Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 98 rectifié.

(L'amendement est adopté.)

Mme la présidente. L'amendement n° 359 rectifié ter, présenté par MM. Revet, D. Laurent, Pellevat, Paul et Pierre et Mme Bories, n'est pas soutenu.

La parole est à M. Yves Daudigny, pour explication de vote sur l'article.

M. Yves Daudigny. Nous avons tous, ici, des liens territoriaux ou professionnels, et nous sommes tous attachés à défendre les activités économiques de nos territoires.

Le département de l’Aisne, que je représente, est le premier département de France producteur de betteraves sucrières. Le sucre y représente donc une richesse importante. C’est pourquoi je souhaite qu'il ne soit pas systématiquement et en toute occasion stigmatisé : il ne s’agit pas d’un poison ! C’est même un produit indispensable à l’alimentation ; les sportifs ne diront pas le contraire.

Dans le même temps, nous savons tous que les effets du sucre sont néfastes pour la santé publique, en particulier pour les enfants. Je pense, notamment, à la consommation de boissons sucrées hors des repas ou au cours des repas. Je soutiens donc la démarche qui a été entreprise par le Gouvernement, sur l’initiative de nos collègues de l’Assemblée nationale.

J’éprouve cependant un léger malaise : les valeurs sur lesquelles nous allons voter ne sont pas, vous l’avez souligné, madame la ministre, définitives. Par conséquent, l’augmentation du produit global de la taxe ne me semble pas correspondre au premier élément indiqué dans la discussion.

Néanmoins, pour affirmer la priorité qui est la mienne de soutenir des mesures de santé publique, je voterai cet article.

Mme la présidente. La parole est à M. Michel Amiel, pour explication de vote sur l'article.

M. Michel Amiel. Mon intervention aura un peu la même tonalité que celle de M. Daudigny. Sur mon territoire est en effet implantée la deuxième usine Coca-Cola de France ! J’ai d’ailleurs reçu leurs représentants et j’ai discuté avec eux.

Néanmoins, en tant que médecin, je me bats depuis des années sur des questions de santé publique. La raison prend donc le pas ici. Après avoir développé certains arguments dans la discussion, je voterai bien évidemment cet article, qui va dans le bon sens.

Pour autant, madame la ministre, comme M. Daudigny, cette histoire de barème me trouble quelque peu. Je serai attentif à ce que les choses soient clarifiées. Au-delà de l’intention générale, au-delà de l’esprit de ce que nous votons, il y a des chiffres et des emplois. Nous savons tous qu’un plan de diminution d’emplois est prévu dans les usines. Il est certes raisonnable de mettre en avant les problématiques de santé, mais il faut aussi tenir compte de l’économie générale.

Mme la présidente. La parole est à Mme Catherine Deroche, pour explication de vote sur l'article.

Mme Catherine Deroche. Comme l’a souligné le président de la commission des affaires sociales, Alain Milon, nous ne sommes pas des fanatiques des taxes à tout-va, sur tous les sujets.

Vous l’avez précisé, madame la ministre, cette taxe est à visée non pas comportementale, mais incitative. Des efforts ont notamment été consentis par les industriels en matière de plats préparés, pour réduire leur teneur en sel ou en matières grasses. Nous devons maintenant les inciter à diminuer les sucres ajoutés.

Notre collègue Michel Magras a parlé à juste titre du problème des édulcorants. Certes, ces derniers ne contiennent pas de sucre, mais ils contribuent à entretenir l’addiction au goût sucré.

La taxe existe déjà : elle avait été votée sous le gouvernement antérieur au gouvernement précédent. À l’époque, une distinction avait été faite entre les sodas sucrés et les boissons dites « zéro ». Le Conseil constitutionnel avait retoqué l’instauration d’une telle taxe uniquement parce que celle-ci n’avait pas été instituée pour des raisons de santé publique, mais pour compenser des régimes de retraite ou autres.

Dans le cadre du rapport que j’ai rédigé avec Yves Daudigny sur la fiscalité comportementale, nous avions souligné le côté injuste d’une taxation identique, quels que soient les degrés de sucre ou la présence d’édulcorants. La taxe, même si elle n’est pas parfaite, répond déjà à cette distorsion. Je voterai donc cet article.

Mme la présidente. La parole est à Mme Françoise Gatel, pour explication de vote sur l'article.

Mme Françoise Gatel. Madame la ministre, je ne voudrais pas qu’il y ait de malentendu. Ici, chacun ne peut que défendre les mesures en faveur de la santé.

Pour ma part, je ne voterai pas cet article, parce que je suis en profond désaccord avec l’avis que vous avez émis sur mon amendement relatif au soja, madame la ministre. On ne peut pas confondre une fraise Tagada avec une fraise du jardin ! (Sourires.)

Il faut faire preuve de cohérence. Alors que, en 2014, on a considéré le soja comme devant être exclu des boissons de type soda, je ne vois pas quel argument nouveau pourrait permettre de le réintégrer, alors même que vous reconnaissez qu’il ne s’agit pas d’une taxe nouvelle.

Je souhaite également que l’on travaille à des plans de sensibilisation en matière d’alimentation, comme l’a souligné le président de la commission.

Je n’ai pas pu intervenir sur l’article 12 : j’espère que l’on mettra autant d’énergie à taxer le soja en tant qu’aliment qu’à niveler le niveau des taxes sur les cigarettes. M. le ministre l’a dit hier, il existe des écarts de fiscalité entre l’Andorre et la France, mais il existe aussi des écarts de fiscalité absolument intolérables entre les cigarettes achetées en Corse et celles achetées sur le continent. J’aimerais que l’on ait la même cohérence sur tous les éléments de santé publique.

Mme la présidente. Je mets aux voix l'article 13 bis, modifié.

(L'article 13 bis est adopté.)

Chapitre IV

Dispositions relatives aux recettes de la branche Maladie

Article 13 bis (nouveau)
Dossier législatif : projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2018
Article 14 (interruption de la discussion)

Article 14

I. – La section II du chapitre VIII du titre III du livre Ier du code de la sécurité sociale est ainsi modifiée :

1° Le III de l’article L. 138-10 est ainsi modifié :

a) Après le mot : « sont », la fin de la seconde phrase est ainsi rédigée : « répartis : » ;

b) Sont ajoutés des 1° et 2° ainsi rédigés :

« 1° Pour l’année au titre de laquelle la contribution est due, au prorata des montants remboursés pour ce médicament par les régimes obligatoires d’assurance maladie au titre, respectivement, des 1° et 2° du II ;

« 2° Pour l’année précédant celle au titre de laquelle la contribution est due, selon la proratisation définie au 1° du présent III, en utilisant de nouveau les montants remboursés au titre de l’année au titre de laquelle la contribution est due. » ;

2° L’article L. 138-11 est complété par les mots : « , après application, le cas échéant, des modalités de répartition définies aux 1° et 2° du III dudit article L. 138-10 » ;

3° Le second alinéa de l’article L. 138-15 est complété par une phrase ainsi rédigée : « Selon des modalités fixées par décret, ces déclarations sont transmises au Comité économique des produits de santé, afin que celui-ci signale le cas échéant les rectifications des données à opérer. »

II. – Pour l’année 2018, les taux (Lv) et (Lh) mentionnés à l’article L. 138-10 du même code sont fixés, respectivement, à 0 % et à 3 %.

III. – Les montants appelés, au titre de l’année 2015 et de l’année 2016, pour la contribution mentionnée à l’article L. 138-10 du même code, dans sa rédaction antérieure à la loi n° 2016-1827 du 23 décembre 2016 de financement de la sécurité sociale pour 2017, ne peuvent faire l’objet de la régularisation prévue à l’article L. 138-15 du même code, dans cette même rédaction.

Mme la présidente. La parole est à M. Yves Daudigny, sur l'article.

M. Yves Daudigny. Je formulerai une observation et je poserai une question.

Mon observation tient à la mise à disposition des patients en France des médicaments les plus innovants ; c’est un sujet, madame la ministre, que vous connaissez parfaitement. Nous disposons en France d’un dispositif ATU, ou autorisations temporaires d’utilisation, que le monde entier nous envie. Il permet la mise à disposition, avant l’autorisation de mise sur le marché.

Or l’adoption de dispositions dans le cadre du projet de loi de financement de la sécurité sociale de l’année dernière – chiffre d’affaires de 30 millions d’euros et limite de remboursement à 10 000 euros par patient –, conjuguées à l’existence de deux taux, Lv et Lh, posent aujourd’hui la question du maintien et de l’intérêt de ce dispositif.

Ma crainte porte non pas sur le chiffre d’affaires des grands laboratoires, qui font des profits à deux chiffres, mais sur le fait que les petits laboratoires de biotechnologie ne seront plus en mesure de soutenir les innovations et de les mettre à disposition des patients français.

Nous savons déjà que, pour les médicaments qui ne relèvent pas de l’ATU, le délai en France entre l’autorisation de mise sur le marché et la mise à disposition des patients est en moyenne de 400 jours, alors que la directive européenne prévoit 180 jours.

Il ne faudrait pas que, demain, des médicaments soient disponibles dans les hôpitaux en Allemagne et non en France. Cela constituerait une perte de chance pour les patients. J’espère, madame la ministre, que vous pourrez me rassurer sur ce sujet.

Ma question porte sur le biosimilaire. Il y a quelque temps, nous avions voté la substitution des médicaments biosimilaires par le pharmacien. Les décrets d’application n’ont jamais été pris, donc la mesure ne s’applique pas. Dans le dernier projet de loi de financement de la sécurité sociale, nous avons mis en place les dispositifs d’interchangeabilité, sur l’initiative des médecins.

Sommes-nous assurés que les dispositions prises pour les biosimilaires permettront d’introduire ces médicaments sur le marché ? L’enjeu sera très important dans les années à venir sur le plan financier pour la sécurité sociale.

Il ne s’agirait pas de commettre les mêmes erreurs avec les biosimilaires qu’avec les génériques. En effet, ces erreurs ont fait naître beaucoup de doutes en France et entraîné des retards par rapport aux pays comparables.

Mme la présidente. L'amendement n° 151, présenté par M. Vanlerenberghe, au nom de la commission des affaires sociales, est ainsi libellé :

I. - Après l’alinéa 1

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

…° Au I de l’article L. 138-10, les mots : « minorés des remises mentionnées à l’article L. 138-13 et des contributions prévues au présent article, » sont supprimés ;

II. – Après l’alinéa 2

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

…) La première phrase est supprimée ;

III. - Pour compenser la perte de recettes résultant des I et II, compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :

… – La perte de recettes résultant pour les organismes de sécurité sociale du présent article est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.

La parole est à M. le rapporteur général.

M. Jean-Marie Vanlerenberghe, rapporteur général de la commission des affaires sociales. Cet amendement vise à aménager le mécanisme de la clause de sauvegarde, afin de rendre comparables les assiettes prises en compte d’une année sur l’autre pour le calcul de la contribution due en application du taux Lv ou du taux Lh.

L’année dernière, un amendement gouvernemental avait eu pour objet de faire porter ces taux sur l’évolution du chiffre d’affaires brut des entreprises, c’est-à-dire sans en retrancher les remises conventionnelles versées par les laboratoires dans le cadre des contrats passés avec le Comité économique des produits de santé, le CEPS.

Subsiste cependant le principe de la déduction des remises et contributions versées au titre de la contribution pour la détermination de l’assiette de l’année n-1. Il en résulte une diminution mécanique de l’assiette prise en compte chaque année, ce qui crée une progression automatique, mais aussi artificielle – c’est cela qui est en jeu – du chiffre d’affaires pris en compte l’année suivante pour l’application du taux Lv ou Lh.

Cela revient à donner à l’industrie pharmaceutique le signal d’une stagnation durable de son chiffre d’affaires qui paraît peu compatible avec la période de retour marqué de l’innovation que nous connaissons actuellement, comme vient de le rappeler notre collègue Yves Daudigny.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Agnès Buzyn, ministre. Je donnerai l’avis du Gouvernement sur cet amendement de la commission, mais je répondrai également à M. Daudigny qui s’est exprimé sur l’article.

Vous évoquez, monsieur le sénateur, les délais de remboursement et le fait que certains patients français pourraient subir des pertes de chance. Comme vous le savez, lorsqu’un médicament est innovant et en voie d’obtenir une autorisation européenne de mise sur le marché, il bénéficie en France d’une autorisation temporaire d’utilisation, une ATU, de cohorte, qui prend généralement effet six mois ou un an avant l’autorisation de mise sur le marché.

Par conséquent, les patients français bénéficient d’un dispositif unique au monde, qui leur permet d’avoir accès à des médicaments innovants un an avant leur mise sur le marché.

Ce n’est pas le cas en Allemagne, par exemple. Ce pays se trouve d’ailleurs souvent en difficulté : dès qu’un médicament obtient l’autorisation de mise sur le marché, il est vendu et la négociation de prix se fait l’année qui suit ; si par la suite le médicament est jugé non innovant par les agences d’évaluation, les Allemands ont beaucoup de difficultés, soit à le retirer du marché, soit à en renégocier le prix ! Ils nous envient donc notre dispositif.

Nous devons être très vigilants à ce que la France conserve cet outil qui permet aux patients d’accéder à l’innovation. En pratique, les médicaments qui n’ont pas d’ATU de cohorte sont ceux qui ne sont pas considérés comme très innovants par la communauté. A priori, cela n’entraîne donc pas une perte de chance.

Bref, aucun industriel, qu’il s’agisse d’une grosse industrie ou d’une biotech, ne se trouve mis difficulté par le dispositif français.

Par ailleurs, vous avez exprimé des craintes au sujet de l’innovation. Le taux Lh est passé de 2 % l’année dernière à 3 % aujourd'hui. Les médicaments innovants, qui généralement font partie de la liste en sus, sont vendus à l’hôpital et vont bénéficier d’une augmentation du taux Lh. Cela prouve bien que nous prenons en compte les innovations pour adapter notre balance entre les médicaments très innovants et ceux pour lesquels nous cherchons des réductions de prix, notamment avec un taux sur les médicaments distribués en ville élevé, qui lui reste à 0 %, car nous ne souhaitons pas que les prix des médicaments non innovants augmentent.

Nous faisons bien la part entre ce qui doit être financé, c’est-à-dire la vraie innovation de rupture, qui sera accompagnée par le taux Lh, et ce qui mérite des économies. Il existe en effet des marges sur les médicaments standards, avec un taux Lv qui restera stable. Il me semble que nous sommes, de ce point de vue, assez discriminants.

Quant à l’amendement n° 151, défendu par le rapporteur général de la commission des affaires sociales, si nous excluions du calcul de déclenchement les contributions versées en année n-1 au titre de la clause de sauvegarde, nous serions dans l’embarras. Nous avons un objectif très ambitieux en matière de maîtrise de la dépense des médicaments. La clause de sauvegarde n’a pour seul but que de sécuriser le respect de cet objectif fixé dans l’ONDAM et les économies prévues.

Son application, pour être efficace, ne doit pas reprendre d’une année sur l’autre les éventuels dépassements, faute de quoi l’on perdrait tout outil de régulation. Ce serait totalement contradictoire avec l’objectif de maîtrise des dépenses de santé, sachant que nous faisons attention à ce que cette maîtrise porte sur les marges d’économies réalisables sur les médicaments de routine et ne pénalise pas les médicaments innovants, qui verront leur taux Lh augmenté.

Pour cette raison, le Gouvernement émet un avis défavorable.

Mme la présidente. La parole est à M. le rapporteur général.

M. Jean-Marie Vanlerenberghe, rapporteur général de la commission des affaires sociales. Il apparaît assez vain de continuer à argumenter, puisque les gouvernements qui se succèdent nous font tous la même réponse…

M. Alain Milon, président de la commission des affaires sociales. Ce n’est pas bon signe ! (Sourires.)

M. Jean-Marie Vanlerenberghe, rapporteur général de la commission des affaires sociales. Il paraît préférable d’étudier cette question calmement. Je retire donc cet amendement, madame la présidente.

Mme la présidente. L'amendement n° 151 est retiré.

L'amendement n° 150, présenté par M. Vanlerenberghe, au nom de la commission des affaires sociales, est ainsi libellé :

I. – Après le premier alinéa

Insérer deux alinéas ainsi rédigés :

…° Le II de l’article L. 138-10 est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« - les médicaments biologiques similaires définis au a du 15° de l’article L. 5121-1 du code de la santé publique. » ;

II. – Pour compenser la perte de recettes résultant du I, compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :

… – La perte de recettes résultant pour les organismes de sécurité sociale du présent article est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.

La parole est à M. le rapporteur général.

M. Jean-Marie Vanlerenberghe, rapporteur général de la commission des affaires sociales. Cet amendement vise à exclure le chiffre d’affaires réalisé au titre des médicaments biosimilaires de l’assiette prise en compte pour la détermination de la contribution due au titre de la clause de sauvegarde.

Il s’agit ainsi d’étendre aux biosimilaires l’exclusion existant déjà pour les médicaments génériques, afin de ne pas pénaliser la diffusion de ces produits par une taxation désincitative.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Agnès Buzyn, ministre. Cet amendement vise à exclure les biosimilaires. Or ces derniers sont aussi efficaces, mais moins chers, que les bioprinceps. Ils permettent donc de faire les économies tout à fait nécessaires pour financer les innovations dont nous parlons.

Le mois dernier, j’ai lancé un plan de promotion des biosimilaires, avec un objectif ambitieux de 80 % de pénétration des biosimilaires sur le marché d’ici à 2022. Aux termes de l’article 38 du projet de loi de financement de la sécurité sociale, le CEPS garantira aux biosimilaires hospitaliers les mêmes tarifs que les bioprinceps.

L’article 39, quant à lui, permettra d’intéresser les établissements de santé à la prescription de biosimilaires.

Enfin, l’article 35 sur les innovations du système de santé offrira un cadre pour des expérimentations visant également à encourager cette prescription.

Ce projet de loi de financement de la sécurité sociale comprend de nombreuses mesures favorables aux biosimilaires. C’est la raison pour laquelle je demande le retrait de cet amendement.

Mme la présidente. Monsieur le rapporteur général, l'amendement n° 150 est-il maintenu ?

M. Jean-Marie Vanlerenberghe, rapporteur général de la commission des affaires sociales. Non, je le retire, madame la présidente.

Mme la présidente. L'amendement n° 150 est retiré.

L'amendement n° 462, présenté par Mme Cohen, M. Watrin et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :

Alinéa 9

Remplacer le taux :

3 %

par le taux :

2 %

La parole est à Mme Laurence Cohen.

Mme Laurence Cohen. Cet amendement vise à revenir au taux Lh fixé lors du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2017, à savoir à 2 %, au lieu des 3 % prévus dans le présent projet de loi.

Nous avons bien noté les efforts du Gouvernement pour réduire le coût des médicaments, mais la marge financière reste tellement importante qu’il convient d’abaisser le taux de progression du chiffre d’affaires des industriels à partir duquel ceux-ci sont soumis à une contribution pour les médicaments distribués à l’hôpital.

Certes, vous avez indiqué à l’Assemblée nationale, madame la ministre, que le relèvement de ce taux par rapport à l’an dernier était destiné à anticiper l’arrivée de nouveaux médicaments et de nouveaux traitements onéreux, notamment en cancérologie. Il me semble néanmoins qu’un taux de 2 % n’empêche en rien l’innovation, tout en apportant des garanties plus solides quant à la maîtrise des prix.

Je crois que chacun se souvient, ici, des dérives liées au Sovaldi pour la prise en charge de l’hépatite C. Ce médicament est le plus cher de l’histoire, alors qu’il est produit à un coût très faible !

Je rappelle que la Cour des comptes a rendu en septembre dernier un rapport préconisant justement de mieux maîtriser le prix des médicaments. Elle recommandait, notamment, de donner plus de moyens au CEPS pour lui permettre de réviser plus régulièrement les prix des médicaments, en particulier pour les médicaments innovants et coûteux.

Je souhaiterais, madame la ministre, que vous puissiez nous répondre sur ce point. Je sais que vous avez essayé d’œuvrer dans ce domaine lors de vos précédentes fonctions, notamment, mais il est important d’essayer de changer les règles en vigueur qui font qu’un pays comme la France n’a pas toute latitude pour fixer ses prix, le marché étant international.

Cet amendement est une première étape, qui, pour le coup, ne dépend que de notre volonté politique.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Jean-Marie Vanlerenberghe, rapporteur général de la commission des affaires sociales. Le taux Lh, qui porte sur les médicaments distribués à l’hôpital, est celui qui concerne le plus les médicaments innovants, issus tout au plus d’une vingtaine d’entreprises.

Le taux de 3 % proposé permet de concilier la nécessaire prise en compte de l’innovation médicamenteuse, dont le retour constitue un motif de satisfaction, et la régulation des dépenses de médicaments.

Je souligne, par ailleurs, que le taux Lv, qui porte sur les médicaments distribués en ville, est fixé à 0 % ; cela signifie que le chiffre d’affaires des industriels produisant des médicaments de ville, moins porteurs d’innovation, sera bloqué, comme c’est le cas depuis plusieurs années.

La commission a donc émis un avis défavorable sur cet amendement.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Agnès Buzyn, ministre. Je souhaite rassurer Mme Cohen.

La question du prix des médicaments est un enjeu international majeur que j’ai défendu lorsque je présidais l’Institut national du cancer, l’INCA. Je sais combien il est complexe de faire baisser les prix des médicaments. C’est un enjeu qui nous concernera encore de nombreuses années.

Ce qui me pose problème avec cet amendement, c’est que j’anticipe. Je connais parfaitement les médicaments qui arriveront bientôt sur le marché, probablement l’année prochaine. Ce sont des médicaments qui, contrairement au Sovaldi que vous avez cité, sont excessivement coûteux à produire – je pense en particulier à des médicaments de traitement du cancer, notamment les cancers des enfants. Le Gouvernement aura donc moins de marge de manœuvre dans la négociation.

Je ne vois pas comment nous allons expliquer aux enfants français atteints de leucémie – la question m’a été posée par un sénateur lors des questions d’actualité au Gouvernement la semaine dernière – que nous avons fixé le taux Lh à 2 % pour les médicaments de thérapie cellulaire et génique, extrêmement cher et long à produire, les CAR-T cells, ce qui ne permettra pas de financer ces innovations de rupture. En effet, pour le coup, ce sont vraiment des innovations de rupture, qui vont guérir des enfants atteints de cancers réfractaires.

C’est donc pour anticiper sur des innovations très exceptionnelles que nous avons décidé de porter le taux Lh à 3 %. Cette hausse sera compensée par une baisse de prix importante, à la fois grâce au taux élevé à 0 % et à la baisse de 50 % du prix des médicaments de la liste en sus, qui font l’objet de brevets anciens.

Nous mettons la pression sur les mécanismes de rentes de situation ; le taux Lh nous permet simplement d’assurer l’avenir pour que les patients français accèdent à des innovations exceptionnelles.

Le Gouvernement émet donc un avis défavorable.

Mme la présidente. La parole est à Mme Laurence Cohen, pour explication de vote.

Mme Laurence Cohen. Je suis sensible aux arguments que vous avez avancés, madame la ministre, mais je m’interroge, car on reprend simplement ici le taux de 2017… Je suis étonnée des possibles conséquences de cette décision.

Vous nous dites qu’il s’agit de médicaments innovants destinés à des enfants victimes de cancers. Qui pourrait s’opposer à une telle mesure ?

Je peux comprendre les arguments de Mme la ministre en faveur du retrait, mais j’ai encore des doutes.

Le dépôt de cet amendement nous a certes permis d’avoir un échange sur la nécessité de continuer nos efforts pour éviter de nouveaux scandales.

Il serait néanmoins souhaitable d’organiser un grand débat sur la création d’un pôle public du médicament et de la recherche. C’est une piste possible, que nous pourrions essayer d’explorer ensemble, sans point de vue figé, pour le bien-être et la santé des Français.

C’est dans cet espoir que je retire le présent amendement, madame la présidente. Continuons à débattre, à travailler ensemble et à trouver les solutions les plus adaptées.

Mme la présidente. L’amendement n° 462 est retiré.

Je mets aux voix l’article 14.

(L’article 14 est adopté.)

Mme la présidente. Mes chers collègues, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à quatorze heures trente.

La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à treize heures, est reprise à quatorze heures trente, sous la présidence de M. Vincent Delahaye.)