M. Jean-Marie Mizzon. Je salue également la suppression de la révision automatique tous les six ans des schémas départementaux de coopération intercommunale. Le Président de la République l’a rappelé, les intercommunalités ne sont jamais que des constructions au service de la population. Elles doivent permettre aux communes de mieux répondre aux défis auxquels elles sont confrontées.

La révision sexennale favorisait une logique de massification, notamment là où les préfets de département faisaient du zèle. Et il y en a eu !

Désormais, la carte intercommunale bénéficiera d’une certaine stabilité, ce qui donnera davantage de lisibilité aux EPCI et leur permettra de porter des projets à long terme.

Enfin, ce projet de loi traite également du pouvoir de police des maires. Il propose d’ajouter à l’arsenal juridique existant quelques moyens nouveaux, dont la mise en œuvre est aisée. L’efficacité devrait être au rendez-vous. Ce volet paraît mineur. Il l’est assurément pour les maires des grandes villes, mais il en va différemment des autres, qui ne bénéficient pas des mêmes services.

Qu’il s’agisse des établissements recevant du public, de la tranquillité publique, de l’urbanisme opérationnel ou encore de comportements troublant la sécurité publique, tous ces domaines peuvent être sources de tensions qui empoisonnent le quotidien des élus. Mais ces choses-là, on ne les mesure pleinement que si l’on va les voir « avec les pieds », que si l’on prend le temps d’aller sur le terrain pour être à l’écoute.

Précisément, l’écoute semble être la marque de fabrique de ce projet de loi, et c’est tant mieux ! Je ne saurais que trop vous inviter, madame, monsieur les ministres, à prolonger cette écoute et, peut-être, entendrez-vous alors la voix du Sénat ! (Applaudissements sur les travées du groupe UC, ainsi que sur des travées des groupes Les Républicains et Les Indépendants.)

Mme la présidente. La parole est à Mme Agnès Canayer. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)

Mme Agnès Canayer. Madame la présidente, madame la ministre, monsieur le ministre, mes chers collègues, attendu de longue date, le projet de loi Engagement et proximité dont nous débattons aujourd’hui arrive à un moment choisi pour répondre aux attentes largement exprimées par les élus locaux et relayées depuis longtemps par le Sénat.

Alors que les échéances de mars 2020 approchent, un maire sur deux hésite toujours à se représenter. Les raisons avancées sont toujours les mêmes : perte d’efficacité et d’utilité, absence de moyens et poids grandissant des responsabilités.

Cette situation est d’autant plus paradoxale que 67 % des Français font confiance à leur maire, bien plus qu’à leur député ou sénateur.

Les causes de la baisse du moral des élus locaux sont connues : loi NOTRe, baisse des dotations durant le précédent quinquennat, multiplication et complexité des normes, désengagement des services de l’État. Et les inquiétudes pour l’avenir existent, notamment en raison du flou qui persiste autour de la réforme de la fiscalité locale.

Formulées lors du grand débat, ces attentes ont été enfin entendues par le Gouvernement. Les nombreux travaux du Sénat, tant ceux de la délégation aux collectivités territoriales sur le statut de l’élu que ceux de la commission des lois, sous l’égide de son président Philippe Bas, sur la réforme de la décentralisation et les irritants de la loi NOTRe ont largement inspiré les rédacteurs du présent texte.

Je me félicite, comme l’a affirmé le Premier ministre au cours de sa déclaration de politique générale au Sénat le 13 juin dernier, que 80 % des dispositions de ce texte résultent des travaux du Sénat. C’est bien, mais peut mieux faire !

L’excellent travail de nos rapporteurs Mathieu Darnaud et Françoise Gatel contribue à enrichir le texte initial, afin de prendre en compte toute la réalité du vécu quotidien des maires et éviter que ce texte attendu ne rate sa cible.

Conforter les maires dans leur rôle impose de redonner de la proximité à leur action et de favoriser leur engagement.

La perte de proximité constitue un leitmotiv. Beaucoup de maires rencontrés affirment être trop souvent dépourvus face à des décisions intercommunales prises sans leur consentement, ou des mesures législatives ou réglementaires déconnectées de la réalité et appliquées uniformément par les préfets. L’application du règlement départemental de défense extérieure contre l’incendie en Seine-Maritime en est une parfaite illustration.

Plus récemment, la faible information des maires lors de l’incendie de l’usine Lubrizol de Rouen – je pense à ma collègue Catherine Morin-Desailly – a privé la chaîne de communication auprès des citoyens d’un maillon essentiel, relais de proximité nécessaire. (Mme Catherine Morin-Desailly opine.)

Le texte dont nous débattons répond à ce besoin de proximité.

S’inspirant des trente propositions de la mission de contrôle et de suivi de la mise en œuvre des lois de réforme territoriale pour revitaliser l’échelon communal, dont M. Darnaud était le rapporteur, et de la proposition de loi relative à l’équilibre territorial et à la vitalité de la démocratie locale, il tend à rééquilibrer les relations entre communes et EPCI pour que l’intercommunalité soit au service de la commune, et non l’inverse.

Souhaitant aller plus loin, la commission des lois a renforcé la place de la commune, en autorisant le transfert de l’intercommunalité vers la commune de compétences ou de la gestion d’équipements de proximité. Cette nouvelle souplesse permettra d’adapter l’organisation des EPCI aux spécificités locales, de faire du sur-mesure et d’éviter le modèle unique.

Si la proximité est essentielle pour redonner du sens à l’action municipale, elle ne peut suffire pour favoriser l’engagement des maires. L’amélioration des conditions d’exercice des mandats locaux est vitale pour encourager les vocations et favoriser l’engagement en politique, notamment des femmes. Seuls 16 % des maires sont aujourd’hui des femmes ; on ne peut que le déplorer.

La conciliation de la vie professionnelle, de la vie politique et de la vie familiale reste difficile. La prise en charge des frais de garde et de déplacements est une première avancée. Pour répondre à la demande d’élus, j’ai déposé un amendement tendant à faciliter le télétravail pour les élus. Son adoption permettra de rapprocher le maire de sa commune en lui libérant du temps de trajet.

L’augmentation du plafond des indemnités réclamée par les élus doit rester supportable par les budgets communaux et acceptable par les administrés. C’est tout le sens des améliorations introduites par les rapporteurs.

Enfin, la perte de ressources et de cotisations retraite liée à l’engagement politique et la gestion de la fin de mandat restent de véritables sujets de préoccupations pour les élus locaux, sur lesquels nous devons encore progresser ensemble.

Le texte Engagement et proximité répond en grande partie aux attentes des élus locaux, grâce aux avancées obtenues collectivement. Le groupe Les Républicains le votera, tel qu’il a été profondément amélioré par le Sénat. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains, ainsi que sur des travées du groupe UC.)

Mme la présidente. La parole est à M. Didier Marie. (Applaudissements sur les travées du groupe SOCR.)

M. Didier Marie. Madame la présidente, madame la ministre, monsieur le ministre, mes chers collègues, avant d’aborder le texte, je veux évoquer le contexte.

Monsieur le ministre, nous sommes à cinq mois des élections municipales et nous avons compris qu’il était temps, pour l’exécutif, de tenter de combler le fossé qu’il a creusé avec les élus locaux, l’éloignant des territoires.

En effet, les décisions négatives se sont multipliées depuis le début du quinquennat, suscitant interrogations, inquiétude, défiance et, parfois, colère.

Dès 2017, alors que le Président de la République affichait sa volonté de dialogue avec les élus locaux en instituant la conférence des territoires, le Gouvernement annonçait, sans concertation, l’annulation de plus de 300 millions d’euros de crédits d’investissement dédiés aux collectivités. C’était mal parti !

Suivaient la diminution drastique du nombre d’emplois aidés, amputant les politiques d’insertion, affaiblissant les associations et obligeant les communes à voler à leur secours, la baisse des APL, impactant le modèle économique des HLM et, par conséquent, les politiques d’urbanisme et de logement des maires et, enfin, la disparition de services publics locaux, celle des trésoreries en étant le dernier avatar.

Puis – je vous passe des étapes – est venue l’annonce de la suppression de la taxe d’habitation, qui fera l’objet non pas d’un dégrèvement, mais d’une compensation par transfert de fiscalité, rappelant la suppression, de triste mémoire, de la taxe professionnelle et ses conséquences sur les finances locales.

Enfin, cerise sur le gâteau, le hashtag #BalanceTonMaire a démontré toute la considération du Gouvernement et de la majorité pour les 600 000 élus locaux qui, chaque jour, s’engagent au bénéfice de leurs concitoyens et de leur territoire. (Mme la ministre et M. le ministre protestent.)

Il aura fallu la crise des « gilets jaunes » et l’appel à la rescousse des maires pour que le Président de la République découvre qu’ils étaient indispensables au lien social, à la cohésion territoriale et, tout simplement, à la République, dont ils sont bien souvent le rempart. C’est à cette occasion que M. Macron a découvert que nos collègues étaient en souffrance et qu’ils avaient le blues, à tel point que nombre d’entre eux n’envisageaient pas de se représenter et que l’on pouvait craindre une crise des vocations.

Ce texte arrive, par un pur hasard de calendrier, juste avant les échéances municipales et sénatoriales de 2020, avec l’ambition affichée de répondre aux attentes des maires, de retisser du lien, de redonner confiance. Nous ne sommes pas dupes de la manœuvre, mais, en responsabilité, nous sommes prêts à prendre tout ce qui améliorera la vie de ces élus, même si le projet de loi est loin de répondre à l’ambition affichée.

M. Roland Courteau. Très bien !

M. Didier Marie. Monsieur le ministre, madame la ministre, que demandent les maires ? Ils attendent d’abord de la considération. À cet égard, ils ne se contenteront pas d’un hashtag #CâlineTonMaire. Comme l’a dit en substance le président Jean-Marie Bockel, vous leur faites des déclarations d’amour, ils veulent des preuves d’amour !

Ensuite, ils demandent des moyens. De ce point de vue, la perspective du gel de l’évolution des bases locatives et d’une augmentation de seulement 0,2 %, hors FCTVA, des concours de l’État aux collectivités dans la prochaine loi de finances ne les rassure pas.

Mme Jacqueline Gourault, ministre. C’est tout de même mieux qu’une baisse !

M. Didier Marie. Enfin, ils veulent retrouver de la liberté d’action, sans contractualisation étouffante, sans tutelle suffocante des services préfectoraux, sans avalanche de normes nouvelles.

Madame la ministre, monsieur le ministre, vous avez fait le choix de reprendre de nombreuses dispositions déjà votées par le Sénat, souvent à l’unanimité, qui, malheureusement, faute de relais au Gouvernement et au sein de la majorité de l’Assemblée nationale, n’avaient pas pu prospérer. Nous considérerons donc un bon nombre de vos propositions avec bienveillance.

Cependant, notre approche sera également exigeante.

Votre texte a été amendé par la commission des lois, qui en a renforcé certains aspects, ce dont il faut se réjouir, mais qui a aussi introduit, sous couvert de gommer certains irritants, des dispositions qui pourraient en créer de nouveaux.

Plusieurs de nos propositions ont été reprises, essentiellement sur les droits des élus. Nous nous en félicitons.

Nous présenterons, en séance, d’autres amendements, qui, nous l’espérons, pourront rassembler.

Ainsi, pour ce qui concerne la consolidation de la place de la commune et du maire dans l’intercommunalité, nous invitons nos collègues à aller plus loin que nos rapporteurs, en rendant obligatoires le pacte de gouvernance et la conférence des maires, considérant que c’est dans les territoires où ils n’existent pas encore qu’ils seront les plus utiles et que, sans obligation, il y a peu de chances qu’ils y voient le jour.

Nous veillerons, par ailleurs, à ce que les possibilités de scission d’EPCI soient bien réservées aux quelques cas d’intercommunalités « XXL » posant difficulté, en fixant des bornes quant à leur taille, et à ce que l’assouplissement de la répartition des compétences n’ouvre pas de remise en cause insidieuse de l’intercommunalité. Il ne faudrait pas que la suppression des compétences optionnelles et l’introduction des compétences à la carte fragilisent tout l’édifice d’une intercommunalité en cours de stabilisation.

Comme le souligne Mme le rapporteur, l’intercommunalité est une chance et une force pour nos territoires. À cet égard, nous sommes convaincus que la si décriée loi NOTRe a redonné aux EPCI des capacités d’action – il en va de même pour les communes.

S’agissant des conditions d’exercice des mandats locaux, nous nous félicitons que la commission ait retenu notre proposition selon laquelle seul le maire peut demander une indemnité inférieure au plafond. Nous aurions souhaité que les indemnités des maires et des adjoints puissent être augmentées de façon dégressive, au-delà de 3 500 habitants jusqu’à 100 000 habitants, strate au-dessous de laquelle l’indemnité du maire est inférieure au salaire médian français.

M. André Reichardt. Très bien !

M. Didier Marie. De nombreuses autres dispositions vont dans le bon sens, bien qu’elles ne révolutionnent pas le quotidien des élus et que ce soit au final le budget communal qui devra, s’il en a les moyens, assumer celles qui ont un coût. Je veux citer la prise en compte des frais de déplacement et des frais de garde, qui, effectivement, améliorera le quotidien des élus.

Cependant, ce texte opère également des reculs. Je pense, concernant la participation des citoyens à la vie locale, à la remise en cause des conseils de développement.

Il présente également des manques, notamment sur la parité, alors que ce texte devrait permettre de la faire progresser au sein des EPCI, qui ne comptent qu’un tiers de femmes et seulement 8,9 % de femmes présidentes.

Enfin, il ne lève pas certaines incertitudes, la question essentielle de la formation étant renvoyée à une ordonnance.

En outre, nous déplorons que l’après-mandat soit le grand absent du texte. On n’en parle pas, alors que c’est une condition de l’engagement. Qu’en est-il de la validation des acquis de l’expérience ? Qu’en est-il de la reconversion professionnelle ? Sur ce plan, nous aurions souhaité que le texte prévoie le bénéfice de l’ancienneté des élus dans le cas d’une reprise d’activité, amplifie l’allocation différentielle de fin de mandat, soutienne la création d’entreprise, en faisant bénéficier l’élu de prêts en quasi-fonds propres. Nous aurions aussi voulu réformer le régime de retraite des élus, alors que celle-ci est, aujourd’hui, indigente.

Ces sujets ne figurent pas dans le texte, et l’article 40 de la Constitution ne nous permet pas de les y intégrer. Nous regrettons que le Gouvernement n’en ait pas pris l’initiative.

Madame la ministre, monsieur le ministre, madame, monsieur les rapporteurs, la question de l’engagement citoyen est primordiale. Ce texte va-t-il décider des élus sortants hésitants à se représenter ? Va-t-il susciter de nouvelles vocations ? Nous ne le croyons pas. Il ne règle en rien la question des moyens financiers. Il ne règle pas plus celle d’une liberté retrouvée ni celle de la sécurité des élus.

Ce texte est, certes, utile, mais c’est un petit texte, qui ne répond pas à une grande ambition et qui risque malheureusement de susciter quelques frustrations. (Applaudissements sur les travées du groupe SOCR.)

Mme la présidente. La parole est à M. Henri Cabanel. (Applaudissements sur les travées du groupe RDSE.)

M. Henri Cabanel. Madame la présidente, madame la ministre, monsieur le ministre, mes chers collègues, quelle démocratie voulons-nous pour demain ? C’est le véritable enjeu de ce texte de loi relatif à l’engagement dans la vie locale et à la proximité de l’action publique, qui, dans son intitulé, énonce deux fondamentaux de la vie politique : l’engagement et la proximité.

L’engagement à servir l’intérêt général, les populations et les territoires doit être le moteur de tout mandat.

La proximité est quant à elle un fondement de notre République.

La France est souvent montrée du doigt pour ses 35 000 communes et ses 503 000 élus municipaux. Ce serait trop.

Trop pour leur budget ? Nous le savons tous ici, ce sont très majoritairement des bénévoles qui consacrent leur quotidien à leur ville ou à leur village, 72 % des communes comptant moins de 1 000 habitants.

M. Yvon Collin. Très bien !

M. Henri Cabanel. Tout cela ne représente jamais que 1,2 % du budget des communes.

Trop de moyens humains ? Quand on constate leur sacerdoce, comment nier le rôle évident des élus locaux ? « Nous sommes de véritables amortisseurs sociaux », m’a dit une maire que j’ai rencontrée lorsque j’ai fait le tour de mon département de l’Hérault. J’aime à répéter cette phrase, qui reflète la réalité des élus communaux.

M. Yvon Collin. Très bien !

M. Henri Cabanel. De fait, les élus locaux sont présents sept jours sur sept, quasiment jour et nuit.

M. Henri Cabanel. La plupart indiquent remplacer certains services qui ont déserté les communes rurales ou les agents municipaux que leur petit budget ne peut assumer.

Bref, notre République s’appuie sur ces élus, qui offrent à notre pays un véritable équilibre, une paix dans un contexte pour le moins agité. Si l’on peut débattre de leur nombre au sein du conseil municipal quand on connaît la difficulté qu’ont certains candidats à constituer une équipe, la nécessité des élus et l’importance de leurs missions sont, elles, incontestables. Dès lors se pose une question fondamentale : comment les soutenir dans leur mandat ?

Merci pour ce texte, qui, dans ses quatre parties, a pour objectif d’apporter des réponses aux problèmes des maires, s’agissant notamment de leur positionnement au sein des EPCI ou encore de leurs pouvoirs de police.

Toutefois, je regrette deux éléments majeurs. En premier lieu, monsieur le ministre, l’intitulé du projet de loi ne mentionne pas le « statut de l’élu local » dont vous avez parlé tout à l’heure. En second lieu, le texte ne prévoit que des droits, et pas de devoirs.

Le « statut de l’élu » est-il devenu un gros mot ? Avons-nous peur des citoyens ? Depuis des années, les élus locaux revendiquent un statut. Pour rappel, ce terme n’a rien de subversif ! Il s’agit uniquement d’un ensemble de textes qui règlent la situation d’une personne ou d’un groupe. Depuis des décennies, les textes s’empilent sur le sujet, sans qu’il y ait eu de réforme radicale.

Le présent projet de loi est l’occasion de s’emparer de la question, à la condition, bien évidemment, que nous soyons écoutés. Pour l’heure, il consiste en un mélange de mesures, certes utiles – je pense notamment à la formation ou à la prise en charge des frais de garde –, mais il ne va pas au fond du sujet.

Les enjeux du statut de l’élu sont triples. Alors que plus de deux maires sur cinq sont des retraités, alors que seulement 16 % des maires sont des femmes, ces enjeux sont ceux de notre société : il s’agit de lutter contre les freins à l’engagement liés à l’activité professionnelle, à la parité et à la représentation de la société dans la vie publique.

Les chiffres publiés sur le site de l’Association des maires de France et des présidents d’intercommunalité montrent une progression de la part des retraités. Cela indique de façon très claire la difficulté qu’ont les salariés, et plus particulièrement ceux du privé, à réintégrer leur entreprise à l’issue de leur mandat. Une quantification du temps qu’exige l’exercice d’un mandat municipal s’impose pour expliquer aux citoyens la nécessité de réformer les retraites et les indemnités des élus locaux.

À cet égard, ce texte aurait dû associer les droits et les devoirs. Comment, dans un contexte social en crise, dans une défiance exacerbée des citoyens envers leurs gouvernants, imaginer des droits sans devoirs ? Alors que le « tous pourris » inonde les réseaux sociaux, les élus locaux font les frais de ce manque de confiance, mais également de l’absence de respect, qui s’amplifie.

Quel est le contexte sous-jacent du drame de Signes intervenu cet été ? Celui de citoyens qui ne respectent plus les élus et de fortes menaces pesant sur l’autorité du maire.

La commission des lois du Sénat a lancé récemment une consultation auprès des maires. Les chiffres qui ont été communiqués démontrent ce malaise : 92 % des participants à la consultation ont déjà subi des incivilités, des injures, des menaces ou des agressions physiques.

Rédiger des textes de loi pour renforcer les moyens de contrainte, c’est bien. Expliquer, c’est essentiel, car la citoyenneté ne se décrète pas, pas plus que la confiance.

C’est pourquoi nous devons collectivement œuvrer pour reconquérir les Français. Nous devons collectivement débattre, expliquer, quels que soient nos mandats et quels que soient les publics.

Pourquoi, par exemple, ne pas imposer à chaque élu de consacrer une demi-journée par mois à une rencontre avec les jeunes ? La citoyenneté se crée dès le plus jeune âge, et je peux vous dire, pour rencontrer les conseils municipaux de jeunes, mais également des élèves et des étudiants du CE2 jusqu’au master 2, qu’il y a une vraie appétence pour nos institutions. Ainsi, dans une décennie, la situation pourrait être inversée, à la condition toutefois que nous expliquions bien nos droits et nos devoirs.

La nécessité de détenir un casier vierge, pour les candidats aux élections, est l’un de ces devoirs. Une telle condition paraît d’ailleurs évidente pour les élus locaux qui la réclament. J’ai réalisé une enquête dans mon département : 82 % des maires qui ont répondu y sont favorables.

D’après ce même questionnaire, pour 74 % des maires, l’exigence accrue des citoyens représente le principal frein à l’engagement. C’est pourquoi il est fondamental de témoigner, d’informer sur le rôle majeur de nos élus et de soutenir encore et toujours cet extraordinaire maillage de notre pays.

En ce sens, le groupe RDSE a déposé de nombreux amendements qui vont plus loin que le texte examiné, car, si le débat a le mérite d’être posé sur plusieurs sujets, certaines propositions sont perçues par les élus locaux comme des effets d’annonce ou de communication. Par exemple, quelle valeur aura la possibilité, pour un EPCI, de déléguer la compétence eau et assainissement aux communes qui le souhaitent, si cette délégation est soumise au vote de l’établissement ? Dans la réalité, certains EPCI ont une gouvernance de baronnie et des postures politiciennes qui bloqueront toute délégation. Par conséquent, il faut soit figer la situation voulue par la loi NOTRe, soit revenir purement et simplement sur celle-ci, en annulant le transfert. Tel n’est pas votre choix, mais la disposition du texte n’est pas tenable dans la réalité. Il faut aller plus loin.

L’augmentation du pouvoir de police du maire est également une bonne intention. Toutefois, dans la réalité, certains pensent que cela les mettra encore plus en danger.

M. Henri Cabanel. Un accompagnement par les services d’État est donc nécessaire.

M. Philippe Dallier. Un peu de courage !

M. Henri Cabanel. Enfin, proposer une hausse des indemnités prélevée sur le budget communal est irréaliste. C’est presque une injure pour les plus petites communes. Dans un contexte financier contraint, une telle mesure est illusoire ! L’État devrait en assumer la charge. C’est le prix à payer pour soutenir l’engagement citoyen. C’est le prix à payer pour notre démocratie. (Applaudissements sur les travées du groupe RDSE. – MM. Didier Marie et Jean-Pierre Sueur applaudissent également.)

Mme la présidente. La parole est à M. Dany Wattebled. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Indépendants. – M. Arnaud de Belenet applaudit également.)

M. Dany Wattebled. Madame la présidente, madame la ministre, monsieur le ministre, mes chers collègues, le projet de loi qu’il nous est donné d’examiner aujourd’hui marque une prise de conscience par le Gouvernement du rôle des élus locaux dans notre démocratie et de la nécessité de mieux les considérer.

En effet, chez les élus, un sentiment latent de dépossession s’est installé. Successivement, ils ont dû affronter les baisses de dotations de l’État, qui ont affecté toutes les collectivités de manière indistincte et non concertée, puis la marche forcée vers les grandes intercommunalités et les grandes régions et, demain, la réforme de la fiscalité locale.

Ce projet de loi entend ainsi valoriser et accompagner ceux qui s’engagent pour la démocratie et la collectivité, en améliorant les conditions d’exercice des mandats locaux.

Dans le même esprit, il vise à étendre les libertés locales, à conforter le rôle du maire pour assurer un meilleur équilibre avec l’intercommunalité, à simplifier le quotidien des élus locaux et à mieux adapter certaines règles ou certains seuils aux réalités territoriales.

Je me réjouis tout particulièrement que ce texte vise à opérer de réelles avancées pour redonner des libertés locales aux élus, afin que ces derniers retrouvent des capacités d’action qui leur ont été enlevées par les lois NOTRe et Maptam.

M. Emmanuel Capus. Très bien !

M. Dany Wattebled. Sans remettre ces lois en cause, il paraît nécessaire de conforter le rôle des maires au sein des intercommunalités, d’améliorer la gouvernance des EPCI pour permettre des ajustements à la carte lorsque cela ne marche pas et de redonner du pouvoir aux maires.

Il est primordial de faire de l’intercommunalité un véritable instrument au profit des maires. N’oublions pas que ce sont les communes qui font l’intercommunalité, et non l’intercommunalité qui fait les communes !

M. Emmanuel Capus. C’est vrai !

M. Dany Wattebled. Je suis heureux également que ce projet de loi prévoie de lever des freins à l’engagement et au réengagement, pour attirer de nouvelles personnes à se présenter et pour ne pas décourager les élus locaux, alors que la menace de voir des listes incomplètes aux élections de 2020 se fait jour.

Je pense toutefois qu’il faudrait aller plus loin.

En effet, sur le terrain, les maires, notamment ceux des communes de moins de 1 000 habitants, réclament une diminution du nombre de conseillers municipaux, car ils rencontrent des difficultés à constituer des listes en vue des prochaines élections.

Ainsi, dans les communes comptant jusqu’à 100 habitants, il faut 7 conseillers municipaux. À partir de 101, il en faut déjà 11, soit plus de 10 % de la population ! Pourquoi ne pas porter le nombre de conseillers à 7 dans les communes de 1 à 199 habitants, à 9 dans les communes de 200 à 499 habitants et à 13 dans celles de 500 à 1 499 ?

De plus, l’abaissement du seuil du scrutin proportionnel en contrepartie, en le fixant, par exemple, à 200 habitants, favoriserait la parité et la démocratie et réduirait l’iniquité qui existe actuellement pour le même scrutin. En effet, pour les communes de 1 000 habitants prévaut actuellement le panachage, ce qui se réduit parfois à un jeu de chamboule-tout, quand les autres connaissent le scrutin proportionnel. Nous avons déposé des amendements en ce sens.

Avant de conclure, je veux saluer, à cette tribune, l’immense travail accompli par les élus locaux, au premier rang desquels les maires, qui sont toujours au plus près des citoyens, de leurs demandes, de leurs encouragements, mais aussi de leurs récriminations.

Oui, le travail que mènent les élus au quotidien au service des habitants, au niveau communal comme au niveau intercommunal, doit être simplifié et soutenu. Oui, le bloc communal doit être valorisé et remis au cœur de notre démocratie. C’est une valeur essentielle de notre République !

Monsieur le ministre, mes chers collègues, réenchanter l’exercice de ce bel engagement qu’est le mandat local est à portée de main. Si ce texte en ouvre la perspective, je me félicite que la commission des lois ait apporté de nombreuses et importantes modifications afin de mieux sécuriser, motiver et outiller les élus locaux, en les dotant d’une plus grande capacité à agir.

Rendre l’engagement citoyen attractif pour de nouveaux élus et répondre aux demandes des maires d’aujourd’hui : voilà l’urgence à laquelle ce texte doit répondre.

Pour cette raison, le groupe Les Indépendants votera ce projet de loi, enrichi largement et significativement par les travaux de la commission. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Indépendants, ainsi que sur des travées du groupe UC. – MM. Arnaud de Belenet et Yves Bouloux applaudissent également.)