Mme la présidente. Les deux amendements suivants sont identiques.

L'amendement n° I-198 est présenté par Mme Didier, M. Foucaud, Mme Beaufils, M. Bocquet et les membres du groupe communiste républicain et citoyen.

L'amendement n° I-284 est présenté par MM. Gattolin, Placé et les membres du groupe écologiste.

Ces deux amendements sont ainsi libellés :

Après l’article 8 bis

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I. – Le code général des impôts est ainsi modifié :

1° L’article 278-0 bis est complété par un paragraphe ainsi rédigé :

« ... – Les transports publics urbains et réguliers de voyageurs. » ;

2° Le b quater de l’article 279 est complété par les mots : « , à l’exclusion des transports publics urbains et réguliers de voyageurs pour lesquels la taxe sur la valeur ajoutée est perçue au taux réduit mentionné au premier alinéa de l’article 278-0 bis ».

II. – La perte de recettes résultant pour l’État du I ci-dessus est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.

La parole est à M. Éric Bocquet, pour présenter l’amendement n° I-198.

M. Éric Bocquet. Nous avons déjà évoqué globalement la problématique ce matin.

En l’occurrence, cet amendement vise à appliquer aux transports publics de voyageurs, notamment aux transports publics urbains, le taux dévolu aux produits de première nécessité, en considération de leur rôle social essentiel et de leur contribution à la réalisation des objectifs de transition énergétique.

Mme la présidente. La parole est à M. André Gattolin, pour présenter l'amendement n° I-284.

M. André Gattolin. Nous proposons d’appliquer aux transports publics de voyageurs du quotidien, c’est-à-dire aux transports publics urbains, le taux de TVA de 5,5 %, ce taux en la matière ayant été porté l’an passé à 10 % pour financer le crédit d’impôt compétitivité emploi, ou CICE.

Nous avons déjà eu l’occasion de présenter cette disposition plusieurs fois dans cette enceinte ; elle a reçu le soutien du Sénat antérieurement.

Une telle mesure paraît d’autant plus légitime aujourd’hui que les interrogations et inquiétudes relatives à l’avenir de notre système ferroviaire, notamment dans sa dimension la plus locale, ont occupé une grande partie de nos travaux cette année, en particulier lorsque nous avons débattu de la réforme ferroviaire.

Les transports publics urbains du quotidien présentent une utilité sociale, économique et environnementale de premier plan.

En effet, les politiques de transport déployées par l’État et les régions peuvent jouer un rôle fondamental dans la lutte contre les nuisances, les pollutions, les accidents de la route, la dépendance aux hydrocarbures et, bien entendu, le réchauffement climatique.

Par définition, les usagers qui choisissent le train sont autant de personnes qui ne se servent pas de leur voiture, dont l’empreinte écologique est particulièrement importante.

Il est donc crucial de favoriser le report modal de la voiture vers le train si nous voulons vraiment enclencher une transition écologique de la mobilité.

Aussi avons-nous tout intérêt à faire en sorte que le prix du train soit attractif et que l’offre en la matière soit aussi diversifiée que possible. Or la hausse de la TVA, qui s’apparente à une taxe sur le train, va malheureusement en sens inverse !

Pour les millions de personnes qui empruntent tous les jours les transports publics urbains dans le cadre de leurs déplacements logement-travail, les fameux déplacements pendulaires, c’est une double peine : ils effectuent des trajets souvent longs et de plus en plus pénibles, et au prix fort !

Je précise que cela ne permet en rien, au contraire, d’entretenir et de moderniser le réseau ferroviaire, comme il faudrait le faire.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Albéric de Montgolfier, rapporteur général de la commission des finances. Ces différents amendements, qui sont d’inspiration commune, visent à réduire le taux de TVA sur les transports.

Aux yeux de la commission, la question ne doit évidemment pas être négligée. D’ailleurs, comme nous le verrons dans quelques instants lors de l’examen de l’article 9, la réforme des rythmes scolaires a alourdi les charges qui pèsent sur les communes, par exemple en obligeant ces dernières à mobiliser les prestations de transport scolaire une journée de plus par semaine. Le débat sur le taux réduit de TVA a donc son importance.

Certes, la possibilité offerte aux opérateurs de récupérer la TVA peut être une solution. Mais, lorsque cette option n’est pas retenue, faut-il appliquer le taux réduit de TVA à 5,5 % ?

Nous en avions déjà débattu lors du relèvement du taux. Nous étions alors nombreux à trouver un peu curieux de soumettre à un tel impôt un service public déjà largement financé par la fiscalité. Cela renvoie d’ailleurs au débat que nous avions ce matin sur les conditions dans lesquelles les prestations assurées dans le domaine des ordures ménagères, déjà financées par une taxe ou une redevance, sont soumises à la TVA. Le débat sur le taux réduit de TVA pour les transports publics, qui peuvent être considérés comme relevant d’un service de première nécessité, se justifie donc.

Je sais que, pour certains, prendre le métro, c’est un vrai plaisir. N’est-ce pas, cher Roger Karoutchi ? (Sourires.)

M. Roger Karoutchi. Pas pour moi, qui le prends vraiment ! (Nouveaux sourires.)

M. Albéric de Montgolfier, rapporteur général de la commission des finances. Mais je pense effectivement que, pour d’autres, ce n’en est pas vraiment un…

Concrètement, les services de transport à la demande, de transport de personnes handicapées, de transport scolaire ou de transport urbain de voyageurs sont effectivement des services publics de première nécessité, d’où la légitimité du débat.

Mais nous sommes face à la même problématique que ce matin. Comment hiérarchiser les secteurs ? Faut-il réduire le taux de TVA plutôt sur les transports, sur le traitement des ordures ménagères ou sur l’énergie ? Et le risque, c’est évidemment de miter les ressources publiques en appliquant des taux réduits !

C'est pourquoi la commission sollicite le retrait des amendements identiques nos I-197 et I-251, ainsi que de l’amendement n° I-368, et émet un avis défavorable sur les amendements identiques nos I-198 et I-284.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Christian Eckert, secrétaire d'État auprès du ministre des finances et des comptes publics, chargé du budget. Le sujet est bien connu ; nous en avions déjà discuté à la fin de l’année 2013, au moment de fixer les taux qui sont entrés en vigueur le 1er janvier 2014. Il s’agit d’un débat légitime.

Je souhaite toutefois revenir sur un point : les transports publics sont chers mais, contrairement à ce qui a pu être indiqué, les usagers n’en financent pas, bien au contraire, l’intégralité.

M. Philippe Dallier. Heureusement pour eux !

M. Alain Fouché. Ils ne pourraient plus les prendre !

M. Christian Eckert, secrétaire d'État. Comme chacun le sait dans cette enceinte, ces transports sont largement financés par l’État et les collectivités locales. Je tenais à le rappeler.

Pour autant, il est vrai que les transports peuvent représenter un coût pour les usagers. Mais faut-il réduire le taux de TVA pour y remédier ? Des politiques tarifaires sont, me semble-t-il, en train d’être mises en place. N’oublions pas non plus – nous aurons l’occasion d’en reparler – la participation aux investissements en matière d’infrastructures de transport public, ferroviaires ou autres.

Comme je l’ai déjà précisé à de nombreuses reprises, le Gouvernement ne souhaite pas modifier le taux de TVA. La réduction du taux portant sur l’ensemble des transports publics de voyageurs, visée par les deux derniers amendements, représenterait un manque à gagner de un milliard d’euros ! Ce n’est évidemment pas envisageable. Et limiter cette réduction aux seuls transports scolaires ou transports des personnes handicapées, comme le proposent les auteurs d’autres amendements, créerait beaucoup de complexité. Laissons vivre, au moins un certain temps, des taux de TVA qui sont entrés en vigueur le 1er janvier dernier seulement.

Le Gouvernement émet donc un avis défavorable sur les cinq amendements qui viennent d’être présentés.

Mme la présidente. La parole est à M. Roger Karoutchi, pour explication de vote.

M. Roger Karoutchi. Il est très difficile de réparer le mal une fois que celui-ci est fait ! L’erreur a été de porter le taux de TVA de 7 % à 10 % pour les transports publics.

M. Jean Desessard. Exactement !

M. Roger Karoutchi. Certes, revenir maintenant à un taux de 5,5 % pose problème.

Monsieur secrétaire d’État, en Île-de-France, 5,5 millions d’usagers, quotidiennement, prennent soit le métro, soit le RER, soit un train de banlieue. Il n’y a guère de romantisme en l’espèce !

La TVA sur les transports doit demeurer à 10 %, nous dit-on. Or, dans le même temps – nous en avons parlé en fin de semaine dernière –, le Gouvernement demande un plan de modernisation, puis prévoit la mise en place du Grand Paris Express. L’État apporte sa contribution, certes, mais les habitants et des entreprises d’Île-de-France ont aussi payé plus d’impôts pour financer ce projet. Les usagers franciliens devraient-ils supporter en outre un coût des transports supérieur avec une TVA à 10 % ?

C’est fou ! Vous affirmez vouloir redonner du pouvoir d’achat à nos concitoyens, mais vous les taxez davantage lorsqu’ils vont travailler ! Par ailleurs, vous demandez aux collectivités de bloquer le prix des transports et vous refusez que le Syndicat des transports d’Île-de-France, le STIF, augmente les tarifs. Dès lors, ce dernier interroge les collectivités sur ce qu’il doit faire avec un taux de TVA porté de 7 % à 10 % !

Plus personne ne sait qui est responsable de quoi, mais tout le monde sait qu’il faudra payer. Nul ne sait comment ni avec quel argent. Le système ne tient plus !

Vous ne pouvez pas demander à 5,5 millions d’usagers, qui sont bien souvent des travailleurs modestes, qui prennent les transports publics non par plaisir – je tiens à le souligner –, mais par obligation, soit de payer plus d’impôts, soit d’acquitter un titre de transport plus élevé !

Je sais bien, monsieur le secrétaire d'État, que, en Île-de-France, les transports sont financés pour un tiers par les usagers, pour un tiers par les entreprises via le versement transport et pour un tiers par les collectivités.

M. Michel Bouvard. C’est-à-dire les contribuables !

M. Roger Karoutchi. Mais c’est un tout ! Si le Gouvernement veut que des citoyens continuent à vivre et à travailler en Île-de-France, il ne faut pas leur demander de se substituer par une hausse d’impôt ou une augmentation du prix du titre de transport aux collectivités !

Depuis des années, je plaide en faveur d’une remise à plat de l’ensemble du financement des transports en Île-de-France, car entre les contributions liées à l’impôt, les contributions des entreprises via le versement transport et les contributions des usagers par le prix du billet, le système n’a plus de sens.

M. le rapporteur général et M. le secrétaire d’État affirment que l’adoption des présents amendements aura un coût très élevé. Quoi qu’il en soit, il faudra bien trouver des solutions et ne plus se contenter de la constante réponse : « on ne peut pas faire autrement », car des millions d’usagers en Île-de-France ne peuvent pas non plus faire autrement ! (Très bien ! et applaudissements sur les travées de l'UMP. – M. André Gattolin applaudit également.)

M. François Marc. En zone rurale non plus, ils ne peuvent pas faire autrement !

Mme la présidente. Monsieur Bocquet, l'amendement n° I-197 est-il maintenu ?

M. Éric Bocquet. Oui, madame la présidente.

Mme la présidente. Monsieur Requier, l'amendement n° I-251 est-il maintenu ?

M. Jean-Claude Requier. Il l’est également.

Mme la présidente. Monsieur Magras, l'amendement n° I-368 est-il maintenu ?

M. Michel Magras. J’ai bien entendu bien les arguments développés par le rapporteur général et par le secrétaire d’État.

Il avait semblé aux cosignataires de cet amendement que les cas du transport scolaire et du transport des enfants handicapés pouvaient être considérés comme à part, d’autant qu’il s’agit de se mettre en conformité avec une directive européenne. Par ailleurs, nous connaissons tous l’intérêt que notre pays porte à l’éducation de ses enfants.

Néanmoins, j’accepte de retirer cet amendement, mais la question devra de nouveau être débattue, car il s’agit d’un vrai problème.

Mme la présidente. L'amendement n° I-368 est retiré.

Je mets aux voix les amendements identiques nos I-197 et I-251.

(Les amendements ne sont pas adoptés.)

M. Jean Desessard. On va bientôt mettre une TVA sur les vélos ! (Sourires.)

Mme la présidente. Je mets aux voix les amendements identiques nos I-198 et I-284.

(Les amendements ne sont pas adoptés.)

Mme la présidente. L'amendement n° I-201, présenté par M. Foucaud, Mme Beaufils, M. Bocquet et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :

Après l’article 8 bis

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I. – Le code général des impôts est ainsi modifié :

1° L’article 278-0 bis est complété par un paragraphe ainsi rédigé :

« ... – Les remboursements et les rémunérations versés par les communes ou leurs groupements aux exploitants des services de distribution d’eau et d’assainissement ainsi que les taxes, surtaxes, redevances perçues sur les usagers des réseaux d’assainissement. » ;

2° Le b de l’article 279 du code général des impôts est abrogé.

II. – La perte de recettes résultant pour l’État du I ci-dessus est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.

La parole est à M. Éric Bocquet.

M. Éric Bocquet. Je serai bref, car le sujet a déjà partiellement été évoqué ce matin.

Le présent amendement a pour objet de rétablir le taux réduit de TVA à 5,5 % en ce qui concerne les remboursements et les rémunérations versés par les communes ou leurs groupements aux exploitants des services de distribution d’eau et d’assainissement, ainsi que les taxes, surtaxes et redevances perçues sur les usagers des réseaux d’assainissement.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Albéric de Montgolfier, rapporteur général de la commission des finances. Après les déchets, les transports, nous abordons l’eau !

Cet amendement vise à passer au taux réduit de TVA à 5,5 % pour les services de distribution d’eau et d’assainissement, ainsi que pour les taxes, surtaxes et redevances perçues sur les usagers des réseaux d’assainissement.

Le débat est toujours le même : la distribution d’eau est-elle davantage un service public que les transports ou la gestion des déchets ? Si nous adoptons des taux de TVA réduits pour tout, il faudra en assumer le coût ! Il s’agit ici de masses extrêmement importantes.

Or l’état de nos finances ne nous permet pas, sauf à envisager des compensations importantes par ailleurs, de revenir à un taux de TVA réduit sur tel ou tel service public. Le débat est certes légitime, d’autant qu’il s’agit souvent de parafiscalité. Cependant, nous devons veiller à maintenir les équilibres budgétaires. La commission émet donc un avis défavorable.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Christian Eckert, secrétaire d'État. Le Gouvernement partage strictement l’avis de la commission.

Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° I-201.

(L'amendement n'est pas adopté.)

Mme la présidente. Je suis saisie de trois amendements faisant l'objet d'une discussion commune.

L'amendement n° I-146, présenté par Mme Jouanno et M. Canevet, est ainsi libellé :

Après l’article 8 bis

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I. – Le 1° du 4 de l’article 298 du code général des impôts est ainsi modifié :

1° Au a, les mots : « utilisées comme carburant mentionnées » sont remplacés par les mots : « et gazoles utilisés comme carburants mentionnés » et les mots : « celles utilisées » sont remplacés par les mots : « ceux utilisés » ;

2° Au b, le mot : « gazoles » est remplacé par les mots : « carburants essence ou gazole utilisés en complément par des véhicules hybrides électriques ».

II. – Le 1° du I entre en vigueur le 1er janvier 2015.

III. – Le 2° du I entre en vigueur le 1er janvier 2016.

Cet amendement n'est pas soutenu.

L'amendement n° I-225 rectifié, présenté par M. Desessard, Mme Archimbaud et les membres du groupe écologiste, est ainsi libellé :

Après l’article 8 bis

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le 1° du 4 de l’article 298 du code général des impôts est ainsi modifié :

1° Au a, les mots : « utilisées comme carburants mentionnées » sont remplacés par les mots : « et gazoles utilisés comme carburants mentionnés » et les mots : « celles utilisées » sont remplacés par les mots : « ceux utilisés » ;

2° Au b, le mot : « gazoles » est remplacé par les mots : « carburants essence ou gazole utilisés en complément par des véhicules hybrides électriques ».

La parole est à M. Jean Desessard.

M. Jean Desessard. Le présent amendement ressemble beaucoup au précédent, qui n’a pas été défendu.

C’est aujourd’hui un fait établi, le diesel est un carburant nocif, à la fois pour l’environnement et pour la santé.

Le 12 juin 2012, le Centre international de recherche sur le cancer, le CIRC, une agence de l’Organisation mondiale de la santé, a classé les particules fines émises par le diesel dans la catégorie des substances les plus dangereuses pour l’homme, celle des cancérigènes certains.

D’ailleurs, la semaine dernière, l’ensemble des groupes ont reconnu que le diesel était nocif pour la santé.

Les résultats des études sur le nombre de décès par an en France dus au diesel oscillent entre 15 000 et 42 000 morts. Même si l’on ne retient que l’estimation basse, cela représente tout de même cinq fois le nombre de tués sur les routes chaque année ! Le doute n’est donc plus permis concernant les incidences du diesel sur la santé.

Pourtant, malgré ces éléments objectifs, rendus publics et connus de tous, notre pays continue de favoriser fiscalement l’usage du diesel. J’insiste bien sur le verbe « favoriser ». Souvent, on pense que les Verts veulent taxer davantage le diesel que l’essence. Je ne dis pas que nous serions opposés à cette idée, mais aujourd'hui nous proposons simplement de taxer le diesel autant que l’essence.

C’est pourquoi, dans la continuité de la proposition de loi de ma collègue Aline Archimbaud, examinée la semaine dernière par notre assemblée, nous vous proposons une série d’amendements tendant à réduire par le biais de la fiscalité la place du diesel dans nos déplacements.

Le premier d’entre eux vise le parc automobile des entreprises. Aujourd’hui, 96 % de ces véhicules fonctionnent au diesel pour une raison simple : la TVA sur le diesel est déductible, contrairement à celle sur l’essence. Il s’agit d’une aberration fiscale qui favorise l’usage d’un carburant nocif.

Cet amendement a pour objet de rétablir l’égalité en supprimant la déductibilité de la TVA sur l’utilisation de carburant diesel.

En revanche, pour introduire un cercle vertueux, nous proposons que les véhicules hybrides, en raison de leur moindre consommation en ressources fossiles et de leur incidence plus réduite sur la santé, puissent bénéficier de cette déduction de TVA.

De plus, l’adoption du présent amendement permettrait de réaliser des économies pour l’État, de l’ordre de 350 millions d’euros. Tout à l’heure, on recherchait 1 milliard d’euros : en voilà un tiers de trouvé !

Il s’agit donc d’une mesure juste, équilibrée et budgétairement responsable qui va dans le sens d’une prise en compte de la santé environnementale que nous appelons de nos vœux. (Applaudissements sur les travées du groupe écologiste.)

Mme la présidente. L'amendement n° I-226 rectifié, présenté par M. Desessard, Mme Archimbaud et les membres du groupe écologiste, est ainsi libellé :

Après l’article 8 bis

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le 1° du 4 de l’article 298 du code général des impôts est ainsi modifié :

1° Au b, le mot : « gazoles » est remplacé par les mots : « carburants essence ou gazole utilisés en complément par des véhicules hybrides électriques » ;

2° Après le e, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« ... les gazoles utilisés comme carburants mentionnés au tableau B du 1° du I de l'article 265 du code des douanes utilisés pour des taxis. »

La parole est à M. Jean Desessard.

M. Jean Desessard. Cet amendement…

M. Roger Karoutchi. C’est le même que le précédent ! N’est-il pas déjà défendu ?

M. André Gattolin. Il est comme un moteur diesel ! (Sourires.)

M. Jean Desessard. J’espère que vous n’allez pas me taxer !

M. Philippe Dallier. On deviendrait riche !

M. Jean Desessard. Dans la lignée du précédent amendement, nous proposons cette fois de mettre fin à la déductibilité de TVA sur le diesel pour les taxis. Il s’agit par conséquent d’un amendement de repli, puisque le précédent visait tous les véhicules de société.

Aujourd’hui, les taxis peuvent récupérer 100 % de la TVA sur leurs achats de diesel, mais pas sur leurs achats d’essence, y compris sans plomb. Il s’agit là d’un avantage fiscal incompréhensible lorsque l’on connaît les effets du diesel sur la santé et l’environnement, surtout en agglomération.

Il est temps que les pouvoirs publics mettent fin à cette différenciation fiscale injustifiée. Nous ne souhaitons toutefois pas pénaliser le pouvoir d’achat des taxis, qui doivent faire face à de nombreuses charges, notamment à un crédit très lourd pour l’acquisition de leur licence. Nous souhaitons simplement éviter qu’ils ne perpétuent, par l’achat de véhicules diesel pour une raison d’économie, une filière condamnée.

C’est pourquoi nous proposons là encore une mesure de contrepartie pour que les véhicules hybrides bénéficient de la déduction de TVA, afin que les taxis profitent de conditions avantageuses pour renouveler leur parc automobile dans une optique plus respectueuse de l’environnement.

Je ne sais pas, mes chers collègues, s’il vous arrive d’emprunter le RER…

MM. Alain Gournac et Roger Karoutchi. Oui !

M. Jean Desessard. … mais, tard le soir, peut-être prenez-vous le taxi et discutez-vous avec le chauffeur, qui conduit une Prius hybride, par exemple. On est content de monter dans ce type de véhicule, parce qu’on sait que c’est une voiture moins polluante que les autres et peu bruyante. Or le chauffeur de taxi ne tarde pas à vous expliquer qu’il ne peut pas récupérer la TVA sur l’essence qu’il achète, contrairement à celui qui a une voiture diesel, alors qu’on sait pourtant que le diesel est nocif. Ne trouvez-vous pas injuste cette situation ?

Je vous propose donc, mes chers collègues, d’adopter les deux amendements que je viens de vous présenter.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Albéric de Montgolfier, rapporteur général de la commission des finances. La commission n’est pas favorable au diesel, dont on connaît les effets. Mais régler abruptement cette question au travers de deux amendements fiscaux permettra-t-il aux entreprises ou aux taxis d’adapter leur parc ?

Mon cher collègue, vous venez de citer une marque de voitures qui n’est pas française…

M. Jean Desessard. Mais qui est produite en France, à Valenciennes !

M. Albéric de Montgolfier, rapporteur général de la commission des finances. Je vous l’accorde. Cela étant, en dehors des aspects fiscaux – c’est là la question –, si le développement du parc de véhicules hybrides reste peu important, c’est certainement en raison de la faiblesse actuelle de l’offre de véhicules adaptés. Très peu de marques développent ces modèles hybrides.

M. Albéric de Montgolfier, rapporteur général de la commission des finances. C’est vrai, comme d’autres marques, mais, quoi qu’il en soit, il existe actuellement très peu d’offres commerciales de véhicules à un prix compétitif et abordable permettant l’adaptation du parc de taxis ou de véhicules d’entreprise.

Si la fiscalité écologique est une réelle question, pour autant, la commission ne souhaite pas la voir résolue par le biais de deux amendements, qui auraient pour conséquence de créer une charge supplémentaire pour ces entreprises sans leur laisser le temps d’adapter la composition de leur parc automobile.

L’analyse qui vaut pour l’amendement n° I-225 rectifié s’applique aussi à l’amendement n° I-226 rectifié, même si on peut en effet se dire que le parc des taxis parisiens pourrait inclure une flotte plus écologique. Mais encore faut-il que les constructeurs proposent une offre suffisante. Je pense que cela va se faire avec le temps et que les véhicules hybrides vont monter en puissance.

Cela étant, l’adoption de ces amendements conduirait à fragiliser davantage encore la profession de taxi et les entreprises, qui ont besoin d’un peu de temps pour adapter leur parc.

C’est pourquoi, sans méconnaître l’intérêt du sujet, la commission a émis un avis défavorable sur les amendements nos I-225 rectifié et I-226 rectifié.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Christian Eckert, secrétaire d'État. Le Gouvernement souhaite protéger les intérêts de la France, ce qui implique d’éviter de se faire condamner par la communauté pour manquement aux règles.

Mesdames, messieurs les sénateurs, la règle générale pour la TVA est d’être déductible. Il existe des exceptions, me direz-vous, que M. Desessard a citées. Ces exceptions peuvent perdurer en vertu d’une règle que j’ai évoquée ce matin, qui est la clause de gel : tout ce qui n’était pas déductible avant 1979 peut le rester. On peut évoluer vers une règle plus conforme au droit européen, ce qui signifie que l’on ne pourra plus alors y revenir puisque l’on est sorti de la phase de gel. Donc, aujourd’hui, la TVA sur le gazole est déductible et les règles communautaires ne permettent pas de revenir sur ce point. Ce n’est pas plus compliqué !

Par conséquent, le Gouvernement est défavorable à ces amendements qui ont le même effet. Je ne peux pas vous laisser mettre notre pays dans une situation de non-conformité par rapport au droit européen.

Je ne veux pas engager de nouveau le débat, nous l’avons déjà eu, sur la nocivité du gazole et sur les caractéristiques de l’industrie automobile française. Ces points sont tous connus, ont été débattus, mais, je le répète, rendre non déductible la TVA sur le gazole irait à l’encontre de toutes les règles communautaires. Cela nous vaudrait à coup sûr une condamnation devant la Cour de justice de l’Union européenne qui ne manquerait pas d’être saisie, et donc des centaines de millions d’euros à rembourser, voire des amendes à régler.