M. le président. Je mets aux voix l’article 1er.

(Larticle 1er est adopté.)

Première partie
Dossier législatif : projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2020
Deuxième partie

Article 2 et annexe A

Est approuvé le rapport figurant en annexe A à la présente loi présentant un tableau, établi au 31 décembre 2018, retraçant la situation patrimoniale des régimes obligatoires de base et des organismes concourant à leur financement, à l’amortissement de leur dette ou à la mise en réserve de recettes à leur profit et décrivant les mesures prévues pour l’affectation des excédents ou la couverture des déficits, tels qu’ils sont constatés dans les tableaux d’équilibre relatifs à l’exercice 2018 figurant à l’article 1er.

Annexe A

Rapport retraçant la situation patrimoniale, au 31 décembre 2018, des régimes obligatoires de base et des organismes concourant à leur financement, à l’amortissement de leur dette ou à la mise en réserve de recettes à leur profit et décrivant les mesures prévues pour l’affectation des excédents et la couverture des déficits constatés pour l’exercice 2018

I. – Situation patrimoniale de la sécurité sociale au 31 décembre 2018

 

(En milliards deuros)

Actif

2018 (net)

2017 (net)

Passif

2018

2017

Immobilisations

7,3

7,4

Capitaux propres

-77,0

-88,5

Immobilisations non financières

5,0

5,0

Dotations

22,3

23,7

Régime général

0,2

0,2

Prêts, dépôts de garantie

1,4

1,5

Autres régimes

6,4

5,8

Caisse d’amortissement de la dette sociale (CADES)

0,2

0,2

Avances/ prêts accordés à des organismes de la sphère sociale

0,9

0,9

Fonds de réserve pour les retraites (FRR)

15,5

17,6

Réserves

21,6

18,8

Régime général

3,8

2,9

Autres régimes

7,7

8,1

FRR

10,1

7,7

Report à nouveau

-136,9

-143,5

Régime général

-5,0

-3,4

Autres régimes

-4,3

-4,0

FSV

-6,6

-0,1

CADES

-121,0

-136,0

Résultat de lexercice 2016 en instance daffectation

-3,6

FSV

-3,6

Résultat de lexercice

14,9

12,6

Régime général

0,5

-2,2

Autres régimes

-0,2

0,2

Fonds de solidarité vieillesse (FSV)

-1,8

-2,9

CADES

15,4

15,0

FRR

0,9

2,4

Écart destimation (réévaluation des actifs du FRR en valeur de marché)

1,1

3,5

Provisions pour risques et charges

17,5

17,2

Actif financier

55,8

55,6

Passif financier

142,6

158,5

Valeurs mobilières et titres de placement

43,4

44,7

Dettes représentées par un titre (obligations, billets de trésorerie, europapiers commerciaux)

131,1

152,0

Régime général

0,0

0,0

Agence centrale des organismes de sécurité sociale (ACOSS)

23,1

27,3

Autres régimes

11,5

8,7

CADES

108,0

124,7

CADES

0,0

1,0

FRR

31,8

35,0

Encours bancaire

12,0

9,1

Dettes à légard détablissements de crédit

6,1

5,7

Régime général

2,2

0,9

Régime général (ordres de paiement en attente)

4,8

4,2

Autres régimes

6,8

4,0

Autres régimes

0,3

0,5

FSV

0,0

0,0

CADES

1,0

1,0

CADES

2,3

3,2

Dépôts reçus

0,4

0,5

FRR

0,7

0,9

ACOSS

0,4

0,5

Créances nettes au titre des instruments financiers

0,5

1,9

Dettes nettes au titre des instruments financiers

0,0

0,2

CADES

0,4

1,3

ACOSS

0,0

0,2

FRR

0,1

0,6

Autres

5,0

0,1

Autres régimes

4,8

0,0

CADES

0,3

0,1

Actif circulant

77,3

82,1

Passif circulant

57,4

57,9

Créances de prestations

9,1

9,0

Dettes et charges à payer à l’égard des bénéficiaires

29,8

29,8

Créances de cotisations, contributions sociales et d’impôts de sécurité sociale

8,5

8,9

Dettes et charges à payer à l’égard des cotisants

2,4

2,7

Produits à recevoir de cotisations, contributions sociales et autres impositions

43,2

47,6

Créances sur entités publiques et organismes de sécurité sociale

10,7

10,7

Dettes et charges à payer à l’égard d’entités publiques

11,0

7,8

Produits à recevoir de l’État

0,7

0,8

Autres actifs

5,2

5,1

Autres passifs

14,2

17,6

Total de lactif

140,5

145,1

Total du passif

140,5

145,1

Sur le champ des régimes de base, du Fonds de solidarité vieillesse (FSV), de la Caisse d’amortissement de la dette publique (CADES) et du Fonds de réserve pour les retraites (FRR), le passif net (ou « dette ») de la sécurité sociale, mesuré par ses capitaux propres négatifs, et qui recouvre pour l’essentiel le cumul des déficits passés restant à financer, s’élevait à 77,0 milliards d’euros au 31 décembre 2018. L’encours de dette sur les produits techniques est de l’ordre de 15 %, soit environ 2 mois de recettes.

Après une dégradation très marquée à la fin de la précédente décennie, en partie imputable à la crise économique, le passif net est en diminution depuis cinq exercices. Cette inversion de tendance s’est confirmée et s’est amplifiée entre 2017 et 2018 (baisse de 7,9 milliards d’euros entre 2015 et 2016, de 12,8 milliards d’euros entre 2016 et 2017 puis de 11,6 milliards d’euros en 2018 par rapport à 2017). Cette amélioration se traduit en particulier par un résultat consolidé positif sur le périmètre d’ensemble de la sécurité sociale retracé ci-dessus (14,9 milliards d’euros en 2018, contre 12,6 milliards d’euros en 2017). Elle reflète la réduction continue des déficits des régimes de base et du FSV (1,4 milliard d’euros en 2018 contre 4,8 milliards d’euros en 2017, 7,0 milliards d’euros en 2016, 10,2 milliards d’euros en 2015, 12,8 milliards d’euros en 2014 et 16,0 milliards d’euros en 2013) dans un contexte de maintien d’un niveau élevé d’amortissement de la dette portée par la CADES (15,4 milliards d’euros en 2018 après 15,0 milliards d’euros en 2017).

Le financement du passif net de la sécurité sociale est assuré à titre principal par un recours à l’emprunt, essentiellement porté par la CADES et l’ACOSS. L’endettement financier net de la sécurité sociale, qui correspond à la différence entre les dettes financières et les actifs financiers placés ou détenus en trésorerie, suit donc en premier lieu les mêmes tendances que le passif net auquel il est fait référence ci-dessus, en subissant secondairement les effets de la variation du besoin en fonds de roulement lié au financement des actifs et passifs circulants (créances et dettes) et des acquisitions d’actifs immobilisés, qui ont également un impact sur la trésorerie. Après l’infléchissement observé depuis 2015, l’endettement financier continue de reculer ainsi fortement en 2018 (86,8 milliards d’euros contre 102,9 milliards d’euros fin 2017), en cohérence avec l’évolution du passif net ainsi que celle du besoin en fonds de roulement.

Évolution du passif net, de lendettement financier net et des résultats comptables consolidés de la sécurité sociale depuis 2009

 

(En milliards deuros)

2009

2010

2011

2012

2013

2014

2015

2016

2017

2018

Passif net au 31/12

(capitaux propres négatifs)

-66,3

-87,1

-100,6

-107,2

-110,9

-110,7

-109,5

-101,4

-88,5

-77,0

Endettement financier net au 31/12

-76,3

-96,0

-111,2

-116,2

-118,0

-121,3

-120,8

-118,0

-102,9

-86,8

Résultat comptable consolidé de l’exercice (régimes de base, FSV, CADES et FRR)

-19,6

-23,9

-10,7

-5,9

-1,6

+1,4

+4,7

+8,1

+12,6

+14,9

II. – Couverture des déficits et affectation des excédents constatés sur lexercice 2018

Dans le cadre fixé par la loi organique n° 2010-1380 du 13 novembre 2010 relative à la gestion de la dette sociale, la loi de financement de la sécurité sociale pour 2011 a organisé le transfert à la CADES, dès l’année 2011, des déficits 2011 des branches maladie et famille du régime général. Elle a également prévu la reprise progressive, à compter de 2012, des déficits des années 2011 à 2018 de la branche Vieillesse du régime général et du FSV, dans la double limite de 10 milliards d’euros chaque année et de 62 milliards d’euros au total.

L’article 26 de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2016 a modifié ce schéma et supprimé le plafond annuel de 10 milliards d’euros afin de tenir compte de conditions de financement à moyen et long termes particulièrement favorables. Il a ainsi ouvert la possibilité d’une saturation du plafond de 62 milliards d’euros dès 2016 et d’une reprise anticipée dont les modalités de mise en œuvre ont été précisées par le décret n° 2016-110 du 4 février 2016 et un arrêté du 14 septembre 2016.

Un montant total de 23,6 milliards d’euros a été repris en 2016, correspondant au transfert de la totalité des déficits de la branche Famille et de la branche Maladie au titre de 2013 et 2014 et de ceux de de la branche Vieillesse et du FSV au titre de 2015, ainsi que d’une partie du déficit de la branche Maladie au titre de 2015.

Ce plafond de reprise par la CADES ayant été saturé après les transferts intervenus en 2016, c’est l’ACOSS qui porte en dette à court terme les déficits des derniers exercices. Après s’être accru de 6,4 milliards d’euros entre 2016 et 2017, sous l’effet du financement des déficits du régime général et du FSV, l’endettement financier brut de l’ACOSS a reculé de 4,4 milliards d’euros pour s’établir à 23,5 milliards d’euros au 31 décembre 2018, suite à l’évolution favorable des comptes sociaux.

Au titre de l’exercice 2018, le résultat cumulé des régimes de base autres que le régime général est déficitaire de 0,2 milliard d’euros. La plupart de ces régimes présentent par construction des résultats annuels équilibrés ou très proches de l’équilibre. Il en est ainsi des branches et régimes intégrés financièrement au régime général (ensemble des branches maladie des différents régimes de base depuis la mise en œuvre, en 2016, de la protection universelle maladie, branches vieillesse de base du régime des salariés agricoles depuis 1963 et du régime social des indépendants jusqu’en 2017), des régimes de retraite équilibrés par des subventions de l’État (SNCF, RATP, régimes des mines et des marins) et des régimes d’employeurs (fonction publique de l’État, industries électriques et gazières), équilibrés par ces derniers. Concernant le régime des mines, les déficits passés cumulés de la branche Maladie ont par ailleurs été transférés à la CNAM à hauteur de 0,7 milliard d’euros en application de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2016.

Concernant les régimes ne bénéficiant pas de tels mécanismes d’équilibrage, le résultat de la Caisse nationale de retraites des agents des collectivités locales, encore excédentaire en 2017, ressort en déficit de 0,6 milliard d’euros en 2018.

La branche retraite du régime des exploitants agricoles, qui était déficitaire en 2017, présente un bénéfice de 0,01 milliard d’euros en 2018. Ses déficits cumulés depuis 2011 (les déficits 2009 et 2010 ayant été repris par la CADES en 2011) atteignent cependant 3,7 milliards d’euros. La loi de financement de la sécurité sociale pour 2015 a prévu que ce déficit puisse être financé par des avances rémunérées de trésorerie octroyées par l’ACOSS, en complément des financements bancaires auxquels avait recours jusque-là la Caisse centrale de la mutualité sociale agricole (CCMSA) pour couvrir ces déficits cumulés. Au 31 décembre 2018, ces déficits ont été financés en totalité par une avance de l’ACOSS.

Enfin, l’excédent du régime de retraite des professions libérales (0,1 milliard d’euros en 2018) recule à nouveau en 2018 (– 0,2 milliard d’euros par rapport à 2017). Ceux de la branche Vieillesse du régime de retraite et de prévoyance des clercs et employés de notaires (0,09 milliard d’euros en 2018) et du régime de base de la caisse nationale des barreaux français (0,06 milliard d’euros en 2018) restent globalement stables. Ces excédents sont affectés aux réserves des régimes concernés.

M. le président. Je mets aux voix l’ensemble constitué de l’article 2 et de l’annexe A.

(Larticle 2 et lannexe A sont adoptés.)

Article 2 et annexe A
Dossier législatif : projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2020
Article 3

M. le président. Personne ne demande la parole ?…

Je mets aux voix l’ensemble de la première partie du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2020.

(La première partie du projet de loi est adoptée.)

DEUXIÈME PARTIE

DISPOSITIONS RELATIVES À L’EXERCICE 2019

Deuxième partie
Dossier législatif : projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2020
Article 4

Article 3

I. – Le 3° de l’article L. 131-8 du code de la sécurité sociale est ainsi modifié :

1° Le a est complété par les mots : « , à l’exception de la contribution mentionnée au III de l’article 136-8 » ;

2° Le b est ainsi modifié :

a) Au cinquième alinéa, le taux : « 5,03 % » est remplacé par le taux : « 4,77 % » ;

b) À l’avant-dernier alinéa, le taux : « 2,25 % » est remplacé par le taux : « 3,2 % » ;

c) Au dernier alinéa, le taux : « 5,05 % » est remplacé par le taux : « 3,07 % » ;

3° Au e, après la référence : « II », sont insérés les mots : « et du III bis » et, à la fin, le taux : « 1,72 % » est remplacé par le taux : « 1,98 % ».

II. – Le dernier alinéa du III de l’article L. 14-10-5 du code de l’action sociale et des familles est ainsi rédigé :

« Avant imputation aux sections mentionnées aux IV, V et VI, l’ensemble des contributions mentionnées aux 1°, 1° bis et 3° de l’article L. 14-10-4 du présent code destinées aux personnes handicapées, soit au titre des établissements et services financés par la sous-section mentionnée au 1 du I du présent article, soit au titre de la présente section, doit totaliser au moins 20 % du produit de ces contributions. »

III. – Le premier alinéa de l’article L. 131-7 du code de la sécurité sociale n’est pas applicable aux pertes de recettes résultant :

1° De la modification de la rédaction de l’article L. 136-8 du code de la sécurité sociale résultant du II de l’article 14 de la loi n° 2018-1203 du 22 décembre 2018 de financement de la sécurité sociale pour 2019 et du 2° du III de l’article 3 de la loi n° 2018-1213 du 24 décembre 2018 portant mesures d’urgence économiques et sociales ;

2° De la modification de la rédaction de l’article L. 137-15 du code de la sécurité sociale résultant de l’article 16 de la loi n° 2018-1203 du 22 décembre 2018 de financement de la sécurité sociale pour 2019 ;

3° De la modification de la rédaction du V de l’article 7 de la loi n° 2018-1203 du 22 décembre 2018 de financement de la sécurité sociale pour 2019 résultant du III de l’article 2 de la loi n° 2018-1213 du 24 décembre 2018 portant mesures d’urgence économiques et sociales.

IV. – Les dépenses exposées pour la rémunération des personnes, mentionnées au 1° de l’article 1er, à l’article 3 et au premier alinéa de l’article 4 de l’ordonnance n° 2018-359 du 16 mai 2018 fixant les modalités de transfert des personnels administratifs des juridictions mentionnées au 1° du I de l’article 109 de la loi n° 2016-1547 du 18 novembre 2016 de modernisation de la justice du XXIe siècle et celles de leur accès aux corps des services judiciaires ou aux corps communs du ministère de la justice, affectées au sein des juridictions compétentes pour connaître du contentieux général et du contentieux technique de la sécurité sociale demeurent, sous réserve des transferts de personnels déjà effectués dans le cadre de la mise en œuvre des lois de finances pour 2019 et 2020, prises en charge jusqu’au 31 décembre 2020 par les organismes de sécurité sociale dans les conditions fixées par l’article L. 144-5 du code de la sécurité sociale dans sa rédaction antérieure au 1er janvier 2019.

Il en est de même, jusqu’à la même date, pour les agents contractuels recrutés, au sein des mêmes juridictions, en remplacement des personnels mentionnés au premier alinéa du présent IV.

M. le président. Je suis saisi de deux amendements identiques.

L’amendement n° 111 est présenté par M. Antiste, Mme Jasmin, MM. Todeschini, Lalande, Temal et Jomier, Mmes Artigalas et G. Jourda, M. Duran et Mmes Taillé-Polian et Monier.

L’amendement n° 186 est présenté par Mmes Cohen, Apourceau-Poly, Gréaume, Lienemann et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.

Ces deux amendements sont ainsi libellés :

Supprimer cet article.

La parole est à M. Maurice Antiste, pour présenter l’amendement n° 111.

M. Maurice Antiste. Le I de l’article 231 A du code général des impôts dispose notamment que « les employeurs redevables de la taxe sur les salaires mentionnés à l’article 1679 A peuvent bénéficier d’un crédit d’impôt assis sur les rémunérations qu’ils versent à leurs salariés au cours de l’année civile ».

L’article 3 du PLFSS pour 2020 prévoit, quant à lui, que ce crédit d’impôt ne fasse pas l’objet d’une compensation à la sécurité sociale. Or les compensations de pertes de recettes ou de transferts de charges entre l’État et la sécurité sociale sont régies par le principe de « compensation intégrale » défini à l’article L. 131-7 du code de la sécurité sociale.

De plus, cette politique d’exonération de cotisations sociales a des conséquences directes sur le financement de notre système de protection sociale, fondé sur la solidarité et la collectivité.

Par ailleurs, la Cour des comptes relève, dans son dernier rapport, un déséquilibre des comptes de la sécurité sociale qui s’explique, avant tout, par la politique d’exonération de cotisations sociales.

C’est la raison pour laquelle est proposée la suppression de cet article.

M. le président. La parole est à Mme Michelle Gréaume, pour présenter l’amendement n° 186.

Mme Michelle Gréaume. L’article 3 était passé en première lecture dans la quasi-indifférence de la majorité sénatoriale, alors qu’il entérine une perte de recettes pour la sécurité sociale de 3 milliards d’euros. Pourtant, le Gouvernement justifie le principe de la non-compensation par l’application de la doctrine issue du rapport Charpy-Dubertret de 2018, qui n’a fait l’objet d’aucune approbation par le Parlement.

Ce rapport préconise de revenir sur la règle de la compensation intégrale relative aux allégements généraux, lesquels, rappelons-le, représentent au total 66 milliards d’euros pour 2019. On voit bien jusqu’où peut conduire cette logique de la non-compensation !

Il s’agit d’un très gros manque à gagner – et à dépenser – pour la sécurité sociale, dont nous avons tous rappelé les immenses besoins. Le système de tuyauterie entre le budget de l’État et celui de la sécurité sociale est devenu extrêmement complexe, mais l’argent coule presque toujours dans le même sens, de la sécurité sociale vers l’État, et beaucoup plus rarement dans l’autre sens.

Pour ces raisons nous demandons la suppression de l’article 3.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Jean-Marie Vanlerenberghe, rapporteur général de la commission des affaires sociales. L’article 3 contient, certes, des mesures de non-compensation auxquelles la commission est opposée, mais aussi diverses dispositions utiles, notamment la répartition des recettes entre branches de la sécurité sociale en 2019, qu’il importe de préserver.

L’avis est donc défavorable sur ces amendements de suppression.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Olivier Dussopt, secrétaire dÉtat. Si vous le permettez, monsieur le président, cet avis vaudra pour ces deux amendements identiques, mais aussi pour les amendements suivants, lesquels ne portent que sur les alinéas relatifs à la non-compensation.

Je rappelle que les mesures d’urgence économique et sociale représentent un engagement de 17 milliards d’euros, dont 14 milliards d’euros à la charge de l’État.

Concernant le débat sur la non-application de la loi Veil de 1994, je précise que celle-ci autorise un certain nombre d’exceptions. Ce n’est d’ailleurs pas la première fois que des exonérations ne sont pas compensées. Nous avons ainsi recensé, depuis l’adoption de cette loi, de quinze à vingt exceptions à la compensation.

Je ne reprendrai pas l’intégralité des arguments que j’avais développés – en vain ! – à l’occasion de la première lecture du PLFSS par votre assemblée. Je soulignerai simplement que le Gouvernement a mis à profit l’élaboration de cet article pour travailler son objectif de retour à l’équilibre de la sécurité sociale.

C’est la raison pour laquelle tant le présent PLFSS que le projet de loi de finances pour 2020 prévoient de revenir sur les transferts de recettes qui avaient été décidés l’an dernier dans une perspective de retour à l’équilibre. Ainsi, les transferts de ressources à la Caisse d’amortissement de la dette sociale (Cades), d’une part, pour apurer la dette, et à l’État, d’autre part, pour participer au financement des mesures d’exonération, sont annulés, ce qui représente 3 milliards d’euros à compter de 2020.

Par ailleurs, en 2019 comme en 2020, les allégements généraux sont intégralement compensés à la sécurité sociale, qui reçoit à ce titre une fraction de TVA. En outre, 5,1 milliards d’euros du budget général sont affectés à la compensation à l’euro près des exonérations ciblées, puisque les mesures non compensées concernent la suppression d’une disposition relative à la modulation du taux de CSG et l’exonération de cotisations sociales sur les heures supplémentaires.

Pour les raisons que j’avais déjà invoquées en première lecture, j’émets un avis défavorable sur les deux amendements de suppression de l’article et, par anticipation, sur les amendements suivants.

M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 111 et 186.

(Les amendements ne sont pas adoptés.)

M. le président. Je suis saisi de six amendements faisant l’objet d’une discussion commune.

L’amendement n° 112, présenté par M. Antiste, Mme Jasmin, MM. Todeschini et Lalande, Mme G. Jourda, M. Duran, Mmes Taillé-Polian, Monier et Artigalas et MM. Jomier et Temal, est ainsi libellé :

Alinéas 1 à 13

Supprimer ces alinéas.

La parole est à M. Maurice Antiste.

M. Maurice Antiste. Au travers de l’article 3, le Gouvernement entérine la non-compensation à la sécurité sociale des conséquences des décisions qu’il prend.

Les compensations de pertes de recettes ou de transferts de charges entre l’État et la sécurité sociale sont pourtant régies par le principe de « compensation intégrale ». Depuis 2017, des entorses à cette règle ont été observées. Par exemple, le crédit d’impôt sur la taxe sur les salaires (CITS) n’a pas fait l’objet d’une compensation à la sécurité sociale en 2018.

Pour 2020, les pertes de recettes non compensées à la sécurité sociale s’élèveraient à un montant estimé à 3,5 milliards d’euros : 1,2 milliard d’euros d’exonération de cotisations sociales sur les heures supplémentaires, 1,5 milliard d’euros de baisse de la CSG pour les retraités gagnant moins de 2 000 euros par mois et une diminution de 800 millions d’euros du forfait social.

Par conséquent, l’article 3 prive la sécurité sociale de 3,5 milliards d’euros de ressources qui devraient lui revenir, ce qui n’est pas acceptable. C’est pourquoi le présent amendement vise à supprimer les alinéas de l’article relatifs à cette non-compensation.

M. le président. Les quatre amendements suivants sont identiques.

L’amendement n° 13 est présenté par M. Vanlerenberghe, au nom de la commission.

L’amendement n° 70 rectifié est présenté par Mme N. Delattre, M. Corbisez, Mme Costes, MM. Dantec et Guérini, Mmes Guillotin, Jouve et Laborde et MM. Léonhardt et Requier.

L’amendement n° 131 est présenté par MM. Daudigny et Kanner, Mmes Féret, Grelet-Certenais et Jasmin, M. Jomier, Mmes Lubin, Meunier et Rossignol, M. Tourenne, Mmes Van Heghe et Artigalas, MM. Leconte, Montaugé, Sueur, Antiste et Bérit-Débat, Mmes Blondin, Bonnefoy et Conconne, MM. Courteau, Duran, Fichet et Gillé, Mmes Harribey et G. Jourda, M. Lalande, Mmes Lepage, Monier, Perol-Dumont, Préville et Taillé-Polian, MM. Temal, Tissot et les membres du groupe socialiste et républicain et apparentés.

L’amendement n° 187 est présenté par Mmes Cohen, Apourceau-Poly, Gréaume, Lienemann et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.

Ces quatre amendements sont ainsi libellés :

Alinéas 10 à 13

Supprimer ces alinéas.

La parole est à M. le rapporteur général, pour présenter l’amendement n° 13.

M. Jean-Marie Vanlerenberghe, rapporteur général de la commission des affaires sociales. Cet amendement tend à supprimer les mesures de non-compensation prévues à l’article 3, pour les raisons qui ont déjà été longuement exposées.

M. le président. La parole est à Mme Véronique Guillotin, pour présenter l’amendement n° 70 rectifié.

Mme Véronique Guillotin. Je partage l’ensemble des arguments qui ont été développés par mes collègues.

Dans le contexte actuel, cette non-compensation est un mauvais signal envoyé aux professionnels de santé. Alors qu’ils subissent les affres des restrictions budgétaires, ils voient s’éloigner encore, malgré les efforts accomplis, la perspective du retour à l’équilibre.

M. le président. La parole est à M. Yves Daudigny, pour présenter l’amendement n° 131.

M. Yves Daudigny. Nous souhaitons prendre le temps de rappeler, une dernière fois, de quoi il s’agit.

L’article 3 du PLFSS prévoit que les pertes de recettes résultant de l’avancement au 1er janvier 2019 de l’exonération de cotisations sociales des heures supplémentaires et celles liées à la création d’un taux de CSG intermédiaire de 6,6 % ne feront pas l’objet d’une compensation à la sécurité sociale par le budget de l’État.

Ces deux mesures représentent une perte de recettes de près de 3 milliards d’euros en 2019 pour la sécurité sociale, ce qui explique en grande partie le retournement de situation financière et la reprise de la dégradation des comptes sociaux.

L’exonération de forfait social pour les entreprises de moins de 250 salariés versant de l’intéressement ou de la participation, mesure décidée dans le cadre de la loi relative à la croissance et la transformation des entreprises, dite loi Pacte, entraîne une perte de recettes de 500 millions d’euros pour la branche vieillesse.

Nous sommes résolument opposés à cette rupture avec la loi de 1994, non par nostalgie d’un passé idéalisé, mais parce que cette doctrine nouvelle affirmée et mise en œuvre par le Gouvernement est destructrice, à nos yeux, du pacte de la sécurité sociale, fondé sur la solidarité des bien-portants avec les malades, des jeunes avec les retraités, de toute la société avec les familles. La pérennité de cette solidarité repose sur l’autonomie financière de la sécurité sociale. Aujourd’hui, cette autonomie financière est attaquée, et l’ensemble de la sécurité sociale est déstructuré.