M. Laurent Duplomb. C’est le cas !

M. Pierre-Yves Collombat. Électoralement, ce n’est pas bon !

M. Sébastien Lecornu, ministre. Nous avons une responsabilité collective, puisque vous êtes parlementaires et, donc, élus nationaux. Vous défendez la Nation tout entière, à savoir les collectivités territoriales et l’État. C’est le ministre qui vous le dit, mais aussi l’ancien maire et l’ancien président d’un conseil départemental.

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Article 1er (début)
Dossier législatif : proposition de loi portant création d'une Agence nationale de la cohésion des territoires
Article 1er (suite)

Adoption des conclusions de la conférence des présidents

M. le président. Je n’ai été saisi d’aucune observation sur les conclusions de la conférence des présidents. Elles sont donc adoptées.

Mes chers collègues, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à quinze heures.

La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à treize heures vingt, est reprise à quinze heures, sous la présidence de M. Thani Mohamed Soilihi.)

PRÉSIDENCE DE M. Thani Mohamed Soilihi

vice-président

M. le président. La séance est reprise.

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Questions d’actualité au Gouvernement

M. le président. L’ordre du jour appelle les réponses à des questions d’actualité au Gouvernement.

Je souhaite excuser l’absence de M. le président du Sénat, qui assiste aujourd’hui au congrès de l’Assemblée des départements de France.

Je rappelle que la séance est retransmise en direct sur Public Sénat, sur le site internet du Sénat et sur Facebook.

Au nom du bureau du Sénat, j’appelle chacun à observer, au cours de nos échanges, l’une de nos valeurs essentielles : le respect, qu’il s’agisse du respect des uns et des autres ou de celui du temps de parole.

carburants et pouvoir d’achat

M. le président. La parole est à M. Fabien Gay, pour le groupe communiste républicain citoyen et écologiste.

M. Fabien Gay. Monsieur le président, monsieur le ministre de l’économie et des finances, mes chers collègues, la colère gronde sur tout le territoire face à l’augmentation des prix du gaz, du fioul domestique et de l’essence. (Ah ! sur les travées du groupe Les Républicains.)

Cette colère est légitime, car elle exprime le sentiment d’assister à un véritable hold-up fiscal.

Vous faites payer une fiscalité maquillée en vert aux familles populaires et aux classes moyennes. Or ce sont ces familles qui subissent déjà les salaires bloqués et la non-revalorisation du SMIC, et qui voient leurs pensions de retraite baisser avec la hausse de la CSG, tout ceci pour compenser vos cadeaux fiscaux aux plus riches, avec la baisse de l’impôt sur la fortune, et aux entreprises – le CICE, le crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi, aura ainsi coûté 99 milliards d’euros pour un effet quasi nul sur l’emploi.

Alors que le réchauffement climatique entre dans un cycle infernal, vous trouvez le moyen de taxer le smicard qui gagne 1 153 euros et qui n’a d’autre choix que de faire 35 kilomètres par jour en voiture. Savez-vous, monsieur le ministre, qu’il y a aujourd’hui 18 millions de Français en zone blanche des transports publics ? Par contre, vous ne taxez surtout pas l’entreprise Total, qui réalisait, en 2017, plus de 8 milliards d’euros de bénéfices nets !

La lutte contre le réchauffement climatique est impérative ! Mais, pour la mener efficacement, arrêtez de fermer les petites gares ! Arrêtez vos bus « Macron », qui roulent au diesel ! Stoppez les activités de forage offshore de Total en Guyane ! Développez les transports publics, et parlons de la gratuité ! Taxez le kérosène et les croisiéristes ! Taxez Total et les sociétés d’autoroutes ! Mieux même : renationalisez ces dernières pour qu’elles contribuent à cet enjeu de société.

Monsieur le ministre, allez-vous arrêter de taxer les Français et vous attaquer enfin aux lobbies ? (Bravo ! et applaudissements sur les travées du groupe communiste républicain citoyen et écologiste et sur des travées du groupe socialiste et républicain et du groupe Les Républicains.)

M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d’État auprès du ministre de l’économie et des finances.

Mme Agnès Pannier-Runacher, secrétaire d’État auprès du ministre de l’économie et des finances. Monsieur le sénateur Gay, oui, nous faisons face à une hausse des prix à la pompe, car le prix du baril est passé de 50 dollars à 80 dollars. (Exclamations sur les travées du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, du groupe socialiste et républicain et du groupe Les Républicains.)

Mme Éliane Assassi et M. Martial Bourquin. Et les taxes ?

Mme Agnès Pannier-Runacher, secrétaire d’État. Oui, la fiscalité pèse sur ce prix, à hauteur de 3 à 7 centimes par litre de carburant. Nous avons pleinement conscience que cela crée des difficultés pour certains ménages modestes, et notamment pour ceux qui sont obligés de se rendre à leur travail en voiture, mais je voudrais dire deux choses.

D’abord, nous assumons cette fiscalité ; elle est conforme à nos engagements pour le climat. Elle est conforme à notre lutte contre la pollution atmosphérique, qui tue des milliers de personnes chaque année. Nous préférons taxer la pollution plutôt que le travail. (Vives protestations sur les travées du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, du groupe socialiste et républicain et du groupe Les Républicains.)

Et vous savez bien que les charges sociales et la taxe d’habitation des ménages ont baissé. Vous savez aussi que pour chaque euro de hausse de taxe sur les carburants, le Gouvernement rend, grosso modo, 4 euros en baisse d’impôts ou de charges.

Pour autant, nous savons les difficultés que peuvent rencontrer les plus modestes de nos compatriotes. Et nous agissons pour les accompagner dans cette transition écologique.

Nous agissons, à moyen terme, avec la prime à la conversion, qui touche cette année 250 000 véhicules et concerne à 70 % des ménages non imposables – cela, c’est la réalité –, avec les aides à la rénovation des logements, avec la généralisation du chèque énergie à 4 millions de ménages.

Nous agissons aussi, à court terme, pour soulager la facture des ménages les plus modestes.

Et puisque vous parlez de Total, monsieur le sénateur, je vous informe que M. Bruno Le Maire et M. François de Rugy devraient recevoir Total et les distributeurs de pétrole (Brouhaha sur les travées du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, du groupe socialiste et républicain et du groupe Les Républicains.) pour s’assurer que la récente baisse du prix du baril soit bien répercutée à la pompe.

Quant aux contrôles de la DGCCRF, la direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes, ils se sont multipliés. (Mêmes mouvements.)

C’est cela, une transition solidaire ! C’est une transition qui maintient son cap tout en accompagnant les ménages modestes. (Applaudissements sur les travées du groupe La République En Marche.)

M. Rachid Temal. Vous appelez cela répondre ?

M. le président. La parole est à M. Fabien Gay, pour la réplique.

M. Fabien Gay. Madame la secrétaire d’État, il n’y aura pas de révolution écologique sans révolution sociale.

S’agissant de la première, mettez vos discours en actes ; s’agissant de la seconde, les Français n’attendent pas la mendicité des chèques énergie, mais l’augmentation de leur pouvoir d’achat, de leurs salaires et de leurs pensions de retraite ! (Applaudissements sur les travées du groupe communiste républicain citoyen et écologiste et sur des travées du groupe socialiste et républicain, du groupe Les Républicains et du groupe Union Centriste.)

transition énergétique et pouvoir d’achat

M. le président. La parole est à M. Franck Montaugé, pour le groupe socialiste et républicain. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain.)

M. Franck Montaugé. Ma question s’adresse à M. le ministre d’État, ministre de la transition écologique et solidaire.

Qu’il s’agisse de se chauffer ou de se déplacer, les Français constatent que leurs factures augmentent dans des proportions insupportables. Les mécontentements montent de toutes parts dans le pays et, malgré les annonces, vous n’avez pas pris la mesure des difficultés que vivent nos concitoyens.

Je pense à ceux dont les revenus sont modestes ou dont le pouvoir d’achat diminue, et qui sont à l’euro près pour boucler leur fin de mois.

Je pense à ces ruraux qui sont captifs du carburant pour se déplacer ou se chauffer, à ces Français qui voudraient bien isoler leur maison pour payer moins cher leur chauffage.

Le Gouvernement s’était engagé, par exemple, à transformer en prime le crédit d’impôt pour la transition énergétique. On attend toujours ; mais ce qui est sûr, c’est que les crédits correspondants sont divisés par deux dans le budget pour 2019.

De surcroît, les Français se sentent grugés quand 20 % seulement des augmentations de taxes sont affectés à la transition.

Ils ne voient pas où vous voulez mener le pays, quand il s’agit de faire face aux enjeux multiples et cruciaux de la transition énergétique et écologique. Ces enjeux, les Français les partagent ; cette transition, ils veulent y contribuer, pour autant que les mesures prises soient justes et efficaces.

Pourquoi, alors, les stigmatiser, les culpabiliser, les rendre responsables d’un état de fait qu’ils subissent entièrement et pour lequel vous ne proposez pas de réponse à la hauteur de leurs difficultés ?

Monsieur le ministre, tout en engageant résolument la France dans la transition économique, sociale et environnementale, qui doit se faire au bénéfice de tous, quelles nouvelles mesures entendez-vous rapidement prendre pour répondre aux difficultés des Français ? (Bravo ! et applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain et sur des travées du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.)

M. le président. La parole est à M. le ministre d’État, ministre de la transition écologique et solidaire.

M. François de Rugy, ministre d’État, ministre de la transition écologique et solidaire. Monsieur le sénateur Montaugé, vous avez raison sur un point : aujourd’hui, les Français, et les élus que vous êtes – nous en avons parlé hier, en commission du développement durable, avec votre président Hervé Maurey –, ont besoin de transparence et de pédagogie s’agissant de l’utilisation des recettes fiscales prélevées au titre de la fiscalité écologique. (Exclamations sur les travées du groupe socialiste et républicain, du groupe communiste républicain citoyen et écologiste et du groupe Les Républicains.)

M. Roland Courteau. Ils ont besoin de bien davantage !

M. François de Rugy, ministre d’État. Je suis tout disposé à mener ce débat et à reconnaître que, en la matière, tout n’a pas été fait. (Exclamations ironiques sur des travées du groupe socialiste et républicain et du groupe Les Républicains.) Nous allons donc, sur ces sujets, améliorer l’information et donner tous les chiffres. (Ah ! sur les travées du groupe socialiste et républicain.)

M. Pierre Ouzoulias. Et le pouvoir d’achat ?

M. François de Rugy, ministre d’État. Premier chiffre, très simple : en 2019 – vous allez voir que nous ne cherchons pas à minorer les choses –, 34 milliards d’euros sont prélevés au titre de la fiscalité écologique : taxes sur les carburants, taxe carbone, mais aussi d’autres taxes qui existaient déjà, d’ailleurs, auparavant.

Le budget du ministère de la transition écologique et solidaire s’élève précisément à 34 milliards d’euros ; il augmente d’un milliard d’euros en 2019 par rapport à 2018. Bien sûr, tous les éléments relatifs au contenu de ce budget et aux dépenses afférentes devront être communiqués. (Exclamations sur les travées du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.)

Exemple concret : sur les 7,9 milliards d’euros de recettes issues de la contribution climat-énergie, dite taxe carbone, 7,3 milliards seront, en 2019, réinvestis dans les énergies renouvelables. Concrètement, 1,2 milliard d’euros seront réinvestis dans les infrastructures de transport via l’Agence de financement des infrastructures de transport de France, l’AFITF. C’est concret ! Je suis prêt, évidemment, à continuer de donner les chiffres.

Quant aux mesures d’accompagnement – l’accompagnement du changement fait partie du changement –, nous les poursuivons et nous les amplifions : la prime à la conversion, qui permet d’acheter une voiture moins polluante en échange de la mise à la casse des voitures les plus polluantes, représente 2 000 euros pour les ménages non imposables…

M. Martial Bourquin. Ce n’est pas assez !

M. François de Rugy, ministre d’État. Elle a un très grand succès, nous l’amplifions. Nous poursuivons également le dispositif de prime au remplacement des chaudières au fioul, et nous augmentons le chèque énergie. Et nous allons travailler sur des mesures complémentaires destinées à améliorer la situation des ménages dont les revenus sont les plus modestes. (Applaudissements sur les travées du groupe La République En Marche.)

M. le président. La parole est à M. Franck Montaugé, pour la réplique.

M. Franck Montaugé. En vérité, le départ fracassant de M. Hulot du Gouvernement a sonné le glas de l’ambition nationale de transition, qui était d’ailleurs davantage la sienne que celle du Président de la République.

Utilisez le chèque énergie de la loi Royal de transition énergétique !

Utilisez le mécanisme de « TICPE flottante », dont le principe fut mis en place par Lionel Jospin – la situation, qui va encore se dégrader, le nécessite !

Mais une politique de transition qui se réduit à la fiscalité est une punition.

Vous avez à l’égard de la France et des Français un devoir de clarté, de cohérence, de pédagogie et surtout d’efficacité ! Assumez ce devoir pleinement, dans l’intérêt général ! (Très bien ! et applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain et sur des travées du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.)

budget des armées

M. le président. La parole est à M. Emmanuel Capus, pour le groupe Les Indépendants – République et Territoires. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Indépendants – République et Territoires.)

M. Emmanuel Capus. Le Président de la République a pris des engagements extrêmement clairs en matière de préservation du budget de la défense. Nous avons voté une loi de finances pour 2018 qui sanctuarise ce budget, et nous avons voté une loi de programmation militaire ambitieuse, qui augmente même les crédits de la défense, ce qui n’était pas arrivé depuis près de vingt ans. Les Indépendants ont salué cet effort.

Hier, à l’Assemblée nationale, le projet de loi de finances rectificative pour 2018 a été déposé ; or il semble que les opérations extérieures et, pour ce qui est de notre territoire, l’opération Sentinelle, qui devaient être prises en charge à hauteur de 50 % par la solidarité interministérielle, n’y seraient plus prises en charge que par le ministère de la défense.

Ce n’est pas ce que nous avons voté. Ce n’est pas ce que nous avons soutenu. Et ce n’est pas possible !

Nous avons donc besoin d’éclaircissements sur ce point. À l’heure où le Président de la République est en itinérance mémorielle pour célébrer nos anciens combattants,…

M. Xavier Iacovelli. Et Pétain !

M. Emmanuel Capus. … à l’heure où l’ensemble de la Nation salue la mémoire de nos combattants, à l’heure, surtout, où, à l’extérieur comme à l’intérieur, nos armées combattent pour défendre nos valeurs, il est important que nous puissions savoir où et comment vont être libérés les 404 millions d’euros qui manquent pour faire face à cette dépense nouvelle.

Surtout, la trajectoire ambitieuse que nous avons votée dans la loi de programmation militaire est-elle mise en cause ? (Applaudissements sur les travées du groupe Les Indépendants – République et Territoires et sur des travées du groupe Les Républicains et du groupe du Rassemblement Démocratique et Social Européen.)

M. le président. La parole est à M. le secrétaire d’État auprès du ministre de l’action et des comptes publics.

M. Olivier Dussopt, secrétaire d’État auprès du ministre de l’action et des comptes publics. Monsieur le sénateur Capus, vous l’avez dit, depuis longtemps s’est creusé un fossé entre les besoins, réels, d’intervention de nos forces armées, à l’intérieur comme à l’extérieur, et les moyens, insuffisants, alloués à la défense.

Une réponse est donnée à cette situation, sous la forme d’un engagement du Président de la République, un engagement clair, ferme, répété : l’État consacrera 2 % de notre produit intérieur brut à la défense d’ici à 2025. Cet engagement est inscrit dans la loi de programmation militaire, dont la trajectoire sera intégralement respectée.

En témoigne le projet de loi de finances pour 2018, qui a déjà augmenté de 5,5 % le budget de la défense, soit 1,8 milliard d’euros supplémentaires.

Nous devons conjuguer cet effort avec le respect d’un autre impératif, celui de la maîtrise de notre déficit public. Et le projet de loi de finances rectificative que vous avez évoqué donne à la France les moyens d’y parvenir, avec notamment une économie de 600 millions d’euros réalisée par rapport à ce qui était prévu dans la loi de finances initiale. Une telle économie permet à la France de tenir ses engagements.

Je tiens à vous rassurer : le ministère des armées est exempté de contribution à cet effort, et des ouvertures de crédits interviendront pour un montant strictement égal aux annulations le concernant.

Dans le détail, les surcoûts liés aux opérations extérieures notamment sont financés à 100 %, conformément aux besoins exprimés, soit 404 millions d’euros – vous l’avez rappelé. Quant aux annulations de crédits du ministère de la défense, elles représentent moins de 1 % du budget dudit ministère. Elles n’auront aucune conséquence sur les commandes et livraisons de matériels au profit des armées, pour une raison très simple : ces annulations portent sur des crédits qui étaient mis en réserve au titre de la réserve de 3 % – celle-ci concerne tous les ministères –, et qui n’avaient donc, jusqu’à présent, absolument pas été engagés.

Par ailleurs, il faut souligner deux points.

Le ministère des armées va bénéficier d’un dégel immédiat de 250 millions d’euros, qui lui donneront une visibilité inédite pour gérer la fin du présent exercice. Et il n’est en aucun cas mis à contribution dans le cadre de la solidarité interministérielle qui s’applique aux opérations de fin de gestion.

M. le président. Veuillez conclure, monsieur le secrétaire d’État.

M. Olivier Dussopt, secrétaire d’État. Il n’y a en la matière aucune ambiguïté, et les engagements du Gouvernement vis-à-vis de nos armées seront intégralement respectés. (Applaudissements sur les travées du groupe La République En Marche.)

M. le président. La parole est à M. Emmanuel Capus, pour la réplique.

M. Emmanuel Capus. Monsieur le secrétaire d’État, vous l’avez compris : nous sommes tout à fait capables de faire des économies sur d’autres missions ; mais, s’agissant de la défense, il faut que les engagements soient tenus : on ne doit rogner ni sur l’investissement, ni sur l’innovation, ni sur l’équipement des troupes. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Indépendants – République et Territoires et sur des travées du groupe Les Républicains et du groupe Union Centriste.)

trajectoire diesel

M. le président. La parole est à M. Jean-François Husson, pour le groupe Les Républicains. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)

M. Jean-François Husson. Monsieur le ministre d’État, vous avez décidé d’augmenter une nouvelle fois la taxe sur les carburants ; vous assumez cette position de manière constante.

Il est grand temps que vous preniez conscience de l’injustice qu’engendre votre politique, au lieu de vous contenter de mesures de circonstance en réaction à la colère des Français. Vous êtes le chef d’orchestre d’une fiscalité punitive, à défaut de dérouler la partition d’une écologie positive, unique clé d’une transition énergétique harmonieuse, capable d’emporter l’adhésion des Français.

Cette politique confiscatoire est le point d’orgue de ce que vous essayez de vendre aux Français comme étant la symphonie du nouveau monde. Alors, monsieur le ministre, quelles nouvelles orientations décisives et stratégiques proposez-vous pour être à la hauteur des enjeux de la transition écologique que l’urgence climatique exige ? (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et sur des travées du groupe Union Centriste.)

M. le président. La parole est à M. le ministre d’État, ministre de la transition écologique et solidaire.

M. François de Rugy, ministre d’État, ministre de la transition écologique et solidaire. Monsieur le sénateur Husson, il y a quelques années, vous aviez remis, à la suite d’une commission d’enquête sénatoriale, un rapport sur la pollution de l’air.

M. Jean-Baptiste Lemoyne, secrétaire d’État auprès du ministre de l’Europe et des affaires étrangères. Eh oui !

M. François de Rugy, ministre d’État. Et vous aviez courageusement, avec celle qui était à l’époque votre collègue, Leila Aïchi, chiffré les dégâts de cette pollution.

Vous aviez, avec les autorités compétentes, évalué à 45 000 le nombre de décès prématurés liés chaque année à la pollution de l’air. Aujourd’hui, Santé publique France a réévalué ce chiffre à 48 000.

Vous aviez évalué les dégâts de cette pollution à plus de 100 milliards d’euros. Vous aviez appelé à l’action, et vous aviez raison.

J’ai vu, ces dernières années, à quels atermoiements donnaient lieu les questions de la pollution de l’air et du climat. Je me souviens – je le dis aussi à l’attention du sénateur Montaugé, qui a soulevé ce point dans sa réplique – qu’en 1998, le Gouvernement avait commencé à amorcer la convergence essence-diesel, avant de la stopper net en 2000. En 2008, on a incité les Français à acheter de petites voitures à moteur diesel, et un pic a été atteint en 2012 : le diesel représentait alors 72 % des ventes de voitures neuves. Puis, après la révélation du « dieselgate », un début de réorientation fiscale a été décidé.

Nous assumons la convergence fiscale essence-diesel : il faut libérer les Français de la consommation de pétrole en général, et du diesel en particulier. Nous avons obtenu des résultats – je ne les revendique pas pour moi-même ; c’est une action continue : aujourd’hui, le diesel ne représente plus que 36 % des ventes de voitures neuves. Ce sont là bel et bien des actions concrètes !

Et nous amplifions les choses, avec la prime à la conversion. Elle ne rate pas sa cible : 70 % des ménages qui changent de voiture grâce à cette prime sont non imposables, et 80 % des véhicules qui sont mis à la casse grâce à elle sont des véhicules diesel.

Oui, donc, il faut agir, ici, maintenant, avec constance. (Exclamations sur les travées du groupe Les Républicains. – Applaudissements sur les travées du groupe La République En Marche.)

M. le président. La parole est à M. Jean-François Husson, pour la réplique.

M. Jean-François Husson. Je veux souligner, monsieur le ministre, l’incohérence de votre politique de taxation énergétique, faite de volte-face permanentes.

Soyons précis : en 2019, moins de 20 % des prélèvements sur les carburants seront consacrés à des actions écologiques et environnementales ; s’agissant de la seule hausse des taxes pour 2019, non seulement vous ne consacrez pas un euro de plus à la transition écologique, mais les dépenses baissent de 400 millions d’euros.

Autrement dit, vous prenez plus aux Français, mais donnez moins à la transition écologique.

Le Président de la République affiche la volonté de taxer moins le travail et davantage le carburant. Mais le carburant permet aux Français d’aller au travail !

Votre ministre des transports le rappelle : aujourd’hui, 80 % du territoire national n’est pas ou est peu ou mal desservi par une offre de transports alternative à la voiture.

Mme Cécile Cukierman. Les gares ferment les unes après les autres !

M. Jean-François Husson. Les Français n’habitant pas les métropoles ne méritent pas d’être assignés à résidence.

Monsieur le ministre, les « Gaulois réfractaires » ont parfaitement conscience que, marchant sur la tête, vous voulez les rouler dans la farine.

M. le président. Veuillez conclure, mon cher collègue.

M. Jean-François Husson. À juste raison, ils ne l’acceptent pas. Au travail, donc, parce qu’il y a urgence à agir ! (Bravo ! et applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et sur des travées du groupe Union Centriste. – Mme Nelly Tocqueville applaudit également.)

flux migratoires dans les pyrénées-atlantiques

M. le président. La parole est à Mme Denis Saint-Pé, pour le groupe Union Centriste. (Applaudissements sur les travées du groupe Union Centriste.)

Mme Denise Saint-Pé. Monsieur le ministre de l’intérieur, les Pyrénées sont devenues une nouvelle route pour les populations migrantes : 50 000 personnes sont arrivées sur les côtes espagnoles depuis le début de l’année, ce qui représente la moitié des entrées sur le continent.

Sa proximité avec la principale porte d’entrée européenne fait du Pays basque un lieu de transit important pour les migrants en provenance de Guinée, du Mali ou de Côte d’Ivoire : cent migrants arrivent tous les jours à Bayonne.

La ville et la communauté d’agglomération font face à un vrai défi humanitaire : il faut mettre à l’abri avant l’entrée dans l’hiver ces populations fragilisées, constituées surtout d’hommes jeunes, de mineurs isolés, de femmes seules avec enfants.

Elles peuvent compter sur de nombreuses associations, qui organisent l’aide aux arrivants et déploient un plan d’actions estimé à 55 000 euros par mois, mais la société civile ne peut pas tout.

Monsieur le ministre, quel soutien l’État est-il en mesure d’apporter aux communes et aux intercommunalités pour répondre au défi humanitaire ? Quelles aides pour les départements de France qui prennent en charge les mineurs isolés ?

Comment renforcer le contrôle aux frontières et lutter contre la prolifération des réseaux de passeurs ?

L’Europe a progressé grâce au renforcement de l’agence FRONTEX et des actions extérieures ; mais, d’une part, pouvez-vous nous dire où en sont les négociations concernant la révision du règlement de Dublin ? D’autre part, comment notre pays agit-il à l’échelon européen pour se donner les moyens d’agir aux côtés de l’Espagne dans la gestion de ces flux migratoires ? (Applaudissements sur les travées du groupe Union Centriste et sur des travées du groupe du Rassemblement Démocratique et Social Européen.)

M. le président. La parole est à M. le ministre de l’intérieur.

M. Christophe Castaner, ministre de l’intérieur. Madame la sénatrice Saint-Pé, vous m’interrogez au sujet du passage des migrants à la frontière franco-espagnole, et je vous en remercie.

Vous avez raison : trois routes migratoires classiques sont identifiées et, aujourd’hui, l’Espagne est le chemin principal d’accès au continent européen. Les chiffres que vous avez donnés sont exacts ; en outre, les nationalités concernées – vous les avez citées – sont pour l’essentiel francophones, et nous savons que le pays de destination de ces migrations est la France.

C’est la raison pour laquelle nous avons décidé de mobiliser des moyens renforcés pour contrôler nos frontières au nom de la sécurité juste, que chacun ici défend.

Une compagnie supplémentaire de CRS a été détachée et, depuis la semaine dernière, dix policiers sont venus renforcer les effectifs. Ils interviennent non seulement sur le site d’Hendaye, que vous connaissez bien, où M. Nunez s’est rendu il y a trois semaines, mais aussi au niveau des cols, où j’ai fait en sorte que nous soyons présents – on sait en effet que les chemins de la migration peuvent parfaitement se déplacer. Nous venons justement de mobiliser un peloton de gendarmerie dédié à la sécurité sur les cols.

Nous avons décidé de renforcer et de réorganiser notre intervention sur la frontière franco-espagnole, et j’ai pris la décision de nommer un coordinateur pour l’ensemble du massif pyrénéen, afin qu’un interlocuteur unique dialogue avec les autorités espagnoles, en vue de renforcer nos moyens et nos engagements.

Par ailleurs, je rencontrerai lundi prochain mon homologue espagnol, et j’irai dans la foulée au Maroc – il est important que nous intervenions aussi dans ce dernier pays. La Commission européenne a décidé il y a trois jours de mobiliser une aide exceptionnelle de 140 millions d’euros à destination du Maroc, et j’ai échangé aujourd’hui même, à midi, avec mon homologue marocain pour faire en sorte que cette enveloppe permette de financer des opérations d’anticipation du risque migratoire.

Vous me posez également la question de l’engagement financier auprès des collectivités locales. Vous avez raison : il est important, en particulier, d’accompagner les départements qui accueillent des mineurs isolés.