M. le président. L’amendement n° 1142 rectifié bis est retiré.

En conséquence, le sous-amendement n° 2257 n’a plus d’objet.

Je mets aux voix l’article 8.

(Larticle 8 est adopté.)

Article 8
Dossier législatif : projet de loi portant lutte contre le dérèglement climatique et renforcement de la résilience face à ses effets
Article additionnel après l'article 9 - Amendement n° 1404 rectifié

Article 9

Au plus tard le 1er janvier 2023, l’Agence de l’environnement et de la maîtrise de l’énergie évalue la capacité de sanction prévue à l’article L. 541-15-15 du code de l’environnement et des actions prévues dans le cadre de la filière à responsabilité élargie du producteur de respecter l’objectif de réduction des déchets issus des papiers à usage graphique fixé dans le cahier des charges de l’éco-organisme agréé pour les produits mentionnés au 3 de l’article L. 541-10-1 du même code.

M. le président. Je suis saisi de trois amendements faisant l’objet d’une discussion commune.

L’amendement n° 152, présenté par Mme Varaillas, MM. Lahellec, Gay et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :

Rédiger ainsi cet article :

L’article L. 541-15-15 du code de l’environnement est complété par un paragraphe ainsi rédigé :

« … – À compter du 1er janvier 2022, la distribution à domicile d’imprimés papier ou cartonnés à visée commerciale non adressés, lorsque l’autorisation de les recevoir ne fait pas l’objet d’une mention expresse et visible sur la boîte aux lettres ou le réceptacle du courrier, est interdite. La même interdiction s’applique à la distribution au siège social d’une personne morale.

« Le non-respect de ces interdictions est puni de l’amende prévue pour les contraventions de cinquième classe. »

La parole est à Mme Marie-Claude Varaillas.

Mme Marie-Claude Varaillas. Par cet amendement, nous souhaitons mettre fin à la distribution d’imprimés publicitaires dans les boîtes aux lettres, hormis les cas où une étiquette autorisant cette distribution est apposée sur la boîte, remplaçant ainsi le principe du Stop Pub par celui du Oui Pub.

Il s’agit d’une demande très précise de la Convention citoyenne, qui, comme d’autres, a été écartée au profit d’une simple expérimentation sur une partie réduite de la population.

M. Philippe Pemezec. Que représentent ces personnes ?

Mme Marie-Claude Varaillas. En effet, l’expérimentation, prévue pour une durée de trois ans, ne doit pas concerner plus de 10 % de la population nationale.

Pourtant, mes chers collègues, chaque année, près de 18 milliards d’imprimés transitent dans nos boîtes aux lettres. Cela représente 800 000 tonnes de papier, soit 30 kilogrammes par foyer en moyenne.

La distribution de prospectus publicitaires est un non-sens écologique. La fabrication de papier est très consommatrice d’eau et d’énergie ; elle favorise la déforestation. (Mme Sophie Primas le conteste.)

Au surplus, les prospectus publicitaires étant lus par moins de 15 % des destinataires, cette méthode semble inopérante d’un point de vue commercial.

Certes, la loi AGEC a apporté des avancées en la matière, avec l’expérimentation du dispositif Stop Pub. Mais si les citoyens souhaitent aller plus loin que ces dispositions, quel est le problème ?

À l’Assemblée nationale, l’argument de l’emploi a été invoqué pour justifier l’opposition à tout dispositif de limitation de la publicité papier. Dois-je rappeler de quel type d’emplois il s’agit le plus souvent ? Celui de retraités pauvres, qui doivent continuer de travailler pour vivre dignement. (Mme Sophie Primas proteste.)

M. Philippe Pemezec. Avec vous, ils seront encore plus pauvres !

Mme Marie-Claude Varaillas. Alors allons plus vite, et augmentons les pensions : ce sera socialement plus juste !

Nous estimons, pour conclure, qu’il est temps d’en finir avec ce gaspillage, et qu’il convient de passer au Oui Pub, laissant à chacun la liberté, et je dirais même la responsabilité, d’affirmer sa disponibilité pour ce type de démarchage.

M. le président. L’amendement n° 356, présenté par MM. Dossus, Dantec, Fernique, Labbé, Salmon et les membres du groupe Écologiste – Solidarité et Territoires, est ainsi libellé :

Rédiger ainsi cet article :

La sous-section 5 de la section 2 du chapitre Ier du titre VIII du livre V du code de l’environnement est complétée par un article L. 581-… ainsi rédigé :

« Art. L. 581-…. – À compter du 1er janvier 2023, la distribution à domicile d’imprimés en plastique, en papier ou cartonnés à visée commerciale non adressés, lorsque l’autorisation de les recevoir ne fait pas l’objet d’une mention expresse et visible sur la boîte aux lettres ou le réceptacle du courrier, est interdite. Le non-respect de cette interdiction est passible d’une amende dont le montant est fixé par un décret en Conseil d’État. »

La parole est à M. Thomas Dossus.

M. Thomas Dossus. Dans sa version initiale, cet article prévoyait une expérimentation du Oui Pub dans les territoires. Avec ce dispositif, la logique du Stop Pub, actuellement en vigueur, est inversée. Ainsi, seules les personnes ayant indiqué leur consentement sur leur boîte aux lettres à l’aide d’un petit autocollant pourraient recevoir de la publicité.

Nous jugions cette version initiale assez timorée, mais la commission a encore réduit la portée. Désormais, l’article 9 se borne à confier à l’Ademe la réalisation d’un rapport, attendu dans un an et demi, visant à évaluer la possibilité de prévoir des sanctions pour le cas où la filière des imprimés papier ne respecterait pas les objectifs de réduction des déchets.

Il paraît assez étonnant que le Sénat se contente d’une demande de rapport. Cette timidité soudaine est d’autant plus surprenante que l’article initial proposait une expérimentation pour les collectivités volontaires uniquement. Le Sénat qui retire un droit d’expérimentation aux collectivités, ce n’est pas banal ! On s’éloigne de l’écologie de l’intelligence territoriale chère à Mme la rapporteure.

Bref, dire que l’article a été vidé de sa substance est un euphémisme. Nous proposons donc de remédier à cette situation.

En France, plus de 18 milliards de tracts publicitaires non sollicités sont distribués chaque année, ce qui représente 800 000 tonnes de papier, soit 30 kilogrammes de prospectus par an et par boîte aux lettres. La majorité de ces tracts finissent à la poubelle sans même avoir été lus. (Mme Sophie Primas manifeste son désaccord.)

C’est un gâchis invraisemblable, qui frise l’indécence. Combien d’arbres abattus, combien de processus de recyclage inutiles mis en œuvre ? Combien de déchetteries encombrées, combien de véhicules, de moyens logistiques polluants déployés, le tout pour distribuer des documents qui ne seront pas lus ?

Le consentement à recevoir des publicités ciblées est désormais exigé sur internet. La tendance est à l’extension du consentement à recevoir de la publicité à l’ensemble des domaines de nos vies, y compris dans l’univers physique.

Il est temps aujourd’hui, ici et maintenant, de prendre un acte fort. C’est pourquoi nous vous proposons de généraliser le Oui Pub dès le 1er janvier 2023. Cela laisse un an et demi à la filière pour se réorienter vers d’autres modèles plus durables. (Protestations sur les travées du groupe Les Républicains.)

Il s’agit d’une vraie mesure, d’une vraie politique, qui transforme radicalement l’article 9 et lui donne les moyens d’atteindre enfin ses objectifs.

M. le président. L’amendement n° 2200, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :

Rédiger ainsi cet article :

I. – À titre expérimental et pour une durée de trois ans, la distribution à domicile d’imprimés en plastique, en papier ou cartonnés à visée commerciale non adressés, lorsque l’autorisation de les recevoir ne fait pas l’objet d’une mention expresse et visible sur la boîte aux lettres ou le réceptacle du courrier, est interdite. Sont exclus de cette expérimentation les échantillons de presse. Cette expérimentation a pour but d’évaluer l’impact environnemental d’une telle mesure, notamment sur la production et le traitement des déchets de papier, ses conséquences sur l’emploi, sur les secteurs d’activité concernés et sur les comportements des consommateurs, ainsi que ses éventuelles difficultés de mise en œuvre. Elle est mise en place dans des collectivités territoriales ou des groupements de collectivités territoriales ayant défini un programme local de prévention des déchets ménagers et assimilés en application de l’article L. 541-15-1 du code de l’environnement. La liste de ces collectivités et groupements, dont la population totale ne doit pas excéder 10 % de la population française totale, est définie par décret, sur la base des candidatures exprimées. Le cas échéant, la sélection est opérée en tenant compte de la diversité des territoires.

Les collectivités territoriales et groupements de collectivités territoriales mettant en place l’expérimentation prévue au présent I peuvent définir des secteurs exclus du champ de cette expérimentation, en particulier le secteur culturel et la presse.

Six mois avant le terme de cette expérimentation, le Gouvernement remet au Parlement un rapport d’évaluation de l’expérimentation. Ce rapport intègre également une étude comparée de l’impact environnemental des campagnes publicitaires par voie de distribution d’imprimés et de celles effectuées par voie numérique.

Les modalités d’application du présent article sont déterminées par décret en Conseil d’État.

II. – Au plus tard le 1er juin 2022, le Gouvernement remet au Parlement un rapport évaluant la mise en œuvre de la sanction prévue à l’article L. 541-15-15 du code de l’environnement et son impact sur la distribution d’imprimés publicitaires non adressés.

La parole est à Mme la ministre.

Mme Barbara Pompili, ministre. La commission a vidé l’article 9 de son essence même, à savoir l’expérimentation du dispositif Oui Pub. Je ne peux pas être favorable à la suppression d’une mesure proposée par la Convention citoyenne pour le climat. Au contraire, il me semble raisonnable d’adopter une telle mesure, car elle est le prolongement des dispositions votées dans le cadre de la loi anti-gaspillage visant à renforcer les sanctions prévues en cas de non-respect du Stop Pub.

Cela a déjà été dit –, en 2019, ce sont plus de 894 000 tonnes d’imprimés publicitaires sans adresse qui ont été distribués, soit 30 kilogrammes par foyer et par an, souvent jetés sans même avoir été lus. Le bilan s’élève à 736 000 tonnes de CO2. L’objectif de cet article est de lutter contre ce gaspillage.

Par ailleurs, une enquête de l’Ademe indique que 70 % des répondants se déclarent « très » ou « plutôt ouverts » à ce qu’un système inverse au Stop Pub soit testé et appliqué dans leur commune.

Je comprends le souhait de voir d’abord s’appliquer le renforcement des sanctions prévues en cas de non-respect du Stop Pub introduit par la loi anti-gaspillage, mais cela n’est pas incompatible avec le fait de commencer à expérimenter le Oui Pub.

En effet, l’Assemblée nationale a souhaité encadrer l’expérimentation Oui Pub. Celle-ci ne pourra pas concerner plus de 10 % de la population française, afin de ne pas généraliser la mesure avant qu’elle ait pu être évaluée, notamment au regard du Stop Pub. C’est le principe même de l’expérimentation.

C’est d’ailleurs la raison pour laquelle j’émettrai un avis défavorable sur les amendements nos 152 et 356, qui visent à instaurer d’emblée une interdiction en généralisant le Oui Pub, ce qui revient, de fait, à effacer cette expérimentation.

A contrario, le rétablissement de l’article 9 permettra bien d’observer l’effet du renforcement des sanctions prévues en cas de non-respect du Stop Pub tout en expérimentant le Oui Pub de manière très circonscrite et dans les collectivités volontaires – j’y insiste.

N’attendons pas pour expérimenter ! Sinon, nous perdrons potentiellement plusieurs années. Nous avons d’autant plus besoin de tirer les enseignements de cette expérimentation que les implications environnementales, économiques et sociétales d’une telle mesure font débat.

Dans une enquête récente réalisée par l’Ademe avec le concours du Cercle national du recyclage (CNR), onze collectivités de différents types – urbaine, périurbaine, rurale, touristique – ont indiqué leur intérêt pour l’expérimentation du Oui Pub. Puisqu’on me demande souvent des exemples, permettez-moi de citer quelques-unes de ces collectivités, qui représentent au total 1,8 million d’habitants : la métropole de Grenoble, la communauté urbaine de Dunkerque ou le syndicat Côte sud des Landes.

Telles sont les raisons pour lesquelles le Gouvernement propose de rétablir l’article 9 dans la rédaction adoptée par l’Assemblée nationale.

M. le président. Quel est l’avis de la commission sur ces trois amendements ?

Mme Marta de Cidrac, rapporteure. J’émets un avis défavorable, qui n’étonnera personne. Permettez-moi d’expliquer pourquoi.

Si l’on veut embrouiller l’esprit de nos concitoyens, voilà exactement ce qu’il faut faire. En effet, adopter l’un de ces amendements reviendrait à ne pas laisser se déployer le dispositif Stop Pub. Nous avons pourtant voté celui-ci dans le cadre de la loi AGEC, et écarté le dispositif Oui Pub après avoir débattu de l’opportunité d’instaurer l’un de ces deux dispositifs.

Aujourd’hui, on nous propose de changer les règles. Mais les règles qui ont déjà été proposées et votées visent les mêmes objectifs, madame la ministre : contrairement à ce que vous avez indiqué, le Oui Pub ne s’inscrit pas dans la continuité de la loi AGEC. En réalité, son adoption reviendrait – j’y insiste – à mettre de côté le Stop Pub en instaurant une nouvelle expérimentation. Cela ne pourra qu’embrouiller davantage l’esprit de nos concitoyens, qui ne sauront plus s’ils doivent apposer le sticker Oui Pub, le sticker Stop Pub ou rien du tout.

Par ailleurs, comme j’ai eu l’occasion de l’évoquer en commission et avec vous, madame la ministre, le Oui Pub est quelque peu stigmatisant. En effet, nos concitoyens qui afficheront l’autocollant Oui Pub sur leur boîte aux lettres enverront le message qu’ils sont encore et toujours preneurs de la publicité papier, à rebours de la tendance actuelle qui tend à alléger la publicité.

De plus, ces publicités papier déposées dans les boîtes aux lettres sont souvent accompagnées de bons de réduction. Le Oui Pub sera donc doublement stigmatisant.

Il ne me paraît pas nécessaire aujourd’hui de changer le dispositif. Le dispositif Stop Pub a été largement voté, ici même, au Sénat, dans le cadre de la loi AGEC. Laissons-le se déployer, voyons comment il fonctionne, évaluons-le. Et une fois que nous aurons déterminé s’il fonctionne ou non, nous pourrons éventuellement changer de dispositif.

Pour toutes ces raisons, j’émets un avis défavorable sur les amendements nos 152, 356 et 2200.

M. le président. La parole est à M. le président de la commission de l’aménagement du territoire et du développement durable.

M. Jean-François Longeot, président de la commission de laménagement du territoire et du développement durable. Je souhaite soutenir fortement la position de Mme la rapporteure.

La loi AGEC date de 2020, et Stop Pub n’est entré en vigueur que le 1er janvier 2021. Remettre ainsi en cause un dispositif qui n’est pas encore totalement mis en œuvre conduirait à brouiller les cartes pour nos concitoyens, qui risqueraient de ne plus rien comprendre.

On indiquait précédemment que nous légiférions trop. En l’occurrence, on légifère beaucoup trop, au point de changer des règles qui ne sont pas encore complètement appliquées.

M. Laurent Duplomb. Vous avez raison !

Mme Catherine Deroche. C’est du gaspillage !

M. le président. La parole est à M. Ronan Dantec, pour explication de vote.

M. Ronan Dantec. Il arrive que des règles, dont on avait l’impression qu’elles répondaient à une demande sociétale, soient déjà en retard sur leur temps. Marta de Cidrac l’a très bien expliqué, en indiquant que nos concitoyens qui apposeront l’autocollant Oui Pub apparaîtront comme déjà décalés par rapport à ce qu’est la réalité du temps.

La réalité du temps, c’est qu’aujourd’hui, en France, de très nombreux artisans ne peuvent pas répondre aux demandes, par exemple pour la construction de terrasses ou pour des rénovations utilisant du bois.

Mme Anne-Catherine Loisier. Cela n’a rien à voir !

M. Ronan Dantec. À l’échelle mondiale, nous n’avons plus les capacités de production suffisantes pour répondre à la demande de bois et de papier. Nous vivons dans un monde où il va falloir commencer à s’interroger sur les emplois inutiles de matières.

Or il est inutile de distribuer de la publicité qui n’est pas lue dans les boîtes aux lettres. Il est temps de considérer que nous devons nous passer des produits peu utiles dont la fabrication et la distribution sont consommatrices d’énergie. Cela ne changera rien pour les circuits commerciaux : ceux-ci s’adapteront sans difficulté.

Sur ce sujet, le Sénat a – je me permets de l’indiquer – un coup de retard, comme Marta de Cidrac l’a bien expliqué. Il faut avancer sur le Oui Pub sans perdre plus de temps.

M. le président. La parole est à M. Joël Bigot, pour explication de vote.

M. Joël Bigot. J’avoue que je suis assez partagé, car dans ce dossier tout n’est pas blanc ou noir.

L’opération Stop Pub a commencé bien avant la loi AGEC. En ce qui me concerne, il y a au moins cinq ou six ans que j’ai apposé l’autocollant Stop Pub sur ma boîte aux lettres.

On a observé que, lorsque ce dispositif a été mis en place, la distribution de publicité s’est souvent déportée sur les communes alentour.

Lorsque j’ai dit que le Oui Pub n’était ni tout blanc ni tout noir, je pensais notamment aux artisans et aux petits commerçants de proximité qui n’ont pas forcément de grands moyens et qui font connaître leur activité par la publicité. (Mme Sophie Primas le confirme.) Je pensais aussi aux étudiants et aux personnes en situation précaire, qui gardent une activité grâce à la distribution de publicités papier.

Mme Sophie Primas. Exactement !

M. Joël Bigot. Le dispositif Stop Pub n’a jamais été évalué ; de fait, on ne sait pas s’il a réellement permis de faire diminuer la distribution de publicités papier. Je propose donc de tester le Oui Pub en fixant une trajectoire d’expérimentation, de manière à évaluer le dispositif et à en mesurer l’impact.

Telles sont les raisons pour lesquelles je voterai l’amendement du Gouvernement.

M. le président. La parole est à Mme Sophie Primas, pour explication de vote.

Mme Sophie Primas. Je souhaite, comme le président Longeot, insister sur un point de méthode.

Nous votons des lois, nous réunissons des commissions mixtes paritaires qui sont parfois conclusives et, douze mois après, nous votons le contraire. C’est ce qu’on nous propose, à cet article, pour la loi AGEC, mais, comme on le verra plus tard, ce sera aussi le cas de la loi pour l’équilibre des relations commerciales dans le secteur agricole et alimentaire et une alimentation saine, durable et accessible à tous, dite Égalim, puis de la loi Énergie-climat. S’agissant de cette dernière, il nous est proposé de revenir sur une vingtaine de dispositions que nous avons votées durant ce même quinquennat.

Mme Catherine Deroche. C’est le « en même temps »…

Mme Sophie Primas. Cela me pose un problème démocratique, mes chers collègues, car il y va de la crédibilité politique, de la crédibilité de ce que nous, parlementaires, faisons dans les assemblées. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains. – Mme Françoise Férat applaudit également.)

Par ailleurs, nous mettons en place des expérimentations. Très bien ! Dans quelques semaines, l’examen du projet de loi « différenciation, décentralisation, déconcentration et simplification », ou 3DS, sera d’ailleurs l’occasion de mettre en route nombre d’expérimentations.

Il faut toutefois aller au bout de ces expérimentations. Celle du Stop Pub est prévue pour une durée de deux ans. Je veux bien qu’on expérimente le Oui Pub, mais attendons d’abord les résultats de cette première expérimentation. Puis amendons le dispositif, changeons-le, confortons-le ou optons pour une autre solution, mais faisons notre travail jusqu’au bout !

Si l’on met en place une expérimentation pour décider au bout de six mois de la mettre « dans le dur », ce n’est pas une expérimentation ! Cela revient à forcer le Parlement à faire des choses qu’il n’a pas envie de faire. C’est ce qui me pose problème.

Dans une vie professionnelle antérieure – on ne devient généralement pas parlementaire d’emblée –, j’ai travaillé dans le privé, dans le secteur de la grande distribution, qui est un gros consommateur de tracts promotionnels. Je peux donc témoigner que, s’ils ne sont pas lus par tous, ces tracts sont lus par certains. De fait, les coupons et les promotions sont très importants pour un certain nombre de Français.

Prenons garde à ce que nous faisons. Vous évoquez la nouvelle valeur qu’est l’écologie, monsieur Dantec, mais certains s’efforcent simplement d’acheter de la nourriture aux meilleures conditions. (M. Ronan Dantec proteste.) Nous aurons ce débat.

Enfin, je souhaite souligner que les entreprises françaises prennent des initiatives. Le grand groupe français Carrefour est en train d’expérimenter l’arrêt de la publicité papier au profit de la publicité numérique, sans savoir, à ce stade, si un bénéfice peut réellement en être attendu en termes d’impact climatique.

M. Laurent Duplomb. C’est vrai !

Mme Sophie Primas. Nous le saurons au terme de l’expérimentation. (Applaudissements sur des travées du groupe Les Républicains. – Mme Françoise Férat applaudit également.)

M. le président. La parole est à M. Joël Guerriau, pour explication de vote.

M. Joël Guerriau. Nous nous efforçons de faire une loi permettant de lutter contre le dérèglement climatique. Les nombres qui ont été cités sont tout de même catastrophiques, et le gâchis, énorme.

Certes, on peut se dire que nous avons déjà fait un pas, puisqu’un dispositif s’applique depuis le début de cette année. Mais qui sait aujourd’hui en France que ce pas a déjà été fait ? Remettrions-nous tout en question si nous décidions d’expérimenter le Oui Pub ? Je ne crois pas que les Français en seraient « révolutionnés » ni qu’ils n’y comprendraient plus rien. Je pense que beaucoup ignorent totalement l’existence du dispositif actuel.

Si instaurer le Oui Pub permet de lutter davantage contre le dérèglement climatique et encore une fois les nombres qui ont été cités sont assez éloquents –, j’estime que c’est notre responsabilité d’aller vers ce dispositif, qui est le meilleur outil pour éviter ce gâchis. (Mme Sophie Primas manifeste son désaccord.)

À quoi et à qui sert la publicité ? Ceux qui dépensent de telles sommes, alors même qu’une grande partie de ces publicités finit à la poubelle, n’auraient-ils pas intérêt à les investir pour d’autres causes bien plus utiles pour notre Nation ? Je serais curieux de connaître le coût exact de la publicité papier, mais je suis persuadé que la somme est faramineuse. Cet argent pourrait être utilisé de manière beaucoup plus intelligente pour lutter contre le dérèglement climatique.

Certains ont évoqué les personnes qui lisent ces publicités. Mais que pensent ceux, nombreux, qui les jettent directement dans leur poubelle ? Ils se disent que c’est du gâchis, et que nous laissons faire.

Ces personnes ne croient pas qu’apposer un autocollant Stop Pub résoudra le problème. Elles se disent que leur boîte aux lettres continuera d’être remplie de publicités, parce qu’elles ne connaissent pas la loi comme vous, mes chers collègues, la connaissez et la pratiquez.

Mme Sophie Primas. Ce n’est pas vrai !

M. Joël Guerriau. J’estime donc, pour ma part, que le Oui Pub a du sens. Je le voterai, car l’objet du présent texte est précisément de nous doter de tous les moyens, aussi modestes soient-ils, pour faire en sorte que, doucement, nous avancions dans cet enjeu planétaire qu’est la lutte contre le dérèglement climatique. (Applaudissements sur les travées du groupe GEST.)

M. le président. Mes chers collègues, j’ai encore quatre demandes d’explication de vote. Nous nous en tiendrons là, sinon nous allons débattre toute la soirée de ces trois amendements.

La parole est à M. Laurent Duplomb, pour explication de vote.

M. Laurent Duplomb. Vous me permettrez de détendre l’atmosphère. Comment ferons-nous si nous n’avons plus d’électricité et plus de papier dans les toilettes ? (Exclamations amusées sur les travées des groupes Les Républicains et UC.) Si j’en crois certains propos, nous en arriverons presque à cette extrémité !

Soyons responsables : des emplois et des entreprises sont en jeu. Je souscris pleinement aux propos tenus par le président Longeot : il faut laisser aux entreprises le temps de s’adapter. Elles ne peuvent pas changer sans cesse de pas, parce que nous raisonnons plus rapidement que ce que l’économie est capable d’avaler, d’autant que nous nous laissons la possibilité d’importer les produits que nous ne voulons plus produire chez nous. J’estime qu’il faut apaiser les choses.

Je souhaite également réagir aux propos de M. Dantec sur la forêt : nous ne coupons pas aujourd’hui la moitié de la croissance du bois. Cessons de voir la forêt comme un patrimoine qui ne peut pas fournir de bois. C’est le contraire ! Il faut considérer les choses avec un peu d’objectivité. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)

M. le président. La parole est à M. Daniel Gremillet, pour explication de vote.

M. Daniel Gremillet. Je serai bref, car mon collègue Laurent Duplomb vient d’aborder le sujet du bois, que je souhaitais également évoquer.

Je partage totalement les propos tenus par la présidente Sophie Primas. Le travail que nous avons mené au sein du groupe de suivi de la loi Égalim a été l’occasion de nous pencher sur la consommation de nos concitoyens qui sont les plus exposés à la publicité. Il faut regarder la situation avec lucidité : certains de ces ménages font leurs courses à l’euro près. Si, demain, la publicité devient exclusivement numérique, cela constituera un facteur d’exclusion supplémentaire pour ces couches de la population. (M. Ronan Dantec montre des signes dimpatience.) Or, ici, nous sommes le Sénat des territoires, et nous sommes attentifs à toutes ces personnes.

Enfin, sur le dossier de la forêt, arrêtons de dire n’importe quoi !

Je vous le dis solennellement, madame la ministre, même si nous aurons l’occasion d’en reparler dans les jours qui viennent : sachez que si la forêt est en croissance et si elle est exploitée convenablement, elle apporte une réponse efficace au problème de la captation des gaz à effet de serre ! Et cette réponse vaut pour plus d’un tiers des émissions.

Je viens d’un département très papetier, celui des Vosges. Regardez donc ce qui se passe : aujourd’hui, la plus grande partie du papier qui finit dans les boîtes, quel que soit le dispositif – Stop Pub ou Oui Pub –, est produit à partir d’une matière de recyclage, à 90 % précisément. Nous sommes d’ailleurs allés trop loin, car nous avons interdit l’introduction d’un peu de pâte à papier noble dans la matière recyclable. Résultat : nous ne savons plus faire le papier. Nous allons donc perdre en France, dans nos territoires, des emplois et un savoir-faire relatif à un outil de communication que nous utilisions auparavant.

Pour terminer, quand nous ferons le bilan carbone de cette opération, contrairement à l’idée que certains essaient de colporter, il sera en défaveur du climat. Il sera aussi en défaveur de la jeunesse et de l’avenir, parce que la forêt a besoin d’être exploitée. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)