M. Robert del Picchia, rapporteur pour avis. Très bien !

M. Rachid Temal, rapporteur pour avis. J’évoquerai aussi la situation des ressortissants français au Royaume-Uni, près de 300 000, sujet d’autant plus important que nous sommes, vous le savez, à quelques jours du sommet européen sur la question du Brexit.

Nous savons que nos postes consulaires sur le territoire britannique ressentent directement les effets des démarches que les Français entreprennent au vu de cette nouvelle situation. Nous sommes donc particulièrement attentifs à ce dossier et à ce que vous pourrez nous dire, monsieur le ministre, sur la possibilité que nos ressortissants accèdent facilement au statut de résident permanent dans ce pays.

Pour finir, je tiens à remercier les deux rapporteurs spéciaux pour leurs propos sur la question de l’enseignement français à l’étranger et sur la nécessité d’assurer un service permanent de qualité. L’amendement déposé par la commission des finances, s’il est adopté, sera une bonne chose pour nos concitoyens. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain.)

M. Robert del Picchia, rapporteur pour avis. Très bien !

Mme la présidente. La parole est à M. le rapporteur pour avis.

M. Robert del Picchia, rapporteur pour avis de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées, pour le programme « Diplomatie culturelle et d’influence ». Madame la présidente, monsieur le ministre, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, 718 millions d’euros pour le programme 185 « Diplomatie culturelle et d’influence » : c’est un budget enfin stable. On est tenté de vous dire, monsieur le ministre, monsieur le secrétaire d’État : c’est bien ! Mais, avec André Vallini, nous avons plusieurs réserves.

La première, très importante, porte sur l’AEFE, fleuron de notre diplomatie d’influence. Les orateurs précédents en ont parlé.

C’est un point très négatif : faire de l’AEFE un outil de régulation budgétaire – il faut peut-être en chercher les responsables du côté de Bercy – n’est pas acceptable. Une diminution de 33 millions d’euros des sommes qui lui sont allouées par rapport à 2017 : c’est trop lourd.

Cela pose des problèmes un peu partout. Dans différents pays, nous avons assisté à des grèves de professeurs, que les parents d’élèves, surtout étrangers, ne comprennent pas. Ces derniers sont un peu, je dois le dire, perturbés par ce qui se passe.

Puiser dans les réserves des établissements, c’est ponctionner des familles françaises, mais aussi étrangères, avec le risque qu’elles fassent à l’avenir d’autres choix que celui de notre système d’enseignement si elles n’en sont pas sûres. Or sans ce financement par les familles étrangères, l’AEFE ne peut fonctionner, tout le monde le sait.

Il faut donc absolument trouver des solutions de lissage dans le temps des conséquences de l’annulation de ces crédits.

Mais ce n’est pas suffisant : il est très urgent d’engager une réflexion de fond sur l’avenir de l’AEFE, son développement et son financement, afin de préserver un modèle aujourd’hui en grand danger.

M. Claude Kern, rapporteur pour avis.Tout à fait !

M. Robert del Picchia, rapporteur pour avis. J’aimerais avoir votre avis, monsieur le ministre, sur cette réflexion que nous appelons de nos vœux.

J’en viens à la situation de l’Institut français. Ses moyens sont stables ; c’est bien, mais insuffisant, on l’a vu lors du récent débat dans cet hémicycle.

Depuis l’échec du rattachement du réseau culturel à l’Institut français, la question de la place et du rôle de cet opérateur n’est pas totalement résolue. Un rapprochement avec la Fondation Alliance française est souhaitable pour créer une nouvelle dynamique. Mais attention, pas pour gérer la pénurie de ressources !

Les moyens d’intervention du réseau culturel diminuent ; c’est regrettable. Ce réseau doit pouvoir compter sur un soutien public solide et durable, ainsi que sur sa capacité à trouver des ressources propres.

Monsieur le ministre, monsieur le secrétaire d’État, la France a récemment été désignée nation la plus influente du monde, d’après le classement The soft Power 30. On s’en réjouit, bien sûr.

Il est vrai, reconnaissons-le, que nous profitons de la conjoncture politique internationale, depuis l’élection de Donald Trump et le référendum sur le Brexit. Mais nous bénéficions surtout de notre image, de notre histoire, et d’une présence culturelle forte sur tous les continents.

Alors mon message est simple : c’est cet héritage qu’il faut aujourd’hui non seulement préserver, mais aussi renouveler et adapter aux défis du XXIe siècle.

M. Christian Cambon, président de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées. Très bien !

Mme la présidente. Je vous redonne la parole, mon cher collègue, pour présenter les observations d’André Vallini sur le rapport pour avis que vous avez rédigé conjointement.

M. Robert del Picchia, en remplacement de M. André Vallini, rapporteur pour avis de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées, pour le programme « Diplomatie culturelle et d’influence ». Madame la présidente, monsieur le ministre, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, le programme 185 comporte également, en effet, des objectifs de diplomatie économique et d’attractivité.

Une mission de réflexion sur la diplomatie économique a été confiée au directeur général de Business France. Nous souhaitons que ce travail permette d’améliorer l’accès aux dispositifs pour les PME, de rénover les outils financiers de soutien à l’export et d’impliquer davantage les territoires.

Le tourisme est une dimension clef de notre diplomatie économique. Il représente 8 % du PIB, 2 millions d’emplois et 40 milliards d’euros de recettes annuelles.

La situation du secteur touristique s’améliore en 2017, mais elle reste fragile. Le financement de la promotion du tourisme doit être consolidé ; l’État devra, en tout état de cause, mettre de l’argent sur la table pour attirer des cofinancements et relancer l’investissement.

Mais nous avons d’autres idées ; nous pensons notamment que d’autres sources de financement doivent être mobilisées. Une réflexion est nécessaire concernant les plateformes internet. Certaines seraient prêtes à contribuer au financement de la promotion du tourisme, à condition de ne pas être immatriculées en France. Cela pose problème.

Par ailleurs, les sociétés d’autoroutes, dont les bénéfices se comptent en milliards d’euros, ne contribuent pas à la politique touristique, alors qu’elles en bénéficient largement. C’est anormal.

Concernant l’attractivité de notre enseignement supérieur, la stabilisation des crédits des bourses est tardive. Le nombre d’étudiants boursiers du gouvernement français a baissé de 24 % entre 2010 et 2016. La France a reculé d’une place dans le classement des pays d’accueil ; c’est très dommage. L’Allemagne consacre trois fois plus de ressources que nous à ses bourses étudiantes.

Oui, nos moyens sont insuffisants, dans un contexte de forte concurrence internationale. Je pense à des pays comme le Canada ou la Grande-Bretagne, qui exercent une concurrence traditionnelle. Mais la Russie, la Chine, les pays du Golfe et même la Turquie attirent de plus en plus d’étudiants, y compris dans nos sphères traditionnelles d’influence.

Enfin, le Président de la République a lancé en juin dernier une invitation à l’intention des chercheurs étrangers. Mais les difficultés sont loin d’être levées pour les établissements, qui doivent trouver des financements et ouvrir à ces chercheurs des postes très concurrentiels, alors que l’Allemagne a lancé une initiative similaire.

Monsieur le ministre, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, la diplomatie d’influence est devenue une composante essentielle de toute politique étrangère. Veillons à ne pas en faire le parent pauvre de notre diplomatie : ce serait plus qu’une erreur, ce serait une faute. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains. – M. le président de la commission applaudit également.)

Mme la présidente. La parole est à M. le rapporteur pour avis.

M. Claude Kern, rapporteur pour avis de la commission de la culture, de l’éducation et de la communication. Madame la présidente, monsieur le ministre, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, voilà presque quinze jours, nous étions réunis dans cet hémicycle pour débattre de l’avenir de l’Institut français, sur l’excellente initiative de la présidente de la commission de la culture, de l’éducation et de la communication Catherine Morin-Desailly. Ce débat a été passionnant pour tous ceux qui y ont participé.

Il a été l’occasion, monsieur le ministre, de vous faire part de l’inquiétude partagée sur toutes les travées de cet hémicycle, et relative à la trajectoire budgétaire des crédits que la mission « Action extérieure de l’État » consacre à notre diplomatie d’influence. Les crédits du programme 185 sont ainsi passés de plus de 750 millions d’euros en 2012 à moins de 680 millions d’euros en 2017, soit une baisse de presque 10 % en cinq ans.

J’ai parlé à cet égard de « quinquennat meurtrier ». Remarquons néanmoins qu’à l’été 2017, c’est votre gouvernement qui, non content d’annuler déjà tous les crédits mis en réserve, a supprimé 33 millions d’euros supplémentaires à l’AEFE.

Pour 2018, vous nous proposez d’arrêter cette descente aux enfers. Comment ne pas y être favorable ? Les crédits se stabilisent pour chacun des opérateurs : Institut français, alliances françaises, AEFE, Campus France. Certains jouissent même d’une onction présidentielle, comme l’AEFE, à laquelle le Président de la République a promis une sanctuarisation de ses moyens.

Mais peut-on raisonnablement être favorable à la perspective de maintenir ces crédits à un si faible étiage ? Nous en avons longuement débattu en commission, et la réponse n’a pas été simple.

Nous avons cependant souhaité prendre acte des propos que vous avez tenus lors du débat sur l’avenir de l’Institut français, monsieur le secrétaire d’État : « message reçu », nous avez-vous dit ; vous vous êtes même engagé à veiller à ce que l’Institut et les autres opérateurs puissent « déployer une véritable diplomatie culturelle ambitieuse ». Puissent ces engagements se concrétiser dans les mois et les années à venir…

C’est dans cette espérance que la commission de la culture, de l’éducation et de la communication a émis, le 22 novembre dernier, un avis favorable, néanmoins puissamment réservé, sur l’adoption des crédits de la mission « Action extérieure de l’État ».

En conclusion, je voudrais appeler votre attention sur une situation d’urgence, dont nous avons eu connaissance ces derniers jours. La Fondation Alliance française est en très grande difficulté financière et son avenir en est directement menacé. Il semblerait que son budget soit largement amputé par des loyers non versés depuis des mois. Quelle réponse, monsieur le ministre, pouvez-vous apporter à cette situation de crise ?

Je rentre d’un déplacement dans un pays du Golfe ; je peux vous dire que le rôle du réseau des Alliances françaises est primordial pour développer et renforcer l’influence de la France. Monsieur le ministre, la Fondation Alliance française a besoin d’un geste de l’État. (Applaudissements sur les travées du groupe Union Centriste et du groupe du Rassemblement Démocratique et Social Européen.)

M. Christian Cambon, président de la commission des affaires étrangères. Tout à fait ! Bravo !

Mme Catherine Morin-Desailly, présidente de la commission de la culture, de l’éducation et de la communication. Bravo !

Mme la présidente. La parole est à M. le président de la commission.

M. Christian Cambon, président de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées. Madame la présidente, monsieur le ministre, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, ce débat sur les moyens de notre diplomatie est évidemment essentiel.

La France a une grande diplomatie, universelle et indépendante, héritée de son histoire, maintenue par son engagement constant au service de la stabilité et de la paix. Dans un monde dangereux et instable, la voix de la France est essentielle.

Daech, Crimée, Corée du Nord, Brexit, orientation nouvelle de l’administration américaine : chacune à leur manière, ces ruptures stratégiques nous ont propulsés dans une ère d’instabilité. Tous les repères de l’ordre international établi à la fin de la Seconde Guerre mondiale semblent aujourd’hui vaciller.

Démonstration de la puissance des États-continents, de la Chine, de l’Inde, de l’Iran ; émergence africaine ; montée du terrorisme islamiste radical, qui ravage le Moyen-Orient, déstabilise le Sahel, menace le Maghreb et l’Afrique de l’Ouest ; affrontement entre chiites et sunnites ; remise en cause des libertés en Turquie ; retour de la force et du nationalisme en Russie… Et voilà que notre projet européen lui-même est atteint dans sa dynamique et dans son essence, que notre alliance militaire la plus étroite, l’Alliance atlantique, est questionnée.

Dans ce monde « zéro-polaire », la France est un partenaire fiable, prédictible, crédible, solide. Rendons-en hommage à nos diplomates. Notre diplomatie indépendante, universelle, qui parle à tous et s’ingénie à proposer des solutions politiques aux crises, est à la foi crédible et attendue. Encore faut-il, monsieur le ministre, lui en donner les moyens.

Tel est le cadre dans lequel prend place l’examen de ce budget, d’un peu plus de 3 milliards d’euros, traditionnellement très contraint par les dépenses obligatoires. Saluons le fait qu’il est globalement stabilisé. Les différents rapporteurs en ont très bien décrit les enjeux ; je me contenterai donc, en complément de leur travail très approfondi, de relever deux ou trois points d’inquiétude ou de vigilance.

L’immobilier, d’abord. Ladislas Poniatowski a bien décrit les failles d’un modèle qui consiste à vendre nos joyaux pour financer l’entretien du réseau. Quand on vend du patrimoine historique pour pouvoir réparer les chaudières et refaire les peintures, quel message envoie-t-on ? C’est dévastateur en matière d’image et d’influence. C’est même, quelque part, un aveu de déclassement.

Je m’associe donc, comme toute la commission, à la demande de M. le rapporteur : monsieur le ministre, confirmez-vous l’engagement pris devant nous de ne pas vendre nos résidences à Londres et, plus généralement, tout emplacement symbolique, car c’est un enjeu d’image pour notre pays ? Nous ne sommes pas obligés de refaire l’erreur du palais Clam-Gallas de Vienne. (Très bien ! et applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain et du groupe Les Républicains.)

La mue du réseau diplomatique est en cours. Je veux saluer l’engagement de nos jeunes diplomates, qui se retrouvent dans les postes dits « de présence diplomatique », avec de très petits moyens, un ambassadeur et un cadre de catégorie B, quelques contrats de droit local, et qui font face à un vrai défi. Évidemment, c’était mieux que de baisser pavillon, mais il nous semble que l’on a atteint, avec 25 postes dans ce format, les limites du modèle.

Point noir, les moyens de notre diplomatie culturelle et d’influence. Ils sont insuffisants, alors que leur effet de levier en matière de rayonnement est considérable. C’est un outil d’influence politique, économique et culturel.

La situation de l’AEFE nous inquiète grandement. À la suite de Robert del Picchia, nous serons très nombreux à l’évoquer ce soir. Attention, monsieur le ministre, le risque d’une remise en cause, à terme, du modèle de l’enseignement français à l’étranger est réel. Elle porterait un coup décisif à notre influence culturelle internationale.

Je terminerai en appelant votre attention sur une toute petite enveloppe de crédits néanmoins complètement stratégique : la coopération de sécurité et de défense.

Ces crédits ont souvent été la variable d’ajustement. Ils sont passés de 106 millions d’euros à 63 millions d’euros en une dizaine d’années. Nous l’avons regretté et dénoncé. Cette politique si intelligente, qui consiste à construire les capacités de nos partenaires dans une action préventive, globale et de long terme, voit enfin ses moyens stabilisés. Merci, monsieur le ministre !

M. Jean-Yves Le Drian, ministre de l’Europe et des affaires étrangères. Ils augmentent même !

M. Robert del Picchia, rapporteur pour avis. Très bien !

M. Christian Cambon, président de la commission des affaires étrangères. La plupart des membres de la commission voteront donc ces crédits, monsieur le ministre, avec le ferme espoir qu’ils seront employés avec efficacité, pour le rayonnement de la France.

Plus que jamais, dans ce monde incertain, la voix de la France doit se faire entendre avec force, car elle est partout, grâce à nos diplomates expérimentés, la voix de la paix. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et du groupe Union Centriste. – M. Bernard Cazeau applaudit également.)

Mme la présidente. Mes chers collègues, je vous rappelle que le temps de parole attribué à chaque groupe pour chaque discussion comprend le temps d’intervention générale et celui de l’explication de vote.

Par ailleurs, le Gouvernement dispose au total de vingt minutes pour intervenir.

Dans la suite de la discussion, la parole est à M. Jean-Noël Guérini. (Applaudissements sur les travées du groupe du Rassemblement Démocratique et Social Européen.)

M. Jean-Noël Guérini. Madame la présidente, monsieur le ministre, monsieur le secrétaire d’État, monsieur le président de la commission, messieurs les rapporteurs, mes chers collègues, nul ne peut aujourd’hui le contester, la France est de retour sur la scène internationale. Et reconnaissons-le, malgré les étonnantes polémiques, le dernier voyage du Président de la République en Afrique est une belle réussite. Nous pouvons tous nous en féliciter.

Pour autant, avant de vous tresser, monsieur le ministre, cher Jean-Yves Le Drian, une couronne de laurier pour votre action, laquelle semble s’inscrire dans le droit fil de vos succès en tant que ministre de la défense, même d’un ancien monde, permettez-moi de formuler quelques remarques et de pointer quelques inquiétudes.

À l’image de l’ensemble du projet de loi de finances, les crédits alloués au ministère de l’Europe et des affaires étrangères sont guidés par le credo si cher à Bercy : « Faire mieux, avec moins ».

Si cette exigence budgétaire est compréhensible, et même souhaitable en certains domaines, j’ai la conviction profonde que l’action extérieure de l’État ne doit surtout pas – ou surtout plus – en faire partie.

Avec 3 milliards d’euros en autorisations d’engagement et crédits de paiement, votre budget, monsieur le ministre, est en très léger recul.

Certains me rétorqueront que je chipote, que 115 millions d’euros de baisse, c’est finalement bien peu de chose. D’autant que, dans un contexte international complexe, la lutte contre la menace terroriste et l’engagement français contre les périls restent une priorité. Soit !

Toutefois, dans cet ensemble d’une relative stabilité, l’apparition d’un nouveau programme, consacré à la présidence française du G7 en 2019, oblige à l’ouverture d’une enveloppe de 26 millions d’euros, répartis entre 14 millions d’euros d’autorisations d’engagement et 12 millions d’euros de crédits de paiement, et ce dès 2018.

La mise en place de ce programme 347 dans nos chapitres budgétaires n’affecte pas, en principe, les programmes consacrés à l’« Action de la France en Europe et dans le monde », le programme 105, à la « Diplomatie culturelle et d’influence », le programme 185, et aux « Français à l’étranger et affaires consulaires », le programme 151.

Votre ministère dispose ainsi d’un volant de crédits de 3 milliards d’euros.

J’ai parlé de léger recul, nul ne cherchera à le nier. J’entends déjà les commentaires convenus. On nous parlera de « corrections à la marge », de « variables d’adaptation », ou encore de « modeste contribution à l’effort collectif ».

Je crains, monsieur le ministre, que les choses ne soient pas aussi simples et, pour être franc, je redoute d’entrevoir dans ces rééquilibrages une certaine orientation, laquelle a déjà fait l’objet de remarques il y a quelques semaines, quand nous avons, ici même, débattu de l’avenir incertain de l’Institut français.

Les prises de parole volontaristes et les poignées de main fermes du chef de l’État sont bienvenues, rassurantes et nécessaires pour les opinions publiques ; mais sont-elles suffisantes pour assurer la pérennité du rayonnement de notre pays ?

À l’heure d’une communication mondialisée, la force des images est indiscutable. Cependant, la continuité et la permanence de nos réseaux consulaires et diplomatiques, la force et le dynamisme de ce que l’on appelle si bien « la diplomatie culturelle et d’influence » de la France, tout comme le soutien et l’accompagnement offerts aux Français établis hors de France, sont des pièces essentielles, qu’il importe de ne pas négliger.

Ce sont autant d’atouts indispensables pour relayer, dans les meilleures conditions de proximité et d’écoute, nos valeurs universalistes, incarnées avec justesse aujourd’hui par le discours présidentiel.

Reconnaissons que le ministère pilotant l’action extérieure de la France a contribué, en pleine responsabilité, en toute sérénité, aux efforts budgétaires tendant au redressement des comptes publics. Les effectifs en équivalents temps plein ont baissé de près de 17 % sur la période 2007-2017 ; les implantations diplomatiques ont été rationalisées ; une partie de notre patrimoine immobilier cédée.

L’action extérieure de l’État a contribué au désendettement de la Nation. Cela dit, monsieur le ministre, contenir et réduire des dépenses de fonctionnement, rares sont ceux qui s’y opposent, à moins de vivre à crédit, et de creuser une dette que les générations futures devraient éponger.

Sauf qu’il y a dans votre politique l’écho d’une petite musique laissant à penser qu’internet, les échanges par réseaux sociaux et les téléconférences peuvent se substituer au travail, à l’enseignement, à la présence des femmes et des hommes qui portent l’image et l’amour de la France sur les cinq continents.

Malgré ces inquiétudes, somme toute légitimes, et malgré mes critiques, j’ai envie de vous faire confiance, monsieur le ministre. À l’approche des fêtes de fin d’année, propices à la bienveillance, permettez-moi de formuler le vœu d’une sacralisation des crédits alloués au rayonnement culturel, diplomatique et économique de la France. Alors, le groupe du Rassemblement Démocratique et Social Européen votera ce budget. (Applaudissements sur les travées du groupe du Rassemblement Démocratique et Social Européen. – M. le président de la commission des affaires étrangères et M. Claude Kern applaudissent également.)

Mme la présidente. La parole est à Mme Christine Prunaud.

Mme Christine Prunaud. Madame la présidente, monsieur le ministre, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, l’action de la France à l’extérieur de ses frontières répond à plusieurs objectifs. J’aimerais, ce soir, développer deux d’entre eux.

Le premier est d’assurer la place de notre pays dans le monde en tant que diffuseur d’idées et de création. Pour cela, ce budget s’appuie sur l’annonce d’un plan ambitieux pour la francophonie.

En effet, 274 millions de locuteurs parlent notre langue dans le monde. Malheureusement, les opérateurs de développement de la francophonie ont vu leur financement s’amoindrir ces dernières années, les contraignant à recentrer leur action sur les zones déjà fortement francophones.

En parallèle, il est confié aux entreprises privées le soin d’exporter le français dans les autres zones. Encore une fois, le service public est supplanté par le privé. Vous le savez, pour notre groupe, c’est un problème.

Je souhaite à mon tour aborder la situation de l’AEFE, dont l’avenir est bien sombre. Les agents se sont mobilisés dernièrement pour dénoncer les 33 millions d’euros de crédits annulés cet été et la centaine d’emplois supprimés d’ici à 2019.

Les conséquences sont attendues : soit les établissements réduisent leurs missions, soit les frais d’inscription pour les familles augmenteront, excluant ainsi les plus fragiles d’entre elles. Il n’est pas toujours possible de faire plus avec moins, mes chers collègues.

Par ailleurs, la francophonie s’appuie également sur l’Institut français pour l’exportation de biens culturels. Mais avec un emploi supplémentaire et 100 000 euros d’augmentation de budget, les perspectives sont, là aussi, compromises.

Prenons pour exemple le livre. Le programme de soutien à la traduction des œuvres françaises a fait ses preuves, faisant de Paris le troisième exportateur européen. Au vu des contraintes budgétaires et de la montée en puissance de concurrents, comment assurer la pérennité de ce dispositif ?

De même, il est regrettable que Campus France voie stagner sa subvention pour charge de service public. La France, malgré de nombreux éléments avantageux – la présence du CNRS ou l’attrait de Paris, par exemple – ne saisit pas pleinement les occasions de développer ses programmes de recherche.

Seuls quatre espaces Campus France existent au Brésil et six en Chine, alors qu’il s’agit de pays pourtant prometteurs dans le secteur de la recherche. C’est donc insuffisant.

Par ailleurs, un tiers du budget social des étudiants étrangers est consacré aux programmes d’excellence comme Eiffel, Excellence-Major ou Quai d’Orsay-Entreprises.

Si ces programmes sont nécessaires, on peut cependant contester cette stratégie à long terme orientée vers l’élitisme.

Pour maintenir notre influence, il est essentiel de réagir face aux stratégies offensives des pays concurrents dans tous les domaines : la Turquie ou l’Arabie saoudite dans l’enseignement supérieur, la Chine et les États-Unis dans l’aide au développement en Afrique notamment, la Russie dans les espaces médiatiques, ou encore le Qatar dans le sport, l’industrie du luxe. Le budget proposé n’est pas à la hauteur de ces attentes.

Le second objectif de notre action extérieure est d’assurer aux Français vivant à l’étranger des points d’accroche avec la France. Là aussi, il est difficile de se satisfaire d’un budget qui ne permet pas l’amélioration d’une situation depuis longtemps critique.

En trente ans, la moitié des effectifs du Quai d’Orsay a disparu. Le budget, présenté comme stable, ne fait pas mention des 160 millions d’euros de crédits gelés cet été, et non compensés, ainsi que des baisses prévues pour 2019 et 2020, à hauteur de 176 millions d’euros.

La France, troisième réseau diplomatique du monde, paie aujourd’hui les choix budgétaires faits en fermant des antennes diplomatiques et en supprimant des postes. Les conséquences pour nos concitoyens à l’étranger mais aussi pour les étrangers souhaitant venir dans notre pays sont importantes. Impossibilité de se déplacer ou difficulté de procéder à certaines démarches, allongement des délais pour effectuer des actes administratifs : les obstacles sont nombreux. Le déroulement des différents scrutins pour les élections de 2017, malgré des rallonges budgétaires, illustre parfaitement cette détérioration.

Persuadé que le budget proposé ne permettra pas d’atteindre tout à fait l’ensemble de ces objectifs, le groupe CRCE votera contre.