ailleurs à l’article 14 du règlement européen n° 2100/94, qui dispose que les agriculteurs « sont autorisés à utiliser, à des fins de multiplication en plein air dans leur propre exploitation, le produit de la récolte ».

Au-delà de la nécessité de conserver ce droit aux agriculteurs, je rappellerai également que le principe de sécurité alimentaire, auquel je suis particulièrement attaché, invite à ne pas laisser des firmes accaparer la chaîne du vivant.

Il ne m’a pas échappé, cher Richard Yung, que le texte ne porte pas directement sur cette problématique, mais, comme plusieurs de mes collègues, je souhaitais défendre un amendement d’appel. Il me semble impératif que des mesures conservatoires soient prévues – pourquoi pas dans un prochain texte sur l’agriculture ? – pour faire cohabiter les détenteurs de certificats d’obtention végétale et les agriculteurs producteurs et utilisateurs de semences.

Sur cette question, j’attends, madame la ministre, vos arguments et votre réponse, qui détermineront la suite que je donnerai à cet amendement.

M. le président. L'amendement n° 13 rectifié, présenté par Mme Cukierman, M. Le Cam, Mme Assassi, M. Favier et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :

Avant le chapitre Ier

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

L’article L. 623-25 du code de la propriété intellectuelle est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« La production à la ferme par un agriculteur de ses semences, de ses plants ou de ses animaux pour les besoins de son exploitation agricole, de ses ferments, levains, levures et autres préparations naturelles à base de micro-organismes ou d’autres éléments naturels issus de sa ferme ou de l’environnement naturel et destinés à ses productions fermières ou aux soins de ses cultures ou de ses animaux, ne constituent pas une contrefaçon. »

La parole est à M. Gérard Le Cam.

M. Gérard Le Cam. Monsieur le président, je m’en suis déjà expliqué et cet amendement se justifie par son texte même.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Michel Delebarre, rapporteur de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d'administration générale. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, je ne sais plus quoi dire ! (Sourires.)

M. Robert del Picchia. Alors, ne dites rien !

M. Michel Delebarre, rapporteur. Nous sommes plusieurs à nous être succédé à la tribune pour expliquer qu’il n’y avait pas de risques pour les semences…

M. Roland Courteau. C’est clair !

M. Michel Delebarre, rapporteur. … et que le texte qui est présenté au Sénat cet après-midi n’apportait aucune modification en la matière.

Par conséquent, les amendements qui viennent d’être présentés n’ont pas d’autre objet que de me permettre de déclarer qu’ils en sont dépourvus ! (Nouveaux sourires.)

Je le répète donc, mes chers collègues : il n’y a pas de risques ! Qu’on ne me croie pas, je m’y résigne, tout en le regrettant, mais Mme la ministre elle-même est montée à la tribune pour le répéter avec force au nom du Gouvernement !

Je me tourne vers M. Labbé. Je m’incline, vous avez retiré votre amendement, convaincu par les arguments que nous avons présentés. Cela ne vous a pas empêché de le défendre et de faire écho aux préoccupations dont on vous a fait part sur le sujet. En tout cas, je n’aurai qu’un mot à dire aux auteurs des amendements restant en discussion : écoutez M. Labbé ! C’est la voix du salut ! Et c’est moi qui vous le dis… (Sourires.)

M. Robert del Picchia. Mais ils vont l’écouter !

M. Yvon Collin. C’est la voix de la sagesse !

M. Michel Delebarre, rapporteur. Non, du salut, et elle porte beaucoup plus loin ! (Nouveaux sourires.)

Je demande donc le retrait de ces amendements : suivez M. Labbé, mes chers collègues !

Pour étayer ma demande, je reprendrai tout de même l’un de mes arguments. Richard Yung l’a dit en présentant sa démarche, notre objectif est de faire reculer la contrefaçon et de défendre la production nationale contre ceux qui, à l’heure actuelle, font n’importe quoi à faibles coûts et sans courir de grands risques.

Si le texte issu des travaux du Sénat devait ne pas respecter cette ligne de conduite, notre démarche en serait affaiblie, et les observateurs auraient beau jeu de proclamer que les sénateurs ne savent pas ce qu’ils veulent, eux qui, partis de la défense de la production industrielle nationale s’égarent en chemin sur l’agriculture !

Je fais des efforts, mais cette assemblée est tout de même compliquée à suivre, je tiens à le dire !

Vos préoccupations sont donc prises en considération, chers collègues, et le projet de loi pour l’avenir de l’agriculture, de l’alimentation et de la forêt, qui vient d’être déposé sur le bureau de l’Assemblée nationale et qui arrivera bientôt au Sénat, nous offrira l’occasion d’aborder ces questions avec précision.

La virginité de ce texte mérite d’être respectée ! (Exclamations amusées.)

Mme Hélène Lipietz. Que c’est beau !

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Nicole Bricq, ministre. Je voudrais remercier à mon tour le groupe écologiste, singulièrement M. Labbé, qui, après avoir reconnu que son amendement était un cavalier législatif, l’a opportunément retiré.

Quant aux six autres amendements restant en discussion, je ne peux que me répéter, mesdames, messieurs les sénateurs.

Je vous ai dit quelle était la philosophie de ce texte, prenant même la précaution de préciser que l’amendement de Mme Bonnefoy rappelait, notamment sur les semences de ferme, le droit existant (Mme Nicole Bonnefoy approuve.), qui est issu d’une législation toute récente.

Je vous ai dit que ce débat pourrait être poursuivi et même approfondi lors de l’examen du projet de loi pour l’avenir de l’agriculture, de l’alimentation et de la forêt que viendra défendre ici Stéphane Le Foll.

Je vous ai dit, concernant la production de semences de ferme, que nous appliquions des dispositions spécifiques, révisées par la loi du 8 décembre 2011, qui a mis en conformité le code de la propriété intellectuelle avec les dispositions internationales existantes. Nous reviendrons sur ces points avec l’amendement déposé par Mme Bonnefoy.

M. le rapporteur ne veut pas dévier de l’objectif principal du présent texte. (M. le rapporteur approuve.) Pour autant, je l’ai dit également dans mon explication liminaire, je ne nie pas que c’est un réel sujet, mais, encore une fois, ce débat, vous l’aurez, vous n’en serez pas frustrés, mesdames, messieurs les sénateurs.

Je demande donc le retrait de ces amendements ; à défaut, l’avis du Gouvernement sera défavorable.

M. Michel Delebarre, rapporteur. Bien sûr !

M. le président. La parole est à M. le président de la commission.

M. Jean-Pierre Sueur, président de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d'administration générale. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, permettez-moi d’intervenir à la suite du débat que nous avons eu en commission ce matin.

Je salue tout d’abord le travail considérable accompli par notre ancien collègue Laurent Béteille et par notre collègue Richard Yung sur cette proposition de loi. J’ajoute que nous nous sommes battus en faveur de l’inscription de ce texte à l’ordre du jour du Sénat, et je remercie Mme la ministre de son engagement pour qu’il en soit ainsi également à l’Assemblée nationale, afin que cette proposition de loi traduise à la fois la volonté du Gouvernement et le souhait du Parlement.

Ce qui fait l’urgence de cette loi, mes chers collègues, c’est que nos industries sont pillées !

M. Jean-Pierre Sueur, président de la commission des lois. Oui, l’industrie mécanique, l’industrie électronique, l’industrie textile, tout le secteur de la mode, celui des produits de luxe, mais aussi l’industrie du médicament, et je pourrais continuer la liste, toutes nos industries sont littéralement pillées !

Oui, notre savoir-faire est volé par les acteurs d’un véritable banditisme international qui, sans aucun respect pour nos travailleurs, pour nos cadres, pour nos chercheurs, sévissent aujourd’hui dans le monde, un monde finalement sans règles.

Contre un tel pillage, nous voulons nous défendre et défendre ce qui n’est que justice : lorsque quelqu’un vole, pille et s’en prend à nos salariés, il doit être sanctionné autrement qu’avec des pénalités symboliques ou si faibles qu’il peut s’en moquer éperdument. Songez que certains provisionnent même ces éventuelles pénalités dans leur bilan comptable !

Nous voulons donc instaurer de véritables pénalités pour mettre un frein à la contrefaçon et pour défendre les intérêts de nos salariés.

Je souhaite de tout cœur – et je parle ici devant Mme Nicole Bonnefoy, qui s’est aussi beaucoup investie dans ce combat –, que ce soit le message envoyé par notre assemblée : le Sénat défend les intérêts industriels de la France.

M. Michel Delebarre, rapporteur. Tout à fait !

M. Jean-Pierre Sueur, président de la commission des lois. Madame la ministre du commerce extérieur, vous qui parcourez le monde inlassablement pour défendre les produits français, notre savoir-faire, notre rayonnement et notre économie, je pense que vous avez besoin de ce message-là de la part du Sénat et, plus largement, du Parlement.

Mais je m’adresse maintenant à tous les auteurs d’amendements, qui appartiennent à un grand nombre de groupes : mes chers collègues, un engagement ferme est pris – M. Michel Delebarre l’a dit, avec sa faconde et son humour, et Mme la ministre l’a confirmé avec solennité à la tribune – et nous allons vous donner un gage en adoptant l’amendement de Mme Bonnefoy, dont je rappelle qu’il conforte la législation existante aux termes de laquelle la semence de ferme existe et ne peut pas être frappée au titre de la contrefaçon.

Nous nous engageons donc tous à ce que la législation existante soit respectée, garantie, maintenue. C’est clair !

Par la suite, s’il y a des projets de loi sur l’agriculture, et il y en aura, le débat pourra avoir lieu de manière approfondie sur le sujet des semences. Je connais personnellement des agriculteurs qui ont développé des semences pour leur plus grand profit. C’est donc un vrai sujet. Mais, pour l’heure, en retirant ces amendements, vous nous permettrez de revenir au sujet et, ce faisant, de nous battre tous pour les salariés, les cadres, les chercheurs, les dirigeants, les innovateurs de l’industrie française. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste, du groupe RDSE et du groupe écologiste, ainsi que sur certaines travées du CRC.)

M. le président. Monsieur Collin, l'amendement n° 18 rectifié bis est-il maintenu ?

M. Yvon Collin. Tout d’abord, je tiens à préciser qu’il ne s’agit pas d’amendements d’obstruction…

M. Michel Delebarre, rapporteur. Non, certes !

M. Yvon Collin. ... qui viseraient à empêcher ou à retarder l’adoption de ce texte. Simplement, nous sommes porteurs, on l’a bien compris, d’un certain nombre de messages.

Et, parce que nous ne nous lassons pas de l’humour de notre collègue Michel Delebarre, parce que nous avons pris plaisir à le voir se battre, et avec quelle conviction, non pas contre nos amendements, mais pour ce texte, au nom de l’intérêt général, nous n’avons pas résisté à la tentation de l’entendre à nouveau. (Sourires.)

Madame la ministre, vos propos nous ont également rassurés. Enfin, Jean-Pierre Sueur a mis en quelque sorte la cerise sur le gâteau et a achevé de nous convaincre.

M. Jean-Pierre Sueur, président de la commission des lois. Je vous remercie, mon cher collègue.

M. Yvon Collin. Ces trois engagements vous lient, madame la ministre, monsieur le président de la commission, monsieur le rapporteur, et nous sommes effectivement convaincus que nous aurons satisfaction rapidement sur le point qui nous intéresse aujourd’hui.

C’est donc sans amertume et sans état d’âme que je retire mon amendement, monsieur le président. (Marques de satisfaction au banc des commissions.)

M. le président. L'amendement n° 18 rectifié bis est retiré.

Monsieur Fournier, qu’en est-il de l’amendement n° 1 rectifié ter ?

M. Bernard Fournier. Compte tenu des arguments qui ont été développés par Mme la ministre, par M. le président de la commission des lois et par M. le rapporteur, avec beaucoup d’humour, je retire cet amendement, et ce d’autant plus volontiers que, comme vous le rappeliez, nous allons bientôt entamer l’examen d’un projet de loi sur l’agriculture qui finira de nous conforter sur ce qui nous tient à cœur.

M. le président. L'amendement n° 1 rectifié ter est retiré.

Monsieur Guerriau, maintenez-vous l’amendement n° 4 rectifié bis ?

M. Joël Guerriau. Dans cette ambiance fort sympathique, un constat s’impose : nous sommes tous d’accord sur le fait que cette proposition de loi a du sens ; nous devons l’approuver et nous ne la remettons aucunement en cause.

Pour autant, une inquiétude a été exprimée, et les propos qui ont été tenus par chacun d’entre nous montrent combien nous sommes conscients que cette inquiétude est fondée. Le débat qui s’ouvre entre nous doit nous permettre de la lever.

Quel est le problème ? Nos agriculteurs redoutent de devoir demain payer pour une semence qu’ils auront eux-mêmes produite, et tout cela pour ne pas être accusés de contrefaçon. On pourrait multiplier les exemples.

Néanmoins, les réponses qui viennent de nous être apportées semblent satisfaisantes, et témoignent en tout cas du très fort intérêt dont fait l’objet cette question. La sagesse comme, je le crois, la confiance qui règnent au Sénat nous conduisent naturellement à retirer cet amendement.

M. le président. L'amendement n° 4 rectifié bis est retiré.

Monsieur Le Cam, les amendements nos 10 rectifié, 11 rectifié et 13 rectifié sont-ils maintenus ?

M. Robert del Picchia. Allez, un effort ! (Sourires.)

M. Gérard Le Cam. Ce n’était pas prévu, mais je vais faire un effort : je ne maintiens que l’amendement n° 10 rectifié et je retire les deux autres, ainsi que, je le dis par avance, monsieur le président, l’amendement n° 12 rectifié.

M. le président. Les amendements nos 11 rectifié et 13 rectifié sont retirés.

Je mets aux voix l'amendement n° 10 rectifié.

J'ai été saisi d'une demande de scrutin public émanant du groupe socialiste.

Je rappelle que la commission ainsi que le Gouvernement ont demandé le retrait de cet amendement.

Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.

Le scrutin est ouvert.

(Le scrutin a lieu.)

M. le président. Personne ne demande plus à voter ?…

Le scrutin est clos.

J'invite Mmes et MM. les secrétaires à procéder au dépouillement du scrutin.

(Il est procédé au dépouillement du scrutin.)

M. le président. Voici le résultat du scrutin n° 66 :

Nombre de votants 341
Nombre de suffrages exprimés 310
Pour l’adoption 20
Contre 290

Le Sénat n'a pas adopté.

L'amendement n° 12 rectifié, présenté par Mme Cukierman, M. Le Cam, Mme Assassi, M. Favier et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :

Avant le chapitre Ier

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

L’article L. 623-25 du code de la propriété intellectuelle est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Toutefois, l’offre, la mise dans le commerce, l’utilisation, la détention en vue de l’utilisation ou de la mise dans le commerce d’un produit contrefaisant n’engagent la responsabilité de leur auteur que s’il est prouvé que les faits ont été commis en connaissance de cause. »

Cet amendement a été précédemment retiré.

L'amendement n° 22 rectifié, présenté par M. Labbé, Mme Lipietz et les membres du groupe écologiste, est ainsi libellé :

Avant le chapitre Ier

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

La rémunération de la sélection des végétaux et des animaux destinée à l'alimentation et à l'agriculture n'est pas soumise au code de la propriété intellectuelle et fait l'objet de dispositions spécifiques.

La parole est à M. Joël Labbé.

M. Joël Labbé. Je retire également cet amendement, monsieur le président.

M. le président. L'amendement n° 22 rectifié est retiré.

CHAPITRE IER

Spécialisation des juridictions civiles en matière de propriété intellectuelle

Articles additionnels avant le chapitre Ier
Dossier législatif : proposition de loi tendant à renforcer la lutte contre la contrefaçon
Article 2

Article 1er

Le code de la propriété intellectuelle est ainsi modifié :

1° Au premier alinéa de l’article L. 615-17, les mots : « aux brevets d’invention » sont remplacés par les mots : « au présent titre » ;

2° Les articles L. 615-18 et L. 615-19 sont abrogés ;

2° bis (nouveau) Au premier alinéa de l’article L. 623-31, après le mot : « instance », sont insérés les mots : « , déterminés par voie réglementaire, » ;

3° (Supprimé)

M. le président. La parole est à M. Roland Courteau, sur l'article.

M. Roland Courteau. Cette proposition de loi, présentée par Richard Yung, prévoit des améliorations nécessaires et attendues. Elle marquera des avancées notables dans le combat que nous menons au quotidien pour l’économie et pour l’emploi de notre pays.

Ne l’oublions pas, la contrefaçon est un fléau qui représente 10 % du commerce mondial. Rien qu’en France, en 2012, les douanes ont saisi 4,6 millions d’articles pour une valeur de 287 millions d’euros.

Quand nous parlons de contrefaçon, nous pensons tous aux marques de luxe. Pourquoi ne pas acheter la copie d’un sac ou d’une paire de lunettes de marque, donc à moindres frais ? L’idée est tentante. Mais force est de constater que cette pratique va bien au-delà et se révèle bien plus dangereuse aussi.

Si la contrefaçon a des conséquences économiques dramatiques, qui se chiffrent au minimum à 250 milliards d’euros dans le monde, et conduit à la perte de 35 000 emplois par an en France, elle met également en jeu des réseaux mafieux, qui voient en elle un trafic moins dangereux et plus rentable que la drogue ou la prostitution, par exemple.

Par ailleurs, la contrefaçon se diversifie désormais tant par les produits contrefaits, qui mettent en danger notre sûreté sanitaire – je pense aux médicaments, aux cosmétiques ou au tabac –, que par les modes de distribution. Internet, notamment, offre une protection bien moindre aux consommateurs.

Même si notre droit réprime déjà durement les atteintes à la propriété intellectuelle, il était plus que temps d’adapter notre législation à ces nouvelles pratiques et de donner aux autorités, en particulier aux tribunaux et aux services des douanes, les moyens juridiques de lutter efficacement contre la contrefaçon.

Traduire dans notre législation les recommandations du rapport d’information de 2011 et harmoniser les règles applicables aux droits de la propriété intellectuelle : voilà ce qui est attendu de nous !

Le problème ne pouvait rester plus longtemps sans réponse. Il appelait une réaction forte du législateur, et je me félicite que le Sénat se soit saisi du sujet et que sa démarche recueille le soutien du Gouvernement.

L’article 1er, et je m’en réjouis, vise à préciser le rôle et à renforcer la spécialisation des tribunaux en matière de propriété intellectuelle. La clarification de la compétence des TGI était primordiale afin de rendre leur action plus efficace et plus lisible.

De plus, le texte initial de notre collègue Richard Yung prévoyait d’attribuer au TGI de Paris une compétence exclusive en matière d’indications géographiques, en particulier en ce qui concerne les appellations d’origine protégée et les indications géographiques protégées.

Je rejoins ici la commission, qui a préféré que cette compétence relève des TGI désignés par voie réglementaire et non pas uniquement de la compétence du TGI de Paris.

Ainsi, nous renforcerons la spécialisation et la formation des magistrats, ce qui est, à mon sens, préférable dans cette situation à la spécialisation des juridictions.

De surcroît, je trouve important que nous insistions sur le caractère éminemment local de ce type d’affaires, qui doivent être traitées par les TGI locaux. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe écologiste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)

M. le président. L'amendement n° 25, présenté par Mme Lipietz et les membres du groupe écologiste, est ainsi libellé :

Après l'alinéa 1

Insérer deux alinéas ainsi rédigés :

...° L’article L. 331-1 est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Les dispositions qui précédent n’affectent pas la compétence de la juridiction administrative pour statuer sur les litiges concernant les personnes publiques. » ;

La parole est à Mme Hélène Lipietz.

Mme Hélène Lipietz. La nouvelle rédaction de l’article L. 331-1 du code de la propriété intellectuelle résultant de l’article 196 de la loi du 17 mai 2011 pourrait, selon certains auteurs, entraîner la compétence judiciaire. Je pense, notamment, à une chronique de Christophe Caron, parue au JCP, Édition générale 2011.

La solution n’est pas certaine, dans un sens ou dans l’autre, même si le tribunal administratif de Paris a, et lui seul, tranché.

Rémi Rouquette, dans la partie Contrats spéciaux du Droit des marchés publics, publié au Moniteur, explique, lui, que la compétence exclusive du TGI pour les actions civiles ne vise justement pas les actions administratives.

Il est possible, aussi, que la compétence du juge judiciaire ne soit fondée que lorsque l’administration est défenderesse à une action extracontractuelle, comme semble le penser Mme Malvina Mairesse dans son article « Contrats publics et propriété intellectuelle : la fin du dualisme juridictionnel ? » publié dans la revue Contrats publics, en 2013.

C’est donc pour préserver la séparation des pouvoirs dans un domaine où l’État est parfois victime d’abus de droit que je présente cet amendement, qui vise à réaffirmer la position du Conseil d’État : la protection du droit d’auteur peut relever des juridictions administratives selon les critères de droit commun, à la seule exception de la compétence exclusive, prévue par le code de la propriété intellectuelle, du président du TGI pour les mesures conservatoires.

Il convient de préciser ce point, qui fait débat au sein non seulement de la doctrine, mais aussi des juridictions.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Michel Delebarre, rapporteur. Ah, madame Lipietz, si je me laissais aller… (Exclamations amusées.), je risquerais de vous suivre dans vos interprétations ! Mais ce ne sont que des interprétations !

L’amendement n° 25 paraît affirmer un principe qui ressort de l’évidence juridique avérée : le juge administratif est compétent pour statuer sur les litiges qui concernent les personnes publiques.

On peut s’interroger sur la portée juridique réelle d’une telle disposition, ainsi insérée dans le code de la propriété intellectuelle.

À mes yeux, la jurisprudence est assez convergente sur le point de savoir quelles sont les juridictions compétentes en matière de propriété intellectuelle, singulièrement en matière de droit d’auteur comme en l’espèce, lorsque sont en cause des personnes publiques : ce sont les juridictions judiciaires.

Le principe de bonne administration de la justice peut justifier l’attribution de l’ensemble d’un contentieux à un ordre de juridiction, concernant les personnes publiques. C’est ce qui se produit avec notre texte.

La commission souhaite donc le retrait de cet amendement. À défaut, je devrai me résoudre, presque à regret, à émettre un avis défavorable, ma chère collègue.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Nicole Bricq, ministre. Bon sang ne saurait mentir, madame Lipietz, et votre profession d’avocate vous invite à vous pencher sur la doctrine et sur le débat qui peut l’agiter.

L’amendement que vous présentez vise à maintenir la compétence de la juridiction administrative pour les litiges concernant les personnes publiques en matière de droit d’auteur.

Le rapporteur a reconnu une certaine légitimité à votre interrogation, mais la rédaction de l’article L.331-1 relatif aux droits d’auteurs et sur lequel porte votre amendement a été modifiée en 2011 afin d’être alignée sur celle qui est prévue en matière de dessins et modèles depuis 2008. Elle prévoit donc que seuls les tribunaux de grande instance sont compétents. Les mêmes dispositions sont prévues pour les marques.

Le Tribunal des conflits s’est prononcé sur la rédaction prévue pour les dessins et modèles par un arrêt du 2 mai 2011. Il a posé le principe d’une compétence exclusive des juridictions de l’ordre judiciaire dans les contentieux et la responsabilité des personnes morales de droit public.

L’interprétation du Tribunal des conflits doit donc prévaloir, et ce pour tous les droits de propriété intellectuelle, dès lors que la rédaction des textes est identique.

À ce titre, le tribunal administratif de Paris s’est déclaré incompétent en 2011 pour connaître des actes civils et des demandes relatives à la propriété littéraire et artistique.

Ainsi, il ne semble pas opportun de revenir sur la rédaction de l’article L.331-1 et sur la compétence exclusive des tribunaux de grande instance, qui est d’ailleurs nécessaire à l’harmonisation de la jurisprudence.

Donc, à l’instar de la commission, le Gouvernement demande le retrait de l’amendement. Sinon, il émettra un avis défavorable.

M. le président. Maintenez-vous votre amendement, madame Lipietz ?

Mme Hélène Lipietz. Je le maintiens, car je voudrais qu’il puisse éventuellement être soumis à l’Assemblée nationale (M. Robert del Picchia s’exclame.) et parce que je ne suis toujours pas convaincue.

Je ferai remarquer que la décision du Tribunal des conflits date du mai 2 mai 2011 et que la modification de la loi date 17 mai 2011. Je veux donc pouvoir effectuer certaines vérifications, car la question est extrêmement technique.

Donc, je maintiens cet amendement, même si je sais que, malheureusement, je ne serai pas suivie.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 25.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je suis saisi de deux amendements faisant l'objet d'une discussion commune.

L'amendement n° 5, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :

Alinéa 2

Supprimer cet alinéa.

La parole est à Mme la ministre.

Mme Nicole Bricq, ministre. Je retire cet amendement au profit de l’amendement n° 31 de la commission, qui me paraît de meilleure facture.

M. le président. L’amendement n° 5 est retiré.

L'amendement n° 31, présenté par M. Delebarre, au nom de la commission, est ainsi libellé :

Alinéa 2

Rédiger ainsi cet alinéa :

1° Au premier alinéa de l’article L. 615-17, après le mot : « compris », sont insérés les mots : « dans le cas prévu à l’article L. 611-7 ou » ;

La parole est à M. le rapporteur.

M. Michel Delebarre, rapporteur. Le présent amendement vise à rendre compatibles l’objectif du Gouvernement – veiller à la mise en place prochaine de la juridiction européenne unifiée du brevet – et le souci exprimé par la commission des lois dans son texte adopté en 2011 et confirmé avec la présente proposition de loi, à savoir clarifier le fait que la compétence exclusive du TGI de Paris en matière de brevets d’invention s’étend bien au cas où l’inventeur est un salarié.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 31.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. L'amendement n° 26, présenté par Mme Lipietz et les membres du groupe écologiste, est ainsi libellé :

Après l'alinéa 2

Insérer deux alinéas ainsi rédigés :

...° L'article L. 615-17 est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Les dispositions qui précédent n’affectent pas la compétence de la juridiction administrative pour statuer sur les litiges concernant les personnes publiques. » ;

La parole est à Mme Hélène Lipietz.

Mme Hélène Lipietz. Je crains que cet amendement ne suscite les mêmes avis que précédemment.

Il porte sur les saisies conservatoires dans les contentieux de marchés publics. Il pourrait y avoir une question préjudicielle, cela a déjà été reconnu, dès lors qu’est en cause l’exécution du livre VI du code de la propriété intellectuelle.

Toutefois, il reste permis de s’interroger sur l’hypothèse où la concession de brevets est incluse dans un marché public. Il est peu probable que le marché lui-même devienne de droit privé car, si la règle sur les brevets est spéciale, la règle sur les marchés l’est encore davantage.

Cependant, la doctrine est hésitante et va même parfois dans le sens de la compétence judiciaire, comme le notent, par exemple, Catherine Blaizot-Hazard ou encore Pierre Potier à l’AJDA 2008, page 352.

C’est la raison pour laquelle je propose de rendre le juge administratif compétent pour les questions préjudicielles, notamment les saisies, le fond pouvant relever du TGI.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Michel Delebarre, rapporteur. Ah, madame Lipietz ! (Sourires.) L’avis de la commission est défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Nicole Bricq, ministre. Madame Lipietz, votre pressentiment était bon : les mêmes causes produisant les mêmes effets, je vous demande de retirer votre amendement. Je salue votre opiniâtreté, mais les arguments que j’ai opposés tout à l’heure à votre amendement n° 25 valent pour celui-ci, comme ils vaudront, d’ailleurs pour l’amendement n° 28, que vous défendrez à l’article 4.

M. le président. Maintenez-vous votre amendement, madame Lipietz ?

Mme Hélène Lipietz. Oui, monsieur le président.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 26.

(L'amendement n’est pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'article 1er, modifié.

(L'article 1er est adopté.)

CHAPITRE II

Dispositions relatives à l’amélioration des dédommagements civils

Article 1er
Dossier législatif : proposition de loi tendant à renforcer la lutte contre la contrefaçon
Article additionnel après l'article 2

Article 2

I. – Le code de la propriété intellectuelle est ainsi modifié :

1° L’article L. 331-1-3 est ainsi rédigé :

« Art. L. 331-1-3. – Pour fixer les dommages et intérêts, la juridiction prend en considération distinctement :

« - les conséquences économiques négatives de l’atteinte aux droits, dont le manque à gagner et la perte subis par la partie lésée ;

« - le préjudice moral causé à cette dernière ;

« - les bénéfices réalisés par l’auteur de l’atteinte aux droits et, le cas échéant, les économies d’investissements intellectuels, matériels et promotionnels que celui-ci a retirées de l’atteinte aux droits.

« Toutefois, la juridiction peut, à titre d’alternative et sur demande de la partie lésée, allouer à titre de dommages et intérêts une somme forfaitaire. Cette somme est égale ou supérieure au montant des redevances ou droits qui auraient été dus si l’auteur de l’atteinte avait demandé l’autorisation d’utiliser le droit auquel il a porté atteinte. » ;

(Supprimé)

II. – L’article L. 521-7 du même code est ainsi rédigé :

« Art. L. 521-7. – Pour fixer les dommages et intérêts, la juridiction prend en considération distinctement :

« - les conséquences économiques négatives de la contrefaçon, dont le manque à gagner et la perte subis par la partie lésée ;

« - le préjudice moral causé à cette dernière ;

« - les bénéfices réalisés par le contrefacteur et, le cas échéant, les économies d’investissements intellectuels, matériels et promotionnels que celui-ci a retirées de la contrefaçon.

« Toutefois, la juridiction peut, à titre d’alternative et sur demande de la partie lésée, allouer à titre de dommages et intérêts une somme forfaitaire. Cette somme est égale ou supérieure au montant des redevances ou droits qui auraient été dus si le contrefacteur avait demandé l’autorisation d’utiliser le droit auquel il a porté atteinte. »

III. – L’article L. 615-7 du même code est ainsi rédigé :

« Art. L. 615-7. – Pour fixer les dommages et intérêts, la juridiction prend en considération distinctement :

« - les conséquences économiques négatives de la contrefaçon, dont le manque à gagner et la perte subis par la partie lésée ;

« - le préjudice moral causé à cette dernière ;

« - les bénéfices réalisés par le contrefacteur et, le cas échéant, les économies d’investissements intellectuels, matériels et promotionnels que celui-ci a retirées de la contrefaçon.

« Toutefois, la juridiction peut, à titre d’alternative et sur demande de la partie lésée, allouer à titre de dommages et intérêts une somme forfaitaire. Cette somme est égale ou supérieure au montant des redevances ou droits qui auraient été dus si le contrefacteur avait demandé l’autorisation d’utiliser le droit auquel il a porté atteinte. »

IV. – L’article L. 623-28 du même code est ainsi rédigé :

« Art. L. 623-28. – Pour fixer les dommages et intérêts, la juridiction prend en considération distinctement :

« - les conséquences économiques négatives de la contrefaçon, dont le manque à gagner et la perte subis par la partie lésée ;

« - le préjudice moral causé à cette dernière ;

« - les bénéfices réalisés par le contrefacteur et, le cas échéant, les économies d’investissements intellectuels, matériels et promotionnels que celui-ci a retirées de la contrefaçon.

« Toutefois, la juridiction peut, à titre d’alternative et sur demande de la partie lésée, allouer à titre de dommages et intérêts une somme forfaitaire. Cette somme est égale ou supérieure au montant des redevances ou droits qui auraient été dus si le contrefacteur avait demandé l’autorisation d’utiliser le droit auquel il a porté atteinte. »

V. – L’article L. 716-14 du même code est ainsi rédigé :

« Art. L. 716-14. – Pour fixer les dommages et intérêts, la juridiction prend en considération distinctement :

« - les conséquences économiques négatives de la contrefaçon, dont le manque à gagner et la perte subis par la partie lésée ;

« - le préjudice moral causé à cette dernière ;

« - les bénéfices réalisés par le contrefacteur et, le cas échéant, les économies d’investissements intellectuels, matériels et promotionnels que celui-ci a retirées de la contrefaçon.

« Toutefois, la juridiction peut, à titre d’alternative et sur demande de la partie lésée, allouer à titre de dommages et intérêts une somme forfaitaire. Cette somme est égale ou supérieure au montant des redevances ou droits qui auraient été dus si le contrefacteur avait demandé l’autorisation d’utiliser le droit auquel il a porté atteinte. »

VI. – L’article L. 722-6 du même code est ainsi rédigé :

« Art. L. 722-6. – Pour fixer les dommages et intérêts, la juridiction prend en considération distinctement :

« - les conséquences économiques négatives de la contrefaçon, dont le manque à gagner et la perte subis par la partie lésée ;

« - le préjudice moral causé à cette dernière ;

« - les bénéfices réalisés par le contrefacteur et, le cas échéant, les économies d’investissements intellectuels, matériels et promotionnels que celui-ci a retirées de la contrefaçon.

« Toutefois, la juridiction peut, à titre d’alternative et sur demande de la partie lésée, allouer à titre de dommages et intérêts une somme forfaitaire. »

M. le président. L'amendement n° 27, présenté par Mme Lipietz et les membres du groupe écologiste, est ainsi libellé :

Alinéas 7, 14, 20, 26 et 32, secondes phrases

Supprimer les mots :

ou supérieure

La parole est à Mme Hélène Lipietz.

Mme Hélène Lipietz. M. le rapporteur, et la commission des lois l’a suivi, a mis en avant le fait que les dommages et intérêts punitifs, c’est-à-dire supérieurs à ce que la partie lésée a réellement perdu, n’existaient pas dans le droit en vigueur.

Pourtant, par un autre amendement, M. le rapporteur a modifié le droit existant, qui, certes, n’est pas clair, de manière qu’il soit possible de condamner un contrefacteur à payer à la partie lésée des dommages et intérêts supérieurs au préjudice subi.

S’il est effectivement nécessaire que le contrefacteur ne tire aucun bénéfice de sa contrefaçon, il est tout de même quelque peu anormal que la personne lésée y trouve, elle, un bénéfice, surtout s’il s’agit de brevets déposés en France, par des ingénieurs français. Il convient de rappeler que la majorité de nos ingénieurs sont, pour le moment encore, et j’espère que cela durera longtemps, formés en France, donc avec des fonds publics. Il paraîtrait plus normal, si l’on doit punir les contrefacteurs au-delà du préjudice subi, que le produit de cette amende aille au budget de l’État et non dans la poche des personnes lésées.

Je propose en conséquence la suppression des mots « ou supérieure » afin que l’on en reste à une indemnisation maximale de la victime, mais qui n’excède pas le montant du préjudice.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Michel Delebarre, rapporteur. L’avis de la commission est défavorable.

Le texte prévoit des dispositions plus lourdes en matière de pénalisation de la contrefaçon. Nous n’avons pas suivi Mme Lipietz.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Nicole Bricq, ministre. La rédaction adoptée par la commission des lois convient au Gouvernement. Je tiens à rappeler que la proposition de loi n’institue pas de dommages et intérêts punitifs.

Sur la demande de la partie lésée, c’est-à-dire du titulaire du droit de propriété intellectuelle contrefait, la juridiction saisie peut allouer, à titre de dommages et intérêts, une somme forfaitaire qui ne peut être inférieure au montant des droits ou redevances qui auraient dû être acquittés par le contrefacteur au bénéfice du titulaire s’il lui avait demandé l’autorisation d’utiliser son droit. La somme forfaitaire accordée peut donc être supérieure à ce montant, comme le prévoit la proposition de loi.

Pour ces raisons, le Gouvernement demande le retrait de cet amendement, sinon il émettra un avis défavorable.

M. le président. Maintenez-vous votre amendement, madame Lipietz ?

Mme Hélène Lipietz. Oui, monsieur le président.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 27.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'article 2.

(L'article 2 est adopté.)

Article 2
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Article 3

Article additionnel après l'article 2

M. le président. L'amendement n° 17, présenté par M. Yung, est ainsi libellé :

Après l’article 2

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le code de la propriété intellectuelle est ainsi modifié : 

1° Après l’article L. 335-2, il est inséré un article L. 335-2-... ainsi rédigé :

« Art. L. 335-2-... - Les personnes physiques ou morales coupables des crimes et délits prévus à l'article L. 335-2 encourent également la peine complémentaire de confiscation, prévue à l’article 131-21 du code pénal, de tout ou partie des biens leur appartenant ou, sous réserve des droits du propriétaire de bonne foi, dont elles ont la libre disposition, quelle qu'en soit la nature, meubles ou immeubles, divis ou indivis. » ;

« 2° Après l’article L. 521-10, il est inséré un article L. 521-10-... ainsi rédigé :

« Art. L. 521-10-... - Les personnes physiques ou morales coupables des crimes et délits prévus à l’article L. 521-10 encourent également la peine complémentaire de confiscation, prévue à l’article 131-21 du code pénal, de tout ou partie des biens leur appartenant ou, sous réserve des droits du propriétaire de bonne foi, dont elles ont la libre disposition, quelle qu'en soit la nature, meubles ou immeubles, divis ou indivis. » ;

« 3° Après l’article L. 615-14-3, il est inséré un article L. 615-14-... ainsi rédigé :

« Art. L. 615-14-... - Les personnes physiques ou morales coupables des crimes et délits prévus à l’article L. 615-14 encourent également la peine complémentaire de confiscation, prévue à l’article 131-21 du code pénal, de tout ou partie des biens leur appartenant ou, sous réserve des droits du propriétaire de bonne foi, dont elles ont la libre disposition, quelle qu'en soit la nature, meubles ou immeubles, divis ou indivis. » ;

« 4° Après l’article L. 716-11-2, il est inséré un article L. 716-11-... ainsi rédigé :

« Art. L. 716-11-... - Les personnes physiques ou morales coupables des crimes et délits prévus de l’article L. 716-9 à L. 716-11 encourent également la peine complémentaire de confiscation, prévue à l’article 131-21 du code pénal, de tout ou partie des biens leur appartenant ou, sous réserve des droits du propriétaire de bonne foi, dont elles ont la libre disposition, quelle qu'en soit la nature, meubles ou immeubles, divis ou indivis. »

La parole est à M. Richard Yung.

M. Richard Yung. On m’a fait un procès en sorcellerie sur les dommages et intérêts punitifs (Sourires.), mais nous ne les avons jamais proposés !

M. Jean-Jacques Hyest. C’est exact !

M. Richard Yung. Quand bien même, d’ailleurs, l’aurions-nous fait, quel mal y aurait-il à en discuter ? Pourquoi ne ferait-on pas évoluer le droit sur ce point ?

Je persiste donc dans mon combat, qui consiste à frapper les contrefacteurs au portefeuille, parce que je pense que c’est la bonne méthode. C’est la raison pour laquelle je présente cet amendement d’appel qui vise à étendre à la contrefaçon la peine complémentaire de confiscation de patrimoine qui est prévue à l’article 131-21 du code pénal.

Je pars de la constatation que la voie pénale est peu utilisée en France. Les victimes de contrefaçons, surtout les entreprises, d’ailleurs, ne l’utilisent pas ou très peu.

M. Robert del Picchia. Et c’est dommage !

M. Richard Yung. Elles recourent à la voie civile, car, ce qu’elles veulent, ce sont des dommages et intérêts.

Il est donc difficile de punir efficacement le contrefacteur, d’où l’idée de la confiscation de patrimoine. Introduite par la loi du 9 juillet 2010, la disposition vise à faciliter la saisie et la confiscation en matière pénale des biens patrimoniaux de personnes physiques ou morales suspectées de blanchiment, de production de fausse monnaie ou encore de trafic de stupéfiants. Ce sont donc des cas de criminalité d’une particulière gravité.

En somme, je vous propose d’assimiler le délit de contrefaçon à ces cas. J’ai une petite idée des réponses qui vont m’être faites, mais, comme Mme Lipietz, je défends mes amendements !

L’application de la peine complémentaire de confiscation de patrimoine prévue à l’article 131-21 du code pénal permettra au juge pénal d’agir rapidement, avant que la personne mise en cause n’ait pu mettre en œuvre les moyens nécessaires pour organiser son insolvabilité ou faire disparaître les éléments de son patrimoine acquis de façon illicite.

Je pense que ma proposition mérite au moins un petit débat…

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Michel Delebarre, rapporteur. La situation est difficile,…

Mme Hélène Lipietz. Mais pas désespérée !

M. Michel Delebarre, rapporteur. … sinon désespérée. Je tente d’argumenter face à M. Yung, mais, sur cette question de la contrefaçon, seules deux attitudes sont possibles : ou vous êtes en accord avec M. Yung, et vous êtes déjà pardonné (Sourires.) ; ou vous n’êtes pas tout à fait d’accord avec M. Yung et, là, vous vous engagez sur un chemin difficile pour arriver à le convaincre. Je ne le tenterai pas : je n’y arriverai pas !

Mon cher collègue, si je vous suis un instant, encore faudrait-il que ceux qui ont à pâtir de la contrefaçon choisissent la voie pénale, ce que, pour la plupart, ils ne font pas – sur ce point, nous sommes d’accord, monsieur Yung – parce que, en général, ils veulent un règlement le plus rapide possible, et cela se comprend. La dénonciation publique de la contrefaçon est déjà un élément qu’ils souhaitent et, dans la voie non pénale, la capacité du juge à alourdir la peine a été renforcée.

Vous proposez la confiscation générale. Autrement dit, j’entre habillé dans la voie pénale et j’en ressors tout nu, parce que j’ai contrefait.

M. Richard Yung. Parce que vous êtes un criminel !

M. Michel Delebarre, rapporteur. Je suis un criminel, je suis un contrefacteur…

M. René Garrec. Il ne faut pas exagérer !

M. Michel Delebarre, rapporteur. Il faudrait pouvoir y revenir dans le débat. Cela étant, selon les éléments qui m’ont été transmis, je relève que la confiscation générale des biens est encourue pour certaines infractions particulièrement graves : crime contre l’humanité ou proxénétisme. Je veux bien aller jusqu’à assimiler les contrefacteurs à des criminels, mais de là à assimiler la contrefaçon au crime contre l’humanité – peut-être l’humanité au travail ? – ou au proxénétisme… Cela nous a semblé une voie « yungesque » (Sourires.) sur laquelle la commission n’a pas pu vous suivre, monsieur Yung.

Je suis donc au regret de vous dire que la commission souhaite le retrait de votre amendement, auquel, sinon, elle donnera un avis défavorable.

Pour ma part, l’avis défavorable, monsieur Yung, je ne l’ai jamais envisagé. C’est pourquoi je vous demande de retirer votre amendement, qui, tout en respectant votre droit d’interpellation, laisse ouverte la voie à la réflexion.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Nicole Bricq, ministre. Je suis d’accord avec le rapporteur, mais, contrairement à lui, j’essaierai de convaincre M. Yung !

Il faut examiner précisément l’état du droit positif. Le rapporteur l’a rappelé, la peine complémentaire de confiscation de tout ou partie du patrimoine est circonscrite à certaines infractions limitativement énumérées par la loi : crime contre l’humanité, traite des êtres humains, terrorisme, blanchiment, pédopornographie et faux monnayage.

M. Richard Yung. Sans oublier le trafic de stupéfiants !

Mme Nicole Bricq, ministre. Ce sont, on le voit, des crimes très spécifiques et très graves.

Par ailleurs, la confiscation des produits indirects ou directs de l’infraction est d’ores et déjà applicable de plein droit pour le délit de contrefaçon, ainsi que pour les délits de contrefaçon aggravée.

La confiscation est élargie à l’ensemble des biens dont l’origine licite ne peut pas être justifiée dès lors que la peine encourue est au moins égale à cinq ans, ce qui est notamment le cas pour les actes commis en bande organisée.

La confiscation peut donc être prononcée de manière satisfaisante en matière de contrefaçon, sans que l’amendement proposé apparaisse ou nécessaire ou utile.

En outre, l’amendement présente un risque constitutionnel important au regard des principes de proportionnalité et de nécessité des peines.

Monsieur Yung, je veux vous éviter cette déconvenue et je vous demande de retirer votre amendement.

M. le président. La parole est à M. Jean-Jacques Hyest, pour explication de vote.

M. Jean-Jacques Hyest. Après les explications de Mme la ministre, je n’ai pas grand-chose à ajouter !

On sait pourquoi les victimes de contrefaçon choisissent la voie civile. En revanche, je comprends moins pourquoi le parquet n’engagerait pas, même sans plainte, l’action publique, notamment grâce aux douanes, qui disposeront de moyens renforcés pour faire condamner les contrefacteurs au pénal, qu’il y ait ou non constitution de partie civile : c’est la définition même de l’action publique en cas de violation de la loi pénale !

Je ne vois pas pourquoi les contrefacteurs ne pourraient pas être poursuivis au pénal, aussi !

On nous a dit qu’on allait lutter contre toutes les formes de corruption, créer un parquet financier, entre autres choses. Par ailleurs, nous savons que la contrefaçon est aujourd’hui le fait de réseaux mafieux. Nous pouvons joindre tous les aspects du dossier !

Le parquet – peut-être un jour le parquet financier… –pourrait très bien se saisir de ces affaires et requérir de lourdes peines.

Monsieur Yung, je serais aussi favorable à ce que soient prononcées des amendes civiles, sans qu’elles profitent à la victime, car il ne doit pas y avoir pas d’enrichissement sans cause. De telles amendes en feraient réfléchir un certain nombre !

C'est d’ailleurs ce qui s’est passé en droit des sociétés. Autrefois, on réprimait par la pénalisation, sans succès : aucune sanction pénale n’était jamais prononcée ! Les choses ont changé lorsque l’on a institué des amendes civiles, qui sanctionnent, par exemple, le non-respect par des dirigeants de sociétés de certaines règles impératives.

Ce serait peut-être une piste à creuser pour améliorer l’efficacité des sanctions en la matière.

M. le président. Monsieur Yung, l'amendement n° 17 est-il maintenu ?

M. Richard Yung. Non, je le retire, monsieur le président.

M. le président. L'amendement n° 17 est retiré.

CHAPITRE III

Clarification de la procédure du droit à l’information

Article additionnel après l'article 2
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Article 4

Article 3

(Non modifié)

I. – L’article L. 331-1-2 du code de la propriété intellectuelle est ainsi modifié :

1° Le premier alinéa est ainsi modifié :

a) Après les mots : « la juridiction saisie » sont insérés les mots : « au fond ou en référé » ;

b) Après les mots : « marchandises et services qui portent », il est inséré le mot : « prétendument » ;

2° Les troisième, quatrième et dernier alinéas sont supprimés.

II. – L’article L. 521-5 du même code est ainsi modifié :

1° Le premier alinéa est ainsi modifié :

a) Après les mots : « la juridiction saisie » sont insérés les mots : « au fond ou en référé » ;

b) Les deux occurrences du mot : « contrefaisants » sont remplacées par les mots : « argués de contrefaçon » ;

c) Les mots : « des activités » sont remplacés par les mots : « de prétendues activités » ;

2° Les troisième, quatrième et dernier alinéas sont supprimés.

III. – L’article L. 615-5-2 du même code est ainsi modifié :

1° Le premier alinéa est ainsi modifié :

a) Après les mots : « la juridiction saisie » sont insérés les mots : « au fond ou en référé » ;

b) Les trois occurrences du mot : « contrefaisants » sont remplacées par les mots : « argués de contrefaçon » ;

c) Les mots : « des activités » sont remplacés par les mots : « de prétendues activités » ;

2° Les troisième, quatrième et dernier alinéas sont supprimés.

IV. – L’article L. 623-27-2 du même code est ainsi modifié :

1° Le premier alinéa est ainsi modifié :

a) Après les mots : « la juridiction saisie » sont insérés les mots : « au fond ou en référé » ;

b) Les deux occurrences du mot : « contrefaisants » sont remplacées par les mots : « argués de contrefaçon » ;

c) Les mots : « des activités » sont remplacés par les mots : « de prétendues activités » ;

2° Les troisième, quatrième et dernier alinéas sont supprimés.

V. – L’article L. 716-7-1 du même code est ainsi modifié :

1° Le premier alinéa est ainsi modifié :

a) Après les mots : « la juridiction saisie » sont insérés les mots : « au fond ou en référé » ;

b) Les deux occurrences du mot : « contrefaisants » sont remplacées par les mots : « argués de contrefaçon » ;

c) Les mots : « des activités » sont remplacés par les mots : « de prétendues activités » ;

2° Les troisième, quatrième et dernier alinéas sont supprimés.

VI. – L’article L. 722-5 du même code est ainsi modifié :

1° Le premier alinéa est ainsi modifié :

a) Après les mots : « la juridiction saisie » sont insérés les mots : « au fond ou en référé » ;

b) Après les mots : « de distribution des produits », il est inséré le mot : « contrefaisants » ;

c) Les mots : « produits portant atteinte à une indication géographique » sont remplacés par les mots : « produits argués de contrefaçon » et les mots : « activités portant atteinte à une indication géographique » sont remplacés par les mots : « de prétendues activités de contrefaçon » ;

2° Les troisième, quatrième et dernier alinéas sont supprimés. – (Adopté.)

CHAPITRE IV

Dispositions relatives au droit de la preuve

Article 3
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Article 5

Article 4

Le code de la propriété intellectuelle est ainsi modifié :

1° L’article L. 332-1 est ainsi rédigé :

« Art. L. 332-1. – Tout auteur d’une œuvre protégée par le livre Ier, ses ayants droit ou ses ayants cause peuvent agir en contrefaçon. À cet effet, ces personnes sont en droit de faire procéder par tous huissiers, assistés par des experts désignés par le demandeur, sur ordonnance rendue sur requête par la juridiction civile compétente, soit à la description détaillée, avec ou sans prélèvement d’échantillons, soit à la saisie réelle des œuvres prétendument contrefaisantes ainsi que de tout document s’y rapportant.

« La juridiction peut ordonner la description détaillée ou la saisie réelle des matériels et instruments utilisés pour produire ou distribuer illicitement les œuvres.

« À cet effet, la juridiction peut ordonner :

« 1° La saisie des exemplaires constituant une reproduction illicite d’une œuvre de l’esprit protégée par le livre Ier ou tout exemplaire, produit, appareil, dispositif, composant ou moyen portant atteinte aux mesures techniques et aux informations mentionnées respectivement aux articles L. 331-5 et L. 331-11 ;

« 2° La saisie, quels que soient le jour et l’heure, des exemplaires constituant une reproduction illicite de l’œuvre, déjà fabriqués ou en cours de fabrication, ou des exemplaires, produits, appareils, dispositifs, composants ou moyens, fabriqués ou en cours de fabrication, portant atteinte aux mesures techniques et aux informations mentionnées respectivement aux articles L. 331-5 et L. 331-11, des recettes réalisées, ainsi que des exemplaires illicitement utilisés ;

« 3° La saisie des recettes provenant de toute reproduction, représentation ou diffusion, par quelque moyen que ce soit, d’une œuvre de l’esprit, effectuée en violation des droits de l’auteur ou provenant d’une atteinte aux mesures techniques et aux informations mentionnées respectivement aux articles L. 331-5 et L. 331-11 ;

« 4° La saisie réelle des œuvres illicites ou produits soupçonnés de porter atteinte à un droit d’auteur, ou leur remise entre les mains d’un tiers afin d’empêcher leur introduction ou leur circulation dans les circuits commerciaux.

« La juridiction civile compétente peut également ordonner :

« 1° La suspension ou la prorogation des représentations ou des exécutions publiques en cours ou déjà annoncées ;

« 2° La suspension de toute fabrication en cours tendant à la reproduction illicite d’une œuvre ou à la réalisation d’une atteinte aux mesures techniques et aux informations mentionnées respectivement aux articles L. 331-5 et L. 331-11 ;

« Elle peut subordonner l’exécution des mesures qu’elle ordonne à la constitution par le demandeur de garanties destinées à assurer l’indemnisation éventuelle du défendeur si l’action en contrefaçon est ultérieurement jugée non fondée ou si la mainlevée de la saisie est prononcée.

« Elle peut, dans les mêmes formes, ordonner les mesures prévues au présent article à la demande des titulaires de droits voisins définis au livre II. » ;

2° Après l’article L. 332-1, il est inséré un article L. 332-1-1 ainsi rédigé :

« Art. L. 332-1-1. – La juridiction a le pouvoir d’ordonner d’office ou à la demande de toute personne ayant qualité pour agir en contrefaçon toutes les mesures d’instruction légalement admissibles, même si une saisie-contrefaçon n’a pas préalablement été ordonnée dans les conditions prévues à l’article L. 332-1. » ;

3° L’article L. 332-4 est ainsi rédigé :

« Art. L. 332-4. – La contrefaçon de logiciels et de bases de données peut être prouvée par tout moyen.

« À cet effet, toute personne ayant qualité pour agir en contrefaçon est en droit de faire procéder en tout lieu et par tous huissiers, assistés d’experts désignés par le demandeur, en vertu d’une ordonnance rendue sur requête par la juridiction civile compétente, soit à la description détaillée, avec ou sans prélèvement d’échantillons, soit à la saisie réelle du logiciel ou de la base de données prétendument contrefaisants ainsi que de tout document s’y rapportant. La saisie-description peut se concrétiser par une copie des logiciels ou des bases de données prétendument contrefaisants.

« La juridiction peut ordonner, aux mêmes fins probatoires, la description détaillée ou la saisie réelle des matériels et instruments utilisés pour produire ou distribuer un logiciel ou une base de données prétendument contrefaisants.

« Elle peut subordonner l’exécution des mesures qu’elle ordonne à la constitution par le demandeur de garanties destinées à assurer l’indemnisation éventuelle du défendeur si l’action en contrefaçon est ultérieurement jugée non fondée ou la saisie annulée.

« À défaut pour le demandeur, dans un délai fixé par voie réglementaire, soit de s’être pourvu au fond, par la voie civile ou pénale, soit d’avoir déposé une plainte devant le procureur de la République, la mainlevée de la saisie peut être ordonnée à la demande du saisi, sans préjudice des dommages et intérêts qui peuvent être réclamés. » ;

4° Au troisième alinéa de l’article L. 343-1, après les mots : « aux mêmes fins probatoires, » sont insérés les mots : « la description détaillée ou » ;

5° Après l’article L. 343-1, il est inséré un article L. 343-1-1 ainsi rédigé :

« Art. L. 343-1-1. – La juridiction a le pouvoir d’ordonner d’office ou à la demande de toute personne ayant qualité pour agir en contrefaçon toutes les mesures d’instruction légalement admissibles, même si une saisie-contrefaçon n’a pas préalablement été ordonnée dans les conditions prévues à l’article L. 343-1. » ;

6° Au troisième alinéa de l’article L. 521-4, après le mot : « probatoires, » sont insérés les mots : « la description détaillée ou » ;

7° Après l’article L. 521-4, il est inséré un article L. 521-4-1 ainsi rédigé :

« Art. L. 521-4-1. – La juridiction a le pouvoir d’ordonner d’office ou à la demande de toute personne ayant qualité pour agir en contrefaçon toutes les mesures d’instruction légalement admissibles, même si une saisie-contrefaçon n’a pas préalablement été ordonnée dans les conditions prévues à l’article L. 521-4. » ;

8° Au troisième alinéa de l’article L. 615-5, après le mot : « probatoires, » sont insérés les mots : « la description détaillée ou » ;

9° Après l’article L. 615-5-1, il est inséré un article L. 615-5-1-1 ainsi rédigé :

« Art. L. 615-5-1-1. – La juridiction a le pouvoir d’ordonner d’office ou à la demande de toute personne ayant qualité pour agir en contrefaçon toutes les mesures d’instruction légalement admissibles même si une saisie-contrefaçon n’a pas préalablement été ordonnée dans les conditions prévues à l’article L. 615-5. » ;

10° Au troisième alinéa de l’article L. 623-27-1, après le mot : « probatoires, » sont insérés les mots : « la description détaillée ou » ;

11° Après l’article L. 623-27-1, il est inséré un article L. 623-27-1-1 ainsi rédigé :

« Art. L. 623-27-1-1. – La juridiction a le pouvoir d’ordonner d’office ou à la demande de toute personne ayant qualité pour agir en contrefaçon toutes les mesures d’instruction légalement admissibles même si une saisie-contrefaçon n’a pas préalablement été ordonnée dans les conditions prévues à l’article L. 623-27-1. » ;

12° Au troisième alinéa de l’article L. 716-7, après le mot : « probatoires, » sont insérés les mots : « la description détaillée ou » ;

13° Après l’article L. 716-7, il est inséré un article L. 716-7-1 A ainsi rédigé :

« Art. L. 716-7-1 A. – La juridiction a le pouvoir d’ordonner d’office ou à la demande de toute personne ayant qualité pour agir en contrefaçon toutes les mesures d’instruction légalement admissibles même si une saisie-contrefaçon n’a pas préalablement été ordonnée dans les conditions prévues à l’article L. 716-7. »

14° Au troisième alinéa de l’article L. 722-4, après le mot : « probatoires, » sont insérés les mots : « la description détaillée ou » ;

15° Après l’article L. 722-4, il est inséré un article L. 722-4-1 ainsi rédigé :

« Art. L. 722-4-1. – La juridiction a le pouvoir d’ordonner d’office ou à la demande de toute personne ayant qualité pour agir en contrefaçon toutes les mesures d’instruction légalement admissibles même si une saisie-contrefaçon n’a pas préalablement été ordonnée dans les conditions prévues à l’article L. 722-4. » ;

M. le président. L'amendement n° 19, présenté par Mme Lipietz et les membres du groupe écologiste, est ainsi libellé :

Alinéa 3, seconde phrase

Compléter cette phrase par les mots :

, à l’exception des produits soupçonnés de contrefaçon d'un certificat d'obtention végétale

La parole est à M. Joël Labbé.

M. Joël Labbé. La contrefaçon dans le domaine des semences relevant d’un COV, un certificat d’obtention végétale, ne résulte que d'une atteinte volontaire.

Il ne doit être procédé à aucune saisie de douane sur demande du propriétaire du certificat sans que l’atteinte volontaire ait été démontrée. Or seul un juge peut statuer sur ce point.

Afin de considérer la situation particulière des semences sous COV, selon le code de la propriété intellectuelle, et empêcher un blocage d'une culture sans que la justice soit intervenue, il faut exclure les COV de la saisie et rester dans un cadre strictement judiciaire.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Michel Delebarre, rapporteur. Nous avons déjà évoqué ce cas lors de la discussion des premiers amendements. La position de la commission reste la même : nous souhaitons le retrait de cet amendement, sinon nous y serons défavorables.

La saisie-contrefaçon est un moyen d’obtenir des preuves en cas de litige de contrefaçon. Cependant, ce n’est pas la procédure qui crée le fait et, in fine, c’est toujours au juge qu’il revient de statuer.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Nicole Bricq, ministre. Je suis du même avis que le rapporteur. Je crains vraiment que cet amendement ne soit contre-productif dans la mesure où il ouvrirait la voie à la contrefaçon…

M. Jean-Jacques Hyest. De toutes les obtentions végétales !

Mme Nicole Bricq, ministre. … généralisée.

Or tel n’est bien évidemment pas le but des auteurs de cette proposition de loi !

Le Gouvernement souhaite donc également le retrait de cet amendement.

M. le président. Monsieur Labbé, l'amendement n° 19 est-il maintenu ?

M. Joël Labbé. Dans les cas précédents, j’avais accepté de retirer mes amendements, mais, en l’espèce, nous estimons que cela va mieux en l’écrivant !

Je maintiens donc mon amendement.

M. le président. La parole est à M. Jean-Jacques Hyest, pour explication de vote.

M. Jean-Jacques Hyest. Franchement, je n’y comprends plus rien ! C’est au juge qu’il revient de trancher sur le point de savoir s’il y a, ou non, contrefaçon, et ce dans tous les cas, qu’il s’agisse d’obtentions végétales, de brevets, de marques…

Mon cher collègue, je vais vous expliquer les conséquences qu’entraînerait l’adoption de votre amendement. Imaginons que je sois obtenteur de variétés de rosiers.

M. René Garrec. « Mme Meilland » !

M. Jean-Jacques Hyest. Nous avons en France de grandes maisons – les meilleures du monde ! – qui sont obtentrices. Le président de la commission des lois est certainement d’autant plus sensible à cette question que la région de Bellegarde, dans le Loiret, en compte un certain nombre. Mais il y a des rosiéristes également en Seine-et-Marne, et ailleurs.

M. Jean-Pierre Sueur, président de la commission des lois. Les rosiéristes font un travail remarquable !

M. Jean-Jacques Hyest. Si cet amendement était adopté, ces obtenteurs ne seraient plus protégés. Il ne pourrait plus y avoir de saisie, alors que nous connaissons l’importance de la contrefaçon non seulement en France, mais dans d’autres pays. Nos exportations de plantes de qualité en pâtiraient.

Pour ces raisons, je vous incite, mon cher collègue, à retirer votre amendement, qui n’a aucun sens.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 19.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. L'amendement n° 32, présenté par M. Delebarre, au nom de la commission, est ainsi libellé :

I. - Alinéa 3

Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée :

L’ordonnance peut autoriser la saisie réelle de tout document se rapportant aux œuvres prétendument contrefaisantes en l’absence de celles-ci.

II. – Après l’alinéa 25

Insérer deux alinéas ainsi rédigés :

bis Le deuxième alinéa de l’article L. 521-4 est complété par une phrase ainsi rédigée :

« L’ordonnance peut autoriser la saisie réelle de tout document se rapportant aux objets prétendus contrefaisants en l’absence de ceux-ci. »

III. – Après l’alinéa 28

Insérer deux alinéas ainsi rédigés :

bis Le deuxième alinéa de l’article L. 615-5 est complété par une phrase ainsi rédigée :

« L’ordonnance peut autoriser la saisie réelle de tout document se rapportant aux produits ou procédés prétendus contrefaisants en l’absence de ceux-ci. »

IV. – Après l’alinéa 31

Insérer deux alinéas ainsi rédigés :

bis Le deuxième alinéa de l’article L. 623-27-1 est complété par une phrase ainsi rédigée :

« L’ordonnance peut autoriser la saisie réelle de tout document se rapportant aux objets prétendus contrefaisants en l’absence de ceux-ci. »

V. – Après l’alinéa 34

Insérer deux alinéas ainsi rédigés :

11° bis Le deuxième alinéa de l’article L. 716-7 est complété par une phrase ainsi rédigée :

« L’ordonnance peut autoriser la saisie réelle de tout document se rapportant aux produits et services prétendus contrefaisants en l’absence de ceux-ci. »

VI. – Après l’alinéa 37

Insérer deux alinéas ainsi rédigés :

13° bis Le deuxième alinéa de l’article L. 722-4 est complété par une phrase ainsi rédigée :

« L’ordonnance peut autoriser la saisie réelle de tout document se rapportant aux objets prétendus contrefaisants en l’absence de ceux-ci. »

La parole est à M. le rapporteur.

M. Michel Delebarre, rapporteur. Cet amendement vise à renforcer l’efficacité de la procédure de saisie-contrefaçon en permettant la saisie de documents en l’absence des objets prétendument contrefaisants sur le lieu de la saisie, à l’appréciation du juge, lorsque des indices suffisants existent.

Il s’agit de clarifier les choses, alors que la jurisprudence est restrictive sur ce point. Actuellement, si l’on ne trouve pas d’objets lors d’une saisie-contrefaçon, il faut tout abandonner. Nous avons la conviction que les services peuvent recueillir des éléments qui, même s’ils ne sont pas les objets contrefaisants, viendront enrichir le dossier d’accusation en matière de contrefaçon.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Nicole Bricq, ministre. Favorable !

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 32.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. L'amendement n° 28, présenté par Mme Lipietz et les membres du groupe écologiste, est ainsi libellé :

Après l'alinéa 3

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

« Lorsque le défendeur est une personne publique, les offices mentionnés par le présent article sont exercées par le président du tribunal administratif saisi en référé conservatoire, lequel peut ordonner toute mesure compatible avec les principes du droit public.

La parole est à Mme Hélène Lipietz.

Mme Hélène Lipietz. Mon explication sera courte, car la motivation doctrinale de cet amendement est suffisamment explicitée dans son objet. Une telle mesure me paraît vraiment indispensable, sauf à dire que nous ne voulons plus de notre dualité des ordres de juridiction.

La juridiction administrative a une connaissance extrêmement fine des contrats administratifs. Or, faut-il le rappeler ici, l’administration, État, collectivités territoriales et établissements publics, a un poids économique important avec la passation des marchés publics.

Il est donc absolument nécessaire que le juge administratif conserve ses pouvoirs en matière de référé conservatoire.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Michel Delebarre, rapporteur. Défavorable !

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Nicole Bricq, ministre. Défavorable !

Mme Hélène Lipietz. Je maintiens l’amendement !

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 28.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'article 4, modifié.

(L'article 4 est adopté.)

Article 4
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Article 6

Article 5

Le code de la propriété intellectuelle est ainsi modifié :

1° L’article L. 332-3 est ainsi rédigé :

« Art. L. 332-3. – À défaut pour le saisissant, dans un délai fixé par voie réglementaire, soit de s’être pourvu au fond, par la voie civile ou pénale, soit d’avoir déposé une plainte devant le procureur de la République, la mainlevée de la saisie réelle peut être ordonnée à la demande du saisi ou du tiers saisi, sans préjudice des dommages et intérêts qui peuvent être réclamés. » ;

2° Le dernier alinéa de l’article L. 521-4 est ainsi rédigé :

« À défaut pour le demandeur, dans un délai fixé par voie réglementaire, soit de s’être pourvu au fond, par la voie civile ou pénale, soit d’avoir déposé une plainte devant le procureur de la République, la mainlevée de la saisie réelle peut être ordonnée à la demande du saisi, sans préjudice des dommages et intérêts qui peuvent être réclamés. » ;

3° Le dernier alinéa de l’article L. 615-5 est ainsi rédigé :

« À défaut pour le demandeur, dans un délai fixé par voie réglementaire, soit de s’être pourvu au fond, par la voie civile ou pénale, soit d’avoir déposé une plainte devant le procureur de la République, la mainlevée de la saisie réelle peut être ordonnée à la demande du saisi, sans préjudice des dommages et intérêts qui peuvent être réclamés. » ;

4° Le dernier alinéa de l’article L. 623-27-1 est ainsi rédigé :

« À défaut pour le demandeur, dans un délai fixé par voie réglementaire, soit de s’être pourvu au fond, par la voie civile ou pénale, soit d’avoir déposé une plainte devant le procureur de la République, la mainlevée de la saisie réelle peut être ordonnée à la demande du saisi, sans préjudice des dommages et intérêts qui peuvent être réclamés. » ;

5° Le dernier alinéa de l’article L. 716-7 est ainsi rédigé :

« À défaut pour le demandeur, dans un délai fixé par voie réglementaire, soit de s’être pourvu au fond, par la voie civile ou pénale, soit d’avoir déposé une plainte devant le procureur de la République, la mainlevée de la saisie réelle peut être ordonnée à la demande du saisi, sans préjudice des dommages et intérêts qui peuvent être réclamés. » ;

6° Le dernier alinéa de l’article L. 722-4 est ainsi rédigé :

« À défaut pour le demandeur, dans un délai fixé par voie réglementaire, soit de s’être pourvu au fond, par la voie civile ou pénale, soit d’avoir déposé une plainte devant le procureur de la République, la mainlevée de la saisie réelle peut être ordonnée à la demande du saisi, sans préjudice des dommages et intérêts qui peuvent être réclamés. » – (Adopté.)

CHAPITRE V

Renforcement des moyens d’action des douanes

Article 5
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Article 7 (Texte non modifié par la commission)

Article 6

Le code de la propriété intellectuelle est ainsi modifié :

1° Au troisième alinéa de l’article L. 335-2, les mots : « et l’importation » sont remplacés par les mots : « , l’importation, le transbordement ou la détention aux fins précitées » ;

2° Au deuxième alinéa de l’article L. 335-4, les mots : « Est punie » sont remplacés par les mots : « Sont punis » et les mots : « toute importation ou exportation » sont remplacés par les mots : « l’importation, l’exportation, le transbordement ou la détention aux fins précitées » ;

3° À l’article L. 513-4, après les mots : « l’exportation, » sont insérés les mots : « le transbordement, » ;

4° L’article L. 613-3 est ainsi modifié :

a) Au a, les mots : « ou bien l’importation » sont remplacés par les mots : « , l’importation, l’exportation, le transbordement, » ;

b) Au c, les mots : « ou l’utilisation ou bien l’importation » sont remplacés par les mots : « , l’utilisation, l’importation, l’exportation, le transbordement » ;

5° L’article L. 623-4 est complété par un V ainsi rédigé :

« V. – Sont interdits, à défaut de consentement du titulaire du certificat d’obtention végétale la production, l’offre, la vente, la mise sur le marché, l’importation, l’exportation, le transbordement, l’utilisation ou la détention à ces fins du matériel de reproduction ou de multiplication de la variété protégée. » ;

6° L’article L. 722-1 est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Sont interdits la production, l’offre, la vente, la mise sur le marché, l’importation, l’exportation, le transbordement, l’utilisation ou la détention à ces fins, de biens dont la présentation laisse croire ou est de nature à faire croire qu’ils bénéficient d’une indication géographique définie par le présent article. »

M. le président. L'amendement n° 9, présenté par Mme Bonnefoy et les membres du groupe socialiste et apparentés, est ainsi libellé :

Alinéa 9

Rédiger ainsi cet alinéa :

« V. – Sous réserve des dispositions de l’article L. 623-24-1, sont interdits, à défaut de consentement du titulaire du certificat d’obtention végétale, la production, l’offre, la vente, la mise sur le marché, l’importation, l’exportation, le transbordement, l’utilisation ou la détention à ces fins, du matériel de reproduction ou de multiplication de la variété protégée. » ;

La parole est à Mme Nicole Bonnefoy.

Mme Nicole Bonnefoy. L’objet de cet amendement a déjà été largement commenté par Mme la ministre et par le président de la commission des lois.

Il s’agit de réaffirmer et de préciser le droit en vigueur, qui n’est pas remis en cause par cet amendement relatif aux semences fermières.

M. Roland Courteau. Très bien !

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Michel Delebarre, rapporteur. L’avis est favorable. L’amendement apporte un certain nombre de précisions.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Nicole Bricq, ministre. Même avis !

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 9.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'article 6, modifié.

(L'article 6 est adopté.)

Article 6
Dossier législatif : proposition de loi tendant à renforcer la lutte contre la contrefaçon
Article 8

Article 7

(Non modifié)

I. – Le titre III du livre III de la première partie du code de la propriété intellectuelle est ainsi modifié :

1° L’article L. 335-10 est abrogé ;

2° Après le chapitre V, il est inséré un chapitre V bis ainsi rédigé :

« CHAPITRE V BIS

« La retenue

« Art. L. 335-10. – En dehors des cas prévus par la réglementation communautaire en vigueur, l’administration des douanes peut, sur demande écrite du titulaire d’un droit d’auteur ou d’un droit voisin, assortie des justifications de son droit, retenir dans le cadre de ses contrôles les marchandises que celui-ci prétend constituer une contrefaçon.

« Le procureur de la République, le demandeur ainsi que le déclarant ou le détenteur des marchandises sont informés sans délai, par les services douaniers, de la retenue à laquelle ces derniers ont procédé.

« Lors de l’information mentionnée au deuxième alinéa, la nature et la quantité réelle ou estimée des marchandises sont communiquées au titulaire du droit d’auteur ou du droit voisin, par dérogation à l’article 59 bis du code des douanes.

« La mesure de retenue est levée de plein droit à défaut, pour le demandeur, dans le délai de dix jours ouvrables ou de trois jours ouvrables s’il s’agit de denrées périssables, à compter de la notification de la retenue des marchandises, de justifier auprès des services douaniers soit de mesures conservatoires décidées par la juridiction civile compétente, soit de s’être pourvu par la voie civile ou la voie correctionnelle et d’avoir constitué les garanties destinées à l’indemnisation éventuelle du détenteur des marchandises au cas où la contrefaçon ne serait pas ultérieurement reconnue, soit d’avoir déposé une plainte auprès du procureur de la République.

« Les frais liés à la mesure de retenue ou aux mesures conservatoires prononcées par la juridiction civile compétente sont à la charge du demandeur.

« Aux fins de l’engagement des actions en justice mentionnées au quatrième alinéa, le demandeur peut obtenir de l’administration des douanes communication des nom et adresse de l’expéditeur, de l’importateur, du destinataire et du déclarant des marchandises retenues ou de leur détenteur, ainsi que de leur quantité, leur origine et leur provenance par dérogation à l’article 59 bis du code des douanes précité.

« La retenue mentionnée au premier alinéa ne porte pas :

« - sur les marchandises de statut communautaire, légalement fabriquées ou mises en libre pratique dans un État membre de l’Union européenne et destinées, après avoir emprunté le territoire douanier tel que défini à l’article 1er du code des douanes, à être mises sur le marché d’un autre État membre de l’Union européenne pour y être légalement commercialisées ;

« - sur les marchandises de statut communautaire, légalement fabriquées ou légalement mises en libre pratique dans un autre État membre de l’Union européenne, dans lequel elles ont été placées sous le régime du transit et qui sont destinées, après avoir transité sur le territoire douanier tel que défini à l’article 1er du code des douanes, à être exportées vers un État non membre de l’Union européenne.

« Art. L. 335-11. – En l’absence de demande écrite du titulaire d’un droit d’auteur ou d’un droit voisin et en dehors des cas prévus par la réglementation communautaire en vigueur, l’administration des douanes peut, dans le cadre de ses contrôles, retenir une marchandise susceptible de porter atteinte à un droit d’auteur ou à un droit voisin.

« Cette retenue est immédiatement notifiée au titulaire du droit d’auteur ou du droit voisin. Le procureur de la République est également informé de ladite mesure.

« Lors de la notification mentionnée au deuxième alinéa, la nature et la quantité réelle ou estimée des marchandises est communiquée au titulaire du droit d’auteur ou du droit voisin, par dérogation à l’article 59 bis du code des douanes.

« La mesure de retenue est levée de plein droit si l’administration des douanes n’a pas reçu du titulaire du droit d’auteur ou du droit voisin, dans un délai de trois jours ouvrables à compter de la notification de la retenue visée au deuxième alinéa du présent article, la demande prévue à l’article L. 335-10 du présent code.

« Si la demande a été reçue conformément à l’alinéa précédent, les délais de dix jours ouvrables ou de trois jours ouvrables mentionnés au quatrième alinéa de l’article L. 335-10 commencent à courir à compter de cette réception.

« Art. L. 335-12. – I. – Lorsque la retenue portant sur des marchandises soupçonnées de constituer une contrefaçon d’un droit d’auteur ou d’un droit voisin, prévue par la réglementation communautaire en vigueur, est mise en œuvre avant qu’une demande d’intervention du titulaire d’un droit d’auteur ou d’un droit voisin ait été déposée ou acceptée, les agents des douanes peuvent, par dérogation à l’article 59 bis du code des douanes, informer ce titulaire de la mise en œuvre de cette mesure. Ils peuvent également lui communiquer des informations portant sur la quantité des marchandises et leur nature.

« Lorsque la retenue portant sur des marchandises soupçonnées de constituer une contrefaçon d’un droit d’auteur ou d’un droit voisin, prévue par la réglementation communautaire en vigueur, est mise en œuvre après qu’une demande d’intervention du titulaire d’un droit d’auteur ou d’un droit voisin a été acceptée, les agents des douanes peuvent également communiquer à ce titulaire les informations prévues par cette réglementation communautaire, nécessaires pour déterminer s’il y a eu violation de son droit.

« II. – Les frais générés par la mise en œuvre d’une retenue prévue par la réglementation communautaire en vigueur sont à la charge du titulaire du droit d’auteur ou du droit voisin.

« Art. L. 335-13. – Pendant le délai de la retenue mentionnée aux articles L. 335-10 à L. 335-12, le titulaire du droit d’auteur ou du droit voisin peut, à sa demande ou à la demande de l’administration des douanes, inspecter les marchandises retenues.

« Lors du contrôle des marchandises mises en retenue, l’administration des douanes peut prélever des échantillons. À la demande du titulaire du droit d’auteur ou du droit voisin, ces échantillons peuvent lui être remis aux seules fins d’analyse et en vue de faciliter les actions qu’il peut être amené à engager par la voie civile ou pénale.

« Art. L. 335-14. – En vue de prononcer les mesures prévues aux articles L. 335-10 à L. 335-13, les agents des douanes appliquent les pouvoirs qui leur sont dévolus par le code des douanes.

« Art. L. 335-15. – Les conditions d’application des mesures prévues aux articles L. 335-10 à L. 335-14 sont définies par décret en Conseil d’État. »

II. – Le titre II du livre V de la deuxième partie du même code est ainsi modifié :

1° Après le chapitre Ier, il est inséré un chapitre I bis intitulé : « La retenue » comprenant les articles L. 521-14 à L. 521-19 ;

2° Au sixième alinéa de l’article L. 521-14, après les mots : « du destinataire » sont insérés les mots : « et du déclarant » ;

3° L’article L. 521-15 est ainsi modifié :

a) Le dernier alinéa est ainsi rédigé :

« La mesure de retenue est levée de plein droit si l’administration des douanes n’a pas reçu du propriétaire du dessin ou du modèle déposé ou du bénéficiaire d’un droit exclusif d’exploitation, dans un délai de trois jours ouvrables à compter de la notification de la retenue mentionnée au deuxième alinéa du présent article, la demande prévue à l’article L. 521-14 du présent code. » ;

b) Est ajouté un alinéa ainsi rédigé :

« Si la demande a été reçue conformément à l’alinéa précédent, les délais de dix jours ouvrables ou de trois jours ouvrables mentionnés au quatrième alinéa de l’article L. 521-14 commencent à courir à compter de cette réception. » ;

4° À l’article L. 522-1, les mots : « Les dispositions du chapitre Ier » sont remplacés par les mots : « Les chapitres Ier et I bis ».

III. – Après le chapitre IV du titre Ier du livre VI de la deuxième partie du même code, il est inséré un chapitre IV bis ainsi rédigé :

« CHAPITRE IV BIS

« La retenue

« Art. L. 614-32. – En dehors des cas prévus par la réglementation communautaire en vigueur, l’administration des douanes peut, sur demande écrite du propriétaire d’un brevet ou d’un certificat complémentaire de protection rattaché à un brevet ou d’une personne habilitée à exploiter l’invention brevetée ou objet du certificat complémentaire d’exploitation, assortie des justifications de son droit, retenir dans le cadre de ses contrôles les marchandises que celui-ci prétend constituer une contrefaçon.

« Le procureur de la République, le demandeur ainsi que le déclarant ou le détenteur des marchandises sont informés sans délai, par les services douaniers, de la retenue à laquelle ces derniers ont procédé.

« Lors de l’information mentionnée au deuxième alinéa, la nature et la quantité réelle ou estimée des marchandises sont communiquées au propriétaire du brevet ou du certificat complémentaire de protection rattaché à un brevet ou à la personne habilitée à exploiter l’invention brevetée ou objet du certificat complémentaire d’exploitation, par dérogation à l’article 59 bis du code des douanes.

« La mesure de retenue est levée de plein droit à défaut, pour le demandeur, dans le délai de dix jours ouvrables ou de trois jours ouvrables s’il s’agit de denrées périssables, à compter de la notification de la retenue des marchandises, de justifier auprès des services douaniers, soit de mesures conservatoires décidées par la juridiction civile compétente, soit de s’être pourvu par la voie civile ou la voie correctionnelle et d’avoir constitué les garanties destinées à l’indemnisation éventuelle du détenteur des marchandises au cas où la contrefaçon ne serait pas ultérieurement reconnue, soit d’avoir déposé une plainte auprès du procureur de la République.

« Les frais liés à la mesure de retenue ou aux mesures conservatoires prononcées par la juridiction civile compétente sont à la charge du demandeur.

« Aux fins de l’engagement des actions en justice mentionnées au quatrième alinéa, le demandeur peut obtenir de l’administration des douanes communication des nom et adresse de l’expéditeur, de l’importateur, du destinataire et du déclarant des marchandises retenues ou de leur détenteur, ainsi que de leur quantité, leur origine et leur provenance par dérogation à l’article 59 bis du code des douanes.

« La retenue mentionnée au premier alinéa ne porte pas :

« - sur les marchandises de statut communautaire, légalement fabriquées ou mises en libre pratique dans un État membre de l’Union européenne et destinées, après avoir emprunté le territoire douanier tel que défini à l’article 1er du code des douanes, à être mises sur le marché d’un autre État membre de l’Union européenne pour y être légalement commercialisées ;

« - sur les marchandises de statut communautaire, légalement fabriquées ou légalement mises en libre pratique dans un autre État membre de l’Union européenne, dans lequel elles ont été placées sous le régime du transit et qui sont destinées, après avoir transité sur le territoire douanier tel que défini à l’article 1er du code des douanes, à être exportées vers un État non membre de l’Union européenne.

« Art. L. 614-33. – En l’absence de demande écrite du propriétaire d’un brevet ou d’un certificat complémentaire de protection rattaché à un brevet ou d’une personne habilitée à exploiter l’invention brevetée ou objet du certificat complémentaire d’exploitation et en dehors des cas prévus par la réglementation communautaire en vigueur, l’administration des douanes peut, dans le cadre de ses contrôles, retenir une marchandise susceptible de porter atteinte à un brevet ou à un certificat complémentaire d’exploitation.

« Cette retenue est immédiatement notifiée au propriétaire du brevet ou du certificat complémentaire de protection rattaché à un brevet ou à la personne habilitée à exploiter l’invention brevetée ou objet du certificat complémentaire d’exploitation. Le procureur de la République est également informé de ladite mesure.

« Lors de la notification mentionnée au deuxième alinéa, la nature et la quantité réelle ou estimée des marchandises est communiquée au propriétaire du brevet ou du certificat complémentaire de protection rattaché à un brevet ou à la personne habilitée à exploiter l’invention brevetée ou objet du certificat complémentaire d’exploitation, par dérogation à l’article 59 bis du code des douanes.

« La mesure de retenue est levée de plein droit si l’administration des douanes n’a pas reçu du propriétaire du brevet ou du certificat complémentaire de protection rattaché à un brevet ou de la personne habilitée à exploiter l’invention brevetée ou objet du certificat complémentaire d’exploitation, dans un délai de trois jours ouvrables à compter de la notification de la retenue mentionnée au deuxième alinéa du présent article, la demande prévue par l’article L. 614-32 du présent code.

« Si la demande a été reçue conformément à l’alinéa précédent, les délais de dix jours ouvrables ou de trois jours ouvrables mentionnés au quatrième alinéa de l’article L. 614-32 commencent à courir à compter de cette réception.

« Art. L. 614-34. – I. – Lorsque la retenue portant sur des marchandises soupçonnées de constituer une contrefaçon d’un brevet ou d’un certificat complémentaire d’exploitation prévue par la réglementation communautaire en vigueur, est mise en œuvre avant qu’une demande d’intervention du propriétaire d’un brevet ou d’un certificat complémentaire de protection rattaché à un brevet ou d’une personne habilitée à exploiter l’invention brevetée ou objet du certificat complémentaire d’exploitation, ait été déposée ou acceptée, les agents des douanes peuvent, par dérogation à l’article 59 bis du code des douanes, informer ce propriétaire ou ce bénéficiaire du droit exclusif d’exploitation de la mise en œuvre de cette mesure. Ils peuvent également lui communiquer des informations portant sur la quantité des marchandises et leur nature.

« Lorsque la retenue portant sur des marchandises soupçonnées de constituer une contrefaçon d’un brevet ou d’un certificat complémentaire d’exploitation, prévue par la réglementation communautaire en vigueur, est mise en œuvre après qu’une demande d’intervention du propriétaire d’un brevet ou d’un certificat complémentaire de protection rattaché à un brevet ou d’une personne habilitée à exploiter l’invention brevetée ou objet du certificat complémentaire d’exploitation, a été acceptée, les agents des douanes peuvent également communiquer à ce propriétaire ou à cette personne habilitée, les informations prévues par cette réglementation communautaire, nécessaires pour déterminer s’il y a eu violation de son droit.

« II. – Les frais générés par la mise en œuvre d’une retenue prévue par la réglementation communautaire en vigueur sont à la charge du propriétaire du brevet ou du certificat complémentaire de protection rattaché à un brevet ou de la personne habilitée à exploiter l’invention brevetée ou objet du certificat complémentaire d’exploitation.

« Art. L. 614-35. – Pendant le délai de la retenue mentionnée aux articles L. 614-32 à L. 614-34, le propriétaire du brevet ou du certificat complémentaire de protection rattaché à un brevet ou la personne habilitée à exploiter l’invention brevetée ou objet du certificat complémentaire d’exploitation peut, à sa demande ou à la demande de l’administration des douanes, inspecter les marchandises retenues.

« Lors du contrôle des marchandises mises en retenue, l’administration des douanes peut prélever des échantillons. À la demande du propriétaire du brevet ou du certificat complémentaire de protection rattaché à un brevet ou de la personne habilitée à exploiter l’invention brevetée ou objet du certificat complémentaire d’exploitation, ces échantillons peuvent lui être remis aux seules fins d’analyse et en vue de faciliter les actions qu’il peut être amené à engager par la voie civile ou pénale.

« Art. L. 614-36. – En vue de prononcer les mesures prévues aux articles L. 614-32 à L. 614-35, les agents des douanes appliquent les pouvoirs qui leur sont dévolus par le code des douanes.

« Art. L. 614-37. – Les conditions d’application des mesures prévues aux articles L. 614-32 à L. 614-36 sont définies par décret en Conseil d’État. »

IV. – Le chapitre III du titre II du livre VI de la deuxième partie du même code est complété par une section 4 ainsi rédigée :

« SECTION 4

« La retenue

« Art. L. 623-36. – En dehors des cas prévus par la réglementation communautaire en vigueur, l’administration des douanes peut, sur demande écrite du titulaire d’un certificat d’obtention végétale, assortie des justifications de son droit, retenir dans le cadre de ses contrôles les marchandises que celui-ci prétend constituer une contrefaçon.

« Le procureur de la République, le demandeur ainsi que le déclarant ou le détenteur des marchandises sont informés sans délai, par les services douaniers, de la retenue à laquelle ces derniers ont procédé.

« Lors de l’information mentionnée au deuxième alinéa, la nature et la quantité réelle ou estimée des marchandises sont communiquées au titulaire du certificat d’obtention végétale, par dérogation à l’article 59 bis du code des douanes.

« La mesure de retenue est levée de plein droit à défaut, pour le demandeur, dans le délai de dix jours ouvrables ou de trois jours ouvrables s’il s’agit de denrées périssables, à compter de la notification de la retenue des marchandises, de justifier auprès des services douaniers, soit de mesures conservatoires décidées par la juridiction civile compétente, soit de s’être pourvu par la voie civile ou la voie correctionnelle et d’avoir constitué les garanties destinées à l’indemnisation éventuelle du détenteur des marchandises au cas où la contrefaçon ne serait pas ultérieurement reconnue, soit d’avoir déposé une plainte auprès du procureur de la République.

« Les frais liés à la mesure de retenue ou aux mesures conservatoires prononcées par la juridiction civile compétente sont à la charge du demandeur.

« Aux fins de l’engagement des actions en justice mentionnées au quatrième alinéa, le demandeur peut obtenir de l’administration des douanes communication des nom et adresse de l’expéditeur, de l’importateur, du destinataire et du déclarant des marchandises retenues ou de leur détenteur, ainsi que de leur quantité, leur origine et leur provenance par dérogation à l’article 59 bis du code des douanes.

« La retenue mentionnée au premier alinéa ne porte pas :

« - sur les marchandises de statut communautaire, légalement fabriquées ou mises en libre pratique dans un État membre de l’Union européenne et destinées, après avoir emprunté le territoire douanier tel que défini à l’article 1er du code des douanes, à être mises sur le marché d’un autre État membre de l’Union européenne pour y être légalement commercialisées ;

« - sur les marchandises de statut communautaire, légalement fabriquées ou légalement mises en libre pratique dans un autre État membre de l’Union européenne, dans lequel elles ont été placées sous le régime du transit et qui sont destinées, après avoir transité sur le territoire douanier tel que défini à l’article 1er du code des douanes, à être exportées vers un État non membre de l’Union européenne.

« Art. L. 623-37. – En l’absence de demande écrite du titulaire du certificat d’obtention végétale et en dehors des cas prévus par la réglementation communautaire en vigueur, l’administration des douanes peut, dans le cadre de ses contrôles, retenir une marchandise susceptible de porter atteinte à un certificat d’obtention végétale.

« Cette retenue est immédiatement notifiée au titulaire du certificat d’obtention végétale. Le procureur de la République est également informé de ladite mesure.

« Lors de la notification mentionnée au deuxième alinéa, la nature et la quantité réelle ou estimée des marchandises est communiquée au titulaire du certificat d’obtention végétale, par dérogation à l’article 59 bis du code des douanes.

« La mesure de retenue est levée de plein droit si l’administration des douanes n’a pas reçu du titulaire du certificat d’obtention végétale, dans un délai de trois jours ouvrables à compter de la notification de la retenue visée au deuxième alinéa du présent article, la demande prévue à l’article L. 623-36 du présent code.

« Si la demande a été reçue conformément à l’alinéa précédent, les délais de dix jours ouvrables ou de trois jours ouvrables mentionnés au quatrième alinéa de l’article L. 623-36 commencent à courir à compter de cette réception.

« Art. L. 623-38. – I. – Lorsque la retenue portant sur des marchandises soupçonnées de constituer une contrefaçon d’un certificat d’obtention végétale, prévue par la réglementation communautaire en vigueur, est mise en œuvre avant qu’une demande d’intervention du titulaire du certificat d’obtention végétale ait été déposée ou acceptée, les agents des douanes peuvent, par dérogation à l’article 59 bis du code des douanes, informer ce titulaire de la mise en œuvre de cette mesure. Ils peuvent également lui communiquer des informations portant sur la quantité des marchandises et leur nature.

« Lorsque la retenue portant sur des marchandises soupçonnées de constituer une contrefaçon d’un certificat d’obtention végétale, prévue par la réglementation communautaire en vigueur, est mise en œuvre après qu’une demande d’intervention du titulaire du certificat d’obtention végétale, a été acceptée, les agents des douanes peuvent également communiquer à ce titulaire, les informations prévues par cette réglementation communautaire, nécessaires pour déterminer s’il y a eu violation de son droit.

« II. – Les frais générés par la mise en œuvre d’une retenue prévue par la réglementation communautaire en vigueur sont à la charge du titulaire du certificat d’obtention végétale.

« Art. L. 623-39. – Pendant le délai de la retenue mentionnée aux articles L. 623-36 à L. 623-38, le titulaire du certificat d’obtention végétale peut, à sa demande ou à la demande de l’administration des douanes, inspecter les marchandises retenues.

« Lors du contrôle des marchandises mises en retenue, l’administration des douanes peut prélever des échantillons. À la demande du titulaire du certificat d’obtention végétale, ces échantillons peuvent lui être remis aux seules fins d’analyse et en vue de faciliter les actions qu’il peut être amené à engager par la voie civile ou pénale.

« Art. L. 623-40. – En vue de prononcer les mesures prévues aux articles L. 623-36 à L. 623-39, les agents des douanes appliquent les pouvoirs qui leur sont dévolus par le code des douanes.

« Art. L. 623-41. – Les conditions d’application des mesures prévues aux articles L. 623-36 à L. 623-40 sont définies par décret en Conseil d’État. »

V. – Le titre Ier du livre VII de la deuxième partie du même code est ainsi modifié :

1° Après le chapitre VI, il est inséré un chapitre VI bis intitulé : « La retenue » comprenant les articles L. 716-8 à L. 716-16 ;

2° Au sixième alinéa de l’article L. 716-8, après les mots : « du destinataire » sont insérés les mots : « et du déclarant » ;

3° L’article L. 716-8-1 est ainsi modifié :

a) Le dernier alinéa est ainsi rédigé :

« La mesure de retenue est levée de plein droit si l’administration des douanes n’a pas reçu du propriétaire de la marque enregistrée ou du bénéficiaire du droit exclusif d’exploitation, dans un délai de trois jours ouvrables à compter de la notification de la retenue mentionnée au deuxième alinéa du présent article, la demande prévue à l’article L. 716-8 du présent code. » ;

b) Est ajouté un alinéa ainsi rédigé :

« Si la demande a été reçue conformément à l’alinéa précédent, les délais de dix jours ouvrables ou de trois jours ouvrables mentionnés au quatrième alinéa de l’article L. 716-8 commencent à courir à compter de cette réception. »

VI. – Le chapitre II du titre II du livre VII de la deuxième partie du même code est ainsi modifié :

1° La section unique devient une section 1 ;

2° Est ajoutée une section 2 ainsi rédigée :

« SECTION 2

« La retenue

« Art. L. 722-9. – En dehors des cas prévus par la réglementation communautaire en vigueur, l’administration des douanes peut, sur demande écrite d’une personne autorisée à utiliser une indication géographique ou de tout organisme de défense des indications géographiques, assortie des justifications de son droit, retenir dans le cadre de ses contrôles les marchandises que celui-ci prétend constituer une contrefaçon.

« Le procureur de la République, le demandeur ainsi que le déclarant ou le détenteur des marchandises sont informés sans délai, par les services douaniers, de la retenue à laquelle ces derniers ont procédé.

« Lors de l’information mentionnée au deuxième alinéa, la nature et la quantité réelle ou estimée des marchandises sont communiquées à la personne autorisée à utiliser une indication géographique ou à l’organisme de défense des indications géographiques, par dérogation à l’article 59 bis du code des douanes.

« La mesure de retenue est levée de plein droit à défaut, pour le demandeur, dans le délai de dix jours ouvrables ou de trois jours ouvrables s’il s’agit de denrées périssables, à compter de la notification de la retenue des marchandises, de justifier auprès des services douaniers, soit de mesures conservatoires décidées par la juridiction civile compétente, soit de s’être pourvu par la voie civile ou la voie correctionnelle et d’avoir constitué les garanties destinées à l’indemnisation éventuelle du détenteur des marchandises au cas où la contrefaçon ne serait pas ultérieurement reconnue, soit d’avoir déposé une plainte auprès du procureur de la République.

« Les frais liés à la mesure de retenue ou aux mesures conservatoires prononcées par la juridiction civile compétente sont à la charge du demandeur.

« Aux fins de l’engagement des actions en justice visées au quatrième alinéa, le demandeur peut obtenir de l’administration des douanes communication des nom et adresse de l’expéditeur, de l’importateur, du destinataire et du déclarant des marchandises retenues ou de leur détenteur, ainsi que de leur quantité, leur origine et leur provenance par dérogation à l’article 59 bis du code des douanes.

« La retenue mentionnée au premier alinéa ne porte pas :

« - sur les marchandises de statut communautaire, légalement fabriquées ou mises en libre pratique dans un État membre de l’Union européenne et destinées, après avoir emprunté le territoire douanier tel que défini à l’article 1er du code des douanes, à être mises sur le marché d’un autre État membre de l’Union européenne pour y être légalement commercialisées ;

« - sur les marchandises de statut communautaire, légalement fabriquées ou légalement mises en libre pratique dans un autre État membre de l’Union européenne, dans lequel elles ont été placées sous le régime du transit et qui sont destinées, après avoir transité sur le territoire douanier tel que défini à l’article 1er du code des douanes, à être exportées vers un État non membre de l’Union européenne.

« Art. L. 722-10. – En l’absence de demande écrite de la personne autorisée à utiliser une indication géographique ou l’organisme de défense des indications géographiques, et en dehors des cas prévus par la réglementation communautaire en vigueur, l’administration des douanes peut, dans le cadre de ses contrôles, retenir une marchandise susceptible de porter atteinte à une indication géographique.

« Cette retenue est immédiatement notifiée à la personne autorisée à utiliser l’indication géographique ou à l’organisme de défense des indications géographiques. Le procureur de la République est également informé de ladite mesure.

« Lors de la notification mentionnée au deuxième alinéa, la nature et la quantité réelle ou estimée des marchandises est communiquée à la personne autorisée à utiliser l’indication géographique ou l’organisme de défense des indications géographiques, par dérogation à l’article 59 bis du code des douanes.

« La mesure de retenue est levée de plein droit si l’administration des douanes n’a pas reçu de la personne autorisée à utiliser l’indication géographique ou de l’organisme de défense des indications géographiques, dans un délai de trois jours ouvrables à compter de la notification de la retenue mentionnée au deuxième alinéa du présent article, la demande prévue à l’article L. 722-9 du présent code.

« Si la demande a été reçue conformément à l’alinéa précédent, les délais de dix jours ouvrables ou de trois jours ouvrables mentionnés au quatrième alinéa de l’article L. 722-9 commencent à courir à compter de cette réception.

« Art. L. 722-11. – I. – Lorsque la retenue portant sur des marchandises soupçonnées de constituer une contrefaçon d’une indication géographique, prévue par la réglementation communautaire en vigueur, est mise en œuvre avant qu’une demande d’intervention de la personne autorisée à utiliser l’indication géographique ou l’organisme de défense des indications géographiques, ait été déposée ou acceptée, les agents des douanes peuvent, par dérogation à l’article 59 bis du code des douanes, informer cette personne ou cet organisme de la mise en œuvre de cette mesure. Ils peuvent également lui communiquer des informations portant sur la quantité des marchandises et leur nature.

« Lorsque la retenue portant sur des marchandises soupçonnées de constituer une contrefaçon d’une indication géographique, prévue par la réglementation communautaire en vigueur, est mise en œuvre après qu’une demande d’intervention de la personne autorisée à utiliser une indication géographique ou de l’organisme de défense des indications géographiques, a été acceptée, les agents des douanes peuvent également communiquer à cette personne ou cet organisme, les informations prévues par cette réglementation communautaire, nécessaires pour déterminer s’il y a eu violation de son droit.

« II. – Les frais générés par la mise en œuvre d’une retenue prévue par la réglementation communautaire en vigueur sont à la charge de la personne autorisée à utiliser une indication géographique ou de l’organisme de défense des indications géographiques.

« Art. L. 722-12. – Pendant le délai de la retenue mentionnée aux articles L. 722-9 à L. 722-11, la personne autorisée à utiliser une indication géographique ou l’organisme de défense des indications géographiques, peut, à sa demande ou à la demande de l’administration des douanes, inspecter les marchandises retenues.

« Lors du contrôle des marchandises mises en retenue, l’administration des douanes peut prélever des échantillons. À la demande de la personne autorisée à utiliser l’indication géographique ou l’organisme de défense des indications géographiques, ces échantillons peuvent lui être remis aux seules fins d’analyse et en vue de faciliter les actions qu’elle ou il peut être amené à engager par la voie civile ou pénale.

« Art. L. 722-13. – En vue de prononcer les mesures prévues aux articles L. 722-9 à L. 722-12, les agents des douanes appliquent les pouvoirs qui leur sont dévolus par le code des douanes.

« Art. L. 722-14. – Les conditions d’application des mesures prévues aux articles L. 722-9 à L. 722-13 sont définies par décret en Conseil d’État. »

M. le président. Je suis saisi de cinq amendements faisant l'objet d'une discussion commune.

L'amendement n° 8 rectifié, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :

A. – Alinéas 7, 40, 64 et 98

Remplacer les mots :

ainsi que le déclarant ou

par le mot :

et

B. – Alinéas 8, 17, 41, 50, 65, 74, 99 et 108

Compléter ces alinéas par une phrase ainsi rédigée :

Ces informations peuvent également être communiquées avant la mise en œuvre de la mesure prévue par le présent article.

C. – Alinéas 9, 42, 66 et 100

Compléter ces alinéas par deux phrases ainsi rédigées :

L’administration des douanes peut proroger le délai de dix jours ouvrables prévu au présent alinéa, de dix jours ouvrables maximum sur requête dûment motivée du demandeur. En cas de prorogation du délai, le procureur de la République et le détenteur de la marchandise en sont informés.

D. – Alinéas 11, 44, 68 et 102

Remplacer les mots :

et leur provenance

par les mots :

, leur provenance et leur destination 

E. – Alinéas 18, 32, 51, 75, 89 et 109

Remplacer le mot :

trois

par le mot :

quatre

F. – Alinéas 19, 52, 76 et 110

Remplacer les mots :

les délais de dix jours ouvrables ou de trois jours ouvrables mentionnés

par les mots :

le délai de dix jours ouvrables mentionné

et le mot :

commencent

est remplacé par le mot :

commence

G. – Après les alinéas 19, 52, 76 et 110

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

« Le présent article n’est pas applicable aux marchandises périssables. »

H. – Alinéa 23

Remplacer les mots :

aux articles L. 335-10 à L. 335-12

par les mots : 

à l’article L. 335-10 et au deuxième alinéa du I de l’article L. 335-12

I. – Alinéa 29

Remplacer cet alinéa par sept alinéas ainsi rédigés :

2° L’article L. 521-14 est ainsi modifié :

a) Au deuxième alinéa, les mots : « ainsi que le déclarant ou » sont remplacés par le mot : « et » ;

b) Le troisième alinéa est complété par une phrase ainsi rédigée :

« Ces informations peuvent également être communiquées avant la mise en œuvre de la mesure prévue par le présent article. » ;

c) Le quatrième alinéa est complété par les mots et deux phrases ainsi rédigées : « soit d’avoir déposé une plainte auprès du procureur de la République. L’administration des douanes peut proroger le délai de dix jours, prévu au présent alinéa, de dix jours ouvrables maximum sur requête dûment motivée du demandeur. En cas de prorogation du délai, le procureur de la République ou le détenteur de la marchandise en sont informés. » ;

d) Le cinquième alinéa est complété par les mots : « sous réserve des procédures prévues aux articles L. 521-18 et L. 521-19 » ;

e) Au sixième alinéa, les mots : « et leur provenance » sont remplacés par les mots : « , leur provenance et leur destination ».

J. – Après l’alinéa 30

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

…) Le troisième alinéa est complété par une phrase ainsi rédigée :

« Ces informations peuvent également être communiquées avant la mise en œuvre de la mesure prévue par le présent article. » ;

K. – Alinéa 34

Remplacer les mots :

les délais de dix jours ouvrables ou de trois jours ouvrables mentionnés au quatrième alinéa de l’article L. 521-14 commencent

par les mots : 

le délai de dix jours ouvrables mentionné au quatrième alinéa de l’article L. 521-14 commence

L. – Après l’alinéa 34

Insérer deux alinéas ainsi rédigés :

« Le présent article n’est pas applicable aux marchandises périssables. » ;

3° bis Au premier alinéa de l’article L. 521-17, les mots : « aux articles L. 521-14 à L. 521-16 » sont remplacés par les mots : « à l’article L. 521-14 et au deuxième alinéa du I de l’article L. 521-16 » ;

M. – Alinéa 56

Remplacer les mots :

aux articles L. 614-32 à L. 614-34

par les mots : 

à l’article L. 614-32 et au deuxième alinéa du I de l’article L. 614-34

N. – Alinéas 57 et 81, dernières phrases

Supprimer ces phrases.

O. – Alinéa 80

Remplacer les mots :

aux articles L. 623-36 à L. 623-38

par les mots :

à l’article L. 623-36 et au deuxième alinéa du I de l’article L. 623-38

P. – Alinéa 86

Remplacer cet alinéa par sept alinéas ainsi rédigés :

2° L’article L. 716-8 est ainsi modifié :

a) Au deuxième alinéa, les mots : « ainsi que le déclarant ou » sont remplacés par le mot « et » ;

b) Le troisième alinéa est complété par une phrase ainsi rédigée :

« Ces informations peuvent également être communiquées avant la mise en œuvre de la mesure prévue par le présent article. » ;

c) Le quatrième alinéa est complété par les mots et deux phrase ainsi rédigées : « , soit d’avoir déposé une plainte auprès du procureur de la République. L’administration des douanes peut proroger le délai de dix jours, prévu au présent alinéa, de dix jours ouvrables maximum sur requête dûment motivée du demandeur. En cas de prorogation du délai, le procureur de la République et le détenteur de la marchandise en sont informés. » ;

d) Le cinquième alinéa est complété par les mots : « sous réserve des procédures prévues aux articles L. 716-8-4 et L. 716-8-5 » ;

e) Au sixième alinéa, les mots : « et leur provenance » sont remplacés par les mots : « , leur provenance et leur destination ».

Q. – Après l’alinéa 87

Insérer deux alinéas ainsi rédigés :

…) Le troisième alinéa est complété par une phrase ainsi rédigée :

« Ces informations peuvent également être communiquées avant la mise en œuvre de la mesure prévue par le présent article. » ;

R. – Alinéa 91

Remplacer les mots :

les délais de dix jours ouvrables ou de trois jours ouvrables mentionnés au quatrième alinéa de l’article L. 716-8 commencent

par les mots : 

le délai de dix jours ouvrables mentionné au quatrième alinéa de l’article L. 716-8 commence

S. – Après l’alinéa 91

Insérer deux alinéas ainsi rédigés :

« Le présent article n’est pas applicable aux marchandises périssables. » ;

4° Au premier alinéa de l’article L. 716-8-3, les mots : « aux articles L. 716-8 à L. 716-8-2 » sont remplacés par les mots : « à l’article L. 716-8 et au deuxième alinéa du I de l’article L. 716-8-2 ».

T. – Alinéa 114

Remplacer les mots : 

aux articles L. 722-9 à L. 722-11

par les mots : 

à l’article L. 722-9 et au deuxième alinéa du I de l’article L. 722-11

La parole est à Mme la ministre.

Mme Nicole Bricq, ministre. Je souhaiterais, monsieur le président, si cela vous convient, présenter en même temps les trois amendements nos 8 rectifié, 7 rectifié et 6 rectifié, car ils relèvent du même objectif, à savoir la mise en cohérence de notre droit national avec la nouvelle réglementation européenne.

M. le président. Je vous en prie, madame la ministre.

M. Jean-Pierre Sueur, président de la commission des lois. Quinze pages d’amendements…

Mme Nicole Bricq, ministre. Une nouvelle réglementation européenne qui prévoit les modalités d’intervention des douanes européennes en présence de marchandises soupçonnées de contrefaçon entrera en application le 1er janvier 2014. Ce règlement s’appliquera aux marchandises de statut tiers lors d’un flux entre l’Union européenne et les pays tiers.

Il s’agit, tout d’abord, d’élargir le champ d’intervention des douanes européenne à l’ensemble des droits de propriété intellectuelle. Les nouveaux droits couverts sont la topographie de produits semi-conducteurs, ce qui est extrêmement important pour notre industrie, et les modèles d’utilité.

Ensuite, il s’agit d’harmoniser les pratiques dans l’Union européenne, notamment s’agissant de la procédure de retenue.

Enfin, il s’agit de simplifier nos procédures, notamment via la procédure la destruction simplifiée.

Compte tenu des changements introduits par le règlement européen, notre dispositif national qui s’applique aux marchandises de statut européen empruntant le territoire français doit être adapté, afin d’assurer une parfaite concordance entre les deux dispositifs, européen et national.

En effet, le système français ne peut rester en retrait par rapport aux nouvelles dispositions européennes, alors même que notre pays a toujours été moteur – j’ai rappelé en particulier le rôle de la Direction générale des douanes – et porteur de réformes au niveau européen en matière de lutte contre la contrefaçon.

En harmonisant les dispositifs national et européen de lutte contre la contrefaçon, cette réforme permet de simplifier l’action des services douaniers, ce qui est nécessaire : il convient, par exemple, que ces services n’aient pas à appliquer des délais de procédure différents en fonction du statut d’une marchandise, qu’elle soit tierce ou européenne.

Monsieur le président de la commission, j’ai entendu votre observation sur les quinze pages d’amendements, mais cette modification permet de renforcer l’effectivité des droits de propriété intellectuelle détenus par les opérateurs en améliorant leur protection.

La longueur de ces amendements tient à la nécessité de dupliquer les dispositions, pour chacun des droits de la propriété intellectuelle protégés. Notre droit l’exige.

Nous sollicitons donc un avis et un vote favorables de la Haute Assemblée s’agissant d’amendements qui ont pour objet de simplifier les procédures et de renforcer leur efficacité.

M. Jean-Pierre Sueur, président de la commission des lois. Madame la ministre, nous ne sommes pas étonnés par la longueur des amendements : nous savons que vous êtes une grande travailleuse ! (Sourires.)

M. le président. L'amendement n° 7 rectifié, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :

A. – Alinéa 9

Au début, insérer les mots :

Sous réserve des procédures prévues aux articles L. 335-14 et L. 335-15,

B. – Alinéas 25 et 26

Remplacer ces alinéas par vingt-trois alinéas ainsi rédigés :

« Art. L. 335-14. – I. – Lorsque la retenue portant sur des marchandises soupçonnées de constituer une contrefaçon de droit d’auteur ou de droit voisin est mise en œuvre après qu’une demande d’intervention visée à l’article L. 335-10 a été acceptée, les marchandises soupçonnées de porter atteinte à un droit d'auteur ou un droit voisin enregistré peuvent être détruites sous le contrôle des agents des douanes dès lors que les conditions suivantes sont remplies :

« – le demandeur a confirmé par écrit et par une expertise détaillée aux autorités douanières, dans un délai de dix jours ouvrables, ou de trois jours ouvrables pour les denrées périssables, à partir de la notification de la retenue, le caractère contrefaisant des marchandises ;

« – le demandeur a confirmé par écrit aux autorités douanières, dans un délai de dix jours ouvrables, ou de trois jours ouvrables pour les denrées périssables, à partir de la notification de la retenue, qu’il consent à la destruction, sous sa responsabilité, des marchandises ;

« – le détenteur des marchandises a confirmé par écrit aux autorités douanières, dans un délai de dix jours ouvrables, ou de trois jours ouvrables pour les denrées périssables, à partir de la notification de la retenue, qu’il consent à la destruction des marchandises.

« II. – Si le détenteur n’a, dans le délai mentionné au dernier alinéa du I, ni confirmé qu’il consent à la destruction des marchandises ni informé l’administration des douanes qu’il s’oppose à leur destruction, il est réputé avoir consenti à cette destruction.

« III. – Lorsque le détenteur des marchandises n’a pas confirmé par écrit qu’il consent à leur destruction et qu’il n’est pas réputé avoir confirmé qu’il consent à la destruction des marchandises dans les délais prévus, l’administration des douanes en informe immédiatement le demandeur lequel, dans un délai de dix jours ou de trois jours ouvrables pour les denrées périssables à partir de la notification de la retenue, prend les mesures mentionnées au quatrième alinéa de l’article L. 335-10. Le délai de dix jours peut être prorogé de dix jours ouvrables maximum sur requête dûment motivée du demandeur. En cas de prorogation du délai, le procureur de la République et le détenteur de la marchandise en sont informés.

« Si les conditions prévues au I du présent article ne sont pas réunies et si le demandeur n’a pas justifié auprès de l’administration des douanes qu’il a pris les mesures mentionnées au quatrième alinéa de l’article L. 335-10, la mesure de retenue est levée de plein droit.

« IV. – Dans le cadre de la communication d’informations prévues au troisième alinéa de l’article L. 335-10 et au troisième alinéa de l’article L. 335-11, les autorités douanières informent le demandeur de l’existence de la procédure prévue au présent article. Les informations prévues au sixième alinéa de l’article L. 335-10 peuvent également être communiquées aux fins de mise en œuvre de la présente mesure.

« Art. L. 335-15. – I. – Lorsque la retenue portant sur des marchandises soupçonnées de constituer une contrefaçon de droit d’auteur ou de droit voisin est mise en œuvre après qu’une demande d’intervention visée à l’article L. 335-10 a été acceptée, les marchandises transportées en petits envois peuvent être détruites sous le contrôle des agents des douanes lorsque le demandeur a, dans la demande d’intervention, sollicité le recours à la procédure prévue par le présent article.

« II. – La notification visée au deuxième alinéa de l’article L. 335-10 est faite dans un délai d’un jour ouvrable à compter de la date du prononcé de retenue. Elle comprend l’intention ou non de l’administration des douanes de détruire les marchandises ainsi que les droits dont bénéficie le détenteur des marchandises au titre des alinéas suivants :

« a) Le détenteur des marchandises dispose d’un délai de dix jours ouvrables à compter de la notification de la retenue pour faire connaître à l’administration ses observations ;

« b) Les marchandises concernées peuvent être détruites lorsque, dans un délai de dix jours ouvrables à partir de leur retenue, le détenteur des marchandises a confirmé à l’administration des douanes qu’il consent à cette destruction. En cas de silence du détenteur des marchandises dans ce délai, celui-ci est réputé avoir consenti à leur destruction.

« L’administration des douanes communique au demandeur, sur requête de celui-ci, les informations relatives à la quantité réelle ou estimée des marchandises détruites et à leur nature.

« III. – Lorsque le détenteur des marchandises n’a pas confirmé qu’il consent à leur destruction ou lorsqu’il n’est pas réputé avoir consenti à leur destruction, l’administration des douanes en informe immédiatement le demandeur et lui communique la quantité, la nature, ainsi que des images des marchandises.

« IV. – La mesure de retenue est levée de plein droit à défaut, pour le demandeur, dans le délai de dix jours ouvrables à compter de la notification prévue au III, de justifier auprès de l’administration des douanes qu’il a pris les mesures visées au quatrième alinéa de l’article L. 335-10.

« En vue de prendre ces mesures, le demandeur peut obtenir de l’administration des douanes communication des nom et adresse de l’expéditeur, de l’importateur, du destinataire et du détenteur des marchandises retenues, ainsi que de leur quantité, leur origine, leur provenance et leur destination, par dérogation à l’article 59 bis du code des douanes.

« V. – La définition des petits envois est précisée par arrêté du ministre chargé des douanes.

« VI. – Le présent article n’est pas applicable aux denrées périssables.

« Art. L. 335-16. – Lorsque la personne ayant déposé la demande visée à l’article L. 335-10 ou la personne titulaire d’une décision faisant droit à une demande relevant de la réglementation européenne en vigueur utilise les informations qui lui sont communiquées par l’administration des douanes, par dérogation à l’article 59 bis du code des douanes, à d’autres fins que celles prévues par le présent chapitre, l’administration des douanes abroge, suspend ou refuse de renouveler ladite demande.

« Art. L. 335-17. – En vue de prononcer les mesures prévues aux articles L. 335-10 à L. 335-13, les agents des douanes appliquent les pouvoirs qui leur sont dévolus par le code des douanes.

« Art. L. 335-18. – Un décret en Conseil d’État fixe :

« – les conditions d’application des mesures prévues aux articles L. 335-10 à L. 335-16 ;

« - les conditions dans lesquelles a lieu la destruction des marchandises susceptibles de porter atteinte à un droit d’auteur ou à un droit voisin prévue par la réglementation européenne en vigueur, ainsi que les conditions du prélèvement d’échantillons préalable à ladite destruction. »

C. – Après l’alinéa 28

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

…° Au début du quatrième alinéa de l’article L. 521-14, sont insérés les mots : « Sous réserve des procédures prévues aux articles L. 521-17-1 et L. 521-17-2, » ;

D. – Après l’alinéa 34

Insérer vingt-cinq alinéas ainsi rédigés :

…° Après l’article L. 521-17, sont insérés trois articles ainsi rédigés :

« Art. L. 521-17-1. – I. – Lorsque la retenue portant sur des marchandises soupçonnées de constituer une contrefaçon d’un dessin et modèle déposé est mise en œuvre après qu’une demande d’intervention visée à l’article L 521-14 a été acceptée, les marchandises soupçonnées de porter atteinte à un dessin et modèle déposé peuvent être détruites sous le contrôle des agents des douanes dès lors que les conditions suivantes sont remplies :

« – le demandeur a confirmé par écrit et par une expertise détaillée aux autorités douanières, dans un délai de dix jours ouvrables, ou de trois jours ouvrables pour les denrées périssables, à partir de la notification de la retenue, le caractère contrefaisant des marchandises ;

« – le demandeur a confirmé par écrit aux autorités douanières, dans un délai de dix jours ouvrables, ou de trois jours ouvrables pour les denrées périssables, à partir de la notification de la retenue, qu’il consent à la destruction, sous sa responsabilité, des marchandises ;

« – le détenteur des marchandises a confirmé par écrit aux autorités douanières, dans un délai de dix jours ouvrables, ou de trois jours ouvrables pour les denrées périssables, à partir de la notification de la retenue, qu’il consent à la destruction des marchandises.

« II. – Si le détenteur n’a, dans le délai mentionné au dernier alinéa du I, ni confirmé qu’il consent à la destruction des marchandises ni informé l’administration des douanes qu’il s’oppose à leur destruction, il est réputé avoir consenti à cette destruction.

« III. – Lorsque le détenteur des marchandises n’a pas confirmé par écrit qu’il consent à leur destruction et qu’il n’est pas réputé avoir confirmé qu’il consent à la destruction des marchandises dans les délais prévus, l’administration des douanes en informe immédiatement le demandeur lequel, dans un délai de dix jours ou de trois jours ouvrables pour les denrées périssables à partir de la notification de la retenue, prend les mesures mentionnées au quatrième alinéa de l’article L. 521-14. Le délai de dix jours peut être prorogé de dix jours ouvrables maximum sur requête dûment motivée du demandeur. En cas de prorogation du délai, le procureur de la République et le détenteur de la marchandise en sont informés.

« Si les conditions prévues au I du présent article ne sont pas réunies et si le demandeur n’a pas justifié auprès de l’administration des douanes qu’il a pris les mesures mentionnées au quatrième alinéa de l’article L. 521-14, la mesure de retenue est levée de plein droit.

« IV. – Dans le cadre de la communication d’informations prévues au troisième alinéa de l’article L. 521-14 et au troisième alinéa de l’article L. 521-15, les autorités douanières informent le demandeur de l’existence de la procédure prévue au présent article. Les informations prévues au sixième alinéa de l’article L. 521-14 peuvent également être communiquées aux fins de mise en œuvre de la présente mesure.

« Art. L. 521-17-2. – I. – Lorsque la retenue portant sur des marchandises soupçonnées de constituer une contrefaçon d’un dessin et modèle déposé est mise en œuvre après qu’une demande d’intervention visée à l’article L. 521-14 a été acceptée, les marchandises transportées en petits envois peuvent être détruites sous le contrôle des agents des douanes lorsque le demandeur a, dans la demande d’intervention, sollicité le recours à la procédure prévue par le présent article.

« II. – La notification visée au deuxième alinéa de l’article L. 521-14 est faite dans un délai d’un jour ouvrable à compter de la date du prononcé de la retenue. Elle comprend l’intention ou non de l’administration des douanes de détruire les marchandises ainsi que les droits dont bénéficie le détenteur des marchandises au titre des alinéas suivants :

« a) Le détenteur des marchandises dispose d’un délai de dix jours ouvrables à compter de la notification de la retenue pour faire connaître à l’administration ses observations ;

« b) Les marchandises concernées peuvent être détruites lorsque, dans un délai de dix jours ouvrables à partir de leur retenue, le détenteur des marchandises a confirmé à l’administration des douanes qu’il consent à cette destruction. En cas de silence du détenteur des marchandises dans ce délai, celui-ci est réputé avoir consenti à leur destruction.

« L’administration des douanes communique au demandeur, sur requête de celui-ci, les informations relatives à la quantité réelle ou estimée des marchandises détruites et à leur nature.

« III. – Lorsque le détenteur des marchandises n’a pas confirmé qu’il consent à leur destruction ou lorsqu’il n’est pas réputé avoir consenti à leur destruction, l’administration des douanes en informe immédiatement le demandeur et lui communique la quantité, la nature, ainsi que des images des marchandises.

« IV. – La mesure de retenue est levée de plein droit à défaut, pour le demandeur, dans le délai de dix jours ouvrables, à compter de la notification prévue au III, de justifier auprès des services douaniers qu’il a pris les mesures visées au quatrième alinéa de l’article L. 521-14.

« En vue de prendre ces mesures, le demandeur peut obtenir de l’administration des douanes communication des nom et adresse de l’expéditeur, de l’importateur, du destinataire et du détenteur des marchandises retenues, ainsi que de leur quantité, leur origine, leur provenance et leur destination par dérogation à l’article 59 bis du code des douanes.

« V. – La définition des petits envois est précisée par arrêté du ministre chargé des douanes

« VI. – Le présent article n’est pas applicable aux denrées périssables.

« Art. L. 521-17-3. – Lorsque la personne ayant déposé la demande visée à l’article L. 521-14 ou la personne titulaire d’une décision faisant droit à une demande relevant de la réglementation européenne en vigueur utilise les informations qui lui sont communiquées par l’administration des douanes, par dérogation à l’article 59 bis du code des douanes à d’autres fins que celles prévues par le présent chapitre, l’administration des douanes abroge, suspend ou refuse de renouveler ladite demande. » ;

…° À l’article L. 521-18, la référence : « L. 521-17 » est remplacée par la référence : « L. 521-17-3 » ;

…° L’article L. 521-19 est ainsi rédigé :

« Art. L. 521-19. – Un décret en Conseil d’État fixe :

« – les conditions d’application des mesures prévues aux articles L. 521-14 à L. 521-17-3 ;

« – les conditions dans lesquelles a lieu la destruction, prévue par la réglementation européenne en vigueur, des marchandises susceptibles de constituer une contrefaçon d’un dessin ou modèle, ainsi que les conditions du prélèvement d’échantillons préalable à ladite destruction. »

E. – Alinéa 42

Au début, insérer les mots :

Sous réserve des procédures prévues aux articles L. 614-36 et L. 614-37,

F. – Alinéas 58 et 59

Remplacer ces alinéas par treize alinéas ainsi rédigés :

« Art. L. 614-36. – I. – Lorsque la retenue portant sur des marchandises soupçonnées de constituer une contrefaçon d’un brevet, d’un certificat complémentaire de protection ou d’un certificat d’utilité est mise en œuvre après qu’une demande d’intervention visée à l’article L. 614-32 a été acceptée, les marchandises soupçonnées de porter atteinte à un brevet, un certificat complémentaire de protection ou un certificat d’utilité peuvent être détruites sous le contrôle des agents des douanes dès lors que les conditions suivantes sont remplies :

« – le demandeur a confirmé par écrit et par une expertise détaillée aux autorités douanières, dans un délai de dix jours ouvrables, ou de trois jours ouvrables pour les denrées périssables, à partir de la notification de la retenue, le caractère contrefaisant des marchandises ;

« – le demandeur a confirmé par écrit aux autorités douanières, dans un délai de dix jours ouvrables, ou de trois jours ouvrables pour les denrées périssables, à partir de la notification de la retenue, qu’il consent à la destruction, sous sa responsabilité, des marchandises ;

« – le détenteur des marchandises a confirmé par écrit aux autorités douanières, dans un délai de dix jours ouvrables, ou de trois jours ouvrables pour les denrées périssables, à partir de la notification de la retenue, qu’il consent à la destruction des marchandises.

« II. – Si le détenteur n’a, dans le délai mentionné au dernier alinéa du I, confirmé qu’il consent à la destruction des marchandises ni informé l’administration des douanes qu’il s’oppose à leur destruction, il est réputé avoir consenti à cette destruction.

« III. – Lorsque le détenteur des marchandises n’a pas confirmé par écrit qu’il consent à leur destruction et qu’il n’est pas réputé avoir confirmé qu’il consent à la destruction des marchandises dans les délais prévus, l’administration des douanes en informe immédiatement le demandeur qui, dans un délai de dix jours ou de trois jours ouvrables pour les denrées périssables à partir de la notification de la retenue, prend les mesures mentionnées au quatrième alinéa de l’article L. 614-32. Le délai de dix jours peut être prorogé de dix jours ouvrables maximum sur requête dûment motivée du demandeur. En cas de prorogation du délai, le procureur de la République et le détenteur de la marchandise en sont informés.

« Si les conditions prévues au I du présent article ne sont pas réunies et si le demandeur n’a pas justifié auprès de l’administration des douanes qu’il a pris les mesures mentionnées au quatrième alinéa de l’article L. 614-32, la mesure de retenue est levée de plein droit.

« IV. – Dans le cadre de la communication d’informations prévues au troisième alinéa de l’article L. 614-32 et au troisième alinéa de l’article L. 614-33, les autorités douanières informent le demandeur de l’existence de la procédure prévue au présent article. Les informations prévues au sixième alinéa de l’article L. 614-32 peuvent également être communiquées aux fins de mise en œuvre de la présente mesure.

« Art. L. 614-37. – Lorsque la personne ayant déposé la demande visée à l’article L. 614-32 ou la personne titulaire d’une décision faisant droit à une demande relevant de la réglementation européenne en vigueur utilise les informations qui lui sont communiquées par l’administration des douanes, par dérogation à l’article 59 bis du code des douanes à d’autres fins que celles prévues par le présent chapitre, l’administration des douanes abroge, suspend ou refuse de renouveler ladite demande.

« Art. L. 614-38. – En vue de prononcer les mesures prévues aux articles L. 614-32 à L. 614-35, les agents des douanes appliquent les pouvoirs qui leur sont dévolus par le code des douanes.

« Art. L. 614-39. – Un décret en Conseil d’État fixe :

« – les conditions d’application des mesures prévues aux articles L. 614-32 à L. 614-37 ;

« – les conditions dans lesquelles a lieu la destruction des marchandises susceptibles de porter atteinte à un brevet, un certificat complémentaire de protection ou un certificat d’utilité prévue par la réglementation européenne en vigueur, ainsi que les conditions du prélèvement d’échantillons préalable à ladite destruction. »

G. – Alinéa 66

Au début, insérer les mots :

Sous réserve des procédures prévues aux articles L. 623-40 et L. 623-41,

H. – Alinéas 82 et 83

Remplacer ces alinéas par treize alinéas ainsi rédigés :

« Art. L. 623-40. – I. – Lorsque la retenue portant sur des marchandises soupçonnées de constituer une contrefaçon d’un certificat d’obtention végétale est mise en œuvre après qu’une demande d’intervention visée à l’article L. 623-36 a été acceptée, les marchandises soupçonnées de porter atteinte à un certificat d’obtention végétale peuvent être détruites sous le contrôle des agents des douanes dès lors que les conditions suivantes sont remplies :

« – le demandeur a confirmé par écrit et par une expertise détaillée aux autorités douanières, dans un délai de dix jours ouvrables, ou de trois jours ouvrables pour les denrées périssables, à partir de la notification de la retenue, le caractère contrefaisant des marchandises ;

« – le demandeur a confirmé par écrit aux autorités douanières, dans un délai de dix jours ouvrables, ou de trois jours ouvrables pour les denrées périssables, à partir de la notification de la retenue, qu’il consent à la destruction, sous sa responsabilité, des marchandises ;

« – le détenteur des marchandises a confirmé par écrit aux autorités douanières, dans un délai de dix jours ouvrables, ou de trois jours ouvrables pour les denrées périssables, à partir de la notification de la retenue, qu’il consent à la destruction des marchandises.

« II. – Lorsque le détenteur n’a, dans le délai mentionné au dernier alinéa du I, ni confirmé qu’il consent à la destruction des marchandises ni informé l’administration des douanes qu’il s’oppose à leur destruction, il est réputé avoir consenti à cette destruction.

« III. – Lorsque le détenteur des marchandises n’a pas confirmé par écrit qu’il consent à leur destruction et qu’il n’est pas réputé avoir confirmé qu’il consent à la destruction des marchandises dans les délais prévus, l’administration des douanes en informe immédiatement le demandeur lequel, dans un délai de dix jours ou de trois jours ouvrables pour les denrées périssables à partir de la notification de la retenue, prend les mesures mentionnées au quatrième alinéa de l’article L. 623-36. Le délai de dix jours peut être prorogé de dix jours ouvrables maximum sur requête dûment motivée du demandeur. En cas de prorogation du délai, le procureur de la République et le détenteur de la marchandise en sont informés.

« Si les conditions prévues au I du présent article ne sont pas réunies et si le demandeur n’a pas justifié auprès de l’administration des douanes qu’il a pris les mesures mentionnées au quatrième alinéa de l’article L. 623-36, la mesure de retenue est levée de plein droit.

« IV. – Dans le cadre de la communication d’informations prévues au troisième alinéa de l’article L. 623-36 et au troisième alinéa de l’article L. 623-37, les autorités douanières informent le demandeur de l’existence de la procédure prévue au présent article. Les informations prévues au sixième alinéa de l’article L. 623-36 peuvent également être communiquées aux fins de mise en œuvre de la présente mesure.

« Art. L. 623-41. – Lorsque la personne ayant déposé la demande visée à l’article L. 623-36 ou la personne titulaire d’une décision faisant droit à une demande relevant de la réglementation européenne en vigueur utilise les informations qui lui sont communiquées par l’administration des douanes, par dérogation à l’article 59 bis du code des douanes, à d’autres fins que celles prévues par le présent chapitre, l’administration des douanes abroge, suspend ou refuse de renouveler ladite demande.

« Art. L. 623-42. – En vue de prononcer les mesures prévues aux articles L. 623-36 à L. 623-39, les agents des douanes appliquent les pouvoirs qui leur sont dévolus par le code des douanes.

« Art. L. 623-43. – Un décret en Conseil d’État fixe :

« – les conditions d’application des mesures prévues aux articles L. 623-36 à L. 623-41 ;

« – les conditions dans lesquelles a lieu la destruction des marchandises susceptibles de porter atteinte à un certificat d’obtention végétale prévue par la réglementation européenne en vigueur, ainsi que les conditions du prélèvement d’échantillons préalable à ladite destruction. »

I. – Après l’alinéa 85

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

…° Au début du quatrième alinéa de l’article L. 716-8, sont insérés les mots : « Sous réserve des procédures prévues aux articles L. 716-8-4 et L. 716-8-5, ».

J. – Après l’alinéa 91

Insérer vingt-cinq alinéas ainsi rédigés :

…° Après l’article L. 716-8-3, sont insérés six articles ainsi rédigés :

« Art. L. 716-8-4. – I. – Lorsque la retenue portant sur des marchandises soupçonnées de constituer une contrefaçon d’une marque enregistrée est mise en œuvre après qu’une demande d’intervention visée à l’article L. 716-8 a été acceptée, les marchandises soupçonnées de porter atteinte à la marque enregistrée peuvent être détruites sous le contrôle des agents des douanes dès lors que les conditions suivantes sont remplies :

« – le demandeur a confirmé par écrit et par une expertise détaillée aux autorités douanières, dans un délai de dix jours ouvrables, ou de trois jours ouvrables pour les denrées périssables, à partir de la notification de la retenue, le caractère contrefaisant des marchandises ;

« – le demandeur a confirmé par écrit aux autorités douanières, dans un délai de dix jours ouvrables, ou de trois jours ouvrables pour les denrées périssables, à partir de la notification de la retenue, qu’il consent à la destruction, sous sa responsabilité, des marchandises ;

« – le détenteur des marchandises a confirmé par écrit aux autorités douanières, dans un délai de dix jours ouvrables, ou de trois jours ouvrables pour les denrées périssables, à partir de la notification de la retenue, qu’il consent à la destruction des marchandises.

« II. – Si le détenteur n’a, dans le délai mentionné au dernier alinéa du I, ni confirmé qu’il consent à la destruction des marchandises ni informé l’administration des douanes qu’il s’oppose à leur destruction, il est réputé avoir consenti à cette destruction.

« III. – Lorsque le détenteur des marchandises n’a pas confirmé par écrit qu’il consent à leur destruction et qu’il n’est pas réputé avoir confirmé qu’il consent à la destruction des marchandises dans les délais prévus, l’administration des douanes en informe immédiatement le demandeur lequel, dans un délai de dix jours ou de trois jours ouvrables pour les denrées périssables à partir de la notification de la retenue, prend les mesures mentionnées au quatrième alinéa de l’article L. 716-8. Le délai de dix jours peut être prorogé de dix jours ouvrables maximum sur requête dûment motivée du demandeur. En cas de prorogation du délai, le procureur de la République et le détenteur de la marchandise en sont informés.

« Si les conditions prévues au I du présent article ne sont pas réunies et si le demandeur n’a pas justifié auprès de l’administration des douanes qu’il a pris les mesures mentionnées au quatrième alinéa de l’article L. 716-8, la mesure de retenue est levée de plein droit.

« IV. – Dans le cadre de la communication d’informations prévues au troisième alinéa de l’article L. 716-8 et au troisième alinéa de l’article L. 716-8-1, les autorités douanières informent le demandeur de l’existence de la procédure prévue au présent article. Les informations prévues au sixième alinéa de l’article L. 716-8 peuvent également être communiquées aux fins de mise en œuvre de la présente mesure.

« Art. L. 716-8-5. – I. – Lorsque la retenue portant sur des marchandises soupçonnées de constituer une contrefaçon d’une marque enregistrée est mise en œuvre après qu’une demande d’intervention visée à l’article L. 716-8 a été acceptée, les marchandises transportées en petits envois soupçonnées de porter atteinte à une marque enregistrée peuvent être détruites sous le contrôle des agents des douanes lorsque le demandeur a, dans la demande d’intervention, sollicité le recours à la procédure prévue par le présent article.

« II. – La notification visée au deuxième alinéa de l’article L. 716-8 est faite dans un délai d’un jour ouvrable à compter de la date du prononcé de la retenue. Elle comprend l’intention ou non de l’administration des douanes de détruire les marchandises ainsi que les droits dont bénéficie le déclarant ou le détenteur des marchandises au titre des alinéas suivants :

« a) Le détenteur des marchandises dispose d’un délai de dix jours ouvrables à compter de la notification de la retenue pour faire connaître à l’administration ses observations ;

« b) Les marchandises concernées peuvent être détruites lorsque, dans un délai de dix jours ouvrables à partir de leur retenue, le détenteur des marchandises a confirmé à l’administration des douanes qu’il consent à cette destruction. En cas de silence du détenteur des marchandises dans ce délai, celui-ci est réputé avoir consenti à leur destruction.

« Les autorités douanières communiquent au demandeur, sur requête de celui-ci, les informations relatives à la quantité réelle ou estimée des marchandises détruites et à leur nature.

« III. – Lorsque le déclarant ou le détenteur des marchandises n’a pas confirmé qu’il consent à leur destruction ou lorsqu’il n’est pas réputé avoir consenti à leur destruction, l’administration des douanes en informe immédiatement le demandeur et lui communique la quantité, la nature, ainsi que des images des marchandises.

« IV. – La mesure de retenue est levée de plein droit à défaut, pour le demandeur, dans le délai de dix jours ouvrables, à compter de la notification prévue au III, de justifier auprès de l’administration des douanes qu’il a pris les mesures visées au quatrième alinéa de l’article L. 716-8.

« En vue de prendre ces mesures, le demandeur peut obtenir de l’administration des douanes communication des nom et adresse de l’expéditeur, de l’importateur, du destinataire et du détenteur des marchandises retenues, ainsi que de leur quantité, leur origine, leur provenance et leur destination par dérogation à l’article 59 bis du code des douanes.

« V. – La définition des petits envois est précisée par arrêté du ministre chargé des douanes.

« VI. – Le présent article n’est pas applicable aux denrées périssables.

« Art. L. 716-8-6. – Lorsque la personne ayant déposé la demande visée à l’article L. 716-8 ou la personne titulaire d’une décision faisant droit à une demande relevant de la réglementation européenne en vigueur les informations qui lui sont communiquées par l’administration des douanes, par dérogation à l’article 59 bis du code des douanes, à d’autres fins que celles prévues par le présent chapitre, l’administration des douanes abroge, suspend ou refuse de renouveler ladite demande.

« Art. L. 716-8-7. – En vue de prononcer les mesures prévues aux articles L. 716-8 à L. 716-8-3, les agents des douanes appliquent les pouvoirs qui leur sont dévolus par le code des douanes.

« Art. L. 716-8-8. – Un décret en Conseil d’État fixe :

« – les conditions d’application des mesures prévues aux articles L. 716-8 à L. 716-8-6 ;

« – les conditions dans lesquelles a lieu la destruction, prévue par la réglementation européenne en vigueur, des marchandises susceptibles de constituer une contrefaçon d’une marque enregistrée, ainsi que les conditions du prélèvement d’échantillons préalable à ladite destruction.

« Art. L. 716-8-9. – Les officiers de police judiciaire peuvent procéder, dès la constatation des infractions prévues aux articles L. 716-9 et L. 716-10, à la saisie des produits fabriqués, importés, détenus, mis en vente, livrés ou fournis illicitement et des matériels spécialement installés en vue de tels agissements. »

K. – Alinéa 100

Au début, insérer les mots :

Sous réserve des procédures prévues aux articles L. 722-13 et L. 722-14,

L. – Alinéas 116 et 117

Remplacer ces alinéas par vingt-trois alinéas ainsi rédigés :

« Art. L. 722-13. – I. – Lorsque la retenue portant sur des marchandises soupçonnées de constituer une contrefaçon d’une indication géographique est mise en œuvre après qu’une demande d’intervention visée à l’article L. 722-9 a été acceptée, les marchandises soupçonnées de porter atteinte à une indication géographique peuvent être détruites sous le contrôle des agents des douanes dès lors que les conditions suivantes sont remplies :

« – le demandeur a confirmé par écrit et par une expertise détaillée aux autorités douanières, dans un délai de dix jours ouvrables, ou de trois jours ouvrables pour les denrées périssables, à partir de la notification de la retenue, le caractère contrefaisant des marchandises ;

« – le demandeur a confirmé par écrit aux autorités douanières, dans un délai de dix jours ouvrables, ou de trois jours ouvrables pour les denrées périssables, à partir de la notification de la retenue, qu’il consent à la destruction, sous sa responsabilité, des marchandises ;

« – le détenteur des marchandises a confirmé par écrit aux autorités douanières, dans un délai de dix jours ouvrables, ou de trois jours ouvrables pour les denrées périssables, à partir de la notification de la retenue, qu’il consent à la destruction des marchandises.

« II. – Si le détenteur n’a, dans le délai mentionné au dernier alinéa du I, ni confirmé qu’il consent à la destruction des marchandises ni informé l’administration des douanes qu’il s’oppose à leur destruction, il est réputé avoir consenti à cette destruction.

« III. – Lorsque le détenteur des marchandises n’a pas confirmé par écrit qu’il consent à leur destruction et qu’il n’est pas réputé avoir confirmé qu’il consent à la destruction des marchandises dans les délais prévus, l’administration des douanes en informe immédiatement le demandeur lequel, dans un délai de dix jours ou de trois jours ouvrables pour les denrées périssables à partir de la notification de la retenue, prend les mesures mentionnées au quatrième alinéa de l’article L. 722-9. Le délai de dix jours peut être prorogé de dix jours ouvrables maximum sur requête dûment motivée du demandeur. En cas de prorogation du délai, le procureur de la République et le détenteur de la marchandise en sont informés.

« Si les conditions prévues au I du présent article ne sont pas réunies et si le demandeur n’a pas justifié auprès de l’administration des douanes qu’il a pris les mesures mentionnées au quatrième alinéa de l’article L. 722-9, la mesure de retenue est levée de plein droit.

« IV. – Dans le cadre de la communication d’informations prévues au troisième alinéa de l’article L. 722-9 et au troisième alinéa de l’article L. 722-10, les autorités douanières informent le demandeur de l’existence de la procédure prévue au présent article. Les informations prévues au sixième alinéa de l’article L. 722-9 peuvent également être communiquées aux fins de mise en œuvre de la présente mesure.

« Art. L. 722-14. – I. – Lorsque la retenue portant sur des marchandises soupçonnées de constituer une contrefaçon d’une indication géographique est mise en œuvre après qu’une demande d’intervention visée à l’article L. 722-9 a été acceptée, les marchandises transportées en petits envois soupçonnées de porter atteinte à une indication géographique peuvent être détruites sous le contrôle des agents des douanes lorsque le demandeur a, dans la demande d’intervention, sollicité le recours à la procédure prévue par le présent article.

« II. – La notification visée au deuxième alinéa de l’article L. 722-9 est faite dans un délai d’un jour ouvrable à compter de la date du prononcé de la retenue. Elle comprend l’intention ou non de l’administration des douanes de détruire les marchandises ainsi que les droits dont bénéficie le détenteur des marchandises au titre des alinéas suivants :

« a) Le détenteur des marchandises dispose d’un délai de dix jours ouvrables à compter de la notification de la retenue pour faire connaître à l’administration ses observations ;

« b) Les marchandises concernées peuvent être détruites lorsque, dans un délai de dix jours ouvrables à partir de leur retenue, le détenteur des marchandises a confirmé à l’administration des douanes qu’il consent à cette destruction. En cas de silence du détenteur des marchandises dans ce délai, celui-ci est réputé avoir consenti à leur destruction.

« L’administration des douanes communique au demandeur, sur requête de celui-ci, les informations relatives à la quantité réelle ou estimée des marchandises détruites et à leur nature.

« III. – Lorsque le détenteur des marchandises n’a pas confirmé qu’il consent à leur destruction ou lorsqu’il n’est pas réputé avoir consenti à leur destruction, l’administration des douanes en informe immédiatement le demandeur et lui communique la quantité, la nature, ainsi que des images des marchandises.

« IV. – La mesure de retenue est levée de plein droit à défaut, pour le demandeur, dans le délai de dix jours ouvrables, à compter de la notification prévue au III, de justifier auprès de l’administration des douanes qu’il a pris les mesures visées au quatrième alinéa de l’article L. 722-9.

« En vue de prendre ces mesures, le demandeur peut obtenir de l’administration des douanes communication des nom et adresse de l’expéditeur, de l’importateur, du destinataire et du détenteur des marchandises retenues, ainsi que de leur quantité, leur origine, leur provenance et leur destination par dérogation à l’article 59 bis du code des douanes.

« V. – La définition des petits envois est précisée par arrêté du ministre chargé des douanes.

« VI. – Le présent article n’est pas applicable aux denrées périssables.

« Art. L. 722-15. – Lorsque la personne ayant déposé la demande visée à l’article L. 722-9 ou la personne titulaire d’une décision faisant droit à une demande relevant de la réglementation européenne en vigueur les informations qui lui sont communiquées par l’administration des douanes, par dérogation à l’article 59 bis du code des douanes, utilise ces informations à d’autres fins que celles prévues par le présent chapitre, l’administration des douanes abroge, suspend ou refuse de renouveler ladite demande.

« Art. L. 722-16. – En vue de prononcer les mesures prévues aux articles L. 722-9 à L. 722-12, les agents des douanes appliquent les pouvoirs qui leur sont dévolus par le code des douanes.

« Art. L. 722-17. – Un décret en Conseil d’État fixe :

« – les conditions d’application des mesures prévues aux articles L. 722-9 à L. 722-15 ;

« – les conditions dans lesquelles a lieu la destruction des marchandises susceptibles de porter atteinte à une indication géographique prévue par la réglementation européenne en vigueur ainsi que les conditions du prélèvement d’échantillons préalable à ladite destruction. »

Cet amendement a été précédemment défendu par Mme la ministre.

L'amendement n° 33 rectifié, présenté par M. Delebarre, au nom de la commission, est ainsi libellé :

I. – Alinéa 18

Remplacer le mot :

voisin,

par les mots :

voisin la demande prévue à l’article L. 335-10 du présent code, déposée

et supprimer les mots :

, la demande prévue à l’article L. 335-10 du présent code

II. – Alinéa 32

Remplacer les mots :

d’exploitation,

par les mots :

d’exploitation la demande prévue à l’article L. 521-14 du présent code, déposée

et supprimer les mots :

, la demande prévue à l’article L. 521-14 du présent code

III. – Alinéa 51

Remplacer les mots :

d’exploitation,

par les mots :

d’exploitation la demande prévue à l’article L. 614-32 du présent code, déposée

et supprimer les mots :

, la demande prévue par l’article L. 614-32 du présent code

IV. – Alinéa 75

Remplacer le mot :

végétale,

par les mots :

végétale la demande prévue à l’article L. 623-36 du présent code, déposée

et supprimer les mots :

, la demande prévue à l’article L. 623-36 du présent code

V. – Alinéa 89

Remplacer les mots :

d’exploitation,

par les mots :

d’exploitation la demande prévue à l’article L. 716-8 du présent code, déposée

et supprimer les mots :

, la demande prévue à l’article L. 716-8 du présent code

VI. – Alinéa 109

Remplacer le mot :

géographiques,

par les mots :

géographiques la demande prévue à l’article L. 722-9 du présent code, déposée

et supprimer les mots :

, la demande prévue à l’article L. 722-9 du présent code

La parole est à M. le rapporteur.

M. Michel Delebarre, rapporteur. Étant favorable aux amendements du Gouvernement, je me contenterai de dire que l’amendement n° 33 rectifié précise l’une des modalités de mise en œuvre du dispositif.

M. le président. L'amendement n° 3 rectifié, présenté par MM. Guerriau, Arthuis et Amoudry, Mmes Morin-Desailly et Goy-Chavent et MM. Roche et Jarlier, est ainsi libellé :

Après l’alinéa 45

Insérer deux alinéas ainsi rédigés :

« – sur la production à la ferme par un agriculteur de ses semences, de ses plants ou de ses animaux pour les besoins de son exploitation agricole librement récoltées dans le territoire de l'agriculteur et ce quelle que soit l'origine de ces semences, de ces plants ou de ces animaux ;

« – sur la production à la ferme par un agriculteur de ses ferments, levains, levures et autres préparations naturelles à base de micro-organismes ou d'autres éléments naturels issus de sa ferme ou de l'environnement naturel et destinés à ses productions fermières ou aux soins de ses cultures ou de ses animaux ;

Cet amendement n’est pas soutenu.

L'amendement n° 20, présenté par Mme Lipietz et les membres du groupe écologiste, est ainsi libellé :

Alinéas 60 à 83

Supprimer ces alinéas.

La parole est à Mme Hélène Lipietz.

Mme Hélène Lipietz. Je retire cet amendement, monsieur le président.

M. le président. L’amendement n° 20 est retiré.

Quel est l’avis de la commission sur les amendements nos 8 rectifié et 7 rectifié ?

M. Michel Delebarre, rapporteur. Favorable !

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement sur l’amendement n° 33 rectifié ?

Mme Nicole Bricq, ministre. Favorable. !

M. le président. La parole est à M. Richard Yung, pour explication de vote sur l’amendement n° 8 rectifié.

M. Richard Yung. Je soutiendrai les amendements du Gouvernement.

Il faut bien avoir conscience que, si les douanes françaises ont des capacités d’action dans le domaine des marques, c’est parce que notre pays a la tradition de la marque ! En revanche, s’agissant des brevets, des dessins et modèles, des certificats, les douanes sont, en l’état actuel des choses, démunies. Cette situation est tout de même paradoxale !

Les amendements du Gouvernement viennent utilement combler ce vide.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 8 rectifié.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 7 rectifié.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 33 rectifié.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. L'amendement n° 6 rectifié, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :

Après l'alinéa 59

Insérer un paragraphe ainsi rédigé :

… – La section 2 du chapitre II du titre II du livre VI de la deuxième partie du même code est complétée par un article L. 622-8 ainsi rédigé :

« Art. L. 622-8. – Les articles L. 614-32 à L. 614-39 sont applicables au présent chapitre. »

Cet amendement a été précédemment défendu par Mme la ministre.

Quel est l’avis de la commission ?

M. Michel Delebarre, rapporteur. Favorable !

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 6 rectifié.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'article 7, modifié.

(L'article 7 est adopté.)

Article 7 (Texte non modifié par la commission)
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Article 9

Article 8

(Non modifié)

Le 4 de l’article 38 du code des douanes est ainsi rédigé :

« 4. Au titre des dispositions dérogatoires prévues à l’article 2 bis, le présent article est applicable :

« - aux produits liés à la défense dont le transfert est soumis à l’autorisation préalable prévue à l’article L. 2335-10 du code de la défense, aux produits chimiques du tableau 1 annexé à la convention de Paris et mentionnés à l’article L. 2342-8 du même code, aux matériels mentionnés à l’article L. 2335-18 du même code ainsi qu’aux produits explosifs destinés à des fins militaires mentionnés à l’article L. 2352-1 dudit code,

« - aux marchandises relevant des articles 2 et 3 de la loi n° 92-1477 du 31 décembre 1992 relative aux produits soumis à certaines restrictions de circulation et à la complémentarité entre les services de police, de gendarmerie et de douane,

« - aux biens culturels et trésors nationaux relevant des articles L 111-1 et L 111-2 du code du patrimoine,

« - aux substances classifiées en catégorie 1 par l’annexe I du règlement (CE) n° 273/2004 du Parlement européen et du Conseil, du 11 février 2004, relatif aux précurseurs de drogues,

« - aux marchandises mentionnées à l’article L. 5132-9 du code de la santé publique,

« - aux médicaments à usage humain mentionnés à l’article L. 5124-13 du même code,

« - aux micro-organismes et aux toxines mentionnés à l’article L. 5139-1 du même code,

« - aux médicaments à usage vétérinaire mentionnés à l’article L. 5142-7 du même code,

« - aux marchandises contrefaisantes,

« - aux produits sanguins labiles et aux pâtes plasmatiques mentionnés au 1° et au 2° de l’article L. 1221-8 du code de la santé publique, au sang, ses composants et ses produits dérivés à des fins scientifiques mentionnés à l’article L. 1221-12 du même code,

« - aux organes, tissus et leurs dérivés, cellules, gamètes et tissus germinaux issus du corps humain ainsi qu’aux préparations de thérapie cellulaire et aux échantillons biologiques mentionnés aux articles L. 1235-1, L. 1243-1, L. 2141-11-1 et L. 1245-5 du même code,

« - aux tissus ou cellules embryonnaires ou fœtaux mentionnés à l’article L. 2151-6 du même code,

« - aux sources artificielles et naturelles de radionucléides définies à l’article L. 1333-1 du même code et relevant des articles L. 1333-2 et L. 1333-4 du même code,

« - aux déchets définis à l’article L. 541-1-1 du code de l’environnement dont l’importation, l’exportation ou le transit sont régis par les articles L. 541-40 à L. 541-42-2 du même code, ainsi que par le règlement (CE) n° 1013/2006 du Parlement européen et du Conseil, du 14 juin 2006, concernant les transferts de déchets et les décisions des autorités de l’Union européenne prises en application de ce règlement,

« - aux objets de toute nature comportant des images ou des représentations d’un mineur à caractère pornographique mentionnées à l’article 227-23 du code pénal. »

M. le président. L'amendement n° 2 rectifié, présenté par MM. Guerriau, Arthuis et Amoudry, Mmes Morin-Desailly et Goy-Chavent et MM. Roche et Jarlier, est ainsi libellé :

Compléter cet article par deux alinéas ainsi rédigés :

Après le 4 de l’article 38 du code des douanes, il est inséré un 4 bis ainsi rédigé :

« 4 bis. Au titre des dispositions dérogatoires prévues à l'article 2 bis, le présent article ne s'applique pas à la reproduction par un agriculteur, de ses animaux reproducteurs, semences de ferme, plants, ferments, levains, levures et autres préparations naturelles à base de micro-organismes ou d’autres éléments naturels issus de sa ferme ou de l’environnement naturel et destinés à ses productions fermières ou au soin de ses cultures ou de ses animaux. »

Cet amendement n'est pas soutenu.

Je mets aux voix l'article 8.

(L'article 8 est adopté.)

Article 8
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Article 10

Article 9

(Non modifié)

Les deux premiers alinéas du II de l’article 67 bis du code des douanes sont remplacés par sept alinéas ainsi rédigés :

« II. – Lorsque les investigations le justifient, le procureur de la République peut autoriser qu’il soit procédé, sous son contrôle, à une opération d’infiltration dans les conditions prévues par le présent article afin :

« 1° De constater les infractions suivantes :

« - les infractions douanières d’importation, d’exportation ou de détention de substances ou plantes classées comme stupéfiants, de contrebande de tabac manufacturé, d’alcool et spiritueux ;

« - les infractions mentionnées à l’article 414 lorsqu’elles portent sur des marchandises contrefaisantes ;

« - les infractions prévues à l’article 415 du présent code ;

« 2° D’identifier les auteurs et complices de ces infractions ainsi que ceux qui y ont participé comme intéressés au sens de l’article 399 du présent code ;

« 3° D’effectuer les saisies prévues par le présent code. » – (Adopté.)

Article 9
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Article additionnel après l’article 10

Article 10

(Non modifié)

L’article 67 bis-1 du code des douanes est ainsi modifié :

1° Au premier alinéa, après le mot : « complices », sont insérés les mots : « ainsi que ceux qui y ont participé comme intéressés au sens de l’article 399 » ;

2° Après la première occurrence du mot : « marchandises », la fin du dernier alinéa est ainsi rédigée : « contrefaisantes ». – (Adopté.)

Article 10
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Article 11

Article additionnel après l’article 10

M. le président. L'amendement n° 14, présenté par MM. Dallier et de Montgolfier, est ainsi libellé :

Après l’article 10

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le Gouvernement remet au Parlement un rapport sur la possibilité et l’opportunité d’étendre le champ de la procédure d’infiltration dite des « coups d’achat », telle que prévue à l’article 67 bis-I du code des douanes.

Le rapport étudiera, d’une part, l’extension du dispositif à d’autres marchandises prohibées au sens de l’article 38 du code des douanes ou faisant l’objet de réglementations particulières, et, d’autre part, à des marchandises qui, sans être illégales, sont suspectées d’échapper au paiement des droits et taxes dus à l’importation.

Le rapport est remis au plus tard le 1er juillet 2014.

Cet amendement n'est pas soutenu.

Article additionnel après l’article 10
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Article 12

Article 11

(Non modifié)

Le code de la propriété intellectuelle est ainsi modifié :

1° La première phrase du dernier alinéa de l’article L. 343-2 est ainsi rédigée :

« Lorsque les mesures prises pour faire cesser une atteinte aux droits du producteur de bases de données sont ordonnées avant l’engagement d’une action au fond, le demandeur doit, dans un délai fixé par voie réglementaire, soit se pourvoir, par la voie civile ou pénale, soit déposer une plainte auprès du procureur de la République. » ;

2° La première phrase du dernier alinéa de l’article L. 521-6 est ainsi rédigée :

« Lorsque les mesures prises pour faire cesser une atteinte aux droits sont ordonnées avant l’engagement d’une action au fond, le demandeur doit, dans un délai fixé par voie réglementaire, soit se pourvoir, par la voie civile ou pénale, soit déposer une plainte auprès du procureur de la République. » ;

3° Le quatrième alinéa de l’article L. 521-14 est complété par les mots : « , soit d’avoir déposé une plainte auprès du procureur de la République » ;

4° La première phrase du dernier alinéa de l’article L. 615-3 est ainsi rédigée :

« Lorsque les mesures prises pour faire cesser une atteinte aux droits sont ordonnées avant l’engagement d’une action au fond, le demandeur doit, dans un délai fixé par voie réglementaire, soit se pourvoir, par la voie civile ou pénale, soit déposer une plainte auprès du procureur de la République. » ;

5° La première phrase du dernier alinéa de l’article L. 623-27 est ainsi rédigée :

« Lorsque les mesures prises pour faire cesser une atteinte aux droits sont ordonnées avant l’engagement d’une action au fond, le demandeur doit, dans un délai fixé par voie réglementaire, soit se pourvoir, par la voie civile ou pénale, soit déposer une plainte auprès du procureur de la République. » ;

6° La première phrase du dernier alinéa de l’article L. 716-6 est ainsi rédigée :

« Lorsque les mesures prises pour faire cesser une atteinte aux droits sont ordonnées avant l’engagement d’une action au fond, le demandeur doit, dans un délai fixé par voie réglementaire, soit se pourvoir, par la voie civile ou pénale, soit déposer une plainte auprès du procureur de la République. » ;

7° Le quatrième alinéa de l’article L. 716-8 est complété par les mots : « , soit d’avoir déposé une plainte auprès du procureur de la République ».

8° La première phrase du dernier alinéa de l’article L. 722-3 est ainsi rédigée :

« Lorsque les mesures prises pour faire cesser une atteinte à une indication géographique sont ordonnées avant l’engagement d’une action au fond, le demandeur doit, dans un délai fixé par voie réglementaire, soit se pourvoir, par la voie civile ou pénale, soit déposer une plainte auprès du procureur de la République. » – (Adopté.)

Article 11
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Article 13 (Texte non modifié par la commission)

Article 12

(Non modifié)

I.- L’article 66 du code des douanes est ainsi rédigé :

« Art. 66. – 1. Pour la recherche et la constatation des infractions prévues au présent code, les agents des douanes ont accès aux locaux des prestataires de services postaux et des entreprises de fret express où sont susceptibles d’être détenus des envois renfermant ou paraissant renfermer des marchandises et des sommes, titres ou valeurs se rapportant à ces infractions. Cet accès ne s’applique pas à la partie des locaux qui sont affectés à usage privé.

« Cet accès a lieu entre 8 heures et 20 heures ou en dehors de ces heures, lorsque l’accès au public est autorisé ou lorsque sont en cours des activités de tri, de transport, de manutention ou d’entreposage.

« 2. Chaque intervention se déroule en présence de l’opérateur contrôlé ou de son représentant et fait l’objet d’un procès-verbal relatant le déroulement des opérations de contrôle dont une copie lui est remise, au plus tard, dans les cinq jours suivant son établissement.

« 3. Il ne peut, en aucun cas, être porté atteinte au secret des correspondances. »

II.- L’article L. 6-1 du code des postes et des communications électroniques est ainsi rédigé :

« Art. L. 6-1 - Les prestataires de services postaux soumettent au contrôle douanier les envois clos ou non dans les conditions prévues à l’article 66 du code des douanes. » – (Adopté.)

Article 12
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Article additionnel après l’article 13

Article 13

(Non modifié)

Après l’article 67 quinquies du code des douanes, il est inséré un article 67 sexies ainsi rédigé :

« Art. 67 sexies – I – Les prestataires de services postaux et les entreprises de fret express transmettent à la direction générale des douanes et droits indirects, les données dont ils disposent et pour autant qu’elles soient nécessaires à l’identification des marchandises, biens et objets acheminés, de leurs moyens de transport ainsi que des personnes concernées par leur acheminement.

« Ces données ne peuvent être de celles qui relèvent du I de l’article 8 de la loi n° 78-17 du 6 janvier 1978 relative à l’informatique, aux fichiers et aux libertés.

« II – Afin de faciliter, pour les agents des douanes, la constatation des infractions visées aux articles 414, 415 et 459 du présent code, le rassemblement des preuves de ces infractions et la recherche de leurs auteurs, le ministre chargé des douanes est autorisé à mettre en œuvre des traitements automatisés des données transmises en application du I.

« Seuls les agents des douanes individuellement désignés et spécialement habilités par le ministre chargé des douanes ont accès aux données.

« III – Les traitements mentionnés au II sont soumis aux dispositions de la loi n° 78-17 du 6 janvier 1978 précitée.

« Les prestataires et entreprises mentionnés au I informent les personnes concernées par les traitements mis en œuvre par la direction générale des douanes et des droits indirects.

« IV – Un décret en Conseil d’État, pris après avis de la Commission nationale de l’informatique et des libertés, fixe les modalités d’application du présent article. Il précise notamment la nature et les modalités de transmission des données mentionnées au I., les catégories de données concernées par les traitements mentionnés au II., les modalités d’accès et d’utilisation des données par les agents habilités, la durée de conservation des données, ainsi que les modalités d’exercice par les personnes concernées des droits d’accès et de rectification. »

M. le président. L'amendement n° 29, présenté par Mme Lipietz et les membres du groupe écologiste, est ainsi libellé :

Alinéa 2

Après les mots :

et droits indirects,

insérer les mots :

sur autorisation du juge,

La parole est à Mme Hélène Lipietz.

Mme Hélène Lipietz. Cet amendement tend à prévoir une autorisation du juge pour la transmission des informations qui fait l’objet de l’article 13.

Cette garantie minimale me paraît vraiment importante, d’autant que le juge saisi – le juge des libertés, par exemple – peut se prononcer extrêmement rapidement. L’importance de l’atteinte nous paraît nécessiter au moins l’aval du juge.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Michel Delebarre, rapporteur. La commission sollicite le retrait de cet amendement. À défaut, elle émettra un avis défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Nicole Bricq, ministre. L’article 13 insère un nouvel article 67 sexies dans le code des douanes, article qui prévoit la transmission aux douanes des données détenues par les opérateurs du fret express et de la Poste.

L’analyse de ces données avant l’arrivée des marchandises permettra aux douanes de mieux cibler les flux à contrôler. Les contrôles du fret express allieront ainsi l’efficacité des contrôles et la moindre gêne pour les prestations auxquelles les « expressistes », comme on les appelle, sont tenus vis-à-vis de leurs clients.

Il faut articuler ces deux exigences ; il y va tout de même de la compétitivité !

Cette mesure concerne une finalité spécifique, la police des marchandises, et une mission sensible, la recherche des infractions douanières de nature uniquement délictuelle, c'est-à-dire les infractions les plus graves, notamment la lutte contre les contrefaçons. Elle consiste à permettre, dans la durée, un traitement de données de type data mining – difficile d’échapper aux anglicismes lorsqu’il s’agit de commerce…

Dans ces conditions, le fait de soumettre la transmission des données concernées à autorisation judiciaire, comme vous le proposez par votre amendement, madame Lipietz, est incompatible avec l’objet et la finalité mêmes du traitement.

À cet égard, les garanties d'ores et déjà prévues par le texte doivent être soulignées. Je les répète, car je ne désespère pas de vous convaincre…

Tout d’abord, seules les données dont disposent déjà les expressistes seront demandées. Ensuite, le traitement de ces données obéira à toutes les prescriptions de la loi de 1978 relative à l’informatique, aux fichiers et aux libertés. Les données seront ainsi définies dans le cadre d’un décret en Conseil d’État pris après avis de la Commission nationale de l’informatique et des libertés, la CNIL, garante des principes établis par la loi de 1978. Enfin, ce décret sera préparé dans le cadre d’un groupe de travail réunissant des représentants des expressistes et de la Poste.

Comme je l’ai annoncé au rapporteur, le Parlement sera bien évidemment associé à sa préparation.

Pour cette raison, madame Lipietz, le Gouvernement sollicite le retrait de votre amendement. À défaut, il émettrait un avis défavorable.

M. le président. Madame Lipietz, l'amendement n° 29 est-il maintenu ?

Mme Hélène Lipietz. Non, je le retire, monsieur le président.

M. le président. L'amendement n° 29 est retiré.

L'amendement n° 34, présenté par M. Delebarre, au nom de la commission, est ainsi libellé :

I. – Alinéa 2

Remplacer les mots :

et pour autant qu’elles soient nécessaires

par le mot :

relatives

II. – Alinéa 3

Remplacer cet alinéa par trois alinéas ainsi rédigés :

« Sont exclues de la transmission mentionnée au premier alinéa :

« 1° Les données mentionnées au I de l’article 8 de la loi n° 78-17 du 6 janvier 1978 relative à l’informatique, aux fichiers et aux libertés ;

« 2° Les données relatives aux envois domestiques.

III. – Après l’alinéa 3

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

« Cette transmission ne peut porter atteinte au secret des correspondances.

IV. – Alinéa 8, seconde phrase

Supprimer cette phrase.

V. – Compléter cet article par sept alinéas ainsi rédigés :

« Ce décret précise notamment :

« 1° La nature et les modalités de transmission des données mentionnées au I ;

« 2° Les catégories de données concernées par les traitements mentionnés au II ;

« 3° Les modalités d’accès et d’utilisation des données par les agents mentionnés au II ;

« 4° Les modalités du contrôle du respect de l’obligation mentionnée au second alinéa du III ;

« 5° La durée de conservation des données, dans la limite du délai de prescription applicable aux infractions mentionnées au II ;

« 6° Les modalités d’exercice par les personnes concernées de leur droit d’accès et de rectification des données. »

La parole est à M. le rapporteur.

M. Michel Delebarre, rapporteur. Avant de présenter cet amendement, je veux rappeler que j’avais proposé aux représentants des expressistes, que j’ai reçus, de continuer à discuter des modalités de mise en œuvre de l’article 13. À cet égard, je veux vous remercier, madame la ministre, du dialogue que vous allez engager.

J’en viens à l’amendement, qui vise à clarifier, préciser et mieux encadrer les dispositions relatives aux traitements automatisés mis en œuvre par les douanes sur les données transmises par les opérateurs postaux et de fret express, afin de mieux respecter le principe constitutionnel de proportionnalité.

Il tend à préciser, en particulier, qu’il ne peut être porté atteinte au secret des correspondances et que les données relatives aux envois domestiques de colis, c'est-à-dire aux colis expédiés depuis la France à destination de la France, sont exclues de l’obligation de transmission.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Nicole Bricq, ministre. Le Gouvernement est favorable à cet amendement, mais considère qu’il convient de bien cerner les enjeux.

Monsieur le rapporteur, vous voulez affiner et préciser le contenu du décret.

M. Michel Delebarre, rapporteur. Oui !

Mme Nicole Bricq, ministre. Le Gouvernement se réjouit que le Parlement, dont les éclairages lui sont très utiles, exerce son « droit d’encadrement » !

Toutefois, je tiens à préciser qu’il n’est en aucun cas question de porter atteinte au principe du secret des correspondances.

Pour mémoire, l’article 66 du code des douanes interdit aux agents des douanes d’accéder au contenu de correspondances privées, la violation de cette interdiction étant sanctionnée par l’article 432-9 du code pénal.

Le Gouvernement est sensible à la proposition d’exclure de l’obligation de transmission les données relatives aux envois domestiques de colis. Néanmoins, cette disposition mérite un examen juridique approfondi au regard du droit européen, car il convient de s’assurer qu’elle ne constitue pas une entrave injustifiée à la libre circulation des marchandises.

Par conséquent, je vous propose que nous puissions continuer à réfléchir ensemble à sa rédaction, en vue de l’examen de la proposition de loi par l’Assemblée nationale. (M. le rapporteur approuve.)

J’en profite pour apporter une précision à M. Collin, qui s’inquiétait de la poursuite du débat devant l’autre assemblée : le ministre chargé des relations avec le Parlement m’a assuré que la proposition de loi serait bien inscrite à l’ordre du jour de l’Assemblée nationale en février prochain.

M. Yvon Collin. Très bien !

M. Michel Delebarre, rapporteur. Déjà ?

Mme Nicole Bricq, ministre. Monsieur le rapporteur, j’attire votre attention sur le fait que la notion d’« envoi domestique » n’est pas définie juridiquement et qu’il conviendra d’y pourvoir dans le décret dans l’hypothèse où l’exclusion que vous proposez était retenue. Il est convenu d’entendre par « envoi domestique » les envois pour lesquels l’expéditeur et le destinataire sont établis en France.

Sous le bénéfice de ces observations, le Gouvernement est favorable à cet amendement, qui apporte d’utiles précisions à l’article 13.

Pour terminer, je remercie le rapporteur et la commission du travail qu’ils ont effectué.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 34.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. L'amendement n° 15, présenté par MM. Dallier et de Montgolfier, est ainsi libellé :

Alinéa 2

Après les mots :

de leurs moyens de transport

rédiger ainsi la fin de cet alinéa :

et des personnes concernées par leur acheminement, ainsi qu’à l’estimation de leur valeur.

Cet amendement n'est pas soutenu.

Je mets aux voix l'article 13, modifié.

(L'article 13 est adopté.)

Article 13 (Texte non modifié par la commission)
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Article 14

Article additionnel après l’article 13

M. le président. L'amendement n° 16, présenté par MM. Dallier et de Montgolfier, est ainsi libellé :

Après l’article 13

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

L’article 293 A du code général des impôts est complété par un 3 ainsi rédigé :

« 3. Par dérogation au 1, pour les biens importés dans le cadre d’une vente par correspondance effectuée par voie électronique, le fait générateur se produit et la taxe devient exigible au moment de la transaction entre l’acheteur et le vendeur.

« La taxe est collectée et reversée au Trésor par le prestataire de services de paiement au sens de l’article L. 521-1 du code monétaire et financier.

« Le présent 3 s’applique sous réserve de sa compatibilité avec le droit de l’Union européenne. »

Cet amendement n'est pas soutenu.

Article additionnel après l’article 13
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Article 15

Article 14

(Non modifié)

Le code de la sécurité intérieure est ainsi modifié :

1° Au premier alinéa de l’article L. 233-1, le mot : « deuxième » est remplacé par le mot : « dernier » ;

2° Au 5° du II de l’article L. 251-2, le mot : « second » est remplacé par le mot : « dernier ». – (Adopté.)

Article 14
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Article 16

Article 15

Le dernier alinéa de l’article 63 ter du code des douanes est ainsi rédigé :

« Le présent article s’applique à la partie affectée à usage privatif des locaux et lieux mentionnés au premier alinéa lorsque leur occupant ou son représentant en donne l’assentiment exprès. Cet assentiment fait l’objet d’une déclaration signée par l’intéressé et recueillie sur place, annexée au procès-verbal mentionné au troisième alinéa. » – (Adopté.)

CHAPITRE VI

Dispositions diverses

Article 15
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Article 16 bis (nouveau)

Article 16

(Non modifié)

Le code de la propriété intellectuelle est ainsi modifié :

1° Au dernier alinéa de l’article L. 321-1, le mot : « dix » est remplacé par le mot : « cinq » ;

2° À la première phrase du quatrième alinéa de l’article L. 321-9, les mots : « , sans préjudice des demandes de paiement des droits non prescrits » sont supprimés ;

3° Au second alinéa de l’article L. 511-10, à l’article L. 521-3, aux deux derniers alinéas de l’article L. 611-8, à l’article L. 615-8, à la seconde phrase du second alinéa de l’article L. 622-3, au premier alinéa de l’article L. 623-29, au second alinéa de l’article L. 712-6 et à l’avant-dernier alinéa de l’article L. 716-5, le mot : « trois » est remplacé par le mot : « cinq ». – (Adopté.)

Article 16
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Article 17

Article 16 bis (nouveau)

Après l’article L. 422-10 du code de la propriété intellectuelle, il est inséré un article L. 422-10-1 ainsi rédigé :

« Art. L. 422-10-1. – La formation continue est obligatoire pour les conseils en propriété industrielle inscrits sur la liste mentionnée au troisième alinéa de l’article L. 422-1.

« La compagnie nationale des conseils en propriété industrielle contrôle le respect de cette obligation.

« Un décret en Conseil d’État détermine la nature et la durée des activités susceptibles d’être validées au titre de l’obligation de formation continue, ainsi que les modalités de son contrôle. » – (Adopté.)

Article 16 bis (nouveau)
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Article 18

Article 17

(Non modifié)

À la seconde phrase de l’article L. 615-20 du code de la propriété intellectuelle, les mots : « en chambre du conseil » sont supprimés. – (Adopté.)

Article 17
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Article 19

Article 18

(Non modifié)

Au dernier alinéa de l’article L. 716-10 du code de la propriété intellectuelle, après les mots : « au public en ligne », sont insérés les mots : « ou lorsque les faits portent sur des marchandises dangereuses pour la santé ou la sécurité de l’homme ou l’animal ». – (Adopté.)

Article 18
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Article 20

Article 19

(Non modifié)

Le code de la propriété intellectuelle est ainsi modifié :

1° Au premier alinéa de l’article L. 722-1, le mot : « engage » est remplacé par les mots : « constitue une contrefaçon engageant » ;

2° L’article L. 722-2 est ainsi modifié :

a) Au premier alinéa, les mots : « atteinte à l’indication géographique » sont remplacés par le mot : « contrefaçon » ;

b) Au second alinéa, les mots : « atteinte à l’indication géographique » sont remplacés par le mot : « contrefaçon » ;

3° L’article L. 722-3 est ainsi modifié :

a) À la première phrase du premier alinéa, les mots : « pour une atteinte à une indication géographique » sont remplacés par les mots : « en contrefaçon », les mots : « auteur de cette atteinte » sont remplacés par le mot : « contrefacteur » et les mots : « portant prétendument atteinte à celle-ci » sont remplacés par les mots : « argués de contrefaçon » ;

b) Le deuxième alinéa est ainsi modifié :

- à la première phrase, les mots : « portant prétendument atteinte à une indication géographique » sont remplacés, deux fois, par les mots : « argués de contrefaçon » ;

- à la deuxième phrase, les mots : « auteur de l’atteinte à une indication géographique » sont remplacés par le mot : « contrefacteur » ;

c) À l’avant-dernier alinéa, les mots : « pour atteinte à l’indication géographique » sont remplacés par les mots : « en contrefaçon » ;

4° L’article L. 722-4 est ainsi modifié :

a) Au premier alinéa, les mots : « L’atteinte à une indication géographique » sont remplacés par les mots : « La contrefaçon » ;

b) Aux deuxième et troisième alinéas, les mots : « portant prétendument atteinte à une indication géographique » sont remplacés par les mots : « prétendus contrefaisants » ;

5° À l’article L. 722-7, les mots : « pour atteinte à une indication géographique » sont remplacés par les mots : « pour contrefaçon » et les mots : « portant atteinte à une indication géographique » sont remplacés par le mot : « contrefaisants ». – (Adopté.)

CHAPITRE VII

Dispositions finales

Article 19
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Explications de vote sur l'ensemble (début)

Article 20

I. – La présente loi est applicable dans les îles Wallis et Futuna.

II. – Les articles 6, 7, 9 à 15 et 18 sont applicables en Nouvelle-Calédonie et en Polynésie française.

III (nouveau). – L’intitulé de la troisième partie du code de la propriété intellectuelle est ainsi rédigé : « Dispositions relatives à l’outre-mer » – (Adopté.)

Vote sur l’ensemble

Article 20
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Explications de vote sur l'ensemble (fin)

M. le président. Avant de mettre aux voix l’ensemble de la proposition de loi, je donne la parole à M. Robert del Picchia, pour explication de vote.

M. Robert del Picchia. Je suis tout à fait favorable à cette proposition de loi, que je trouve intelligente.

J’espère qu’elle sera efficace, car, quand on vit ou quand on voyage à l’étranger, on voit des contrefaçons de produits français un peu partout !

Permettez-moi de vous raconter une anecdote : débarquant un matin sur une île d’un pays méditerranéen ami que je ne citerai pas, je vois, sur les quais, étalés sur des tréteaux, tous les produits de luxe français possibles et imaginables. Je m’adresse aux deux représentants de la force publique présents sur les lieux, leur fais part de mon incompréhension, invoque la réglementation européenne… Savez-vous ce qu’ils me répondent ? « Monsieur, nous avons vérifié chacun de ces produits, un par un, aucun ne provient de notre pays ! » (Sourires.)

Dès lors, je voterai cette proposition de loi des deux mains !

M. le président. La parole est à M. Yvon Collin.

M. Yvon Collin. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, je veux simplement me réjouir une nouvelle fois de la grande qualité de cette proposition de loi, que nous allons sans doute voter à la quasi-unanimité, à l’issue d’un débat constructif et assez consensuel, tenu dans une ambiance excellente.

Madame la ministre, j’ai bien noté que M. le ministre chargé des relations avec le Parlement et vous-même vous étiez engagés à faire prospérer ce texte. Nous en sommes ravis ! Nous lui souhaitons bonne route et espérons qu’il trouvera une issue favorable à l’Assemblée nationale.

C’est donc avec enthousiasme que nous voterons cette proposition de loi, dont nous félicitons une nouvelle fois l’auteur, Richard Yung.

M. Michel Delebarre, rapporteur. Très bien !

M. le président. La parole est à M. Richard Yung.

M. Richard Yung. Je ne souhaite pas, à proprement parler, me livrer à une explication de vote, mais je tiens à remercier tous ceux qui ont contribué au cheminement de cette proposition de loi jusqu'à son inscription à l'ordre du jour de notre assemblée, ce qui n’était pas la chose la plus simple. Je remercie donc le Gouvernement, pour son soutien, le rapporteur, qui a bien voulu reprendre ce texte parfois un peu technique, et chacun d'entre vous, mes chers collègues, pour cette discussion intéressante et riche, qui a permis d'améliorer la proposition de loi.

D’autres étapes sont devant nous, ou plutôt devant nos collègues députés, avec l'inscription de l'examen de ce texte à l'ordre du jour de l’Assemblée nationale, puis la discussion elle-même. Mais, sur ce point, nous n’avons pas la main et devons donc nous fier aux engagements des uns et des autres pour que la loi soit adoptée.

M. le président. La parole est à M. Jean-Claude Lenoir.

M. Jean-Claude Lenoir. D'autres collègues se sont exprimés pour soutenir ce texte, je n’en serai que plus bref.

On ne peut pas dire que cette proposition soit une contrefaçon (Sourires.), mais du moins est-ce la copie conforme d'un texte déjà adopté, fruit du travail intense de personnes qui ne se trouvent aujourd'hui ni au banc des commissions ni au banc du Gouvernement. Je voulais donc simplement, de façon rétrospective et rétroactive, saluer ici leur travail.

M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...

Je mets aux voix l'ensemble de la proposition de loi dans le texte de la commission, modifié.

(La proposition de loi est adoptée.)

M. le président. Je constate que la proposition de loi a été adoptée à l'unanimité des présents.

La parole est à Mme la ministre.

Mme Nicole Bricq, ministre. Je voudrais remercier les sénateurs et les sénatrices, particulièrement ceux qui ont accepté de retirer des amendements qu’ils ont pu défendre : vous avez vraiment fait une œuvre utile, efficace. Vous avez fait progresser le droit.

Je voudrais signaler à M. Lenoir que j’ai reconnu la pertinence de la législation de 2011.

Mme Nicole Bricq, ministre. De même, j’ai reconnu la pertinence du travail effectué par Mme Christine Lagarde, en 2007. Mais la présente proposition de loi, dans la rédaction issue des travaux du Sénat telle qu’elle vient d’être adoptée par votre assemblée, comporte quatre articles nouveaux qui prolongent et amplifient le travail précédent.

Il peut arriver que les majorités se succédant partagent les mêmes objectifs…

M. Jean-Claude Lenoir. Parfaitement !

Mme Nicole Bricq, ministre. Et l'objectif commun, c'est de préserver la compétitivité des entreprises françaises, c'est de les défendre à l'international.

M. Charles Revet. Il faut le dire à l’extérieur !

Mme Nicole Bricq, ministre. Monsieur Revet, vous pouvez témoigner de l’utilité de ce combat, vous qui m'avez accompagnée dans un déplacement (M. Charles Revet le confirme.)

M. Jean-Claude Lenoir. Je suis, moi aussi, à votre disposition ! (Sourires.)

Mme Nicole Bricq, ministre. Je précise, mesdames, messieurs les sénateurs, que M. Revet est président d'un groupe d'amitié, et il n’est d'ailleurs pas le seul… J’ajoute qu’il ne votera pas pour autant tous les textes du Gouvernement ! (Nouveaux sourires.)

La défense des entreprises à l'international est donc utile et vous avez prouvé, mesdames, messieurs les sénateurs, une fois encore, le sérieux du travail du Sénat à cet égard.

M. Charles Revet. Comme toujours !

Mme Nicole Bricq, ministre. Ce texte, lorsqu’il sera examiné par l’Assemblée nationale, sera adopté sur l'initiative du Sénat, j’y veillerai tout particulièrement.

Je voudrais aussi rappeler à M. Collin que, demain, le Sénat examinera en premier lieu le projet de loi autorisant la ratification de l'accord relatif à une juridiction unifiée du brevet. (M. Robert del Picchia le confirme.) C'est extrêmement important, et l'on se trouvera dans la même configuration.

Enfin, je tiens à vous renouveler mes remerciements, mais je n’en attendais pas moins du Sénat. Je connais son sérieux, notamment celui de la commission des lois. Monsieur le rapporteur, vous nous avez dit que vous aviez beaucoup débattu en commission des lois.

M. Michel Delebarre, rapporteur. C’est vrai !

Mme Nicole Bricq, ministre. Eh bien, ce débat vient de se prolonger dans l'hémicycle, sous le regard du public, dans la plus grande transparence démocratique ! (Applaudissements au banc des commissions.)

M. le président. Mes chers collègues, nous avons achevé l'examen de ce texte avec quarante-cinq minutes d'avance sur le temps imparti, ce dont je vous félicite. Aussi – et je prie les visiteurs qui viennent de nous rejoindre dans les tribunes de nous en excuser –, nous allons interrompre nos travaux avant d’aborder le point suivant de l’ordre du jour.

La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à dix-sept heures quarante-cinq, est reprise à dix-huit heures trente, sous la présidence de M. Jean-Patrick Courtois.)

PRÉSIDENCE DE M. Jean-Patrick Courtois

vice-président

M. le président. La séance est reprise.

Explications de vote sur l'ensemble (début)
Dossier législatif : proposition de loi tendant à renforcer la lutte contre la contrefaçon
 

7

Organisme extraparlementaire

M. le président. M. le Premier ministre a demandé au Sénat de bien vouloir procéder à la désignation d’un sénateur appelé à siéger au sein de la commission de surveillance de la Caisse des dépôts et consignations.

Conformément à l’article 9 du règlement du Sénat, la commission des finances a été saisie de cette désignation.

Les nominations au sein de cet organisme extraparlementaire auront lieu ultérieurement, dans les conditions prévues par l’article 9 du règlement.

8

Demande de création d'une mission commune d'information

M. le président. Par lettre en date du 19 novembre 2013, M. Jean-Vincent Placé, président du groupe écologiste, a fait connaître à M. le président du Sénat que le groupe écologiste exerce son droit de tirage, en application de l’article 6 bis du règlement, pour la création d’une mission commune d’information sur l’accès aux documents administratifs et aux données publiques.

La conférence des présidents sera saisie de cette demande de création lors de sa prochaine réunion.

9

 
Dossier législatif : proposition de loi relative à la prévention des inondations et à la protection contre celles-ci
Discussion générale (suite)

Prévention des inondations

Adoption d'une proposition de loi dans le texte de la commission

Discussion générale (début)
Dossier législatif : proposition de loi relative à la prévention des inondations et à la protection contre celles-ci
Article 1er (supprimé)

M. le président. L’ordre du jour appelle, à la demande du groupe du RDSE, la discussion de la proposition de loi relative à la prévention des inondations et à la protection contre celles-ci, présentée par M. Pierre-Yves Collombat et plusieurs de ses collègues (proposition n° 47, texte de la commission n° 145, rapport n° 144).

Dans la discussion générale, la parole est à M. Pierre-Yves Collombat, auteur de la proposition de loi.

M. Pierre-Yves Collombat, auteur de la proposition de loi. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, je commencerai par un bref rappel : fin février 2010, Xynthia a causé cinquante-trois morts, 700 millions d’euros de dégâts au titre de l’inondation, le double si l’on tient compte de ceux liés à la tempête ; les 15 et 16 juin 2010, vingt-trois morts, deux disparus, 1,2 milliard d’euros de dégâts à Draguignan et dans la basse vallée de l’Argens, dans le Var ; en novembre 2011, dans la basse vallée de l’Argens et le sud-est de la France, quatre morts, entre 500 millions et 800 millions d’euros de dégâts ; en décembre 2011, inondations dans les Vosges ; en octobre 2012, deux morts à la suite de pluies torrentielles sur La Garde et Toulon ; en octobre-novembre 2012, inondations dans le Pas-de-Calais ; en juin 2013, inondations en Haute-Garonne et dans les Hautes-Pyrénées, 127 communes sinistrées, 134 millions d’euros de dégâts ; fin octobre 2013, inondations dans la Drôme et l’Ardèche… À qui le tour ?

L’histoire s’accélère et, outre le coût humain, la facture est énorme : en moyenne, ces dernières années, elle a été de l’ordre de 700 millions à 800 millions d’euros par an, la moitié seulement de cette somme étant indemnisée au titre des catastrophes naturelles.

Quand viendra le tour de l’Île-de-France, selon l’Organisation de coopération et de développement économiques, l’OCDE, le coût sera de 40 milliards d’euros ! Comme l’a fait observer notre collègue Pozzo di Borgo en octobre 2013, devant le conseil de Paris, « tous les experts s’accordent : il ne s’agit pas de savoir si une inondation de type 1901 surviendra, mais de savoir quand elle se produira. Chaque année, Paris a 1 chance sur 100 d’être frappé par une telle catastrophe. »

Dans ce qui n’est qu’un prérapport, l’OCDE relève que « l’absence d’une vision stratégique d’ensemble autour de ce risque majeur pour ce territoire stratégique essentiel révèle un déficit de la politique française de gestion des risques ». À l’origine de cette situation, l’absence de gouvernance unifiée, chacun des multiples acteurs ayant tendance « à faire valoir [sa] vision et [ses] intérêts spécifiques plutôt que de soutenir les objectifs d’ensemble [avec le risque] de l’inefficacité, du saupoudrage des ressources et que les efforts […] pourtant réalisés ne puissent pas totalement porter leurs fruits ». Résultat, « il n’y a pas eu d’investissements importants pour prévenir ce risque majeur depuis une vingtaine d’années. Et ces investissements découlent de la crue de 1901. Depuis, la métropole s’est agrandie. Aujourd’hui, Paris est protégé, la banlieue non. »

Paris est protégé, mais seulement contre l’inondation centennale, et sa banlieue doit se contenter, au mieux, d’une protection contre les crues trentennales. Or c’est là que se trouve l’essentiel du potentiel économique de l’Île-de-France, un tiers du potentiel national : une paille !

Cette situation est à comparer avec celle des Pays-Bas, où, depuis les années soixante, les ouvrages de protection sont conçus en fonction d’une fréquence de retour de la submersion de 10 000 ans dans la partie la plus peuplée et la plus industrieuse du pays, la Randstad Holland, d’une fréquence de retour de 4 000 ans pour les zones soumises à la submersion marine mais moins peuplées, de 2 000 ans à 1 250 ans selon les types de zones soumises au risque de crue des rivières et des fleuves. Depuis 2009, les ouvrages neufs doivent même tenir compte du réchauffement climatique : 1 milliard d’euros par an est prévu pour le futur programme d’adaptation, dit « programme Delta ».

La compétitivité d’un territoire, c’est peut-être aussi la sécurité qu’il assure aux entreprises contre les risques de catastrophes, qui, pour être « naturelles », n’en sont pas moins prévisibles.

Il est donc plus que temps de suivre l’exemple des Pays-Bas et de mettre enfin en place une politique de prévention de l’inondation digne de ce nom en France, à savoir une politique financée de manière pérenne et couvrant l’ensemble du territoire. Si les enjeux ne sont pas vitaux comme aux Pays-Bas, ils n’en sont pas moins essentiels.

Il est temps aussi de réviser les dispositifs de gestion de la crise et de l’immédiate après-crise, même s’ils donnent globalement satisfaction. À l’usage, on s’aperçoit en effet que l’empilement des dispositifs et la séparation des acteurs, chacun avec ses règles de fonctionnement, sont sources de lourdeurs, de dysfonctionnements et donc d’incompréhension de la part des sinistrés.

À l’occasion de la discussion du projet de loi de modernisation de l’action publique territoriale et d’affirmation des métropoles, le Sénat a déjà adopté, en première lecture puis en deuxième lecture, en les complétant, un ensemble de dispositions essentielles, au travers des articles 35 B à 35 E.

Des dispositions parfois identiques et en tout cas toujours très proches ont été reprises dans la présente proposition de loi. Pour avoir force de loi, elles attendent d’être votées par l’Assemblée nationale, à l’occasion de l’examen en deuxième lecture du projet de loi de modernisation de l’action publique territoriale et d’affirmation des métropoles, prévu dans trois semaines. La commission a donc eu raison de ne pas soumettre de nouveau au débat ses articles 1er, 2, 3, 4, 5, 13 et 14, non que ceux-ci manquent d’intérêt ou de pertinence, bien au contraire, mais parce que leur adoption serait redondante et aurait risqué d’entretenir la confusion.

Au lieu d’un texte unique relatif à la lutte contre l’inondation, les hasards et les méandres de la discussion parlementaire ont fait que nous en aurons deux si le Parlement suit nos propositions : l’un relatif à la prévention, objet des articles 35 B à 35 E du projet de loi de modernisation de l’action publique territoriale et d’affirmation des métropoles, qui n’attend plus que la décision de l’Assemblée nationale pour être voté ; l’autre relatif à la gestion de la crise, de l’après-crise et à l’indemnisation des dommages, objet du texte dont nous débattons ce soir.

Je souhaite cependant vous rappeler brièvement, avant de revenir sur ces propositions nouvelles, l’esprit et l’essentiel des dispositions que nous avons déjà adoptées, parce que je sais qu’elles suscitent des interrogations, pour ne pas dire des oppositions, que j’ai du mal à comprendre, je l’avoue, eu égard aux enjeux rappelés en préambule.

Les dispositions relatives à la prévention de l’inondation déjà adoptées par le Sénat se bornent, en effet, à appliquer à la prévention de l’inondation un principe de bon sens : pas de politique efficace tant qu’on ignore qui doit faire quoi et qu’il n’en a pas les moyens.

Juridiquement, à ce jour, la prévention de l’inondation n’incombe à personne ; c’est une « compétence sans maître », pour reprendre l’expression de notre collègue Vandierendonck. Tout au plus la responsabilité de ceux qui auraient contribué à en aggraver les effets peut-elle être recherchée : les propriétaires riverains des cours d’eau non domaniaux, en principe responsables de leur entretien, les auteurs publics ou privés d’ouvrages, pour manque d’entretien, les élus et les préfets, pour des décisions d’urbanisme prises ou non prises, les mêmes, pour des fautes commises dans la gestion de l’alerte ou des secours.

Or la disparition progressive de la société rurale, où la propriété des cours d’eau non domaniaux représentait une richesse à entretenir, l’urbanisation accélérée ont amené les collectivités territoriales à se substituer de fait aux particuliers et à mettre en place localement des politiques de prévention de l’inondation afin de protéger la population, mais trop souvent au coup par coup et à retardement, à la suite de catastrophes dramatiques en termes de victimes et de destructions.

Les dispositions adoptées n’imposent aucune obligation nouvelle aux collectivités qui ont déjà choisi d’assumer la compétence, avec les responsabilités qui l’accompagnent ; elles leur donnent simplement, si elles le désirent, des ressources supplémentaires pour y faire face. De même, elles n’imposent aucune modification dans l’organisation du dispositif de lutte si celui-ci leur donne satisfaction ; tout au plus les intercommunalités se substitueront-elles aux communes dans les syndicats ou syndicats mixtes auxquels elles appartiennent déjà. Elles prévoient que « les communes sont compétentes en matière de gestion des milieux aquatiques et de prévention des inondations », mais que cette compétence s’exerce obligatoirement au niveau des communautés de communes, des communautés d’agglomération ou des communautés urbaines et des métropoles.

L’un n’allant pas sans l’autre, elles prévoient en outre que les communes ou les établissements publics de coopération intercommunale à fiscalité propre substitués à leurs communes membres pour l’exercice de la compétence en matière de gestion des milieux aquatiques et de prévention des inondations peuvent instituer, en vue du financement des actions liées à l’exercice de cette compétence, « la taxe pour la gestion des milieux aquatiques et la prévention des inondations » ainsi créée. Ce n’est nullement une obligation si elles disposent déjà de financements suffisants.

L’objet de cette taxe affectée est « le financement des travaux de toute nature permettant de réduire les risques d’inondation et les dommages causés aux personnes et aux biens.

« Dans les conditions prévues à l’article L. 113-4 du code des assurances, le montant des primes d’assurances contre le risque inondation et celui des franchises tient compte, à due proportion, de la réduction des risques qui résulte des actions de prévention. »

L’assiette très large de cette taxe, répartie « entre toutes les personnes physiques ou morales assujetties aux taxes foncières sur les propriétés bâties et non bâties, à la taxe d’habitation et à la cotisation foncière des entreprises », en fait un outil de solidarité et d’aménagement territorial face à l’inondation et garantit des taux bas. Son recouvrement n’entraîne en outre aucun frais supplémentaire.

Encore une fois, il s’agit d’une taxe dont la création est facultative, plafonnée à 40 euros par habitant et dont le produit est « exclusivement affecté au financement des charges de fonctionnement et d’investissement […] résultant de l’exercice de la compétence ».

Selon la simulation réalisée par la direction générale des collectivités locales, la DGCL, cette taxe, instituée partout à son plafond, rapporterait environ 600 millions d’euros par an, chiffre à rapprocher des 250 millions à 350 millions d’euros dépensés annuellement pour la prévention active de l’inondation, qui s’en trouverait ainsi stimulée, ainsi que du montant des dégâts annuels, de l’ordre de 600 millions d’euros.

La contrepartie de cette taxe, ce sont des investissements et des actions directement liés à la prévention de l’inondation, opérations dont le contribuable peut facilement apprécier l’importance et la pertinence, et qui auront une incidence sur le montant des primes d’assurance du régime d’indemnisation des catastrophes naturelles et des franchises : rien à voir donc avec une taxe sans autre affectation que l’amélioration hypothétique d’un quelconque équilibre budgétaire.

Je précise enfin que le bras armé des communautés, en matière de prévention de l’inondation, ce sont les syndicats mixtes constitués à l’échelle des bassins versants, qui les rassemblent avec leurs partenaires naturels : départements, régions, agence de l’eau, etc.

Voilà pour le rappel des dispositions qui ont déjà été votées par le Sénat et que nous souhaitons voir adopter par l’Assemblée nationale.

Comme je l’ai dit, l’objet initial de cette proposition de loi était aussi de revisiter les dispositifs de gestion de la crise et de l’immédiat après-crise, dont l’empilement, ainsi que l’âge et le cloisonnement des acteurs, chacun avec ses règles de fonctionnement, sont devenus sources de lourdeurs, de dysfonctionnements et d’incompréhension pour les sinistrés.

Les dispositions proposées se bornent à reprendre les observations de notre mission commune d’information sur les inondations qui se sont produites dans le Var, et plus largement dans le sud-est de la France au mois de novembre 2011, présidée par notre collègue Louis Nègre. On peut les suivre selon trois fils rouges qui s’entrecroisent : clarifier et simplifier les dispositifs existants ; associer la population et les élus à la lutte contre l’inondation pour leur permettre de mieux habiter leur territoire ; améliorer un système assurantiel que beaucoup de pays nous envient mais qui peut encore progresser.

La discussion des articles et des amendements nous permettra de rentrer dans le détail de ces propositions ; je me bornerai donc ici à en rappeler l’esprit.

L’article 6, qui définit la notion de cours d’eau, l’article 11, qui vise à accélérer la procédure de déclaration d’état de catastrophe naturelle et l’article 15, qui tend à accélérer la perception de la fraction de TVA correspondant aux travaux découlant de l’état de catastrophe naturelle, sont des articles de clarification et de simplification des procédures visant à accélérer leur mise en œuvre et à éviter les conflits entre les différents acteurs concernés.

L’amendement que j’ai déposé à l’article 16 et qui a pour objet de faciliter la passation des marchés liés aux opérations d’urgence en cas d’aléa imprévisible est de même nature : son adoption permettra d’accélérer et de clarifier les choses.

Les cinq articles suivants visent à associer les élus et la population aussi bien aux opérations de secours qu’à la prévention de la catastrophe : l’article 7 amendé tend à associer plus étroitement les services de l’État, les élus et la population à l’élaboration des plans de prévention des risques d’inondations, les PPRI, et à leur permettre d’évoluer plus facilement en fonction des avancées de la politique de prévention ; l’article 8 a pour objet de rendre les élus majoritaires dans les organes délibérants des comités de bassin et des agences de l’eau ; l’article 9 organise l’échange d’information entre élus, préfet et directeur des secours ; l’article 10 associe les réserves communales de sécurité à la prévention et à la lutte contre l’inondation ; l’article 12 vise à rendre obligatoire la création par le préfet d’une commission de suivi de l’après-crise.

Enfin, les articles 18 à 20 et l’amendement que j’ai déposé à l’article 17 constituent un toilettage du dispositif d’indemnisation au titre du régime assurantiel des catastrophes naturelles.

L’amendement déposé à l’article 21, quant à lui, tend à mieux articuler le régime assurantiel des catastrophes naturelles avec le régime de solidarité des calamités agricoles.

Mes chers collègues, quels que soient ses défauts et ses insuffisances, j’ai la faiblesse de penser que cet ensemble de dispositions – celles déjà adoptées par le Sénat dans le cadre du projet de loi de modernisation de l’action publique territoriale et d’affirmation des métropoles et celles dont nous allons débatte aujourd’hui – constitue un tout cohérent.

Une telle occasion de donner à notre pays les moyens de faire face aux défis que la nature lui lance, défis qui se multiplient et dont les conséquences seront d’autant plus terribles que nous resterons dans l’attente, risque de ne pas se représenter de sitôt. Je n’ai rien contre la concertation, mais il arrive un moment où il faut franchir le pas, quitte à rectifier ensuite le tir s’il le faut.

Devant le désastre ayant frappé son département, la Drôme, il y a quelques semaines, notre premier vice-président, Didier Guillaume, a eu ce mot, prononcé sur un ton laissant percer une certaine colère : « Chacun devra prendre ses responsabilités pour avancer. »

Je ne doute pas que le Sénat confirme aujourd’hui son engagement clair dans la lutte contre ce fléau qu’est l’inondation. Nous saurons bientôt si l’Assemblée nationale emprunte la même voie : sa décision ne sera pas sans conséquence. Encore une fois, comme disait notre premier vice-président, à chacun de prendre ses responsabilités ! (Applaudissements.)

M. le président. La parole est à M. le rapporteur.

M. Louis Nègre, rapporteur de la commission du développement durable, des infrastructures, de l’équipement et de l’aménagement du territoire. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, la proposition de loi examinée par la commission du développement durable a pour ambition de mettre en œuvre certaines des préconisations du rapport d’information publié le 24 septembre 2012, à la suite des travaux de la mission commune d’information sur les inondations survenues dans le Var et le sud-est de la France, que j’ai eu l’honneur de présider et dont Pierre-Yves Collombat était le rapporteur.

Notre constat partagé était le suivant : si les dispositifs de gestion immédiate de l’urgence et de l’indemnisation après-crise existent et peuvent être améliorés, la politique de prévention des inondations est pratiquement inexistante dans notre pays.

Quels résultats donne-t-elle, en effet ? Fin février 2010, la tempête Xynthia cause cinquante-trois morts et 700 millions d’euros de dégâts. Les 15 et 16 juin 2010, à Draguignan, on dénombre vingt-trois morts, deux disparus et 1,2 milliard d’euros de dégâts. En novembre 2011, dans la basse vallée de l’Argens et le sud-est de la France, le bilan est de quatre morts et de 500 millions à 800 millions d’euros de dégâts. En décembre 2011, des inondations frappent les Vosges. En octobre 2012, des pluies torrentielles sur Toulon font deux morts. En octobre et novembre 2012, des inondations surviennent dans le Pas-de-Calais. En juin 2013, les inondations en Haute-Garonne et dans les Hautes-Pyrénées font 134 millions d’euros de dégâts dans 127 communes sinistrées. Fin octobre 2013, des inondations frappent la Drôme et l’Ardèche. Telle est la litanie des conséquences de cette politique – ou de cette absence de politique –, qui doit nous faire prendre conscience, une fois pour toutes, du problème !

Sans parler du plus grave, à savoir les pertes en vies humaines, les inondations provoquent en moyenne 1 milliard d’euros de dégâts par an, chiffre identique au montant des investissements réalisés chaque année pour la prévention par les Pays-Bas, pays beaucoup plus petit que le nôtre.

L’ensemble des assurés financent les indemnisations à hauteur de 500 millions d’euros par an, via les surprimes d’assurance au titre du régime des catastrophes naturelles.

Ces indemnisations sont relativement favorables, nous dit-on, par rapport à ce qu’elles sont dans d’autres pays n’ayant pas mis en place le même système, comme l’Italie. Toutefois, elles ne sont pas toujours versées aussi rapidement, ni aussi complètement, que l’on pourrait le souhaiter.

M. Charles Revet. Tout à fait !

M. Louis Nègre, rapporteur. Je note que, au mois d’octobre dernier, les habitants de Saint-Béat, en Haute-Garonne, ont mis en place des barrages filtrants pour protester contre l’inertie des administrations et des assureurs à la suite des inondations du mois de juin précédent.

Nous ne pouvons pas continuer ainsi, chers collègues : on traite les conséquences des inondations, mais on n’effectue aucune action de prévention en amont.

C’est la raison pour laquelle la présente proposition de loi est articulée en trois volets : la prévention des inondations, la gestion des situations de crise et, pour finir, l’après-crise. La commission du développement durable a apporté des modifications plus ou moins importantes à chacun de ces volets.

Je serai très bref sur le premier d’entre eux, concernant la prévention des inondations. En effet, les plus importantes de ces dispositions ont déjà été adoptées par le Sénat lors de la deuxième lecture du projet de loi de modernisation de l’action publique territoriale et d’affirmation des métropoles. Il s’agit de clarifier l’exercice des missions en matière de prévention des inondations. À ce jour, je le répète, aucune politique globale n’est menée, notamment du fait de l’absence d’une compétence clairement définie et attribuée.

Cette proposition de loi prévoit donc la création d’une compétence « gestion des milieux aquatiques et prévention contre les inondations », en l’assortissant, si nécessaire, d’un financement adapté. Cette compétence, confiée aux intercommunalités, a vocation à être exercée par des établissements publics territoriaux de bassin, pour les grands fleuves, et par des établissements publics d’aménagement et de gestion de l’eau, à l’échelon des sous-bassins fluviaux.

C’est en effet à cet échelon, celui des élus locaux, que se conjuguent la compréhension du problème, la connaissance du terrain et la réactivité. Les élus, en première ligne face aux dommages des inondations, auront davantage à cœur de mener une politique de prévention que des usines à gaz instituées à l’échelon national. Il n’est pas étonnant que ce soit Pierre-Yves Collombat, ancien maire d’une commune touchée par les inondations, qui présente cette proposition de loi, avec le soutien du maire de Cagnes-sur-Mer, ville également concernée par ce fléau. En tant qu’élus de terrain, il est de notre devoir de traiter ce problème une fois pour toutes.

La gestion des ouvrages et équipements de prévention a été rationalisée. Il est prévu que l’ensemble du dispositif entre en vigueur de manière progressive. Par cohérence juridique, la commission a donc retiré du texte les articles 1er à 5, 13 et 14, déjà adoptés par le Sénat lors de l’examen du projet de loi de modernisation de l’action publique territoriale et d’affirmation des métropoles.

Seuls trois articles relevant du volet relatif à la prévention n’ont pas déjà été adoptés.

L’article 6 donne une définition législative de la notion de cours d’eau, en précisant que l’écoulement peut ne pas être permanent tout au long de l’année, en particulier sur le pourtour méditerranéen.

L’article 7 prévoit une élaboration conjointe des plans de prévention des risques naturels prévisibles entre l’État et les collectivités territoriales. L’objectif de l’auteur du texte – j’y souscris pleinement – est de garantir une meilleure association des élus locaux à l’élaboration des PPRI, afin de réduire le caractère particulièrement conflictuel de cette procédure.

La commission a adopté un amendement de réécriture de cet article. En effet, la formulation initialement retenue faisait référence à une « élaboration conjointe » des plans. Cette notion d’élaboration conjointe risquait de mettre en cause directement la responsabilité pénale des élus, ce qui n’est absolument pas le but de cette proposition de loi. Il nous est donc apparu préférable de supprimer ces mots et de préciser que les collectivités sont « associées » à l’élaboration des plans, avant leur prescription et à chaque étape de leur élaboration.

Nous avons également voulu que la population concernée soit « informée et consultée », conformément à ce que recommandait le rapport de notre mission commune d’information.

L’article 8, qui vise à rendre la représentation des élus locaux majoritaire au sein des instances délibérantes des comités de bassin et des agences de l’eau, a été adopté sans modification par la commission. Il nous apparaît nécessaire, dans un texte de décentralisation, de faire en sorte que les élus locaux participent davantage à ce niveau de décision.

Vous l’aurez compris, chers collègues, un des principaux objectifs de cette proposition de loi est d’associer davantage les élus locaux et la population à la politique de prévention.

J’en arrive au deuxième volet du texte, consacré à la gestion de crise à proprement parler.

L’article 9 vise à mieux associer les maires à la conduite des opérations de secours. Ce n’est pas toujours le cas sur le terrain, et aucun texte, aujourd’hui, ne prévoit formellement une telle information. La commission a adopté un amendement de clarification. La rédaction initiale de l’article indiquait que les préfets assurent la direction des opérations en liaison avec les maires. Les mots « en liaison » pouvaient laisser croire à une codirection des opérations de secours, et donc à l’existence d’une coresponsabilité – éventuellement pénale – engageant directement les élus. Ce n’est pas l’objectif visé, bien sûr, et nous avons donc sécurisé la rédaction, en précisant que le préfet doit être en contact régulier avec les maires, si les moyens de communication le permettent.

L’article 10 concerne les réserves communales de sécurité civile et précise notamment que ces réserves peuvent intervenir hors des limites de la commune. Cette disposition va dans le sens d’une meilleure réactivité sur le terrain en cas de crise et de l’apport d’une aide aux communes voisines si nécessaire.

La commission du développement durable a précisé que l’intervention à l’extérieur de la commune n’est possible qu’avec l’accord écrit – par mail, par exemple – des maires concernés. Cela semble logique, notamment au regard du principe constitutionnel de libre administration des collectivités territoriales.

L’article 11 prévoit que l’arrêté interministériel constatant l’état de catastrophe naturelle ne peut être pris qu’après avis d’une commission permanente composée notamment de représentants des collectivités territoriales, de représentants d’entreprises d’assurances et de personnalités qualifiées. La volonté conjointe de l’auteur de cette proposition de loi et du rapporteur est, là encore, d’associer pleinement les parties prenantes à la prise de décision. Nous sommes au XXIe siècle, la démocratie participative existe ! La commission a renvoyé à un décret le soin de préciser le détail de la composition de cette commission permanente.

L’article 12 prévoit la création d’une commission de suivi des opérations liées à l’après-crise, présidée par le préfet. Il s’agit là d’une disposition unanimement réclamée par les élus et les sinistrés. Cette commission permettra de faire le point sur l’avancement des travaux et des indemnisations, et sera un lieu d’échange et d’information sur tout sujet intéressant élus et sinistrés.

Il s’agit là, chers collègues, d’une grande avancée. Je crois que cet article, en apparence modeste, constituera un progrès important sur le terrain. La commission du développement durable l’a adopté sans modification.

Je vous rappelle que les articles 13 et 14 ont été supprimés, parce que des dispositifs similaires ont déjà été adoptés lors de l’examen du projet de loi de modernisation de l’action publique territoriale et d’affirmation des métropoles.

Le dernier volet du texte porte sur les dispositions relatives à l’indemnisation. L’article 15 a trait aux règles applicables pour le remboursement anticipé par le Fonds de compensation pour la TVA des dépenses d’investissement faites par les communes, en réparation des dégâts causés par des intempéries exceptionnelles. Aujourd’hui, ce remboursement est conditionné à la fois par la prise de l’arrêté interministériel constatant l’état de catastrophe naturelle et par celle d’un décret. Deux textes sont donc nécessaires ! L’article 15 tend à supprimer l’exigence de la parution de ce second décret. La commission du développement durable a également adopté cet article sans modification.

L’article 16, supprimé, permettait de déroger aux règles de publicité et de mise en concurrence du code des marchés publics. Cette disposition dérogatoire, permettant aux communes de faire face aux réparations les plus urgentes sans être tenues par les délais des procédures ordinaires, est tout à fait compréhensible au vu des circonstances, mais elle est déjà prévue par l’article 35 du code des marchés publics, de nature réglementaire. Le seul effet juridique de l’article 16 du texte initial de la proposition de loi était donc de l’élever au niveau législatif, sans rien changer au fond du droit existant. Cela n’a pas paru opportun à la commission, qui a donc supprimé cet article.

L’article 17, également supprimé, instaurait une assurance habitation obligatoire pour les propriétaires. L’objectif était de porter à 100 % le taux de couverture des propriétaires. Ce dernier, sur une simple base volontaire, est déjà très élevé, puisqu’il est de l’ordre de 98 %. Cette démarche était compréhensible, et je l’avais approuvée.

Toutefois, cette nouvelle assurance obligatoire présentait des inconvénients d’ordres juridique et pratique, comme j’ai pu le découvrir au cours des auditions que nous avons menées.

Juridiquement, les principes des droits national et européen ne permettent pas, à ce jour, d’instaurer une assurance obligatoire pour d’autres risques que ceux encourus au titre de la responsabilité civile des assurés à l’égard des tiers.

En outre, d’un point de vue pratique, l’application effective de cette nouvelle obligation aux 2 % de propriétaires non encore assurés requerrait un dispositif de contrôle onéreux, dont le coût serait égal, voire supérieur, au surcroît de primes espéré. Cerise sur le gâteau, si je puis dire, son efficacité serait de toute façon douteuse, puisque le taux de 2 % semble correspondre au pourcentage incompressible des récalcitrants à tout dispositif d’assurance obligatoire dans notre beau pays, comme le montre l’exemple de l’assurance automobile obligatoire. En conséquence, la commission a supprimé cet article.

J’en viens à l’article 18. D’une part, il prévoit une modulation de la surprime d’assurance contre les risques de catastrophe naturelle en fonction des efforts consentis par les assurés pour renforcer leur propre protection. D’autre part, il interdit toute modulation des franchises d’assurance en fonction de l’absence d’un plan de prévention des risques naturels dans la commune ou du nombre d’événements calamiteux constatés dans le passé.

En ce qui concerne le premier volet de cet article, la modulation de la surprime nous est apparue inopérante, compte tenu du niveau modeste de celle-ci. Elle est, en effet, de l’ordre de 25 euros pour un contrat multirisques habitation standard. La commission a donc fait porter la modulation sur la prime de base, d’un montant beaucoup plus important, qui pourra être réduite en application de l’article L. 113-4 du code des assurances, dont le quatrième alinéa dispose que « l’assuré a droit en cas de diminution du risque en cours de contrat à une diminution du montant de la prime ».

Le second volet de cet article a été adopté sans modification par la commission, car la modulation des franchises, telle qu’elle existe aujourd’hui, est une forme de sanction injuste contre les assurés, qui ne peuvent être tenus personnellement responsables ni de l’incurie des pouvoirs publics ni de l’acharnement du sort sur leurs biens.

L’article 19 prévoyait, dans sa rédaction initiale, que l’obligation de couvrir les risques de catastrophes naturelles ne s’impose pas aux entreprises d’assurances pour les biens construits et les activités exercées en violation des lois et règlements en vigueur. Nous avons craint que cette clause très générale ne se retourne contre les assurés. En effet, les entreprises d’assurances pourraient toujours l’invoquer, au motif d’une irrégularité quelconque, pour refuser de faire jouer la garantie. Par exemple, une entreprise qui violerait le droit du travail ou une construction qui ne respecterait pas la réglementation thermique pourraient se voir privées de la garantie « catastrophe naturelle » ! La commission a donc préféré réserver l’hypothèse d’un retrait de la garantie au seul cas d’un bien immobilier construit dans une zone classée inconstructible après la publication d’un PPRI, tout en lui donnant un caractère automatique.

L’article 20 prévoit que les aides versées par le Fonds d’intervention pour les services, l’artisanat et le commerce, le FISAC, en cas de catastrophe naturelle doivent couvrir les franchises d’assurance appliquées dans le régime des catastrophes naturelles. Cela a paru équitable à la commission, qui a adopté cet article sans modification.

L’article 21, supprimé, visait à étendre le bénéfice du régime des catastrophes naturelles aux dommages relevant actuellement du régime de solidarité des calamités agricoles. Tout en partageant totalement l’objectif d’améliorer la couverture des agriculteurs contre les risques de catastrophe naturelle, la commission du développement durable a estimé que ce n’était pas la bonne méthode pour l’atteindre. Cette extension de son champ aurait pour effet de déséquilibrer gravement, sur le plan financier, le régime des catastrophes naturelles. Il faudrait alors soit augmenter la surprime, soit réduire le niveau des indemnisations. Lors des auditions des cabinets ministériels, nous avons appris que le Gouvernement avait engagé une réflexion, déjà très avancée, en vue d’améliorer, comme nous le souhaitons tous, le régime de solidarité des calamités agricoles, aujourd’hui bien insuffisant.

M. Charles Revet. C’est vrai !

M. Louis Nègre, rapporteur. En outre, le régime actuel fait également intervenir, de manière très complexe, des fonds européens. Très clairement, il est urgent d’améliorer ce régime. Je demande donc solennellement au Gouvernement de proposer, dans le cours de la navette, un nouveau dispositif pour perfectionner le système existant.

L’article 22, enfin, constitue la traditionnelle disposition de gage, qui compense, par une majoration des droits sur les tabacs, les éventuelles conséquences financières de la mise en œuvre de la proposition de loi pour les collectivités territoriales.

La commission du développement durable a adopté à une très large majorité la proposition de loi de Pierre-Yves Collombat. Ce texte, qui a été alimenté par le travail de terrain minutieux et très complet de la mission commune d’information, vise donc à faire évoluer en profondeur une politique de lutte contre les inondations nous apparaissant aujourd’hui frappée d’une étrange inertie, pour ne pas dire d’une forme de fatalisme. Comment peut-on accepter la récurrence d’événements qui détruisent, année après année, un milliard d’euros de valeur, en moyenne, dans notre pays, sans compter les pertes inestimables en vies humaines ? La France est-elle un pays si riche qu’elle puisse se le permettre ?

Je pense qu’il est urgent de changer de logique, et de mettre en place une vraie politique de prévention associant tous les acteurs de proximité. À terme, les sommes investies dans la prévention permettront de diminuer le montant des dégâts, par voie de conséquence celui des indemnisations et, in fine, celui des primes d’assurance. Nous souhaitons engager une dynamique vertueuse dont tout le monde tirera un bénéfice : assurés, acteurs économiques, élus locaux.

Je vous invite donc, mes chers collègues, à adopter cette proposition de loi dans le texte issu des travaux de la commission du développement durable. (Applaudissements sur les travées de l’UMP, ainsi que sur certaines travées du RDSE et du groupe socialiste.)

M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée.

Mme Anne-Marie Escoffier, ministre déléguée auprès de la ministre de la réforme de l’État, de la décentralisation et de la fonction publique, chargée de la décentralisation. Monsieur le président, monsieur le rapporteur, monsieur l’auteur de la proposition de loi, mesdames, messieurs les sénateurs, les propos que je vais tenir devant vous sont le fruit d’une coproduction interministérielle. De nombreux ministères ont travaillé ensemble, main dans la main, pour examiner ce texte, dont nous avons tous compris qu’il répondait à une absolue nécessité. Nombre de ses dispositions ont d’ailleurs d’ores et déjà été adoptées dans le cadre de l’examen par la Haute Assemblée du projet de loi de modernisation de l’action publique territoriale et d’affirmation des métropoles.

Permettez-moi de saluer le travail remarquable de la mission commune d’information sur les inondations qui ont touché le Var en 2010, dont le président était Louis Nègre et le rapporteur Pierre-Yves Collombat. Le titre du rapport de la mission commune d’information invitait à « se donner les moyens de ses ambitions » en matière de gestion des risques d’inondation : c’est tout l’objet de la proposition de loi relative à la prévention des inondations et à la protection contre celles-ci, présentée par ces mêmes sénateurs et discutée aujourd’hui par la Haute Assemblée. Elle vise en effet à nous donner les moyens de nos ambitions collectives en matière de protection des biens et des personnes exposés aux inondations.

Selon le quatrième rapport du Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat, le GIEC, à l’horizon 2100, le niveau de la mer pourrait s’être élevé d’un mètre. Nous aurons, aux échelons régional, national et international, à gérer de manière plus régulière les conséquences, souvent dramatiques, du dérèglement climatique. Je ne reviendrai pas sur les chiffres cités par MM. Collombat et Nègre, sinon pour souligner la lourdeur de la facture humaine : les différentes inondations dont il a été fait état ont causé quelque quatre-vingt-dix morts.

Ces faits ne doivent pas nous conduire au fatalisme, bien au contraire ! Il nous faut avancer.

Au moment où nous parlons, la France s’engage activement pour parvenir, dès 2015, à un accord contraignant sur le climat. C’est d’ailleurs, mesdames, messieurs les sénateurs, la raison de l’absence ce soir du ministre de l’écologie, du développement durable et de l’énergie.

Le Gouvernement agit, aux échelons local et national, afin de nous préparer à anticiper et à gérer collectivement les risques accrus d’inondations.

L’enjeu est majeur : 17 millions de personnes vivent en zone inondable, et près de 9 millions d’emplois sont concernés. Régulièrement – trop régulièrement, devrais-je dire –, les inondations que nous subissons en France viennent nous rappeler l’importance de mieux gérer le risque.

La tempête Xynthia et les inondations du Var ont marqué les mémoires. Plus récemment, au premier semestre de cette année, notre territoire a de nouveau été touché par des événements pluvieux d’une particulière intensité, en Champagne-Ardenne, en Bourgogne, dans le Sud-Ouest, en Aveyron : les dégâts ont été considérables.

M. Charles Revet. En Seine-Maritime aussi !

Mme Anne-Marie Escoffier, ministre déléguée. Je n’oublie surtout pas votre département, monsieur le sénateur !

Les enjeux en matière de gestion des risques d’inondation sont donc majeurs, et le Gouvernement joue sur tous les leviers d’action, de la prévention à la réparation.

J’évoquerai d’abord la politique de prévention des inondations.

En la matière, le premier levier est la maîtrise de l’urbanisation en zone inondable,…

Mme Évelyne Didier. Très juste !

Mme Anne-Marie Escoffier, ministre déléguée. … pour limiter les enjeux humains, économiques et culturels exposés aux inondations. Les plans de prévention des risques d’inondation établis par l’État constituent un outil indispensable. L’élaboration de ces documents doit être poursuivie en étroite collaboration avec les collectivités concernées et leurs élus locaux. (M. le rapporteur acquiesce.)

Toujours en matière de prévention des inondations, un véritable défi est à relever : l’entretien et la gestion des cours d’eau et des digues.

Cette question a récemment fait l’objet, dans cet hémicycle, de débats riches et construits, fondés sur les travaux de la mission commune d’information et sur la réalité concrète que les uns et les autres ont vécue. Vous avez, mesdames, messieurs les sénateurs, parfaitement pris la mesure du problème et assumé votre responsabilité de parlementaires en votant, lors de l’examen du projet de loi de modernisation de l’action publique territoriale et d’affirmation des métropoles, la création d’une compétence obligatoire de gestion des milieux aquatiques et de prévention des inondations confiée aux EPCI à fiscalité propre. Le Gouvernement tient à saluer tout particulièrement, à cet égard, l’initiative de MM. Nègre et Collombat, qui débouche aujourd’hui sur la discussion d’un texte formant un tout cohérent.

Tous ces axes doivent permettre une meilleure prévention des inondations. Mais, vous le savez et nous le constatons tous les jours, le risque zéro n’existe pas. Quoi que l’on fasse, l’inondation peut toujours survenir. Il convient donc d’être collectivement prêts, afin de réagir rapidement et de manière appropriée pour mettre en sécurité les personnes et les biens lorsqu’un tel événement se produira.

Dans ce cadre, la préparation et la gestion de la crise constituent des pans essentiels, indispensables, de la lutte contre les inondations.

Par ailleurs, il ne faut pas négliger le suivi de la post-crise, avec le relogement d’urgence et l’indemnisation des sinistrés. Certains, je le sais, se sont émus du fait que le temps de l’indemnisation des catastrophes naturelles ne soit pas celui de l’action, qu’il soit beaucoup trop long.

La politique de prévention des risques d’inondation mobilise d’importants moyens humains, techniques et financiers. Elle vise à permettre aux acteurs locaux de s’inscrire dans une démarche de développement durable des territoires ; j’insiste sur l’importance de cette notion de « développement durable » ! C’est tout l’objet de la stratégie nationale de gestion des risques d’inondation que le Gouvernement élabore actuellement.

La présente proposition de loi s’inscrit dans cette dynamique. Elle tend à renforcer cette démarche de mobilisation locale, au plus près du terrain.

L’article 6 a pour objet d’inscrire – enfin ! – dans la législation une définition de la notion de cours d’eau, en s’appuyant sur les éléments établis par la jurisprudence et les circulaires ministérielles. Cela devrait permettre de clarifier une notion qui est, pour l’heure, sujette à interprétations.

L’article 7, quant à lui, prévoit le renforcement de l’association des collectivités et de la population concernées à l’élaboration des plans de prévention des risques d’inondation.

L’article 8 tend à modifier la composition des instances délibérantes des comités de bassin et des agences de l’eau. La question de la gouvernance des instances de concertation de la gestion de l’eau à l’échelle des bassins est essentielle. Elle est d’ailleurs prise en compte dans la feuille de route gouvernementale issue de la table ronde sur la politique de l’eau tenue lors de la deuxième conférence environnementale, en septembre 2013.

Sur ce sujet, les propositions du groupe de travail du Comité national de l’eau, instance nationale de concertation sur la politique de l’eau, sont attendues en principe pour le 18 décembre 2013. Des parlementaires, parmi lesquels les sénateurs Henri Tandonnet et Michel Doublet, des collectivités, des usagers économiques et des représentants de la société civile travaillent actuellement sur ces questions de gouvernance.

Le Comité national de l’eau s’est en effet saisi de cette mission dès sa réunion du 10 octobre dernier. Il a donné mandat à ce groupe de travail de définir des orientations d’ici aux prochaines élections des comités de bassin, qui sont programmées avant l’été 2014. Il doit également fixer des orientations de plus long terme si cela apparaît nécessaire. La mise en œuvre des premières réformes doit commencer début 2014.

Ce sujet figure au cœur de la politique de l’eau et des milieux aquatiques. Il dépasse donc le cadre de la seule gestion des inondations. Dans ce contexte, l’ensemble des ministres concernés considèrent que la concertation entre les acteurs de la politique de l’eau, notamment les élus, doit être approfondie dans le cadre du débat organisé au Comité national de l’eau.

La présente proposition de loi contient en outre plusieurs dispositions relatives à la gestion de la crise.

Lors de l’événement, tous les acteurs sont mobilisés pour gérer l’urgence. À cet égard, je tiens à saluer le professionnalisme et le dévouement dont font preuve, lors de tous ces épisodes climatiques, nos services de prévision, d’alerte et de gestion de crise, ainsi que la mobilisation des collectivités et des acteurs de terrain.

Il me semble utile de revenir sur les étapes de cette gestion de crise.

Bien gérer une crise, la gérer au mieux, c’est d’abord assurer la fluidité du partage des connaissances et des échanges d’informations. Notre dispositif de prévision des inondations se fonde, d’une part, sur la vigilance crues – il s’agit d’informer dans les vingt-quatre heures sur le risque de crue des cours d’eau placés sous surveillance –, et, d’autre part, sur la vigilance météorologique – il s’agit d’alerter sur le risque d’inondation à l’échelle départementale par le biais des pictogrammes « pluie-inondation », « orage », « inondation » et « vagues-submersion ».

Les cartes de vigilance et les bulletins de suivi sont diffusés le plus largement possible, simultanément vers le public et les services de l’État, et partant vers les services de secours.

Le service central d’hydrométéorologie et d’appui à la prévision, le SCHAPI, et Météo-France œuvrent à l’amélioration de la qualité des prévisions. Ils cherchent à définir des modèles de prévision des pluies à une échelle toujours plus fine et densifient le réseau d’observation.

Je relève que toutes ces actions sont menées de manière concertée, les services du ministère de l’intérieur et ceux du ministère de l’écologie, du développement durable et de l’énergie travaillant en collaboration.

Pendant la crise, la question de l’information est tout aussi essentielle. Aussi faut-il évoquer les procédures de remontée de l’information, qui font l’objet de dispositions bienvenues dans le texte que nous examinons ce soir.

Les services départementaux d’incendie et de secours rendent compte, en toute situation, de leur activité opérationnelle au préfet. L’autorité préfectorale et le commandant des opérations de secours entretiennent d’étroites relations afin de coordonner au mieux les opérations.

Toutefois, au-delà de ce dispositif opérationnel, les maires sont les premiers acteurs de terrain de la gestion de crise. Pleinement inclus dans ce dispositif décisionnel de la gestion de crise, ils renseignent l’autorité préfectorale et communiquent avec elle.

On le sait d’expérience, parfois, cette communication n’a pas été suffisamment fluide. En ce sens, l’article 9, qui tend à modifier l’article 742-2 du code de sécurité intérieure, est intéressant : il inscrit dans la loi une pratique qui est, la plupart du temps, déjà effective. Sa rédaction a été affinée par la commission, mais il demeure une imprécision qui pourrait avoir des conséquences négatives en matière de responsabilité de chacun des acteurs. Nous aurons l’occasion de débattre de ce point ce soir.

Améliorer la gestion de crise, c’est également rendre les secours plus efficaces et plus réactifs, notamment en confiant davantage de responsabilités aux acteurs de terrain.

Il faut, en particulier, favoriser l’implication de la population. C’est un enjeu essentiel ! À ce titre, monsieur Collombat, le département du Var offre un exemple plus qu’intéressant, dont il faut s’inspirer. Dans ce département, régulièrement soumis aux risques naturels – je songe aux incendies de forêt –, l’engagement des citoyens dans la réserve communale de sécurité civile mérite d’être salué. Dans les plus petites communes comme dans les villes plus importantes, des femmes et des hommes se mobilisent pour aider les populations sinistrées en se mettant à la disposition du maire. Ce sont aujourd’hui plus de 4 000 citoyens qui, dans ce département, sont engagés au sein de ces réserves. Ils n’en retirent aucune contrepartie, aucun avantage : leur seule motivation est le service de leur commune.

L’article 10 facilitera l’engagement de ces réserves dans la gestion de crise, en dehors même de leur commune d’origine. Là encore, nous pourrons discuter de la rédaction proposée, mais le sens de cette disposition est, en soi, tout à fait intéressant.

Cela étant, gérer une crise, c’est aussi préparer l’après-crise, qui constitue la troisième phase. La responsabilité est grande : il faut pouvoir gérer le retour à la normale sur le territoire concerné. En la matière, les dispositions de la proposition de loi que nous examinons aujourd’hui sont de nature à faciliter les choses.

L’article 12, notamment, comporte une innovation intéressante : la création d’une commission départementale de suivi des opérations de reconstruction qui associera l’ensemble des acteurs.

Le Gouvernement mesure pleinement la nécessité d’améliorer les procédures de reconnaissance des catastrophes subies par les communes au cours des derniers mois, que vise l’article 11. Une réflexion est actuellement menée pour affiner les éléments d’évaluation des catastrophes naturelles. Il convient par exemple de se pencher sur des événements dont le déroulement est moins rapide que celui des inondations, telles les périodes de sécheresse. Ces réflexions doivent se poursuivre, en vue de l’introduction de dispositions dans un texte approprié ; je ne suis pas sûre que nous puissions aboutir avant la fin de la navette.

Quoi qu’il en soit, le Gouvernement cherchera bien entendu à répondre aux attentes des acteurs de la gestion de crise.

Enfin, la proposition de loi comporte plusieurs dispositions relatives à l’indemnisation des sinistrés, question dont l’examen requiert une certaine prudence.

C’est le régime des catastrophes naturelles qui indemnise les dommages des particuliers, des entreprises ou des collectivités locales occasionnés notamment par des inondations d’intensité exceptionnelle. Il englobe une pluralité de périls, définis par l’anormalité de l’événement climatique qui les a déclenchés.

La solidarité nationale, qui sous-tend la philosophie et l’équilibre financier du régime, impose de penser celui-ci dans sa globalité, et non péril par péril.

Cet élément d’égalité et de solidarité nationale est fondamental. C’est à sa lumière que doit être lue la proposition d’instaurer une règle de réduction de la prime d’assurance en fonction des mesures de protection mises en œuvre, y compris pour les particuliers.

Une commission permanente est également créée. Elle comprend notamment des représentants des collectivités et des compagnies d’assurances ; son rôle serait de donner un avis préalable à la signature d’un arrêté interministériel de reconnaissance de l’état de catastrophe naturelle.

Une commission instruit les dossiers des communes concernées avant que l’état de catastrophe naturelle ne soit déclaré, et ce rôle mérite d’être inscrit dans la loi. Il me semble toutefois que, pour éviter d’introduire un biais, il convient de lui conserver un caractère technique, afin de garantir qu’elle continue d’analyser l’intensité des événements climatiques, et non celle des dommages.

Concernant la question importante de l’indemnisation des calamités agricoles, une réflexion est effectivement en cours au sein du Gouvernement : le régime des calamités agricoles relève d’une autre logique et doit être envisagé à part.

Mesdames, messieurs les sénateurs, le débat de ce soir offre assurément l’occasion de souligner l’implication de tous les acteurs – particuliers, élus, collectivités locales, services de l’État, société civile – dans la mise en place des outils nécessaires à une meilleure gestion des risques naturels, pour la protection de tous, qu’il nous incombe d’assurer.

Considérant que cette proposition de loi traite d’un sujet majeur, qu’elle permet de renforcer les dispositifs de prévention, de gestion et de réparation des inondations mais qu’il subsiste peut-être des interrogations sur la portée de certaines dispositions, le Gouvernement s’en remettra à la sagesse de la Haute Assemblée.

J’espère que vous aurez compris, au ton que j’ai adopté en prononçant cette intervention, tout l’intérêt que je porte à cette proposition de loi. (Applaudissements.)

M. le président. Mes chers collègues, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à vingt et une heures trente.

La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à dix-neuf heures trente-cinq, est reprise à vingt et une heures trente, sous la présidence de M. Didier Guillaume.)

PRÉSIDENCE DE M. Didier Guillaume

vice-président

M. le président. La séance est reprise.

Nous poursuivons la discussion de la proposition de loi relative à la prévention des inondations et à la protection contre celles-ci.

Dans la suite de la discussion générale, la parole est à M. André Vairetto.

M. André Vairetto. Monsieur le président, madame la ministre de la réforme de l'État, de la décentralisation et de la fonction publique, monsieur le rapporteur, mes chers collègues, le texte que nous examinons ce soir s’inscrit dans le prolongement des préconisations de la mission commune d’information sur les inondations qui se sont produites dans le Var et, plus largement, dans le sud-est de la France au mois de novembre 2011, présidée par Louis Nègre et dont le rapporteur était l’auteur de la présente proposition de loi, Pierre-Yves Collombat.

Je veux saluer ici la ténacité et l’implication dont nos collègues ont fait preuve pour élaborer un dispositif législatif cohérent, qui permette une prévention véritablement efficace d’un fléau dont il a été rappelé combien il était coûteux, en termes financiers et, surtout, humains.

La liste des catastrophes survenues au cours de ces trois dernières années est longue, depuis la tempête Xynthia, en février 2010, jusqu’aux inondations en Haute-Garonne et dans les Hautes-Pyrénées, tout récemment, en passant évidemment par les inondations du Var ou d’autres régions de notre pays.

Le changement climatique, qui aboutira, semble-t-il, à une récurrence plus fréquente de tels phénomènes, laisse augurer de nouveaux dégâts, notamment là où les pouvoirs publics n’auront pas organisé la prévention des inondations.

Un constat préalable est ainsi unanimement partagé : l’absence de responsabilités clairement identifiées ou leur dilution aboutit à une prise en charge très inégale du risque d’inondation selon les territoires et rend surtout très difficile l’organisation de la prévention.

Dans un document de travail du 25 janvier 2013, le Comité national de l’eau appelait déjà de ses vœux une clarification de la définition des attributions en matière de gestion de l’eau dans le milieu naturel.

À ce jour, on constate que les collectivités locales assurent majoritairement les investissements liés à la protection et à l’entretien des cours d’eau, en se substituant souvent aux propriétaires riverains. En effet, si ces derniers sont tenus à l’entretien régulier des cours d’eau aux termes du code de l’environnement, force est de constater que cette mission, qui contribue à la prévention des inondations, est le plus souvent assumée par les collectivités locales.

Comme le soulignait également un document du ministère de l’écologie, du développement durable et de l’énergie, la France dispose d’une politique de prévention des risques d’inondation et d’une politique de solidarité pour la réparation des dommages qui ont jusqu’à présent permis d’assurer la gestion des crises.

Cependant, ces politiques, qui sont mises localement en œuvre au gré des événements, souffrent d’une application inégale d’un territoire à l’autre et d’approches hétérogènes quant aux objectifs visés. Le manque d’une vision homogène et partagée des risques existants rend plus difficile encore l’évaluation de l’efficacité de ces politiques.

Il convient enfin de rappeler que, face au bilan catastrophique des inondations ayant eu lieu en Europe au cours des dernières décennies, la Commission européenne s’est mobilisée en adoptant, en 2007, la directive 2007/60/CE relative à l’évaluation et à la gestion des risques d’inondation, dite directive « inondation ».

La gestion des risques d’inondation proposée au travers de cette directive replace le partage des responsabilités au cœur d’un dispositif dans lequel les collectivités jouent un rôle important.

La proposition de loi qui nous est soumise comporte deux parties, consacrées l’une à la prévention des inondations, l’autre à la gestion de la crise à court et moyen termes.

Les articles 1er à 5, 13 et 14 de ce texte sont identiques ou quasiment identiques aux articles 35 B à 35 E du projet de loi de modernisation de l’action publique territoriale et d’affirmation des métropoles, eux-mêmes introduits en première lecture au Sénat, sur l’initiative de Pierre-Yves Collombat. Ils visent principalement à la création d’une compétence obligatoire de gestion des milieux aquatiques et de prévention des inondations et à la mise en place d’une taxe pour financer le transfert de cette nouvelle compétence. Le texte prévoit également le renforcement du rôle des établissements publics territoriaux de bassin et le transfert des digues. Le rapporteur a légitimement proposé leur suppression à la commission, qui l’a acceptée. En effet, faire coexister deux projets traitant d’un même sujet rendait totalement illisible la démarche parlementaire.

Si la suppression de ces articles est préférable du point de vue de la cohérence juridique, ils appellent cependant quelques observations.

Je me permets de rappeler que la commission des lois ne s’était pas prononcée sur l’article 35 B, considérant qu’elle ne disposait pas de l’ensemble des éléments pour le faire. Elle avait souhaité attendre l’examen de ces dispositions en séance publique.

Par ailleurs, l’évaluation financière du dispositif pose problème. Une étude d’impact portant sur le coût estimé de l’exercice de cette nouvelle compétence a été fournie par la Direction générale des collectivités locales : elle indique que la recette affectée – entre 600 millions et 650 millions d’euros – permettra de couvrir les dépenses d’investissement et d’entretien liées à la prévention des inondations et à la gestion des milieux aquatiques. Néanmoins, j’ai toujours quelques doutes sur cette estimation globale.

De plus, se posera à terme le problème de la péréquation du produit de la taxe destinée à financer l’exercice de la compétence de prévention des inondations. Prélevé par les EPCI compétents, ce produit pourrait se révéler insuffisant pour certains territoires. Les territoires ruraux, en particulier, doivent parfois supporter des coûts d’entretien importants, alors que la recette de la taxe, compte tenu de la densité d’habitation et d’activité, sera limitée.

Enfin, je rappelle que, à l’échéance de dix ans, les collectivités locales auront à assumer la charge de l’entretien des digues propriétés de l’État. Cela représentera une dépense très importante, même si le transfert doit porter sur des ouvrages respectant les obligations réglementaires et légales.

Ces interrogations rappelées, j’en reviens aux dispositions du texte en discussion.

L’article 6 vise à définir juridiquement la notion de cours d’eau en fonction de critères retenus par la jurisprudence. Cette définition législative du cours d’eau, complétée par la commission, sera de nature à résoudre certains contentieux liés à l’exercice de la police de l’eau et à la responsabilité des propriétaires riverains. Cependant, j’émettrai une réserve : il semble que seule une partie de la jurisprudence ait été reprise. Ainsi, un lit ouvert de main d’homme prend le statut de cours d’eau non domanial dès lors qu’il constitue l’exutoire unique de cours d’eau influents, selon la jurisprudence. Est-ce à dire que, dans cette situation, ce type de cours d’eau ne serait plus considéré comme tel, ce qui poserait de réels problèmes juridiques ?

Il serait souhaitable de s’assurer d’une transcription plus complète de la jurisprudence dans la loi, afin de parer au risque de ne résoudre que partiellement le problème posé, voire de l’aggraver pour certaines situations locales.

L’article 7 vise à modifier l’article 562-1 du code de l’environnement relatif aux plans de prévention des risques naturels, les PPRN, et à favoriser l’association des élus à leur élaboration.

À cet égard, le rapport de la mission commune d’information rappelle justement que l’entrée en vigueur d’un plan de prévention du risque inondation a des conséquences très importantes pour un territoire. En effet, celui-ci limite le choix des élus en matière d’urbanisme, puisque les plans locaux d’urbanisme et les plans d’occupation des sols doivent être compatibles avec lui. Le PPRI peut ainsi être perçu comme une contrainte et crée parfois des difficultés entre l’État et les élus ou entre l’État et la population.

Aussi l’objet de cet article, l’acceptation du PPRI, est-il fondamental. Néanmoins, le terme « conjointement » retenu dans la rédaction initiale posait problème, dans la mesure où il supposait l’engagement de la responsabilité des collectivités locales. C’est donc à juste titre que le rapporteur, soutenu par la commission, a substitué à la notion d’élaboration conjointe celle d’association.

Concernant l’article 8, visant à augmenter la part du collège des élus dans les instances délibérantes des comités de bassin ou à leur accorder la majorité dans celles des agences de l’eau, nous ne sommes pas opposés à l’évolution proposée. Toutefois, celle-ci paraît prématurée, dans la mesure où des travaux sont en cours sur la gouvernance de l’eau, notamment à la suite du rapport du député Michel Lesage.

M. Pierre-Yves Collombat. Il est urgent d’attendre…

M. André Vairetto. Aussi notre groupe avait-il déposé un amendement de suppression de cet article. Cela ne témoignait en aucun cas d’un manque de confiance envers les élus, mais nous estimions préférable d’attendre les résultats de la réflexion globale engagée au début de l’année, qui pourraient trouver leur concrétisation dans le cadre de l’élaboration de la prochaine loi sur la biodiversité. Néanmoins, pour éviter une interprétation tendancieuse de cet amendement, nous avons pris la décision de le retirer.

La seconde partie de cette proposition de loi concerne la phase post-inondations, qui va de la gestion de la crise elle-même à l’indemnisation des victimes et des collectivités locales.

Le texte vise à mieux associer les maires à la gestion de crise et à renforcer le rôle des réserves communales de sécurité. Il prévoit également la mise en place d’une commission de suivi des opérations, de reconstruction et d’indemnisation, avancée très positive à laquelle nous souscrivons.

Là encore, le travail de la commission a été profitable et a permis de lever certaines inquiétudes. Je pense en particulier à l’article 9 : la meilleure association des élus à la gestion immédiate de la crise ne devait pas se traduire par une responsabilité accrue du maire.

S’agissant de la délicate question du régime de garantie des catastrophes naturelles, dit « régime catnat », l’article 11 traite de la constatation de l’état de catastrophe naturelle.

Plusieurs rapports consacrés au régime des catastrophes naturelles pointent en effet les inconvénients associés à son fonctionnement actuel, fondé sur une commission interministérielle sans existence législative.

Il a notamment été relevé que l’appréciation des critères fondamentaux utilisés pour définir l’état de catastrophe naturelle, c'est-à-dire l’« intensité anormale » et la « cause déterminante », est subjective et peut conduire à des erreurs d’interprétation. L’État peut ainsi être soupçonné de manquer d’équité. Les services du Défenseur des droits, fréquemment saisis, font d’ailleurs état du manque de clarté des critères sur lesquels s’appuient les décisions et de lisibilité des réponses. La décision n’est souvent pas comprise par les citoyens et est vécue comme une injustice.

Les retards parfois pris par l’État pour traiter les demandes des communes, particulièrement après la sécheresse de 2003, sont également mal perçus.

Enfin, la composition de la commission est purement administrative, même si elle bénéficie d’avis ponctuels d’experts, alors que son rôle est essentiellement technique.

L’article 11 vise donc à remplacer la commission interministérielle en vigueur par une commission permanente, dont la définition de la composition est renvoyée à un décret, mais en précisant que seront associés l’ensemble des acteurs concernés : élus, représentants des sociétés d’assurances et personnes qualifiées. Il constitue donc une première réponse satisfaisante aux problèmes que je viens d’évoquer.

M. le président. Je vous prie de conclure, mon cher collègue !

M. André Vairetto. En conclusion, cette proposition de loi renforce la participation des élus non seulement dans le processus de décision concernant la déclaration de catastrophe naturelle qui enclenche l’indemnisation, mais aussi dans le suivi des opérations post-inondations. Elle permettra une indemnisation plus rapide et plus juste des collectivités locales et des sinistrés. C’est pourquoi le groupe socialiste la soutiendra. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe écologiste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)

M. le président. La parole est à M. Philippe Esnol.

M. Philippe Esnol. Monsieur le président, madame la ministre, monsieur le rapporteur, mes chers collègues, cette proposition de loi, déposée par notre collègue Pierre-Yves Collombat, visant à la prévention des risques naturels liés aux inondations et à la protection des populations lorsque celles-ci surviennent, est l’aboutissement d’un long et sérieux travail législatif, engagé notamment à la suite des deux inondations dont le Var a été victime, en juin 2010 puis en novembre 2011. Nos collègues Pierre-Yves Collombat et Louis Nègre avaient alors conduit conjointement une mission d’information dont les travaux furent d’une qualité remarquable et remarquée. Ils ont remis leur rapport il y a un peu plus d’un an, après avoir réalisé un véritable travail de terrain et procédé à de nombreuses auditions d’experts, de scientifiques et d’acteurs politiques et socioéconomiques.

Tirant tous les enseignements de la double catastrophe survenue dans le Var, nos collègues ont établi un diagnostic clairvoyant sur la prévention du risque d’inondation dans notre pays, accompagné d’un certain nombre de préconisations utiles. Le caractère exemplaire de ce travail trouve, par conséquent, un prolongement à la fois logique et bienvenu dans une initiative législative qui ne pouvait, dans ce contexte, qu’émaner du Sénat.

Le premier intérêt de cette proposition de loi est d’aborder de manière résolue un sujet majeur, mais quelquefois sous-estimé dans notre pays : celui de la gestion des risques naturels.

Dans le monde, nombre de gouvernements comportent un ministre chargé spécifiquement de la prévention et de la réparation des risques naturels, disposant bien sûr des moyens administratifs et budgétaires adéquats.

À la vérité, tel est le cas surtout dans les pays les plus exposés à ce type de risques, où la sensibilité aux questions de prévention et de réparation des catastrophes naturelles est évidemment plus forte. Je ne vais pas forcément regretter que la France ne soit pas dans cette situation ! En effet, par rapport à d’autres, notre pays est tout de même faiblement exposé aux risques naturels majeurs ; c’est sans doute la raison pour laquelle cette question y est moins sensible qu’ailleurs.

Pour autant, nous ne sommes bien évidemment pas exempts de risques de différentes sortes, et il est donc absolument essentiel d’adopter une stratégie de prévention et de protection des populations.

Ainsi, quoique l’activité sismique y soit faible, la France n’est pas à l’abri d’éventuels dégâts matériels provoqués par les tremblements de terre qui s’y produisent quelquefois, en particulier dans le Sud. Les précédents historiques sont rares, mais certains ont été de véritables désastres, à l’image du tremblement de terre de Lambesc, survenu en 1909. (M. le rapporteur acquiesce.)

De même, si notre climat tempéré nous exempte, au moins en métropole, des menaces les plus graves, comme les ouragans, et si nous n’avons pas en permanence une épée de Damoclès au-dessus de nos têtes, nous sommes exposés aux feux de forêt en période de sécheresse estivale, ainsi qu’à des tempêtes susceptibles de causer de graves dégâts humains et matériels, comme en décembre 1999, ou à des inondations.

La prise de conscience des risques naturels invite les responsables politiques que nous sommes à créer les structures et les stratégies propres à y répondre.

Nous ne sommes bien sûr pas démunis en la matière, mais l’excellent travail accompli par nos collègues au sein de la mission commune d’information sur les inondations qui se sont produites dans le Var et, plus largement, dans le sud-est de la France au mois de novembre 2011 a parfaitement démontré que nous devons mieux prendre en compte le renforcement tendanciel de ces risques, lié à l’étalement urbain, qui réduit considérablement, dans de nombreuses zones de notre territoire, l’absorption des eaux pluviales par les sols, en particulier en cas d’intempéries subites et intenses.

Le dispositif de la présente proposition de loi offre des pistes pour une amélioration sensible de la gestion de ce risque.

Il vise à permettre une modernisation des outils à la disposition des acteurs publics pour mener à bien deux missions essentielles : la prévention, consistant à réduire l’exposition au risque par des politiques d’aménagement plus intégrées, et la réparation, consistant à rendre plus souple, plus rapide et plus effective la réponse des autorités publiques aux situations d’urgence, en vue de mieux venir en aide aux populations victimes des inondations.

Pour satisfaire à ce double objectif, la proposition de loi tend à rénover l’architecture de la gouvernance du risque et de la prévention des inondations.

Tout d’abord, elle vise à faire de l’échelon intercommunal l’acteur clé de cette politique territorialisée, pour renforcer la lisibilité et l’identification de l’action publique.

La commission du développement durable, des infrastructures, de l’équipement et de l’aménagement du territoire a estimé que ces dispositions avaient déjà été adoptées par notre assemblée, dans le cadre de l’examen en deuxième lecture du projet de loi de modernisation de l’action publique territoriale et d’affirmation des métropoles.

De même, la création de structures ad hoc pour la gestion des bassins versants, prévue par la proposition de loi, a déjà été débattue dans cet hémicycle. Je me contenterai donc de rappeler que la création d’établissements publics spécifiques, dotés d’un statut mieux adapté, permettra de renforcer les organismes publics qui existent déjà dans ce domaine. Elle permettra aussi de rationaliser l’action publique de prévention de l’inondation, assurée jusqu’ici par d’autres types d’organismes, comme les syndicats mixtes ou les syndicats de rivière.

Enfin, la question de la création d’une taxe destinée à financer la gestion des milieux aquatiques et la prévention des inondations a également été examinée lors de la discussion du projet de loi de modernisation de l’action publique territoriale et d’affirmation des métropoles. Il s’agit d’assortir la clarification des responsabilités locales de moyens d’action effectifs, renforcés évidemment par les programmes de l’État dans ce domaine. En tant que rapporteur pour avis du programme « protection de l’environnement et prévention des risques » du projet de loi de finances pour 2014, je suis particulièrement attentif à ce problème.

La proposition de loi renforce les éléments d’une gouvernance locale du risque inondation déjà mis en place. Ainsi, s’agissant des plans de prévention des risques naturels prévisibles, la commission du développement durable a tenu à rappeler que, s’ils relèvent de la responsabilité exclusive de l’État, ils doivent être pilotés en concertation étroite avec les élus locaux à chaque étape de leur conception et de leur mise en œuvre. Pour être moi-même un élu local subissant en ce moment l’élaboration d’un PPRN, je puis vous assurer que la participation du maire et de la population est absolument indispensable ! (M. le rapporteur acquiesce.)

Dans sa seconde partie, la proposition de loi comporte des mesures relatives à la gestion de la crise consécutive à l’inondation et de l’après-crise, ainsi qu’à l’indemnisation des dommages.

En ce qui concerne la gestion de la crise, elle renforce la coordination des actions sur le terrain et prévoit une association plus étroite des maires aux opérations conduites par le préfet.

En ce qui concerne l’après-crise, elle met en place une commission de suivi des opérations : l’action de cette instance très importante et très attendue permettra d’inscrire dans la durée le suivi des travaux, l’indemnisation des dommages et le traitement de l’ensemble des problèmes se posant tant aux élus qu’à leurs administrés à la suite du sinistre.

Enfin, la proposition de loi prévoit des évolutions substantielles du régime assurantiel des catastrophes naturelles. Elle responsabilise l’assuré en prévoyant le retrait de la garantie « catastrophe naturelle » dans un cas strictement défini : lorsque des biens immobiliers ont été implantés illégalement dans une zone classée inconstructible par un PPRN. Elle instaure également une modulation de la prime d’assurance visant à inciter les particuliers à entreprendre des travaux de protection contre le risque d’inondation.

M. le président. Mon cher collègue, il faut conclure !

M. Philippe Esnol. Mes chers collègues, les pistes ouvertes par cette proposition de loi représentent des avancées utiles et importantes en vue de l’amélioration de la réponse publique au risque d’inondation. Elles ont été considérées favorablement par la commission du développement durable ; du reste, je crois que, sur un tel sujet, il y a peu de place pour les débats politiciens. J’ai grande confiance dans le fait que le Sénat reprendra cette initiative à son compte. Pour sa part, le groupe RDSE soutiendra bien évidemment la proposition de loi de notre collègue Pierre-Yves Collombat ! (Applaudissements.)

M. le président. La parole est à Mme Hélène Lipietz.

Mme Hélène Lipietz. Monsieur le président, madame la ministre, monsieur le rapporteur, chers collègues, j’ai l’honneur de suppléer Ronan Dantec, qui fut membre de la mission commune d’information sur les inondations survenues en 2011.

Plusieurs des préconisations formulées par cette mission ont été intégrées, avec le soutien des écologistes, dans le projet de loi de modernisation de l’action publique territoriale et d’affirmation des métropoles. Je pense en particulier à celles qui touchent à la gouvernance de l’eau à l’échelle des intercommunalités et du bassin versant, prévoyant les moyens de mettre en œuvre ces responsabilités locales grâce à des ressources fiscales dédiées.

Toutefois, nous regrettons que l’idée, avancée par la mission commune d’information, d’inscrire l’aménagement des zones inondables dans les schémas régionaux d’aménagement du territoire n’ait pas été prise en compte, et que les régions n’aient pas été désignées comme chefs de file pour la gestion de l’eau, ainsi que nous l’avions proposé, hélas sans succès.

Nombre des dispositions de la proposition de loi sont issues des travaux approfondis menés par la mission commune d’information. Elles jettent les bases d’une politique de prévention des inondations, inexistante jusqu’ici.

Les écologistes soutiennent toutes les politiques de prévention des risques. En effet, nous estimons que le principe de prévention, ignoré jusqu’à présent, doit nous guider à l’avenir, en même temps que la connaissance du passé.

Les crues intenses et rapides sont sorties de la mémoire collective, alors que nos ancêtres avaient su transmettre leur souvenir pour mieux s’en prémunir. Nous vivons à une époque où l’être humain se croit invincible face à la nature, mais si on peut éteindre – difficilement – le feu, on ne peut pas arrêter l’eau…

Pourtant, dans la mythologie nationale, c’est le feu qui fait peur, pas les inondations ! Ainsi, on parle des « soldats du feu », et non des « soldats de l’eau », alors que ce sont les mêmes pompiers qui interviennent dans les deux cas. Cette simple observation linguistique explique peut-être pourquoi les inondations ne font pas l’objet de mesures de prévention, au contraire des incendies : elles ne sont pas prises au sérieux, alors qu’elles aussi causent des morts, peut-être autant que les feux de forêt.

Dès lors, ce sont malheureusement les catastrophes qui, encore une fois, nous servent de pédagogues et d’inspiratrices : la proposition de loi fait suite à la mission commune d’information sur les inondations survenues dans le Var en 2011, qui avaient été particulièrement meurtrières et destructrices.

S’il va dans le bon sens, ce texte ne porte que sur la gestion des flux de l’eau lorsque celle-ci s’est agglomérée en torrents. Or, il faut rappeler cette évidence que, avant d’être torrent, l’eau est pluie : cette pluie qui, lorsque l’absence d’exutoire dans le sol la contraint à rester en surface, forme un torrent au lieu de rester simple rivière.

Ce problème de l’imperméabilisation des sols n’est pas abordé par la proposition de loi. Il est vrai qu’il touche à la gestion de la maîtrise du foncier, sujet épineux s’il en est, mais il n’est pas possible de l’oublier. C’est la raison pour laquelle les sénateurs écologistes ont déposé trois amendements visant à limiter le ruissellement des eaux lié à l’artificialisation des sols, phénomène qui est l’une des causes des inondations, comme l’a souligné la mission commune d’information.

Nous devons réfléchir aussi à l’aménagement des zones de crue, notamment en termes de mutualisation des espaces : les vases d’expansion des crues peuvent être des espaces publics hors période de crue et servir de réservoirs de biodiversité. Nous pourrions permettre aux collectivités territoriales de réaliser des économies substantielles en aménageant de telles zones.

Cependant, n’oublions pas le rôle essentiel de l’État, notamment en ce qui concerne la police de l’eau. De ce point de vue, les coupes dans le budget de l’écologie et les suppressions de postes sont difficilement acceptables. En particulier, l’Office national de l’eau et des milieux aquatiques devrait voir ses moyens sanctuarisés.

Au moment où se tient la conférence de Varsovie sur le climat, nous ne devons surtout pas ignorer que la lutte contre le changement climatique fait partie de la prévention des inondations. Le changement climatique aggrave les événements climatiques extrêmes et augmente leur fréquence, même sous nos climats tempérés : j’espère que ce point fait maintenant consensus.

Mes chers collègues, ce n’est pas une proposition ou un projet de loi qui permettra de faire face à cette réalité ; seule la prise en compte du changement climatique dans toutes les politiques nationales et internationales pourra en limiter les effets : en aurons-nous la volonté ?

M. le président. La parole est à M. Jean-Jacques Lasserre.

M. Jean-Jacques Lasserre. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, le sujet dont nous débattons ce soir revêt une importance significative pour de nombreux territoires, touchés par des inondations dans un passé proche ou plus lointain.

Certes, en matière d’inondations, des dispositifs existent pour gérer la crise et l’après-crise ; mais, comme l’a très bien montré la mission commune d’information, des lacunes existent sur les plans de la prévention et du financement de la gestion des risques.

Tous les départements, ou presque, ont connu un jour cette catastrophe naturelle aux conséquences dramatiques sur les plans humain, matériel, moral et financier.

Il importe de réfléchir, notamment, à l’articulation des rôles de chaque niveau de collectivités territoriales et aux obligations auxquelles devraient se conformer les collectivités, en matière d’assurances, de création de fonds spécifiques, etc. La proposition de loi prévoit une meilleure implication des collectivités locales ; nous souscrivons à cet objectif.

Je tiens à saluer le travail de Pierre-Yves Collombat et de ses collègues du groupe RDSE ayant cosigné cette très judicieuse proposition de loi. Je salue également le travail de Louis Nègre, qui a brillamment présidé la mission commune d’information sur les inondations survenues dans le Var et, plus largement, dans le sud-est de la France en 2011, dont le rapport a fortement inspiré la proposition de loi.

La commission du développement durable a supprimé une grande partie des articles, en particulier les articles 1er à 5, 13 et 14, portant sur l’articulation des rôles entre les collectivités territoriales. Ils étaient en effet redondants, dans la mesure où le sujet a déjà été traité dans le cadre de la discussion du projet de loi de modernisation de l’action publique territoriale et d’affirmation des métropoles.

Je souhaiterais néanmoins aborder rapidement cette problématique, qui reste vaste et délicate, à la lumière de mon expérience locale. En juin dernier, en effet, des inondations ont touché les Hautes-Pyrénées et les Pyrénées-Atlantiques.

Il me semble que le transfert des ouvrages aux collectivités territoriales est extrêmement contraignant pour celles-ci. Or les inondations, à un certain degré de gravité, réclament, dans tous les cas, la mise en jeu de la solidarité régionale et nationale, ainsi que, le plus souvent, des engagements financiers aussi importants que conjoncturels. Dans ces conditions, je considère que ce transfert ne doit pas être synonyme de désengagement !

Les inondations n’ont pas toutes la même cause et les mêmes caractéristiques, selon que l’on est sur le littoral, en bordure de fleuve ou de rivière torrentueuse. Dans certains cas, il est quasiment impossible d’intervenir contre les inondations ; dans d’autres, les plus fréquents, les inondations résultent de négligences répétées et durables, notamment dans l’entretien des ouvrages de protection.

Un transfert linéaire, régulier, selon des lignes budgétaires annuelles est, à mon sens, une réponse forte, mais partielle, au problème posé. De fait, nous connaîtrons toujours des cas de figure exceptionnels, qui nécessiteront un appel à la solidarité nationale.

Nous avons connu voilà peu, dans le Sud-Ouest, une crue dévastatrice, qui a littéralement saccagé les Hautes-Pyrénées et les Pyrénées-Atlantiques. Cet événement à caractère exceptionnel, d’une ampleur dépassant largement l’échelle départementale ou intercommunale, ne pouvait que relever de la solidarité nationale. Ainsi, dans de nombreux cas, une approche nationale est nécessaire et doit être adoptée. L’inondation très médiatisée de la grotte de Lourdes en a été un exemple emblématique. Le maire de la ville a bien résumé la situation, déclarant : « Nous ne pouvons rien faire, la situation est exceptionnelle. »

Cela étant, même dans les situations où le recours à la solidarité nationale s’impose, le rôle du maire et des acteurs locaux, fort bien évoqué aux articles 9 et 10 de la proposition de loi, demeure bien entendu primordial. Le travail d’équipe des élus locaux et de l’État, incarné notamment par le préfet, est essentiel pour conduire les opérations de résolution de crise.

L’article 12 de la proposition de loi s’inscrit également dans cette perspective, puisqu’il vise à instaurer une commission de suivi des opérations liées à l’après-crise, présidée par le préfet. Ce dernier doit donc sans cesse renforcer ses liens avec les élus locaux, afin de faire le relais entre le terrain et le niveau national.

Je souhaite aussi évoquer brièvement l’article 8 de la proposition de loi, qui tend à modifier les conditions de représentation des élus au sein des organes délibérants des comités de bassin et des agences de l’eau, afin de les rendre majoritaires, ce qui nous paraît extrêmement opportun. Je me permets de rappeler l’importance des agences de l’eau, dont le projet de loi de finances pour 2014 prévoit de ponctionner le fonds de roulement à hauteur de 210 millions d’euros, ce qui induira une réduction de leurs marges de manœuvre et de leur champ d’intervention. Il faut à tout prix sauvegarder ces beaux outils que sont les agences de l’eau.

Je souhaite aborder une autre question importante, celle de l’assurance. Faut-il la rendre obligatoire ? Convient-il de généraliser l’obligation d’assurance permettant d’asseoir la garantie des catastrophes naturelles ? Pour ma part, je serais tenté de me rallier à la proposition de la commission, mais n’oublions pas que les assurances, pour la réparation de dommages engendrés par des intempéries, sont à mon sens le seul moyen de solidarité et de péréquation nationales. En effet, c’est bien l’effort consenti par chaque assuré qui constitue le fonds national. Je sais que cette question fait débat ; si j’y insiste, c’est parce que l’assurance est aussi le gage de la solidarité et de la responsabilisation de l’ensemble des citoyens.

Par ailleurs, soulignons-le, quel que soit le type de dommages, le coût de la prévention des risques est souvent inférieur à celui de la réparation des dommages et de l’indemnisation des sinistrés.

Quant à l’article 21 du texte, il visait à opérer un transfert de charges du régime des calamités agricoles vers celui des catastrophes naturelles. Sa suppression nous semble sage. En effet, les fonds de ces deux régimes étant insuffisants, il serait tout à fait prématuré, en l’état actuel des choses, d’envisager un quelconque transfert de charges.

Un autre sujet important, souvent évoqué par mon collègue Pozzo di Borgo, a trait aux risques de crue centennale en Île-de-France. Il s’agit d’une question vitale pour le Grand Paris. Il semblerait qu’elle soit envisagée sous l’angle de la gestion immédiate de la crise, alors qu’il conviendrait avant tout, là encore, de travailler à la prévention de celle-ci. Une réelle prise de conscience du risque, ou plutôt de l’étendue des conséquences de sa réalisation, est fondamentale.

Vous l’aurez compris, le groupe UDI-UC est favorable à cette proposition de loi et la votera. Nous comptons sur vous, madame la ministre, pour que ce texte, dont l’esprit est excellent et qui comble en grande partie une insuffisance incontestable, soit appliqué dans les plus brefs délais.

Pour résumer, nous considérons que l’adoption de cette proposition de loi constituera un réel progrès, car nous avons beaucoup à gagner à la clarification des responsabilités, à l’association beaucoup plus active des élus et des populations et au renforcement de la présence des élus dans les organes délibérants des agences de l’eau. Notre débat inachevé concernant les dispositions assurantielles est positif.

Nous voterons ce texte avant tout parce qu’il donne la priorité à la prévention, sous deux aspects : celui des indicateurs de risques de catastrophes, pouvant permettre de sauver des vies humaines, et celui de l’entretien vigilant des ouvrages de protection, notamment des digues, qui suppose des dotations budgétaires suffisantes et, je me risque à le dire, une attitude peut-être un peu plus dynamique et réaliste de l’administration. (Applaudissements sur les travées de l'UDI-UC et du RDSE. – Mme Virginie Klès applaudit également.)

M. le président. La parole est à Mme Évelyne Didier.

Mme Évelyne Didier. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, la présente proposition de loi traduit les préconisations du rapport d’information sur la prévention des inondations adopté en septembre 2012 sur l’initiative de notre collègue Pierre-Yves Collombat.

Au cours du débat qui s’est tenu en novembre 2012, nous avions déjà fait part de nos fortes réserves sur ces préconisations. Depuis, le contenu de cette proposition de loi a été pour majeure partie intégré au projet de loi de modernisation de l’action publique territoriale et d’affirmation des métropoles : je pense notamment aux articles 1er à 5, qui constituaient pourtant le cœur du texte et dont l’objet était d’affirmer la compétence des communes en matière de gestion des milieux aquatiques et de prévention des inondations, tout en précisant que la compétence devrait être exercée à l’échelon intercommunal.

Il s’agit une nouvelle fois d’entériner le désengagement de l’État de ses missions premières. Ce transfert de compétence est ainsi justifié par le fait que celui-ci n’assume plus ou assume mal ses missions depuis de nombreuses années.

Nous ne partageons pas cette philosophie. En effet, jusqu’à aujourd’hui, la gestion du risque inondation était partagée entre l’État, les collectivités et les citoyens, dans une logique de contractualisation.

Les principaux outils sont les PPRN, les plans de prévention des risques naturels, élaborés par les préfets en association avec les communes concernées et soumis à enquête publique, et les PAPI, les programmes d’actions de prévention contre les inondations, qui rassemblent les opérations contractualisées entre les collectivités et l’État. Il faut savoir que, aujourd’hui, au titre des PAPI, l’État refuse par principe de financer les opérations relevant des compétences obligatoires des communes, comme la mise en place des plans communaux de sauvegarde.

Nous craignons que la reconnaissance explicite de l’octroi de la compétence de prévention des inondations aux communes ne conduise à priver les collectivités d’un soutien financier de l’État. En témoigne d’ailleurs l’article 8, qui prévoit d’augmenter la représentation des élus locaux au sein des instances délibérantes des comités de bassin. Il s’agit a priori d’une bonne mesure, sauf qu’une telle montée en puissance se traduit par une baisse de la représentation de l’État. Parce que nous ne souhaitons pas une telle évolution, nous avons déposé un amendement sur ce point en commission.

Dans le même esprit, le transfert des ouvrages de prévention constitue à nos yeux un cadeau empoisonné aux collectivités. À ce propos, j’aimerais savoir si celles-ci ont été consultées et si elles savent ce qui les attend. Des conventions d’une durée de dix ans sont prévues, mais qu’en sera-t-il à l’issue de ce délai ? La responsabilité de la gestion de ces ouvrages peut s’avérer extrêmement lourde pour les collectivités territoriales. Ce transfert engendrera en outre une dépense importante – de l’ordre de 600 millions d’euros, selon certains calculs – pour les collectivités, qu’il s’agisse de la gestion des digues ou de l’entretien des cours d’eau non domaniaux.

Pour financer l’exercice de ces compétences, la rédaction initiale de la proposition de loi prévoyait la création d’une taxe, acquittée par les habitants des zones concernées. Nous continuons, pour notre part, de penser que la prévention des inondations relève de la solidarité nationale. Une telle mesure est par ailleurs contradictoire avec la volonté d’opérer une pause fiscale affirmée par le Gouvernement.

Par ailleurs, la généralisation des établissements publics territoriaux de bassin ne semble pas être une idée pertinente pour tous les territoires, au regard des fortes disparités territoriales constatées.

Quant aux dispositions relatives au régime des catastrophes naturelles, figurant dans les seuls articles restant finalement en discussion, elles sont très contrastées. Si certaines sont positives, notamment celles qui visent à permettre une meilleure association des maires à la gestion de crise ou celles qui portent sur l’accélération des indemnisations, d’autres le sont beaucoup moins.

On veut introduire beaucoup de nouveautés, alors même que toutes les propositions faites à la suite d’événements précédents n’ont pas été mises en œuvre jusqu’au bout. De la même manière, il a été fait peu de cas des outils issus de la loi Grenelle II, qui transpose pourtant la directive « inondation » de 2007.

Alors que le rapport d’information invitait à changer de paradigme en mettant au cœur de la prévention non pas la protection contre le risque, mais l’aménagement du territoire pour rendre celui-ci moins vulnérable, rien dans la proposition de loi ne relève d’une telle démarche. À cet égard, nous regrettons que la diminution continue des moyens humains au sein des préfectures ne permette pas de renforcer les contrôles de légalité sur les constructions en zones inondables. L’effectivité de ce contrôle est pourtant essentielle.

Force est de constater, au final, qu’aucune ressource budgétaire supplémentaire n’est prévue pour financer la prévention des inondations. Dans ce cadre, nous regrettons notamment que la question du recentrage du fonds Barnier sur ses missions premières ne soit pas évoquée.

Quant à la création du fonds qui était prévue à l’article 14 et qui a finalement été intégrée dans la loi de modernisation de l’action publique territoriale et d’affirmation des métropoles, nous craignons que la sanctuarisation liée à l’inscription des crédits en loi de finances n’entraîne un effet de blocage de la dépense.

Cependant, nous estimons que le travail en commission a permis d’améliorer le texte, y compris par la prise en compte de nos propositions. En particulier, nous sommes satisfaits de la suppression de l’article 16, qui permettait aux communes de s’affranchir purement et simplement du respect du code des marchés publics. Nous nous félicitons également que l’idée d’instaurer un malus en matière d’assurance ait été abandonnée, sur notre proposition et celle du rapporteur. Un tel dispositif semblait peu efficace et fortement pénalisant.

Pour autant, nous avons défendu en commission des propositions alternatives. Il s’agissait du dispositif relatif au régime des catastrophes naturelles préconisé par le groupe socialiste et soutenu dès 2005 par Nicole Bricq, qui nous paraissait plus simple et plus efficient. Malheureusement, le couperet de l’article 40 de la Constitution est tombé, ce qui ne nous permet pas d’y revenir.

Au fond, nous estimons qu’il est important de reconsidérer la place de l’État dans la prévention des inondations et le régime des catastrophes naturelles. L’État est supposé garantir la sécurité des personnes et des biens contre les éléments naturels, mais il est aujourd’hui évident que ce sont bien les collectivités qui l’aident à s’acquitter de ses missions, et non l’inverse. Cette proposition de loi en prend simplement acte.

Les charges et responsabilités ont été reportées sur les collectivités locales, qui ont par ailleurs subi la lente érosion du soutien de l’État par l’agonie de l’ingénierie publique. De manière factuelle, cette initiative parlementaire se heurte clairement au calendrier gouvernemental. En effet, la présente proposition de loi est débattue au moment même où une concertation est menée par le Gouvernement en vue de l’élaboration d’une stratégie nationale de gestion des risques d’inondation. Nombre d’associations d’élus ont donc souhaité que soit suspendue l’adoption de mesures législatives, dans l’attente de l’aboutissement de ces consultations, qui ne saurait tarder. C’est le sens de la position commune arrêtée en octobre par treize associations nationales de collectivités territoriales. Parce que nous partageons cette volonté de respecter la concertation aujourd’hui en cours, nous nous abstiendrons sur ce texte. (Applaudissements sur les travées du groupe CRC.)

M. le président. La parole est à M. Jean-Paul Fournier.

M. Jean-Paul Fournier. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, si le mot « inondation » est, pour beaucoup, associé aux adjectifs « subite », « ponctuelle » et « aléatoire», il est inscrit, pour d’autres, en filigrane de la plupart des volets de la vie publique locale.

Les travaux de la mission commune d’information ont permis de le souligner : eu égard à l’ampleur et à la récurrence de l’aléa, les habitants du département du Gard, du représentant de l’État au citoyen, de l’élu local à l’entrepreneur, se sont forgés depuis un quart de siècle une culture du risque.

Cette culture a en quelque sorte permis de pousser jusqu’à ses limites vertueuses un modèle empirique. Mais l’expérience et le retour d’expérience trouvent leurs limites en l’absence d’environnement législatif et réglementaire adapté.

Cette culture s’est imposée par la force des réalités. Non seulement les collectivités touchées ont de facto la charge d’inventer la prévention et la protection, mais elles ont aussi celle de frapper à toutes les portes pour tenter de les financer.

Dans ces conditions, comment s’étonner que beaucoup voient en l’État non plus le grand aménageur du territoire qu’il fut, mais un simple service administratif censeur, au mieux un « contrôleur des travaux finis » ? Si bien que, dans chaque commune de France concernée, le document des documents en la matière, le PPRI, a pris le statut de « livre maudit ». La protection et la prévention des risques devraient repousser les frontières pour les hommes, pour l’économie ; au lieu de cela, elles les figent. Aujourd’hui, l’administration, se fondant sur le principe de précaution, ouvre – soit dit sans jeu de mots – un parapluie tellement grand qu’il ne pousse plus rien sur nos territoires…

S’il est un domaine où l’existence de cet état d’esprit apparaît en pleine lumière, c’est bien celui qui est abordé au travers de cette proposition de loi. La mission commune d’information l’a souligné, nous sommes bien loin des Pays-Bas, en termes non seulement de méthode, d’investissements et de moyens mobilisés, mais aussi et surtout de philosophie et d’objectifs.

Protéger pour mieux vivre, protéger pour développer l’activité : voilà ce qu’il faudrait faire. Quand, aux Pays-Bas, on construit la croissance à l’abri des digues et des polders, nous décrétons le désert !

Nos PPRI font fi des investissements réalisés. Ils ne semblent avoir d’autre objet que de garantir leurs auteurs contre toute mésaventure judiciaire. Ce n’est pas comme cela que l’on mobilise les énergies.

Le pire, c’est qu’avec ces postures systématiques de précaution mal évaluées, on n’encourage pas l’investissement pour la protection. En revanche, on en rajoute à l’atonie d’un pays sans envie, sans projet.

Ce constat amène à poser un problème de fond. Je regrette que l’on légifère pour attribuer formellement, au plus tard le 1er janvier 2016, aux intercommunalités la responsabilité en matière de gestion des milieux aquatiques et de prévention des inondations, comme prévu aux feus articles 1er et 5, intégrés à la loi de modernisation de l’action publique territoriale et d’affirmation des métropoles, mais que, par ailleurs, nous maintenions la prééminence étatique en matière d’urbanisme, ou plutôt d’interdictions urbanistiques, donc économiques.

D’un côté, on fait confiance aux élus pour sauver le vivant et la richesse ; de l’autre, on leur refuse tous les moyens de développer celle-ci. On leur donne des véhicules juridiques intéressants pour agir, comme aux feus articles 3 et 4, on va même jusqu’à leur permettre de lever une taxe dédiée, « la taxe pour la gestion des milieux aquatiques et la prévention des inondations ».

À cet égard, je me demande si cette taxe, même plafonnée à 40 euros par foyer ou par entreprise et hypothétiquement compensée par la baisse des primes d’assurance, n’est pas un cadeau empoisonné en cette période. Mais soit, si c’est pour un gain d’efficacité et un surcroît de financement de travaux colossaux qui ne peuvent être envisagés qu’au travers d’un plan pluriannuel d’investissement ; soit, si effectivement le fonds de prévention des risques naturels majeurs demeure une ressource accessible aux élus pour le financement des études et, accessoirement, des travaux.

Pour autant, pour faire pendant à cette confiance placée en les élus pour agir, édifier, protéger, il faudrait leur faire confiance en matière de droit des sols. Or je crains que les dispositions de l’article 7 associant les collectivités territoriales et les EPCI à l’élaboration du PPRI, aussi louables soient-elles, ne restent vaines en termes de résultats. Pas un maire de mon département n’a échappé aux affres de l’élaboration de son PLU, alors que c’est le maire, dans ce cas, qui est censé avoir la main.

Alors, ne parlons pas d’une procédure strictement étatique comme l’élaboration du PPRI. D’ailleurs, sur un plan plus formel, voilà vingt ans, le décret du 5 octobre 1995 définissant la procédure d’élaboration des plans de prévention des risques formalisait déjà la consultation des collectivités par avis du conseil municipal et celle des populations par enquête publique. On sait ce qu’il en est ! Dans l’immense majorité des cas, en vérité, l’amélioration concrète et réelle de la situation due aux investissements lourds n’est pas prise en compte in fine par les préfets lors de la signature de l’arrêté, quel que soit le niveau de concertation tout au long de la procédure d’élaboration. On retrouve grand ouvert le fameux parapluie ! Il y a donc un chemin à parcourir pour que la peur des uns ne pétrifie pas le territoire des autres.

Dans nos communes, nos départements et nos régions, pour la prévention comme pour la protection, il y a des actes, beaucoup d’actes. Il en est ainsi en tout cas dans le Gard, à Nîmes, à Alès, à Beaucaire, à Sommières, dans le Gard rhodanien, dans les Cévennes ou la Petite Camargue : on s’y livre à de vrais sprints tant l’énergie des équipes et la mobilisation des finances sont fortes, à des courses contre la montre aussi, parce que chaque année pèse sur nos communes la récurrence de l’aléa. Mais ces sprints se disputent sur des distances marathoniennes, et ces contre-la-montre sur le long terme. Des œuvres de grande ampleur sont menées, comme à Nîmes depuis vingt ans, comme dans le Gard rhodanien et la Petite Camargue depuis dix ans, mais il n’existe aucune perspective pour repousser les frontières.

Il y a des démarches expérimentales, il y a un creuset de réflexion au sein des collectivités, il y a même des comités de pilotage, mais notre République cartésienne peine à élaborer une politique générale.

La diversité des traitements appropriés aux différents types de bassins, de submersions ou d’aléas ne change rien à la nécessité, pour ceux qui en ont la charge, de s’appuyer sur un corpus commun. Pour autant, l’absence de politique générale pourrait très bien trouver un terme non pas du fait de l’État, mais de l’Europe. La directive « inondation » trace une voie commune en termes de méthode et d’outils ; on peut la critiquer, elle perturbe parfois les dispositifs locaux en place, mais elle a au moins le mérite d’obliger la France, comme les autres pays, à s’organiser partout sur son territoire, à partir d’une cartographie établie. Le présent texte la complète opportunément.

S’agissant de la seconde partie de la proposition de loi, relative au traitement des crises, je suis bien placé pour vous dire que, dans mon département, l’organisation est bien rodée. Il est proposé d’inscrire dans la loi que le maire est l’interlocuteur des services de l’État, devant être informé en temps et en heure des moyens mis en œuvre : c’est une mécanique qui, lorsqu’elle est pratiquée régulièrement, comme c’est le cas dans le Gard, entre naturellement dans les habitudes de tous les protagonistes ayant à gérer ces événements exceptionnels.

Tels sont les éléments que je souhaitais apporter à la discussion du texte. Les collectivités dont le territoire est exposé au risque d’inondation ont des responsabilités particulières, certes, mais elles doivent conserver toute latitude pour organiser leur développement, en contrepartie des efforts qu’elles consentent pour mettre à l’abri les biens et les personnes.

Au-delà du texte de loi – ou en deçà, devrais-je plutôt dire –, nombre des vingt-deux propositions de la mission commune d’information relèvent d’actes réglementaires, parfois de simples comportements de l’administration à l’égard des acteurs de terrain : ces maires, ces conseillers généraux, ces présidents d’EPCI qui attendent avec impatience une évolution de la perception par l’État du risque, l’apparition d’une autre culture du risque.

En conclusion, je ne peux qu’être favorable à ce texte, qui va vraiment dans le bon sens. (Applaudissements sur les travées de l'UMP et du RDSE.)

M. le président. La parole est à M. Maurice Antiste.

M. Maurice Antiste. Monsieur le président, madame la ministre, monsieur le rapporteur, mes chers collègues, le sujet qui nous occupe aujourd’hui est la prévention des inondations et la protection contre celles-ci. Nous ultramarins connaissons bien ces problèmes, car ils sont récurrents et constituent une préoccupation majeure en Martinique et en Guadeloupe, où les risques naturels sont plus nombreux et plus dangereux qu’ailleurs.

Ainsi, le risque d’inondation est élevé aux Antilles, puisque les pluies y provoquent des crues rapides, violentes et de courte durée. En outre, le risque de mouvements de terrain est présent à des degrés divers : certaines zones à risque sont connues, d’autres sont plus délicates à repérer. De plus, les risques naturels dans les DOM pourraient s’aggraver à l’avenir, car le changement climatique est susceptible d’entraîner une élévation du niveau de la mer et un accroissement de l’intensité des tempêtes et des cyclones.

C’est pourquoi la proposition de loi relative à la prévention des inondations et à la protection contre celles-ci m’apparaît comme un texte majeur. Je salue la prise en compte de cette problématique au travers de la double perspective de la prévention et de la protection.

Concernant la prévention, je souhaite souligner que, aux Antilles, sur le plan juridique, nous sommes confrontés à des interprétations contradictoires des dispositions combinées du code général de la propriété des personnes publiques et du code de l’environnement.

Par exemple, les termes des articles L. 2124-11 et L. 2111-9 du code général de la propriété des personnes publiques et L. 215-14 du code de l’environnement donnent à penser que l’entretien des berges des cours d’eau domaniaux est à la charge de l’État, puisque celui-ci est responsable de l’entretien du lit aux rives et que les berges relient le lit aux rives. Or ces éléments sont en contradiction avec l’article L. 215-14 du code de l’environnement, aux termes duquel « le propriétaire riverain est tenu à un entretien régulier du cours d’eau ».

Sur cette base, les services de l’État refusent d’intervenir pour l’entretien des berges des cours d’eau domaniaux. Ainsi, il n’existe pas de plan de gestion assorti d’une fréquence régulière d’entretien pour les cours d’eau domaniaux en Martinique. C’est pourquoi il est indispensable que le préfet ait les moyens d’organiser les interventions régulières de l’État pour l’entretien des cours d’eau domaniaux.

Par ailleurs, les spécificités géographiques ne sont pas non plus prises en compte sur le plan juridique. Par exemple, il n’y a pas de fleuve aux Antilles. La définition jurisprudentielle – et, à terme, réglementaire – des cours d’eau – présence d’un lit naturel et d’un débit suffisant la majeure partie de l’année – exclut donc d’office les ravines insulaires du champ réglementaire. Or la prise en compte de leur entretien et de leur aménagement est capitale pour la gestion des « cours d’eau » dans un espace insulaire caribéen soumis à des pluies parfois violentes et sporadiques à la fois, d’autant que, en Martinique, les bassins versants sont relativement petits et souvent pentus en amont, ce qui accroît l’érosion.

Il importe donc d’ajuster la définition pour que les ravines soient considérées comme des cours d’eau. Cette qualification représente un enjeu essentiel pour les Antilles, surtout sur le plan financier.

En effet, l’entretien des cours d’eau non domaniaux et les travaux de protection sont à la charge des riverains. Ceux-ci, faute de moyens suffisants, se retournent vers les communes, qui, souvent, ne sont pas en mesure d’agir. Alors, les riverains interviennent de façon inappropriée dans le lit des rivières.

Enfin, concernant le volet relatif à la protection, il m’apparaît utile, à ce stade, de formuler des remarques sur le chapitre II, intitulé « Dispositions relatives à la gestion de la crise, à la réhabilitation et à l’indemnisation ».

L’article 10 prévoit, à bon escient, le renforcement de la mission des réserves communales de sécurité civile. Compte tenu de notre insularité, la faculté de recourir à une réserve revêt une importance cruciale.

Toutefois, trois points méritent d’être clarifiés.

D’abord, il faudrait prévoir l’affectation de moyens financiers spécifiques à la création et à la gestion de ces réserves, qui voient leur rôle renforcé.

Ensuite, la formule « dès que la probabilité de survenance d’un événement calamiteux exceptionnel est forte » pourrait à mon sens être remplacée par les mots « dès que des événements excédant les capacités des moyens disponibles ». Ainsi, l’élu disposerait d’une plus large possibilité de faire appel à la réserve.

Enfin, s’il est intéressant de légitimer la mutualisation des moyens entre communes, il convient de préciser l’autorité de commandement, le champ de la responsabilité des réserves et la prise en charge de leur couverture en cas de problème.

Telles sont les propositions que je formule pour enrichir ce texte que je considère de bonne facture. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du RDSE.)

M. le président. La parole est à M. Michel Houel.

M. Michel Houel. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, je tiens tout d’abord à saluer le travail accompli par nos collègues Pierre-Yves Collombat, auteur de cette proposition de loi, et Louis Nègre, rapporteur.

Selon l’ONU, un milliard de personnes vivent dans des zones exposées aux inondations et leur nombre devrait doubler d’ici à 2050, cela sans prendre en compte la multiplication des événements extrêmes résultant du changement climatique.

Nous le savons, le principal risque naturel, en France, c’est le risque d’inondation. L’agglomération parisienne est, économiquement, la région la plus menacée de notre pays.

Élu de Seine-et-Marne et président du syndicat intercommunal du Grand Morin depuis vingt-quatre ans – c’est essentiellement à ce titre que je m’exprime ce soir à cette tribune –, j’ai déjà mis en œuvre à peu près toutes les mesures prévues dans cette proposition de loi. Sachez, mes chers collègues, que cela fonctionne bien et que nous obtenons des résultats.

Au cours des siècles, les débordements de la Seine et de ses affluents ont régulièrement dévasté la capitale et ses abords. Nous avons tous en mémoire les photographies de la grande crue de 1910, mais sommes-nous capables d’imaginer aujourd’hui les conséquences qu’aurait une inondation de ce type dans une agglomération dont l’importance, le nombre d’habitants et la complexité ne cessent de croître ?

On évalue à 20 milliards d’euros les dommages directs qu’engendrerait une crue majeure dans l’agglomération ; ce montant double si l’on ajoute les dommages indirects. Des millions de personnes seraient touchées, en particulier par l’interruption des services publics et l’incapacité des entreprises à poursuivre leur activité. Cela ne concernerait pas seulement les zones inondées ! Au-delà de la seule agglomération parisienne, c’est l’économie tout entière de notre pays qui pâtirait durablement. Il s’agit là de l’exemple que je connais le mieux, mais nous avons assisté à des drames dans d’autres régions de France.

Nos collectivités subissent de plein fouet, depuis plusieurs années, la crise. Aussi tout euro dépensé doit-il être un euro utile. La sécurité publique, la sécurité matérielle et économique ont un coût qui peut paraître élevé, mais il n’est rien en comparaison de l’argent qu’il faut débourser après qu’une catastrophe naturelle s’est abattue sur un territoire mal préparé.

Alors, mieux vaut prévenir que guérir, et nous devons nous donner les moyens d’atténuer dès aujourd’hui les conséquences de crues dont on sait qu’elles peuvent survenir à tout moment.

Depuis 1955, la Seine et ses affluents sont à peu près calmes, ce qui a pour conséquence une sorte d’amnésie collective du risque d’inondation. Or, on a également tendance à l’oublier, après une inondation, l’herbe est plus verte, si j’ose dire !

Gouverner, c’est prévoir. Mettre en place les dispositifs pour former, informer et prévenir relève de notre responsabilité collective. Seule une meilleure prévention des risques permettra de réduire la facture laissée par ces événements exceptionnels sur les populations et leurs activités. Il faut donc réduire la vulnérabilité des villes et des villages face à ces catastrophes naturelles.

L’inondation est pourtant inscrite historiquement dans le fonctionnement des sociétés riveraines. Les crues étaient même acceptées en Camargue au milieu du XIXe siècle. De même, de nombreuses civilisations ont prospéré à partir des effets positifs des inondations. Souvenez-vous du Nil, des années de vaches maigres et des années de vaches grasses !

Fermons cette parenthèse qui visait à affirmer que les crues sont des phénomènes naturels qu’il faut apprendre à gérer ; nous devons tous, collectivités locales, société civile, État, unir nos efforts et agir ensemble pour prévenir les risques.

Le syndicat que je préside et qui regroupe vingt-cinq communes a mis en place un système de vigilance et d’alerte. Il a été l’un des premiers à instaurer la surveillance par téléalarme. Il faut dire que le Grand Morin, qui est un affluent de la Marne, peut prendre soixante centimètres en l’espace de huit heures. Le système que nous avons établi permet d’évacuer rapidement vers la Marne le trop-plein. Le signal de la levée de vannes est initié par des balises situées à trois endroits stratégiques sur le cours d’eau. Elles sont reliées à une téléalarme, qui, lorsqu’une balise déclenche l’alerte, téléphone, quelle que soit l’heure du jour ou de la nuit, à un responsable, d’abord au président, puis aux vice-présidents, car il faut absolument lever les vannages de l’aval vers l’amont.

Grâce aux méthodes que j’ai appliquées, en douze ans, nous n’avons plus connu aucune crue,…

M. Louis Nègre, rapporteur. Bravo !

M. Michel Houel. … alors qu’auparavant les crues se produisaient tous les deux ou trois ans.

Ce système donne satisfaction depuis plusieurs années, mais nous ne perdons pas de vue que la grande inondation viendra un jour où l’autre. À cet égard, les travaux que nous avons entrepris, qui sont d’ailleurs préconisés par la proposition de loi, nous permettent de regarder les risques d’inondation à trente ans.

La couverture assurantielle des communes est généralement mal adaptée pour faire face à des inondations graves : soit la commune est en « auto-assurance », ce qui est un cas encore fréquent, soit les polices contractées prennent très mal en compte des dommages d’inondations, qui n’ont pas été analysés en détail au moment d’établir le contrat. Au final, la commune doit prendre à sa charge des dommages qui correspondent, en valeur, à plusieurs années d’investissement.

La proposition de loi va, à mon avis, dans le bon sens, et je la voterai. Cependant, bien qu’il soit aujourd’hui facultatif, l’article 35 B prévoit que les communes ou les EPCI à fiscalité propre peuvent instituer une taxe. J’espère simplement que cette taxe sera levée avec discernement, afin de ne pas apparaître comme un impôt nouveau.

M. Michel Houel. La prévention des risques d’inondation est un défi d’avenir que les maires doivent relever en ajoutant un volet « réduction des risques d’inondation » à chacune de leurs actions, tant à l’échelle communale qu’intercommunale. C’est un défi d’avenir, car il nous permettra de léguer aux générations futures des territoires mieux préparés à faire face aux menaces certaines des inondations. Pour y parvenir, anticiper s’avère vital, s’adapter est capital et ne pas aggraver le risque est essentiel. (Applaudissements sur les travées de l'UMP, de l'UDI-UC, du RDSE et du groupe écologiste.)

M. le président. La discussion générale est close.

Nous passons à la discussion des articles du texte de la commission.

CHAPITRE IER

Dispositions relatives à la prévention

Discussion générale (suite)
Dossier législatif : proposition de loi relative à la prévention des inondations et à la protection contre celles-ci
Articles 2 à 5

Article 1er

(Supprimé)

M. le président. La parole à M. Pierre-Yves Collombat, sur l’article.

M. Pierre-Yves Collombat. Mme Lebranchu n’ayant pu assister à la présentation de cette proposition de loi, je souhaite revenir sur la signification de la suppression des articles 1er à 5 et 13 à 14, ainsi que sur les enjeux du texte.

Si les articles 1er à 5, présents dans la proposition de loi initiale, ne figurent plus ici, ce n’est pas parce qu’ils manquaient d’intérêt ou étaient superfétatoires, mais parce que les dispositifs qu’ils prévoyaient ont déjà été adoptés en première lecture au Sénat et à l’Assemblée nationale, puis, sous une forme améliorée par la concertation entre notre commission des lois et le Gouvernement, en seconde lecture au Sénat lors de l’examen du projet de loi de modernisation de l'action publique territoriale et d’affirmation des métropoles, dont ils constituent les articles 35 B à 35 E.

Au lieu d’un texte unique relatif à la lutte contre l’inondation, les hasards et les méandres de la discussion parlementaire ont donc fait que nous avons deux fers au feu : l’un relatif à la prévention des inondations, objet des articles 35 B à 35 E du projet de loi de modernisation de l'action publique territoriale et d’affirmation des métropoles, l’autre, le présent texte, essentiellement relatif à la gestion de la crise, de l’après-crise et de l’indemnisation.

Les articles 35 B à 35 E du projet de loi de modernisation de l'action publique territoriale et d’affirmation des métropoles, parce qu’ils organisent la gouvernance de la politique de prévention de l’inondation et donnent les moyens d’une telle politique sur l’ensemble du territoire et dans la durée sont des éléments essentiels du dispositif. C’est pour cela, madame la ministre, que nous aurons besoin, dans trois semaines à l’Assemblée nationale, du même soutien que celui dont vous nous avez témoigné lors de leur examen au Sénat.

Avec ces propositions, nous ne disons pas aux acteurs de terrain qu’ils doivent s’organiser de telle ou telle façon si ce qu’ils ont mis en place les satisfait, pas plus que nous ne les contraignons à lever des ressources nouvelles s’ils ne le jugent pas nécessaire. Nous ne décidons pas pour eux ; nous leur donnons simplement le libre choix des moyens. Par conséquent, pas de faux procès, les enjeux sont trop graves !

J’ai rappelé ces enjeux en dressant la liste des inondations catastrophiques depuis février 2010 – voyez que je ne suis pas remonté au déluge ! –, à savoir huit catastrophes notables, quatre-vingts morts, entre 3 et 3,5 milliards d’euros de dégâts, et ce n’est pas parti pour s’arrêter, car ce qu’on sait n’est pas vraiment rassurant.

Comme je l’ai déjà dit, le prérapport de l’OCDE sur la situation de l’Île-de-France n’est pas non plus rassurant : la prochaine inondation centennale dans la région qui abrite le tiers du potentiel économique de la France coûterait 40 milliards d’euros ! Quant au nombre de victimes, mystère… Lorsqu’on sait que les zones inondables de l’Île-de-France sont urbanisées de 40 % à 90 %, il y a quelques soucis à se faire. La conclusion de l’OCDE est la suivante : aujourd’hui Paris est protégé, la banlieue non ! Précisions que Paris est préparé seulement pour l’inondation centennale et non pour une catastrophe de plus grande ampleur.

Voilà les enjeux, madame la ministre, mes chers collègues ! Ils sont tels que tous les reproches que l’on peut faire à nos propositions, même ceux qui sont justifiés, restent quand même un peu légers. Que valent en effet les objections juridiques devant l’étendue du défi ?

Je sais bien cependant qu’il ne suffit pas de voter une loi pour régler les problèmes ; si tel était le cas, cela se saurait ! La seule prétention de ce texte est de rompre avec le système « autobloquant » dans lequel nous nous sommes enfermés progressivement, d’ouvrir le possible à ceux qui le voudront bien. Pour le reste, l’avenir jugera.

Concertation ! Concertation ! Telle est l’urgence, nous dit-on. Personnellement, je pense non pas qu’il est urgent d’attendre, mais qu’il est urgent d’agir. Si ce soir, comme dans trois semaines à l’Assemblée nationale, nous pouvons donner les moyens d’agir, nous aurons fait une bonne action. La concertation s’affinera par la suite. (Applaudissements sur les travées du RDSE, du groupe écologiste, de l’UMP et de l’UDI-UC.)

Article 1er (supprimé)
Dossier législatif : proposition de loi relative à la prévention des inondations et à la protection contre celles-ci
Article 6

Articles 2 à 5

(Supprimés)

Articles 2 à 5
Dossier législatif : proposition de loi relative à la prévention des inondations et à la protection contre celles-ci
Article 7

Article 6

Après l’article L. 215-7 du code de l’environnement, il est inséré un article L. 215-7-1 ainsi rédigé :

« Art. L. 215-7-1. – Constitue un cours d’eau un écoulement d’eaux courantes dans un lit naturel à l’origine, alimenté par une source et présentant un débit suffisant la majeure partie de l’année.

« L’écoulement peut ne pas être permanent compte tenu des conditions hydrologiques et géologiques locales. »

M. le président. Je mets aux voix l'article 6.

(L'article 6 est adopté.)

Article 6
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Article 8

Article 7

Le code de l’environnement est ainsi modifié :

1° Le I de l’article L. 562-1 est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Les plans de prévention des risques naturels prévisibles identifient la nature du ou des risques naturels prévisibles pour le territoire concerné et précisent la qualification du ou des risques conformément au II et aux décrets en Conseil d’État visés au VII. » ;

2° Le deuxième alinéa de l’article L. 562-3 est remplacé par deux alinéas ainsi rédigés :

« Sont associés à l’élaboration de ce projet les collectivités territoriales et les établissements publics de coopération intercommunale concernés, préalablement à la prescription du plan de prévention des risques naturels prévisibles et à chaque étape de son élaboration.

« La population concernée est informée et consultée sur le projet de plan de prévention des risques naturels prévisibles. »

M. le président. La parole est à M. Pierre-Yves Collombat, sur l'article.

M. Pierre-Yves Collombat. L’une des conclusions de la mission commune d’information sénatoriale sur les inondations qui se sont produites dans le Var et plus généralement dans le sud-est de la France est qu’il faut changer la conception des PPRI. Or la commission du développement durable a lyophilisé mon texte. C’est pourquoi j’ai déposé un amendement visant à rétablir la rédaction initiale.

Même si c’est un peu long, je veux vous lire ce qui est écrit à la page 263 du rapport intitulé Se donner les moyens de ses ambitions : « Le caractère antagonistique des relations État/élus, voire État/une partie de la population lors de l’élaboration des PPRI est une constante, plus ou moins affirmée certes, mais une constante. » – notre collègue Fournier l’a rappelé – « Cette opposition porte tantôt sur le principe du PPRI, tantôt sur les modalités d’application de celui-ci. En réalité, sous couvert de discussions techniques, ce sont généralement deux objectifs politiques qui s’affrontent : un objectif de protection maximale, porté par les services de l’État – au nom de leur interprétation de la loi, ce qui est dans leur rôle, voire de principes transcendants, ce qui l’est moins – contre un objectif de développement ou d’intérêt local, défendu par les élus.

« Cette opposition trouve généralement sa résolution au terme d’un marchandage, ce qui conduit parfois à douter de la cohérence de l’action de l’État dès lors qu’on se risque à comparer le traitement réservé à chaque territoire.

« Le sentiment de la mission que la seule manière de sortir de cet affrontement qui mène à une impasse, c’est de poser le problème autrement, de le poser sous l’angle de l’aménagement du territoire et non plus du seul point de vue de la sécurité, la sécurité devenant l’une des conditions du développement, condition essentielle mais d’autant moins unique qu’elle ne saurait […] être absolue.

« Loin de favoriser cette approche, les modèles mathématiques utilisés par les bureaux d’études dans l’élaboration des PPRI, la rendent plus difficile, leurs présupposés n’étant jamais mis sur la table et encore moins présentés pour ce qu’ils sont, des choix humains, choix raisonnables sans doute, mais choix. Un tel usage non scientifique des modèles de simulation est non seulement un abus de pouvoir, une cause de blocages ultérieurs. Si ce n’était pas le cas pourquoi pourrait-on trouver avec eux, comme Tartuffe avec le ciel, des accommodements au terme d’un marchandage ? » Que marchande-t-on ? Des droits à construire contre des risques ! Quelle allure cela a-t-il ?

« Il conviendrait, comme le soulignait lors de son audition M. Paul-Henri Bourrelier, de se souvenir que les modèles sont relatifs et que leurs résultats dépendent largement des données introduites en amont. » Le problème est qu’on ne sait jamais quelles sont les données introduites en amont !

« Pour sortir de cette impasse, la mission s’est demandé comment faire évoluer l’élaboration des PPRI. Probablement en creusant la voie indiquée par Mme Stéphanie Bidault, délégué générale du CEPRI, lors de son audition qui faisait observer qu’un "partenariat [entre État et collectivités territoriales] fonctionne mieux qu’une logique réglementaire descendante". »

La rédaction de l’article 7 que je propose répond à cette logique ainsi qu’à une forte attente des élus et de la population.

Premièrement, si les PPRN sont mis en application par l'État, qui garde le dernier mot, ils sont élaborés conjointement, c'est-à-dire dans le cadre d'un échange sur les modalités techniques d'élaboration des choix – d'où le décret en Conseil d’État –, ce qui n'a rien à voir avec les modalités actuelles d'association prévues à l'article L. 562-3 du code de l'environnement, qui se résument le plus souvent à une information sur les propositions des bureaux d'études missionnés et de l'administration qui les valide, le tout suivi du marchandage décrit plus haut. Je précise que le PPRI étant publié par arrêté préfectoral, la responsabilité des élus n’est pas plus engagée qu’aujourd'hui. L’objection qui m’a été faite au sujet de la responsabilité ne me paraît donc pas du tout pertinente.

Deuxièmement, les PPRN ne se limitent pas à affirmer une volonté générale aussi exigeante que vague de protection contre un risque, mais, sur le modèle des Pays-Bas, ils fixent le niveau de protection visé et les dispositifs à mettre en place pour assurer cette protection. C’est illusoire de penser que l’élaboration d’un plan d’urbanisme suffit à tout régler.

Troisièmement, si on admet que les PPRN définissent les règles de protection d’un territoire pour l’habiter en sécurité, il est logique que celles-ci puissent évoluer en fonction des efforts faits pour le sécuriser. Or, actuellement, l’élaboration d’un PPRN est si hasardeuse, si pénible, qu’une fois que la décision est arrêtée, personne n’a envie d’y revenir. Selon la doctrine officielle, les investissements qui peuvent être faits par les collectivités, produisant un faux sentiment de sécurité, sont dangereux ; voilà qui ne risque pas de stimuler l’initiative ! C’est à se demander pourquoi on dépense entre 250 et 350 millions d’euros par an pour assurer une protection active contre l’inondation.

Il ne faut donc pas s’étonner que notre système de prévention de l’inondation soit « autobloquant ». Comme l’a dit l’un de nos collègues, il est tout à fait essentiel de faire évoluer cette façon de pratiquer les PPRN. La rédaction retenue par la commission du développement durable est donc trop proche de la rédaction actuelle pour induire véritablement un changement d’attitude.

M. le président. La parole est à M. Yves Pozzo di Borgo, sur l'article.

M. Yves Pozzo di Borgo. Je souhaite intervenir sur cet article, non pas pour son fondement même, mais pour évoquer la situation particulière de Paris.

La proposition de loi de Pierre-Yves Collombat constitue une réelle avancée. Elle doit permettre une prise de conscience de l’enjeu financier et humain que représentent les inondations sur notre territoire. Notre collègue pointe deux grandes lacunes : notre absence de culture de la gestion des risques naturels et le manque de gouvernance qui en découle pour apporter une réponse pérenne à un tel enjeu.

Paris est symptomatique du déficit de gouvernance. Mais, de par son importance, je crois que la capitale aurait besoin d’une réponse spécifique. À ce titre, je voudrais saisir l’occasion pour évoquer le risque de crue centennale – il y a déjà été fait référence – dans la capitale. Cette problématique n’est pas simplement parisienne, ni même francilienne ; elle revêt un caractère national.

L’Île-de-France, c’est 29 % du PIB national. Or, malgré l’enjeu, chacun des acteurs, qu’il s’agisse de la ville de Paris, des communes, de la région et de l’État, tente de diluer les risques dans un activisme de façade qui n’est pas à la mesure des conséquences que provoquerait une inondation majeure.

Pourtant, tous les experts s’accordent. La question est de savoir non pas si une inondation comme celle de 1910 surviendra – à Paris, on voit encore la ligne qui indique le niveau auquel l’eau était montée –, mais quand elle se produira. Chaque année, la région capitale a 1 chance sur 100 d’être frappée par une telle catastrophe... Prague, qui dispose d’une géographie comparable à Paris, a eu sa crise centennale, avec des dégâts énormes.

Notre région capitale est vulnérable. Le plan ORSEC de la zone de défense de Paris et le plan Neptune du ministère de la défense visent davantage l’organisation des secours que la mise en place d’un dispositif de protection en amont limitant la montée des eaux. Nous sommes dans la gestion immédiate de la crise quand le véritable enjeu réside dans sa prévention. C’est d’ailleurs ce que relève le rapport de l’OCDE, qui pointe un manque de prise de conscience du risque et un défaut de gouvernance.

La région capitale a été épargnée depuis longtemps par des catastrophes de ce type. Les différents acteurs n’ont donc pas de mémoire en la matière, ni d’expérience face à ce genre d’événement. Pourtant, il suffit de regarder les inondations de New York en 2011 pour en prendre la mesure : 19 milliards de dollars de dégâts rien que pour Manhattan, 42 milliards de dollars pour l’État du New Jersey, 20 milliards de dollars au titre de perte de production, 26 000 entreprises touchées et 60 000 faillites.

À l’échelle du Grand Paris, selon l’OCDE, 5 millions de personnes et des dizaines de milliers d’entreprises seraient touchées. Les dégâts directs seraient de 11 milliards d’euros selon la préfecture de police et de 40 milliards d’euros selon l’OCDE. Monsieur Collombat, contrairement à ce que vous affirmez, la ville de Paris n’est pas protégée.

L’établissement public Seine Grands Lacs, qui a bien travaillé, a depuis longtemps identifié les risques et les conséquences. Il a proposé la construction d’un nouveau barrage-réservoir, celui de la Bassée, seul moyen de réduire de 30 % les dégâts éventuels en cas de crue centennale. Au sein du conseil d’administration siègent les quatre départements correspondant à l’ancien département de la Seine. Ils sont donc au plus près pour avoir connaissance des risques et des moyens de les limiter. Pourtant, depuis plusieurs années, le projet demeure à l’état d’embryon.

Au conseil de Paris, à plusieurs reprises, j’ai saisi le maire de la capitale sur le sujet ; il m’a répondu récemment qu’il commençait à s’y intéresser… Je me suis maintes fois adressé au préfet pour qu’il prenne la mesure de cet enjeu vital pour la région. Au sein même de cet hémicycle, j’ai interrogé les ministres des différents gouvernements pour qu’ils prennent le dossier en main. Je me souviens de ma première intervention voilà une dizaine d’années : il manquait 800 millions. Sauf que cela permettrait d’économiser 40 milliards d’euros de dégâts !

Personne ne bouge ! Aucune initiative n’a véritablement été prise, si ce n’est, après dix ans de réflexion, le lancement pour 2019 d’une expérimentation d’un seul casier test sur les dix que compte le projet de la Bassée, ce qui revient à ne rien faire. Une telle inaction des différents acteurs dans ce dossier est coupable, chacun se renvoyant la responsabilité de prendre la décision politique.

Passer d’une « logique de protection pour elle-même des territoires inondables à une logique d’aménagement de ces territoires » apparaît comme une ambition plus que souhaitable. J’émets toutefois un bémol : c’est difficile à mettre en pratique sur un territoire comme l’Île-de-France, dont la complexité a été renforcée par la loi sur la métropole de Paris, les compétences se chevauchant entre la métropole, la région, les départements et les communes...

Je veux conclure en rappelant que le risque de crue centennale dans la région capitale échappe à la logique classique de gestion des risques naturels. Plus qu’un problème de gouvernance, c’est une question de prise de conscience réelle des conséquences d’une telle catastrophe qui doit primer !

M. le président. La parole est à Mme Marie-France Beaufils, sur l’article.

Mme Marie-France Beaufils. L’article 7 nous permet d’aborder un point qui me paraît important : les modalités d’association des collectivités locales à l’élaboration des plans de prévention des risques d’inondation.

Certains de nos collègues ont rappelé les difficultés liées aux premiers PPRI. Dans ma commune, le premier date de 1998. C’est donc une problématique que nous connaissons bien. D’ailleurs, notre nouveau plan d’occupation des sols a été élaboré à partir des réflexions menées sur l’évolution possible de nos territoires qui sont soumis à des risques de grandes crues, comme celle de la Loire en 1866. Au demeurant, Saint-Pierre-des-Corps n’est pas la seule commune concernée. Notre collègue Jean-Jacques Filleul, qui est maire de Montlouis-sur-Loire, connaît également bien le sujet. (M. Jean-Jacques Filleul acquiesce.) En effet, en cas de rupture de digue, ma commune et plusieurs autres seraient recouvertes par plus de deux mètres d’eau !

La question de l’avenir de nos territoires a donc été au centre de nos réflexions au cours de cette période. Nos collectivités locales se sont constituées en associations, afin d’y travailler ensemble.

Je dois dire que, dans le cadre de la transposition en droit français de la directive européenne de 2007, un certain nombre d’interrogations que nous avions alors soulevées, en ayant du mal à être entendus, commencent à être prises en compte. Je vous renvoie à ce qui se fait actuellement au ministère de l’écologie. Le Gouvernement a ainsi lancé une consultation sur la stratégie nationale. Un débat a d’ailleurs eu lieu cet après-midi à la Commission mixte inondation, la CMI. Je n’ai pas pu y assister : on ne peut pas être au four et au moulin ! (Sourires.)

Telle qu’elle est conçue actuellement, la stratégie nationale a le grand intérêt, à mon sens, de poser non seulement la question de la protection, mais aussi celle de la situation des territoires. Nous le savons, un outil de protection peut constituer une fragilité. Par exemple, la digue qui avait été installée entre L’Aiguillon-sur-Mer et La Faute-sur-Mer s’est révélée être un véritable piège.

M. Charles Revet. Bien sûr ! C’est pour cela qu’il faut faire très attention aux travaux que l’on entreprend !

Mme Marie-France Beaufils. Il faut donc faire preuve de beaucoup de vigilance.

Les risques d’inondation auxquels nos territoires sont soumis peuvent revêtir de multiples formes : submersions marines, crues torrentielles, remontées lentes des eaux,… Ces situations très diverses complexifient encore la recherche de solutions. Nous devons donc nous interroger sur les instruments de protection les plus adaptés et sur leur financement. À cet égard, j’ai beaucoup de réserves sur la taxe envisagée, qui ne peut pas, me semble-t-il, être levée dans des territoires déjà soumis à un certain nombre de pressions et de règles réduisant leurs capacités financières. Et il ne me paraît pas non plus envisageable d’en faire porter la charge aux seules populations !

Dans le même temps, nous devons réfléchir au devenir des territoires concernés et voir comment les rendre moins vulnérables. Il faut trouver les moyens qui permettent aux habitants de revenir y vivre rapidement après une crue. Des travaux en ce sens sont en cours.

Les réponses qui sont proposées aujourd’hui sont peut-être pertinentes pour certaines parties du territoire, mais il faut, me semble-t-il, appréhender la gestion du risque d’inondation dans sa globalité ; l’approche actuelle me paraît trop étroite. C’est pourquoi j’aurais souhaité que l’on attende que le travail de la stratégie nationale soit plus avancé. Nous aurions ainsi pu aboutir à un dispositif plus rigoureux, plus solide, avec un meilleur contenu. C’était sans doute l’affaire de quelques mois. En effet, des progrès importants ont tout de même été réalisés. Par exemple, la CMI a été consultée.

Nous travaillons actuellement sur des initiatives, dont certaines concernent le type de constructions engagées dans nos communes. Il y a des exemples en ce sens. Mercredi dernier, le Gouvernement a lancé des ateliers de réflexion menés sur un certain nombre de territoires concernés par de tels risques. C’est le cas en Île-de-France ou sur les rives de la Loire. Des réflexions sur le sujet vont donc être menées dans plusieurs secteurs.

Je pense qu'adopter un tel dispositif à ce stade ne permettrait pas de répondre à la totalité des cas de figure. Il est évidemment important que les communes soient associées à la démarche, mais elles ne doivent pas se substituer à l’État. Car c’est bien à l’État qu’incombe la responsabilité de traiter le problème sur l’ensemble du territoire !

M. le président. La parole est à M. François Fortassin, sur l'article.

M. François Fortassin. L’initiative de mon ami Pierre-Yves Collombat, que je tiens à féliciter, me permet d’évoquer les crues qui ont ravagé la vallée de la Garonne et la vallée des Gaves.

La montée des eaux liée à une fonte des neiges prématurée et à des températures très élevées a carrément arraché la roche-mère, à tel point que le village de Barèges ressemblait à certaines cités du Moyen-Orient après un bombardement. La route entre Barèges et Luz-Saint-Sauveur, longue de sept kilomètres, s’est littéralement effondrée sur quatre kilomètres. Comme ces vallées sont en cul-de-sac, les populations se sont retrouvées isolées du reste des Hautes-Pyrénées. Il a évidemment fallu panser les plaies rapidement. Madame la ministre, vous avez pu voir l’ampleur du désastre.

Mme Marylise Lebranchu, ministre. En effet !

M. François Fortassin. Les relations ont très vite été rétablies. Un certain nombre de travaux ont été faits sur le lit majeur, en s’affranchissant totalement d’un certain nombre de règles. C’est la preuve que la loi sur l’eau est parfaitement inadaptée face à ce type d’événements.

De la même manière, les travaux ont été réalisés sans passation de marché. Au lendemain de la catastrophe, le président du conseil général a réuni les entreprises, qui ont réagi spontanément en prévoyant un bordereau de prix rigoureusement identique. C’est ainsi que nous avons cheminé, ce qui a permis de régler un certain nombre de problèmes.

Que dire de ce service qui, depuis deux mois, est pratiquement absent sur le secteur, je veux parler de l’ONEMA, l’Office national de l’eau et des milieux aquatiques ? Voilà des gens bardés de certitudes, armés comme des shérifs américains et qui prennent les maires pour des délinquants,…

M. Jacques Mézard. Absolument !

M. François Fortassin. … au point de réclamer des peines de prison à leur encontre !

M. Yvon Collin. C’est vrai !

M. François Fortassin. Dans quelle République vit-on ?

M. Yvon Collin. Il a raison !

M. François Fortassin. Je crois qu’il faudrait profiter de l’occasion pour leur rappeler que, s’il y a des règles à respecter, trop c’est trop, si vous voulez bien me pardonner cette locution facile.

Nous ne pouvons pas accepter, nous qui sommes la représentation nationale, que des fonctionnaires interprètent les lois en fonction de leurs désirs. Je sais que, en disant cela, je ne vais pas me faire des amis au sein de ces services dans les Hautes-Pyrénées, mais cela ne me gêne pas. Je vous le dis très clairement, madame la ministre, si je les voyais disparaître, cela me gênerait encore moins.

M. Yvon Collin. Oh ! Oh !

M. François Fortassin. Nous continuerons bien entendu à réaliser des travaux sur les rivières pour tenter de régler le problème des crues.

Je dois dire que les services de l’État comme ceux du département, eux, ont été exemplaires. C’est grâce à eux, parce que les secours ont été conduits de manière remarquable, qu’il n’y a eu finalement que deux morts, même si c’est bien évidemment deux morts de trop. Vous le voyez, je ne suis pas négatif envers tous les services de l’État. (Applaudissements sur les travées du RDSE.)

M. le président. La parole est à Mme Virginie Klès, sur l’article.

Mme Virginie Klès. Je n’avais pas prévu d’intervenir, mais les propos de Mme Beaufils me poussent à prendre la parole.

Ma commune subit des inondations d’une ampleur limitée. Même s’il n’y a jamais eu de mort, elle enregistre des dégâts pratiquement tous les ans. Pour les personnes touchées, c’est toujours traumatisant.

Cela étant, connaissant les inondations à une échelle beaucoup plus importante pour avoir rencontré, avec le Haut Comité français pour la défense civile, un certain nombre de personnes s’occupant des inondations à Paris ou à New York, après le passage de l’ouragan Sandy, je peux dire que nous manquons cruellement en France d’une culture de la prévention du risque, tant dans les services de l’État et les services départementaux et communaux que chez nos concitoyens. C’est pourquoi je pense que plus on parlera de prévention, plus on provoquera une prise de conscience.

La prévention des risques en général, comme d’ailleurs la gestion des crises, nécessite un maillage, un partenariat, un véritable travail en réseau et une prise de conscience de la part des citoyens comme de tous les pouvoirs publics. Cependant, nous ne pourrons jamais réaliser d’un seul coup le travail parfait que souhaite Mme Beaufils. Il faut bien sûr l’avoir en point de mire, et, pour s’en rapprocher, il faut commencer le plus tôt possible. C’est pourquoi l’initiative de notre collègue Collombat est excellente. C’est marche après marche, pas après pas, que nous y parviendrons. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste, ainsi que sur certaines travées du RDSE. – M. Yves Pozzo di Borgo applaudit également.)

M. le président. Je suis saisi de deux amendements faisant l'objet d'une discussion commune.

L'amendement n° 1, présenté par M. Collombat, est ainsi libellé :

Rédiger ainsi cet article :

I. – Le code de l’environnement est ainsi modifié :

1° L’article L. 562-1 est ainsi modifié :

a) Le I est ainsi modifié :

« I. – L’État, les collectivités territoriales et les établissements publics de coopération intercommunale intéressés élaborent conjointement des plans de prévention des risques naturels prévisibles tels que les inondations, les mouvements de terrains, les avalanches, les incendies de forêt, les séismes, les éruptions volcaniques, les tempêtes ou les cyclones. Les établissements publics en charge de la prévention de l’inondation sont associés aux plans de prévention des risques d’inondation. Ces plans sont mis en application par l’État. » ;

b) Après le I, il est inséré un I bis ainsi rédigé :

« I bis. – Les plans de prévention des risques naturels prévisibles identifient la nature du risque naturel prévisible pour le territoire et fixent le niveau de risque contre lequel les dispositions du plan entendent protéger la population et les biens. Ils déterminent les travaux permettant de réduire le risque, dans quelle proportion et selon quelle probabilité.

« La population est associée aux processus d’identification, de détermination et de réduction du risque aussi précocement que possible. » ;

c) Le début du VII est ainsi rédigé :

« VII. – Des décrets en Conseil d’État définissent les modalités selon lesquelles l’État, les collectivités territoriales et les établissements publics de coopération internationale concernés élaborent conjointement les plans de prévention des risques naturels prévisibles, les règles relatives à la détermination des zonages, les modalités de qualification… (le reste sans changement) » ;

2° L’article L. 562-4-1 est complété par un III ainsi rédigé :

« III. – Lorsque, sans remettre en cause l’économie générale du plan, la révision a uniquement pour objet une modification limitée des zones ou des prescriptions qui leur correspondent, lorsque la réalisation des équipements prévus au I bis de l’article L. 562-1 du code de l’environnement et la mise en place d’une politique de sensibilisation de la population au risque inondation le justifient, elle peut être effectuée selon la procédure simplifiée prévue à l’alinéa précédent. »

II. – Dans un délai d’un an après l’approbation du dernier des deux plans, le plan de prévention du risque d’inondation et le plan local d’urbanisme de la commune ou de l’établissement public de coopération intercommunale compétent sont mis en conformité.

La parole est à M. Pierre-Yves Collombat.

M. Pierre-Yves Collombat. Je crois que tout le monde est d’accord pour dire qu’il faut changer la façon de concevoir les PPRI si l’on veut en faire de vrais outils de prévention permettant que les territoires puissent être habités en sécurité.

Je veux insister sur trois points.

Premièrement, le fait que l’État, les collectivités territoriales et les établissements publics de coopération intercommunale intéressés élaborent « conjointement » des plans de prévention des risques naturels prévisibles signifie qu’un échange d’informations doit avoir lieu, en particulier sur la façon de déterminer les risques, à rebours de la situation actuelle, où les services de l’État tiennent leurs renseignements de bureaux d’études qui ont été missionnés et qui anticipent pratiquement partout des crues de deux mètres. C’est ce qu’ils ont fait chez moi où, comme je leur ai fait observer, ce n’est pas le Danube qui passe, mais un simple ru ! J’ignore où ils prennent leurs modèles et comment ils les font, sans doute sur le gabarit des fleuves. On retrouve le même problème avec les PPRIF, les plans de prévention des risques d’incendies de forêt.

Évidemment, s’il y a un risque sérieux que la crue atteigne deux mètres, on ne va pas rendre le terrain constructible. Le problème c’est que, très souvent, ce qu’on nous dit ne correspond à rien, et il faut se battre comme des chiffonniers pour arriver à faire changer d’avis l’administration. Je le répète, on est face à cette absurdité : on marchande des risques contre des droits à construire. Cela n’a rigoureusement aucun sens !

Quant à l’idée qu’on proposerait un transfert de responsabilité aux communes, elle est fausse. Le préfet publie l’arrêté et les modalités de concertation sont établies par un décret en Conseil d’État. L’État conserve donc la suprématie en la matière, mais nous voulons avoir la possibilité de discuter des outils.

Deuxièmement, une fois que les aménagements ont été réalisés, nous voulons pouvoir faire évoluer facilement le PPRI. Cela ne veut pas dire qu’on construira des maisons dans des zones où il y aura deux ou trois mètres d’eau si la digue s’effondre, mais quand la crue ne dépasse pas cinquante centimètres, on peut peut-être faire un certain nombre de choses. D’où l’idée, assez répulsive, mais qu’on retrouve aux Pays-Bas, qui consiste à préciser contre quel type de risques on veut se prémunir. Aujourd’hui, c’est simple, on veut une protection absolue et pas simplement contre la crue centennale, mais aussi contre celle qui aura lieu dans mille ans, dans deux mille ans, dans trois mille ans…

Dans le même temps, on essaie de déterminer quels seraient les travaux et les politiques nécessaires, parce que l’implication de la population – on le verra tout à l’heure avec le problème des réserves communales de sécurité – est essentielle.

Je vous conseille d’aller visiter Sommières.

Mme Marie-France Beaufils. J’y suis allée !

M. Pierre-Yves Collombat. D’abord, parce que c’est très beau. Ensuite, parce que la ville est établie depuis le Moyen Âge dans le lit majeur du fleuve, le Vidourle.

M. Pierre-Yves Collombat. Ce n’est pas un petit ruisseau paisible, croyez-moi, et ses crues, les « vidourlades », sont redoutées. Sur la place du marché, certains repères des crues atteignent jusqu’à sept mètres ; pour autant, les gens continuent à y vivre ! Certes, on y a mis les moyens, avec de véritables plans de prévention.

Nous voulons changer complètement de logique, en passant de la protection pure et simple – il est illusoire de croire qu’il suffit d’élaborer des plans d’urbanisme pour tout régler – à un dispositif qui, naturellement, assurera toujours la protection, mais qui permettra aux populations d’habiter les zones concernées. Pour cela, il faut bien sûr y mettre les moyens.

Troisièmement, si le PPRI s’impose au PLU, il faut parfois du temps pour les mettre en conformité. L’amendement vise donc à fixer à un an après l’approbation du dernier des deux plans le délai pour la mise en conformité. Tout le monde réclame cette mesure. Cela simplifierait les choses : les personnes qui voudront construire sauront au moins à quelles conditions elles pourront ou non le faire.

M. Jacques Mézard. Très bien !

M. le président. L'amendement n° 2, présenté par M. Collombat, est ainsi libellé :

Compléter cet article par trois alinéas ainsi rédigés :

3° – L’article L. 562-4-1 est complété par un paragraphe ainsi rédigé :

« III. – Lorsque, sans remettre en cause l’économie générale du plan, la révision a uniquement pour objet une modification limitée des zones ou des prescriptions qui leur correspondent, lorsque la réalisation des mesures prévues au 4° du II de l’article L. 562-1 du code de l’environnement et la mise en place d’une politique de sensibilisation de la population au risque inondation le justifient, elle peut être effectuée selon la procédure simplifiée prévue à l’alinéa précédent. »

... – Dans un délai d’un an après l’approbation du dernier des deux plans, le plan de prévention du risque d’inondation et le plan local d’urbanisme de la commune ou de l’établissement public de coopération intercommunale compétent sont mis en conformité.

La parole est à M. Pierre-Yves Collombat.

M. Pierre-Yves Collombat. Il est défendu.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Louis Nègre, rapporteur. Notre collègue Pierre-Yves Collombat vient de défendre ses amendements de façon remarquable, ce qui lui ressemble bien.

M. Pierre-Yves Collombat. Ça commence mal !

M. Louis Nègre, rapporteur. Plongé dans l’eau, le texte lyophilisé prend une autre allure… (Sourires.) Néanmoins, cher collègue, pour avoir travaillé ensemble l’année dernière sur le rapport d’information sénatorial, l’argument principal que je vous opposerai, en dehors de celui de la commission, que je vais bien sûr rappeler, c’est que nous appelions tous deux, page 264 du rapport, à une plus grande participation des élus locaux à la décision finale pour améliorer l’élaboration des PPRI.

Par rapport à ce que vous avez dit, il y a donc un hiatus. Nous avons bien compris votre démarche, mais élaborer conjointement les plans soulèverait de sérieux problèmes en termes de responsabilité pénale des élus. Or, nous le savons, ce n’est pas ce que vous recherchez. Voilà pourquoi en commission un amendement visant à réécrire l’article a été adopté, à l’unanimité si ma mémoire est bonne. Nous avons en effet jugé préférable de préciser à l’article L. 562-3 du code de l’environnement que les collectivités territoriales sont associées à l’élaboration des plans avant leur prescription et à chaque étape de leur élaboration.

Nous mettons en place une véritable procédure. Nous ne nous payons pas de mots : c’est bien à chaque étape de l’élaboration du plan que les collectivités seront associées. Je pense que cette mesure répond entièrement à votre volonté, sans engager la responsabilité pénale des élus.

Vous proposez également d’associer la population « aux processus d’identification, de détermination et de réduction du risque aussi précocement que possible ». Sur ce point aussi, la commission est parvenue à une solution plus équilibrée que la vôtre, en prévoyant que la « population concernée est informée et consultée sur le projet de plan de prévention des risques naturels prévisibles », conformément, du reste, à une recommandation du rapport d’information.

J’en viens à la mesure visant à faciliter la révision et la modification des PPRN.

Notre collègue Fortassin a fort bien expliqué qu’en cas d’urgence absolue il fallait pouvoir prendre des mesures. C’est ce que vous souhaitez également, comme nous tous. Vous proposez donc d’ajouter – et c’est ce point que nous n’avons pas réussi à comprendre – des critères supplémentaires par rapport au droit en vigueur. Pour pouvoir recourir à la procédure simplifiée de révision, il ne suffira plus de ne pas remettre en cause l’économie générale du plan, il faudra en outre que la révision proposée ait uniquement pour objet une modification limitée des zones ou des prescriptions qui leur correspondent, ou encore que la mise en place d’une politique de sensibilisation de la population au risque d’inondation puisse justifier le recours à la procédure simplifiée.

Pourquoi aller au-delà du droit actuel, qui nous permet d’ores et déjà d’intervenir pour réviser un PPRN ? Je vous suggère d’en rester à la solution préconisée par la commission, car nous ne souhaitons pas ajouter des critères supplémentaires qui rendraient la révision encore plus difficile.

Pour toutes ces raisons, la commission vous invite à retirer vos deux amendements ; à défaut, l’avis sera défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Marylise Lebranchu, ministre de la réforme de l'État, de la décentralisation et de la fonction publique. Je remercie à mon tour M. Collombat et M. le rapporteur du travail qui a été accompli et de l’avancée qu’on leur doit, ainsi qu’à tous leurs collègues. Il est vrai que sur ces sujets nous faisons bouger les choses.

Il a été fort justement rappelé que la stratégie nationale est en cours d’élaboration et que le principe d’une collaboration entre l’État et les collectivités est absolument indispensable. Il me semble que M. Collombat dit vrai quand il fait état de la nécessité absolue d’associer – je dis bien d’associer – les collectivités territoriales à l’élaboration du plan. L’État peut faire appel à des experts. Les collectivités, si elles avaient la pleine responsabilité du plan, feraient de même. Mais il m’est difficile d’imaginer que même un groupe de collectivités puisse disposer de suffisamment d’experts en son sein pour émettre un avis sur les critères scientifiques, techniques, géologiques, etc.

Il m’a semblé que M. Collombat, en défendant ses amendements, voulait mettre l’accent sur la façon dont il fallait tenir compte, au sens juridique du terme, des recommandations des experts en matière de risques. Je ne suis pas totalement certaine que l’article 7, tel qu’il est rédigé par la commission, soit suffisant de ce point de vue. Je le pense profondément. Il faudrait réfléchir à une solution dans le cadre de la stratégie nationale et à partir des propositions de M. Collombat. En revanche, rejoignant les propos du rapporteur sur la responsabilité pénale du décisionnaire, je suis dans l’incapacité de proposer une autre rédaction de l’article.

Monsieur Collombat, il serait préférable pour nous tous que vous acceptiez de retirer ces amendements. En échange de quoi, je prends l’engagement, au nom de mes collègues du Gouvernement, parce que je ne suis pas seule responsable sur ces sujets, de voir si, au cours du cheminement du texte, en évitant le terme « conjointement » pour les questions de responsabilité pénale que le rapporteur a évoquées, on ne peut pas faire mieux que la rédaction actuelle de la proposition de loi.

M. Louis Nègre, rapporteur. Oui !

Mme Marylise Lebranchu, ministre. Il me semble que l’on peut s’engager à essayer de faire mieux. À l’heure où je vous parle, je me donne une obligation de moyens, pas forcément une obligation de résultat.

Il faudra assurément se montrer extrêmement prudent sur la façon de rédiger l’article. En particulier, j’entends bien l’argument avancé selon lequel les travaux réalisés à tel endroit de notre territoire pour protéger d’un risque ne modifient pas automatiquement le plan de prévention tel qu’il est prévu. C’est une question de bon sens, même si je n’aime pas cette expression, qui n’est assise sur rien.

Quoi qu’il en soit, on sent que vous parlez d’expérience. Il manque effectivement quelque chose. Un plan est écrit, des préconisations sont faites : une fois les travaux réalisés, quel est le devenir du plan tel qu’il a été élaboré avant les travaux ? J’entends aussi cette question.

Le seul engagement que je me sens capable de prendre est de faire cheminer ce texte et d’expertiser la proposition de M. Collombat, pour améliorer l’article.

J’ai pris un peu de temps, monsieur le président, pour exprimer l’avis du Gouvernement, mais il est important que je puisse apporter une réponse à l’ensemble des sentiments qui s’expriment sur les travées du Sénat. Il est vrai que les collectivités territoriales, cela a été rappelé cet après-midi au cours d’une réunion bien connue, ont manifesté une forme d’agacement en ce qui concerne certaines prescriptions. Par exemple, quand un PPRI absolument nécessaire n’est pas élaboré dans les délais et qu’entre-temps des actions sont engagées qui rendent le plan inopérant. Cette remarque nous a été faite.

M. Charles Revet. De nombreuses procédures s’additionnent et retardent la réalisation des projets !

Mme Marylise Lebranchu, ministre. J’ai dit dans cet hémicycle, il n’y a pas très longtemps, qu’il me semblait possible de réduire le nombre des documents d’urbanisme, mais en les rendant plus précis et en faisant en sorte qu’une fois élaborés ils soient révisables différemment. Nous voyons que des tas de questions se posent.

Je veux dire au sénateur Fortassin que je n’accepte pas que l’on montre du doigt les agents qui, ici ou là, auraient fait excès de zèle.

M. Charles Revet. Cela arrive quelquefois !

Mme Marylise Lebranchu, ministre. Ils appliquent des règles qu’on leur demande de mettre en œuvre et qui, parfois, sont nées d’amendements parlementaires et pas seulement de textes du Gouvernement ! Je pense à la loi sur l’eau, par exemple.

M. Charles Revet. Oui, et aux lourdeurs de sa genèse !

Mme Marylise Lebranchu, ministre. Je me souviens de beaucoup d’amendements parlementaires qui, de bonne foi juridique et pragmatique, ont alourdi la barque. Il faut faire attention à tout.

J’ai été un peu longue, car cet article est sans doute le point le plus délicat ; j’interviendrai plus brièvement par la suite. En tout état de cause, il me semble que M. Collombat pourrait retirer ses amendements. La modification des PPRN est déjà inscrite dans le code, qui prévoit que la procédure simplifiée peut s’appliquer dès lors que les modifications envisagées ne remettent pas en cause l’économie générale du plan.

Si vous maintenez vos amendements, monsieur le sénateur, je serai obligée d’émettre un avis défavorable, non sur l’esprit, mais plutôt sur la lettre.

M. le président. La parole est à M. Pierre-Yves Collombat, pour explication de vote.

M. Pierre-Yves Collombat. Je suis sensible aux efforts consentis pour essayer de régler un vrai problème.

Dans les articles 35 B à 35 E du projet de loi de modernisation de l’action publique territoriale et d’affirmation des métropoles, hormis les problèmes de transfert ou autres, les points essentiels sont la compétence et le financement. C’est là qu’est la pierre d’achoppement, qui non seulement hérisse tout le monde mais provoque aussi un blocage. D’ailleurs, c’est ça qui est dramatique !

On demande aux élus d’élaborer des PPRI, mais ils ne sont pas fous. Ils savent qu’ils ne pourront plus rien faire. Ils réaliseront des investissements, mettront en place des politiques pour, au final, se développer encore moins qu’avant. Il faut donc lier le développement local à la protection.

J’accepte la rédaction proposée par le rapporteur pour le a) de l’article du code de l’environnement, qui est peut-être préférable pour des raisons métaphysiques qui m’échappent. En revanche, ce serait un plus que les plans de prévention des risques fixent le niveau de protection de la population et déterminent les travaux à réaliser.

M. Louis Nègre, rapporteur. Oui, ce serait un plus !

M. Pierre-Yves Collombat. Mon cher Louis Nègre, c’est ce que préconisait notre rapport.

Par ailleurs, on nous dit : « Mais vous pouvez le faire, c’est marqué. » Sauf qu’on ne le fait pas ! La précision « la mise en place d’une politique de sensibilisation de la population au risque inondation » n’est pas anodine. Cette problématique rejoint la question de la mobilisation de la population. Ce n’est pas seulement le problème des investissements, c’est aussi celui de l’acquisition d’une culture du risque, c’est un tout !

Si, au moment du PPRI, on envisage tous ces sujets, et pas seulement la question de savoir si on peut construire ou non et à quelle condition, on a une chance de faire adhérer la population à la transformation du territoire en faveur de davantage de sécurité. C’est le sens de cette proposition. Je n’ai aucun intérêt particulier à faire prévaloir telle rédaction plutôt que telle autre, mais ce point est vraiment essentiel.

M. le président. La parole est à M. le rapporteur.

M. Louis Nègre, rapporteur. J’ai entendu votre proposition, madame la ministre. Je note qu’elle émane de quelqu’un qui a visiblement été maire en son temps. Le débat de ce soir offre un bel exemple de l’intérêt du cumul des mandats : tous les intervenants qui ont fait référence à leur expérience de terrain et se sont appuyés sur elle pour asseoir leurs propositions sont des maires !

M. Louis Nègre, rapporteur. Le jour où ces maires, qui sont directement concernés, ne siégeront plus sur ces travées, nous ne pourrons plus bénéficier de la même expertise.

M. Jacques Mézard. Exactement !

M. Louis Nègre, rapporteur. Nous ne faisons qu’évoquer dans cet hémicycle une difficulté dont nos collègues se plaignent sur le terrain : ils sont exclus de l’élaboration des PPRI et ne les découvrent qu’à la fin, ne sachant pas très bien comment ils ont été décidés. La plupart du temps, le résultat les laisse insatisfaits.

Le Gouvernement demande le retrait de l’amendement. Je ne sais pas si Pierre-Yves Collombat répondra positivement à cette sollicitation. Pour ma part, j’y mettrai une condition. Certes, le Gouvernement s’engage devant nous de manière formelle. J’ai donc confiance. Simplement, madame la ministre, si vous me le permettez, je poserai comme condition le temps de la navette. Dans la mesure où il y aura deux lectures, cela laisse un peu de temps pour améliorer la rédaction du texte, mais ne reportons pas sine die la décision.

M. le président. Monsieur Collombat, les amendements nos 1 et 2 sont-ils maintenus ?

M. Pierre-Yves Collombat. Je les maintiens. On pourra toujours les modifier par la suite, mais, en attendant, ils seront là comme une mauvaise conscience.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 1.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 2.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'article 7.

(L'article 7 est adopté.)

Article 7
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Articles additionnels après l'article 8

Article 8

I. – L’article L. 213-8 du code de l’environnement est ainsi modifié :

1° Au 1°, le pourcentage : « 40 % » est remplacé par le pourcentage : « 50 % » ;

2° Au 2°, après les mots : « de la pêche », sont insérés les mots : « , des associations de victimes des inondations » ;

3° Au 3°, le pourcentage : « 20 % » est remplacé par le pourcentage : « 10 % ».

II. – L’article L. 213-8-1 du même code est ainsi modifié :

1° Au début du 2°, il est inséré le mot : « Majoritairement » ;

2° Au huitième alinéa, la référence : « 2°, » est supprimée.

M. le président. L'amendement n° 11, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :

Supprimer cet article.

La parole est à Mme la ministre.

Mme Marylise Lebranchu, ministre. Je l’ai dit à M. Collombat tout à l’heure, la question de la gouvernance de la gestion de l’eau et des milieux aquatiques est un sujet qui doit être étudié dans sa globalité.

Vous le savez, un travail est en cours. Je salue d’ailleurs les sénateurs Henri Tandonnet et Michel Doublet, qui sont à l’origine de nombreuses propositions. Il serait très délicat pour un gouvernement d’accepter d’y mettre un terme – j’espère que vous entendrez cet argument – si cet article était adopté. Cela signifierait que la démarche engagée a été inutile et que c’est ce soir que l’on décide de tout.

Le Gouvernement se doit de respecter la parole qu’il a donnée à l’ensemble des acteurs – collectivités territoriales, associations – qui œuvrent au sein du Comité national de l’eau. Il serait très embêtant de clore leur discussion. Cet article ne pouvant être retiré, je propose donc de le supprimer.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Louis Nègre, rapporteur. Madame la ministre, j’ai bien compris votre raisonnement, mais je n’y souscris pas, car la proposition de M. Collombat constitue une décision politique au sens noble du terme.

Le Sénat représente les territoires. Or les élus locaux, qui vont désormais avoir la compétence, seront les payeurs et les décideurs. Dans ces conditions, que propose Pierre-Yves Collombat ? Il propose tout simplement que la part des élus passe de 40 % à 50 %. C’est bien le moins ! Alors qu’ils auront la compétence, paieront, décideront, ils n’auraient même pas la moitié des sièges ?

La commission qui va se pencher sur cette question devra prendre acte, me semble-t-il, de cette nécessité. Si elle veut accorder davantage que 50 % des sièges aux élus locaux, nous en sommes tout à fait d’accord. En tout cas, je ne peux pas imaginer un seul instant qu’on puisse leur en attribuer moins. L’avis est donc défavorable.

Mme Marylise Lebranchu, ministre. Il n’y a pas de surprise, je le savais !

M. le président. La parole est à M. André Vairetto, pour explication de vote.

M. André Vairetto. Comme je l’ai déjà indiqué dans la discussion générale, le groupe socialiste avait déposé un amendement visant à supprimer l’article 8.

M. Charles Revet. Habilement retiré !

M. André Vairetto. Nous ne sommes pas opposés au renforcement de la présence des élus dans les instances des agences de l’eau et des comités de bassin, mais nous considérons que la réflexion qui est engagée doit aboutir.

Je rappelle que la commission avait émis un avis favorable sur l’amendement que nous avons retiré avant la séance publique.

M. le président. La parole est à M. Pierre-Yves Collombat, pour explication de vote.

M. Pierre-Yves Collombat. C’est bien parti… Si les choses continuent ainsi, il ne restera plus rien du tout dans cette proposition de loi. Vous pourrez donc la voter à l’unanimité sans état d’âme.

Pourtant, on nous dit qu’il y a urgence, que des drames, des catastrophes se préparent, puis qu’il faut attendre, qu’il y a l’article 12 B ou 34 C, la concertation qui est lancée, qu’il ne faut pas paniquer… Comme vous voulez !

Ce qu’a dit Mme la ministre est exact, il y a probablement quelque chose à faire. Mais je constate quand même que la part des élus est réduite à la portion congrue partout alors qu’on les charge de plus en plus,…

M. Charles Revet. En effet !

M. Pierre-Yves Collombat. … et même des rythmes scolaires !

Il faudrait donc savoir ce qu’on veut. Essaie-t-on de faire avancer les choses ou, au contraire, cherche-t-on à multiplier toutes les raisons de ne pas agir, au prétexte qu’il faut se concerter et attendre parce qu’on ne sait jamais ?

M. Jacques Mézard. Il y a des hauts conseils à créer… (Sourires.)

M. Pierre-Yves Collombat. Chers collègues, on en reparlera à la prochaine catastrophe !

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 11.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'article 8.

(L'article 8 est adopté.)

Article 8
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Article 9

Articles additionnels après l'article 8

M. le président. L'amendement n° 7, présenté par Mme Lipietz, M. Dantec et les membres du groupe écologiste, est ainsi libellé :

Après l’article 8

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

À la dernière phrase de l’article L. 110 du code de l’urbanisme après les mots : « Leur action en matière d'urbanisme contribue » sont insérés les mots « à la prévention des inondations, ».

La parole est à Mme Hélène Lipietz.

Mme Hélène Lipietz. Cet amendement vise à substituer la culture de la prévention à la culture du risque. Il précise, en complétant l’article L. 110 du code de l’urbanisme, qui est le premier article de ce code, que les actions des collectivités locales en matière d’urbanisme contribuent à la prévention des inondations.

Rappeler que la culture de la prévention des inondations relève des collectivités territoriales apparaît comme un premier pas.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Louis Nègre, rapporteur. L’article L. 110 du code de l’urbanisme fixe les règles générales d’utilisation du sol. Sa dernière phrase prévoit que l’action des collectivités publiques en matière d’urbanisme « contribue à la lutte contre le changement climatique et à l’adaptation à ce changement ».

Cet amendement vise à compléter cette phrase en indiquant que l’action des collectivités doit aussi contribuer à la prévention des inondations. Il s’agit là d’une disposition opportune : les politiques d’urbanisme doivent être guidées par le souci de la prévention des inondations. La commission a donc émis un avis favorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Marylise Lebranchu, ministre. Favorable.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 7.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans la proposition de loi, après l'article 8.

L'amendement n° 8, présenté par Mme Lipietz, M. Dantec et les membres du groupe écologiste, est ainsi libellé :

Après l’article 8

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Après le deuxième alinéa de l’article L. 111-6-1 du code l’urbanisme, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« Les surfaces affectées aux aires de stationnement sont couvertes d’un revêtement perméable. »

La parole est à Mme Hélène Lipietz.

Mme Hélène Lipietz. Cet amendement vise à réduire l’imperméabilisation de notre territoire, notamment les aires de stationnement. Celles-ci prennent de plus en plus de place, grignotent nos cultures, empiètent sur nos terres agricoles, comme c’est notamment le cas en Seine-et-Marne. De surcroît, en l’absence de réglementation, elles empêchent la pénétration des eaux de pluie dans le sol, ce qui cause de véritables problèmes. D’ailleurs, dans leur rapport sur les inondations dans le Var, MM. Collombat et Nègre évoquent le risque de ruissellement urbain auquel contribuent ces aires de stationnement.

C’est pourquoi je propose que les surfaces affectées aux aires de stationnement soient couvertes d’un revêtement perméable. Cette disposition aura certes un coût mais dans la mesure où cet amendement concerne la surface maximale des aires de stationnement des commerces et des cinémas, ce coût sera à la charge de ces entreprises et ne pèsera pas sur les collectivités territoriales.

Lutter contre l’imperméabilisation des sols est aussi un facteur de prévention des inondations.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Louis Nègre, rapporteur. Cet amendement vise à imposer que toutes les surfaces affectées aux aires de stationnement soient couvertes d’un revêtement perméable.

Je comprends l’objectif d’une telle mesure, qui vise à lutter contre le ruissellement urbain dont on sait qu’il contribue à une saturation rapide du réseau d’évacuation des eaux. Toutefois, le dispositif proposé n’est pas satisfaisant : aucune réflexion préalable sur le coût d’une telle obligation – vous avez vous-même, madame Lipietz, parlé d’un surcoût non négligeable – qui serait probablement important pour les entreprises, surtout dans une période difficile, ou sur le délai d’entrée en vigueur de cette mesure n’a été menée.

En conséquence, la commission ne peut qu’être défavorable à votre amendement, même si le problème que vous soulevez est réel.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Marylise Lebranchu, ministre. Le Gouvernement, au cours de la discussion de la loi pour l’accès au logement et un urbanisme rénové, dite « loi ALUR », avait déjà émis un avis défavorable sur cet amendement. Vous comprendrez donc que son avis reste inchangé.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 8.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. L'amendement n° 9, présenté par Mme Lipietz, M. Dantec et les membres du groupe écologiste, est ainsi libellé :

Après l'article 8

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

L’article L. 111-1 du code de la voirie routière est ainsi modifié :

1° Le deuxième alinéa est complété par les mots : « notamment en matière d’écoulement naturel des eaux de pluie » ;

2° La première phrase du troisième alinéa est complétée par les mots : « notamment en matière d’écoulement naturel des eaux de pluie ».

La parole est à Mme Hélène Lipietz.

Mme Hélène Lipietz. Cet amendement vise à modifier le code de la voirie routière, afin que les collectivités engagent une réflexion. Il n’en résultera, à ce stade, aucun coût puisqu’il s’agit uniquement, au travers de la modification de l’article L. 111–1 du code de la voirie routière, de changer les modalités de réflexion en matière d’écoulement naturel des eaux de pluie. L’idée qui sous-tend cet amendement est la même que dans l’amendement n° 7, qui a été précédemment adopté.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Louis Nègre, rapporteur. Cet amendement vise à préciser que l’État et les collectivités doivent veiller à la diffusion, à la recherche et à la mise en œuvre de dispositifs d’écoulement naturel des eaux, là encore pour limiter le ruissellement.

Il serait intéressant de connaître la position du Gouvernement sur la portée normative concrète d’un tel amendement. Toutefois, dans la mesure où nous en partageons l’objectif, la commission y est favorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Marylise Lebranchu, ministre. L’objet de cet amendement est intéressant. Toutefois, il risque de complexifier le droit existant. Même s’il n’est malheureusement pas suffisamment respecté, le droit de l’urbanisme prévoit depuis longtemps, pour chaque construction, des dispositions concernant les eaux pluviales : faut-il ou non détourner le ruissellement, vers où doit-on le réorienter, etc. ?

Je le répète, votre amendement, madame la sénatrice, aboutirait à complexifier le droit en vigueur, qui n’a peut-être pas été assez souvent respecté, en particulier sur des opérations d’urbanisme importantes où on a oublié de vérifier l’existence du plan de ruissellement des eaux pluviales, pourtant obligatoire.

L’objectif que vous visez est donc d’ores et déjà satisfait. J’ajoute qu’il serait intéressant que tout le monde satisfasse au droit.

M. le président. La parole est à M. Pierre-Yves Collombat, pour explication de vote.

M. Pierre-Yves Collombat. Si j’ai bien compris, il s’agit simplement d’intégrer dans la réflexion de l’État et des collectivités territoriales qui ont la responsabilité des routes, le problème du ruissellement. Il n’y a aucun impératif pratique. Cela ne me paraît pas une mauvaise idée.

La principale critique que l’on pourrait faire à cet amendement, c’est de ne former qu’un vœu pieux. Mais on ne peut le rejeter au motif que le droit existant prévoit déjà une telle disposition, qui joue pour toutes les constructions. Il me semble qu’en matière de réfection et d’entretien des routes, que celles-ci relèvent de l’État – il n’y en a pas beaucoup – ou des départements, ce n’est pas une mauvaise idée.

Personnellement, je voterai cet amendement.

M. le président. La parole est à Mme la ministre.

Mme Marylise Lebranchu, ministre. Comme je l’ai déjà dit, au détour des amendements, on complexifie, on crée de la norme, on rend les choses beaucoup plus difficiles.

Mme Marylise Lebranchu, ministre. Plusieurs dispositions du code de l’environnement permettent la gestion globale des eaux pluviales sur les plans qualitatif et quantitatif. En particulier, tout projet de voirie est soumis au régime de la loi sur l’eau et doit dès lors répondre aux objectifs de la bonne gestion des eaux pluviales. Tel est le droit en vigueur.

M. Pierre-Yves Collombat. Ce droit est inapplicable !

Mme Marylise Lebranchu, ministre. Monsieur Collombat, vous nous dites que cet amendement est un vœu pieux et que, pour cette raison, vous allez le voter. Je vous réponds que, si vous le votez, ce vœu pieux deviendra du droit.

M. Charles Revet. Tout à fait !

Mme Marylise Lebranchu, ministre. Vous ajouterez donc de la norme à la norme.

M. le président. La parole est à M. le rapporteur.

M. Louis Nègre, rapporteur. J’ai été convaincu par l’explication de texte de Mme la ministre.

La démarche de Mme Lipietz figurera dans nos débats parlementaires. Nous pourrons donc l’approfondir, demander à aller plus loin si nécessaire. Si, à l’avenir, le juge a besoin de renseignements complémentaires, il pourra également se reporter à nos travaux.

Nous avons bien compris quelle était la démarche poursuivie. Nous voulons bien essayer de ne pas oublier cette disposition, mais, puisqu’elle figure déjà dans notre droit, évitons de surcharger les textes ! Nous nous plaignons déjà suffisamment du millefeuille normatif.

M. le président. La parole est à M. Charles Revet, pour explication de vote.

M. Charles Revet. Nous nous plaignons tous des lourdeurs et du surcroît de normes. Pourtant, nous finissons toujours par ajouter de nouvelles dispositions, au motif qu’elles peuvent être utiles. Or leur interprétation aboutit parfois à créer des obligations supplémentaires pour les collectivités.

Il suffit quelquefois d’un simple bassin de stockage de l’eau pour prévenir une inondation. Mais avec la loi sur l’eau et toutes les autres normes, cela prend trois à cinq ans pour régler le problème.

À la première inondation, les personnes qui ont les pieds dans l’eau vous accueillent comme un sauveur. La deuxième fois, ils commencent à vous regarder de travers. Au bout de trois ou quatre ans, ils se demandent ce que vous venez faire, car ils vous considèrent comme un bon à rien…

À force d’ajouter des normes, on finit par compliquer les choses, alors que nous souhaitons simplifier. Nous devons être raisonnables. Je ne voterai donc pas cet amendement.

M. le président. La parole est à M. Yves Pozzo di Borgo, pour explication de vote.

M. Yves Pozzo di Borgo. Nous sommes moins confrontés à ce problème à Paris, où il est plutôt bien géré.

J’ai écouté avec grande attention Mme la ministre, que je ne connaissais pas. Ses propos me semblent empreints d’une grande sagesse. Si j’ai bien compris, cet amendement tend à insérer une disposition sur l’écoulement des eaux pluviales, alors qu’il existe dans un autre code une disposition similaire qui n’est pas vraiment appliquée.

Pourquoi ajouter une disposition qui ne fera qu’alourdir les choses ? Peut-être par volonté pédagogique ?

M. Yvon Collin. Cela deviendrait obligatoire !

M. Yves Pozzo di Borgo. Il m’arrive de quitter Paris. (Sourires.) Je me rends bien compte que cette question est importante et sensible, notamment pour les maires ruraux.

Puisque la disposition n’est pas appliquée, alors même qu’elle figure déjà dans un texte, il n’est peut-être pas inutile de l’inscrire à nouveau. Je voterai donc cet amendement.

M. le président. La parole est à M. Jean-Jacques Filleul, pour explication de vote.

M. Jean-Jacques Filleul. La commission du développement durable a longuement débattu de cette idée, qui est intéressante. Néanmoins, elle n’a pas voulu rajouter une norme supplémentaire. Elle a donc émis un avis de sagesse, en attendant de connaître l’avis du Gouvernement.

Mme la ministre ayant émis un avis défavorable sur cet amendement, le groupe socialiste ne le votera pas.

M. le président. La parole est à Mme Hélène Lipietz, pour explication de vote.

Mme Hélène Lipietz. Mes chers collègues, je voudrais essayer de vous convaincre.

On ne peut pas dire, comme c'est le cas depuis le début de la discussion, que nous sommes favorables à la prévention si, dès qu’on met en avant un élément de prévention qui ne mange pas de pain, on nous rétorque qu’il s’agit d’une norme supplémentaire. Mais ce n’est pas de cela qu’il est question !

Aux termes de l’article L. 111-1 du code de la voirie routière, « l’État veille à la cohérence et à l’efficacité du réseau routier dans son ensemble ; il veille en particulier à la sécurité, » – alors que le rôle de l’État est de veiller à la sécurité, vous avez estimé que cette formulation n’était pas redondante, et vous l’avez laissée – « à la cohérence de l’exploitation et de l’information des usagers, à la connaissance statistique des réseaux et des trafics ainsi qu’au maintien, au développement et à la diffusion des règles de l’art ». Par mon amendement, je demande simplement que cet alinéa soit complété par la formulation : « notamment en matière d’écoulement naturel des eaux de pluie ».

Il arrive que des zones soient touchées trois ou quatre années de suite par des inondations. Cela signifie donc que les règles de l’art, notamment en matière d’écoulement naturel des eaux de pluie, n’ont pas été respectées.

M. Charles Revet. À cause des lourdeurs administratives !

Mme Hélène Lipietz. Je propose d’insérer la même précision dans le troisième alinéa de cet article, aux termes duquel « sur les réseaux relevant de leur compétence, les collectivités territoriales et leurs groupements définissent conjointement avec l’État les programmes de recherche et de développement des savoir-faire techniques ».

Ce n’est donc pas une nouvelle norme qui s’impose aux collectivités. Le jour où les programmes de recherche et de développement techniques, notamment en matière d’écoulement naturel des eaux de pluie, seront au point, nous pourrons alors envisager d’avoir de nouvelles normes. En attendant, mon amendement n’en crée aucune.

J’ajoute qu’il faut très certainement revoir, ce que l’adoption de mon amendement permettrait, la formation des ingénieurs des ponts et chaussées – j’en connais quelques-uns personnellement – et des techniciens des routes, pour qu’ils acquièrent cet automatisme de prévention.

M. le président. La parole est à Mme la ministre.

Mme Marylise Lebranchu, ministre. Je vous renvoie à l’article R. 214-3 du code de l’environnement, à la rubrique « eaux pluviales ». Cette disposition existe bien !

Je vous rappelle qu’un certain nombre de grandes surfaces commerciales ont d’ailleurs été obligées, après avoir imperméabilisé des surfaces pour créer des parkings, soit de refaire les travaux, soit de créer des bassins de rétention et d’épurer les eaux.

M. Louis Nègre, rapporteur. L’amendement est donc bien satisfait !

Mme Marylise Lebranchu, ministre. Cette disposition est d’application « bouillante », si vous me passez l’expression, pour certaines installations ne respectant pas les dispositions de l’article que je viens de mentionner s’agissant en particulier du ruissellement des eaux.

M. le président. La parole est à Mme Marie-France Beaufils, pour explication de vote.

Mme Marie-France Beaufils. Je suis étonnée d’entendre qu’il faudrait ajouter des dispositions législatives. Mieux vaudrait faire appliquer les textes existants. Nous devons d’ailleurs être vigilants sur ce point.

Je l’ai dit à l’époque de la mission d’information sur Xynthia, si les lois avaient été appliquées, les conséquences de la submersion marine n’auraient pas été aussi graves.

M. Charles Revet. C’est une certitude !

Mme Marie-France Beaufils. Ce n’est pas toujours en ajoutant des obligations qu’on règle le problème. Faisons en sorte que l’appropriation des textes par les élus qui sont sur le terrain soit bien plus large que ce n’est le cas aujourd’hui !

Je partage les propos de Virginie Klès. Je me bats aussi pour que la population s’approprie la réglementation. Avec notre association d’élus, nous avons fait cette année encore, comme tous les ans, un partage de connaissances sur ces sujets, car cela nous semble absolument indispensable. C'est notre rôle !

Certains textes sont enfouis, on ne les lit plus, et on finit par ajouter de nouvelles règles. Voilà pourquoi j’approuve les propos de Mme la ministre.

M. le président. La parole est à Mme Virginie Klès, pour explication de vote.

Mme Virginie Klès. Je voudrais appuyer les propos de Mme Beaufils. Il faut bien avoir conscience que si l’on vote cet amendement, les mêmes dispositions pourront exister dans deux codes, sous des formes différentes, et être appliquées différemment.

Lorsqu’on voudra les modifier, il faudra se rappeler qu’elles figurent dans les deux codes, avec des rédactions distinctes. On risque d’être confronté, à la longue, à des interprétations contradictoires de ces deux textes, qui finiraient par devenir totalement inapplicables.

M. Charles Revet. Ça arrive souvent !

Mme Virginie Klès. Il est inutilement complexe, et même dangereux, d’écrire la même chose dans deux codes. Puisque la disposition existe déjà, il faut s’en tenir là.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 9.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Mes chers collègues, je vous rappelle que les propositions de loi présentées respectivement par M. Pierre-Yves Collombat et M. Jacques Mézard ont été inscrites par la conférence des présidents à l’ordre du jour de notre assemblée pour une durée totale de quatre heures. Je serai donc contraint de lever la séance à minuit trente.

Si l’examen de l’une de ces propositions de loi n’est pas achevé d’ici à la fin de la séance, il reviendra à une prochaine conférence des présidents de l’inscrire à l’ordre du jour de nos travaux.

CHAPITRE II

Dispositions relatives à la gestion de la crise, à la réhabilitation et à l’indemnisation

Articles additionnels après l'article 8
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Article 10

Article 9

La troisième phrase de l’article L. 742-2 du code de la sécurité intérieure est remplacée par trois phrases ainsi rédigées :

« Il assure la direction des opérations de secours en contact régulier avec les maires des communes intéressées, si les moyens de communication le permettent. Les maires sont tenus régulièrement informés de l’évolution de la situation. Ils sont obligatoirement membres des cellules de crise quand leurs communes sont directement concernées et que lesdites cellules sont constituées. » – (Adopté.)

Article 9
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Article 11

Article 10

L’article L. 724-1 du code de la sécurité intérieure est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Elles peuvent participer à des actions au-delà des limites de leur commune dès lors que les maires des communes concernées par l’intervention ont donné leur accord écrit. »

M. le président. L'amendement n° 3, présenté par M. Collombat, est ainsi libellé :

Rédiger ainsi cet article :

L’article L. 724-1 du code de la sécurité intérieure est ainsi rédigé :

« Art. L. 724-1. – Les réserves communales de sécurité civile concourent avec les services en charge de la sécurité civile au soutien et à l'assistance des populations, à l'appui logistique, au rétablissement des activités ainsi qu’à la préparation de celles-ci face aux risques.

« Elles peuvent participer à des actions au-delà des limites de leur commune dès lors que les maires des communes concernées par l’intervention ont donné leur accord écrit. »

La parole est à M. Pierre-Yves Collombat.

M. Pierre-Yves Collombat. Dans la rédaction actuelle du code de la sécurité intérieure, « les réserves communales de sécurité civile ont pour objet d'appuyer les services concourant à la sécurité civile ».

La nouvelle rédaction que je propose est conforme aux conclusions de notre rapport. Elle tend à assurer une meilleure implication des réserves de sécurité civile à la fois au moment de la crise et à titre préventif, comme relais avec les populations pour développer une culture du risque.

On l’a bien vu dans le Var, les services sont « préfecto-centrés ». Tout part du préfet, tout est organisé par lui. Mais lorsqu’il n’y a plus de communication, comme cela a été le cas en juin 2010 dans ce département, chacun doit se débrouiller dans son coin ! On était bien content d’avoir les comités communaux feux de forêts et les réserves communales de sécurité civile pour faire le travail et réconforter la population.

L’idée qui sous-tend mon amendement est d’associer davantage ces réserves communales. En revanche, je souhaite modifier la rédaction initiale de cet article de ma proposition de loi pour que, lorsqu’elles participent, ce qui est nouveau, à des actions au-delà des limites de leur commune, les maires donnent leur accord, qui pourrait d’ailleurs très bien ne pas être écrit. Dans ce cas, elles sont sous la responsabilité et la direction du préfet.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Louis Nègre, rapporteur. Monsieur le président, nous avons bien entendu votre appel. Le maître des temps nous a indiqué que la séance devait être levée à minuit trente, nous allons donc faire simple : la commission s’en remet à la sagesse du Sénat sur cet amendement, auquel, personnellement, je suis favorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Marylise Lebranchu, ministre. Le Gouvernement estime que la rédaction de l’article 10 telle qu’elle est issue des travaux de votre commission est satisfaisante. Il semble en effet préférable de conserver, comme l’a fait la commission, l’architecture actuelle de l’article L. 724-1 du code de la sécurité intérieure.

Par ailleurs, l’efficacité de la gestion de crise peut justifier de se passer d’un accord écrit.

Le Gouvernement demande donc le retrait de cet amendement ; à défaut, il y sera défavorable.

M. le président. Monsieur Collombat, l'amendement n° 3 est-il maintenu ?

M. Pierre-Yves Collombat. Le mot « écrit » relève effectivement d’une exigence quelque peu excessive. Mais on dit qu’il faut changer les choses, alors qu’en réalité on les maintient en l’état. Les préfets vont continuer à tout faire !

Actuellement, les réserves communales de sécurité civile sont chargées d’appuyer les services ; elles ne sont pas des acteurs à part entière du dispositif. Quand les services officiels sont absents en raison d’une catastrophe, elles doivent se débrouiller seules.

On s’obstine – nous le verrons également sur la question des assurances – à dire que la situation actuelle est satisfaisante. Gardons ! Conservons ! Nous disons, nous, que tout ne va pas bien. Si l’on arrive à mieux associer la population de manière préventive et au moment de la crise, via les réserves communales de sécurité civile, pourquoi s’en priver ? Parce qu’on a peur de ce qui va se passer ?

Non, tout ne marche pas très bien ! Non, les services ne sont pas extrêmement performants dans toutes les situations ! Dans ces conditions, je maintiens l’amendement. Cela dit, je le rectifie en supprimant le mot « écrit ».

M. le président. Je suis donc saisi d’un amendement n° 3 rectifié, présenté par M. Collombat, et ainsi libellé :

Rédiger ainsi cet article :

L’article L. 724-1 du code de la sécurité intérieure est ainsi rédigé :

« Art. L. 724-1. – Les réserves communales de sécurité civile concourent avec les services en charge de la sécurité civile au soutien et à l'assistance des populations, à l'appui logistique, au rétablissement des activités ainsi qu’à la préparation de celles-ci face aux risques.

« Elles peuvent participer à des actions au-delà des limites de leur commune dès lors que les maires des communes concernées par l’intervention ont donné leur accord. »

Quel est l’avis de la commission sur cet amendement rectifié ?

M. Louis Nègre, rapporteur. Favorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Marylise Lebranchu, ministre. Favorable.

M. Charles Revet. Que demande le peuple ?

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 3 rectifié.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. En conséquence, l'article 10 est ainsi rédigé.

Article 10
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Article 12

Article 11

La première phrase du quatrième alinéa de l’article L. 125-1 du code des assurances est ainsi rédigée :

« En cas de survenance d’événements climatiques ou géologiques présentant un caractère irrésistible, l’état de catastrophe naturelle peut, après avis d’une commission permanente dont la composition, précisée par décret, comprend des représentants des collectivités territoriales, des représentants d’entreprises d’assurances et des personnalités qualifiées, être constaté par un arrêté interministériel qui détermine les zones et les périodes où s’est située la catastrophe ainsi que la nature des dommages résultant de celle-ci couverts par la garantie visée au premier alinéa du présent article. »

M. le président. La parole est à M. Pierre-Yves Collombat, sur l’article.

M. Pierre-Yves Collombat. Compte tenu du temps qui passe, j’y renonce.

M. le président. Je mets aux voix l'article 11.

(L'article 11 est adopté.)

Article 11
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Articles 13 et 14

Article 12

Le titre IV du livre VII du code de la sécurité intérieure est complété par un chapitre III ainsi rédigé :

« Chapitre III

« Gestion de l’immédiat après-crise

« Art. L. 743-1. – Après une inondation d’ampleur exceptionnelle, le représentant de l’État dans le département met en place, dans les meilleurs délais, une commission de suivi des opérations de reconstruction, de réhabilitation et d’indemnisation dont il fixe l’effectif. Il en assure la présidence. Cette commission est composée des élus, des services de l’État et des institutions financières concernés, de représentants des personnes sinistrées, des entreprises d’assurance et des médiateurs des assurances ainsi que des organismes consulaires.

« Sur convocation régulière de son président, elle fait le point sur les problèmes en cours, l’état d’avancement des solutions mises en œuvre, les difficultés rencontrées et les moyens envisagés pour les résoudre jusqu’à ce que la majorité de ses membres constate l’achèvement de sa mission. »

M. le président. La parole est à M. Pierre-Yves Collombat, sur l'article.

M. Pierre-Yves Collombat. Je suis très satisfait que cet article relatif à la gestion de l’immédiat après-crise ait été retenu par la commission : ses dispositions répondent à une demande unanime de toutes les personnes que nous avons rencontrées.

Dans la semaine, voire les quinze jours qui suivent la catastrophe, tout le monde est mobilisé, les choses vont le plus vite possible et chacun fait ce qu’il peut. Mais, comme chacun le sait, plus le temps passe, plus la gestion de la crise devient difficile… Dans ces conditions, la création d’une commission de suivi des opérations de reconstruction, de réhabilitation et d’indemnisation qui se réunira régulièrement est de nature à améliorer les choses.

Mme Marylise Lebranchu, ministre. Très bien !

M. le président. Je mets aux voix l'article 12.

(L'article 12 est adopté.)

Article 12
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Article 15

Articles 13 et 14

(Supprimés)

Articles 13 et 14
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Article 16 (supprimé)

Article 15

Le III de l’article L. 1615-6 du code général des collectivités territoriales est ainsi modifié :

1° Au premier alinéa, les mots : « reconnues par décret » sont supprimés ;

2° Le deuxième alinéa est supprimé.

M. le président. La parole est à M. Pierre-Yves Collombat, sur l'article.

M. Pierre-Yves Collombat. Je souhaite expliquer brièvement en quoi consiste cet article, rédigé dans le patois des bureaux.

Il s’agit de pouvoir récupérer la TVA sur les travaux réalisés à la suite de la catastrophe dans l’année. Cette disposition peut être utile, car, actuellement, la possibilité de récupérer la TVA existe déjà, mais il faut un décret. Or il arrive que ce décret ne soit publié que des mois plus tard, ce qui crée des problèmes budgétaires.

M. le président. Je mets aux voix l'article 15.

(L'article 15 est adopté.)

Article 15
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Article 17 (supprimé)

Article 16

(Supprimé)

M. le président. L'amendement n° 4, présenté par M. Collombat, est ainsi libellé :

Rétablir cet article dans la rédaction suivante :

Peuvent être négociés sans publicité préalable et sans mise en concurrence, les marchés publics et les accords-cadres conclus pour faire face à une urgence impérieuse résultant de circonstances imprévisibles pour le pouvoir adjudicateur et n’étant pas de son fait, et dont les conditions de passation ne sont pas compatibles avec les délais exigés par les procédures d’appel d’offres ou de marchés négociés avec publicité et mise en concurrence préalable, et notamment, les marchés conclus pour faire face à des situations d’urgence impérieuse liées à une catastrophe naturelle.

La parole est à M. Pierre-Yves Collombat.

M. Pierre-Yves Collombat. Je me heurte à forte partie puisque j’ai contre moi non seulement Bercy, mais aussi les assurances. Autant vous dire, mes chers collègues, que mes chances de succès sont minces… D'ailleurs, l’article 16 a été supprimé en commission.

Cet article visait à faciliter les opérations de sécurisation et de remise en état d’urgence après la catastrophe, sans avoir à mettre en place toute l’artillerie censée protéger la concurrence libre et non faussée. Pour ma part, je préférerais que l’on puisse engager le plus vite possible les travaux directement liés à la remise en état.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Louis Nègre, rapporteur. La commission du développement durable n’a pas supprimé l’article 16 parce qu’elle conteste le bien-fondé de cette dérogation au code des marchés publics. Celle-ci est, au contraire, très utile pour permettre aux collectivités territoriales de procéder, au plus vite, aux réparations les plus urgentes après une inondation, sans qu’elles soient retardées par les délais des procédures ordinaires.

Cher Pierre-Yves Collombat, cette dérogation est tellement opportune, au vu des circonstances, qu’elle est déjà prévue par l’article 35 du code des marchés publics, lequel est de nature entièrement réglementaire. Le rétablissement de l’article 16 n’apporterait donc rien au fond du droit existant. Son seul effet juridique serait de donner une valeur législative à des dispositions actuellement de valeur réglementaire. Dans ces conditions, l’adoption de l’amendement ne présenterait pas d’intérêt particulier et risquerait de poser un problème de cohérence en conférant une valeur législative à une disposition isolée du code des marchés publics.

Permettez-moi de vous lire un extrait de l’article 35 de ce code : « Peuvent être négociés sans publicité préalable et sans mise en concurrence […] les marchés et les accords-cadres conclus pour faire face à une urgence impérieuse résultant de circonstances imprévisibles pour le pouvoir adjudicateur et n’étant pas de son fait, et dont les conditions de passation ne sont pas compatibles avec les délais exigés par les procédures d’appel d’offres ou de marchés négociés avec publicité et mise en concurrence préalable, et notamment les marchés conclus pour faire face à des situations d’urgence impérieuse liées à une catastrophe technologique ou naturelle ». Tout est dit !

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Marylise Lebranchu, ministre. L’avis du Gouvernement est également défavorable, pour les motifs que le rapporteur vient si bien d’exposer.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 4.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. L’article 16 demeure supprimé.

Article 16 (supprimé)
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Article 18

Article 17

(Supprimé)

M. le président. L'amendement n° 5, présenté par M. Collombat, est ainsi libellé :

Rétablir cet article dans la rédaction suivante :

Après le titre Ier du livre II du code des assurances, il est inséré un titre Ier bis ainsi rédigé :

« TITRE IER BIS

« L’ASSURANCE HABITATION

« CHAPITRE UNIQUE

« Art. L. 214-2. – Toute personne physique ou morale autre que l’État, propriétaire d’un local à usage d’habitation, doit être couverte par une assurance garantissant au minimum le risque d’incendie ainsi que le risque résultant d’un dégât des eaux, pour ledit local, ses dépendances et les objets mobiliers présents à l’intérieur.

« Art. L. 214-3. – Toute personne physique ou toute personne morale autre que l’État est obligée de s’assurer contre les risques de responsabilité civile dont elle doit répondre en sa qualité de propriétaire, de locataire ou d’occupant d’un local à usage d’habitation.

« Art. L. 214-4. – I. – Toute personne mentionnée aux articles L. 214-2 et L. 214-3 qui, ayant sollicité la souscription d'un contrat auprès d'une entreprise d'assurance couvrant en France les risques visés auxdits articles, se voit opposer un refus, peut saisir un bureau central de tarification dont les conditions de constitution et les règles de fonctionnement sont fixées par décret en Conseil d'État.

« II. – Le bureau central de tarification a pour rôle exclusif de fixer le montant de la prime moyennant laquelle l'entreprise d'assurance intéressée est tenue de garantir le risque qui lui a été proposé. Il peut, dans les conditions fixées par le décret en Conseil d'État susmentionné, déterminer le montant d'une franchise qui reste à la charge de l'assuré.

« III. – Est nulle toute clause des traités de réassurance tendant à exclure certains risques de la garantie de réassurance en raison de la tarification adoptée par le bureau central de tarification.

« IV. – Toute entreprise d'assurance qui couvre le risque de responsabilité civile mentionné au premier alinéa qui maintient son refus de garantir le risque, dont la prime a été fixée par le bureau central de tarification, est considérée comme ne fonctionnant plus conformément à la réglementation en vigueur. Elle encourt, selon le cas, soit le retrait des agréments prévus aux articles L. 321-1, L. 321-7, L. 321-8 ou L. 321-9, soit les sanctions prévues aux articles L. 351-7, L. 351-8 et L. 363-4. »

La parole est à M. Pierre-Yves Collombat.

M. Pierre-Yves Collombat. Il s’agit simplement de généraliser, donc de rendre obligatoire, y compris pour les propriétaires de locaux à usage d’habitation, ce qui n’est pas le cas actuellement, une assurance qui les couvre en cas de catastrophes naturelles.

On m’a expliqué tout à l'heure qu’une telle disposition est contraire aux exigences de Bruxelles…

Mme Marylise Lebranchu, ministre. Pas du tout !

M. Pierre-Yves Collombat. … ou à que sais-je encore. Cela ne m’a pas du tout convaincu !

Une telle mesure pourrait être utile pour les propriétaires d’un bâtiment qui, par suite d’une catastrophe naturelle, s’écroule et porte atteinte au bien d’autrui.

Il est vrai que, sur le plan pratique, assurer 2 % de personnes en plus ne changera pas grand-chose. Mais, sur le plan des principes, si on part de l’idée, qui sous-tend le rapport, que la solidarité doit être organisée au niveau des territoires, alors tout le monde doit contribuer. En effet, si des travaux sont réalisés pour aménager le territoire, il n’y a pas de raison que l’ensemble des personnes qui en bénéficieront ne participent pas à cet effort collectif.

Je le répète, cela ne changera pas grand-chose sur le plan pratique, mais je constate quand même encore une fois que bouger une virgule dans le domaine des assurances, c’est plus que déplacer le ciel ! Nous en verrons d’autres exemples tout à l'heure.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Louis Nègre, rapporteur. Je ne suis pas sûr de pouvoir suivre l’auteur de la proposition de loi sur ce point.

Pierre-Yves Collombat nous dit qu’il prend une position de principe. Il a rappelé, à juste raison, ce à quoi avait conclu le rapport de la mission présidée par Louis Nègre.

Sauf que, après les auditions, on s’est rendu compte que, sur le plan pratique, une telle mesure serait sans effet, qu’il faudrait installer une administration supplémentaire pour contrôler la couverture des 2 % de propriétaires récalcitrants et qu’en dépit de ce contrôle le nombre de ces derniers ne baisserait pas. Au final, on alourdirait le système de manière significative, sans obtenir le résultat recherché.

En conséquence, l’avis de la commission est défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Marylise Lebranchu, ministre. À notre connaissance, ce n’est même pas 2 % de la population qui, pour un tas de raisons, n’a pas souscrit cette assurance, mais seulement 0,6 %. Au demeurant, il existe déjà une section catastrophe naturelle permettant de fournir une assurance multirisque habitation aux personnes désireuses de s’assurer contre les risques de catastrophe naturelle et qui ne trouveraient pas d’offre sur le marché.

Je ne vois donc pas ce qu’apporterait l’adoption de cet amendement, qui créerait une norme supplémentaire, dont il faudra contrôler le respect, alors qu’elle ne concernerait que 0,6 % des propriétaires, et que l’offre existe déjà. Dans ces conditions, l’avis du Gouvernement est très défavorable.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 5.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. L’article 17 demeure supprimé.

Article 17 (supprimé)
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Article 19

Article 18

I. – L’article L. 125-2 du code des assurances est ainsi modifié :

1° Après le premier alinéa, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« Un décret en Conseil d’État fixe les modalités selon lesquelles cette clause comporte une règle de réduction de la prime, conformément au quatrième alinéa de l’article L. 113-4, en fonction des mesures de prévention prises par les assurés pour renforcer leur propre protection. » ;

2° Après la troisième phrase du quatrième alinéa, est insérée une phrase ainsi rédigée :

« Elles ne peuvent, en aucun cas, être modulées en fonction du fait qu’une commune est ou non dotée d’un plan de prévention des risques naturels prévisibles pour le risque faisant l’objet d’un arrêté portant constatation de l’état de catastrophe naturelle ou du nombre de constatations intervenues pour le même risque sur le territoire de ladite commune au cours d’une période donnée. »

II. – À la seconde phrase du dernier alinéa de l’article L. 561-1 du code de l’environnement, les mots : « quatrième alinéa » sont remplacés par les mots : « cinquième alinéa ». – (Adopté.)

Article 18
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Article 20

Article 19

I. – L’article L. 125-6 du code des assurances est ainsi modifié :

1° Les trois premiers alinéas sont remplacés par un alinéa ainsi rédigé :

« Dans les terrains situés dans des zones inconstructibles d’un plan de prévention des risques naturels prévisibles approuvé ou appliqué par anticipation dans les conditions fixées au chapitre II du titre VI du livre V du code de l’environnement, l’assuré est déchu du bénéfice de la garantie contre les effets des catastrophes naturelles s’agissant de dommages causés à des biens mentionnés à l’article L. 125-1 par un phénomène sur lequel porte le plan, lorsque ces biens ont été construits postérieurement à la publication du plan, sans autorisation administrative de construire. » ;

2° Au quatrième alinéa, les mots : « deuxième alinéa » sont remplacés par les mots : « troisième alinéa ».

II. – L’article L. 194-1 du même code est ainsi modifié :

1° Au deuxième alinéa, les mots : « , à l’exception du quatrième alinéa de l’article L. 125-6 et sous réserve des adaptations suivantes » sont supprimés ;

2° Les troisième à cinquième alinéas sont supprimés. – (Adopté.)

Article 19
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Article 21 (supprimé)

Article 20

Après le deuxième alinéa du I de l’article L. 750-1-1 du code de commerce, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« Lorsqu’en application du premier alinéa, les concours sont apportés pour faciliter le retour à une activité normale à la suite de circonstances exceptionnelles susceptibles de provoquer une atteinte grave au tissu commercial de proximité, les aides financières prennent en compte le montant des franchises retenu par les entreprises d’assurance conformément aux dispositions du cinquième alinéa de l’article L. 125-2 du code des assurances. » – (Adopté.)

Article 20
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Article 22

Article 21

(Supprimé)

M. le président. L'amendement n° 6, présenté par M. Collombat, est ainsi libellé :

Rétablir cet article dans la rédaction suivante :

Le premier alinéa de l’article L. 125-5 du code des assurances est remplacé par deux alinéas ainsi rédigés :

« Art. L. 125-5. – Lorsqu’une partie des biens outre ceux réservés à l’habitation, d’une exploitation agricole, bénéficie des garanties prévues à l’article L. 125-1, les dégâts causés aux récoltes non engrangées, aux cultures, aux sols et au cheptel vif hors bâtiment, peuvent bénéficier de la clause prévue à l’article L. 125-2.

« Les contrats d’assurance garantissant ces dommages peuvent être soumis au versement de la prime ou cotisation additionnelle. »

La parole est à M. Pierre-Yves Collombat.

M. Pierre-Yves Collombat. Sans aller jusqu’à dire que cet amendement est un cri de détresse, il vise à apporter une solution à un problème qui nous a été signalé : celui de l’articulation qui peut parfois se poser entre, d’une part, l’indemnisation au titre des catastrophes naturelles et, d’autre part, l’indemnisation au titre des calamités agricoles.

En particulier, un agriculteur pourra être indemnisé – s’il est assuré, bien évidemment – au titre des catastrophes naturelles pour les productions qui se trouvent à l’intérieur de ses bâtiments et au titre des calamités agricoles pour ce qui est à l’extérieur. Il en résulte des retards, entre autres difficultés, et, au final, un sacré méli-mélo.

Nos interlocuteurs ont reconnu l’existence de ce problème, mais nous ont assuré qu’une réflexion était en cours. Si Mme la ministre s’engage à nous proposer une solution, dans le cadre de la navette, d’ici à la deuxième lecture – il paraît qu’un groupe de travail réfléchit à ce sujet –, je veux bien retirer mon amendement, dont la rédaction, j’en ai bien conscience, est loin d’être parfaite, pose des problèmes et ne mérite pas que je me fasse couper la tête.

Cela dit, il faut répondre aux attentes des agriculteurs, qui peuvent se retrouver dans une situation vraiment dramatique.

M. le président. La parole est à Mme la ministre.

Mme Marylise Lebranchu, ministre. Monsieur Collombat, je m’engage à ce que nous trouvions une solution. D'ailleurs, le travail est déjà en cours.

Dès lors, je vous invite à retirer votre amendement, dont la rédaction ne convient pas.

M. le président. Monsieur Collombat, l'amendement n° 6 est-il maintenu ?

M. Pierre-Yves Collombat. Non, je le retire, monsieur le président.

M. le président. L'amendement n° 6 est retiré.

L’article 21 demeure supprimé.

Article 21 (supprimé)
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Explications de vote sur l'ensemble (début)

Article 22

Les éventuelles conséquences financières résultant pour les collectivités territoriales de la présente proposition de loi sont compensées à due concurrence par une majoration de la dotation globale de fonctionnement.

La perte de recettes résultant pour l’État du premier alinéa est compensée à due concurrence par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts – (Adopté.)

Vote sur l'ensemble

Article 22
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Explications de vote sur l'ensemble (fin)

M. le président. Avant de mettre aux voix l'ensemble de la proposition de loi, je donne la parole à M. Pierre-Yves Collombat, pour explication de vote.

M. Pierre-Yves Collombat. Nous avons fait un travail utile puisqu’un certain nombre de propositions figurant dans notre rapport ont été retenues. J’ai quand même un énorme regret, c'est que nous n’ayons pas progressé sur les PPRI, qui restent une pierre d'achoppement.

Si la prévention se limite à interdire des constructions, même si l'on nous dit qu’il n’en est rien et que des aménagements sont prévus, on continuera à avoir une gestion chaotique et conflictuelle des PPRI. Il est normal que la dimension « aménagement » ou « urbanisme » conduise, dans certains cas, jusqu'à l'interdiction formelle, mais à condition que les règles soient claires. En particulier, il serait bon de savoir comment les risques sont mesurés, afin de pouvoir bâtir une stratégie non seulement d'interdiction, mais aussi de reconstruction et d'investissement. On en aura les moyens si cette politique est portée par les intercommunalités et que sa mise au point s'effectue dans le cadre des syndicats mixtes.

Les PPRI doivent évoluer, afin d’encourager les collectivités territoriales à investir et à développer la culture du risque et les populations à prendre en charge leurs lieux de résidence et à en améliorer la sécurité.

À ce regret près, je remercie les membres de la commission du développement durable de m’avoir suivi, en particulier le rapporteur, avec qui j’ai cheminé – pas sur les eaux, mais à côté – pendant deux ans.

Madame la ministre, je le répète, il est essentiel que nous puissions compter sur vous à l’Assemblée nationale, afin que cet ensemble cohérent perdure. À partir de là, nous pourrons engager une action dans la durée, ce qui nous permettra d'affronter les événements qui ne manqueront pas de survenir. Nul besoin d’être Nostradamus pour le prédire !

M. le président. La parole est à M. Charles Revet.

M. Charles Revet. Les conséquences des inondations qui reviennent régulièrement – certaines d’entre elles ont été évoquées, mais la liste est longue – sont souvent humainement et économiquement dramatiques.

Le groupe UMP votera donc ce texte, qui comporte des avancées significatives tant en termes de prévention que de traitement et de réparation. Nous remercions Pierre-Yves Collombat et ses collègues du groupe du RDSE d’avoir présenté cette proposition de loi, ainsi que Louis Nègre, aujourd'hui rapporteur, qui s'est fortement investi, comme tout le monde l’a reconnu. Je rappelle qu’il était président de la mission d’information qui a travaillé sur cette question en amont et dont le rapport a été beaucoup cité.

Il faut avoir été confronté à ces situations pour comprendre à quel point nos concitoyens sont sensibles aux inondations qui surviennent à répétition. Cela m'est arrivé à plusieurs reprises.

Madame le ministre, on a beaucoup parlé de prévention, mais c’est un sujet sur lequel il faudra revenir. Pour les rivières, par exemple, ce sont normalement les riverains qui sont chargés de l’entretien. Certains le peuvent, d'autres non. Or quand les branchages n’ont pas été enlevés, cela peut avoir des conséquences importantes.

Quand on songe également aux incendies dans le Sud, on se dit que si, comme par le passé, les forêts étaient entretenues – c’était notamment le cas grâce aux bergers –, bien des problèmes seraient réglés. Il y va de même pour les avalanches.

Je pense qu’il faut mettre à profit la navette pour réfléchir au moyen d’améliorer la prévention.

M. le président. La parole est à M. André Vairetto.

M. André Vairetto. Après le vote de l’article 35 B du projet de loi de modernisation de l’action publique territoriale et d’affirmation des métropoles, qui crée une compétence en matière de gestion des milieux aquatiques et de prévention des inondations, cette proposition de loi est un ajout positif.

Comme nous l'avons déjà indiqué, le groupe socialiste votera ce texte, car il renforce la participation des élus dans le processus de décision concernant la déclaration de catastrophe naturelle, qui enclenche l'indemnisation, dans le suivi des opérations post-inondations et parce qu’il permet une indemnisation plus rapide et plus juste des collectivités locales et des personnes sinistrées.

Je voudrais moi aussi adresser des remerciements à l'auteur de la proposition de loi et à son rapporteur. Il s'agit d'une œuvre au long cours, depuis la mission commune d’information sur les inondations dans le Sud-Est et dans le Var.

M. le président. La parole est à M. le rapporteur.

M. Louis Nègre, rapporteur. À l'évidence un consensus très large se dégage sur cette proposition de loi, qui va faire bouger les lignes, qui va bousculer le droit établi. Je tiens tout particulièrement à remercier son auteur pour sa ténacité, sa volonté et, bien que cela puisse surprendre, sa sagesse puisqu’il a retiré un amendement. (Sourires.)

Je veux dire la chance que j’ai eue de travailler avec Pierre-Yves Collombat ; je m'en félicite tous les jours. Même s'il n’a pas obtenu totalement satisfaction, je tiens à le rassurer : le Gouvernement s’est engagé à aller encore plus loin que ce que nous avions prévu pour associer les élus locaux aux PPRI. Cette demande forte représentera une avancée de ce texte.

Voilà une batterie de mesures pour mieux protéger les populations et éviter la destruction de biens. Nous l’avons vu sur le terrain, à cause d'inondations récurrentes, des entreprises sont restées fermées pendant des mois et des centaines de salariés n’ont pas pu reprendre leur travail. Pourtant, on savait que les inondations se produisaient aux mêmes endroits au XIXsiècle !

Il est de notre devoir de nous occuper des problèmes du quotidien, qui sont des problèmes graves pour l'économie de notre pays et pour la vie de nos concitoyens. C'est l'honneur du Sénat de montrer que, avec une proposition de loi du groupe du RDSE rapportée par un sénateur du groupe UMP, il sait travailler en bonne intelligence pour l'intérêt général ! (Applaudissements sur les travées de l'UMP, du RDSE et du groupe écologiste.)

M. Charles Revet. Très bien !

M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...

Je mets aux voix l'ensemble de la proposition de loi dans le texte de la commission, modifié.

(La proposition de loi est adoptée.)

M. le président. Il reste six minutes avant que je ne lève la séance. J’ose à peine vous interroger, monsieur Mézard…

M. Jacques Mézard. Le sourire narquois de Pierre-Yves Collombat est regrettable (Sourires.), car il va manquer une amélioration considérable à notre procédure pénale. En effet, en si peu de temps, je n’aurai pas la possibilité de convaincre la Haute Assemblée de l'utilité de l'excellente proposition de loi que notre groupe a rédigée. J’ai malheureusement compris qu’il n’y aurait pas de délai de grâce… Je me soumets donc à la règle, comme d'habitude.

M. le président. C’est une règle intangible. (Sourires.)

Explications de vote sur l'ensemble (début)
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10

Ordre du jour

M. le président. Voici quel sera l’ordre du jour de la prochaine séance publique, précédemment fixée à aujourd’hui, jeudi 21 novembre 2013 :

À neuf heures trente :

1. Projet de loi autorisant la ratification de l’accord relatif à une juridiction unifiée du brevet (Procédure accélérée) (n° 97, 2013-2014) ;

Rapport de M. Jacques Berthou, fait au nom de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées (n° 141, 2013-2014) ;

Texte de la commission (n° 142, 2013-2014).

2. Conclusions des commissions mixtes paritaires sur le projet de loi organique et sur le projet de loi portant application de l’article 11 de la Constitution ;

Rapport de M. Jean-Pierre Sueur, rapporteur pour le Sénat (n° 110, 2013-2014) ;

Textes de la commission (nos 111 et 112, 2013-2014).

À onze heures :

3. Projet de loi de finances pour 2014 (n° 155, 2013-2014) ;

Rapport de M. François Marc, rapporteur général de la commission des finances (n° 156, 2013-2014).

-Discussion générale.

De quinze heures à quinze heures quarante-cinq :

4. Questions cribles thématiques sur la sécurité : les chiffres de la délinquance.

À seize heures et, éventuellement, le soir :

5. Suite de l’ordre du jour du matin.

Personne ne demande la parole ?…

La séance est levée.

(La séance est levée le jeudi 21 novembre 2013, à zéro heure vingt-cinq.)

Le Directeur du Compte rendu intégral

FRANÇOISE WIART