M. le président. La parole est à M. Claude Kern, auquel je souhaite un très bon anniversaire. (Applaudissements sur les travées du groupe Union Centriste.)

M. Claude Kern. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, 32 % des Français de plus de 18 ans sont bénévoles dans une organisation, soit 16 millions de nos concitoyens. Le temps consacré au bénévolat augmente de 4 % par an.

Le secteur du sport, sur lequel je vais concentrer mon intervention, compte 3,2 millions de bénévoles, ce qui représente environ 274 000 équivalents temps plein travaillé et un poids économique certain dans le domaine du sport, et par capillarité, dans l’ensemble de l’économie. La valorisation économique est estimée entre 5,22 milliards d’euros et 10,10 milliards d’euros.

Il convient donc d’adapter la formation des bénévoles et de valoriser le bénévolat, et ce malgré la menace qui pèse sur l’attractivité du bénévolat, compte tenu de la suppression des emplois aidés et de l’explosion de la charge de travail des bénévoles.

En effet, il n’est nul besoin de vous convaincre du rôle social extrêmement important que les clubs et les associations de proximité jouent dans nos quartiers et dans nos territoires, en particulier dans les plus délaissés d’entre eux. Ils constituent des lieux de sociabilité pour les jeunes comme pour leurs familles et participent à l’éducation de nos enfants au travers de la promotion des valeurs éducatives et citoyennes. Ils ont de plus une forte incidence en matière de santé publique.

Unis vers le sport est un exemple prégnant, sur un territoire que je connais particulièrement, de structure constituée dans le but de mettre en œuvre des programmes d’éducation et d’insertion par le sport dans les quartiers dits sensibles de Strasbourg et de sa région.

À cet égard, je salue les petites associations qui n’ont ni salarié ni structure administrative, et dont le modèle économique repose à 100 % sur le bénévolat. Elles mettent en œuvre des projets concrets, vecteurs de solidarité et de lien social dans nos communes et nos villages.

Je suis donc convaincu, et vous le comprendrez aisément, qu’il faut préserver cette possibilité, voire la développer davantage, tant elle est importante dans nos sociétés.

Par ailleurs, du fait de l’accueil des jeux Olympiques et Paralympiques et des grands événements sportifs préalables à 2024, le nombre et la qualité des bénévoles devraient s’accroître.

Les bénévoles constituent ainsi le tissu associatif de notre pays, principal garant du bon fonctionnement du modèle sportif français. La fin des contrats aidés, la suppression de la réserve parlementaire et la baisse drastique des dotations aux collectivités territoriales mettent en danger la pérennisation du modèle.

On le constate, les bénévoles méritent toute notre attention. Dès lors, il n’est pas possible de faire l’économie d’un véritable statut des bénévoles dans le sport. À cet égard, la charte du bénévolat adoptée dans le cadre de la préparation de l’Euro 2016 en France fut une première étape utile, mais, on le sait, elle n’a malheureusement pas suffi à éviter les abus.

L’adoption de mesures plus contraignantes devient ainsi nécessaire, comme l’a indiqué à plusieurs reprises Tony Estanguet, le président du Comité d’organisation des jeux Olympiques et Paralympiques, afin d’apporter toutes les garanties nécessaires aux nombreux bénévoles qui seront sollicités.

La réflexion doit donc se poursuivre. Je rappelle que le Sénat appelle de ses vœux un véritable statut du bénévole. Nous nous devons par conséquent de vous interroger, monsieur le secrétaire d’État, sur votre position sur ce sujet.

Le Fonds pour le développement de la vie associative, le FDVA, œuvre de façon importante, notamment dans la formation des bénévoles, mais qu’en sera-t-il demain ? Comment le Gouvernement envisage-t-il précisément cet aspect ? Comment faciliter l’éligibilité des bénévoles aux formations, lesquelles sanctionneraient un certain niveau d’engagement et de qualification ?

Comment comptez-vous lever les obstacles administratifs et réglementaires au développement du bénévolat dans le monde du sport ?

Enfin, que comptez-vous faire pour éventuellement engager une stratégie de pérennisation de l’emploi ?

Nous comptons sur votre volontarisme créatif sur cette problématique, que vous connaissez bien, monsieur le secrétaire d’État. (Applaudissements sur les travées du groupe Union Centriste et sur des travées du groupe Les Républicains. – Mme Maryvonne Blondin applaudit également.)

M. le président. La parole est à M. Jérôme Bignon.

M. Jérôme Bignon. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, à mon tour, je remercie le groupe Union Centriste de cette initiative bienvenue.

L’État n’a plus le monopole de l’intérêt général. « Les grandes vocations se poursuivent en dehors du lieu de travail » disait déjà Camus. Des millions d’hommes, de femmes, de jeunes s’engagent chaque jour pour agir en faveur du bien commun.

En pleine effervescence, le secteur de la vie associative se professionnalise. Des cours sur l’engagement, sur l’économie sociale et solidaire sont désormais dispensés dans les plus prestigieuses écoles et universités. Le moteur essentiel de la vie associative reste le bénévolat. L’engagement bénévole a sa grandeur ; c’est un acte solennel dont on mesure difficilement la valeur en terme monétaire, un signe de courage et de générosité, une forme de promesse à soi et aux autres.

« Être homme, c’est précisément être responsable. C’est connaître la honte en face d’une misère qui ne semblait pas dépendre de soi. […] C’est sentir, en posant sa pierre, que l’on contribue à bâtir le monde » disait Saint-Exupéry.

Il s’agit non pas de changer le monde, mais de redresser une injustice locale, d’améliorer le quotidien de quelques personnes, de trouver des solutions à un problème concret. Les voies de l’engagement sont multiples, les lieux et les raisons de s’engager le sont tout autant. Leur dénominateur commun, c’est le lien social qui se tisse entre des personnes unissant leur volonté autour d’une cause commune : bâtir une école au milieu du Burkina Faso, apporter des repas à des gens qui ont faim, lutter contre la prolifération des algues vertes sur les plages de Bretagne.

Souvent, ces initiatives naissent d’idées un peu folles mises en forme sur un coin de table, fruits de la rencontre fertile entre les rêveries d’un visionnaire et l’esprit pratique d’un bâtisseur.

Comment mesurer l’apport inestimable de ces initiatives bénévoles, éloignées de toute considération monétaire, lorsque l’on peine déjà à mesurer objectivement la valeur du travail de chacun ? Nous estimons que le bénévolat représente entre 1 % et 2 % du PIB, soit l’équivalent du budget de la défense. Les sapeurs-pompiers volontaires représentent la plus grande part des effectifs mobilisables. La grande majorité des élus locaux sont bénévoles. Qu’ils soient ici remerciés de leur engagement.

Le secteur associatif est en quelque sorte le continent immergé de l’économie marchande. Si sa valeur économique est considérable, sa véritable valeur ne se quantifie pas en masse monétaire. Au-delà des statistiques, la générosité, l’honneur, le courage d’entreprendre ne se mesurent pas en chiffres agglomérés comme des grains de sable. Faut-il introduire une logique comptable dans le bénévolat ?

Ma vie de bénévole m’ayant apporté tant de joies, je suis convaincu que la plus grande vertu du bénévolat est de rendre heureux. Le bénévolat est source d’engagements désintéressés et de moments privilégiés, de reconnaissance mutuelle, de liberté, d’expression de soi. Il est une réponse à l’individualisme ambiant, au narcissisme d’une société qui se noie dans son propre reflet, à la recherche de sens et de liens.

Pour les besoins d’une étude sur le bonheur de l’école de médecine de Harvard, publiée en 2015, des scientifiques ont observé le quotidien de 724 personnes pendant 75 ans. Ils en sont venus à la conclusion suivante : loin devant la richesse et le succès, le principal ingrédient du bonheur et de la santé serait la qualité des relations humaines. Aussi, n’en déplaise à Jean-Paul Sartre, pour qui l’enfer serait les autres, l’isolement est sans doute la plus terrible épreuve qu’un être humain puisse traverser.

En œuvrant à rapprocher les hommes, la vie associative participe à la restauration du lien social, lutte contre l’isolement et l’exclusion, et permet à chacun de trouver sa place au sein de la société. Ce rapprochement, au-delà des âges, des origines géographiques, culturelles et sociales, ce goût pour l’altérité, porte en lui-même les conditions de la vie en société. En ce sens, la vie associative, consacrée dans la société française depuis la loi de 1901, est le creuset de la démocratie.

Grâce à l’implication d’une multitude de personnes, des projets jugés utopiques lors de leur lancement ont progressivement pu prendre corps, devenir réalité et améliorer le quotidien de toute une population.

Beaucoup de ces engagements sont en outre source d’innovation. N’oublions jamais que quantité de pratiques nouvelles ont été diffusées au sein de la société grâce à des initiatives bénévoles, dont certaines ont donné lieu à des lois. Ainsi la création des Restos du Cœur et la distribution de repas aux plus démunis par leurs bénévoles ont-elles permis d’apporter une réponse concrète à un besoin criant. Aujourd’hui, la loi relative à la lutte contre le gaspillage alimentaire produit ses effets, et dans quelques mois, nous aurons l’occasion d’examiner le projet de loi pour lutter contre le gaspillage des produits invendus, annoncé par le Gouvernement.

La France ne peut se concevoir sans l’engagement de ces citoyens qui ne comptent ni leurs heures ni leur argent et qui mettent leur temps, leurs compétences et leur générosité au service de la solidarité nationale.

Mes chers collègues, le tissu associatif est une part essentielle du ciment de la République, un des derniers remparts contre l’isolement, le populisme et la montée des égoïsmes. Si l’État ne peut être partout, il doit prendre ses responsabilités pour valoriser l’action de ceux qui agissent là où il ne peut lui-même aller, sur le terrain, au plus près des besoins, notamment de nos concitoyens en situation de grande pauvreté, et des initiatives citoyennes. (Applaudissements sur les travées du groupe Union Centriste, du groupe du Rassemblement Démocratique et Social Européen et du groupe Les Indépendants – République et Territoires.)

M. le président. La parole est à M. Arnaud Bazin.

M. Arnaud Bazin. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, la France, cela a été dit, compte plus de 16 millions de bénévoles, œuvrant dans des associations ou diverses structures. Ils sont le maillon essentiel de nombreux services ou politiques publics.

Près de 30 % des bénévoles s’engagent dans le secteur social ou caritatif, apportant ainsi une aide précieuse aux plus vulnérables de nos concitoyens.

C’est précisément le cas dans le secteur de l’aide alimentaire, dont mon collègue Éric Bocquet et moi avons pu analyser l’organisation et le fonctionnement lors d’un travail de contrôle budgétaire, en tant que rapporteurs spéciaux de la mission « Solidarité, insertion et égalité des chances », au sein de la commission des finances.

Nous avons ainsi relevé dans notre rapport d’information que l’aide alimentaire en France repose essentiellement sur le modèle associatif fondé sur le bénévolat. Elle s’appuie en effet sur un tissu associatif extrêmement dense, qui est l’indispensable pilier de cette politique publique. Ce sont ainsi environ 9 000 structures ou associations habilitées qui contribuent à l’aide alimentaire sur l’ensemble du territoire, grâce à la distribution de colis, de chèques alimentaires, de repas chauds, dans des centres fixes ou lors de maraudes.

L’aide alimentaire repose ainsi, si l’on se fonde sur les quatre plus importantes associations nationales œuvrant dans le secteur – la Fédération française des banques alimentaires, les Restos du Cœur, le Secours populaire français et la Croix-Rouge française – sur plus de 200 000 bénévoles.

Le bénévolat constitue donc la clé de voûte du système d’aide alimentaire français. Si l’on valorise financièrement le travail effectué par les bénévoles, on atteint un montant de l’ordre de 500 millions d’euros, soit près du tiers du coût total de l’aide alimentaire en France.

Le taux de salariés dans les structures d’aide alimentaire étant très faible, voire quasi inexistant dans certaines associations, les bénévoles peuvent ainsi occuper tous les postes-clés inhérents à la gestion de l’aide alimentaire : l’approvisionnement, le tri, l’hygiène et la sécurité alimentaire, l’informatique, le mécénat, etc. Les effectifs des banques alimentaires, par exemple, sont constitués à 90 % de bénévoles.

L’aide alimentaire apparaît particulièrement efficiente, car peu coûteuse pour les finances publiques au regard du service rendu, notamment grâce au travail des bénévoles. L’effet de levier, qui désigne l’effet d’entraînement des ressources publiques, est ainsi très important, notamment grâce au bénévolat.

L’exemple de l’aide alimentaire illustre l’importance du bénévolat dans la mise en œuvre de nos politiques publiques en France. Cette ressource bénévole doit être préservée, l’engagement associatif encouragé. Pour cela, il convient aussi de mieux prendre en compte la spécificité de l’action bénévole dans la mise en œuvre de ces politiques.

Dans le secteur de l’aide alimentaire, nous recommandons de trouver un équilibre entre l’exigence administrative et le travail effectué sur le terrain par des bénévoles parfois sous-équipés, notamment en moyens informatiques. L’enjeu est de faire respecter par les associations les exigences nationales et européennes en termes de contrôles et de réglementation, tout en tenant compte des spécificités de l’action bénévole.

Il s’agit d’un équilibre essentiel qui doit être trouvé, garant de la mise en œuvre de politiques et de services publics souvent indispensables pour nos concitoyens les plus vulnérables. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et du groupe Union Centriste, ainsi que sur des travées du groupe socialiste et républicain.)

M. le président. La parole est à M. Jean-Jacques Lozach.

M. Jean-Jacques Lozach. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, les Français sont de plus en plus nombreux à vouloir agir pour les autres, à « faire société » ensemble et à partager des valeurs civiques, soit dans un cadre organisé, qu’il soit politique, syndical, municipal, religieux ou dans le secteur de l’économie sociale et solidaire, soit sur un mode plus informel, auprès d’une ou plusieurs personnes, en dehors du cadre familial. À cet égard, je pense à la solidarité de voisinage.

Riche de ce tissu associatif rassemblant entre 13 et 18 millions de bénévoles engagés, pour les deux tiers d’entre eux, dans les 1,3 million d’associations répertoriées, notre modèle français de l’engagement citoyen, qui participe pleinement à la construction de notre société, doit cependant faire face à de nombreuses difficultés.

Je pense à la baisse drastique des dotations de l’État aux associations, caractérisée par une chute de 10 % des crédits sur les deux derniers exercices budgétaires et par une diminution de la part des subventions dans le total des ressources des associations, d’environ 15 milliards d’euros en dix ans – cette part est passée de 34 % en 2005 à 24,7 % en 2011, et même à 16,8 % en 2014 selon l’Insee.

Je pense à la diminution des dotations aux collectivités territoriales ; à la réforme des rythmes scolaires, qui a souvent suscité des polémiques et des difficultés, en particulier dans les communes rurales. Ainsi, dans la Creuse, seule une commune applique désormais cette réforme.

Je pense à la suppression brutale et sans concertation de plus de 250 000 contrats aidés en l’espace de deux ans, lesquels contribuent pourtant à l’emploi associatif. Alors qu’on comptait 459 000 contrats aidés en 2016 pour 4,2 milliards d’euros de subventions, on n’en dénombrait plus que 200 000 en 2018 pour 1,4 milliard d’euros de subventions. Cette réduction a constitué un véritable frein pour de nombreuses associations, qui pratiquaient souvent une mutualisation de leurs moyens humains et financiers. Il en a résulté un nouveau transfert de tâches sur les bénévoles. Ainsi avons-nous assisté dans mon département à la disparition pure et simple de l’escrime, laquelle était enseignée par un cadre technique qui bénéficiait d’un contrat aidé.

Je pense à l’absence de véritable statut encadrant cette activité bénévole, fondée sur l’engagement volontaire et la gratuité, à la baisse structurelle du nombre de bénévoles par rapport à l’augmentation du nombre d’heures données chaque semaine, ou bien encore à la suppression de la réserve parlementaire, qui permettait aux associations de bénéficier d’environ 60 millions d’euros par an.

M. Jean-Jacques Lozach. Ces différentes mesures menacent directement l’existence de milliers d’associations, risquent de priver d’emplois un nombre important de salariés et d’empêcher les collectivités territoriales d’assurer la continuité du service public de proximité. Elles ont également un effet sur le moral et l’engagement des bénévoles, qui attendent et espèrent une reconnaissance accrue de la part des pouvoirs publics.

Si elle permet de sécuriser juridiquement l’action de nos dirigeants bénévoles, de sensibiliser nos jeunes collégiens et lycéens à la vie associative, et si elle constitue une première étape nécessaire, la proposition de loi en faveur de l’engagement associatif, adoptée mercredi dernier par notre assemblée, ne consolidera pas à elle seule un modèle fragilisé.

Le bénévolat demeure le premier point d’achoppement pour les associations et arrive en tête de leurs préoccupations, devant la situation financière. En effet, 40 % des responsables associatifs interrogés dans les enquêtes de Recherches et solidarités se disent inquiets des difficultés de renouvellement des dirigeants. Cette crise de responsabilités trouve en partie son explication dans la judiciarisation accrue de l’acte bénévole, la responsabilité pénale, fiscale et sociale des dirigeants étant susceptible d’être engagée.

Rappelons, par ailleurs, que 42 % des 1,3 million associations répertoriées ont pour activité principale le sport ou la culture, soit 545 000 d’entre elles. Parmi celles-ci, seuls 12 % sont des associations employeuses : 36 000 dans le domaine du sport et 34 000 dans le secteur culturel. Le modèle le plus efficient me semble être celui qui combine professionnalisme et bénévolat.

Une récente étude d’août 2018 du Centre de droit et d’économie du sport valorise, par la méthode dite « du coût de remplacement », le poids économique du bénévolat sportif entre 5,2 milliards d’euros, pour une valorisation au SMIC, et 10,1 milliards d’euros, pour une valorisation au salaire moyen de la branche. Sur les mêmes bases, le bénévolat peut être valorisé entre 3,6 milliards d’euros et 8,22 milliards d’euros dans le secteur culturel.

Alors que la vie associative se professionnalise, des individus aux parcours et aux compétences différents se côtoient dans l’encadrement des associations sportives. L’équilibre entre ces individus est un garant de la pérennité d’un club et de son développement. Le mouvement sportif ne saurait exister sans toutes ces petites mains qui s’activent aux côtés des professionnels. Je pense par exemple aux conseillers techniques sportifs.

Face à une montée des exigences en matière de compétences et de performance qui rapprochent l’association sportive, dans sa gestion, d’une entreprise, le public et les licenciés poussent les clubs et leurs bénévoles à s’adapter, à se former, afin de gagner en efficacité et en technicité dans la finance, la gestion humaine, la planification ou l’organisation des déplacements. Il est de notre responsabilité d’encourager et de faciliter leur engagement.

Enfin, je formule le souhait que le futur service national universel, dont l’un des objectifs est l’intégration républicaine, suscite des vocations d’implication bénévole. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain.)

M. le président. La parole est à M. Olivier Cigolotti. (Applaudissements sur les travées du groupe Union Centriste.)

M. Olivier Cigolotti. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, le bénévolat est avant tout un don de soi, libre, consenti et gratuit. Il tient une place aussi spécifique qu’essentielle dans la société civile. C’est notamment la grande souplesse du statut de bénévole qui en fait sa valeur et son succès.

Son spectre est beaucoup plus large que ce que l’on peut imaginer spontanément. Les missions sont diverses et variées : elles vont de l’accompagnement éducatif ou sportif et de l’écoute aux travaux manuels, à la visite en établissements, à la gestion administrative, en passant par l’expertise juridique ou l’ingénierie… Chacun peut trouver la mission qui lui correspond.

Le bénévolat et les associations tiennent une place importante dans le monde rural. Je dirais même qu’ils sont une des clés de voûte du fonctionnement des communes, notamment des plus petites d’entre elles. Dans un contexte de baisses des dotations aux collectivités locales, les communes rurales ont bien souvent du mal à boucler leur budget. Au lieu d’augmenter la fiscalité ou de rogner toujours davantage sur les dépenses de fonctionnement, elles s’appuient sur le bénévolat, qui constitue une aide précieuse, une sorte de troisième voie qui leur est indispensable aujourd’hui.

Je pense d’abord aux citoyens qui mettent la main à la pâte bénévolement pour réaliser des travaux de bâtiment, de décoration ou d’organisation d’événements communaux, mais également aux maires, aux adjoints ou aux conseillers municipaux qui perçoivent des indemnités modestes, lesquelles n’atteignent pas, le plus souvent, le maximum légal, par choix personnel. Compte tenu du temps qu’ils consacrent à leurs diverses activités et du fait que leurs indemnités ne sont pas à la hauteur de leur investissement, ces élus peuvent être d’autant plus considérés comme des bénévoles.

Ces personnes se rendent disponibles, s’engagent et mettent à disposition des citoyens leurs compétences techniques ou professionnelles, et sont bien souvent multitâches. C’est un réel gage de réactivité et la garantie d’un service à la population. Il n’est pas rare d’ailleurs de voir des élus avoir quotidiennement plusieurs casquettes : ingénieur des travaux, juriste, assistant social et même psychologue !

À cette occasion, je salue le travail de la délégation sénatoriale aux collectivités territoriales et à la décentralisation visant à faciliter l’exercice des mandats locaux. Les propositions qu’elle a formulées ont en effet pour but de préserver le bénévolat républicain tout en renforçant le statut de l’élu.

Les attentes des élus locaux sont fortes. Il y a aujourd’hui un véritable souhait de faire évoluer les conditions d’exercice des mandats, les responsabilités et les compétences des collectivités locales s’étant considérablement accrues et complexifiées.

Il convient de rappeler également que le phénomène de regroupement dans des intercommunalités de taille XXL a donné un sentiment de perte d’autonomie aux communes. Nous faisons face à une démobilisation des élus, dont l’engagement reposait avant tout sur la proximité et l’entité communale.

Même si le bénévolat des élus locaux et des citoyens continue d’exister, il a reculé considérablement, ce qui représente un coût qu’il conviendrait d’analyser à l’échelle de chaque fusion ou regroupement.

Enfin, entre bénévolat et salariat, j’évoquerai brièvement l’engagement volontaire des sapeurs-pompiers, qui constitue le socle du modèle français de secours et de gestion des crises.

Une directive européenne portant sur le temps de travail menace actuellement notre modèle de sécurité civile.

M. Roland Courteau. C’est vrai !

M. Olivier Cigolotti. Sa transposition en droit français remettrait en cause le volontariat comme engagement altruiste et généreux.

M. Olivier Cigolotti. Le Sénat tout entier s’est mobilisé en faisant parvenir une motion au président de la Commission européenne le 26 septembre dernier.

Monsieur le secrétaire d’État, nous attendons du Gouvernement une action forte sur la question du volontariat. Bénévolat et volontariat tiennent une place centrale face aux enjeux majeurs de notre pays. Ils permettent le maintien indispensable de la proximité, mais aussi le développement d’une société de l’engagement, inclusive et plus fraternelle. (Applaudissements sur les travées du groupe Union Centriste, du groupe Les Républicains et du groupe du Rassemblement Démocratique et Social Européen, ainsi que sur des travées du groupe socialiste et républicain.)

M. le président. La parole est à M. Jean-Raymond Hugonet.

M. Jean-Raymond Hugonet. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, l’engagement du monde associatif est au cœur de l’exigence de cohésion sociale, à laquelle le groupe Les Républicains est particulièrement attaché. Je tiens par conséquent à saluer l’initiative du groupe Union Centriste et de son président, Hervé Marseille, qui est à l’origine de ce débat.

Le bénévolat est un don de soi librement consenti et gratuit. Normalement, il occupe une place spécifique dans la société civile, complémentaire du travail, et non concurrentielle, mais aujourd’hui, plus que le bénévolat, c’est la vie associative dans son ensemble qui est en crise, parce qu’elle est devenue une contrainte et parce que les bénévoles ne veulent plus s’engager autant. Cette contrainte et ces responsabilités grandissantes font qu’il est plus difficile de trouver des dirigeants.

Parallèlement, les responsabilités administratives et financières constituent un frein à l’engagement, d’autant plus que les dotations de l’État sont en constante diminution.

Si le projet fondateur des associations n’est plus reconnu en tant que tel, à savoir la libre organisation de citoyens réunis pour proposer une action au service de tout ou partie de la collectivité, les associations sont financées non plus pour ce qu’elles sont ou font, mais pour la mise en œuvre de politiques publiques. Seule leur capacité technique est alors reconnue, au détriment de leur capacité politique, au sens noble du terme, bien entendu.

Elles sont donc contraintes, je le répète, à des spécialisations techniques et sectorielles, au montage de dossiers multiples et complexes, dont on raffole dans ce pays, là où elles étaient autrefois en contact direct avec la population.

Dans ce contexte, les bénévoles, en cogérant l’association, se retrouvent en situation professionnelle non salariée, ce qui contribue à la fois à l’essoufflement du bénévolat et à la baisse du coût du travail sur le marché de l’emploi associatif, voire à sa disparition. Je pense aux emplois aidés.

On constate ainsi sur les territoires une mise en concurrence des associations entre elles, la conséquence principale étant qu’elles adoptent peu à peu l’attitude d’entreprises marchandes. Dès lors, il n’est nullement étonnant que les bénévoles disparaissent puisqu’ils ont vocation non pas à gérer, mais à animer la vie locale.

Retrouver un véritable militantisme bénévole, fondé sur l’imagination et la créativité des personnes, tel est à mon sens le véritable enjeu. Cela suppose que soient financés les projets imaginés par les associations, non ceux qui sont pensés par les pouvoirs publics.

Si le bénévole devient un professionnel non salarié auquel on demande une grande technicité, il est compréhensible qu’il aspire à des formes de reconnaissance : la prise en compte de son activité bénévole par les agences de Pôle emploi, la reconnaissance universitaire, des points de retraite, et j’en passe. D’où cette question extrêmement paradoxale, mes chers collègues, et de plus en plus souvent entendue : quelle contrepartie à l’engagement bénévole ? Nous y voilà, la boucle est bouclée !

Pour ma part, je pense très sincèrement que, en l’absence d’une réelle fonction politique citoyenne reconnue aux associations, sur des critères définis par l’État, les mesures techniques visant à enrayer l’hémorragie des responsables associatifs sont parfaitement illusoires. En effet, on ne devient pas bénévole pour gérer des politiques sectorielles à la place des pouvoirs publics ! (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains, du groupe Union Centriste, du groupe du Rassemblement Démocratique et Social Européen et du groupe socialiste et républicain.)