Mme la présidente. La parole est à M. Thomas Dossus, pour explication de vote.

M. Thomas Dossus. Je remercie M. Bacchi, car nous n’avons pas pu avoir ce débat avec le président de la LFP, qui n’a pas levé toutes les zones d’ombre entourant cet article introduit par un amendement de séance à l’Assemblée nationale.

Pour les clubs de football, c’est le pire moment pour négocier la création de la société commerciale et l’ouverture à un investisseur extérieur. Ces négociations interviendraient en effet alors que scandale Mediapro a mis le couteau sous la gorge de la LFP.

Elles interviendraient également au pire moment en raison de l’épidémie. Des règles absurdes ont été remises en place pour faire face à la vague du variant omicron. La semaine dernière, le Gouvernement a refusé de répondre sur la question des jauges. On nous avait pourtant garanti un peu plus tôt que ces dernières seraient proportionnelles à la capacité des stades, avant qu’elles ne soient rétablies à 5 000 personnes. Ce sont aussi les pertes liées à la billetterie qui placent les clubs dans une situation insoluble !

Ce texte n’est pas le bon pour étudier ces questions : ce n’est pas la société commerciale qui va démocratiser le sport. De nombreuses zones d’ombre persistent, comme nous en débattrons lors de l’examen des amendements suivants. Enfin, la LFP n’a que faire de nos débats, puisqu’un premier tour de table a déjà été annoncé par son président. Nos débats ne servent pas à grand-chose, cette société commerciale étant déjà actée par la LFP et par les clubs.

Nous sommes donc dans une seringue ; c’est pourquoi je m’abstiendrai sur cet amendement.

Mme la présidente. La parole est à Mme la ministre déléguée.

Mme Roxana Maracineanu, ministre déléguée. Monsieur Dossus, la LFP a acté non pas la création de la société commerciale, mais bien son besoin de créer une structure lui permettant d’améliorer sa gouvernance.

Il y a quelques semaines, en ce qui concerne la violence dans les stades, nous avons vu combien il était difficile de disjoindre l’intérêt des clubs de l’intérêt général.

Le but était alors de calmer les esprits. Des investissements communs renforcent les dispositifs mutualisés de sécurité dans les stades, la LFP pouvant d’ailleurs garder une partie de l’argent des diffuseurs, afin d’investir de manière cohérente et d’assurer la sécurité des spectateurs. En effet, les clubs sont intéressés par une rentabilité immédiate, par un retour direct sur l’investissement permis par les droits audiovisuels.

Quel que soit le pourcentage de leur participation, une société commerciale et des dirigeants capables de disjoindre les intérêts en cause conduiraient les investisseurs privés à améliorer le « produit football », tout en veillant à certains thèmes importants, comme les horaires des matchs ou les joueurs participant au championnat.

Certaines compétences sont déléguées aux fédérations, et la société commerciale n’aura pas le droit d’y toucher. Le périmètre de l’action de cette dernière doit encore être sécurisé, mais je crois que l’adoption de l’amendement de M. Savin satisferait cet objectif. Une telle société fera prendre conscience aux présidents des clubs que, pour avoir un retour sur investissement, il faut d’abord investir.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 26.

(Lamendement nest pas adopté.)

Mme la présidente. L’amendement n° 113, présenté par M. Lozach, Mme S. Robert, MM. Kanner, Antiste, Assouline, Chantrel et Magner, Mme Monier, M. Stanzione, Mmes Van Heghe et Harribey, MM. Devinaz et Jacquin, Mmes G. Jourda, Lubin et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :

Alinéa 3

Remplacer le mot :

accord

par les mots :

avis conforme des instances dirigeantes

La parole est à M. Jean-Jacques Lozach.

M. Jean-Jacques Lozach. Toujours à propos de la société commerciale, cet amendement vise la relation entre la fédération sportive et la ligue sportive professionnelle, relation qui est très importante et peut prendre diverses formes. Le Gouvernement a d’ailleurs lui aussi déposé un amendement tendant à mieux borner juridiquement cette relation entre la fédération sportive et la ligue.

Il est vrai que, aujourd’hui, nous parlons surtout de football lorsque nous parlons de ces sociétés commerciales, pour la simple raison que, en France, une seule fédération sportive a transféré la propriété juridique de l’exploitation des droits audiovisuels à sa ligue professionnelle : la Fédération française de football. Aucune autre n’a fait de même.

Toutefois, nous légiférons pour l’ensemble des sports, et, à l’évidence, après le football, d’autres sociétés commerciales de ce type seront probablement créées dans d’autres disciplines sportives ; nous pensons en particulier au rugby, au basket et – pourquoi pas ? – au handball.

En ce qui nous concerne, nous sommes favorables à la création des sociétés commerciales et nous sommes globalement satisfaits de la version du texte qui est issue des travaux de l’Assemblée nationale.

Il est vrai que, pour l’instant, je le répète, cela concerne surtout le football. Si la LFP, si je puis dire, « pousse à la roue » pour créer cette société commerciale, c’est pour des raisons à la fois conjoncturelles et structurelles.

Les deux principales raisons conjoncturelles sont l’affaire Mediapro, qui a causé une perte d’environ 500 millions d’euros par an par rapport à ce qui était envisagé il y a trois ans, et la pandémie, dont le manque à gagner pour la Ligue 1 est chiffré à 1,7 milliard d’euros par le président de la LFP.

Néanmoins, certaines raisons sont plus profondes et concernent le modèle économique du football. Aujourd’hui, ce dernier n’est pas économiquement viable, puisque chaque année, à la fin de la saison, selon la Direction nationale du contrôle de gestion (DNCG), le déficit des clubs tourne autour de 700 millions d’euros, et doit être comblé en particulier par la vente des joueurs. (Marques dimpatience sur les travées du groupe Les Républicains.)

Mme la présidente. Il faut conclure, mon cher collègue.

M. Jean-Jacques Lozach. Pour ces deux types de raisons, il est indispensable de créer cette société commerciale.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Michel Savin, rapporteur. Avis défavorable.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Roxana Maracineanu, ministre déléguée. Monsieur Lozach, vous proposez que la création de la société commerciale soit soumise à un avis conforme des fédérations.

Selon la rédaction de l’article, la fédération doit approuver les statuts de la société. De mon point de vue, un avis conforme et une approbation sont la même chose.

Le Gouvernement émet donc un avis défavorable.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 113.

(Lamendement nest pas adopté.)

Mme la présidente. Je suis saisie de trois amendements et d’un sous-amendement faisant l’objet d’une discussion commune.

L’amendement n° 212 rectifié, présenté par M. Savin, au nom de la commission, est ainsi libellé :

Alinéas 6 à 9

Rédiger ainsi ces alinéas :

« Les statuts de la société commerciale ainsi que leurs modifications sont approuvés par l’assemblée générale de la fédération sportive délégataire concernée et par le ministre chargé des sports. Les statuts de la société commerciale précisent notamment les décisions qui ne peuvent pas être prises sans l’accord des associés ou actionnaires minoritaires ainsi que les modalités permettant de garantir le respect des principes mentionnés à l’article L. 333-3. Les décisions de la société commerciale ne peuvent être contraires à la délégation mentionnée à l’article L. 131-14 et ne peuvent porter atteinte à l’objet de la ligue professionnelle et aux compétences que la fédération lui a subdéléguées en application du même article.

« Les statuts de la société commerciale prévoient la présence d’un représentant de la fédération sportive délégataire dans les instances dirigeantes de la société commerciale avec voix consultative.

« La ligue professionnelle ne peut pas détenir moins de 85 % du capital et des droits de vote de la société commerciale. Un décret en Conseil d’État détermine les catégories de personnes physiques et morales, de droit français ou étranger, ne pouvant pas détenir de participation au capital et des droits de vote de la société commerciale.

« Les produits de la commercialisation des droits d’exploitation perçus par la société commerciale, ainsi que les sommes de toutes natures versées à cette société au titre des financements et des apports en capital effectués à son profit sont répartis entre cette société, la fédération sportive délégataire, la ligue et les sociétés sportives.

La parole est à M. le rapporteur.

M. Michel Savin, rapporteur. Je serai un peu plus long que d’habitude sur cet amendement, dont l’objet est la création d’une société commerciale négociant les droits audiovisuels.

Je suis quelque peu surpris que M. Jean-Jacques Lozach défende la position de l’Assemblée nationale, qui, à nos yeux, ne sécurise assez ni le système ni les relations entre la fédération et la ligue.

Le présent amendement tend à modifier la rédaction de l’article, en tenant compte des échanges de ces derniers jours entre la Ligue de football professionnel, la Fédération française de football et les élus qui ont travaillé sur la création de cette société commerciale.

Ses dispositions comprennent les évolutions suivantes par rapport à la rédaction initiale.

Premièrement, les décisions de la société commerciale ne pourront être contraires à la délégation de service public liant la fédération et la ligue, mentionnée à l’article L. 131-14 du code du sport. Elles ne pourront pas non plus porter atteinte aux compétences que la fédération a déléguées à la ligue professionnelle en application du même article.

Deuxièmement, compte tenu des garanties ainsi apportées à la Fédération française de football, les statuts de la société commerciale devront prévoir qu’un représentant de la fédération délégataire participe aux instances dirigeantes de la société commerciale, et que sa voix consultative soit garantie, afin de favoriser la fluidité des échanges entre la fédération et la ligue.

Comme je l’ai indiqué plus tôt, nous demandons également que ces statuts soient approuvés par l’assemblée générale de la fédération sportive délégataire et par le ministre chargé des sports.

Nous avions établi, dans un premier temps, la part du capital de cette société et des droits de vote pouvant être cédée à un investisseur à 10 %. À la suite des discussions et des négociations qui ont actuellement lieu, nous proposons de la fixer désormais à 15 %, ce chiffre correspondant à celui souhaité par la LFP.

Enfin, point important pour les relations de la fédération et de la ligue, nous souhaitons que les produits de la commercialisation des droits d’exploitation perçus par la société commerciale, ainsi que les sommes de toutes natures versées à cette société au titre des financements et des apports en capital effectués à son profit, soient répartis entre cette société, la fédération sportive délégataire, c’est-à-dire le sport amateur, la ligue et les sociétés sportives.

Il faut que la fédération puisse continuer à percevoir des recettes et qu’il y ait un lien entre le sport professionnel et le sport amateur.

Nous espérons que cette rentrée d’argent ne viendra pas uniquement boucher les déficits des clubs professionnels. Les statuts de la société doivent comprendre un engagement de cette dernière pour que l’investissement puisse aider les clubs à améliorer leurs outils de travail, par exemple les stades et les centres de formation. Tout ce travail paiera dans les années à venir, en permettant aux clubs de mieux se structurer.

Mme la présidente. Il faut conclure, monsieur le rapporteur.

M. Michel Savin, rapporteur. Voilà les mesures que nous avons apportées pour sécuriser ce système.

Mes chers collègues, je vous propose donc de voter en faveur de cet amendement.

Mme la présidente. Le sous-amendement n° 236, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :

Amendement n° 212 rectifié, alinéa 5

Remplacer le pourcentage :

85 %

par le pourcentage :

80 %

La parole est à Mme la ministre déléguée.

Mme Roxana Maracineanu, ministre déléguée. Ce sous-amendement a pour objet l’augmentation de la part du capital ouvert aux investisseurs extérieurs.

Mesdames, messieurs les sénateurs, vous avez eu les mêmes discussions que nous avec la LFP, qui rencontre aujourd’hui les investisseurs souhaitant prendre part à la création de cette société ; la LFP s’adresse à plusieurs personnes qui peuvent apporter de l’argent et commercialiser différents types de droits de diffusion, sur internet, à la télévision ou pour la diffusion d’extraits courts.

Les membres de la LFP ont réussi à vous convaincre de porter ce taux à 15 %, mais ils nous disent avoir besoin d’un taux de 20 %. Notre sous-amendement tend donc à établir ce dernier taux.

Monsieur le rapporteur, je vous remercie d’avoir tenu compte du sous-amendement de M. Juanico adopté par l’Assemblée nationale avec notre soutien, qui tendait à mettre en place cette protection des fédérations et à garantir leur présence dans les instances de la société. L’amendement voté à l’Assemblée nationale visait en effet à conditionner la création de cette société commerciale à l’accord des fédérations.

Vous souhaitiez aller plus loin, au point que, au lieu d’une voix consultative du représentant de la fédération, vous avez proposé un droit de veto qui nous semble par trop dissuasif. Si l’on crée une société commerciale, il faut faire en sorte que cette dernière fonctionne.

Je veux que l’on respecte l’ordre des choses et le droit de regard de l’État, tant sur les activités de la fédération délégataire que sur les prérogatives que cette dernière subdélègue à la ligue. Cet ordre est déjà établi, et le principe de subdélégation est inscrit dans plusieurs lois.

Les contrats de délégation pourront mentionner l’existence de cette société commerciale et ses liens avec la fédération. Une convention lie la ligue et la fédération et un système de redistribution directe de l’argent récolté au sein de cette société commerciale est mis en place. Il y a donc suffisamment de garde-fous pour que l’on atteigne l’objectif énoncé par M. Cédric Roussel à l’Assemblée nationale, à savoir à la création de cette société commerciale, dont les acteurs ont besoin, comme ils l’ont exprimé.

Comme légiférer c’est prévoir, donnons sa chance au produit, laissons la LFP trouver de l’argent afin de satisfaire les besoins des clubs, pour que ces derniers puissent créer entre eux de la valeur, sans avoir besoin de l’appui de l’État.

Pendant la crise sanitaire, tant les associations que le football professionnel nous demandaient de l’aide. Or, politiquement, l’acceptabilité publique de mesures d’aide du football professionnel n’était pas évidente, quand on connaît le montant des salaires des joueurs et l’argent que le football brasse.

Néanmoins, il était indispensable d’aider le football professionnel, le risque étant que ce dernier disparaisse en France. Vous pouvez chacun mesurer son impact dans les territoires : avoir des stades qui accueillent du public, vivre ces animations, ces fêtes, ces émotions que nos champions nous procurent sur le terrain ou à la télévision, c’est essentiel.

Il faut laisser sa chance à cette société commerciale et lui permettre de fonctionner et d’attirer les investisseurs, pour que l’État puisse se désinvestir de l’aide qu’il serait contraint d’apporter dans le cas contraire.

Mme la présidente. L’amendement n° 164, présenté par M. Lozach, est ainsi libellé :

Alinéa 7, première phrase

Remplacer le taux :

90 %

par le taux :

80 %

La parole est à M. Jean-Jacques Lozach.

M. Jean-Jacques Lozach. Je suis très attaché à la place de la fédération dans la gouvernance de la société commerciale.

Néanmoins, nous ne sommes pas en train de réinventer l’eau chaude ! Dans les championnats comparables au nôtre, comme en Allemagne, en Italie ou en Angleterre, les ligues professionnelles sont allées beaucoup plus loin, en se constituant elles-mêmes en sociétés commerciales.

La question de l’ouverture du capital de cette société est essentielle. Après avoir discuté avec les acteurs du football professionnel, je crois pouvoir dire que le seuil d’attractivité de la société commerciale se situe à hauteur de 20 %. Si ce montant n’est pas retenu, les investisseurs ne viendront pas participer à ce capital.

La différence entre les taux de 10 % et 20 % n’est pas mince. Nous parlons d’un milliard d’euros, puisque l’estimation de la valeur marchande de la Ligue 1 se situe entre 9 milliards d’euros et 12 milliards d’euros – cette valeur sera précisée dans les mois qui viennent. Nous parlons donc d’accorder ou non un milliard d’euros supplémentaires aux clubs professionnels, qui connaissent aujourd’hui de grandes difficultés.

L’objectif est de donner de la compétitivité au football professionnel. Une telle approche, s’appuyant sur la diversification et sur la recherche de recettes supplémentaires, est nouvelle. En effet, jusqu’à présent, on essayait toujours plus ou moins d’alléger les charges fiscales et sociales des différents clubs – ces demandes étaient réitérées de la part du football professionnel.

Avec l’ouverture des capitaux, nous cherchons non pas à baisser les dépenses, mais au contraire à augmenter les recettes. Pour ma part, je suis favorable à ce type de mesure.

Mme la présidente. L’amendement n° 114, présenté par M. Lozach, Mme S. Robert, MM. Kanner, Antiste, Assouline, Chantrel et Magner, Mme Monier, M. Stanzione, Mmes Van Heghe et Harribey, MM. Devinaz et Jacquin, Mmes G. Jourda, Lubin et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :

Après l’alinéa 7

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

« Les produits de la commercialisation des droits d’exploitation perçus par la société commerciale mentionnée au premier alinéa du présent article, ainsi que les sommes de toutes natures versées à cette société au titre des financements et des apports en capital effectués à son profit sont répartis entre cette société, la fédération, la ligue et les sociétés sportives.

La parole est à M. Jean-Jacques Lozach.

M. Jean-Jacques Lozach. Il est défendu, madame la présidente.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Michel Savin, rapporteur. La commission est défavorable aux autres amendements que le sien et au sous-amendement, qu’ils soient portés par le Gouvernement ou par nos collègues.

Je reviens à la différence entre ce que je viens d’entendre et la vision que l’on peut avoir. Ceux qui veulent fixer la part des sociétés commerciales à 20 % évoquent des rentrées d’argent. Permettez-moi de vous le dire, mes chers collègues, c’est une vision à court terme.

J’espère que la ligue, aujourd’hui, travaille sur un projet à moyen et long terme. L’aspect financier est une chose, mais il faut que l’investisseur s’engage à rester dans la durée pour faire croître le gain de cette société. Cette dernière doit avoir un vrai projet, pour augmenter les recettes liées à l’audiovisuel. Si l’on recherche simplement, aujourd’hui, un chèque pour répondre à une situation d’urgence, on se trompe !

Bien sûr, cette société devra accompagner les clubs qui sont en difficulté, mais elle devra surtout avoir un projet à moyen et long terme, pour développer les droits audiovisuels et les recettes liées au football professionnel. Ce projet devra être réfléchi avec l’ensemble des acteurs, pour aller vers quelque chose de meilleur. Il ne s’agit pas simplement d’attendre un chèque pour répondre à l’urgence.

Ne limitons pas la création de cette société à la fixation de ces 20 %. On ne peut pas seulement dire : « Fixons un tel pourcentage, il y aura ainsi plus d’argent ! »

À mon avis, la ligue sera vigilante sur cet aspect. Ce n’est pas celui qui offrira le plus qui sera forcément retenu. C’est celui qui aura le meilleur projet et qui souhaitera travailler avec l’ensemble des acteurs pour développer cette société commerciale qui sera retenu.

La commission émet donc un avis défavorable sur les amendements nos 164 et 114 ainsi que sur le sous-amendement n° 236.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Roxana Maracineanu, ministre déléguée. Selon moi, monsieur le rapporteur, vous établissez un lien erroné entre le montant placé par l’investisseur et le pourcentage, qui représente la part maximale du capital et des droits de vote.

Ne l’oublions pas, nous sommes en train de voter la loi et non pas les statuts de la société commerciale. Je comprends que vous ayez envie d’avoir les mains dans le cambouis et d’aider la ligue à rédiger ses statuts. Mais, pour le moment, nous nous efforçons de prendre un peu de hauteur.

Je le répète, laissons sa chance au produit ! Si, demain, les investisseurs arrivent à capter suffisamment d’argent, nous ne nous en plaindrons pas. Par exemple, les statuts devront bien préciser qu’une partie des sommes sera consacrée à la sécurité dans les stades. Ici, au Sénat, nous ne sommes pas en train de négocier avec les investisseurs. Nous votons une loi sur laquelle nous ne reviendrons pas avant un certain temps.

Vous et moi savons combien il est difficile, même lorsque les jeux Olympiques se déroulent dans notre pays, de trouver un créneau pour une loi Sports. Si toutes ces dispositions devaient figurer dans une loi Sports, nous risquerions de courir pendant un moment après les investisseurs !

En tant que ministre et en tant que sénateurs en responsabilité, nous devons donner la possibilité à cette société d’être attractive. Il n’est pas sûr que, demain, les investisseurs aient envie de détenir 20 % des parts du capital et des droits de vote. Peut-être que, dans leurs propres statuts, ils prévoiront 16 %, par exemple, s’ils estiment que c’est préférable.

Encadrons les choses, tout en laissant les acteurs être libres de leurs mouvements. Faisons confiance à ce qu’ils nous proposent.

Pour ma part, je suis ravie que vous ayez repris dans votre nouvel amendement ce que nous avions proposé pour sécuriser le périmètre de cette société par rapport aux prérogatives déléguées et subdéléguées. Vous avez tenu à le préciser, et je trouve cela très bien, un représentant de la fédération sportive devra être présent dans les instances dirigeantes de la société commerciale. Quant au Gouvernement, il donnera son avis au moment de la création des statuts.

Si vous ne changez pas d’avis sur notre sous-amendement, j’émettrai un simple avis de sagesse sur l’amendement n° 212 rectifié.

Par ailleurs, j’émets un avis favorable sur l’amendement n° 164 de M. Jean-Jacques Lozach, qui vise à proposer un taux identique à celui qui a été retenu par le Gouvernement.

En revanche, je suis défavorable à l’amendement n° 114.

Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Raymond Hugonet, pour explication de vote.

M. Jean-Raymond Hugonet. Par cet article 10 bis A, il nous est proposé de tirer des leçons du désastre Mediapro, qui avait été annoncé, je le souligne au passage, par la commission de la culture du Sénat.

C’est une régulation équilibrée qui a été retenue, et je salue à ce titre le travail de M. le rapporteur, Michel Savin. Tout de même, j’ai l’impression, en écoutant le débat, d’entendre la fable de La Fontaine La Laitière et le pot au lait !

On crée une société commerciale, on se répartit les pourcentages… Or, dans tout bon business, le prix potentiel d’un produit est lié à sa qualité intrinsèque. Rupert Murdoch l’avait bien compris avec le championnat anglais, et ce dernier est grâce à lui aujourd’hui le premier d’Europe et du monde, et de très loin.

Si l’on veut vraiment rendre service au football français, attachons-nous à ce que les footballeurs français ne jouent pas avec un boulet au pied ! Bien évidemment, il faut penser aux ressources, mais il faudra aussi baisser les charges, qui sont totalement déséquilibrées par rapport à celles de nos concurrents directs. Sur ce point, et uniquement sur ce point, je suis en désaccord avec mon collègue Jean-Jacques Lozach.

J’entends parler de l’Espagne, de l’Italie et de l’Angleterre. Mais les règles ne sont pas les mêmes dans ces championnats, où l’on a compris que le football, au-delà d’un sport magnifique, était un spectacle mondialement reconnu. (Applaudissements sur des travées du groupe Les Républicains.)

Mme la présidente. La parole est à M. Jérémy Bacchi, pour explication de vote.

M. Jérémy Bacchi. Monsieur le rapporteur, j’ai bien noté les efforts de la commission pour essayer d’encadrer quelque peu cette société commerciale, même si vous avez retenu une position intermédiaire, avec une part de 15 %, au lieu des 10 % initialement prévus. Par ailleurs, vous avez supprimé le veto fédéral.

Toutefois, il subsiste à mes yeux deux ou trois questions, et je m’en voudrais de ne pas les évoquer.

Tout d’abord, même si je sais que l’on ne peut pas le déterminer à l’avance, je parlerai du montant auquel seront vendus les droits télévisuels à la société commerciale. M. Lozach a évoqué tout à l’heure un milliard d’euros sur huit ans, ce qui revient à peu près à 125 millions d’euros par saison. Cela correspond pile-poil au montant des droits négociés à la hâte après le scandale Mediapro… Il s’agit donc de droits de télévision revus à la baisse, au pire moment.

Si le chiffre qui circule est le bon, on ferait un cadeau à cette société commerciale de plusieurs dizaines, voire centaines, de millions d’euros, car nous nous appuierions sur un prix d’achat historiquement faible.

Ensuite, je souhaite évoquer la clé de répartition entre les clubs. Aurons-nous un modèle de répartition en lien avec le classement de la saison précédente ? Aurons-nous une clé de répartition en lien avec les audiences télévisuelles ?

On peut imaginer que la moitié de cette répartition soit liée au classement de la saison précédente, avec un bonus pour ceux qui réalisent les meilleures audiences. Quoi qu’il en soit, il convient de réfléchir à cette clé de répartition, qui devra constituer une sorte de garde-fou, afin d’éviter le scénario catastrophe que j’évoquais tout à l’heure, où un seul club pourrait capter un tiers de ces droits télévisés.

Enfin, je m’interroge en cas de vente d’un club. Celui-ci serait-il valorisé de la même manière si une société commerciale détient 20 % des droits télé ? Je n’ai pas la réponse à cette question. Ce point, me semble-t-il, pourrait avoir une véritable incidence sur les clubs de Ligue 1.

Mme la présidente. La parole est à M. Didier Rambaud, pour explication de vote.

M. Didier Rambaud. Je dois l’avouer, jusqu’il y a quelques jours, j’étais assez sensible à l’amendement de Michel Savin, notamment en matière d’éthique. Je partage tous ses propos concernant le comportement de la ligue. Par ailleurs, nous sommes tous échaudés par les prédateurs du monde du foot.

On a parlé de l’échec cinglant de Mediapro ; je pourrais vous parler aussi du retrait du fonds de pension américain du club de Bordeaux et d’autres prédateurs qui sont en train de tourner autour d’un certain nombre de clubs historiques, comme celui de Saint-Étienne.

Pour autant, je n’ai pas envie d’être naïf. Notre collègue Jean-Raymond Hugonet l’a dit, on connaît le problème de concurrence rencontré par les clubs français face aux clubs allemands, anglais, italiens et espagnols. On ne va pas baisser les charges pesant sur les salaires des footballeurs français, cela ne me paraît pas à l’heure du jour ! Toutefois, si l’on veut que nos clubs français puissent peser dans les championnats européens, il faut leur donner les moyens de créer cette société commerciale.

Je partage tout à fait les arguments défendus par Jean-Jacques Lozach. À moins de 20 %, j’attends de voir si un investisseur se présentera. Donnons ce coup de main à la ligue professionnelle de foot ! Autorisons-la à créer cette société commerciale, qui permettra l’arrivée d’un investisseur.