compte rendu intégral

Présidence de M. Vincent Delahaye

vice-président

Secrétaires :

M. Joël Guerriau,

M. Dominique de Legge.

M. le président. La séance est ouverte.

(La séance est ouverte à quinze heures.)

1

Procès-verbal

M. le président. Le compte rendu analytique de la précédente séance a été distribué.

Il n’y a pas d’observation ?…

Le procès-verbal est adopté sous les réserves d’usage.

2

Candidatures à d’éventuelles commissions mixtes paritaires

M. le président. J’informe le Sénat que des candidatures pour siéger au sein des éventuelles commissions mixtes paritaires chargées d’élaborer un texte sur les dispositions restant en discussion sur le projet de loi relatif à l’énergie et au climat et sur le projet de loi relatif à la création de l’Agence nationale du sport et à diverses dispositions relatives à l’organisation des jeux Olympiques et Paralympiques de 2024 ont été publiées.

Ces candidatures seront ratifiées si la présidence n’a pas reçu d’opposition dans le délai d’une heure prévu par notre règlement.

3

Rappels au règlement

M. le président. La parole est à M. Pascal Savoldelli, pour un rappel au règlement.

M. Pascal Savoldelli. Madame la ministre, vous venez d’être nommée au ministère de l’écologie. Cette promotion et les nouvelles responsabilités qui l’accompagnent vous offrent désormais de nouvelles compétences pour passer des intentions aux actes.

Vous avez récemment promis que la ligne de fret Perpignan-Rungis serait maintenue. Toutefois, au lieu de trouver une solution pérenne pour favoriser le transport de marchandises par le rail, on fait circuler le train des primeurs à vide ! C’est ahurissant ! On conviendra qu’en plus d’être économiquement absurde, cette situation est écologiquement irresponsable.

Votre champ de compétence vient de s’élargir considérablement, madame la ministre. Vous allez pouvoir mettre en œuvre une solution un peu plus sérieuse pour maintenir cette ligne et cesser de faire circuler un train fantôme.

Avec les moyens rehaussés qui sont désormais les vôtres, quelle solution viable et concrète envisagez-vous de mettre en œuvre pour conserver la ligne de fret Perpignan-Rungis et ne pas laisser 400 000 tonnes de fruits et légumes être acheminées par 80 000 camions annuellement, soit 250 par jour ?

Plus généralement, quel plan de développement du fret ferroviaire envisagez-vous de mettre en place afin de réduire la part du transport routier et de pouvoir ainsi atteindre les objectifs environnementaux que le Gouvernement proclame à grand renfort de communication ? (Applaudissements sur les travées du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.)

M. le président. Acte vous est donné de votre rappel au règlement, mon cher collègue, qui s’apparente plutôt à une question au Gouvernement…

La parole est à Mme la présidente de la commission des affaires économiques, pour un rappel au règlement.

Mme Sophie Primas, présidente de la commission des affaires économiques. Madame la ministre, je vous souhaite la bienvenue dans cet hémicycle. Vous venez y défendre un projet de loi enfanté par Nicolas Hulot, présenté en conseil des ministres par François de Rugy, défendu hier soir par Emmanuelle Wargon, et qui sera probablement accouché par vous-même.

Vous comprendrez que le Sénat trouve ces conditions de travail particulièrement difficiles. Je n’ai évidemment aucun reproche à vous faire à titre personnel, pas plus que je n’avais à en adresser hier soir à Emmanuelle Wargon, mais j’estime que la détermination de la stratégie de notre pays en matière énergique pour les cinquante ans à venir mérite mieux que ce cafouillis, que cet examen en pointillé. Elle mérite plus d’attention et d’ouverture.

Madame la ministre, nous avons été de bonne composition. Nous avons accepté tout ce que le Gouvernement nous a fait subir : les délais d’examen trop courts, les changements de ministre et, tout à l’heure encore, le report de cette séance pour que votre cérémonie de passation de pouvoirs puisse se dérouler dans de bonnes conditions. Nous accepterons un certain nombre d’amendements déposés par le Gouvernement parce qu’ils vont dans le bon sens pour la politique énergétique de la France. Cependant, il faut que le Gouvernement se montre attentif au Parlement, car ce que nous vivons depuis quelques semaines témoigne d’un mépris du Parlement…

M. Roland Courteau. Du Sénat !

Mme Sophie Primas, présidente de la commission des affaires économiques. … et, de façon générale, de l’action parlementaire.

Ces propos ne vous concernent pas à titre personnel, mais nous ne voudrions pas revivre, lorsque nous traitons d’un sujet aussi important que la politique énergétique de la France, ce que nous avons vécu à l’occasion de l’examen d’autres textes.

Je voulais simplement, madame la ministre, vous exprimer notre lassitude. Cela n’a évidemment rien de personnel, je le redis, et nous continuerons à nous montrer constructifs, parce qu’il y va de l’intérêt supérieur de notre pays. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains, du groupe Union Centriste, du groupe du Rassemblement Démocratique et Social Européen et du groupe socialiste et républicain.)

M. le président. Acte vous est donné de votre rappel au règlement, ma chère collègue.

La parole est à Mme la ministre.

Mme Élisabeth Borne, ministre de la transition écologique et solidaire. Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, je voudrais tout d’abord vous remercier de la compréhension dont vous avez fait preuve en acceptant de décaler le début de cette séance.

Je voudrais vous dire à quel point je mesure l’honneur que m’ont fait le Président de la République et le Premier ministre en me nommant ministre de la transition écologique et solidaire. Préparer cette transition est la priorité du quinquennat. Je mesure l’ampleur des défis que nous aurons à relever et je ne doute pas que nous pourrons y travailler ensemble.

Ma feuille de route est de poursuivre et d’accélérer les transformations en cours. Nous avons eu, il y a quelque temps, des débats, que j’ai trouvés passionnants, sur le projet de loi d’orientation des mobilités, qui constitue l’une des briques de notre transition écologique et solidaire. À la rentrée, vous examinerez le projet de loi relatif à l’économie circulaire.

Aujourd’hui, nous débattons du projet de loi relatif à l’énergie et au climat, un texte essentiel pour atteindre l’objectif de neutralité carbone en 2050. J’apporterai dans ce débat ma sensibilité, construite au fil de mon parcours, qui n’est pas celui de mes prédécesseurs. Je l’ai forgée d’abord sur le terrain, en tant que préfète d’une région rurale où la rénovation thermique des logements, la méthanisation et le développement des énergies renouvelables n’étaient pas de simples dossiers, mais bien des réalités.

Prenant la relève de François de Rugy, je voudrais rendre hommage à son engagement et à son implication sur les sujets écologiques. Ce projet de loi illustre la philosophie dans laquelle je m’inscris moi aussi : se donner les moyens de tenir les objectifs que l’on s’est fixés plutôt que toujours les rehausser et les reporter, et accompagner les Français, les entreprises et les territoires dans la transition écologique, qui représente un défi pour nous tous.

Ce texte, qui au départ comportait seulement quelques articles, a été considérablement enrichi au cours des débats ; il en compte maintenant plus de cinquante. Je sais que votre commission l’a complété dans une logique constructive. Le Gouvernement sera amené à déposer quelques amendements, sur des sujets essentiellement techniques. Je forme le vœu que nous puissions poursuivre ce travail très constructif, en évitant de nouveaux retards, dans la perspective d’une commission mixte paritaire que j’espère conclusive.

4

Article 1er (interruption de la discussion)
Dossier législatif : projet de loi relatif à l'énergie et au climat
Article 1er

Énergie et climat

Suite de la discussion en procédure accélérée d’un projet de loi dans le texte de la commission

M. le président. L’ordre du jour appelle la suite de la discussion du projet de loi, adopté par l’Assemblée nationale après engagement de la procédure accélérée, relatif à l’énergie et au climat (projet n° 622, texte de la commission n° 658, rapport n° 657, avis n° 646).

Dans la discussion du texte de la commission, nous poursuivons, au sein du chapitre Ier, l’examen de l’article 1er.

Chapitre Ier (suite)

Objectifs de la politique énergétique

Discussion générale
Dossier législatif : projet de loi relatif à l'énergie et au climat
Article additionnel après l'article 1er - Amendement n° 158

Article 1er (suite)

I A (nouveau). – L’article L. 100-2 du code de l’énergie est ainsi modifié :

1° Le 3° est ainsi modifié :

a) Le mot : « et » est remplacé par le signe : « , » ;

b) Sont ajoutés les mots : « et encourager la production simultanée de chaleur et d’électricité » ;

2° Le 7° est ainsi rédigé :

« 7° Impulser une politique de recherche et d’innovation qui favorise l’adaptation des secteurs d’activité à la transition énergétique ; »

3° Après le 9°, il est inséré un 10° ainsi rédigé :

« 10° Valoriser la biomasse à des fins énergétiques, en conciliant la production d’énergie avec l’agriculture et la sylviculture. »

I. – Le I de l’article L. 100-4 du code de l’énergie est ainsi modifié :

1° A Le début du premier alinéa est ainsi rédigé : « I. – Pour répondre à l’urgence écologique et climatique, la politique… (le reste sans changement). » ;

1° Le 1° est ainsi modifié :

a) À la première phrase, les mots : « de diviser par quatre les émissions de gaz à effet de serre » sont remplacés par les mots : « d’atteindre la neutralité carbone à l’horizon 2050 en divisant les émissions de gaz à effet de serre par un facteur supérieur à six » ;

b) Sont ajoutées deux phrases ainsi rédigées : « Pour l’application du présent alinéa, la neutralité carbone est entendue comme un équilibre, sur le territoire national, entre les émissions anthropiques par les sources et les absorptions anthropiques par les puits de gaz à effet de serre, tel que mentionné à l’article 4 de l’accord de Paris ratifié le 15 juin 2016. La comptabilisation de ces émissions et absorptions est réalisée selon les mêmes modalités que celles applicables aux inventaires nationaux de gaz à effet de serre notifiés à la Commission européenne et dans le cadre de la convention-cadre des Nations unies sur les changements climatiques, sans tenir compte des crédits internationaux de compensation carbone ; »

1° bis À la première phrase du 2°, les mots : « un objectif intermédiaire » sont remplacés par les mots : « les objectifs intermédiaires d’environ 7 % en 2023 et » ;

2° Le 3° est ainsi modifié :

a) Le taux : « 30 % » est remplacé par le taux : « 40 % » ;

b) Est ajoutée une phrase ainsi rédigée : « Dans cette perspective, il est mis fin en priorité à l’usage des énergies fossiles les plus émettrices de gaz à effet de serre. » ;

2° bis Le 4° est ainsi modifié :

a) Le taux : « 32 % » est remplacé par les mots : « 33 % au moins » et après le mot : « représenter », sont insérés les mots : « au moins » ;

b) Sont ajoutés les mots : « en visant un objectif intermédiaire de 8 % en 2028 dans ce dernier cas » ;

2° ter (nouveau) Après le même 4°, sont insérés des 4° bis et 4° ter ainsi rédigés :

« 4° bis D’encourager la production d’énergie hydraulique, avec pour objectif l’atteinte de capacités installées de production d’au moins 27 gigawatts en 2028 ;

« 4° ter De favoriser la production d’électricité issue d’installations utilisant l’énergie mécanique du vent implantées en mer, avec pour objectif l’augmentation des capacités installées de production d’au moins 1 gigawatt par an d’ici 2024 ; »

3° À la fin du 5°, l’année : « 2025 » est remplacée par l’année : « 2035 » ;

4° (Supprimé)

5° Il est ajouté un 10° ainsi rédigé :

« 10° De développer l’hydrogène bas-carbone et renouvelable avec la perspective d’atteindre environ 20 à 40 % de la consommation totale d’hydrogène industriel à l’horizon 2030. »

II. – L’article L. 141-2 du code de l’énergie est ainsi modifié :

a) Le 2° est complété par une phrase ainsi rédigée : « Il identifie les usages pour lesquels l’amélioration de l’efficacité énergétique et la baisse de la consommation d’énergie primaire sont une priorité ; »

b) Sont ajoutés trois alinéas ainsi rédigés :

« La programmation pluriannuelle de l’énergie comprend en annexe une feuille de route de la rénovation énergétique des bâtiments, précisant les modalités de mise en œuvre de l’objectif de réduction de la consommation énergétique finale mentionné au 2° du I de l’article L. 100-4 pour les bâtiments à usage résidentiel ou tertiaire et de l’objectif de rénovation des bâtiments en fonction des normes “bâtiment basse consommation” ou assimilées mentionné au 7° du même I.

« Elle comprend en annexe une feuille de route relative aux opérations de démantèlement des installations nucléaires engagées dans le cadre de la mise en œuvre de l’objectif de réduction de la part du nucléaire dans la production d’électricité mentionné au 5° du I de l’article L. 100-4.

« Elle comprend en annexe une stratégie pour le développement des projets de production d’énergie renouvelable dont tout ou partie du capital est détenu par les citoyens, les collectivités territoriales et leurs groupements. Cette stratégie évalue le potentiel de développement de ces projets et des obstacles juridiques et financiers auxquels ils sont confrontés. Elle définit des objectifs de développement qui assurent le financement des réseaux et préservent la solidarité entre les territoires. »

III. – Le II du présent article est applicable aux programmations pluriannuelles de l’énergie mentionnées à l’article L. 141-1 du code de l’énergie publiées après le 31 décembre 2022.

M. le président. Je suis saisi de quatre amendements faisant l’objet d’une discussion commune.

L’amendement n° 469, présenté par M. Gremillet, au nom de la commission des affaires économiques, est ainsi libellé :

Alinéa 27

Rédiger ainsi cet alinéa :

« 10° De développer l’hydrogène bas-carbone et renouvelable et ses usages industriel, énergétique et pour la mobilité, avec la perspective d’atteindre environ 20 % à 40 % des consommations totales d’hydrogène et d’hydrogène industriel à l’horizon 2030

La parole est à M. le rapporteur.

M. Daniel Gremillet, rapporteur de la commission des affaires économiques. Nous proposons une nouvelle rédaction de l’objectif relatif au développement de l’hydrogène bas-carbone et renouvelable. Il s’agit de viser ses différents usages et de décliner cet objectif, par rapport à la fois aux consommations totales d’hydrogène, tous secteurs confondus, et aux consommations d’hydrogène industriel.

C’est un sujet sur lequel l’ensemble des sénatrices et des sénateurs, quelle que soit leur sensibilité, sont très mobilisés.

M. le président. L’amendement n° 59 rectifié, présenté par Mmes Noël, Duranton, Garriaud-Maylam et Troendlé, M. Lefèvre, Mme Deromedi, MM. Poniatowski, Laménie, D. Laurent, Revet, B. Fournier et A. Bertrand et Mme Morhet-Richaud, est ainsi libellé :

Alinéa 27

Rédiger ainsi cet alinéa :

« 10° De porter la part de l’hydrogène bas carbone et de l’hydrogène renouvelable à 30 % de la consommation totale d’hydrogène à l’horizon 2030. »

La parole est à Mme Sylviane Noël.

Mme Sylviane Noël. Le plan hydrogène de 2018 ambitionne de faire de l’hydrogène un véritable vecteur énergétique, au-delà de son usage actuel, uniquement industriel. Ce plan prévoit l’injection d’hydrogène dans les réseaux comme levier de flexibilité et de stockage, facilitant l’intégration des énergies renouvelables électriques intermittentes dans le mix énergétique.

Le présent amendement vise donc à inscrire dans le code de l’énergie un objectif de développement du recours à l’hydrogène bas-carbone et renouvelable, pour les usages non seulement industriels, mais également énergétiques, à l’horizon 2030.

L’ambition de porter à 30 % la part de l’hydrogène bas-carbone et renouvelable est mesurée au regard de l’objectif de lui faire assurer de 20 % à 40 % de la consommation industrielle en 2028 et des perspectives de développement de l’utilisation de l’hydrogène bas-carbone dans les autres secteurs, en particulier les transports. Cet objectif reste d’ailleurs inférieur aux projections réalisées dans le cadre du plan de déploiement de l’hydrogène pour la transition énergétique, qui prévoit la production d’environ 450 000 tonnes d’hydrogène bas-carbone et renouvelable à l’horizon 2028.

M. le président. L’amendement n° 23 rectifié, présenté par MM. Cazabonne, Bonnecarrère et Prince, Mme Vermeillet et MM. Laugier, Canevet, Henno, Kern, Vanlerenberghe, Le Nay, Delahaye et Longeot, est ainsi libellé :

Alinéa 27

Compléter cet alinéa par les mots :

, notamment par le biais des mobilités

La parole est à M. Alain Cazabonne.

M. Alain Cazabonne. Cet amendement vise à favoriser le développement des mobilités décarbonées dans le futur.

Je constate que la plupart des grandes entreprises –Engie, EDF, Alstom, bien d’autres encore – sont prêtes à prendre un risque industriel, notamment pour développer des sites de fabrication de l’hydrogène destiné aux mobilités ou de moteurs à hydrogène.

Je crois important de bien marquer l’intérêt qu’il y a, pour l’avenir, à développer l’utilisation de cette source d’énergie pour toutes les mobilités : bus, trains, scooters, et bientôt sans doute bateaux, ce qui résoudra le problème du bruit et de la pollution. L’enjeu industriel est important, et les entreprises attendent de nous un geste fort, montrant une ambition pour ce secteur.

M. le président. L’amendement n° 212, présenté par M. Courteau, Mmes Préville et Artigalas, MM. M. Bourquin, Daunis et Duran, Mme Guillemot, MM. Iacovelli, Montaugé et Tissot, Mme Conconne, MM. Bérit-Débat et Joël Bigot, Mme Bonnefoy, M. Dagbert, Mme M. Filleul, MM. Houllegatte, Jacquin et Madrelle, Mme Tocqueville, M. Kanner et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :

Après l’alinéa 27

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

« …° De porter la part de l’hydrogène bas carbone et de l’hydrogène renouvelable à 30 % de la consommation totale d’hydrogène à horizon 2030. »

La parole est à M. Roland Courteau.

M. Roland Courteau. Cet amendement est presque identique à l’amendement n° 59 rectifié.

L’hydrogène est une énergie d’avenir, qui permettra d’aller plus vite vers la décarbonation. C’est à la fois un vecteur énergétique et un moyen de stockage. Les enjeux sont multiples : climatiques, techniques, socioéconomiques et sanitaires. La France et l’Europe disposent d’atouts certains.

Dès lors, porter la part de l’hydrogène bas-carbone et renouvelable à 30 % de la consommation totale d’hydrogène à l’horizon 2030 nous paraît particulièrement nécessaire.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Daniel Gremillet, rapporteur. Les amendements nos 59 rectifié et 212 visent à consacrer l’objectif de porter à 30 % la part de l’hydrogène renouvelable et bas-carbone dans la consommation totale d’hydrogène à l’horizon 2030. Leurs auteurs cherchent à très juste titre à soutenir une filière d’avenir. Pour autant, j’avais fait part, en commission, de mes doutes quant au chiffrage proposé, qui ne figurait ni dans le plan de déploiement de l’hydrogène de 2018 ni dans le projet de PPE.

Étant en mesure de proposer un chiffrage susceptible de convenir à tous, je propose d’adopter plutôt l’amendement n° 469 de la commission, qui vise à porter entre 20 % et 40 % la part d’hydrogène renouvelable et bas-carbone dans la consommation totale d’hydrogène à l’horizon 2030. En outre, cet amendement ne supprime pas l’objectif relatif à l’hydrogène industriel, qui garde toute sa pertinence.

L’amendement n° 23, quant à lui, vise à favoriser l’utilisation de l’hydrogène dans les transports. Sa finalité est compréhensible, puisque le recours à l’hydrogène dans le domaine des mobilités constitue l’un des axes du plan de déploiement de l’hydrogène et figure parmi les objectifs du projet de PPE.

Pour autant, il est dommage de ne viser que la mobilité, ces plans encourageant également l’utilisation de l’hydrogène à des fins industrielles et énergétiques. Je propose pour ma part, au travers de l’amendement de la commission, de viser ces deux derniers usages, en plus de la mobilité.

Vos amendements, mes chers collègues, seront donc satisfaits par celui de la commission. C’est pourquoi je vous demande de bien vouloir les retirer ; sinon, l’avis de la commission sera défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Élisabeth Borne, ministre de la transition écologique et solidaire. Concernant l’amendement n° 469, je souhaite redire que l’objectif de 20 % à 40 % qui figure dans le plan de déploiement de l’hydrogène de 2018 concerne bien l’hydrogène industriel.

Pour autant, je suis évidemment très attachée à ce que l’on se fixe des objectifs ambitieux pour le développement de l’utilisation de l’hydrogène pour la mobilité. Il ne faut pas se contenter de regarder circuler des trains à hydrogène chez nos voisins, mais plutôt agir, comme nous sommes en train de le faire, pour que des trains à hydrogène circulent également sur notre réseau d’ici à la fin du quinquennat.

J’émets donc un avis favorable sur l’amendement n° 469, et je demande le retrait des autres amendements faisant l’objet de la discussion commune. Ces amendements visent eux aussi à affirmer l’objectif de développement de l’utilisation de l’hydrogène pour la mobilité, mais ils tendent à trop préciser les choses, alors que l’on ne connaît pas encore exactement aujourd’hui le potentiel de la filière. Il est prudent, selon moi, de s’en tenir à la fourchette de 20 % à 40 % qui figure dans le texte actuel, tout en adoptant la rédaction proposée par M. le rapporteur, qui permet de bien prendre en compte l’ensemble des usages de l’hydrogène.

M. le président. Madame Noël, l’amendement n° 59 rectifié est-il maintenu ?

Mme Sylviane Noël. Non, je le retire, monsieur le président.

M. le président. L’amendement n° 59 rectifié est retiré.

Monsieur Cazabonne, l’amendement n° 23 rectifié est-il maintenu ?

M. Alain Cazabonne. Non, je le retire, monsieur le président.

M. le président. L’amendement n° 23 rectifié est retiré.

Monsieur Courteau, l’amendement n° 212 est-il maintenu ?

M. Roland Courteau. Non, je le retire, monsieur le président.

M. le président. L’amendement n° 212 est retiré.

La parole est à M. Fabien Gay, pour explication de vote sur l’amendement n° 469.

M. Fabien Gay. Nous voterons cet amendement.

Madame la ministre, nous avons posé hier de nombreuses questions à Mme Wargon, mais nous n’avons obtenu aucune réponse. Je me permets donc d’insister.

Il s’agit ici d’une filière industrielle. Il faudra bien construire les tramways ou les trains qui fonctionneront à l’hydrogène. Nous partageons l’ambition affirmée au travers de l’article 1er d’atteindre la neutralité carbone en 2050, mais où sont les filières industrielles ? Vous nous dites que l’on n’en connaît pas encore tout à fait le potentiel, mais il faut tout de même travailler sur ces questions. Il y va de l’avenir de la France, de notre indépendance dans un certain nombre de domaines.

Il en va de même concernant l’éolien offshore : où sont les filières industrielles ? Seront-elles développées à Saint-Nazaire ou dépendrons-nous, là encore, des étrangers ? Concernant la méthanisation, où sont les filières industrielles ? Là non plus, nous n’avons pas de réponse. Concernant l’hydrogène, où sont les filières industrielles ? Où seront construits les tramways et les trains à hydrogène ? Chez Alstom ?

Nous partageons l’ambition affichée, mais il faudra bien apporter des réponses à ces questions et trouver les moyens nécessaires. Je sais bien que vous n’êtes entrée en fonction qu’aujourd’hui et qu’il vous est difficile de nous répondre, mais je me permets néanmoins de vous reposer ces questions, pour que nous puissions avancer.

M. le président. La parole est à M. Alain Cazabonne, pour explication de vote.

M. Alain Cazabonne. Je voterai naturellement l’amendement de la commission, mais je veux insister sur le fait que les industriels sont prêts à se lancer dans la fabrication de moteurs à hydrogène, sur des sites comme ceux de Belfort et de Blanquefort.

Il est donc important de faire un geste fort et de mettre en œuvre un vrai projet industriel, sans se borner à afficher des objectifs. La Chine va mobiliser 10 milliards d’euros, dans les années qui viennent, pour fabriquer d’ici à 2030 de 1 à 2 millions de véhicules à hydrogène. Il ne faudrait pas que l’Europe soit en retard dans ce domaine prometteur !

M. le président. La parole est à M. Marc Daunis, pour explication de vote.

M. Marc Daunis. Madame la ministre, au début des années quatre-vingt-dix, la France possédait une avance considérable en matière de recherche dans l’énergie solaire, mais cette avance s’est étiolée au fil du temps, faute d’une implication suffisante des industriels.

Je rejoins notre collègue Fabien Gay : il est important que l’ambition affirmée, qui est partagée à mon sens sur toutes nos travées, trouve une traduction concrète sur le plan industriel. Il y a là une occasion que nous ne devons pas manquer. Or, dans ce domaine où la recherche française et européenne est particulièrement performante, nous sommes en train de perdre du terrain, faute d’une politique industrielle à la hauteur. Cette perte de terrain est toutefois parfaitement rattrapable, car nous disposons de forts atouts en matière de recherche et d’un appareil industriel qui peut être adapté relativement facilement.

Eu égard à l’importance de l’enjeu, notre groupe votera bien évidemment l’amendement de la commission. La question du plan de développement industriel à mettre en œuvre pour consolider ce secteur essentiel pour l’avenir et pour le climat reste néanmoins pendante.