M. Stéphane Le Foll, ministre. Ainsi, j’en suis persuadé, nous donnons aujourd’hui à ce texte les moyens de réussir.

Je l’ai dit en concluant nos discussions de la semaine dernière, une loi, ce sont bien sûr des articles, un cadre législatif et normatif. Mais cela doit également être un outil donnant envie d’être utilisé, suscitant un mouvement dans la société et parmi les acteurs concernés au premier chef.

Au cours des débats consacrés aux groupements d’intérêt économique et environnemental, les GIEE, j’ai défendu longuement l’idée selon laquelle il fallait créer des structures assez ouvertes, laisser aux agriculteurs la possibilité de faire leurs choix sur la base de leur projet. J’ai expliqué qu’il ne fallait pas fermer l’éventail des options, lesquelles peuvent être diverses, notamment sur le plan des contractualisations avec les collectivités territoriales.

Telle est ma conviction. Je sais que cette idée a fait débat et que, sur certaines travées, on souhaitait réduire l’étendue de ce dispositif, en lui donnant un cadre à mes yeux trop précis. En effet, la loi est là pour inciter. Elle est réussie lorsque les acteurs concernés s’en saisissent pour créer leur propre dynamique.

Un député, André Chassaigne, a cité à ce propos une formule de René Char qui ne manque pas d’intérêt : « L’inachevé bourdonne d’essentiel. » Le travail législatif doit, de temps à autre, définir un cadre tout en laissant aux acteurs toutes les possibilités, toutes les éventualités, toutes les hypothèses. Ce souci fait, lui aussi, partie du débat politique : il est indispensable de ménager une part d’utopie pour faire avancer les choses. On a eu l’occasion de le rappeler s’agissant des sujets qui nous occupent aujourd’hui.

Mesdames, messieurs les sénateurs, le présent texte peut être résumé en quatre grands objectifs, qui constituent autant d’axes, de piliers : produire autrement, enseigner autrement, rechercher autrement et développer autrement.

Premièrement, il convient de produire autrement, c’est-à-dire de promouvoir de nouveaux modèles de production. Le Sénat a débattu des enjeux de performance économique et écologique, auxquels il a ajouté, sous l’impulsion de son rapporteur Didier Guillaume, la performance sociale.

Il faut définir une nouvelle combinaison entre l’environnement et l’économie. Il faut mettre un terme à l’opposition de ces deux termes, trop souvent répétée, réduisant les impératifs environnementaux à des contraintes qui entraveraient le développement économique ! C’est tout l’objet, souvent rappelé par Ségolène Royal, de la lutte contre « l’écologie punitive ». A contrario, nous devons construire une écologie dynamique. Je le répète, il faut ouvrir des perspectives tout en s’assurant qu’elles suscitent des dynamiques positives, combinant les dimensions environnementales et économiques, en lien, évidemment, avec la dimension sociale. Cette triple performance du « produire autrement » résume toute la conception de l’agroécologie.

En outre, il faut changer les modèles de production ; il faut lutter contre l’antibiorésistance, et donc contre l’utilisation excessive des antibiotiques ; il faut faire en sorte d’inscrire pleinement les actions menées dans le cadre du plan Écophyto, pour réduire le recours aux produits phytosanitaires. C’est un enjeu essentiel !

On a déjà longuement évoqué des sujets d’actualité comme la protection d’un certain nombre de lieux, notamment les habitations. Toutefois, on ne peut se contenter d’examiner la seule norme, la seule contrainte que l’on va créer. Il faut traiter le fond du problème : nous devons être capables de déterminer des modèles de production limitant, à la base, le recours aux produits phytosanitaires. C’est là le meilleur moyen d’atteindre les objectifs qui sont les nôtres. Ce constat vaut pour les antibiotiques, pour les produits phytosanitaires ou encore pour les azotes – nous avons notamment débattu de l’azote total.

C’est bien en produisant autrement que nous combinerons efficacement les impératifs environnementaux, économiques et sociaux. La restructuration doit être assurée à la base. Je l’ai dit dès ma prise de fonctions en 2012, lors d’un de mes premiers débats en commission, qui avait précisément lieu au Sénat. Il était alors question du plan Écophyto, imposant une réduction de 50 % des produits phytosanitaires d’ici à 2020. Or, à cette époque, à la suite du Grenelle de l’environnement, l’usage de ces produits tendait à augmenter. Pourquoi ? Parce que les modèles de production conçus voilà vingt ou trente ans ont précisément été élaborés sur la base du recours à ces produits ! Si l’on ne modifie pas le fondement même du modèle pour réduire leur usage, on pourra toujours instaurer des contraintes, se satisfaire d’un règlement ou d’un article de loi : la situation ne changera pas pour autant en profondeur !

Voilà pourquoi le « produire autrement », premier pilier du présent texte, constitue à mes yeux un enjeu majeur. Il a d’ailleurs fait l’objet des débats les plus importants.

Deuxièmement, il faut enseigner autrement.

Didier Guillaume l’a rappelé, plusieurs spécialistes de cette question se sont attachés, au sein de la Haute Assemblée, à améliorer les propositions formulées par le Gouvernement au titre des articles 26 et 27. Il s’agit d’assurer la promotion sociale via l’enseignement agricole. (Mme Anne-Marie Escoffier acquiesce.) Obtenir un diplôme est un atout majeur pour accéder à un emploi. Ce dispositif d’enseignement est essentiel. Il a été conforté, et cet impératif a été réaffirmé.

En outre, il faut défendre le principe d’acquisition progressive des diplômes. Il faut chercher à emmener l’élève du début jusqu’à la fin de son parcours, en le faisant progresser et non simplement en le jugeant. Voilà un atout, voilà un enjeu, voilà une démarche innovante !

Bien sûr, « enseigner autrement » et « produire autrement » ont partie liée, étant donné la grande question de la réorientation des référentiels en termes d’éducation et d’enseignement pour l’agriculture. Les deux chantiers vont de pair.

Le troisième pilier, « rechercher autrement », très lié aux deux précédents, confère à la loi sa cohérence.

Je n’ai jamais considéré qu’il ne fallait pas rechercher et innover, bien au contraire ! Produire autrement, c'est-à-dire mettre l’accent sur l’agroécologie, est une ambition qui ouvre un champ potentiel énorme à la recherche, qu’il faut soutenir et dynamiser. Cela constitue une nécessité majeure.

Encore faut-il que nous soyons capables d’ouvrir les yeux et de changer notre regard, en définissant de nouveaux principes pour la recherche. Nous devons garder à l’esprit l’idée développée jusqu’ici, qui a mené aux résultats que l’on sait en augmentant de manière très importante la production agricole.

Tel était bien l’objectif des grandes lois d’orientation agricole d’Edgar Pisani. On oublie souvent que la France sortait alors, après la Seconde Guerre mondiale, d’une pénurie qui l’avait parfois contrainte aux tickets de rationnement sur l’alimentation. Nous devions alors importer dans tous les domaines, bien loin d’une autosuffisance dont on peut d’ailleurs discuter de la réalité : importer des protéines végétales pour produire des protéines animales, est-ce vraiment de l’autosuffisance ?

Ces lois d’orientation agricole de 1960 et 1961 ont donné une impulsion et une dynamique. Les modèles qu’elles ont dessinés étaient focalisés sur la grande question de la production.

Aujourd’hui, notre responsabilité est de permettre à l’agriculture d’engager une mutation, comparable à celle qu’elle a connue avec la généralisation de la traction mécanique et la modernisation du matériel agricole, mais également avec l’utilisation de la chimie, pour éliminer les concurrences naturelles existantes afin de permettre la spécialisation des productions. Nous devons aujourd’hui réintroduire ces mécanismes naturels pour les mettre au service de la production.

Il est donc essentiel de nourrir l’ambition de rechercher autrement. La reconnaissance de la recherche agricole française est extrêmement importante pour l’avenir du pays et de son agriculture. Nous préparons un colloque international qui aura lieu le 19 septembre sur ces grandes questions, et mobilisons à cet effet nos instituts de recherche.

Afin de conférer au secteur cette visibilité et de faire la démonstration de la capacité de la France à répondre aux grands enjeux, aux défis auxquels la recherche devra faire face à l’avenir, nous avons créé l’Institut agronomique, vétérinaire et forestier de France, l’IAVFF. Ainsi pourrons-nous organiser le cadre de référence au sein duquel un grand pays agricole comme le nôtre va préparer, organiser, anticiper et réaliser une importante mutation, en s’appuyant sur une recherche renouvelée.

Produire autrement, enseigner autrement, rechercher autrement ; j’en viens au quatrième pilier, développer autrement.

Le sujet du développement agricole a été très débattu. Il constitue sans doute l’aspect le plus formidable des changements opérés dans l’agriculture après la Seconde Guerre mondiale. Sur la base du syndicalisme agricole, et en particulier de la fameuse JAC, ou Jeunesse agricole catholique, à laquelle il est si souvent fait référence, qui a été un lieu d’élaboration, de motivation et de construction, et avec les grandes orientations fixées par les lois Pisani, on a trouvé un moyen de développer l’agriculture, d’utiliser ce qui en était la potentialité majeure, à savoir les agriculteurs eux-mêmes, et de les fédérer afin d’assurer la diffusion de ce développement.

Nous devons agir de même en relevant le défi du « produire autrement » : créer des modèles et organiser un développement agricole qui permette cette diffusion, cette mobilisation.

Comme je l’ai déjà dit, c’est, j’en suis sûr, dans l’inachevé en construction que va bourdonner l’essentiel de demain, parce que les acteurs s’en saisiront.

Ces structures en construction, ce sont par exemple les groupements d’intérêt économique et environnemental, ou GIEE, et leur pendant forestier – nous n’avons pas oublié la forêt ! –, les GIEEF.

Ce défi est relevé également en matière d’installation. Nous avons tous ici la volonté de renouveler les générations, d’aider les jeunes à retrouver l’envie de construire l’agriculture de demain, de les aider à s’installer. Dans ce domaine, les débats qui ont concerné le foncier prennent sens, avec le renforcement du rôle de préemption des SAFER et du rôle des CDPENAF en ce qui concerne les espaces agricoles et naturels. Les enjeux ont été parfaitement identifiés et ont fait l’objet d’excellents débats. Nous avons fait le choix de l’accès au foncier pour que, demain, notre agriculture soit bien celle des agriculteurs, et pas seulement celle des investisseurs. Cela fait partie des grandes décisions que porte cette loi.

Enfin, il faut évoquer la création du registre de l’agriculture, initiée par un débat à l’Assemblée nationale, qui s’est poursuivi au Sénat. Nous avons été prudents, en avançant pas à pas pour répondre à une demande de la profession. Ce registre constituera à mon sens un atout dans la réalisation de notre projet : la mise en mouvement du secteur et la reconnaissance du statut de l’agriculteur.

Cette loi porte également sur la forêt. La forêt française, une des plus importantes d'Europe, rencontre des difficultés en termes de transformation économique. Ainsi, par exemple, des billes de bois de grande qualité sont exportées partout dans le monde sans être transformées en France. Voilà tout de même un sujet essentiel !

Philippe Leroy connaît parfaitement cette question et a conduit avec doigté le débat sur l’organisation de la forêt en vue de favoriser la coordination et d’éviter le morcellement. Il nous faut mobiliser le bois en vue de sa transformation, tout en préservant la multifonctionnalité de la forêt. Celle-ci doit devenir un atout économique et écologique, deux dimensions dans lesquelles elle dispose de moyens de réussir.

Nous avons ainsi créé, je l’ai rappelé, les GIEEF, mais également le Fonds stratégique de la forêt et du bois. Nous avons décidé de la mise en place d’un certain nombre de règles sur les préemptions et les questions liées aux communes forestières.

L’équilibre sylvo-cynégétique, qui a donné lieu ici à un débat toujours difficile entre chasseurs et sylviculteurs, a été préservé, grâce à l’engagement plein et entier de Jean-Jacques Mirassou et de Philippe Leroy. Nous avons fait avancer ce très important sujet et nous continuerons dans cette voie.

Enfin, une partie de la loi s’attache aux outre-mer, abordant les grands enjeux de leurs agricultures. Nous mettons en place les COSDA, ces fameux comités d’orientation stratégique et de développement agricole, afin de coordonner les objectifs de production agricole dans les outre-mer. Il s’agit de faire en sorte que l’agriculture s’y diversifie pour reconquérir les marchés locaux, et que cette diversification soit parfaitement organisée et structurée. Il fallait mobiliser les collectivités territoriales autour de cet objectif.

Aujourd’hui, deux grandes productions sont absolument nécessaires aux outre-mer : la canne à sucre et la banane. Nous avons l’obligation de permettre la diversification des productions agricoles et donc d’organiser dans chaque territoire la capacité d’orienter, de soutenir et de développer l’agriculture.

Tel est le résumé qui peut être fait de tous nos débats sur ce texte, y compris de ceux qui ont eu lieu en commission mixte paritaire. Des arbitrages ont été faits, et je les soutiens. Tout ce travail, j’en suis persuadé, aura constitué un moment important non seulement pour définir des normes, mais surtout pour ouvrir des potentialités, pour donner des envies d’organisation différente, des envies de créer et de porter des projets. Au fond, c’est cela aussi la loi ! C’est cela aussi l’objectif du débat politique ! C’est cela qui donne un sens à toutes ces heures passées, c’est cela qui leur donnera demain une réalité et, surtout, une capacité à mobiliser.

Pour toutes ces raisons, je suis un ministre satisfait des débats. Je tiens à saluer le travail du rapporteur Didier Guillaume, avec qui mes collaborateurs et moi-même avons passé de nombreuses heures pour préparer ces discussions. Je souhaite également remercier Daniel Raoul, pour la présidence de la commission, l’organisation de ces débats et le fait qu’ils aient pu aller jusqu’à leur terme.

Enfin, je voudrais remercier toutes les sénatrices et tous les sénateurs qui sont intervenus dans ce débat avec la conviction que nous avons la responsabilité de porter haut l’agriculture et la forêt de France. C’est non seulement une question de défense du patrimoine, une question qui nous concerne aujourd’hui, mais aussi et surtout une question capitale pour demain ! (Applaudissements.)

M. le président. La parole est à M. Jean-Jacques Lasserre.

M. Jean-Jacques Lasserre. Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, nous voici réunis ce matin pour examiner le texte issu de la commission mixte paritaire, à laquelle j’ai eu l’honneur de participer.

Après de nombreuses heures de débat et de travail sur ce projet de loi d’avenir pour l’agriculture, l’alimentation et la forêt, plusieurs constats s’imposent, me semble-t-il : le Sénat a exercé ses responsabilités, et ce dans de bonnes conditions. M. le président de la commission et MM. les rapporteurs ont su fixer un cadre de travail tout à fait positif, et je tiens une fois de plus à les en remercier.

Le Sénat s’honore d’une véritable tradition d’approfondissement des dossiers, d’une liberté d’expression qui lui est propre, dont j’espère qu’elle sera pérennisée, et d’un profond respect de tous les points de vue. Cela mérite d’être noté : cet examen est la démonstration d’un bel exercice démocratique.

Sur le fond, je reviendrai sur la position du groupe UDI-UC. Nous avons souhaité aborder ce texte avec pragmatisme et d’une façon positive. Nous reconnaissons ainsi certaines avancées : dès la première lecture, nous avons su nous accorder sur la clause miroir. Nous avons également avancé sur la gestion du foncier et le rôle des SAFER, sur la création des GIEE, qui a donné lieu à un débat intéressant et très animé, sur l’utilisation des phytosanitaires, ou encore sur la protection des zones de production des AOC.

Nous saluons particulièrement la création du registre de l’agriculture, pour lequel le groupe UDI-UC s’est battu. C’est un sujet très important et extrêmement délicat, puisque beaucoup de choses en découleront dans l’avenir. Nous avons eu de longs échanges à ce sujet, avant d’aboutir finalement à une solution qui me semble satisfaisante.

À côté de ces avancées, certains points sont pourtant insuffisants. Nous regrettons ainsi le rejet de certains de nos amendements, même si M. le rapporteur nous affirme que beaucoup d’entre eux ont été étudiés dans des conditions convenables, et souvent acceptés.

M. Stéphane Le Foll, ministre. C’est vrai !

M. Jean-Jacques Lasserre. Nos regrets portent notamment sur le financement des chambres d’agriculture, point fort de nos discussions, qui a été longuement débattu.

Alors que ce projet de loi comporte de nombreux points intéressants – circuits courts, solutions de proximité, économies plus resserrées sur les ressources locales, exploitations des particularités –, vous choisissez ce moment pour éloigner la responsabilité consulaire du département ! C’est d’autant plus regrettable que le redécoupage suggéré des régions rendra l’exercice très compliqué.

L’agriculture de nos régions est d’une grande diversité. L’idée de confier aux chambres régionales des missions très générales, plaisantes à l’énoncé mais ni opérationnelles ni adaptées, est une idée dépassée. « Définition d’un projet régional », « mises en cohérence des actions locales », « économies d’échelle », sont autant de termes génériques qui ne nous paraissent pas adaptés à la situation. Le développement agricole, dont nous savons qu’il vous préoccupe autant que nos collègues, exige d’être abordé avec des attitudes très fines et proches des réalités.

Un autre de nos regrets concerne l’enseignement agricole, question très débattue également, qui aurait dû prendre plus de place dans ce projet de loi. On ne retrouve qu’insuffisamment les prescriptions du rapport 2013 de l’Observatoire national de l’enseignement agricole, intitulé L’enseignement agricole face aux défis de l’agriculture à l’horizon 2025.

Nous regrettons à ce sujet que l’amendement de notre collègue Françoise Férat, pourtant adopté en seconde lecture au Sénat, n’ait pas été retenu en commission mixte paritaire. Sans nous y attarder, rappelons qu’il aurait permis la conclusion de protocoles de gouvernance des établissements d’enseignement agricole entre les conseils régionaux et les directions régionales de l’alimentation, de l’agriculture et de la forêt, ou DRAAF. Il aurait également rendu possible la signature d’une convention d’objectifs et de moyens pour les exploitations qui font partie des centres constitutifs des établissements d’enseignement agricole et offert la possibilité d’entretenir des relations étroites – c’est fondamental– entre les établissements et le monde professionnel agricole.

J’exprimerai un dernier regret en évoquant les sujets n’ayant pu être traités dans ce texte.

Tout d’abord, j’ai longuement parlé dans mes interventions précédentes des aléas climatiques. Prenons-en conscience, la situation actuelle n’est pas acceptable. L’agriculture, à 90 % ou 95 %, montre une telle fragilité qu’elle n’est plus en situation d’affronter les accidents climatiques. Nous reviendrons sur ce sujet à l’avenir, j’espère. Pour ma part, je m’emploierai personnellement à ce qu’il en soit ainsi.

Ensuite, je regrette – j’ai d’ailleurs eu déjà l’occasion de le souligner – que nous n’ayons pas eu la possibilité de discuter d’un dispositif cadre à la suite de l’interdiction du Monsanto 810 et des débats qui en ont découlé. Certes, il était intéressant de parler de l’inscription d’une variété, mais il aurait fallu examiner au fond la question des PGM, les plantes génétiquement modifiées, en abordant la poursuite nécessaire de la recherche et en donnant à la loi la possibilité de cerner les objectifs de la recherche. Ces deux questions mériteront à l’avenir d’être débattues. Nous ne pouvons pas nous réunir incessamment dans cette enceinte au gré des inscriptions des variétés dans les catalogues. Ce n’est pas ainsi qu’on légifère ! Il importe de prévoir un dispositif cadre.

Par ailleurs – j’ai aussi eu l’occasion de le dire –, la création dans le projet de loi d’un médiateur en vue de régler les relations entre les producteurs et les distributeurs, soit une question fondamentale, est certes une bonne idée et constitue une avancée, mais elle n’est pas à la hauteur du problème posé. Il ne faut pas voir d’une façon angélique ce chantier, qui est au contraire d’une férocité inimaginable. Il faudra bien un jour que le législateur – peut-être sera-ce le travail de la Haute Assemblée ! – élabore un bon dispositif.

Enfin, j’évoquerai l’application du verdissement de la politique agricole commune.

Je l’ai souligné à plusieurs reprises, il sera très difficile de mettre en place l’obligation d’assolement pouvant aller jusqu’à 30 % dans des régions de monoculture. J’espère, monsieur le ministre, que vous nous donnerez sur ce point des précisions positives.

L’objet de ce projet de loi était bien sûr très ambitieux. La triple performance – tantôt elle est double, tantôt elle est triple ; pour ce qui me concerne, elle est triple ! –, environnementale, sociale, économique, est une belle ambition, qui s’est traduite par une véritable recherche d’équilibre.

Pour conclure, permettez-moi de vous faire part d’un sentiment, afin de justifier ou d’expliquer l’abstention du groupe UDI-UC sur ce projet de loi : il aurait fallu à notre avis traiter davantage le volet économique, même si l’exercice est difficile. La plupart des secteurs agricoles sont en situation de désarroi et de désespérance. Selon moi, notre travail est loin d’être achevé : l’agriculture française a besoin d’un nouveau souffle, elle a tout simplement besoin d’être reconnue. Sa fonction, ses sacrifices, ses difficultés exigent, me semble-t-il, une meilleure reconnaissance – la reconnaissance du monde agricole passe par là. Son utilité sociale a besoin d’être confirmée.

La situation économique de la plupart des productions nous donnera, j’en suis sûr, l’occasion d’engager de nouveaux débats. (Applaudissements sur les travées de l'UDI-UC et de l'UMP. – M. Didier Guillaume, rapporteur, et M. Claude Dilain applaudissent également.)

Mme la présidente. La parole est à Mme Cécile Cukierman.

Mme Cécile Cukierman. Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, le projet de loi d’avenir pour l’agriculture, l’alimentation et la forêt tend à promouvoir un nouveau modèle agricole, qui réconcilierait productivité agricole et respect de l’environnement. Il met au cœur de l’agroécologie un outil intéressant, le groupement d’intérêt économique et environnemental, censé créer une véritable coopération entre les agriculteurs et faire de ces derniers les acteurs de cette nouvelle orientation de la politique agricole.

C’est dans cet esprit que nous devons travailler avec les agriculteurs pour mettre en œuvre des pratiques agricoles vertueuses pour l’environnement, sans que ceux-ci aient l’impression de se voir imposer réglementation sur réglementation. Je pense ici, en particulier, à la profonde inquiétude relayée par de nombreux maires – au cours de ces dernières semaines, nous avons tous reçu de nombreux courriers et avons eu de nombreux rendez-vous à ce sujet – pour ce qui concerne la réglementation de l’usage des produits phytosanitaires. Je me félicite que la commission mixte paritaire ait pu apporter une réponse mesurée sur ce point, ainsi que l’a rappelé M. le rapporteur. À cet égard, je suis d’accord avec les propos tenus par M. le ministre quant à l’écologie.

Concernant le nouvel outil qu’est le GIEE, nous avons accueilli favorablement l’élargissement de ce groupement à la dimension sociale. Nous avons tenu à préciser que les majorations d’aides dont peuvent profiter les membres des GIEE bénéficient en priorité aux exploitants agricoles, et nous avons élargi l’entraide agricole.

Nos propositions visant à permettre les échanges de semences entre agriculteurs et à protéger la pratique des semences de ferme n’ont pas été retenues, mais le dispositif reste positif, et nous le soutenons.

Le projet de loi tend aussi à réduire les impacts négatifs de l’agriculture sur les milieux naturels et la santé des hommes, par la diminution du recours aux intrants phytosanitaires et aux antibiotiques en élevage.

L’antibiorésistance est un sujet particulièrement préoccupant, comme cela a été rappelé. Il est nécessaire de rester très prudent, car l’accord de libre-échange entre l’Europe et les États-Unis pourrait aboutir à un alignement par le bas de la réglementation dans le domaine alimentaire. On sait d’ailleurs que l’antibiorésistance est aujourd'hui un phénomène plus marqué aux États-Unis qu’en Europe.

Ensuite, le projet de loi accorde – et c’est une excellente chose – une priorité à l’installation des jeunes, avec le contrat de génération destiné aux jeunes agriculteurs, la rénovation des aides à l’installation et la suppression de la surface minimum d’installation, remplacée par l’activité minimale d’assujettissement, qui devrait faciliter l’installation progressive, une mesure que nous avons soutenue.

Au cours des débats, nous avons insisté sur la nécessité de prendre en compte la situation des jeunes qui ne disposent pas des diplômes légalement requis pour exercer des activités agricoles.

Afin de faciliter l’accès aux terres agricoles et leur valorisation, le projet de loi a également conforté et étendu le droit de préemption des SAFER. Nous avons souligné le rôle des banques, notamment du Crédit Agricole, pour accompagner les projets dans les territoires. C’est un véritable sujet, qui n’a finalement pas été abordé dans ce texte.

Nous avons évoqué le problème du traitement des déchets, notamment ceux du secteur du bâtiment et des travaux publics. Là encore, il faut être particulièrement vigilant sur les pratiques d’enfouissement ou de dépôt de ces déchets sur les terres agricoles, au détriment du potentiel agronomique, mais également, plus largement, en raison des risques de pollution.

S’agissant du volet consacré à la forêt française, il aurait été souhaitable – nous l’avions indiqué – qu’un projet de loi indépendant y soit consacré. Cependant, ce texte apporte des réponses intéressantes au problème du morcellement de la forêt, notamment. La création des GIEEF est également une bonne mesure.

En revanche, nous n’avons pas encore trouvé les moyens de lutter contre l’affaiblissement de l’industrie de transformation du bois. C’est là l’une des nombreuses aberrations de l’économie de marché, en vertu de laquelle nous perdons des centaines d’emplois dans le secteur et nous exportons notre bois pour réimporter des meubles et du papier.

Sans revenir en détail sur toutes les dispositions contenues dans ce texte, j’indique que celles-ci nous satisfont dans leur grande majorité. Les quelques réserves que je formulerai ici sont inspirées par notre souhait que ce projet de loi d’avenir pour l’agriculture soit suivi d’effets concrets dans nos territoires et qu’il produise des effets positifs dans la vie des agriculteurs.

D’une part, malgré les efforts de la France, la tendance de la politique agricole commune est de s’inscrire, à moyen terme, dans un objectif de libéralisation des échanges et de la réglementation du secteur. Ainsi, la fin des quotas sucriers aura des effets dévastateurs sur l’économie de la Réunion.

Nous avons également reconnu dans le projet de loi le vin comme faisant partie du patrimoine de la France. Pourtant, d’autres combats restent à mener si l’on veut effectivement protéger ce secteur essentiel pour la France face à l’organisation commune du marché vitivinicole, au sein de laquelle les pratiques viticoles et œnologiques tendent à être uniformisées et standardisées. Les premières victoires acquises ces dernières années ne doivent pas nous conduire à baisser la garde. Il faudra bien évidemment maintenir les droits de plantation pour éviter de soumettre la viticulture et les viticulteurs aux lois du marché libéral.

D’autre part, nos politiques restent fortement conditionnées par celles qui sont menées dans le cadre de l’Organisation mondiale du commerce, ainsi que par celles qui sont discutées dans le cadre des accords de partenariats bilatéraux, tel celui du traité transatlantique que j’ai évoqué précédemment. Or, là encore, comment protéger notre élevage contre les exportations de viandes canadiennes vers l’Union européenne ? Le risque est fort de voir la filière viande déstabilisée : les exigences outre-Atlantique en termes de normes de production en matières environnementale, sanitaire et de bien-être animal sont bien inférieures aux nôtres et sont en inadéquation totale avec les exigences des consommateurs français et, plus largement, européens.

Mme Nathalie Goulet. Très bien !

Mme Cécile Cukierman. Enfin, nous avons insisté à plusieurs reprises au Sénat sur l’importance de la dimension sociale, notamment dans le cadre des groupements d’intérêt économique et environnemental.

Le texte n’apporte pas de réponse à la question de la dégradation du revenu agricole, et il n’apporte qu’une réponse imparfaite à la mauvaise répartition de la valeur ajoutée et au déséquilibre des relations commerciales. En effet, les prix d’achat de la production agricole subissent une pression constante à la baisse, alors que les coûts des consommations intermédiaires, eux, ne cessent d’augmenter, qu’il s’agisse du prix de l’énergie, des engrais ou des produits phytosanitaires. Cette double évolution a des conséquences très claires : le revenu agricole, tous secteurs confondus, n’augmente pas.

Pour toutes ces raisons, il paraît indispensable d’encadrer et de réglementer les marges et les pratiques de la grande distribution, avec la double ambition de fournir une alimentation de qualité accessible à tous et une rémunération digne du travail agricole pour l’ensemble des personnes de ce secteur. Nous espérons que le Gouvernement traitera ces questions à bras-le-corps, afin de trouver – enfin ! – des solutions.

Malgré ces craintes et parce que le texte promeut un modèle agricole que nous partageons, le groupe CRC votera le projet de loi d’avenir pour l’agriculture, l’alimentation et la forêt. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.)

Mme la présidente. La parole est à Mme Anne-Marie Escoffier.

Mme Anne-Marie Escoffier. Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, il est des lois qui suscitent des désaccords de fond ; d’autres dont on pense qu’on ne peut pas les éviter ; d’autres, enfin, dont le bien-fondé n’est pas contestable. Le projet de loi d’avenir pour l’agriculture, l’alimentation et la forêt, qui en est arrivé au stade final de la discussion, appartient à cette dernière catégorie et va clore superbement, me semble-t-il, cette session extraordinaire.

Sénateur d’un département dans lequel l’agriculture est une activité fondatrice de son histoire, de sa culture tout entière, de sa philosophie, qui marie l’homme, le territoire et ses produits, je veux saluer ce texte.

Je veux le saluer en ce qu’il est l’expression d’une écoute, d’un débat constructif, issu d’une véritable volonté pragmatique de rapprocher les points de vue du Gouvernement de ceux des deux assemblées.

Le rapporteur de l'Assemblée nationale, M. Germinal Peiro, ne déclarait-il pas voilà quelques jours seulement : « Si le projet de loi est perçu globalement de manière si positive, c’est grâce à la concertation et à la transparence qui ont présidé à sa préparation » ? Les orateurs qui m’ont précédée à la tribune ont salué la même démarche, nourrie par un nombre important d’amendements, dont bon nombre ont été adoptés à l’occasion de la navette.

Il ne me semble pas utile, à ce stade, de reprendre chacun des domaines inscrits dans la loi ; M. le ministre l’a fait, dans un cadre d’une simplicité totale, au travers des quatre priorités fixées par le Gouvernement.

Je me bornerai à me féliciter de la modernité de ce texte, un texte d’avenir qui se projette vers une anticipation opportune et ne se contente pas de corriger des dispositifs antérieurs ou de les réajuster. Voilà un projet qui a une véritable vision de ce que l’agriculture, dans toutes ses dimensions, doit chercher à concilier : performance économique et environnementale, pilier de l’agroécologie, que vous portez avec une conviction sans pareille, monsieur le ministre !

Comment ne pas se féliciter des avancées réalisées en matière de contractualisation, avec la création des groupements d’intérêt économique et environnemental, qui ont pour objet de conforter la transition de l’agriculture vers des systèmes agroécologiques, en s’appuyant sur des dynamiques collectives ancrées dans les territoires ?

La place et le rôle de chacun des acteurs dans le GIEE sont clairement définis, privilégiant les agriculteurs eux-mêmes, sans négliger ni la région, partenaire essentiel dans la définition d’une stratégie au niveau de son territoire, ni les chambres d’agriculture, qui démontrent le rôle privilégié qui est le leur comme expert technique.

J’ai aussi noté avec satisfaction l’introduction de dispositions relatives à la préservation du foncier agricole. J’y suis d’autant plus sensible que, en d’autres temps et d’autres lieux, j’ai milité pour un rééquilibrage de notre territoire, dont personne ne peut croire qu’il est tout entier métropole, au détriment de nos espaces ruraux. Je veux donc saluer les mesures prises pour la protection des terres non urbanisées, avec, notamment, le rôle accru accordé à la commission départementale de la consommation des espaces agricoles et la mission confortée des SAFER, qui avaient besoin, soit dit en passant, d’un véritable toilettage pour retrouver toute leur pertinence dans une gouvernance enfin rénovée.

Un autre volet essentiel du projet de loi touche à l’alimentation, sujet dont l’actualité de ces derniers mois nous a encore permis de mesurer l’importance pour les consommateurs. La France est très attachée à des produits d’une qualité irréprochable. À cet égard, toutes les démarches visant à conjuguer qualité et productivité sont importantes, et même essentielles.

Je rougis à peine de souligner que l’Aveyron est devenu, sur ce plan, un département pionnier, par la volonté de son monde agricole, de précurseurs comme Raymond Lacombe, dont tout le monde garde le souvenir ; ils ont contribué à l’émergence de nouvelles institutions comme l’Institut national de l’origine et de la qualité, l’INAO, et l’Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail, l’ANSES, désormais chargée de délivrer certaines autorisations de mise sur le marché.

Parmi les avancées contenues dans le projet de loi dont on peut se féliciter, je ne voudrais pas omettre les dispositions prises en faveur de la forêt, une richesse insuffisamment mise en valeur jusqu’ici. De fait, il a fallu bien des rapports, bien des études, bien des alertes pour prendre enfin la mesure des bénéfices apportés par nos ressources forestières. Cette prise de conscience s’inscrit plus largement dans la problématique de la transition énergétique et du développement durable, qui représente sans conteste un grand chantier.

Enfin, je voudrais évoquer la place donnée aux agriculteurs eux-mêmes, la reconnaissance de leur savoir-faire comme de leur savoir-être. L’ambition de faire de l’enseignement agricole un outil de promotion sociale et d’insertion professionnelle vient concrétiser ce changement de cap, essentiel aujourd’hui.

Monsieur le ministre, il n’est pas utile que j’énumère de nouveau tous les apports de ce projet de loi, ni que je me fasse la comptable de nos amendements acceptés ou refusés. Pour les membres du groupe RDSE, il s’agit d’un pari collectivement gagné : ce texte va permettre au monde agricole de s’orienter vers une voie d’avenir, bénéfique pour tous. Aussi le voterons-nous, dans un bel élan de conviction partagée ! (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste, du groupe CRC et de l'UDI-UC.)

Mme la présidente. La parole est à Mme Renée Nicoux.

Mme Renée Nicoux. Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, l’adoption d’un texte par la commission mixte paritaire marque le terme de la discussion du projet de loi d’avenir pour l’agriculture, l’alimentation et la forêt. L’accord trouvé entre les sénateurs et les députés, s’il n’a pas recueilli un vote unanime, a permis qu’une majorité confortable se dégage pour entériner le travail accompli par les deux chambres depuis plusieurs mois.

Je tiens à souligner la qualité du travail de nos rapporteurs, Didier Guillaume et Philippe Leroy, ainsi que celle du dialogue qui s’est instauré entre eux et les membres de la commission. Cette volonté de dialogue a permis de trouver, conjointement avec Germinal Peiro, le rapporteur de l’Assemblée nationale, les bonnes formulations, propres à ce qu’une majorité d’entre nous puissent s’accorder sur un texte qui devrait faire date dans l’évolution des pratiques agricoles.

Comme tout texte de loi, celui-ci suscite à la fois de l’enthousiasme et des regrets. Je commencerai par parler des regrets, avant d’aborder les aspects positifs du projet de loi, qui sont nombreux et correspondent à de réelles avancées ; je ne les citerai pas tous, car M. le rapporteur les a déjà énumérés.

L’interdiction des remises, rabais et ristournes pour les produits alimentaires, introduite par le Sénat en seconde lecture, a été supprimée en commission mixte paritaire. Cela est fort regrettable, d’autant que les pratiques irrégulières des grandes surfaces, qui confinent parfois à l’extorsion, ont fait l’objet très récemment d’un communiqué conjoint des ministres de l’agriculture et de l’économie, ceux-ci s’appuyant sur les informations recueillies à l’occasion des enquêtes de la Direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes, dont le rapport est attendu durant l’été.

L’abandon de cette mesure d’interdiction amène à laisser de côté la question de l’équilibre des relations commerciales entre les agriculteurs, les fournisseurs et les distributeurs, dont chacun connaît les imperfections. Il aurait pourtant été souhaitable d’apporter des solutions concrètes.

Je regrette aussi la suppression des alinéas 30 et 31 de l’article 3, que nous avions réintroduits en seconde lecture afin de faciliter la commercialisation des semences au sein des GIEE. Pour justifier leur retrait du projet de loi, on a brandi le risque d’une multiplication de GIEE créés à cette seule fin ; cet argument ne tient pas, car ces groupements ont une vocation tout autre et font l’objet d’un examen attentif de l’administration avant d’être constitués. Toutefois, cette suppression ne porte pas atteinte à la possibilité de procéder à l’échange de semences non couvertes par un certificat d’obtention végétale.

Concernant les dispositions introduites au Sénat et supprimées en commission mixte paritaire, il faut encore évoquer la mesure visant à limiter la dissémination des pesticides hors des parcelles agricoles situées à proximité d’habitations. L’amendement que le Sénat avait adopté en seconde lecture allait pourtant dans le sens que l’on souhaite donner à cette loi : s’engager vers une moindre utilisation des pesticides et faire preuve d’une plus grande vigilance quant à leur incidence sur la santé humaine et sur l’environnement. La suppression de cette disposition est d’autant plus étonnante que cet amendement avait reçu un avis favorable du ministre et du rapporteur.

Quoi qu’il en soit, il va sans dire que les personnes vulnérables comme les enfants ou les personnes âgées, en considération desquelles la loi encadre les pratiques d’épandage autour des écoles, des hôpitaux et des maisons de retraite, sont tout aussi vulnérables lorsqu’elles sont à leur domicile. Par ailleurs, toute personne ne doit-elle pas être considérée comme vulnérable et pouvoir bénéficier de ces mesures de précaution ? Notre collègue Bernadette Bourzai, qui ne pouvait participer à ce débat, m’a demandé de vous faire savoir qu’elle partage ce constat.

Il faut toutefois reconnaître qu’un certain nombre de mesures prévues au même article vont dans le bon sens et s’appuient sur les conclusions du rapport de la mission commune d’information sur les pesticides.

M. Didier Guillaume, rapporteur. On n’est jamais allé aussi loin !