Mme la présidente. L’amendement n° 158, présenté par MM. J. Bigot et Sueur, Mme de la Gontrie, MM. Kanner, Durain, Leconte, Kerrouche, Fichet et Houllegatte, Mmes Préville, Meunier, Lubin, Jasmin et Blondin, MM. Jeansannetas, Cabanel et Montaugé, Mmes G. Jourda, Taillé-Polian et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :

Alinéas 19 à 22

Supprimer ces alinéas.

La parole est à M. Jacques Bigot.

M. Jacques Bigot. Aux alinéas 19 à 22, on étend, dans l’article 40, tel qu’il résulte de la rédaction de la commission, le recours aux ordonnances pénales de manière extrêmement large – à nos yeux, de manière exagérée.

En effet, appliquer l’ordonnance pénale, c’est condamner quelqu’un sans l’avoir l’auditionné, sans qu’on l’ait entendu, sans qu’il ait pu s’expliquer. Certes, il peut faire opposition et revenir devant le juge, mais il nous paraît excessif d’étendre à ce point la procédure de l’ordonnance pénale.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. François-Noël Buffet, corapporteur de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d'administration générale. La commission s’est prononcée en faveur de l’extension du champ d’application des délits relevant de la formation à juge unique, suivant d’ailleurs la position qu’elle avait adoptée en janvier 2017 lors de l’examen de la proposition de loi tendant à renforcer l’efficacité de la justice pénale.

Rappelons qu’une large majorité, pour ne pas dire une très large majorité des affaires correctionnelles font l’objet d’un jugement rendu à juge unique : les délits prévus par le code de la route, les outrages et rébellions, les délits en matière de réglementation relative aux transports, les délits punis d’amendes, etc.

Le présent projet de loi tend à poursuivre cette tendance, en élargissant la compétence de la formation à juge unique du tribunal correctionnel à de nombreux délits punis au maximum de cinq ans d’emprisonnement, sans considération d’ailleurs des aggravations résultant de l’état de récidive.

La commission est favorable à cette extension de l’office du juge unique en première instance, mais non en cause d’appel. Elle a fait le choix de la simplicité et de la lisibilité en instaurant une compétence générale du magistrat pour toute infraction au code pénal faisant courir à une personne une peine d’emprisonnement d’une durée inférieure ou égale à cinq ans, à l’exception, j’y insiste, des délits d’agression sexuelle.

Au cours des auditions, d’ailleurs, il nous est apparu que l’examen des poursuites par un magistrat unique pouvait parfaitement être envisagé en première instance pour tous ces délits du code pénal punis d’une peine maximale de cinq ans, dès lors qu’étaient prévues les mêmes exigences de temps et d’attention que devant une formation collégiale.

La commission émet donc un avis défavorable sur l’amendement n° 157.

En ce qui concerne l’amendement n° 176 du Gouvernement, qui tend à en revenir au texte original du projet de loi, mon avis est également défavorable.

Il faut que les choses restent simples : puisqu’il existe une liste des délits jugés par une formation composée d’un seul magistrat, la commission considère que cela s’applique à tous les délits du code pénal, à l’exception donc des délits d’agression sexuelle, je le répète, ainsi qu’à tous les autres délits mentionnés dans d’autres codes. Sur ce point, le texte de la commission n’a absolument pas touché aux dispositions du projet de loi initial.

Par ailleurs, il y a une liste des délits qui peuvent être jugés par ordonnance pénale : tous les délits punis d’une peine inférieure à cinq ans, à l’exception des délits d’atteintes à la personne. Sur ce point, la commission a repris la position qu’elle avait adoptée en janvier 2017 lors de l’examen du texte que j’ai mentionné plus haut.

Enfin, l’amendement n° 158 vise à supprimer la possibilité pour le juge unique d’avoir à traiter des affaires en matière d’ordonnance pénale. La commission, pour les raisons que je viens d’invoquer, a également émis un avis défavorable.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Nicole Belloubet, garde des sceaux. Le Gouvernement émet un avis défavorable à la fois sur l’amendement no 157, pour les raisons que j’ai explicitées en présentant l’amendement du Gouvernement, et sur l’amendement n° 158, qui tend à supprimer les dispositions relatives à l’ordonnance pénale, puisque celles-ci sont directement liées à l’évolution du champ de la procédure de jugement à juge unique et qu’elles offrent une plus grande diversité en matière de réponse pénale.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 157.

(Lamendement nest pas adopté.)

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 176.

(Lamendement nest pas adopté.)

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 158.

(Lamendement nest pas adopté.)

Mme la présidente. L’amendement n° 159, présenté par MM. J. Bigot et Sueur, Mme de la Gontrie, MM. Kanner, Durain, Leconte, Kerrouche, Fichet et Houllegatte, Mmes Préville, Meunier, Lubin, Jasmin et Blondin, MM. Jeansannetas, Cabanel et Montaugé, Mmes G. Jourda, Taillé-Polian et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :

Alinéa 23

Supprimer cet alinéa.

La parole est à M. Jacques Bigot.

M. Jacques Bigot. Ne me faisant aucune illusion sur le sort qui va lui être réservé, et afin que nous gagnions un peu de temps, je considère que cet amendement est défendu, madame la présidente !

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. François-Noël Buffet, corapporteur. La commission considère que le dispositif, tel qu’il existe, assure les garanties suffisantes pour que les décisions soient rendues dans de bonnes conditions et en respectant des droits de la défense.

Je sollicite donc le retrait de cet amendement.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Nicole Belloubet, garde des sceaux. Le Gouvernement demande, lui aussi, le retrait de cet amendement ; à défaut, il émettrait un avis défavorable.

Mme la présidente. Monsieur Bigot, l’amendement n° 159 est-il maintenu ?

M. Jacques Bigot. Les chants désespérés étant les plus beaux (Sourires.), je le maintiens, madame la présidente.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 159.

(Lamendement nest pas adopté.)

Mme la présidente. L’amendement n° 349, présenté par MM. Buffet et Détraigne, au nom de la commission, est ainsi libellé :

Alinéa 24

Après les mots :

également portée à

insérer le mot :

la

La parole est à M. le corapporteur.

M. François-Noël Buffet, corapporteur. Il s’agit d’un amendement rédactionnel.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Nicole Belloubet, garde des sceaux. Favorable, madame la présidente.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 349.

(Lamendement est adopté.)

Mme la présidente. La parole est à M. Jacques Bigot, pour explication de vote sur l’article.

M. Jacques Bigot. Bien évidemment, nous ne voterons pas l’article 40, qui, à nos yeux, ne garantit pas suffisamment les droits de la défense.

Dans notre système judiciaire, la collégialité, pour les affaires lourdes, et le débat – mis à mal par l’élargissement du champ de la procédure d’ordonnance pénale – sont importants, même si cela a un coût. C’est une exigence de notre État de droit. Un jour, si l’on n’y fait pas attention, on en parviendra à des systèmes extrémistes, avec une justice expéditive. Personne ne le souhaite ici.

J’attire donc l’attention de tous sur le danger de renoncer à nos principes et à nos valeurs pour des motifs purement gestionnaires.

Mme la présidente. La parole est à M. Marc Laménie, pour explication de vote sur l’article.

M. Marc Laménie. Après les explications du corapporteur, je voterai naturellement cet article, qui a fait l’objet de quelques amendements. Je me permets néanmoins d’insister sur un point, tout en respectant, comme nous l’avons toujours fait, la séparation des pouvoirs : la justice doit disposer de moyens humains et financiers.

L’amendement du Gouvernement tend à dresser une liste phénoménale, particulièrement longue, d’infractions relevant de la compétence du juge unique. L’un d’entre eux a appelé mon attention, parce que nous y sommes malheureusement confrontés dans nos départements : les intrusions et les dégradations dans les établissements scolaires.

Les écoles maternelles et primaires, qui relèvent de la responsabilité des communes, ne sont pas nécessairement toutes équipées d’alarmes. Or ces dégradations et ces intrusions mobilisent naturellement le personnel et les enseignants. Quelles sont les peines qui sont prononcées, pour autant que l’on retrouve les auteurs de ces faits ?

Madame la garde des sceaux, il faut rester particulièrement vigilant et faire preuve de fermeté.

Mme la présidente. La parole est à Mme la garde des sceaux.

Mme Nicole Belloubet, garde des sceaux. Monsieur le sénateur, je suis évidemment très sensible à la question que vous venez d’évoquer : les intrusions dans les établissements scolaires sont des faits très graves.

Le recours au juge unique n’est possible que dans le cas des audiences « classiques », si je puis dire. Dans le cas d’une comparution immédiate, l’audience sera toujours collégiale. En cas de flagrance, s’agissant notamment des faits que vous évoquez, l’audience sera collégiale.

Par ailleurs, notre amendement tend effectivement à dresser une liste très longue des infractions relevant de la compétence du juge unique. Nous l’avons rédigé ainsi pour répondre à une recommandation que nous a faite le Conseil d’État lorsqu’il a étudié ce texte, mais aussi pour apporter plus de clarté.

Mme la présidente. La parole est à Mme Sophie Joissains, pour explication de vote sur l’article.

Mme Sophie Joissains. Je suis contre l’extension de la compétence de la formation à juge unique, parce que je considère qu’une telle procédure de jugement ne présente pas toutes les garanties d’impartialité et tend vers une justice expéditive.

C’est pourquoi, à titre personnel, je voterai contre l’article 40, comme je l’avais annoncé en commission et au cours de mon intervention dans la discussion générale.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’article 40, modifié.

(Larticle 40 est adopté.)

Article 40
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Article 42

Article 41

I. – Le deuxième alinéa de l’article 502 du code de procédure pénale est ainsi rédigé :

« La déclaration indique si l’appel porte sur la décision sur l’action publique ou sur la décision sur l’action civile ou sur les deux décisions. Si l’appel concerne la décision sur l’action publique, elle indique s’il porte sur la décision de culpabilité ou s’il est limité aux peines prononcées, à certaines d’entre elles ou à leurs modalités d’application. Si la décision sur l’action publique a déclaré le prévenu coupable de plusieurs infractions, l’appel sur cette décision précise s’il concerne l’ensemble des infractions ou certaines d’entre elles. »

II. – Au premier alinéa de l’article 509 du code de procédure pénale, les mots : « dans la limite fixée par l’acte d’appel » sont remplacés par les mots : « dans les limites fixées par l’acte d’appel conformément au deuxième alinéa de l’article 502 ».

III. – (Supprimé)

Mme la présidente. L’amendement n° 160, présenté par MM. J. Bigot et Sueur, Mme de la Gontrie, MM. Kanner, Durain, Leconte, Kerrouche, Fichet et Houllegatte, Mmes Préville, Meunier, Lubin, Jasmin et Blondin, MM. Jeansannetas, Cabanel et Montaugé, Mmes G. Jourda, Taillé-Polian et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :

Après l’alinéa 2

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

« Les omissions ou inexactitudes constatées dans la déclaration mentionnée au deuxième alinéa ne peuvent constituer une cause de rejet du droit de former appel. »

La parole est à M. Jacques Bigot.

M. Jacques Bigot. Je présente cet amendement à la demande de plusieurs collègues.

L’article 41 prévoit de manière extrêmement précise les conditions de la déclaration d’appel. Il dispose notamment que, si l’appel concerne la décision sur l’action publique, la déclaration indique s’il porte sur la décision de culpabilité ou s’il est limité aux peines prononcées.

Si la personne est représentée par un avocat, celui-ci saura comment répondre et faire cette déclaration. Mais la question que soulèvent mes collègues est la suivante : comme l’appel doit être interjeté dans les dix jours suivant le prononcé de la décision, le risque est que les personnes concernées ne sachent pas comment formuler leur déclaration. Il importe donc d’éviter qu’une mauvaise formulation de cette dernière rende irrecevable l’appel.

C’est pourquoi nous proposons de préciser que les omissions ou inexactitudes constatées dans la déclaration ne sont pas de nature à priver l’appelant de son droit. À la limite, il pourrait, par courrier, préciser la portée exacte de son appel, faute de l’avoir indiquée clairement dans un premier temps.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. François-Noël Buffet, corapporteur. La commission émet un avis favorable sur cet amendement.

Mme Nathalie Goulet. Très bien !

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Nicole Belloubet, garde des sceaux. L’article 41 du projet de loi simplifie les règles en matière d’appel. L’article 502 du code de procédure pénale obligera le prévenu à préciser la portée de son appel en indiquant, lorsque celui-ci porte sur la décision de l’action publique, s’il concerne la décision de culpabilité ou bien s’il est limité aux peines prononcées, à certaines d’entre elles ou à leurs modalités d’application.

Ces précisions auront notamment pour intérêt de permettre un audiencement qui nous semble plus rationalisé par une meilleure anticipation du temps d’audience.

L’amendement n° 160, que vous portez, vise à préciser que le non-respect de ces formalités lors de la déclaration d’appel ne constitue pas une cause de rejet de celui-ci. En réalité, si je vais émettre un avis défavorable sur votre amendement, c’est parce que cette précision ne me semble pas utile dès lors que le contenu de la déclaration doit systématiquement être contrôlé par le greffier ou par le chef d’établissement pénitentiaire qui reçoit et signe celle-ci, s’assurant à cette occasion que le condamné y précise bien la portée de son appel.

Il me semble qu’il n’est pas nécessaire de préciser que cette formalité n’est pas prescrite à peine d’irrecevabilité. Le Gouvernement émet donc un avis défavorable sur cet amendement.

Mme la présidente. La parole est à M. Jacques Bigot, pour explication de vote.

M. Jacques Bigot. Madame la garde des sceaux, je pensais bien que vous me feriez cette réponse. C’est la raison pour laquelle je prends bien la précaution de préciser que c’est pour que ce texte soit discuté en séance publique que j’ai déposé cet amendement.

Je remercie M. le rapporteur d’avoir émis un avis favorable, au nom de la commission : cela veut bien dire qu’il y a là un sujet.

Cet amendement, que nous allons voter, n’est sans doute pas pleinement satisfaisant sur le plan technique. Certes, ce texte fait l’objet d’une seule lecture, mais il serait sans doute utile d’apporter par la suite des précisions, car le risque demeure si la personne qui forme un appel n’a pas suffisamment précisé son objet. Il ne faudrait pas non plus qu’elle soit privée de cette faculté parce qu’elle aurait été mal conseillée ou parce qu’auraient subsisté des incompréhensions, en dépit du contrôle exercé par les greffes.

Mme la présidente. La parole est à Mme Nathalie Goulet, pour explication de vote.

Mme Nathalie Goulet. Les praticiens du droit connaissent les nombreuses difficultés de l’exercice, mais, généralement, les modalités de formulation de l’appel, son modus operandi, figurent en annexe de la décision qui en fait l’objet, ce qui permet d’éviter ce type de problème.

Par ailleurs, nous avons voté il y a très peu de temps le principe du droit à l’erreur ; je crois donc que les dispositions de l’amendement notre collègue Jacques Bigot vont dans le bon sens.

Je suivrai donc l’avis de la commission et voterai l’amendement n° 160.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 160.

(Lamendement est adopté.)

Mme la présidente. L’amendement n° 177, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :

Alinéa 4

Rétablir le III dans la rédaction suivante :

III. – Après le premier alinéa de l’article 510 du même code, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« Toutefois, lorsque le jugement attaqué a été rendu selon les modalités prévues au troisième alinéa de l’article 398, la chambre des appels correctionnels est composée d’un seul de ces magistrats exerçant les pouvoirs confiés au président de chambre, sauf si le prévenu est en détention provisoire pour les faits qui lui sont reprochés ou si, dans l’acte d’appel, celui-ci demande que l’affaire soit examinée par une formation collégiale. Elle ne peut alors prononcer une peine d’emprisonnement ferme d’une durée supérieure à cinq ans. Elle peut toutefois, si ce renvoi lui paraît justifié en raison de la complexité des faits ou en raison de l’importance de la peine susceptible d’être prononcée, décider, d’office ou à la demande des parties ou du ministère public, de renvoyer l’affaire devant la chambre des appels correctionnels siégeant en formation collégiale. »

La parole est à Mme la garde des sceaux.

Mme Nicole Belloubet, garde des sceaux. Cet amendement vise à rétablir une disposition essentielle du projet de loi relative à l’examen à juge unique des appels rendus par la juridiction correctionnelle statuant elle-même à juge unique.

Cette mesure, qui s’appliquera à tous les faits relevant du juge unique, sauf quand les prévenus sont en détention provisoire, devrait concerner environ 12 000 affaires par an, sur un total de 22 000 condamnations prononcées annuellement par les cours d’appel en matière correctionnelle. Elle aura pour conséquence d’alléger significativement la charge des juridictions, donc les délais de traitement des appels en matière correctionnelle.

Toutefois, pour répondre aux observations qu’a formulées la commission des lois, je propose de moduler ce principe, en prévoyant que le prévenu puisse solliciter, lorsqu’il interjette appel, le bénéfice de la collégialité.

Une telle solution est exactement similaire à celle qui a été retenue sur l’initiative du Sénat dans la loi du 15 juin 2000 en matière de référé-liberté. Il avait été prévu alors que la personne formant ce recours pourrait demander qu’il soit examiné non pas par le président de la chambre de l’instruction, mais pas la chambre elle-même – c’est l’article 187-2 du code de procédure pénale.

Cette solution, qui représente un pas du Gouvernement en direction de la commission, me semble équilibrée, et je souhaite donc vivement que cet amendement puisse être voté.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. François-Noël Buffet, corapporteur. La commission a émis un avis défavorable hier matin. Néanmoins, je tiens à dire que la proposition du Gouvernement est intéressante et constitue malgré tout une avancée.

Je ne puis pas, naturellement, m’engager au nom de la commission, qui a statué sur l’amendement ; je m’en tiendrai donc à cet avis défavorable. En revanche, au cours de la navette, il faudra voir comment faire prospérer cette avancée.

M. Jean-Pierre Sueur. Il faudrait d’abord qu’il y eût une navette ! (Sourires.)

M. François-Noël Buffet, corapporteur. Nous allons essayer de prendre le bon ticket pour que cela marche ! (Nouveaux sourires.)

En attendant, je le rappelle, la commission a émis un avis défavorable.

Mme la présidente. La parole est à Mme Nathalie Goulet, pour explication de vote.

Mme Nathalie Goulet. Le meilleur moyen pour faire progresser un texte au cours de la navette en l’absence de navette, c’est de le voter quand on en a l’occasion.

Je voterai donc cet amendement.

Mme la présidente. La parole est à M. Jacques Bigot, pour explication de vote.

M. Jacques Bigot. Mes chers collègues, devant la justice, je pense toujours qu’il y a la loi et l’application de la loi. Je remercie Mme la garde des sceaux de l’effort auquel elle consent en prévoyant que le prévenu puisse solliciter, lorsqu’il interjette appel, le bénéfice de la collégialité.

En pratique, le risque est que l’on dise au prévenu voulant suivre cette voie que son affaire sera alors audiencée plus tardivement. C’est une pression réelle, que l’on observe en matière civile lorsque le choix existe entre le juge unique et la collégialité. Je n’en fais pas grief aux magistrats, qui veulent que les choses puissent fonctionner, alors même qu’ils ne sont pas suffisamment nombreux – peut-être le seront-ils plus demain, du moins je l’espère.

C’est la raison pour laquelle, personnellement, je suivrai non pas le Gouvernement, mais la commission.

Mme la présidente. La parole est à M. le corapporteur.

M. François-Noël Buffet, corapporteur. J’ai dit que l’amendement du Gouvernement représentait une avancée, mais que nous nous en tenions à l’avis de la commission. J’ai ajouté que, dans le cadre des discussions qui s’ouvriront après l’adoption du texte, il faudra regarder les choses de plus près.

L’avis de la commission est donc bien défavorable.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 177.

(Lamendement nest pas adopté.)

Mme la présidente. Je mets aux voix l’article 41, modifié.

(Larticle 41 est adopté.)

Sous-section 2

Dispositions relatives au jugement des crimes

Article 41
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Article additionnel après l'article 42 - Amendement n° 179

Article 42

I. – Le code de procédure pénale est ainsi modifié :

1° L’article 281 est ainsi modifié :

a) Au premier alinéa, les mots : « vingt-quatre heures » sont remplacés par les mots : « un mois » ;

b) À la seconde phrase du dernier alinéa, les mots : « cinq jours » sont remplacés par les mots : « dix jours et un mois » ;

1° bis (nouveau) L’article 311 est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Au cours des débats, les jurés peuvent demander au président l’accès à une ou plusieurs pièces de la procédure contenues dans le dossier. » ;

2° La section 1 du chapitre VI du titre Ier du livre II est complétée par un article 316-1 ainsi rédigé :

« Art. 316-1. – Une copie du dossier est mise à la disposition des assesseurs. » ;

3° L’article 331 est ainsi modifié :

a) L’avant-dernier alinéa est supprimé ;

b) Il est ajouté un alinéa ainsi rédigé :

« Les témoins ne sont pas tenus de faire part de leur intime conviction concernant la culpabilité de l’accusé. » ;

4° (Supprimé)

5° Le deuxième alinéa de l’article 365-1 est complété par une phrase ainsi rédigée : « La motivation consiste également dans l’énoncé des principaux éléments ayant convaincu la cour d’assises dans le choix de la peine, au vu des éléments exposés au cours de la délibération prévue à l’article 362. » ;

6° (Supprimé)

7° Après l’article 380-2, il est inséré un article 380-2-1 A ainsi rédigé :

« Art. 380-2-1 A. – L’appel formé par l’accusé ou le ministère public peut indiquer qu’il ne conteste pas les réponses données par la cour d’assises sur sa culpabilité et qu’il est limité à la décision sur la peine.

« Dans ce cas, seuls sont entendus devant la cour d’assises statuant en appel les témoins et experts dont la déposition est nécessaire afin d’éclairer les assesseurs et les jurés sur les faits commis et la personnalité de l’accusé, sans que soient entendues les personnes dont la déposition ne serait utile que pour établir sa culpabilité.

« Lorsque la cour d’assises se retire pour délibérer, les dispositions relatives aux questions sur la culpabilité ne sont pas applicables. » ;

8° Après le 3° de l’article 698-6, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« Les deux derniers alinéas de l’article 347 ne sont pas applicables et la cour d’assises peut délibérer en étant en possession de l’entier dossier de la procédure. »

II. – Par dérogation à l’article 181 et aux chapitres Ier à V du titre I du livre II du code de procédure pénale, les personnes majeures accusées d’un crime puni de quinze ans ou de vingt ans de réclusion criminelle, lorsqu’il n’est pas commis en état de récidive légale, sont jugées en premier ressort par le tribunal criminel départemental. Ce tribunal est également compétent pour le jugement des délits connexes.

Le tribunal criminel départemental, qui siège au même lieu que la cour d’assises, est composé d’un président et de quatre assesseurs, choisis par le premier président de la cour d’appel parmi, pour le président, les présidents de chambres et les conseillers du ressort de la cour d’appel et, pour les assesseurs, les conseillers et les juges de ce ressort. Deux des assesseurs peuvent être des magistrats exerçant à titre temporaire ou des magistrats honoraires.

Les personnes contre lesquelles il existe à l’issue de l’information des charges suffisantes d’avoir commis, hors récidive, un crime mentionné au premier alinéa du présent II sont, selon les modalités prévues à l’article 181 du code de procédure pénale, mises en accusation par le juge d’instruction devant le tribunal criminel. Le délai d’un an prévu au huitième alinéa du même article 181 est alors réduit à six mois, et il ne peut être procédé qu’à une seule prolongation en application du neuvième alinéa.

L’audiencement devant le tribunal criminel est fixé par décision conjointe du président de ce tribunal et du procureur de la République. À défaut d’accord, il est fixé par le premier président de la cour d’appel, après avis du procureur général.

Le tribunal criminel applique les dispositions du titre Ier du livre II du code de procédure pénale sous les réserves suivantes :

1° Il n’est pas tenu compte des dispositions qui font mention du jury ou des jurés ;

2° Les attributions confiées à la cour d’assises ou à la cour sont exercées par le tribunal criminel, et celles confiées au président de la cour d’assises sont exercées par le président de ce tribunal ;

3° Les articles 254 à 267, 282, 288 à 292, les deuxième et dernier alinéa de l’article 293 et les articles 295 à 305 du même code ne sont pas applicables ;

4° Pour l’application des articles 359, 360 et 362 dudit code, les décisions sont prises à la majorité ;

5° Les deux derniers alinéas de l’article 347 du même code ne sont pas applicables et le tribunal criminel délibère en étant en possession de l’entier dossier de la procédure.

Si le tribunal criminel estime, au cours ou à l’issue des débats, que les faits dont il est saisi constituent un crime puni de trente ans de réclusion ou de la réclusion criminelle à perpétuité, il renvoie l’affaire devant la cour d’assises.

L’appel des décisions du tribunal criminel départemental est examiné par la cour d’assises dans les conditions prévues au titre Ier du livre II du même code pour l’appel des arrêts rendus par les cours d’assises en premier ressort.

Pour l’application des dispositions relatives à l’aide juridictionnelle, le tribunal criminel est assimilé à la cour d’assises.

III. – Le II du présent article est applicable à titre expérimental à compter du 1er janvier 2019 et jusqu’au 1er janvier 2022, pour le jugement des personnes mises en accusation au plus tard le 1er janvier 2021, dans au moins deux départements et au plus dix départements déterminés par un arrêté du garde des sceaux.

Six mois au moins avant le terme de l’expérimentation, le Gouvernement adresse au Parlement un rapport procédant à son évaluation.

Pour la mise en œuvre de l’expérimentation, les personnes déjà mises en accusation devant la cour d’assises peuvent être renvoyées devant le tribunal criminel, avec leur accord recueilli en présence de leur avocat, sur décision du premier président de la cour d’appel. Les personnes mises en accusation devant le tribunal criminel avant le 1er janvier 2021 et non encore jugées au 1er janvier 2022 sont de plein droit mises en accusation devant la cour d’assises.

IV (nouveau). – L’article 689-11 du code de procédure pénale est ainsi rédigé :

« Art. 689-11. – En dehors des cas prévus au sous-titre Ier du titre Ier du livre IV du présent code pour l’application de la convention portant statut de la Cour pénale internationale, ouverte à la signature à Rome le 18 juillet 1998, peut être poursuivie et jugée par les juridictions françaises, si elle se trouve en France, toute personne soupçonnée de l’une des infractions suivantes :

« 1° Les crimes contre l’humanité et crimes de génocide définis aux articles 211-1, 211-2, 212-1 à 212-3 du code pénal ;

« 2° Les crimes et les délits de guerre définis aux articles 461-1 à 461-31 du même code.

« La poursuite de cette personne ne peut être exercée, si aucune juridiction internationale ou étrangère ne demande sa remise ou son extradition, qu’à la requête du ministère public, lequel s’assure au préalable de l’absence de poursuite diligentée par la Cour pénale internationale ou un État compétent. Lorsque, en application de l’article 40-3 du présent code, le procureur général est saisi d’un recours contre une décision de classement sans suite prise par le procureur de la République, il entend la personne qui a dénoncé les faits si celle-ci en fait la demande. S’il estime le recours infondé, il en informe l’intéressé par une décision écrite motivée. »