M. le président. La parole est à M. Alain Bertrand.

M. Alain Bertrand. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, je veux moi aussi rendre hommage à Jean-Claude Frécon, mon voisin dans l’hémicycle. J’ai été stupéfait d’apprendre la disparition de ce collègue attachant, que j’avais tout de suite repéré comme étant un être affable, simple et doux, qui aimait profondément les gens.

Je remercie le Gouvernement, plus particulièrement l’ancien Premier ministre Manuel Valls et M. le ministre Jean-Michel Baylet, ainsi que les élus de montagne du travail qui a été effectué sur ce projet de loi. Pour autant, le texte ne constitue pas un projet de loi de programmation – ma collègue Cukierman vient de le souligner – ni de financement. Il s’agit d’une déclaration d’intention, louable, importante, indispensable, de ce dont ont besoin les territoires de montagne et, plus largement, la ruralité.

Il ne vous a pas échappé, mes chers collègues, que tous les territoires de montagne sont des territoires ruraux, alors que toutes les ruralités ne sont pas, elles, constituées par des territoires de montagne. Cependant, ce dont ont besoin la montagne comme la ruralité, c’est une prise en compte du financement des problèmes liés à leurs handicaps naturels. Il conviendra donc de s’assurer, dans les années à venir, que les intentions se transforment en actions structurantes, maintenant pour nos zones de montagne, plus tard pour la ruralité.

Malgré sa grande nécessité, le projet de loi ne clôture pas du tout le débat sur la ruralité, ni sur l’aménagement du territoire, qui figure dans votre portefeuille ministériel, monsieur le ministre, ni sur l’équité territoriale : c’est une étape, qui doit nous permettre de mieux atteindre les objectifs que je viens d’indiquer.

Afin de ne pas répéter ce qui a déjà été dit, j’évoquerai très rapidement les avancées que contient le projet de loi.

L’article 1er reconnaît le caractère particulier et les enjeux spécifiques de la montagne, avec une mise en avant des politiques publiques en matière de numérique, de téléphonie mobile, d’urbanisme, d’éducation – les avancées sont assez remarquables sur ce plan –, de santé ou encore de transports ; je ne reviens pas sur l’école.

L’accompagnement des agriculteurs, dans leur installation, leur activité et les travaux de construction, sera favorisé.

L’article 16 prévoit que l’on pourra adapter les moyens de lutte contre la prédation des animaux d’élevage par les grands prédateurs. J’ai moi-même déposé, le 16 octobre 2012, une proposition de loi visant à créer des zones d’exclusion renforcées pour le loup. Je suis donc satisfait par la possibilité, ouverte dès lors qu’une attaque est avérée, d’autoriser un éleveur à réaliser des tirs de prélèvement sur les loups.

Je me réjouis de l’adoption de cet article, qui, au fond, reconnaît le juste ordre des choses : d'abord, l’homme et l’élevage ; ensuite, la protection des espèces.

M. Michel Bouvard. Très bien !

M. Alain Bertrand. L’article 16 intègre également la spécificité des territoires de montagne dans la lutte contre les nuisibles. M. le ministre a évoqué, non sans humour, les dommages causés par les rats taupiers. Je sais que M. le président est aussi sensible à toutes les espèces et à l’agriculture, ne serait-ce que par sa profession… (Sourires.)

M. le président. « Vêtu comme un taupier » était une expression autrefois usitée en Normandie… (Nouveaux sourires.)

M. Alain Bertrand. Toutefois, les loups et les « nuisibles » ne sont pas les seuls animaux dangereux pour notre élevage. Il faut étendre le champ d’application de l’article 16 à l’ensemble des grands prédateurs, à savoir, pour ce qui concerne notre pays, les ours et les lynx.

Pour ce qui est de la filière bois, je veux évoquer l’appel pour la forêt qu’a lancé, à Mende, le sénateur Philippe Leroy, qui est un expert de ces questions. Dans ce texte, intelligent et sensible, notre collègue affirme que la forêt est notre métropole, qu’elle est le cœur de la montagne. Je ne doute pas qu’il sera entendu ! Il faut affecter une partie des recettes de la contribution climat-énergie au Fonds stratégique de la forêt et du bois. Les actions en faveur de la forêt pourraient être encore bien davantage développées dans le texte.

En matière de numérique, j’ai bien entendu vos propos, monsieur le ministre, mais il faut aller plus loin. Vous avez accompli des efforts considérables, mais la notion de « zone grise » demeure inopérante. Une zone grise est une zone dans laquelle on a accès au téléphone. Il suffit qu’un opérateur soit présent sur 5 % du territoire de la commune pour que celle-ci soit classée en zone grise ! Pour caricaturer, je dirais qu’il suffit qu’une barre de réseau apparaisse sur un téléphone brandi en haut du clocher de l’église pour que la commune soit considérée en zone grise… Pour ma part, je propose que toute commune qui n’est pas couverte à hauteur de 90 % par un ou plusieurs opérateurs soit classée en zone blanche. À vous de voir ce que vous pouvez faire ! Toujours est-il qu’il faut trouver un autre critère, et je sais que vous êtes en mesure de le faire.

J’ai bien entendu également les propos que vous avez tenus sur les zones de revitalisation rurale. Quelle que soit la carte qui paraîtra au mois de janvier prochain, la dispersion des moyens affectés aux ZRR est évidente. Le spectre géographique est trop grand et ne permet pas d’intervenir là où c’est le plus nécessaire, par exemple par une baisse, à hauteur de 50 %, de l’impôt sur les sociétés. Sur ce point aussi vous pouvez faire des propositions pour améliorer encore la loi.

Sur le plan de la santé, il n’est pas acceptable, en termes d’égalité, que, dans les zones rurales et dans les zones de montagne, qui sont toutes rurales, on ait plus de risques qu’ailleurs de mourir d’un AVC, de devenir infirme ou de souffrir de séquelles graves, tout simplement parce que les délais de transport par la route y sont supérieurs à ce qu’exigent tous les protocoles médicaux. Votre portefeuille ministériel vous permet, indépendamment des ministres de la santé ou de l’intérieur, qui sont également concernés, de mutualiser les hélicoptères – les bleus, les blancs et les rouges. En effet, il faut que, dans chaque zone, le transport primaire ou secondaire vers un CHU puisse être garanti en moins de trente minutes.

On pourrait parler de la dotation de solidarité rurale, qui n’est pas à la hauteur ou, par exemple, stigmatiser le seuil de population pour recruter un directeur général des services, ou DGS, qui a été inscrit dans la loi NOTRe. Ainsi, les petites communautés de communes des zones de montagne ne peuvent embaucher un DGS. Je préconise, pour ma part, un abaissement du seuil de 10 000 à 6 000 habitants.

Monsieur le ministre, je ne méconnais pas tout ce que Mme Pinel puis vous-même avez fait pour l’égalité des territoires dans le gouvernement de Manuel Valls : le fonds régional de ruralité, le doublement de la DETR, les centres-bourgs, les contrats de ruralité, qui sont particulièrement importants, car ils revêtent une dimension à la fois symbolique et financière. Je vous en remercie. Je n’oublie pas non plus que vous avez dit que les territoires de montagne étaient plus pauvres que les autres et qu’ils étaient parfois marginalisés, voire méprisés. Vous avez parlé de « montagne refuge ». Je parlerai, moi, de « ruralité résistance » et de « montagne résistance ». Je pense au Vercors ou encore au mont Mouchet, mais je pourrais en citer bien d’autres.

MM. Michel Bouvard et Loïc Hervé. Les Glières !

M. Alain Bertrand. Il y en a des dizaines !

Cela étant, les habitants des zones rurales et des zones de montagne ont le droit d’obtenir une réponse à deux questions : quel avenir pour les ruralités et pour les montagnes ? Quelle place dans la nation pour celles-ci ? Pour leur permettre d’obtenir les réponses qu’ils attendent, j’en appelle à une loi d’avenir sur les ruralités et sur l’hyper-ruralité.

Parce que vous êtes un spécialiste, je suis sûr que vous aurez à cœur de poser les premières pierres de ce grand chantier, dans les derniers mois de cette législature ou, peut-être, au cours de la suivante… (M. le ministre s’esclaffe. – Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain et du groupe CRC.)

M. le président. La parole est à M. Loïc Hervé. (Applaudissements sur les travées de l'UDI-UC.)

M. Loïc Hervé. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, ce qui nous rassemble cet après-midi, c’est la montagne.

La montagne ? L’homme l’a souvent crainte. Il l’habite depuis longtemps et, autant que possible, il essaye de la dompter.

La montagne ? Elle est devenue l’un des symboles de l’excellence française, par la majesté de ses paysages, l’excellence de ses productions agricoles, la richesse que représentent les entreprises qui s’y sont développées dès la première révolution industrielle – avec la houille blanche, l’homme en a tiré toute la force – ainsi que par le dynamisme de son tourisme, qui en fait l’une des destinations phares du premier pays touristique au monde.

C’est la montagne qui a forgé le caractère des montagnards. Et c’est ainsi qu’aujourd’hui ce sont eux, les montagnards, qui la protègent, parce qu’ils y vivent et parce qu’ils l’aiment.

En 1985, une loi spécifique inscrivait la montagne dans notre législation et faisait reconnaître toute sa spécificité dans notre droit.

Prévue dès la « loi pastorale » de 1972 du gouvernement Chaban-Delmas,…

M. Michel Bouvard. Très bonne référence !

M. Loïc Hervé. … votée plus tardivement que dans d’autres pays européens, elle a été un acte fondateur de la politique d’aménagement du territoire en France, préfigurant la pratique du développement territorial.

En 2002, ici, au Sénat, un rapport de notre ancien collègue Jean-Paul Amoudry, mon prédécesseur en Haute-Savoie, préparait « l’avenir de la montagne ».

Alors, dans cette Haute Assemblée, qui s’imprègne des territoires, c’est la montagne française, dans toute sa diversité, qui attendait ce projet de loi, monsieur le ministre. Si ce nouveau projet de loi s’est fait attendre, je salue la volonté du Gouvernement d’avoir voulu ce texte, qui touche à beaucoup d’aspects de la réalité de la montagne.

Dans un travail avec les parlementaires de montagne et les grandes associations d’élus, notamment l’ANEM et l’ANMSM, vous avez bonifié ce texte. Je vous en remercie, comme je félicite Mme et MM. les rapporteurs au Sénat pour le travail qu’ils ont engagé.

Je crois que le Sénat joue parfaitement son rôle quand il traduit les attentes des territoires dans le texte de la loi et qu’il rend celui-ci plus concret, plus pratique, plus ambitieux. C’est le rôle auquel nous devons nous astreindre.

Aussi, au nom des sénateurs du groupe UDI-UC et en lien avec mon collègue Bernard Delcros, je voudrais appeler l’attention de la Haute Assemblée sur différents sujets.

Concernant la question de la compétence de la promotion touristique et de son exercice, je salue les améliorations proposées dans le texte de l’Assemblée nationale et renforcées dans le texte adopté par la commission des affaires économiques. Sans remettre en cause l’esprit de la loi NOTRe, la prise en compte de l’idée que la promotion touristique et son exercice, au travers des offices de tourisme, sont intimement liés aux stratégies des stations classées de tourisme est une évidence qui méritait une évolution législative bienvenue. Cette évolution vient confirmer un engagement pris par le Premier ministre Manuel Valls au Montenvers, à Chamonix, lors de la réunion du Conseil national de la montagne. J’y reviendrai au cours de nos débats, en proposant d’enrichir encore cette rédaction, de manière à prévoir les différents cas de figure auxquels les collectivités pourraient se trouver confrontées.

Pour ce qui est des questions d’urbanisme en montagne, chacun comprend la volonté de planification qui se traduira par l’inscription de la procédure des unités touristiques nouvelles dans les SCOT ou les PLU. Mais j’appelle notre attention collective, alors que l’on évoque ici ou là la double nécessité de simplifier notre droit et de lutter contre les normes, sur l’obligation de ne pas créer de dispositif qui s’avérerait dissuasif, au moment même où notre économie mérite que l’on accorde une plus grande attention à l’investissement et à la création d’emplois. (M. Michel Bouvard applaudit longuement.)

De la même manière, les conséquences de la loi ALUR, en termes de densification dans certaines stations de montagne, s’avèrent aller à l’encontre d’un urbanisme durable en montagne et ne permettent pas de prendre en compte les attentes de la population permanente, en engageant une politique volontariste, destinée à maintenir en montagne une population active. Beaucoup de communes de montagne voient leur démographie s’effondrer, monsieur le ministre. La législation en matière d’urbanisme doit permettre aux habitants de continuer à y vivre et à y travailler.

M. Michel Bouvard. Très bien !

M. Loïc Hervé. Là aussi, il faut répondre aux inquiétudes plus que légitimes des maires.

Pour ce qui concerne, enfin, la question de la couverture mobile, je voudrais profiter de la chance d’avoir la parole à cette tribune, monsieur le ministre, pour vous faire part, à la suite de certains de mes collègues, de toutes les sensibilités politiques, de la colère de nos collègues élus des territoires de montagne, qui ne comprennent plus que cette question ne soit pas réglée depuis longtemps. C’est une affaire de vie quotidienne, de sécurité, mais aussi de compétitivité économique de nos territoires et de crédibilité internationale. Les touristes du monde entier qui viennent passer l’été ou l’hiver dans nos stations de ski ne comprennent pas que ces zones ne soient pas couvertes par les réseaux mobiles. Ce projet de loi doit être l’occasion d’acter des avancées majeures dans ce domaine. Je compte sur le bon déroulement des débats pour que nous y parvenions.

Nous examinons ce texte en fin d’année. Ce sera l’un des derniers de la législature. Je compte, à son sujet, sur l’ouverture d’esprit du Gouvernement, que vous représentez. Nous voulons une montagne protégée, certes, mais avant tout dynamique et ouverte.

« Que la montagne est belle », dit la chanson. Personne n’en doute, mais il faut qu’elle le demeure ! C’est ce que les populations et les élus qui y vivent attendent de nous. (Applaudissements sur les travées de l'UDI-UC et du groupe Les Républicains, ainsi que sur quelques travées du groupe socialiste et républicain.)

M. le président. La parole est à M. Patrick Chaize.

M. Patrick Chaize. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, je veux, pour commencer, remercier le rapporteur, Cyril Pellevat, de m’avoir confié la partie du projet de loi ayant trait au numérique. Cela devrait permettre de maintenir une cohérence avec les textes antérieurs. C’est en tout cas l’état d’esprit qui a été le mien dans ce travail.

Les dispositions du texte relatives au numérique démontrent la transversalité de ce sujet, qui s’invite au centre de toutes les politiques. Je réitère d’ailleurs, monsieur le président, ma suggestion d’anticiper, au sein de notre institution, une organisation prenant en compte cette nouvelle donnée.

Vous l’aurez donc compris, mes chers collègues, mon propos se concentrera sur le numérique, à savoir sur l’article 9 et ses déclinaisons.

Si la loi Montagne de 1985 était novatrice à bien des égards, elle était dépourvue de mesures significatives sur les communications électroniques, à une époque où internet et la téléphonie mobile n’existaient pas dans notre pays. La seule disposition de la loi dans ce domaine visait des aménagements techniques, afin de permettre une bonne réception des émissions des services de radio dans les zones de montagne.

Le présent projet de loi est donc le bienvenu : il permet de prévoir des mesures spécifiques en faveur de la couverture numérique de ces territoires. Il faut noter qu’il succède à plusieurs lois comprenant des dispositions importantes pour l’aménagement numérique du territoire, en particulier la loi du 6 août 2015 pour la croissance, l’activité et l’égalité des chances économiques et la récente loi du 7 octobre 2016 pour une République numérique.

La couverture numérique des territoires ruraux reste très contrastée, même s’il est difficile de disposer de données spécifiques aux zones de montagne. La progression de la couverture fixe en très haut débit est constatée au niveau national, mais elle bénéficie encore très largement aux zones urbaines. La contribution des réseaux d’initiative publique s’accélère au profit des zones rurales, mais les collectivités territoriales ne pourront pas couvrir les territoires les plus difficiles d’accès, en particulier en montagne, sans aides supplémentaires de l’État si la fibre optique jusqu’à l’utilisateur reste la priorité.

Par ailleurs, en attendant le très haut débit, le réseau téléphonique connaît certains désagréments et ne permet pas toujours aux habitants de disposer d’un haut débit de qualité, alors que les usages et les standards technologiques évoluent à très grande vitesse.

En matière de téléphonie et d’internet mobiles, la montagne est particulièrement exposée aux problèmes des zones blanches, en termes de couverture de la population et du territoire. Des initiatives ont été prises par le Gouvernement depuis 2015, mais leur mise en œuvre doit être accélérée. Je pense notamment à l’achèvement du programme « zones blanches en centres-bourgs », qui a enregistré certains retards. Si le déploiement de sites hors centres-bourgs, qui a été lancé aujourd'hui même à Vesoul, est une initiative intéressante, ses modalités de mise en œuvre doivent être rapidement précisées avec les opérateurs.

Le présent projet de loi offre ainsi l’opportunité d’améliorer le déploiement des réseaux fixes et mobiles en faveur de la couverture des territoires de montagne. À cet égard, l’Assemblée nationale a enrichi le projet de loi initial, qui se limitait à un seul article, pour transmettre au Sénat un texte en comportant neuf. Deux préoccupations ont guidé ces ajouts : l’utilisation des réseaux d’initiative publique par les fournisseurs d’accès à internet pour apporter des services fixes à très haut débit aux utilisateurs et le déploiement de points hauts mutualisés en zone de montagne pour améliorer la couverture mobile.

L’article 9 prévoit une adaptation de l’aménagement numérique du territoire en zone de montagne et en confie la responsabilité aux ministres compétents et à l’ARCEP.

Si l’article prévoit de favoriser le recours à un « mix technologique » pour déployer des solutions technologiques optimales, je rappelle qu’il est important de privilégier – autant que possible – la fibre optique, qui reste la frontière technologique du très haut débit et la seule architecture véritablement pérenne. Ce que confirme la Commission européenne à travers les nouvelles directives de son paquet Télécom, qui imposent le gigabit dès 2025.

Cet article, à dimension programmatique, devra se traduire par des mesures concrètes et tangibles pour un aménagement numérique adapté à ces territoires. L’Assemblée nationale a ajouté des dispositions utiles comme l’élaboration de cartes de couverture spécifiques aux zones de montagne et l’évaluation du déploiement du très haut débit en montagne pour améliorer la connaissance de la couverture de nos territoires.

Il me semble également intéressant de cibler en priorité les territoires de montagne dans le cadre du programme de construction de sites hors centres-bourgs pour les réseaux mobiles.

En commission, nous avons souhaité préciser les dispositions relatives au développement de services et d’usages numériques adaptés aux besoins des populations de montagne et confier à l’État, plutôt qu’à l’ARCEP, le suivi annuel du très haut débit en zone de montagne eu égard aux publications déjà effectuées par l’Agence du numérique en la matière.

Afin d’accélérer l’utilisation des réseaux d’initiative publique par les fournisseurs d’accès à internet, l’article 9 bis permet aux collectivités territoriales de proposer des tarifs préférentiels d’accès en cas d’insuffisance de l’offre privée pour commercialiser des services sur ces réseaux. Nous avons souhaité sécuriser cette possibilité en rappelant les principes que doivent respecter ces tarifs promotionnels au lancement de la commercialisation des réseaux.

Avec la même préoccupation d’assurer l’utilité de ces infrastructures publiques, l’Assemblée nationale a inséré l’article 9 nonies, qui prévoyait une obligation générale pour les opérateurs de communications électroniques d’intégrer les réseaux d’initiative publique existants. Problématique au regard de la Constitution et du droit européen, cette disposition a été réécrite en commission afin de confier à I’ARCEP une mission de suivi et de promotion des systèmes d’information entre opérateurs pour améliorer la fourniture de services sur les réseaux à très haut débit.

Enfin, toujours sur ce même enjeu, l’article 9 quinquies prévoit la publication périodique par I’ARCEP d’informations sur la commercialisation de services sur les réseaux publics, ce qui permettra de suivre leur utilisation effective par les opérateurs de services et la diversité des offres proposées aux utilisateurs finals.

L’article 9 ter rend obligatoire en zone de montagne la mise en place d’une stratégie de développement des usages et services numériques, créée par la loi du 7 octobre 2016 pour une République numérique et adossée au schéma directeur territorial d’aménagement du territoire. Nous avons souhaité préciser les conditions de déclenchement de cette obligation, qui permettra de soutenir la création d’usages et de services adaptés aux territoires de montagne et favorables au développement local.

Afin d’accélérer la couverture mobile, l’article 9 quater prévoit une exonération de l’imposition forfaitaire sur les entreprises de réseaux en faveur des stations radioélectriques de téléphonie mobile construites en zone de montagne à partir du 1er janvier 2017. En vue de doter cette mesure d’un véritable effet d’accélération sur la couverture mobile, nous avons souhaité qu’elle bénéficie aux équipements mis en place entre le 1er janvier 2017 et le 31 décembre 2020.

L’article 9 sexies crée une obligation générale à la charge des opérateurs de faire droit aux demandes raisonnables d’accès à leurs points hauts en zone de montagne pour favoriser la mutualisation des infrastructures passives de téléphonie mobile. Notre commission a apporté des précisions à ce dispositif, notamment pour améliorer la répartition des coûts entre opérateurs et pour élargir le périmètre des réseaux radioélectriques concernés.

Afin d’accélérer le déploiement des équipements, l’article 9 septies allège les obligations d’information du maire ou du président de l’intercommunalité en cas de modification sur un point haut ou de travaux sur un point haut situé en zone de montagne et ne faisant pas l’objet d’une extension ou d’une rehausse substantielle. L’objectif de cette disposition est de fluidifier le déploiement des équipements mobiles. Je sais qu’elle soulève certaines inquiétudes. Nous aurons l’occasion d’en reparler lors de l’examen des articles.

Enfin, l’article 9 octies prévoit la prise en compte, par le Conseil supérieur de l’audiovisuel, des contraintes géographiques inhérentes aux zones de montagne lors de l’encadrement de la puissance d’émission pour la diffusion des radios.

En commission, un article 9 nonies A a été inséré en vue de faciliter l’octroi d’autorisations temporaires d’utilisation de fréquences lors d’événements exceptionnels ou pendant les pics de fréquentation touristique.

En outre, deux articles additionnels ont été insérés en commission.

L’article 9 ter A prévoit la mise à disposition, à partir du 1er juillet 2017, d’une base harmonisée des adresses au niveau national, dans le cadre du service public de la donnée créé par la loi pour une République numérique. Il s’agit d’une disposition très attendue. La constitution progressive de cette base doit notamment faciliter la fourniture de services à très haut débit aux utilisateurs.

L’article 9 ter B, quant à lui, fixe au 1er juillet 2017 le terme du processus de conventionnement des projets privés de déploiement de réseaux fixes à très haut débit. L’objectif est d’actualiser et de formaliser les intentions d’investissement des opérateurs pour mettre fin à l’incertitude, qui n’a que trop duré, entourant la réalité des projets dans la zone délimitée par l’appel à manifestation d’intentions d’investissement de 2011.

Par ces différents ajouts, la commission a donc souhaité renforcer et enrichir les dispositions du volet numérique afin d’améliorer l’accès aux différents réseaux en montagne. Pour ces territoires, les technologies numériques sont une source de fracture territoriale supplémentaire lorsqu’elles sont absentes, mais elles constituent également une opportunité formidable de désenclavement et de développement si elles sont déployées en temps utile et pour l’ensemble des habitants.

Ce texte, vous le constaterez, a été construit de façon équilibrée. Il envoie des signes positifs aux opérateurs en simplifiant des procédures et en améliorant certaines dispositions fiscales. Il renforce néanmoins leurs obligations pour donner aux territoires de montagne et, par extension, aux territoires ruraux, des garanties d’amélioration de leur couverture, indispensable à la population. Au cours de ce débat, faisons en sorte que le numérique avance ! (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et de l'UDI-UC, ainsi que sur plusieurs travées du groupe socialiste et républicain et certaines travées du groupe CRC.)

M. le président. La parole est à M. Éric Jeansannetas.

M. Éric Jeansannetas. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, nos montagnes, dans leur grande diversité, appellent un traitement particulier. Les situations sont variées, même s’il existe des constantes : difficultés d’accès, populations rurales isolées, besoins spécifiques… Il convient de combler les désavantages géographiques de ces territoires tout en promouvant l’exceptionnelle richesse de leurs paysages et de leur patrimoine. C’est tout le sens de ce texte, qui réaffirme les principes fondateurs de son aîné de 1985 et en actualise les dispositions au regard des évolutions de nos territoires.

Je m’exprime au nom de mes collègues du groupe socialiste et républicain de la commission des affaires sociales. Les articles qui nous concernent couvrent essentiellement deux problématiques, celle de l’accès aux soins et celle du travail saisonnier.

Monsieur le ministre, vous avez salué voilà quelques instants l’état d’esprit des rapporteurs ; je peux vous assurer qu’en commission des affaires sociales nous avons travaillé, sous la conduite de notre rapporteur, à la construction du texte le plus consensuel possible.

Ce projet de loi vient prolonger le travail effectué par le Gouvernement depuis quatre ans dans les deux domaines que j’évoquais.

Dans nos territoires de montagne, l’accès aux soins, en raison de l’enclavement, du climat et des temps de déplacement, présente des difficultés particulières. Or, depuis l’instauration du pacte territoire-santé en 2012, la grande priorité est de permettre l’accès de tous les Français à des soins de qualité sur l’ensemble du territoire national.

L’engagement de la ministre des affaires sociales et de la santé, Mme Touraine, a permis la mise en place d’actions simples et concrètes pour inciter les médecins à exercer dans les territoires qui en ont le plus besoin. Des outils existent. Je tiens d’ailleurs à saluer les élus locaux, notamment les maires, des communes de montagne, qui luttent chaque jour contre la désertification médicale.