M. Pierre Laurent. Cet amendement s’inscrit dans la même logique que celui que nous avons présenté sur l’impact des contrats de désendettement et de développement dans la comptabilisation de l’APD. En l’occurrence, il s’agit de la comptabilisation des instruments du secteur privé (ISP).

En 2017, l’AFD déclarait : « Pour démontrer sa volonté de construire des ponts entre public et privé, l’AFD compte doubler ses financements alloués au secteur privé d’ici 2020. Avec comme objectif d’atteindre le cap de 50 % de ses financements vers des acteurs dits “non souverains” qui incluent plus globalement collectivités territoriales, ONG, banques, fonds d’investissement et entreprises publiques ou privées. » Elle ajoutait : « Une spécificité unique parmi les bailleurs internationaux. »

C’est précisément cette spécificité unique que nous mettons en question, car la comptabilisation des ISP en APD se fait au détriment de la part des services sociaux de base dans les pays les plus pauvres. Or c’est au contraire vers ces derniers que nous voudrions renforcer notre effort.

Alors que les financements de l’AFD vers le secteur privé ont progressé de 14 à 19 % entre 2016 et 2017, la proportion des financements pour la santé et l’éducation a reculé durant la même période.

Il faut inverser la tendance. Nous ne mettons pas en cause l’existence de relations commerciales mutuellement avantageuses impliquant le secteur privé – bien au contraire –, mais nous ne pensons pas que cette problématique relève de l’APD. Les dispositions actuelles peuvent même fausser nos calculs de progression de l’APD et de son contenu.

M. le président. L’amendement n° 147, présenté par Mme Gréaume, M. P. Laurent et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :

Alinéa 147

Compléter cet alinéa par deux phrases ainsi rédigées :

Toutefois, seule la partie concessionnelle des instruments en appui au secteur privé sont comptabilisés dans le cadre des objectifs budgétaires de l’aide publique au développement solidaire et à la lutte contre les inégalités mondiales tels qu’énoncés dans la loi. Cette comptabilisation se fait sur la base de critères stricts de concessionnalité, les garanties étant exclues de la comptabilisation.

La parole est à M. Pierre Laurent.

M. Pierre Laurent. Il s’agit d’un amendement de repli, qui vise à restreindre notre amendement à la partie concessionnelle des ISP.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Rachid Temal, rapporteur. Si la prise de position de Pierre Laurent est tout à fait louable, l’adoption de ces amendements aurait pour effet d’attenter à la cohérence du texte, que nous avons construite depuis le début sur les dépenses intégrées à l’APD.

Au demeurant, le texte contient déjà des évolutions puisque, suivant en cela la commission, le Sénat a fait le choix de prévoir des objectifs en matière d’aide programmable par pays.

Parce que nous ne souhaitons pas revenir sur la cohérence du texte, nous émettons un avis défavorable sur les deux amendements.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Jean-Yves Le Drian, ministre. Je comprends les préoccupations de Pierre Laurent, mais j’ai déjà eu l’occasion de m’exprimer sur les règles définies par le Comité d’aide au développement de l’OCDE.

Nous considérons que la comptabilisation de l’APD doit respecter les règles définies par l’OCDE. Cela vaut aussi pour la comptabilisation des ISP auxquels vous faites référence.

J’ajoute que cette récente prise en compte des ISP dans la comptabilisation de l’APD française n’a pas conduit à un délaissement de nos autres priorités de développement. La baisse des proportions des financements pour la santé et l’éducation s’explique par une augmentation du volume de l’activité de l’Agence, alors que ces deux secteurs sont d’abord portés par l’activité en subventions.

Au reste, la modification unilatérale des règles généralisées par l’OCDE me paraît difficilement possible. Si l’on voulait reprendre les négociations sur le sujet, il faudrait beaucoup de temps.

Je m’en tiens donc aux références actuelles et j’émets un avis défavorable sur l’amendement.

M. le président. La parole est à M. Pierre Laurent, pour explication de vote.

M. Pierre Laurent. Monsieur le rapporteur, ce qui m’importe davantage que la cohérence du texte, c’est la cohérence de nos politiques ! Nous avons d’ailleurs déposé plusieurs amendements visant à renforcer le contrôle de la cohérence de l’ensemble de nos politiques.

Il convient de savoir ce qui relève à nos yeux de l’APD et quelles sont nos priorités. Nos amendements tendent à renforcer ces priorités et à mettre l’accent sur elles.

Par ailleurs, nous devons envisager de manière cohérente l’ensemble de nos interventions en direction de ces pays, lesquelles ne relèvent pas seulement de l’APD : elles peuvent aussi être l’incidence directe de relations commerciales ou fiscales.

À cet égard, le présent amendement est parfaitement cohérent avec la logique que nous défendons.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 146.

(Lamendement nest pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 147.

(Lamendement nest pas adopté.)

M. le président. L’amendement n° 325, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :

Alinéa 165, seconde phrase et alinéa 169, tableau, dernière colonne, huitième ligne

Remplacer les mots :

Fonds mondial pour l’environnement

par les mots :

Fonds pour l’environnement mondial

La parole est à M. le ministre.

M. Jean-Yves Le Drian, ministre. Il s’agit d’un amendement rédactionnel.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Rachid Temal, rapporteur. Favorable.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 325.

(Lamendement est adopté.)

M. le président. Je suis saisi de trois amendements faisant l’objet d’une discussion commune.

L’amendement n° 193 rectifié, présenté par Mme Poncet Monge, MM. Gontard et Benarroche, Mme Benbassa, MM. Dantec, Dossus, Fernique et Labbé, Mme de Marco, MM. Parigi et Salmon et Mme Taillé-Polian, est ainsi libellé :

Alinéa 167

Rédiger ainsi cet alinéa :

La France encourage la production de données désagrégées par âge et par sexe et les indicateurs de résultats genrés, au travers de son dialogue politique avec les États partenaires et par un appui technique et financier. Les données sont désagrégées par sexe et par âge, afin de permettre la mesure de l’impact de l’action de la France en matière de lutte contre les inégalités entre les femmes et les hommes, les filles et les garçons.

La parole est à Mme Raymonde Poncet Monge.

Mme Raymonde Poncet Monge. Une aide publique au développement cohérente, performante et efficace dépend aussi de la production de données concernant les populations visées par les différents projets que nous finançons. C’est la collecte des données et leur analyse qui permettent, pour toutes les institutions et les acteurs impliqués, de définir les politiques publiques efficientes et adaptées aux besoins.

Nous ne pouvons souffrir de lacunes dans la production de ces données. Or, en l’état actuel du texte, le CPG ne fait mention que d’une seule donnée désagrégée par sexe. L’absence de données par âge empêche de mesurer les résultats d’une politique publique efficace, notamment envers les filles et les enfants.

C’est pourquoi nous proposons d’ajouter l’âge afin d’obtenir des données désagrégées par âge et par sexe, ainsi qu’une prise en compte systématique de l’âge dans les indicateurs de résultats. Cela permettrait de rendre visibles les enjeux liés à la fois au genre et à l’âge, donc de définir des politiques publiques plus adaptées.

La prise en compte de l’âge permettra également de contribuer à la protection de centaines de millions d’enfants qui ne sont pas enregistrés à la naissance, ce qui les prive d’accès à l’identité, donc à l’ensemble de leurs droits. Par exemple, une fille doit pouvoir prouver son âge lorsque le cadre légal la protège du mariage précoce et forcé.

Par conséquent, l’importance de notre amendement est double. Il s’agit, d’une part, d’orienter efficacement et de manière pertinente les politiques publiques, et, d’autre part, de participer à la protection des enfants, des jeunes et des filles en particulier.

M. le président. L’amendement n° 8 rectifié, présenté par Mme Doineau, MM. Le Nay, Longeot, de Belenet et Kern, Mme Dindar, M. Hingray, Mme Saint-Pé, MM. Canévet et Levi, Mmes Gatel et Perrot, MM. Folliot, Cigolotti et Chauvet, Mme Férat, M. Duffourg, Mme Billon, M. P. Martin, Mme Jacquemet et M. Delcros, est ainsi libellé :

Alinéa 167

1° Au début, insérer une phrase ainsi rédigée :

La France encourage la production de données désagrégées par âge et par sexe, au travers de son dialogue politique avec les États partenaires et à travers un appui technique et financier.

2° Supprimer les mots :

Lorsqu’elles sont disponibles,

3° Après le mot :

sexe

insérer les mots :

et par âge

4° Compléter cet alinéa par les mots :

, les filles et les garçons

La parole est à M. Jacques Le Nay.

M. Jacques Le Nay. Cet amendement a exactement le même esprit, mais sa rédaction est plus synthétique.

M. le président. L’amendement n° 285, présenté par Mme Carlotti, MM. Temal, Kanner, Todeschini et Roger, Mmes Conway-Mouret et G. Jourda, MM. M. Vallet, Vallini, Vaugrenard, Antiste, Cozic et P. Joly, Mmes Lepage et Monier, MM. Stanzione, Tissot et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :

Alinéa 167

Après le mot :

sexe

insérer les mots :

et par âge

La parole est à M. Gilbert Roger.

M. Gilbert Roger. L’amendement est défendu.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Rachid Temal, rapporteur. Je crois que chacun est favorable au fait de désagréger toutes les données par sexe et par âge.

Les trois amendements sont quasiment identiques, mais nous émettons un avis défavorable sur les amendements nos 193 rectifié et 8 rectifié, au profit de l’amendement n° 285, dont le dispositif nous paraît beaucoup plus souple, donc plus facile à mettre en place.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Jean-Yves Le Drian, ministre. Sur le principe, je trouve que la rédaction de l’amendement n° 285 est la plus compacte et la plus lisible. Le seul problème est qu’il n’est pas possible aujourd’hui de désagréger les données par âge.

Je n’ai rien contre les vœux et les pétitions de principe, mais ce n’est techniquement pas possible ! Je ne souhaite pas que les futurs ministres chargés du développement soient redevables d’une disposition qu’ils ne peuvent pas mettre en œuvre.

Du fait de cette impossibilité, l’avis du Gouvernement est défavorable.

Mme Raymonde Poncet Monge. Je retire l’amendement n° 193 rectifié !

M. le président. L’amendement n° 193 rectifié est retiré.

M. Jacques Le Nay. Je retire l’amendement n° 8 rectifié !

M. le président. L’amendement n° 8 rectifié est retiré.

La parole est à M. le rapporteur.

M. Rachid Temal, rapporteur. Monsieur le ministre, l’alinéa 167 débute par les mots « lorsqu’elles sont disponibles ». L’idée est bien de réaliser ce travail seulement quand cela est possible !

Je crois que nous pouvons tous ici nous retrouver sur cette rédaction.

M. le président. La parole est à M. le ministre.

M. Jean-Yves Le Drian, ministre. Le Gouvernement s’en remet à la sagesse du Sénat, monsieur le président !

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 285.

(Lamendement est adopté.)

M. le président. L’amendement n° 286, présenté par Mmes Lepage et Carlotti, MM. Temal, Kanner, Todeschini et Roger, Mmes Conway-Mouret et G. Jourda, MM. M. Vallet, Vallini, Vaugrenard, Antiste, Cozic et P. Joly, Mme Monier, MM. Stanzione, Tissot et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :

Alinéa 169, tableau, cinquième colonne, onzième ligne

Compléter cette ligne par quatre alinéas ainsi rédigés :

– Volume de financement ayant pour objectif le libre et égal accès aux services, notamment les services sociaux de base tels que la santé sexuelle et reproductive

- Volume de financement ayant pour objectif d’assurer la participation effective des femmes et des filles dans les espaces de décisions économiques, politiques et sociaux

- Nombre de personnes dont l’accès aux services sociaux de base tels que la santé sexuelle et reproductive a été amélioré grâce à l’appui de la France, avec des données désagrégées par sexe et par âge

- Nombre de personnes dont la participation effective dans les espaces de décisions économiques, politiques et sociaux, formels et informels, a été amélioré grâce à l’appui de la France, avec des données désagrégées par sexe et âge

La parole est à Mme Claudine Lepage.

Mme Claudine Lepage. L’évaluation de notre politique d’APD implique la mise en place d’indicateurs adaptés.

Mieux évaluer, c’est permettre une vision au plus près de la réalité de terrain, et donc adapter notre politique en fonction des besoins réels. Cet amendement vise donc à la mise en place d’indicateurs plus précis.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Rachid Temal, rapporteur. Si l’on peut comprendre et même soutenir la démarche proposée, on peut aussi reconnaître que l’alinéa prévoit déjà un certain nombre d’indicateurs – je crois, chère collègue, que vous l’admettrez avec nous.

Aller plus loin semble compliqué. Je crois, monsieur le ministre, que ce ne serait pas forcément faisable.

L’avis de la commission est donc défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Jean-Yves Le Drian, ministre. Défavorable.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 286.

(Lamendement nest pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix, modifié, l’ensemble constitué de l’article 1er et du rapport annexé.

(Larticle 1er et le rapport annexé sont adoptés.)

Article 1er et rapport annexé
Dossier législatif : projet de loi de programmation relatif au développement solidaire et à la lutte contre les inégalités mondiales
Article additionnel après l'article 1er - Amendement n° 114

Articles additionnels après l’article 1er

M. le président. L’amendement n° 113, présenté par Mme Gréaume, M. P. Laurent et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :

Après l’article 1er

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I. – L’article 235 ter ZD du code général des impôts est ainsi modifié :

1° Le I est ainsi modifié :

a) Au premier alinéa, les mots : « que son acquisition donne lieu à un transfert de propriété, au sens de l’article L. 211-17 du même code, » sont supprimés ;

b) Au deuxième alinéa, après les mots : « s’entend de », sont insérés les mots : « l’exécution d’un ordre d’achat ou, à défaut, de » ;

2° Au premier alinéa du VII, après les mots : « et effectue la livraison du titre, », sont insérés les mots : « ou s’il n’y a pas de livraison du titre, » ;

3° La dernière phrase du VIII est ainsi rédigée :

« Un décret précise, que l’acquisition donne lieu ou non à un transfert de propriété au sens de l’article L. 211-17 dudit code, la nature de ces informations, qui incluent le montant de la taxe due au titre de la période d’imposition, les numéros d’ordre quand ils existent des opérations concernées, la date de leur réalisation, la désignation, le nombre et la valeur des titres dont l’acquisition est taxable et les opérations exonérées, réparties selon les catégories d’exonération mentionnées au II. »

II. – Le I s’applique aux acquisitions réalisées à compter du 1er janvier 2020.

La parole est à M. Pierre Laurent.

M. Pierre Laurent. Cet amendement concerne la taxe sur les transactions financières (TTF), dont on sait qu’elle rapporte aujourd’hui beaucoup d’argent.

Les amendements de la commission ont augmenté la part de la TTF consacrée au financement de l’APD, mais nous pensons que l’on peut encore faire mieux.

Le présent amendement vise à rétablir une disposition qui était prévue dans la loi de finances pour 2017, laquelle prévoyait l’élargissement de l’assiette de la TTF aux transactions intrajournalières.

À l’époque, on chiffrait entre 2 et 4 milliards d’euros annuels le rendement estimé de cette mesure, prévue par la directive européenne sur une TTF continentale avant d’être abandonnée à la suite de la pression de certains États, laquelle a conduit à abandonner cet objectif – je crois d’ailleurs savoir qu’il y avait, parmi ces pays, la Grande-Bretagne, qui, depuis, a quitté l’Union européenne.

Nous pensons que, pour financer l’APD et aller vers une programmation plus ambitieuse, il serait extrêmement utile de rétablir cette taxation des transactions intrajournalières, car la conséquence en serait un doublement probable du rendement de la TTF.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Rachid Temal, rapporteur. Cet amendement soulève deux questions.

Premièrement, il faut rappeler que, à la suite du travail de la commission, la part de la TTF affectée à l’APD a doublé, passant de 30 % à 60 %. C’est donc 1,7 milliard d’euros qui est fléché pour l’APD.

Je crois que c’est une avancée importante, et je le dis sous le contrôle du rapporteur de la commission des finances. Celle-ci a nécessité de longues discussions et le Sénat a réalisé un important travail collectif sur le sujet.

Deuxièmement, des questions se posent sur la question des transactions journalières, notamment sur l’absence de transfert de propriété.

À ce stade, pour ne pas ouvrir de débat sur la question juridique, nous préférons émettre un avis défavorable et saluer l’avancée importante du Sénat sur la question de la TTF.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Jean-Yves Le Drian, ministre. Défavorable.

M. le président. La parole est à M. Pierre Laurent, pour explication de vote.

M. Pierre Laurent. Nous avons soutenu la proposition de la commission d’affecter 60 % de la TTF, conformément, d’ailleurs, à l’objectif initial de celle-ci. Nous estimons, par conséquent, qu’une telle décision ne relève pas de l’exploit…

Nous savons qu’il faut encore se battre aujourd’hui pour que les chiffres soient respectés. Cependant, je n’entends pas que l’on se prive de recettes supplémentaires, qui sont à notre portée et pourraient résoudre de nombreux problèmes liés à la modestie de notre programmation budgétaire.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 113.

(Lamendement nest pas adopté.)

Article additionnel après l'article 1er - Amendement n° 113
Dossier législatif : projet de loi de programmation relatif au développement solidaire et à la lutte contre les inégalités mondiales
Article additionnel après l'article 1er - Amendements n° 300 rectifié bis, n° 142 rectifié, n° 216, n° 189 rectifié et n° 217

M. le président. L’amendement n° 114, présenté par Mme Gréaume, M. P. Laurent et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :

Après l’article 1er

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Au V de l’article 235 ter ZD du code général des impôts, le taux : « 0,3 % » est remplacé par le taux : « 0,5 % ».

La parole est à M. Pierre Laurent.

M. Pierre Laurent. Dans le même esprit que le précédent, cet amendement vise à augmenter le taux de prélèvement de la TTF de 0,3 à 0,5 %.

Nous ne sommes pas les seuls à le souhaiter : une proposition de loi déposée par le député UDI Christophe Naegelen va dans le même sens. La question est donc sur la table. Une telle mesure apporterait évidemment des recettes supplémentaires extrêmement importantes et utiles.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Rachid Temal, rapporteur. Encore une fois, au nom de l’accord dynamique que nous avons trouvé pour accroître les recettes liées à la TTF, nous proposons de ne pas en modifier le taux.

L’avis de la commission est donc défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Jean-Yves Le Drian, ministre. Défavorable.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 114.

(Lamendement nest pas adopté.)

Article additionnel après l'article 1er - Amendement n° 114
Dossier législatif : projet de loi de programmation relatif au développement solidaire et à la lutte contre les inégalités mondiales
Article additionnel après l'article 1er - Amendement n° 218

M. le président. Je suis saisi de cinq amendements faisant l’objet d’une discussion commune.

L’amendement n° 300 rectifié bis, présenté par MM. Gontard et Benarroche, Mme Benbassa, MM. Dossus, Fernique et Labbé, Mme de Marco, M. Parigi, Mme Poncet Monge, M. Salmon et Mme Taillé-Polian, est ainsi libellé :

Après l’article 1er

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Dans le cadre de leur action extérieure, les acteurs publics français, qui exercent une influence à l’étranger, ainsi que les acteurs privés qui concourent à l’exercice de cette influence, ont l’obligation de prévenir les atteintes graves envers les droits humains et les libertés fondamentales, la santé et la sécurité des personnes ainsi que l’environnement, résultant directement ou indirectement des activités d’organismes publics ou privés français ou des activités des sous-traitants, des fournisseurs ou des bénéficiaires avec lesquels ils entretiennent une relation établie.

La responsabilité des acteurs publics et privés, qui exercent une influence à l’étranger, dans les conditions ci-dessus définies, est engagée et l’oblige à réparer le préjudice que l’exécution de cette obligation aurait permis d’éviter. Est présumée responsable la personne morale qui, dans le cadre de ses activités, de celles de ses filiales, de ses partenaires, bénéficiaires ou de ses sous-traitants, ne démontre pas avoir pris toutes les mesures nécessaires et raisonnablement en son pouvoir en vue de prévenir ou d’empêcher la survenance d’un dommage ou d’un risque certain de dommage envers les droits humains et les libertés fondamentales, la santé et la sécurité des personnes ainsi que l’environnement.

La parole est à Mme Raymonde Poncet Monge.

Mme Raymonde Poncet Monge. Cet amendement vise à inscrire dans le corps de la loi le devoir de vigilance des acteurs français exerçant une influence à l’étranger, et à y associer les mécanismes qui permettent d’assurer son efficacité.

Ce devoir fait partie intégrante de la responsabilité sociétale des acteurs publics et privés français. Il a d’ailleurs été inscrit comme tel dans le CPG.

Rappelons également que, afin d’assurer la cohérence de notre action de coopération internationale, ce devoir concerne l’ensemble des acteurs français publics et privés ayant une influence à l’étranger.

L’importance d’appliquer cette obligation au secteur privé était encore soutenue par le secrétaire d’État Jean-Baptiste Lemoyne le 18 février 2020 devant le Conseil national du développement et de la solidarité internationale (CNDSI).

Depuis l’entrée en vigueur de la loi du 27 mars 2017 relative au devoir de vigilance des sociétés mères et des entreprises donneuses d’ordre, trois entreprises françaises ont été assignées en justice pour de telles atteintes : EDF, au Mexique ; Casino, pour son rôle dans la déforestation en Amazonie ; Total, dans plusieurs affaires. La survenance encore trop fréquente de ces affaires prouve que nous devons modifier la loi afin d’accompagner nos entreprises à l’étranger dans le changement de leurs pratiques.

Nous proposons d’inscrire dans la loi l’obligation pour ces acteurs de prévenir les atteintes graves, mais aussi de faciliter l’identification de ces atteintes par les autorités judiciaires compétentes et la réparation des préjudices qui ont découlé du manquement à l’obligation de vigilance.

Les organisations non gouvernementales (ONG) nous ont alertés sur l’extrême difficulté que rencontrent les organisations de la société civile, dont les moyens sont limités, pour réunir les éléments nécessaires à la démonstration de la responsabilité de ces acteurs.

Pour remédier à cette faiblesse dans la prévention des atteintes, nous proposons le mécanisme suivant : une personne morale qui ne démontre pas avoir pris toutes les mesures nécessaires et en son pouvoir afin de prévenir une atteinte grave est présumée responsable et, par conséquent, obligée de réparer le préjudice que l’exécution de sa vigilance aurait permis d’éviter.

Pour ces organismes, dont les services juridiques et les moyens financiers sont largement supérieurs à ceux des organisations de la société civile, ce mécanisme ne représenterait pas une charge lourde et permettrait une mise en œuvre efficace de la prévention de dommages importants, donc une assurance de la qualité de notre action de coopération internationale.

M. le président. L’amendement n° 142 rectifié, présenté par Mme Gréaume, M. P. Laurent et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :

Après l’article 1er

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

La politique de développement solidaire et de lutte contre les inégalités mondiales s’accompagne d’une obligation de vigilance pour les acteurs publics français qui exercent une influence à l’étranger, ainsi que les acteurs privés qui concourent à l’exercice de cette influence. Lorsqu’un acteur public français est témoin d’une atteinte grave envers les droits humains et les libertés fondamentales, les normes sociales telles qu’édictées par l’Organisation internationale du travail, ou d’une mise en danger de la santé et de la sécurité des personnes ou de l’environnement, résultant des activités des organismes publics et des sociétés qu’il contrôle, directement ou indirectement, ainsi que des activités des sous-traitants, des fournisseurs ou des bénéficiaires avec lesquels est entretenue une relation établie, il est tenu de le signaler à la justice.

Ce devoir de vigilance s’accompagne d’une veille toute particulière des opérateurs de la politique de développement solidaire et de lutte contre les inégalités mondiales quant au choix des opérateurs par lesquels et pour lesquels ils s’engagent, notamment en matière de respect du droit fiscal.

La parole est à M. Pierre Laurent.

M. Pierre Laurent. Cet amendement va exactement dans le même sens : il tend à inscrire une obligation de vigilance pour tous les acteurs intervenant dans le domaine de l’aide publique au développement.

Comme cela vient d’être dit, cette question est extrêmement importante. Nous savons, par exemple, que l’AFD et sa filiale Proparco, ainsi que Bpifrance, sont souvent visées dans leurs activités de soutien à l’exportation, qui encouragent des modèles contraires aux objectifs centraux de l’Organisation des Nations unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO), parce qu’elles desservent des modèles agricoles dont les pays ont besoin pour répondre à leurs besoins alimentaires, privilégiant des objectifs d’exportation.

Les exemples sont très nombreux. En République démocratique du Congo, Proparco a financé pendant plus de huit ans – entre 2012 et 2020 – le mégaprojet d’huile de palme Feronia, sur une superficie équivalente à la taille de la Belgique.

D’autres cas sont sur la sellette : Total, en Ouganda ; EDF, au Mexique ; Casino, qui s’approvisionne en viande de bœuf élevée sur des zones déforestées en Amazonie. On pourrait encore citer d’autres exemples.

Grâce à l’inscription dans la loi de ce devoir de vigilance, les projets soutenus seront conformes aux objectifs que nous y avons fait figurer.