M. le président. La parole est à M. le secrétaire d’État.

M. Olivier Dussopt, secrétaire dÉtat. Je remercie les orateurs de leurs propos, de leur contribution, et la commission spéciale de l’ensemble du travail réalisé.

Les éléments de réponse que je souhaite apporter seront nécessairement parcellaires, mais l’examen des articles permettra d’aller plus avant sur certains points.

Plusieurs orateurs ont évoqué la question du droit à l’erreur. Beaucoup d’entre vous, mesdames, messieurs les sénateurs, ont souligné, à juste titre, que le droit à l’erreur est une doctrine déjà pratiquée par un certain nombre d’administrations, notamment l’administration fiscale, et qu’il s’agirait d’une généralisation.

Je vous le confirme : il s’agit bien de généraliser une pratique développée notamment au sein de la Direction générale des finances publiques et de ses implantations territoriales. Bien évidemment, je préfère le terme « généraliser » une bonne pratique à celui de « cristalliser » qu’employait M. Bocquet en évoquant cette particularité.

Nous souhaitons que le droit à l’erreur soit généralisé et qu’il s’accompagne du droit au contrôle. Nous accueillons très favorablement l’inscription, à l’article 4, sur l’initiative de l’Assemblée nationale, du principe de la garantie fiscale. Le Gouvernement vous proposera, par le biais d’un amendement qu’il a déposé, d’élargir la garantie fiscale prévue pour les impôts directs et indirects du ressort de la Direction générale des finances publiques aux impôts directs et indirects du ressort de la Direction générale des douanes et droits indirects qui nous a dit sa volonté d’intégrer ce dispositif.

MM. Durain, Husson et Détraigne ont évoqué la question de la mise en œuvre de ce texte. Nous prévoyons un certain nombre de moyens et de mesures d’accompagnement. Dans les semaines qui viennent, nous publierons un schéma national de formation continue et professionnelle à destination de l’ensemble des agents publics. Il s’agit de mobiliser les moyens dits « de droit commun » en matière de formation continue des agents publics. Nous prévoyons d’y consacrer 1,5 milliard d’euros, comme l’a rappelé M. Détraigne, au titre du Grand plan d’investissement d’avenir.

Nous souhaitons renforcer ce schéma national de formation. Un des axes prioritaires concerne bien évidemment la mise en œuvre du droit à l’erreur, de même que la généralisation du droit à la transaction et à la médiation.

Le Gouvernement a mis en place, dans le cadre de ce même grand plan d’investissement d’avenir, un fonds de 700 millions d’euros sur cinq ans consacré à la modernisation des administrations. Nous partons du principe que, pour se moderniser, pour être plus efficace, il faut savoir payer et doter nos administrations de nouveaux outils.

Certains d’entre vous ont évoqué les retards que l’administration rencontre parfois en matière d’équipements – logiciels, systèmes d’information… Ce fonds de 700 millions d’euros a vocation à aider les administrations à rattraper ce retard. Le premier appel à projets a été lancé au mois de février dernier pour 200 millions d’euros, inscrits au budget pour 2018.

Vous avez été nombreux à évoquer l’ambition même du texte. Certains, notamment MM. Capus et Bargeton, considèrent qu’il s’agit d’une première brique. Ils ont raison : il s’agit bien de la première brique du programme de transformation publique que nous désirons mener à bien.

Comme je l’ai souligné dans mon propos liminaire, considérer que l’essentiel du chemin sera accompli en matière de modernisation après l’adoption de ce texte serait une erreur. Il ne s’agit que d’un début, d’une première pierre posée pour un véritable changement de mentalité, de culture, d’habitudes grâce auquel le texte pourra connaître une application pleine et entière.

Le fait que d’aucuns estiment que le projet de loi ne comporte pas assez d’éléments de simplification de la vie administrative quotidienne s’explique pour deux raisons : le Gouvernement considère que les lois de simplification adoptées par le Parlement, tant au Sénat qu’à l’Assemblée nationale, sont souvent des textes extrêmement fournis, extrêmement denses, et dont la lisibilité n’est pas toujours évidente… Nous préférons nous intéresser à quelques éléments de simplification à travers ce texte et, surtout, appeler l’ensemble des ministères et des ministres qui auront à déposer des projets de loi devant votre assemblée à prévoir systématiquement un volet de simplification. Tel sera le cas du projet de loi issu des travaux des états généraux de l’alimentation et de l’ensemble des textes que vous aurez à examiner dans les temps à venir.

Madame Delattre, vous avez qualifié de « viscéral » votre attachement, et celui de votre groupe, à la laïcité. Sachez que je partage un attachement tout aussi viscéral à chacun des mots de l’article 1er de la Constitution.

L’article 25 du présent projet de loi, dans sa rédaction issue des travaux de l’Assemblée nationale et de votre commission spéciale, ne nous paraît pas conférer de droits particuliers aux associations de nature cultuelle. Il leur ouvre la possibilité de recevoir des dons par SMS, comme d’autres associations. Aucun avantage particulier n’est donc accordé aux associations cultuelles par ce biais.

J’ajoute que l’Assemblée nationale a adopté un amendement permettant d’encadrer cette mesure : les associations cultuelles qui auront recours à ce service de dons par SMS seront tenues de faire certifier leurs comptes et de les déposer, ce qui n’est pas le cas aujourd’hui.

Enfin, madame, j’ai pleinement conscience de la rédaction de l’article 38 issue des travaux de la commission spéciale du Sénat. Je tiens simplement à souligner que le Gouvernement avait accompagné de manière extrêmement favorable et positive les démarches de la majorité, à l’Assemblée nationale, pour veiller à ce que la question des immeubles de rapport ne figure plus à cet article. La commission spéciale a décidé de rétablir cette disposition, mais le Gouvernement reste attaché à la rédaction issue de l’Assemblée nationale.

M. le président. La discussion générale est close.

Rappels au règlement

Discussion générale (suite)
Dossier législatif : projet de loi pour un État au service d'une société de confiance
Rappel au règlement (suite)

M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Sueur, pour un rappel au règlement.

M. Jean-Pierre Sueur. Mon rappel au règlement porte sur la manière dont est mis en œuvre, au Sénat, l’article 45 de la Constitution.

Pendant dix ans, à l’Assemblée nationale, je n’ai jamais vu un amendement se voir opposer l’article 45 ; et de même au Sénat, pendant plus longtemps encore.

Le présent texte, monsieur le président, porte sur une très grande diversité de sujets. Dès lors, l’irrecevabilité de certains amendements relève quelque peu de l’aléatoire.

Je prends un exemple très simple. J’ai déposé un amendement visant à relayer les demandes d’associations de victimes d’attentats. Cette question est sérieuse et relève de la dignité. Les restes humains, en très mauvais état, sont aujourd’hui considérés comme des déchets chirurgicaux. Ce statut n’est pas digne.

J’ai essayé, à deux reprises, de remédier à cette situation : une première fois dans le cadre du projet de loi relatif à l’égalité et à la citoyenneté, puis une seconde à l’occasion de l’examen de ce présent projet de loi sur la confiance. Il s’agit, je le répète, d’une question de dignité à l’encontre de laquelle il ne peut y avoir que peu d’opposition.

On m’a dit, la première fois, que ce sujet n’entrait pas dans le champ de l’égalité et de la citoyenneté ; aujourd’hui, on me dit qu’il n’a pas non plus sa place dans un texte sur la confiance…

De deux choses l’une, monsieur le président : soit les textes que nous soumet le Gouvernement ont un objet précis – je comprends alors qu’on exclue les amendements qui ne s’y rapportent pas –, soit leur objet est si large – c’est le cas en l’espèce – qu’il faut faire preuve d’un état d’esprit positif sur les amendements que nous croyons devoir déposer. (Applaudissements.)

M. le président. Monsieur Sueur, acte vous est donné de votre rappel au règlement.

L’application de l’article 45 de la Constitution relève de la compétence de la commission saisie au fond, en l’occurrence la commission spéciale.

La parole est à M. le président de la commission spéciale.

M. Jean-François Husson, président de la commission spéciale. Je voudrais donner quelques éléments de réponse à M. Sueur, et ce d’autant plus qu’il m’a sensibilisé à cette question.

Certes, ce texte comporte des dispositions diverses au point que certains ont pu le qualifier de « fourre-tout » ou de « patchwork ».

Les amendements déposés sont examinés par la commission spéciale qui décide de leur recevabilité. Si l’on veut faire un travail législatif de qualité, il faut relier les amendements non pas au seul titre de ce projet de loi, mais – vous le savez très bien, mon cher collègue – à l’objet des articles du projet de loi initial.

Nous avons souhaité appliquer avec rigueur, mais en toute objectivité et sérénité, les règles d’irrecevabilité.

Rappel au règlement (début)
Dossier législatif : projet de loi pour un État au service d'une société de confiance
Article 1er et annexe (Texte non modifié par la commission)

M. le président. La parole est à Mme Nassimah Dindar, pour un rappel au règlement.

Mme Nassimah Dindar. J’avais déposé un amendement visant à la révision des schémas d’aménagement régionaux, les SAR, dans les départements d’outre-mer, pour qu’ils soient examinés dans les mêmes conditions qu’en métropole et approuvés par le préfet. Dans les DOM, cette approbation relève aujourd’hui du Conseil d’État.

Cet amendement tendait à corriger cette situation dans un souci de simplification. Or on m’a opposé l’article 45 en me disant que cette question n’entrait pas dans le champ de ce texte, alors même qu’il s’agit d’un fourre-tout.

M. le président. Acte vous est donné de votre rappel au règlement, ma chère collègue.

Je demande à ceux de nos collègues qui voudront également faire des rappels au règlement de bien vouloir citer l’article du règlement auquel ils se réfèrent.

Nous passons à la discussion du texte de la commission spéciale.

Je rappelle que douze articles font l’objet d’une procédure de législation en commission. Le vote sur l’ensemble de ces articles est donc réservé et interviendra avant le vote sur l’ensemble du texte.

projet de loi pour un état au service d’une société de confiance

TITRE PRÉLIMINAIRE

DISPOSITIONS D’ORIENTATION ET DE PROGRAMMATION

Rappel au règlement (suite)
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Annexe (début)

Article 1er et annexe

(Non modifié)

La stratégie nationale d’orientation de l’action publique, annexée à la présente loi, est approuvée.

Article 1er et annexe (Texte non modifié par la commission)
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Annexe (interruption de la discussion)

Annexe

Stratégie nationale d’orientation de l’action publique

La présente stratégie nationale énonce les orientations et les objectifs de l’action publique vers une société de confiance, d’ici à 2022.

I. – Vers une administration de conseil et de service

L’administration est au service des personnes, qu’elle conseille loyalement et accompagne dans leurs démarches. Les prérogatives et les moyens qui lui sont conférés pour la mise en œuvre des politiques publiques sont employés au bénéfice de ces personnes.

L’autonomie et la protection des agents publics dans leurs relations avec les usagers sont garanties.

Les personnes intéressées sont associées aux politiques publiques dans des conditions adaptées à chaque domaine d’intervention. Lorsqu’une telle association est décidée pour une action déterminée, la décision prévoit les moyens nécessaires à cette association.

Lorsqu’une personne est soumise par la loi ou le règlement à une obligation, elle est réputée s’y être conformée dans sa relation avec l’administration.

L’administration accompagne les usagers qui la sollicitent pour les aider dans la bonne application des règles qui les concernent. L’administration leur facilite l’accès aux données les concernant strictement.

Les rapports entre le public et l’administration sont fondés sur les principes de loyauté, de simplicité et d’adaptation.

L’administration développe les modalités non contentieuses de traitement des contestations, notamment la médiation.

L’administration prend en compte la capacité financière du contribuable dans le cas d’un recouvrement fiscal ou administratif.

II. – Vers une action publique modernisée, simplifiée, décentralisée et plus efficace

L’action publique fait l’objet d’évaluations régulières, notamment quant à son efficacité, son mode d’organisation et sa capacité à satisfaire les usagers dans leurs demandes de conseils et de services. Les statistiques sur la mise en œuvre des pénalités sont publiées, en distinguant celles figurant dans les propositions de rectification ou les notifications de bases imposées d’office de celles maintenues à l’issue de la procédure de redressement.

Les missions de l’administration sont régulièrement évaluées, y compris de manière indépendante, notamment quant à leur pertinence pour répondre aux nouveaux besoins de la société. L’évaluation de l’administration associe les personnes intéressées, dont les propositions sont prises en compte pour l’organisation et l’adaptation de l’action publique.

L’organisation de l’administration s’adapte constamment à l’évolution de ses missions en tenant compte des nécessités de l’aménagement du territoire.

Les agents publics bénéficient régulièrement d’une formation et d’un accompagnement leur permettant de s’adapter aux évolutions des missions de l’administration.

L’organisation administrative prend en considération la diversité et la spécificité des territoires.

Les moyens pour mener à bien l’action publique sont déterminés en fonction de leur adaptation aux objectifs, quantitatifs et qualitatifs, à atteindre.

L’action publique n’entraîne l’édiction d’une norme que si celle-ci est strictement nécessaire à sa réalisation.

L’action publique doit permettre la réduction des délais administratifs.

Toute décision publique prend en compte le coût qu’elle implique pour son auteur, ses destinataires et les tiers ainsi que la complexité des règles particulières qu’ils doivent appliquer et respecter. Ce coût et ces règles doivent être limités au strict nécessaire et proportionnés aux objectifs à atteindre.

L’administration prend en considération les contraintes horaires du public dans ses horaires d’ouverture et met en œuvre les moyens nécessaires permettant d’organiser un accueil téléphonique efficient.

La proximité territoriale doit permettre à l’administration d’assurer le service public sur tout le territoire de la République, notamment grâce à l’implantation des maisons de service au public.

L’administration doit assurer, notamment aux personnes vulnérables ou n’utilisant pas l’outil numérique, des possibilités de communication et de médiation adaptées à leurs besoins et à leur situation.

Tout usager des services publics doit pouvoir consulter l’état de sa situation administrative et de l’avancement du traitement de ses démarches et demandes.

Le Gouvernement se fixe pour objectifs, s’agissant de l’administration de l’État :

1° La dématérialisation de l’ensemble des démarches administratives, en dehors de la première délivrance d’un document d’identité, d’ici à 2022, avec la prise en compte des besoins d’accompagnement des citoyens ayant des difficultés d’accès aux services dématérialisés ;

2° L’institution du droit pour toute personne de ne pas être tenue de produire à l’administration une information déjà détenue ou susceptible d’être obtenue auprès d’une autre administration.

L’État, les collectivités territoriales et leurs groupements ainsi que les autres personnes publiques et les personnes morales de droit privé chargées d’une mission de service public administratif concourent à la mise en œuvre de la présente stratégie nationale.

M. le président. La parole est à M. Pierre Ouzoulias, sur l’article.

M. Pierre Ouzoulias. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, accepter en l’état l’article 1er de ce projet de loi et le contenu de son annexe reviendrait à renoncer, par principe, aux vertus fondatrices du service public à la française.

Dans les faits, au-delà des apparences nécessaires d’une relation courtoise et humaine entre administrés et administration, c’est bel et bien la capacité du service public à agir avec des effectifs de plus en plus réduits – la programmation de 120 000 suppressions de postes, que vous assumez, monsieur le secrétaire d’État, demeurant inscrite à l’arrière-plan du débat – qui est en question.

L’administration de conseil et de service que semble vouloir promouvoir ce projet de loi nous apparaît comme une réponse malthusienne de réduction des services humains, remplacés par des procédures toujours plus automatisées.

C’est non pas l’accumulation des services et leur organisation qui pose parfois problème aux administrés, mais bien plutôt les pressions contradictoires exercées à leur endroit.

Prenons l’exemple des administrations fiscales : ces dernières sont mises en demeure, depuis le vote de la loi de finances rectificative pour 2012, de promouvoir auprès des entreprises le crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi tout en luttant contre la fraude fiscale.

Or une activité de contrôle fiscal n’est pas qu’affaire de « gros coups », mais constitue plutôt une activité unissant les services fiscaux, du plus obscur des centres de finances publiques jusqu’aux directions spécialisées les plus pointues, pour faire respecter le principe d’égalité devant l’impôt, principe fondateur de nos valeurs républicaines.

Nous faisons nôtres les préoccupations du Conseil d’État : ajouter aux procédures de l’administration l’exercice du droit au contrôle par le contribuable ou par l’administré en général risque fort de poser des problèmes d’organisation. Ce phénomène a été relevé plusieurs fois par les syndicalistes des finances sur le contrôle fiscal.

Le contrôle fiscal externe a toujours été considéré par les pouvoirs publics comme une vitrine de l’action de l’administration fiscale et de la lutte contre la fraude, une vitrine que chaque ministre et directeur général s’échinent à lustrer, alors qu’il y a de moins en moins de choses en magasin.

Ce qui est en jeu, à travers cet article 1er, c’est non pas la lourdeur de l’administration, mais bien plutôt la résultante des politiques qui, de RGPP – révision générale des politiques publiques – en MAP – modernisation de l’action publique –, ont dissous une bonne partie des pratiques et de l’efficacité de nos services publics. (Applaudissements sur les travées du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.)

M. le président. Je suis saisi de six amendements faisant l’objet d’une discussion commune.

L’amendement n° 131, présenté par MM. Bocquet, Collombat et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :

Rédiger ainsi cette annexe :

La stratégie nationale d’orientation pour l’action publique se définit par référence aux qualités fondamentales du service public à la française, fondé sur l’égalité de traitement, l’accessibilité, la neutralité, la laïcité, la continuité, l’adaptabilité.

Elle participe de l’action en faveur d’un développement équilibré des différentes parties du pays par une présence territoriale suffisante, tenant compte des spécificités géographiques, démographiques, sociales et économiques des bassins de vie.

Elle apporte aux usagers les réponses adaptées à leur situation, leurs attentes et besoins, tels qu’exprimés par eux comme pour leurs familles.

Elle garantit aux agents publics le plein exercice de leurs droits tels que définis par le statut général favorisant la pleine expression de leur autonomie et de leurs compétences et qualifications.

Elle tend à développer une relation loyale et confiante avec les usagers, permettant la prévention des contentieux, s’appuyant sur la transparence et l’intelligibilité des procédures, illustration du droit tel que découlant de la loi, expression de l’intérêt général.

Elle associe les agents du service public eux-mêmes à la mise en œuvre des politiques déconcentrées des administrations de l’État, de la Sécurité sociale, et des politiques locales et sollicite l’intervention des usagers en vue de définir les voies et moyens de la proximité, de l’atteinte des objectifs généraux de l’action publique et du respect des valeurs républicaines.

S’appuyant sur l’autonomie des services dans un cadre réglementaire rénové, l’action publique tend, par son maillage de proximité, à favoriser l’accès de tous les habitants de ce pays aux services qu’ils sont en droit d’attendre, en tout domaine d’intervention de la vie quotidienne.

D’ici la fin de la législature en cours, sera engagée et mise en œuvre une action renouvelée de développement du service public dans les domaines suivants :

- l’accueil et le soutien aux personnes âgées dépendantes ou risquant de perdre leur autonomie ;

- l’accueil, l’information et le soutien aux demandeurs de logement, la structuration et la connaissance du marché locatif, le repérage et la détection des abus, la connaissance des droits et obligations des parties.

La parole est à M. Éric Bocquet.

M. Éric Bocquet. Le fonctionnement de nos services publics ne serait-il qu’une sorte de poids mort pour la collectivité dont il conviendrait de réduire le coût ? C’est un peu l’impression que laisse la lecture de l’annexe de l’article 1er que nous proposons de réécrire intégralement.

Il nous a d’abord paru indispensable de rappeler que les services publics ont pour vocation essentielle de répondre aux besoins de la collectivité, c’est-à-dire aux attentes de la population dans la diversité des situations.

N’oublions pas que ce lien s’est pour le moins distendu du fait notamment de politiques publiques ayant tourné le dos aux fondamentaux du service public – égalité, continuité, neutralité, accessibilité et laïcité – pour mener des politiques sélectives s’éloignant toujours un peu plus de la justice sociale la plus élémentaire.

Il est évident qu’une véritable action publique ne peut avoir de pertinence et de résultats qu’en s’appuyant pleinement sur ses propres ressources humaines, source de la valeur ajoutée, portée par l’action publique au bénéfice de l’ensemble de la collectivité.

Le statut de la fonction publique recèle un puissant potentiel de mise en mouvement des agents publics et tend notamment à valoriser et leurs compétences et leur qualification.

Dans l’absolu, la formation continue des agents publics ne peut se contenter d’une simple adaptation de ces agents à je ne sais quelle nouvelle technologie ou quelle bonne pratique sans reconnaissance quelconque de cette évolution.

De fait, la fonction publique est un ensemble de métiers tout à fait exceptionnels, loin de l’image courtelinesque des ronds-de-cuir, faits de savoirs, de savoir-faire, de gestes professionnels qu’il convient de valoriser et dont la pleine expression est l’un des enjeux à venir.

La lecture de l’article 29 du présent projet de loi suffit à montrer, si besoin était, que l’on ne peut se contenter d’expédients et de solutions à l’emporte-pièce en la matière et qu’il est grand temps d’envisager la question sous tous ses aspects systémiques : la place des personnes âgées dans notre société, par exemple ; la qualité des services que nous pouvons apporter ; le statut ; les compétences et la reconnaissance que nous pouvons accorder à ceux dont le métier est, ou sera, demain, d’assister ; les sommes que nous sommes disposés à consacrer à la satisfaction de ces besoins…

Voilà, selon nous, quel est l’enjeu et comment donner du sens à l’action publique.

M. le président. L’amendement n° 74 rectifié, présenté par Mme Taillé-Polian, M. Durain, Mme Meunier, M. Cabanel, Mme Espagnac, MM. Lurel et Mazuir, Mmes Préville, de la Gontrie et Jasmin, M. Fichet, Mme Blondin, MM. Courteau et Sueur, Mme Monier et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :

Après l’alinéa 8

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

L’application par l’administration des principes et droits au bénéfice des usagers est conditionnée à une exigence de respect et de courtoisie des usagers envers l’administration.

La parole est à Mme Sophie Taillé-Polian.

Mme Sophie Taillé-Polian. Cet amendement vise à insérer dans la stratégie nationale d’orientation de l’action publique un alinéa aux termes duquel « l’application par l’administration des principes et droits au bénéfice des usagers est conditionnée à une exigence de respect et de courtoisie des usagers envers l’administration. »

Évident, me dira-ton, mais cela va mieux en le disant !

En commission spéciale, il a été indiqué que cette stratégie nationale – pardonnez-moi l’expression ! – enfonçait quelques portes ouvertes. Enfonçons-les donc toutes, y compris celles qui concernent la nature parfois difficile, abrasive des rapports avec les administrés. Il est souvent question des risques psychosociaux encourus par les agents placés en première ligne pour accueillir les usagers.

Ce texte crée des droits nouveaux pour les administrés sans moyens supplémentaires et, comme cela a été dit, en supprimant 120 000 postes de fonctionnaires.

Dès lors, monsieur le secrétaire d’État, comment mettre en œuvre ces nouvelles procédures ? En se contentant d’organiser des formations ou de doter l’administration de nouveaux outils informatiques ? C’est indispensable, mais cela ne peut remplacer le manque de personnels.

La dématérialisation signifierait postes d’agents publics inutiles ; mais elle peut également induire des tâches supplémentaires pour certains agents.

Il serait d’autant plus facile d’accompagner un changement de mentalité, qui pourrait s’avérer tout à fait positif, en montrant aux agents publics que nous attendons des usagers qu’ils fassent preuve de respect et de courtoisie dans chacune de leurs demandes. Il s’agit de faire respecter les droits des administrés, certes, mais dans le respect des agents publics.

M. le président. L’amendement n° 57, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :

Après l’alinéa 13

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

Toute personne a accès à une information transparente sur l’efficacité et la qualité des services publics en relation avec les usagers.

La parole est à M. le secrétaire d’État.

M. Olivier Dussopt, secrétaire dÉtat. Cet amendement vise à introduire dans la stratégie nationale une nouvelle orientation selon laquelle toute personne a accès à une information transparente sur l’efficacité et la qualité du service public en relation avec les usagers.

Il s’agit, dans la droite ligne des orientations annoncées lors du comité interministériel de la transformation publique, de permettre aux usagers de connaître le niveau de résultat, l’efficience des services publics auxquels ils ont accès.

Cette nouvelle orientation sera mise en place de manière progressive. Il est bien évidemment hors de question d’imposer une publication de résultats qui ne pourrait qu’avoir des effets contre-productifs dès lors que les critères ne seraient pas posés et réfléchis de concert avec les administrations.