Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Jean-Baptiste Lemoyne, secrétaire d'État. Nous abordons le sujet des collectivités locales qui nous sont chères aux uns et aux autres.

Sur l’amendement n° I-231, qui vise à augmenter la DGF de 4 milliards d'euros, même si nous approchons de Noël, vous comprendrez que le Gouvernement s’en tienne à la rupture qui consiste à stabiliser la DGF après qu’elle ait diminué tous les ans depuis 2013. J’émets donc, au nom du Gouvernement, un avis défavorable.

Je le précise, d’une façon générale, le Gouvernement partage les appréciations de la commission sur cette salve d’amendements.

L’amendement n° I-232 vise à augmenter de 590 millions d'euros la DGF attribuée aux départements. Un dispositif mettant en place le fonds d’urgence de 100 millions d'euros va être prochainement soumis à la discussion, dans le cadre du collectif budgétaire.

Par ailleurs, le ministre de l’action et des comptes publics est ouvert – il l’a dit –, dans le cadre du travail contractuel qui va s’engager avec les 319 plus grosses collectivités, à ce qu’une réflexion ait lieu par rapport aux allocations individuelles de solidarité. Doivent-elles ou non être prises en compte dans la norme d’évolution de la dépense – on parle bien d’évolution de la dépense et pas de baisse de dépense ? Ce point est important.

L’avis du Gouvernement est défavorable sur l’amendement n° I-232.

L’amendement n° I-233 vise à augmenter la DGF de 380 millions d'euros pour financer une augmentation, notamment de la DSU et de la DSR. Au sein de l’enveloppe de DGF qui est stabilisée dans le cadre de la copie présentée par le Gouvernement, le niveau de péréquation, pour ce qui concerne la lutte contre les inégalités territoriales, a lui aussi été augmenté, à parts égales, de 180 millions d'euros pour la DSU et la DSR, après l’augmentation soclée de 380 millions d'euros l’année dernière. C’est pourquoi j’émets, au nom du Gouvernement, un avis défavorable.

L’amendement n° I-239 vise lui aussi à augmenter la DGF des départements de 590 millions d'euros. Je vous renvoie à mon propos précédent et émets un avis défavorable.

L’amendement n° I-577 concerne également la progression de la DSR et de la DSU. On augmente d’ores et déjà cette année la péréquation dans le projet de loi de finances. J’émets, au nom du Gouvernement, qui souhaite s’en tenir à ce niveau, un avis défavorable.

Les amendements identiques nos I-535 et I-576, sur lesquels la commission souhaite entendre l’avis du Gouvernement, sont relatifs au fonds exceptionnel de soutien aux régions qui avait été institué par la loi de finances initiale pour 2017.

Dans l’expression « fonds exceptionnel », il y a le mot « exceptionnel ». Par conséquent, ce fonds n’avait pas vocation à être reconduit. J’entends que le précédent gouvernement avait pris des engagements. Si l’on considère le chapelet de mines laissé dans le précédent projet de loi de finances (M. Claude Raynal éclate de rire.) qui a d'ailleurs conduit à prendre, cet été, un certain nombre de mesures de régulation budgétaire,…

M. Albéric de Montgolfier, rapporteur général de la commission des finances. Des décrets d’avance ! On l’avait dit !

M. Jean-Baptiste Lemoyne, secrétaire d'État. … force est de constater que nous allons tenir la promesse différemment.

M. Claude Raynal. En ne la tenant pas !

M. Jean-Baptiste Lemoyne, secrétaire d'État. En la tenant différemment ! Le Gouvernement propose d’affecter de la TVA, laquelle est une recette très dynamique, en progression de l’ordre de plus de 5 % à l’heure actuelle. Cela va donc permettre aux régions d’avoir 100 millions d'euros de plus par rapport au montant de DGF précédent. Ce n’est pas rien !

Pour donner un petit ordre d’idée, le fonds exceptionnel est de 450 millions d'euros sur une DGF qui représentait 4 milliards d'euros pour les régions. Quelle collectivité aurait ainsi plus de 10 % d’attribution ? J’en connais assez peu !

Mme Sophie Primas. Pas les communes, en tout cas !

M. Jean-Baptiste Lemoyne, secrétaire d'État. Il faut apprécier à sa juste mesure cette affectation de TVA, recette dynamique, qui produira des effets positifs de l’ordre de plus de 100 millions d'euros dès cette année.

J’en arrive aux amendements nos I-418, et I-419 présentés par MM. Patient et Karam. J’entends bien l’appel à prendre en compte la spécificité ultramarine. Le Premier ministre a évoqué le sujet lors de son déplacement en Martinique, il y a quelques semaines.

Il faut utilement mettre à profit les états généraux des outre-mer pour continuer la réflexion.

Un petit problème de jurisprudence se pose. Si ces amendements étaient adoptés en l’état, cela pourrait créer un précédent pour d’autres collectivités qui sont en cours d’évolution vers la collectivité unique – je pense en particulier à la Corse, qui va entrer dans ce régime à partir du 1er janvier 2018– , ce qui n’est pas souhaité à ce stade. Nous devons en tenir compte.

Par conséquent, je souhaite le retrait de ces amendements, sachant qu’il faut continuer à réfléchir sur la meilleure prise en compte des spécificités des territoires ultramarins dans le cadre de l’exercice conduit par Mme Annick Girardin, auquel je sais que vous contribuez ardemment, mesdames, messieurs les sénateurs.

Mme la présidente. La parole est à M. Claude Raynal, pour explication de vote.

M. Claude Raynal. Monsieur le secrétaire d'État, j’ai entendu vos arguments. Je les avais un petit peu parés préalablement. Peut-être ne m’avez-vous pas, vous, entendu totalement… Ces arguments ont été avancés à l’Assemblée nationale, nous les connaissions, mais le fait de les répéter ne les rend pas justes, vous l’admettrez !

Un point me gêne dans cette affaire. Je me méfie beaucoup du mot « promesse ». Quand un gouvernement ou plutôt quand l’État prend des engagements par rapport à des collectivités, dans un cadre négocié, ce n’est pas une promesse, c’est un engagement !

Cela a toujours honoré la République que les gouvernements se succédant les uns aux autres tiennent les engagements pris.

Un engagement est tout à fait différent d’une promesse. Une promesse est faite lors d’un discours électoral prononcé devant de grandes assemblées. On le comprend, cela n’engage personne ! Mais quand, à Bercy, au cours d’une réunion avec des représentants des régions, un protocole est signé ou un accord est exprimé par un gouvernement, ce n’est pas un gouvernement qui s’engage, c’est l’État !

Pour l’avenir, c’est très inquiétant. Faut-il arrêter toute négociation entre l’État et les acteurs un an avant les élections futures ? En effet, les discussions ne servent à rien ! Et on bloque un an sur cinq ans. Cela fait déjà 20 % de glaciation de la réflexion entre l’État et qui que ce soit. Ce n’est pas raisonnable !

Reconnaissez que vous avez fait un autre choix, que vous procédez à des coupes budgétaires pour des raisons qui vous regardent. Cela étant, ce n’est pas juste ! Et quand j’entends que les 100 millions d'euros par an de la TVA viennent compenser, je réponds bien sûr que c’est faux. Car ces recettes étaient déjà intégrées dès le départ par rapport à un coût qui était évalué, initialement, à 1,6 milliard d’euros, a été revu à 1 milliard d’euros, accepté par les régions, dans le cadre d’une négociation à 600 millions d'euros.

On ne peut pas revenir sur une négociation ! C’est d’ailleurs ce que vous ont dit les régions, toutes couleurs politiques confondues, monsieur le secrétaire d'État. Il y a eu un désaccord sur le fait même que l’on puisse revenir sur un accord avec l’État.

Mme la présidente. La parole est à Mme Sophie Primas, pour explication de vote.

Mme Sophie Primas. Il est temps de siffler la fin de la récréation à propos des collectivités territoriales. L’abondance des amendements le montre !

Les collectivités territoriales ont subi, depuis maintenant quatre ou cinq ans – ce n’est pas un reproche, mais un constat –, l’application de la loi NOTRe et de la loi Métropoles, avec des refondations d’établissements publics de coopération intercommunale. Pour ce qui me concerne, le territoire de mon EPCI a été changé quatre fois en cinq ans. Les collectivités ont subi des baisses de dotations – une première salve lors du dernier quinquennat, une nouvelle est annoncée –, des contrats de ruralité qui vont et viennent, la disparition de la réserve parlementaire, des transferts de compétences de l’État vers les collectivités territoriales qui ne sont pas compensés… On nous annonce désormais la suppression de la taxe d’habitation, même si la Haute Assemblée a eu la sagesse d’annuler cette mesure. On assiste, en réalité, à des actes de recentralisation évidents, avec une perte complète de la visibilité et de la prédictibilité des budgets pour les élus locaux. Il est temps d’arrêter !

On nous attribue des dotations, on les remplace par la TVA, on les rechange, on les baisse, on nous en promet, on nous les reprend six mois après… Cela devient insupportable pour les gens chargés de la véritable conduite des politiques publiques locales !

Vraiment, j’appelle de mes vœux une trajectoire, des engagements, l’inscription dans la loi de mécanismes pérennes. Je le répète, cela devient, pour nos collectivités territoriales et pour les élus de la République qui servent nos concitoyens, absolument insupportable ! (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains, du groupe Union Centriste, du groupe Les Indépendants – République et Territoires, ainsi que sur des travées du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.)

Mme la présidente. La parole est à M. Georges Patient, pour explication de vote.

M. Georges Patient. Je veux bien admettre l’argument de M. le secrétaire d'État, comme de M. le rapporteur général, à propos de l’amendement n° I-418 quant à un risque de diffusion.

Je maintiens l’amendement n° I-419, parce qu’il s’agit de corriger une disparité existante entre les collectivités hexagonales et celles d’outre-mer. La mesure proposée, si elle était adoptée, permettrait aux collectivités d’outre-mer de gagner 5,4 millions d'euros au lieu de 1,7 million d’euros, soit plus de 3 millions d'euros supplémentaires, ce qui n’est pas énorme pour le budget.

Quant aux états généraux des outre-mer, ils peuvent toujours être renvoyés aux calendes grecques !

Mme la présidente. La parole est à M. Pascal Savoldelli, pour explication de vote.

M. Pascal Savoldelli. M. le rapporteur général a été très clair. Il a tenu des propos très cohérents, faisant le lien entre les exonérations fiscales et les dotations de l’État aux collectivités locales. Cela a le mérite de la clarté !

Monsieur le secrétaire d'État, vous dites : « Fonds d’urgence, dix-neuf départements, 100 millions d'euros. Mais, sénateur Savoldelli, groupe communiste républicain citoyen et écologiste, ne vous inquiétez pas, on va avoir un grand moment de dialogue avec les collectivités territoriales. » Mais il s’agit d’une enveloppe fermée !

Alors, nous disons oui au dialogue, mais à la condition que le Gouvernement accepte de prendre, en accord avec les collectivités territoriales, une décision modificative, c’est-à-dire de déposer un collectif budgétaire. Sinon, pardonnez-moi, monsieur le secrétaire d’État, mais ce n’est qu’un exercice de com’ !

Certes, on se met autour de la table pour parler des difficultés rencontrées, en particulier par les communes et les départements, mais aussi des moyens des régions, auxquelles de nouvelles responsabilités ont été transférées, mais l’enveloppe reste fermée !

Il faut donc comprendre la fatigue des élus. Mme Primas l’a exprimée, et je l’ai applaudie. Toutefois, ma chère collègue, un problème nous différencie : je n’ai voté ni la suppression de l’ISF ni 115 milliards d’euros d’exonérations pour les entreprises. Quand même, voyez les chiffres ! Nous avons pris des décisions sur les titres de séjour, le CICE, le CIR, le crédit d’impôt recherche ; les échelles sont différentes. Or, comme M. le rapporteur général l’a dit avec honnêteté politique et transparence, il existe un vase communicant entre, d’une part, les dotations aux collectivités territoriales et, d’autre part, ces deux derniers dispositifs. Mes calculs sont peut-être un peu simplistes, mais on aura, d’un côté, 13 milliards d’euros en moins pour les collectivités et, de l’autre, 12 milliards d’euros affectés aux dispositifs de crédit d’impôt.

Sérieusement, j’ai peur que cela ne craque ! J’ai déjà évoqué le risque de cessation de paiements auquel sont exposés les départements. Au-delà se posera une autre difficulté : à force de faire craquer certaines villes, les élus vont abandonner leurs mandats, et ce quelle que soit leur étiquette politique. En effet, tous ne sont pas animés par un désir de faire carrière ; pour l’essentiel, les élus, en France, sont des bénévoles. Il y aura donc, à un moment, de sérieux problèmes de cohésion sociale et, si l’on veut les prévenir, il faut annoncer plus qu’un simple dialogue. Le fonds d’urgence aux départements n’est que de 100 millions d’euros, et l’enveloppe est fermée !

Mme la présidente. La parole est à M. Roger Karoutchi, pour explication de vote.

M. Roger Karoutchi. Je voudrais revenir sur les amendements relatifs à la capacité offerte aux régions d’assurer la compétence « développement économique », qui leur a été transférée. Cette situation me gêne beaucoup.

Pour le dire très clairement, lorsqu’on a décidé d’effectuer ce transfert, je n’y étais que moyennement favorable. En effet, comme je l’avais dit aux présidents de région, il ne fallait pas se faire d’illusion : le transfert serait fait ; quant à la couleur de l’argent, ils la verraient beaucoup plus tard ! Les régions ont reçu, avec cette compétence, une responsabilité, et elles font désormais l’objet des critiques des entreprises et de l’ensemble des citoyens, mais elles ne disposent pas des moyens nécessaires pour l’assumer.

On avait alors estimé le coût global de cette compétence transférée à 600 millions d’euros. L’État avait clairement promis un fonds de garantie de 450 millions d’euros. Or, à présent, on ne parle plus que de 150 millions d’euros. Quelle est donc la parole de l’État ? À quoi sert-il de signer un accord, une convention avec lui ?

Justement, la présidente de la région d’Île-de-France, ou son prédécesseur, avait signé un accord avec le Gouvernement, alors dirigé par M. Manuel Valls, sur le pass Navigo qui prévoyait un concours financier de l’État. Comprenez mon agacement : dès le changement de gouvernement, salut et merci : le concours financier tombe ! On critique aujourd’hui la présidente de région : comment se fait-il qu’elle augmente le prix du pass Navigo ? Eh bien, c’est parce qu’elle n’a pas reçu la moitié de la somme promise !

La gestion des collectivités territoriales, qui se fait au plus près des citoyens, doit pouvoir reposer sur des sommes à peu près stabilisées. Si l’État promet aux régions 450 millions d’euros pour assurer l’exercice de la compétence « développement économique », il faut qu’elles reçoivent 450 millions d’euros ! Cela peut se négocier à la marge, mais réduire des deux tiers leur capacité en la matière n’est pas sérieux. Franchement, les régions ne négocieront plus et ne demanderont plus de compétences supplémentaires. Si elles ne reçoivent pas la capacité financière d’agir, cela n’a plus aucun sens !

Monsieur le secrétaire d’État, laissez donc les régions vivre comme elles le peuvent ! Ce ne serait peut-être pas mal. (Bravo ! et applaudissements sur des travées du groupe Les Républicains.)

Mme la présidente. La parole est à M. Marc Laménie, pour explication de vote.

M. Marc Laménie. Le nombre d’amendements déposés sur l’article 16 montre bien la préoccupation unanime des élus, en particulier, des élus de terrain. M. Savoldelli mentionnait à juste titre que nombre d’entre eux sont bénévoles. De fait, les inquiétudes dont témoignent ces amendements sont légitimes.

L’article 16 est très important, au moins en masse financière, puisqu’il fixe le montant de la DGF. Ce prélèvement effectué sur les ressources de l’État en faveur des collectivités territoriales est établi pour 2018 à 27 milliards d’euros. Rappelons que, ces dernières années, cette dotation baissait tous les ans de 2, voire 3 milliards d’euros, ce qui a eu un impact sur les communes, les intercommunalités, les départements et les régions. La situation varie d’un département à l’autre, d’une commune à l’autre ; ce n’est vraiment pas simple.

Certes, nous savons qu’il faut faire des économies à tous les niveaux. Toutefois, les collectivités territoriales sont des donneurs d’ordre importants pour l’activité du bâtiment et des travaux publics. Les restrictions envisagées ne concerneraient que les dépenses de fonctionnement. Cela dit, on est en train de mesurer la situation de chaque commune et les charges qui pèsent sur chaque collectivité. Dans ce domaine, il faut rester extrêmement prudent.

Mme la présidente. La parole est à Mme Lana Tetuanui, pour explication de vote.

Mme Lana Tetuanui. Pour rester cohérente et solidaire de mes collègues ultramarins, je dois faire part à M. le secrétaire d’État de ma stupéfaction à entendre les propos tenus ce matin.

Les collectivités ultramarines participent à l’effort de la Nation. Elles subissent, comme tout le monde, les réductions de crédits demandées. Monsieur le secrétaire d’État, quelle est vraiment la position de l’État par rapport aux collectivités ultramarines ?

J’aurai l’occasion de revenir sur le financement des collectivités locales, puisque la DGF participe, bien sûr, au fonctionnement de nos collectivités locales ultramarines. Je me demande en revanche quelle est la différence entre les collectivités locales métropolitaines et ultramarines. Toutes sont assujetties aux mêmes règles, le fameux code général des collectivités territoriales, qui s’applique aussi bien sous nos cocotiers et nos palmiers qu’en France métropolitaine.

Vous avez évoqué, monsieur le secrétaire d’État, les assises des outre-mer. Or vous savez que beaucoup de ministres des outre-mer sont passés chez nous. Ils recevaient des colliers de tiaré et de coquillages, la musique était douce et l’on distribuait de tout à tous, par-ci et par-là ; à chaque nouveau gouvernement, chacun veut venir mettre de sa crème !

L’élue de terrain que je suis, monsieur le secrétaire d’État, veut vous rappeler que nous avons voté la loi de programmation relative à l’égalité réelle outre-mer. Bien des solutions y ont été trouvées. Il suffit juste, aujourd’hui, que le Gouvernement les décline. Or on va encore venir sous nos tropiques nous faire rêver : voulez-vous ceci, voulez-vous cela ? Il faut arrêter ! Soyez donc clair, une bonne fois pour toutes, et dites-nous quelle est vraiment la place de nos collectivités au sein de la République. (Applaudissements sur les travées du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, ainsi que sur des travées du groupe socialiste et républicain et du groupe Les Républicains.)

Mme la présidente. La parole est à M. Philippe Dallier, pour explication de vote.

M. Philippe Dallier. Cette série d’amendements vise à satisfaire à peu près tout le monde : les villes bénéficiaires de la DSU, les communes qui reçoivent la DSR, les départements, ou encore les régions. Cela suffit à démontrer que, sur toutes nos travées, la plupart des élus sont toujours aussi inquiets pour l’avenir de nos collectivités territoriales.

Certes, le Gouvernement nous a promis la stabilisation de la DGF. Néanmoins, quand on entre dans le détail, on voit bien que, par nécessité, cette promesse ne sera pas tenue pour tout le monde. Ainsi des communes : on donne plus – c’est normal – aux communes dont la population augmente ou à celles qui se regroupent ; on pense à augmenter la DSU et la DSR. Mais tout cela se fait à enveloppe fermée. Dès lors, certaines collectivités vont voir baisser leurs dotations de compensation, en particulier, la dotation de compensation de la réforme de la taxe professionnelle, ou DCRTP, mais aussi le produit de la taxe foncière sur les propriétés bâties. C’est pourquoi l’inquiétude est encore présente.

Je veux quand même, monsieur le secrétaire d’État, vous interroger sur un point particulier. On sait que ces dotations de péréquation posent bien des difficultés ; leurs critères sont complètement différents d’une dotation à l’autre. Ainsi, je rappelle souvent qu’une commune, en Île-de-France, peut être attributaire de la DSU, contributeur au FPIC, et neutre au FSRIF. Cela suffit à démontrer que la complexité actuelle aboutit parfois à des situations quelque peu inexplicables. Un travail avait été engagé, au Sénat tout d’abord, mais aussi à l’Assemblée nationale, sur une réforme de la DGF et, peut-être, de ces dotations de péréquation. Ce travail sera-t-il abandonné, monsieur le secrétaire d’État ?

De fait, toute volonté de réforme des valeurs locatives semble disparue, alors même que, en dépit de la disparition de la taxe d’habitation, la taxe foncière reste assise sur ces valeurs locatives. Alors, l’idée de réformer la DGF et les dotations de péréquation est-elle toujours sur la table, ou bien passerons-nous cinq années à ne plus en entendre parler ?

Mme la présidente. La parole est à M. le secrétaire d’État.

M. Jean-Baptiste Lemoyne, secrétaire d’État. Je souhaite apporter quelques éléments de réponse aux orateurs qui se sont exprimés.

M. Raynal a évoqué la parole de l’État et la nécessité, pour un gouvernement, de tenir les engagements pris par l’un de ses prédécesseurs.

M. Claude Raynal. La continuité de l’État !

M. Jean-Baptiste Lemoyne, secrétaire d’État. Certes, monsieur le sénateur, mais je me souviens que, en 2012, une majorité succédant à une autre, le Parlement, sur l’initiative du Gouvernement d’alors, a rayé d’un trait de plume une réforme visant à traiter de la fiscalité contre les délocalisations.

Notre idée est de parvenir naturellement, tout en préservant un esprit de discussion, à trouver des modalités distinctes pour préserver les ressources des régions.

Mme Primas a quant à elle rappelé la nécessité de stabilité. Ce débat se tient de façon très récurrente. Déjà, en 2004, assis au banc des conseillers du Gouvernement, j’ai pu observer un tel débat : il s’agissait alors d’affecter une part de la taxe intérieure de consommation sur les produits pétroliers aux régions à la suite du transfert de certaines compétences. Ensuite, ayant été, jusqu’à très récemment, l’un des vôtres, mesdames, messieurs les sénateurs, j’ai pu participer à d’autres débats similaires.

C’est pourquoi, comme vous, j’appelle de mes vœux un vrai dialogue qui permette de poser des bases pérennes. C’est aussi l’esprit dans lequel Gérald Darmanin, Jacqueline Gourault et Gérard Collomb travaillent. Telle est l’idée derrière la logique contractuelle. En effet, pour signer un contrat, il faut se mettre autour de la table et discuter. On trouve ensemble des équilibres sans que cela soit imposé d’en haut.

C’est pourquoi, madame la sénatrice, puisque vous avez évoqué, à raison, les baisses de dotations du quinquennat précédent, l’honnêteté intellectuelle m’oblige à vous dire qu’on ne peut en revanche parler aujourd’hui de baisses de dotations. Je comprends bien que, par un petit argument rhétorique, on essaie de faire passer l’idée qu’il y aurait de telles baisses, mais c’est faux. Nous travaillons simplement sur l’évolution des dépenses de fonctionnement, qui sont différentes des dotations. Celles-ci restent stables, ce qui représente une révolution copernicienne par rapport à l’évolution antérieure.

M. Philippe Dallier. Stables en bloc, mais pas dans le détail !

Mme Sophie Primas. Le Président de la République a tout de même annoncé 13 milliards d’euros en moins !

M. Jean-Baptiste Lemoyne, secrétaire d’État. Madame Tetuanui, nous sommes tous des élus de terrain.

Mme Sophie Primas. Certains le sont plus que d’autres !

M. Jean-Baptiste Lemoyne, secrétaire d’État. Quand j’étais maire de Vallery, j’ai bien vu les conséquences des décisions du quinquennat précédent en termes de dotations : chaque année, ma commune recevait de l’État 6 000 ou 7 000 euros de moins que l’année précédente. Je sais donc bien de quoi il est question.

De ce point de vue, madame la sénatrice, sachez que nous nous attachons à vous proposer les mesures les plus pragmatiques possible. S’agissant des outre-mer, je n’ignore pas que des assises se sont tenues voilà plusieurs années, mais je crois sincèrement que la démarche portée par Mme Annick Girardin est très ouverte et inclusive. Nous n’attendons qu’une chose : construire, avec vous, l’avenir des outre-mer !

Quant à la proposition de M. Patient, la DGF dont bénéficient les départements d’outre-mer n’est pas moindre du point de vue des collectivités. En effet, la DGF des collectivités uniques n’est pas calculée en fonction du nombre d’habitants, car elle résulte de la compensation de la suppression de la part salariale de la taxe professionnelle. C’est pourquoi les schémas sont différents.

Dès lors, sans méconnaître la nécessité de conduire un travail sur ce sujet, je vous avoue qu’il est compliqué, pour le Gouvernement, de souscrire dès aujourd’hui à une telle évolution. C’est pourquoi je vous demande de nouveau de bien vouloir retirer votre amendement n° I-419, monsieur Patient, faute de quoi l’avis du Gouvernement restera, à mon grand regret, défavorable.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° I-231.

(L’amendement n’est pas adopté.)

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° I-232.

(L’amendement n’est pas adopté.)

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° I-233.

(L’amendement n’est pas adopté.)

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° I-239.

(L’amendement n’est pas adopté.)

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° I-577.

(L’amendement n’est pas adopté.)

Mme la présidente. Je mets aux voix les amendements identiques nos I-535 et I-576.

(Les amendements ne sont pas adoptés.)

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° I-418.

(L’amendement n’est pas adopté.)

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° I-419.

(L’amendement est adopté.)

Mme la présidente. Mes chers collègues, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à quatorze heures trente.

La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à douze heures cinquante, est reprise à quatorze heures trente, sous la présidence de M. Vincent Delahaye.)