Mme la présidente. La parole est à M. André Gattolin.

M. André Gattolin. Madame la présidente, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, permettez-moi tout d’abord de vous livrer une confidence un peu personnelle. (Exclamations amusées sur les travées du groupe socialiste et républicain.)

À l’automne, quand je partage avec vous un mois de débats denses et passionnés, je me laisse un peu gagner par l’euphorie à l’idée de faire le budget de la France.

Seulement, à l’été suivant, quand je partage, toujours avec vous, cette petite après-midi à discuter de son exécution, je me demande plutôt si nous n’avons pas perdu un mois à l’automne…

Ce qui déclenche chez moi ce dépit, mes chers collègues, c’est notamment la lecture, dans l’exposé des motifs du projet de loi, de la phrase suivante : « Les dépenses de l’État sont significativement inférieures à l’autorisation parlementaire, témoignant ainsi d’une gestion 2014 particulièrement sérieuse. »

M. Philippe Dallier. Ce n’est pas la Cour des comptes qui le dit !

M. André Gattolin. C’est dit et écrit avec une telle candeur administrative…

M. Christian Eckert, secrétaire d'État. C’est une politique !

M. André Gattolin. Pour mesurer l’ampleur de cette performance, rappelons d’abord que l’article 40 de la Constitution interdit aux parlementaires toute dépense. L’autorisation parlementaire est donc surtout une « auto-autorisation » gouvernementale.

À cela s’ajoute la réserve de précaution, chaque année plus importante et complètement détournée de son objet. Se succèdent ensuite les annulations de crédits, gelés, surgelés, congelés bientôt, peut-être, les redéploiements sur lesquels nous ne votons pas toujours, et les manœuvres de débudgétisation autour des PIA, les programmes d’investissements d’avenir.

C’est vrai qu’en 2014, pour les investissements d’avenir dédiés à l’écologie, par exemple, on a dépensé 366 millions de moins que l’autorisation parlementaire. Devons-nous pour autant y voir le signe d’une gestion sérieuse ? Sincèrement, je ne le crois pas. L’exécution de notre budget 2014 fournit une belle illustration de la difficulté qu’il y a à plaquer cette logique comptable sur une économie.

On postule comme objectif la réduction du déficit ; on procède à des coupes claires dans les dépenses publiques ; on constate ensuite un mystérieux recul des recettes fiscales de 10 milliards d’euros par rapport à la loi de finances initiale, et, à la fin, le déficit de l’État augmente d’à peu près autant qu’en 2013.

M. André Gattolin. Et tout cela alors même qu’un contexte exogène favorable nous maintient la tête hors de l’eau : la BCE mène une politique des plus accommodantes ; l’euro s’est déprécié par rapport au dollar et le prix du baril s’est écroulé à la faveur d’une concurrence entre producteurs.

De plus, notre dette bénéficie de taux très bas, dont il serait sans doute présomptueux de considérer qu’ils ne reflètent que la qualité intrinsèque de nos obligations.

M. Philippe Dallier. Conclusion ?...

M. André Gattolin. Ainsi, les écologistes partagent le constat du caractère préoccupant de la situation de nos finances publiques, mais ils contestent les moyens aujourd’hui mis en œuvre pour y répondre.

Pour autant, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, il ne doit pas y avoir d’ambiguïté : les écologistes prônent une substantielle évolution de nos modes de vie pour les rendre plus durables. Nous contestons donc non pas le principe des efforts, mais la nature de ceux qui nous sont proposés.

À quelques mois de la conférence de Paris sur le climat, il serait temps de prendre conscience que le changement climatique représente, entre autres risques, une bombe à retardement financière. D’innombrables rapports d’économistes, dont le plus célèbre reste celui de Nicholas Stern, détaillent le coût faramineux de l’inaction.

Alors, quand on voit le traitement réservé à l’écologie, budget après budget, il y a quand même de quoi s’inquiéter.

Le même raisonnement s’applique à presque tous les secteurs de l’économie. Ainsi, une étude récente a chiffré le coût des pollutions chimiques dans l’Union européenne à 157 milliards d’euros annuels.

Je pourrais également citer le coût de la pollution de l’air, qui, sur l’initiative du groupe écologiste, fait actuellement l’objet d’une commission d’enquête du Sénat, ou encore le coût de la production agroalimentaire, dont la responsabilité est avérée dans les épidémies d’obésité et de diabète, très dispendieuses pour nos finances publiques.

Je n’oublie pas, évidemment, le coût du nucléaire : il se trouve que le déficit constaté en 2014 du compte des participations financières de l’État découle de l’achat de titres AREVA au CEA, uniquement pour financer le démantèlement de ses installations nucléaires. C’est bien une énième illustration de l’absence de prise en compte des coûts réels du nucléaire...

Pour toutes ces raisons, les écologistes considèrent que la réduction des crédits ne peut être posée comme l’objectif irréfragable de la politique budgétaire, car un tel choix ne nous permet pas d’envisager les réformes de structure dont nous avons besoin pour redresser durablement nos finances.

C’est d’ailleurs en ce sens que nous avions défendu une proposition de loi de notre collègue députée Eva Sas visant à introduire des indicateurs alternatifs plus représentatifs de la santé de notre pays qu’un simple agrégat comptable.

Grâce au travail du rapporteur Antoine Lefèvre, que je salue, le Sénat a définitivement adopté cette proposition de loi en première lecture, dans le but d’en permettre l’application rapide. À cet égard, pouvez-vous nous préciser, monsieur le secrétaire d’État, si cette loi sera bien appliquée dès le projet de loi de finances pour 2016 ?

À cette question de l’objectif et des indicateurs vient s’ajouter la politique du Gouvernement en faveur des entreprises. En effet, les économies demandées aux Français ne servent pas qu’à satisfaire l’orthodoxie budgétaire : elles financent également des baisses de cotisations et des dépenses fiscales pour les entreprises. Sont-elles pour autant toutes efficaces ?

Le CIR, ce crédit d’impôt recherche qui coûte environ 6 milliards d’euros, a déjà été étrillé dans plusieurs rapports, où l’on met en évidence les indéniables effets d’aubaine auxquels il donne lieu.

Le CICE, le crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi, coûte déjà, quant à lui, 10 milliards d’euros environ, et tout porte à croire, eu égard à son impact très limité sur l’emploi, qu’il a lui aussi été massivement détourné de ses objectifs.

Toutefois, puisque sa réorientation a fait l’objet de subtiles tractations lors du congrès de Poitiers, il nous est encore permis d’espérer. C’est donc avec une grande impatience, probablement comme vous, monsieur le secrétaire d’État, que nous attendons le rapport que le parti socialiste doit publier à ce propos le 27 juillet prochain.

En ce qui concerne l’obsession des économies tous azimuts, il semble, en revanche, que le ton est donné pour le PLF 2016 : l’écologie est de nouveau sacrifiée ! (Mais non ! sur les travées du groupe socialiste et républicain.)

Et à ceux qui nous expliquent qu’il faut compter avec les dépenses fiscales, j’aurais tendance à répondre que les dizaines de milliards de dépenses fiscales au profit des énergies fossiles et des polluants ne plaident pas en ce sens.

Vous l’aurez compris, mes chers collègues, les écologistes sont très réservés sur l’orientation de nos finances publiques, mais notre vote porte aujourd’hui sur la loi de règlement.

Malgré le dépit dont je vous ai fait part en commençant, et malgré des critiques plus sérieuses sur l’usage des PIA, les écologistes considèrent qu’il n’y a pas lieu de rejeter les comptes 2014.

Nous voterons donc ce projet de loi de règlement. (Exclamations amusées sur les travées de l'UDI-UC et du groupe Les Républicains.)

M. Philippe Dallier. Quel soulagement !...

M. Francis Delattre. Au prix de quelles contorsions !

M. André Gattolin. Mais je vous indique, monsieur le secrétaire d’État, que, s’agissant du projet de loi de finances pour 2016, nous serons un petit peu plus difficiles à convaincre... (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain et du RDSE.)

Mme la présidente. La parole est à Mme Marie-France Beaufils.

Mme Marie-France Beaufils. Madame la présidente, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, un pays peut présenter un excédent budgétaire primaire sans que cette situation soit le signe d’une bonne santé économique et sociale.

Comme nul ne l’ignore, la France demeure à la recherche, depuis fort longtemps désormais, de ce que l’on appelle un « excédent primaire ». Selon les chiffres disponibles, il manque actuellement de 30 à 40 milliards d’euros pour que ce soit le cas.

Nous avons entendu hier de nombreuses déclarations sur ce que devraient faire les Grecs, certains mettant même en cause l’expression démocratique du peuple grec, qui refuse de céder aux exigences de la troïka.

Si étrange que cela puisse paraître, le budget de l’État grec a obtenu en 2014 un résultat moins dégradé que celui de l’État français, avant paiement des intérêts de sa dette. Mais cet excédent budgétaire est le produit de politiques d’austérité que la population vient de rejeter par référendum. Rappelons, à cet égard, la chute des salaires et pensions de 25 % à 50 % pour les couches moyennes et modestes, quand les plus riches sont, eux, encore plus riches.

Ce rejet de l’austérité progresse dans d’autres pays européens, et la France, elle aussi, doit s’interroger sur l’accroissement de la pauvreté, l’aggravation des inégalités, l’augmentation continue du chômage, et ce alors même que les plus riches le sont toujours davantage, comme le traduit l’augmentation du produit de l’ISF en 2014.

À l’occasion de ce débat sur l’orientation des finances publiques et de l’examen de ce projet de loi de règlement, interrogeons-nous donc sur certains choix.

Cela fait cinq ans que la valeur du point d’indice des fonctionnaires n’a pas été relevée. On constate un déficit de main-d’œuvre grandissant dans la fonction publique : 50 000 postes demeurent inoccupés dans les services de l’État et les établissements publics, nous dit-on. Mais 1 600 euros par mois pour un professeur certifié débutant, est-ce une rémunération qui peut attirer les vocations de pédagogue et de formateur ?

Autre exemple : il a été décidé de priver en quatre ans les collectivités locales de 28 milliards d’euros, en cumulé de ressources budgétaires normalement dues, puisque la DGF ne fait que compenser des recettes fiscales antérieurement perçues. Rappelons que les collectivités locales ne sont dépositaires que de moins de 10 % de la dette publique !

Selon une étude de l’Association des maires de France, la réduction de 1,5 milliard d’euros de dotation en 2014 a causé 4,3 milliards d’euros de perte pour notre économie. Cela signifie que la baisse réalisée sur les dotations se révèle moins élevée que la perte de recettes fiscales et sociales liée aux moindres investissements locaux.

Cette baisse des dotations est largement combattue et contestée par les élus et les populations. Elle se traduit par une chute des travaux engagés, mais aussi par une réduction des services rendus à la population. Pourquoi poursuivre dans cette orientation ?

À l’évidence, les politiques de restriction de la dépense publique montrent aujourd’hui leurs limites : les déficits publics ne diminuent pas et la dette publique continue de bien se porter !

Que la situation du budget de l’État ne s’améliore que par la baisse des taux d’intérêt de la dette publique est tout simplement significatif des limites des politiques d’austérité.

De plus, la dépense fiscale continue, elle aussi, de se bien porter. Dans le budget 2014, la diminution des recettes fiscales est imputable, en totalité, à la baisse du rendement d’un impôt sur les sociétés miné par les niches fiscales et, entre autres, par le CICE et par le CIR !

Le crédit d’impôt recherche, sans garantie que des moyens accrus soient consacrés à la recherche et développement, ce sont 160 euros d’impôt en plus pour chaque contribuable ! Le rapport de la commission d’enquête sur le sujet nous aurait probablement permis de mieux apprécier cette réalité... s’il avait été adopté en commission !

Le crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi, même moins élevé que prévu, coûte, pour sa part, 300 euros par contribuable, sans que l’emploi et la compétitivité soient au rendez-vous.

Les allégements de cotisations sociales, ce sont 850 euros d’impôt en plus !

Le coût du travail en France n’aura jamais été aussi allégé qu’en ce moment. Pourtant, le nombre de personnes privées d’emploi bat, mois après mois, des records !

Le régime des groupes, qui permet aux entreprises transnationales à base française d’optimiser leurs impôts en toute légalité, ce sont 1 200 euros d’impôt en plus à payer pour les contribuables ordinaires !

Et les intérêts de la dette, ce sont environ 1 200 euros que chacun contribue à payer, salariés, retraités et leurs familles, même non imposés sur le revenu, particulièrement par l’intermédiaire de la TVA. Ceux qui en profitent sont nos créanciers, et plus précisément les marchés financiers.

Cette politique budgétaire de réduction à tout prix de la dépense publique, généreuse quant à la fiscalité des entreprises, mais sans aucune contrepartie tangible dans le domaine de l’emploi et en termes d’amélioration du tissu économique, se double d’une démarche calamiteuse en matière de politique sociale.

Bas salaires et sous-emploi chronique continuent de saper les bases de la sécurité sociale, et la réduction des déficits sociaux - encore 13 milliards d’euros environ cette année -, doit beaucoup plus à la modération des dépenses et des prestations qu’à autre chose.

Le redressement des comptes sociaux ne passe pas par de nouveaux allégements de cotisations, pas plus que par la baisse des retraites, la diminution des remboursements médicaux, l’étranglement des établissements hospitaliers, les vacances de postes de personnel soignant ou les déserts médicaux, qui s’étendent dans nos villes et nos campagnes.

On voit, au travers de ce projet de loi de règlement et des orientations des finances publiques, les conséquences logiques de la mise en œuvre du dernier traité européen, qui n’a jamais été renégocié, contrairement aux engagements pris juste avant l’élection présidentielle de 2012. Ce traité, adopté au Parlement, et majoritairement dans cette assemblée, n’avait pas recueilli notre assentiment. La situation actuelle nous conforte quant à la justesse de notre choix.

La situation en Grèce nous rappelle quel est le résultat d’une construction européenne qui a soutenu les gouvernements dont les Grecs ont aujourd’hui décidé de se libérer. Il est, à notre avis, du devoir de la France d’aider le gouvernement que les Grecs se sont donné pour sortir leur pays du marasme dans lequel il se trouve.

Pour ce qui concerne notre pays, l’exigence de la sortie des politiques d’austérité est une nécessité, notamment parce qu’elles sont le ferment et le terreau de nouvelles inégalités sociales, de nouvelles confrontations, de la montée de l’intolérance, de la xénophobie et des courants politiques qui en ont fait leur fonds de commerce. Nous n’avons nulle envie que, dans notre pays, les plus pauvres soient les boucs émissaires des difficultés des moins pauvres qu’eux.

L’affaire UberPop a montré la nocivité de ce système qui, sous couvert de répondre à un besoin, s’attaque en fait au fondement de notre modèle social et laisse croire que, en exerçant plusieurs métiers, on peut échapper à une vie précaire. Tout cela parce que la logique des bas salaires est la marque de fabrique des politiques qui se développent au sein de l’Union européenne, au détriment des capacités de développement de chaque pays...

J’ai participé au déplacement de la délégation du bureau de la commission des finances en Espagne et au Portugal. Nous avons constaté sur place que ces politiques, et particulièrement celle des bas salaires, n’ont eu pour résultat que le déménagement des activités économiques d’un pays de l’Union vers un autre pays européen. J’en veux pour exemple l’installation des centres d’appel français au Portugal.

Il est temps que la construction européenne se fixe enfin des objectifs ambitieux dans les domaines économique et social.

La réduction des déficits et de la dette publics passe par un changement total d’orientation des politiques budgétaires, en France également. Les défis de la formation des salariés et de la jeunesse, la réponse à la crise du logement, la nécessité de réaliser des infrastructures décisives pour un aménagement du territoire pertinent, la mise en œuvre de la transition énergétique, sont autant de priorités que nous devons poursuivre.

L’argent public ne doit pas être gaspillé en dépenses fiscales et en dispositifs incitatifs ne débouchant sur aucun résultat. Il doit servir plus utilement. Le secteur bancaire doit mieux participer à financer les investissements porteurs de dynamique économique, plutôt que de s’inscrire dans la spéculation.

Partir des besoins collectifs pour y répondre et créer les conditions d’une croissance d’un type nouveau, c’est, nous semble-t-il, la seule voie possible pour le redressement de notre pays.

N’ayant pas voté la loi de finances initiale, nous ne voterons pas ce projet de loi de règlement. (Applaudissements sur les travées du groupe CRC.)

Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Claude Requier.

M. Jean-Claude Requier. Mme la présidente, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, comme chaque année à cette période, il nous revient la tâche de nous prononcer sur le règlement du budget de l’année précédente et sur les perspectives budgétaires pour l’année suivante.

Je souhaite faire remarquer, tout d’abord, que les conditions de transmission des documents relatifs à cet exercice par le Gouvernement n’ont pas été satisfaisantes. Il n’est guère acceptable que le Parlement reçoive les principaux documents – projet de loi de règlement, perspectives des finances publiques – la veille au soir de leur examen en commission et l’avant-veille de l’examen en séance.

L’année 2014 aura été la troisième année consécutive de croissance et d’inflation quasi nulles. Dans ces conditions particulièrement défavorables, l’effort de redressement des finances publiques s’est malgré tout poursuivi, sans toutefois parvenir à ramener le déficit public en dessous du seuil de 3 % ni à enrayer l’augmentation de la dette, qui approche inexorablement 100 % du PIB.

Sur ce point, chacun tient une part de responsabilité depuis pas moins de quatre décennies, mais singulièrement depuis 2008, année à partir de laquelle l’endettement s’est dangereusement accéléré. Le troisième trimestre de 2014 aura vu la dette publique dépasser la barre symbolique des 2 000 milliards d’euros…

Le niveau élevé de l’endettement public rend nos finances particulièrement sensibles à une baisse du taux de croissance ou à une remontée, même faible, des taux d’intérêt. Comme l’a montré le rapporteur général, une simple augmentation d’un demi-point des taux d’intérêt sur la dette aurait des effets majeurs à court et à moyen terme sur l’alourdissement de la charge de cette dette. À cet égard, la baisse des recettes enregistrée l’an passé est inquiétante. C’est donc un véritable enjeu de soutenabilité de nos finances, et même de souveraineté dans la mesure où notre dette publique est détenue majoritairement par des créanciers étrangers.

Les perspectives des finances publiques pour 2016 et au-delà s’inscrivent dans la continuité du programme de stabilité 2015-2018, présenté en avril dans le cadre du Semestre européen.

À ce titre, je constate avec satisfaction que le programme de stabilité de la France a bien été accepté par la Commission européenne, malgré la menace d’une procédure pour déficit excessif.

Comme nous l’avions exprimé en avril, notre groupe se félicite de l’objectif de réduction du déficit public à 3 % du PIB à l’horizon 2017. Il est impératif de maintenir le cap du retour aux critères définis par le Pacte de stabilité et de croissance, à la fois pour préserver l’avenir de nos finances publiques et pour démontrer le sérieux de la France à nos partenaires européens, alors que la zone euro est de nouveau plongée dans une grande incertitude, liée à la situation de la Grèce, dont nous avons débattu hier et dont nous serons certainement amenés à discuter encore.

En la matière, nous avons de réelles marges de progression. Comme l’a souligné le rapporteur général en commission des finances, la France se situe actuellement dans la moyenne basse des pays de la zone euro en termes de réduction du déficit. Or, si nous voulons conserver une signature et un discours crédibles, il nous faut impérativement corriger cela.

Les années 2015-2017 seront marquées par la mise en œuvre des mesures en faveur de l’investissement annoncées par le Premier ministre, le 8 avril dernier, pour un montant total de 2,5 milliards d’euros, ainsi que par le déploiement du CICE, mais également du pacte de responsabilité. Nous saluons ces efforts en matière d’investissement, même s’ils restent relativement modestes au regard des besoins de nos territoires.

En revanche, nous regrettons que les évolutions anticipées du taux de prélèvement obligatoire et de la dépense publique restent à peu près constants et à des niveaux élevés, respectivement 44,4 % et 55,4 % en 2015, et 44,3 % et 54,7 % en 2016. Ce niveau élevé des impôts, des prélèvements obligatoires et de la dépense publique, véritable « mal français », pèse lourd dans le budget des ménages, notamment des plus faibles revenus, tandis que les importantes baisses de charges pour les entreprises créent trop souvent des effets d’aubaine.

Il faut rendre notre politique fiscale plus efficiente, sans décourager les acteurs économiques sur lesquels repose in fine la reprise.

Ainsi, nous soutenons le plan de consolidation budgétaire de 50 milliards d’euros et les mesures supplémentaires d’économies de 4 milliards d’euros en 2015 et de 5 milliards d’euros en 2016, qui concentrent les efforts sur la réduction des dépenses. Les collectivités en supportent une part importante, à hauteur de 11 milliards d’euros.

À ce titre, nous notons que, en 2014, la dette des collectivités a baissé de 800 millions d’euros, tandis que celle de l’État et des administrations de sécurité sociale a continué de croître. Parallèlement, la dotation globale de fonctionnement a été réduite et l’ODELE, l’objectif national d’évolution de la dépense publique locale, devrait de nouveau être révisé à la baisse en 2016. Il faut reconnaître que des efforts de plus en plus importants sont sans cesse demandés aux collectivités, sans que celles-ci bénéficient toujours de contreparties !

État, collectivités, sécurité sociale : toutes les administrations publiques sont mobilisées pour l’effort de redressement des finances publiques, dans un contexte national, européen et même mondial de plus en plus incertain. Le Gouvernement doit faire preuve de la plus grande vigilance afin d’atteindre les objectifs budgétaires qu’il s’est fixés et dont dépendent l’avenir de notre pays, plus exactement la pérennité de notre modèle social, la reprise de notre économie et la protection de nos concitoyens les plus faibles.

En partenaires attentifs, nous soutenons son action. C’est pourquoi notre groupe, à une très large majorité de ses membres, votera le projet de loi de règlement du budget et d’approbation des comptes de l’année 2014. (Très bien ! et applaudissements sur les travées du RDSE, du groupe écologiste et du groupe socialiste et républicain.)

Mme la présidente. La parole est à M. Richard Yung.

M. Richard Yung. Madame la présidente, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, je centrerai mon propos sur le projet de loi de règlement du budget et d’approbation des comptes de l’année 2014.

Je rappelle le sens de l’exercice : il s’agit de constater que le budget a été exécuté convenablement, c'est-à-dire selon les règles.

M. Francis Delattre. C’est un peu plus que cela, tout de même !

M. Richard Yung. Ces comptes ont été validés par la Cour des comptes,...

M. Francis Delattre. Avec quelques observations !

M. Didier Guillaume. Mais ils sont validés !

M. Richard Yung. ... laquelle n’est pas d’une tendresse particulière.

M. Philippe Dallier. On peut le dire ! (Sourires.)

M. Richard Yung. En écoutant le rapporteur général de la commission des finances, on avait l’impression que ces comptes avaient été préparés à Bercy, nuitamment…

M. Richard Yung. … à la lumière d’une bougie, par une équipe de malfaiteurs ou de faussaires ! (M. François Marc approuve. – Exclamations sur les travées du groupe Les Républicains.)

M. Roger Karoutchi. C’est bien excessif !

M. Richard Yung. J’aurais été à la place du secrétaire d’État, je n’aurais pas hésité à vous rassurer tout à fait : ce n’est pas ainsi que cela se passe !

M. Roger Karoutchi. Donc, ce projet de loi n’a pas été élaboré la nuit ! (Sourires.)

M. Richard Yung. On travaille souvent la nuit !

M. Roger Karoutchi. À la bougie ? (Nouveaux sourires.)

M. Richard Yung. J’ajoute, pour que votre information soit complète et que vous vous réjouissiez avec nous, chers collègues, que la Commission européenne a souligné que la France avait « pris des actions qui sont suivies d’effets positifs en 2013 et 2014 ». (Exclamations sur les travées du groupe Les Républicains.)

L’an dernier, le redressement des comptes publics s’est poursuivi, et ce en dépit d’une croissance proche de zéro et d’un très faible niveau d’inflation. Le déficit public nominal, initialement prévu à 4,4 % du PIB, a finalement représenté 4 %.

M. Didier Guillaume. Il est important de le redire !

M. Richard Yung. En 2014, le déficit budgétaire de l’État – hors PIA 2 – a diminué…

M. Philippe Dallier. Non, il a augmenté !

M. Richard Yung. … de 1,3 milliard d’euros par rapport à 2013, soit 73,6 milliards d’euros, contre 74,9 milliards d’euros.

M. Richard Yung. On note donc une baisse du déficit, même si celle-ci reste modeste. C’est une tendance importante et lourde qui apparaît pour la première fois et dont nous aurons l’occasion de reparler.

M. Philippe Dallier. Ne vous inquiétez pas, nous en reparlerons !

M. Richard Yung. Je regrette que la Cour des comptes n’ait pas davantage souligné les efforts accomplis en matière de réduction du déficit structurel. Vous demandiez un historique depuis 1990, monsieur Dallier, le voici : le déficit structurel a atteint, en 2014, son plus bas niveau depuis la fin des années quatre-vingt-dix et a été ramené à 2,1 % du PIB, contre 2,6 % en 2013.

Ces bons résultats sont le fruit d’une politique de sérieux budgétaire.

Les dépenses nettes de l’État ont été inférieures au montant prévu par la loi de finances initiale pour 2014, notamment grâce à l’annulation – souvent assez douloureuse – de nombreux crédits des missions budgétaires…