M. Guillaume Arnell. Non, je le retire, monsieur le président.

M. le président. L'amendement n° 518 rectifié est retiré.

Madame Primas, l'amendement n° 335 est-il maintenu ?

Mme Sophie Primas. Non, je le retire, monsieur le président, toujours à contrecœur !

M. le président. L'amendement n° 335 est retiré.

Monsieur Gremillet, l'amendement n° 341 rectifié est-il maintenu ?

M. Daniel Gremillet. Celui-là, je le maintiens ! Je rappelle qu’il s’agit de préciser que « le domaine d’activité se distingue de celui précédemment couvert ».

Monsieur le rapporteur, dans l’exemple que vous avez donné, celui d’un changement d’affectation pour passer d’un produit alimentaire à un shampooing, il n’y a aucune difficulté puisque ce n’est pas dans un domaine couvert. En revanche, pour prendre l’exemple du secteur agroalimentaire, obliger l’entreprise qui utilise un ferment à refaire une démarche alors que ce ferment peut être utilisé pour un nouveau produit dans le même cœur de métier, là, franchement, c’est complexifier énormément la vie des entreprises et aller largement au-delà du règlement communautaire !

Telles sont les raisons pour lesquelles je maintiens l’amendement.

M. le président. La parole est à Mme la ministre.

Mme Ségolène Royal, ministre. Cet amendement vise à substituer au critère de changement d’objectifs et de contenu le critère de changement de domaine d’activité. C’est vrai que cette proposition est opérationnelle. Elle va nécessiter sans doute une clarification sous la forme soit d’un guide d’accompagnement soit d’une circulaire, mais, après vous avoir écouté, j’émets un avis favorable, au nom du Gouvernement.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 341 rectifié.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 586 rectifié.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. Je suis saisi de deux amendements identiques.

L'amendement n° 133 est présenté par Mme Blandin, MM. Dantec, Labbé et les membres du groupe écologiste.

L'amendement n° 278 rectifié est présenté par MM. Madrelle et Poher, Mme Bonnefoy, MM. Guillaume, Bérit-Débat, Camani, Cornano et Filleul, Mme Herviaux, MM. J.C. Leroy, Miquel et Roux, Mme Tocqueville, MM. Karam, Yung, Daunis et les membres du groupe socialiste et républicain.

Ces deux amendements sont ainsi libellés :

Alinéa 60

Rédiger ainsi cet alinéa :

« Lorsque l’accès aux ressources génétiques mentionné au premier alinéa du présent I a lieu sur le territoire d’une collectivité où sont présentes des communautés d’habitants telles que définies à l’article L. 412-3, l’autorité administrative compétente doit accompagner cette déclaration d’une procédure d’information des communautés d’habitants.

La parole est à Mme Marie-Christine Blandin, pour présenter l'amendement n° 133.

Mme Marie-Christine Blandin. L’article 18 fixe bien les modalités d’accès aux ressources génétiques et aux connaissances traditionnelles associées en application du protocole de Nagoya, qui prévoit que l’État partie prend « les mesures nécessaires pour s’assurer que le consentement préalable donné en connaissance de cause ou l’accord et la participation des communautés autochtones et locales » – nous, nous parlons des communautés d’habitants – « sont obtenus pour l’accès aux ressources génétiques […] ».

Or, la rédaction actuelle du texte ne prévoit qu’une information adressée au conseil d’administration de l’établissement du parc national concerné par ce prélèvement.

Autant nous nous réjouissons qu’un parc national joue quasiment un rôle de représentant déconcentré de l’État, comme c’est le cas en Guyane française, au point que les gens lui font remplir toutes les missions– et il fait bien son travail !–, autant nous regrettons que les communautés d’habitants présentes n’aient pas en direct leur mot à dire.

Même si cette information peut passer par le parc, ce sont les habitants, et non le parc, qui sont titulaires du droit. On ne peut pas se contenter d’informer les seuls parcs nationaux.

De plus, il n’y a pas de parc national à Mayotte ni à Wallis et Futuna et le parc amazonien de Guyane ne couvre que 47 % du territoire. Il y a même plus de communautés d’habitants hors du parc qu’à l’intérieur !

Le présent amendement vise à remédier à cette lacune en instaurant a minima, pour l’accès aux ressources génétiques à des fins non commerciales, l’information des communautés d’habitants concernées.

M. le président. La parole est à M. Philippe Madrelle, pour présenter l'amendement n° 278 rectifié.

M. Philippe Madrelle. L’article 18 organise la consultation des communautés d’habitants dans le cas d’utilisation des connaissances traditionnelles associées à des ressources génétiques.

Toutefois, s’agissant de l’accès aux ressources génétiques, il n’est pas prévu d’associer les communautés d’habitants dans le cadre de la procédure de déclaration comme dans celui de la procédure d’autorisation, qui suppose une visée commerciale.

Le dispositif proposé se limite à une simple information des conseils d’administration des parcs nationaux lorsque le prélèvement a lieu dans les limites géographiques d’un parc, ce qui est naturellement insuffisant, comme vient de le dire ma collègue.

En effet, les communautés d’habitants ne vivant pas toutes dans les limites des parcs nationaux, leur information n’est donc en rien garantie.

Par ailleurs, l’on peut observer qu’il n’existe aucun parc national à Mayotte ou à Wallis et Futuna.

Enfin, le parc amazonien de Guyane ne couvre que 47 % du territoire guyanais.

Le dispositif ne permet donc pas d’informer toutes les communautés d’habitants présentes sur le territoire. Pourtant, elles sont bien les premières concernées par l’accès à des ressources qu’elles entretiennent, parfois même depuis une très longue période.

Cet amendement vise donc à garantir un processus minimal obligatoire d’information des communautés d’habitants concernées pour l’accès aux ressources génétiques à des fins non commerciales.

Cette procédure d’information serait mise en place par l’autorité administrative, parallèlement à la procédure de déclaration.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Jérôme Bignon, rapporteur. Il est difficile de ne pas être d’accord avec ceux qui proposent d’informer les communautés d’habitants !

À l’occasion des auditions préalables à l’examen en commission de ce texte, Gilles Kleitz, directeur du parc amazonien de Guyane, que j’avais auditionné en vidéoconférence, avait attiré notre attention sur le fait qu’il ne fallait pas complexifier les choses. N’oublions pas qu’il s’agit de terrains difficiles et que, sur place, on ne dispose pas des mêmes moyens matériels et de communication que ceux dont nous avons la chance de profiter sur le territoire métropolitain. Dès lors, les communautés en question n’entendent pas nécessairement le mot « communication » de la même façon que nous. Mais cette organisation doit se faire de manière à ce que ce soit opposable et compréhensible par les habitants.

Il faut nous garder de transposer nos habitudes d’Occidentaux gâtés, qui attendent toujours beaucoup des autorités, à des communautés dispersées et dénuées de moyens de communication sur des territoires bien différents.

Certes, je comprends et je partage bien évidemment les objectifs des auteurs de ces amendements. Si j’appartenais à l’une de ces communautés, j’apprécierais d’être informé, je trouverais cela légitime.

Pour autant, le problème subsiste de savoir comment s’organiser pour que cette information soit effective.

En Guyane, cela fonctionne : le parc amazonien est un outil absolument exceptionnel ; au-delà de sa mission de parc national, il est la présence de l’État sur le terrain et ses personnels ont par conséquent à cœur de faire en sorte que les communautés soient informées.

La situation est probablement plus compliquée à Wallis et Futuna, où les communications ne sont pas toujours très simples, voire à Mayotte, où près de 90 % de la population ne parle pas le français.

En conclusion, je suis sensible à ces amendements fins et intelligents, mais j’ai une certaine réticence à donner un avis favorable au vu des difficultés de mise en œuvre que je pressens. Dans un esprit d’ouverture, je m’en remettrai donc à la sagesse de notre assemblée, tout en attirant son attention sur ces difficultés potentielles.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Ségolène Royal, ministre. La question posée est de savoir si l’on étend le système de la communication actuellement en vigueur pour les communautés d’habitants résidant dans le parc amazonien de Guyane, dont la densité donne du sens à ce dispositif, non seulement à l’ensemble des parcs, ce qui a été rendu possible par l’adoption d’un amendement à l’Assemblée nationale, mais encore au-delà des parcs nationaux.

On peut opposer aux auteurs de ces amendements identiques la complication que cet élargissement entraînerait. Si cet argument n’est pas sans fondement, les deux amendements précisent bien néanmoins qu’ils ne visent que les communautés d’habitants, concept bien identifié.

Dès lors, alors que j’avais l’intention de demander le retrait, après avoir écouté votre argumentation, madame la sénatrice, monsieur le sénateur, j’émets un avis favorable.

M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 133 et 278 rectifié.

(Les amendements sont adoptés.)

M. le président. Je suis saisi de deux amendements faisant l’objet d’une discussion commune.

L’amendement n° 134, présenté par Mme Blandin, MM. Dantec, Labbé et les membres du groupe écologiste, est ainsi libellé :

Après l’alinéa 60

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

« … – À l’issue des travaux de recherche, le demandeur est tenu de restituer auprès des communautés d’habitants, après avis de l’autorité compétente sur les modalités de restitution, les informations et connaissances acquises à partir des ressources génétiques prélevées sur le territoire d’une collectivité où une ou plusieurs communautés d’habitants sont présentes.

La parole est à Mme Marie-Christine Blandin.

Mme Marie-Christine Blandin. Nous sommes toujours sur l’obligation de restitution auprès des communautés d’habitants, mais cette fois il s’agit de restituer les informations produites à partir des ressources génétiques prélevées. C’est une demande forte de ces communautés, notamment, bien sûr, en Guyane. En effet, les ressources qu’elles utilisent et entretiennent sont actuellement prélevées sans qu’elles bénéficient de retours sur les connaissances acquises par les chercheurs grâce à ces prélèvements.

Je tiens à cet égard à mentionner le travail mené par la faculté de pharmacie de Lille, certes en dehors du territoire français. Cette faculté envoie ses jeunes thésardes à Madagascar pour travailler avec les populations et identifier les savoirs locaux. À l’issue de leur mission, ces chercheuses restituent aux populations le nom et la forme des molécules chimiques et des substances actives des végétaux utilisés.

Cela a permis tout simplement à des communautés d’habitants de Madagascar d’empêcher que des entreprises prédatrices de biopiraterie, venues des États-Unis, ne s’emparent de leurs plantes. En effet, les habitants peuvent désormais afficher le nom de la molécule, justifier qu’ils s’en servent depuis longtemps et la connaissent bien. Ces communautés ont ainsi pu se défendre.

Notre but, au travers de cet amendement, est donc simplement de plaider pour la restitution des savoirs.

M. le président. L'amendement n° 370 rectifié bis, présenté par MM. Karam et Cornano, Mme Claireaux et MM. Antiste, S. Larcher, Patient et J. Gillot, est ainsi libellé :

Après l’alinéa 60

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

« À l’issue des travaux de recherche, le déclarant est tenu de restituer auprès des communautés d’habitants les informations et connaissances acquises à partir des ressources génétiques prélevées sur le territoire d’une collectivité où une ou plusieurs communautés d’habitants sont présentes.

La parole est à M. Jacques Cornano.

M. Jacques Cornano. Cet amendement vise à instaurer pour le déclarant une obligation de restitution auprès des communautés d’habitants des informations produites à partir des ressources génétiques prélevées.

C’est une demande forte des communautés d’habitants, notamment en Guyane : elles voient en effet les ressources qu’elles utilisent et entretiennent être prélevées sans bénéficier de retours sur les connaissances acquises par les chercheurs au moyen de ces prélèvements.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Jérôme Bignon, rapporteur. Je me trouve bien embarrassé : en effet, après les propos que j’ai tenus sur les amendements précédents, il me serait délicat de me montrer défavorable à celui-ci. Cependant, il me semble que, avec cet amendement, on atteint un degré supplémentaire de difficulté.

Informer une communauté de l’accès à une ressource paraît relativement simple, quoiqu’il faille se garder là encore de transposer à une situation différente notre capacité d’information ordinaire. En revanche, transmettre le résultat d’une recherche scientifique, c’est courir le risque que le degré de complexité de l’information à transmettre rende cette communication bien plus ardue.

Cela dit, pourquoi pas ? On peut tout imaginer, mais il faut prévoir des modalités. Il me paraît compliqué de le faire dans la loi, alors posons le principe avant de nous employer à trouver des façons de le concrétiser. Il faudra traduire en langue amérindienne ou bushinengue le résultat de recherches scientifiques complexes : si cela ne pose pas de problème, je n’y vois que des avantages.

Par conséquent, si la commission avait émis un avis défavorable, une fois de plus, sans en avoir vraiment le droit, je le transforme en avis de sagesse. (Sourires.)

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Ségolène Royal, ministre. Dans la continuité de mes propos précédents, je soutiendrai également cet amendement. Il exprime en effet la dynamique des sciences participatives et ouvre la perspective d’une nouvelle citoyenneté environnementale : les communautés d’habitants, qui participent à la recherche par l’observation du territoire et de la biodiversité, non seulement ont le droit de recevoir l’information des scientifiques, pour les raisons qui ont été très bien développées, mais elles peuvent aussi, avec les scientifiques, valoriser leur savoir-faire, leur sens de l’observation, ou encore la transmission de génération en génération de l’évolution de la biodiversité.

Elles peuvent, à partir de cette observation, nourrir le travail des chercheurs qui ont absolument besoin d’une observation fine et au quotidien que seuls les citoyens peuvent fournir : on le voit en métropole quand les écoles et les quartiers sont associés aux sciences participatives grâce à l’observation, par exemple, des insectes collés sur les parebrises.

Pour avoir vu au Muséum d’histoire naturelle ce que sont ces sciences participatives, je puis vous dire que tout cela est vraiment étonnant : d’ailleurs, sans ces sciences participatives, les chercheurs auraient beaucoup moins d’accès aux connaissances.

Par conséquent, cela joue dans les deux sens : d’un côté, le droit pour les communautés d’habitants d’avoir effectivement accès à ce que les chercheurs ont observé sur leur territoire et, de l’autre, le désir de connaissances et l’éducation à l’environnement que cela va leur donner pour contribuer par leur sens de l’observation quotidienne au travail des chercheurs.

Je soutiens par conséquent cet amendement.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 134.

(L’amendement est adopté.)

M. le président. En conséquence, l’amendement n° 370 rectifié bis n’a plus d’objet.

L’amendement n° 279 rectifié, présenté par MM. Madrelle et Poher, Mme Bonnefoy, MM. Guillaume, Bérit-Débat, Camani, Cornano et Filleul, Mme Herviaux, MM. J.C. Leroy, Miquel et Roux, Mme Tocqueville, MM. Karam, Yung, Daunis et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :

Alinéa 65

Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée :

La délivrance d’une autorisation est conditionnée à la consultation et à l’obtention du consentement préalable donné en connaissance de cause des communautés d’habitants concernées.

La parole est à M. Philippe Madrelle.

M. Philippe Madrelle. Dans la logique de l’amendement n° 278 rectifié, que nous avons adopté, cet amendement a pour objet d’imposer une procédure de consultation et d’obtention du consentement des communautés d’habitants, cette fois en cas de demande d’autorisation d’accès aux ressources génétiques à visée commerciale.

La participation et l’accord des communautés d’habitants constituent un enjeu fondamental du protocole de Nagoya. Le paragraphe 2 de l’article 6 de ce protocole, relatif à l’accès aux ressources génétiques, précise que chaque partie – c’est-à-dire chaque État – « prend les mesures nécessaires pour s’assurer que le consentement préalable donné en connaissance de cause ou l’accord et la participation des communautés autochtones et locales sont obtenus pour l’accès aux ressources génétiques ».

J’ai bien conscience des difficultés juridiques qui sont posées : les ressources génétiques sont la propriété de la nation et non des communautés d’habitants. Cependant, cet amendement ne vise pas à remettre en cause ce principe.

Ainsi, c’est bien l’État qui sera chargé des négociations. L’autorité administrative demeure également l’autorité compétente pour délivrer l’autorisation d’accès. Cependant, nous estimons que l’État a aussi le devoir d’associer les populations directement concernées.

Un pas a été fait en ce sens à l’Assemblée nationale, grâce à vous, madame la ministre. Le texte prévoit désormais, aux alinéas 60 et 66 du présent article, une procédure d’information dans le cas des parcs nationaux. Cette amélioration doit être saluée, mais nous pouvons peut-être aller plus loin.

Par cet amendement, nous souhaitons donc insister sur la nécessaire consultation des habitants des territoires concernés, qui jouent, depuis des siècles, un rôle important et reconnu en matière de conservation et d’utilisation durable de la biodiversité.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Jérôme Bignon, rapporteur. J’ai peur d’être ici plus fondé à émettre un avis défavorable.

Autant on comprend que l’utilisation des connaissances traditionnelles nécessite le consentement des communautés, comme il est prévu, puisqu’elles sont propriétaires de ces savoirs traditionnels, autant recueillir leur consentement pour l’accès à des ressources présentes sur des territoires où, certes, elles vivent, mais dont elles ne sont pas propriétaires, puisque c’est la propriété de la nation, me paraît ajouter au texte une contrainte qui serait susceptible d’être considérée comme inconstitutionnelle.

Que ferait-on si ces communautés refusaient de donner leur consentement ? On s’engagerait dans un contentieux. Et quel serait donc le fondement de ce refus ? Les communautés pourraient-elles invoquer contre l’État un droit de propriété sur ces ressources ?

Poser la question, c’est y répondre : on ne peut pas accepter l’exigence d’un consentement préalable. Développons plutôt l’information et le compte rendu des recherches scientifiques, développons la recherche participative, comme le suggérait à l’instant Mme la ministre. Tout cela me paraît aller dans le bon sens, celui du respect de ces communautés. Mais leur demander leur consentement pour l’utilisation d’un bien qui ne leur appartient pas pourrait accréditer que ces communautés sont spoliées : si on leur demande leur consentement, c’est bien qu’elles sont propriétaires !

Je suis donc défavorable à cet amendement en raison des risques juridiques que son adoption ferait courir.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Ségolène Royal, ministre. Pour la même raison, je demanderai le retrait de cet amendement, qui va beaucoup trop loin. On atteint ici un réel déséquilibre. En effet, tout d’abord, l’association des communautés d’habitants, que vous appelez de vos vœux, monsieur le sénateur, est déjà assurée dans le cadre de l’accès aux connaissances traditionnelles de ces communautés. Quant à l’accès aux ressources génétiques, sous quelle forme entendez-vous recueillir le consentement de ces communautés ? Par un vote, une déclaration, un rassemblement ?

Une telle exigence risque réellement de poser un frein grave à la recherche et d’entraîner des délais d’instruction considérables par des demandes d’autorisation qui ne seront pas cadrées. D’ailleurs, le protocole de Nagoya n’impose le consentement préalable des communautés d’habitants que lorsqu’il s’agit de connaissances traditionnelles détenues par ces communautés.

L’avis du Gouvernement sur cet amendement est donc défavorable.

M. le président. Monsieur Madrelle, l’amendement n° 279 rectifié est-il maintenu ?

M. Philippe Madrelle. Non, je le retire, monsieur le président.

M. le président. L’amendement n° 279 rectifié est retiré.

L’amendement n° 135, présenté par Mme Blandin, MM. Dantec, Labbé et les membres du groupe écologiste, est ainsi libellé :

Alinéa 66

Rédiger ainsi cet alinéa :

« Lorsque l’accès aux ressources génétiques mentionné au premier alinéa du présent I a lieu sur le territoire d’une collectivité où est présente une communauté d’habitants définie au 4° de l’article L. 412-3, l’autorisation ne peut être accordée qu’au terme de la procédure définie aux articles L. 412-8, L. 412-9 et aux I et III de l’article L. 412-11. Au vu du procès-verbal, l’autorité administrative accorde ou refuse, en partie ou en totalité, l’accès aux ressources génétiques. Cette décision est notifiée au demandeur et fait l’objet de mesures de publicité dans des conditions fixées par décret, sous réserve du I de l’article L. 412-14.

La parole est à Mme Marie-Christine Blandin.

Mme Marie-Christine Blandin. Je pressens qu’il sera moins facile de convaincre de l’opportunité de cet amendement.

Le Protocole de Nagoya prévoit pourtant que soit obtenu le consentement préalable des communautés d’habitants pour l’accès aux ressources génétiques les concernant. Cela se pratique déjà en Guyane, où les communautés d’habitants situées dans le parc national sont réellement consultées sur l’accès aux ressources génétiques prélevées dans ce territoire. Il n’y a pas de distinction entre un régime déclaratif et un régime d’autorisation.

Or le projet de loi, dans sa rédaction actuelle, établit cette distinction.

Pour le régime déclaratif, il prévoit la simple information des parcs nationaux lorsque le prélèvement a lieu dans les limites du parc.

Pour le régime d’autorisation, le parc national concerné peut rendre un avis. Les communautés d’habitants du parc ne seront donc plus consultées, mais seulement informées. Cela représenterait, aux yeux des écologistes, un recul par rapport à l’esprit et à la lettre du protocole de Nagoya. Et cela pose toujours le même problème : tout le monde n’habite pas dans les parcs.

Je précise que le dispositif que nous proposons ici s’adresse bien aux seules communautés d’habitants telles que définies par la présente loi – il y en a en Guyane, à Mayotte et à Wallis et Futuna – et ne concernera donc pas l’accès aux ressources génétiques sur l’immense majorité du territoire français.

Tout à l’heure, certains évoquaient le saucisson ou encore le fromage ; on aurait pu parler des filières génétiques de levure pour le pain ou la bière. Tel n’est pas le cas ici : nous nous adressons de manière très précise aux seules communautés d’habitants.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Jérôme Bignon, rapporteur. Je ne répéterai pas l’argumentation que j’ai développée lors de l’examen de l’amendement précédent, qui est de même nature. Au risque d’être désagréable, je souligne que cette disposition n’est juridiquement pas possible.

Par conséquent, la commission émet un avis défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Ségolène Royal, ministre. Cette disposition n’est même pas praticable ! Que signifie un consentement préalable ? Cela suppose-t-il un vote, un accès à la lecture de documents scientifiques par des populations qui ne savent pas forcément lire ? Et qui les informera ? Ne doit-on pas aussi redouter des manipulations de vote ?

L’obligation d’un consentement préalable prévu par le protocole de Nagoya ne concerne que les connaissances traditionnelles détenues par ces communautés d’habitants, ce qui est déjà extrêmement lourd. Il n’est qu’à voir la consultation sur ce sujet et l’association des communautés d’habitants dans le parc de Guyane ! Conditionner la délivrance à l’accès aux ressources génétiques est complexe et il appartiendra à la gouvernance des parcs de s’assurer que les procédures se déroulent dans le respect des populations.

Qui plus est, une telle procédure juridique suppose la publication d’un décret d’application. Les décisions seront-elles prises à la majorité absolue ou à l’unanimité ? Faudra-t-il un vote à bulletin secret ?

Pardon de le dire ainsi, mais je pense que l’on tombe là dans une idéologie excessive qui va se retourner contre les communautés d’habitants et risque d’affaiblir tout le processus d’association, qui vient d’être étendu au-delà des seuls parcs. Il faudra déjà organiser tout cela. Et qui se chargera de cette nouvelle organisation ? Comment paiera-t-on les gens qui organiseront ces informations et ces consultations ? Quels territoires seront concernés ?

Commençons par appliquer l'amendement qui vient d’être adopté, c'est-à-dire l’association des communautés d’habitants sur leurs connaissances traditionnelles. Quand on peut étendre le dispositif aux ressources génétiques – je peux donner une instruction à cette fin –, faisons-le. Mais imposer la consultation dans la loi, c’est à coup sûr interdire les recherches et faire de la France le seul pays à empêcher la recherche sur son territoire. Résultat ? Ce sont des chercheurs étrangers qui viendront dans nos outre-mer… (M. Ronan Dantec fait un signe de dénégation.) Bien sûr que si, puisqu’ils ne seront pas tenus par leur droit national d’informer les populations locales !

Pour toutes ces raisons, il est préférable de retirer cet amendement. De nombreuses avancées ont déjà été rendues possibles grâce aux amendements que vous avez déposés. Travaillons à l’application de ces nouvelles dispositions, déjà très complexes, avant de tomber de l’autre côté du cheval, si je puis m’exprimer ainsi ! (Sourires.)