M. le président. La parole est à M. Thomas Dossus.

M. Thomas Dossus. Monsieur le président, madame la ministre, mesdames les secrétaires d’État, mes chers collègues, nous entamons l’examen des crédits de la mission « Sport, jeunesse et vie associative ». Sport, jeunesse, vie associative : de toutes les missions du projet de loi de finances, celle-ci est certainement la plus fourre-tout, mais, ne nous y trompons pas, cette architecture budgétaire large ne doit rien au hasard. Elle traduit une volonté politique claire et assumée d’empêcher l’émergence d’une réelle politique d’éducation populaire tournée vers l’émancipation.

Disons-le clairement, ce n’est pas le chemin que prend cette mission. Le projet phare du volet consacré à la jeunesse, le service national universel, en est le parfait exemple : un dispositif extrêmement coûteux – 140 millions d’euros –, dont le budget augmente année après année, même s’il ne remplit pas ses objectifs, et dont aucune évaluation sérieuse n’est faite.

Pour nous, c’est un dispositif inutile, fondé sur une nostalgie surannée du service militaire, un dispositif au fumet autoritaire, pensé pour faire « rentrer la jeunesse dans le rang », la faire obéir, la faire saluer au garde-à-vous, y compris des responsables civils. Un dangereux mélange des genres !

La liste des scandales entourant le SNU ne cesse de s’allonger au fil des mois : malaises de jeunes laissés en plein soleil, brimades et punitions physiques collectives, désorganisation des convocations et, même, atelier de menottage en lien avec la police nationale.

On est loin de l’émancipation, on est loin du moment collectif qui fédère, on est très loin de la politique pour la jeunesse que notre pays mérite.

Profitons ensuite de cette discussion budgétaire pour relayer les craintes du mouvement associatif. Certaines, qui concernaient une mise au pas des associations les plus militantes, s’étaient exprimées au moment de l’examen de la loi, dite Séparatisme, du 24 août 2021 confortant le respect des principes de la République. Ces craintes se sont concrétisées récemment, le contrat d’engagement républicain ayant été utilisé pour attaquer la liberté associative et priver une association écologiste de ses subventions.

Je veux dire ici mon soutien aux libertés associatives et appelle le Gouvernement à revenir sur ce dispositif dangereux.

J’en viens au troisième volet de la mission, le sport, qui – rappelons-le – est aussi politique.

Ce programme prévoit 100 millions d’euros pour le Pass’Sport. Cette aide à la prise de licence est bienvenue, mais mériterait une réelle montée en puissance.

Les annonces concernant la mobilisation du fonds vert pour rénover les équipements devraient nous rassurer. Mais, comme tous les ministres semblent vouloir se servir dans ce fonds, nous sommes très dubitatifs sur les montants qui seront réellement affectés.

J’ai été surpris – mais pas vraiment étonné, tant c’est le cas dans toutes les missions budgétaires – de l’absence du mot climat dans la présentation du programme « Sport ». J’ai compris pourquoi lorsque nous avons eu confirmation de la présence de notre ministre des sports à la Coupe du monde de football organisée au Qatar, et donc de la caution apportée, par sa présence, à l’aberration, pour ne pas dire à la bombe climatique, que constitue cet événement. C’est toujours le même déni gouvernemental sur les questions climatiques, que nous connaissons depuis cinq ans !

Pourtant, le changement climatique aura des conséquences dramatiques sur les pratiques sportives, les stations de ski, les installations littorales, le sport en extérieur et en plein été. De tout cela, il n’est pas prévu de débattre aujourd’hui, à la lecture de ce budget, et c’est pourquoi nous aborderons ce sujet par voie d’amendement.

J’évoquerai un dernier point, et pas des moindres tant il constitue presque l’horizon unique de la politique sportive française des prochaines armées : les jeux Olympiques et Paralympiques de 2024.

Le budget poursuit une trajectoire financière qui, sans surprise, commence à déraper – mais tout cela était prévu de longue date.

Je dois en revanche me faire ici l’écho des inquiétudes relatives à l’annulation possible des festivals en 2024, qui plonge dans l’insécurité de nombreuses entreprises culturelles, peinant déjà à relever la tête après la pandémie de covid-19.

Le risque d’opposer sport et culture est grand. La fête des jeux Olympiques et Paralympiques ne doit pas être gâchée par une saison de festivals annulée de plus. Il est donc nécessaire de mieux dimensionner la mobilisation de nos forces de sécurité pour que saison culturelle et jeux puissent se dérouler en harmonie.

Pour conclure, s’agissant du sport, nous constatons la faiblesse des ambitions climatiques ; s’agissant de la jeunesse, nous refusons la mise au pas annoncée ; s’agissant de la vie associative, nous déplorons le manque de visibilité et les attaques aux libertés.

Nous nous abstiendrons donc sur les crédits de cette mission.

M. le président. La parole est à M. Didier Rambaud.

M. Didier Rambaud. Monsieur le président, madame la ministre, mesdames les secrétaires d’État, mes chers collègues, dix mois avant la Coupe du monde de rugby et vingt mois avant les jeux Olympiques et Paralympiques de Paris, l’État augment les moyens financiers en faveur du sport.

En témoigne l’augmentation de 5,1 % des crédits de la mission « Sport, jeunesse et vie associative », qui atteignent 1,82 milliard d’euros en crédits de paiement.

Ces moyens financiers permettent de poursuivre l’accès des jeunes à la pratique sportive, avec le Pass’Sport, un dispositif pertinent qui porte ses fruits et que nous devons amplifier. Je me réjouis donc de son extension à de nouveaux publics : les étudiants jusqu’à 28 ans révolus bénéficiant d’une bourse sur critères sociaux de l’enseignement supérieur et les jeunes bénéficiaires de l’allocation aux adultes handicapés.

Je salue également le déploiement des parcours sport-santé de proximité sur les territoires, sans oublier les 100 millions d’euros destinés au financement du programme des 5 000 équipements sportifs de proximité, soit 200 millions d’euros sur deux ans pour développer la pratique sportive sur tout le territoire national, l’objectif étant d’atteindre trois millions de nouveaux pratiquants d’ici à 2024.

Ce sont des moyens substantiels pour des équipements incitant à la pratique sportive dans les meilleures conditions et dont les caractéristiques peuvent se résumer en deux mots : simplicité et proximité. Pour garder cette proximité – je profite de l’occasion pour vous interroger, madame la ministre –, le zonage ne pourrait-il pas être retravaillé afin d’éviter l’exclusion de certains territoires, qui ne sont situés ni dans les zones de revitalisation rurale ni dans les quartiers prioritaires de la politique de la ville ?

Le Gouvernement envoie également un message positif pour l’engagement de la jeunesse.

Dans une société divisée, où de nombreux jeunes sont en quête de repères, je pense que le service national universel mérite toute notre attention. Je suis donc plus qu’étonné de voir le nombre d’amendements déposés pour réduire les moyens financiers qui lui sont dédiés.

Les auteurs de ces amendements considèrent-ils que le service national universel ne mérite pas de bénéficier d’une enveloppe supplémentaire de 30 millions d’euros ? Je pense au contraire, mes chers collègues, que nous ne dépenserons jamais assez d’argent pour l’engagement de notre jeunesse au service de l’intérêt général et des valeurs de la République.

Enfin, je ne peux terminer sans revenir un instant sur les jeux Olympiques et Paralympiques de 2024.

Les crédits du programme dédié diminuent de 0,7 %, ce qui démontre que la trajectoire budgétaire a été anticipée et demeure maîtrisée.

Certes, le comité d’organisation vient d’annoncer cette semaine un coût supplémentaire d’environ 400 millions d’euros, mais je crois pouvoir dire que ces coûts sont liés, d’une part, à l’inflation des coûts énergétiques, aggravés par la guerre en Ukraine ; d’autre part, au renforcement des moyens dédiés à la cybersécurité et à la quiétude de l’ordre public lors de la cérémonie d’ouverture, qui s’annonce d’ores et déjà historique.

À ce jour, l’enveloppe prévisionnelle totale atteint donc 8,7 milliards d’euros.

Permettez-moi de rappeler que les jeux Olympiques et Paralympiques de Londres ont coûté l’équivalent de plus de 10 milliards d’euros, quand le coût de ceux de Rio est estimé à plus de 13 milliards d’euros…

Ce rappel étant fait, je conclus en précisant que le groupe RDPI votera ces crédits, qui encouragent la pratique du sport et l’engagement de notre jeunesse. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI.)

M. le président. La parole est à Mme Sabine Van Heghe. (Applaudissements sur les travées du groupe SER.)

Mme Sabine Van Heghe. Monsieur le président, madame la ministre, mesdames les secrétaires d’État, mes chers collègues, je remercie nos deux rapporteurs pour avis, Jean-Jacques Lozach et Jacques-Bernard Magner, de la qualité de leur travail.

Je commencerai par faire quelques remarques générales sur les crédits globaux de cette mission pour 2023, qui connaissent une hausse de 5,8 % des crédits de paiement, soit 1,8 milliard d’euros, et une baisse de 10,8 % des autorisations d’engagement, soit 1,5 milliard d’euros.

C’est le programme 219, « Sport », dont les autorisations d’engagement sont en baisse de 22 %, qui est préoccupant pour les années à venir.

Rappelons que le plan de relance complétait pour 2021 et 2022 les crédits de la mission « Sport, jeunesse et vie associative » de 330 millions d’euros supplémentaires, lesquels disparaissent en 2023. Les crédits de cette mission sont donc en baisse de 200 millions d’euros.

Permettez-moi à ce stade de faire un rappel utile : lorsque la gauche était au pouvoir, entre 2012 et 2017, les moyens globaux avaient progressé de 31 %.

J’en viens maintenant aux détails de chacun des programmes, en commençant par le programme 219, « Sport ».

En 2023, ses crédits de paiement augmenteront de 26 %, soit 690 millions d’euros, dont 164 millions seront absorbés par l’Agence nationale du sport.

Les crédits de l’action n° 02, Développement du sport de haut niveau, ne progressent que d’un peu plus de 2 %, ce qui est un mauvais signal à la veille de la Coupe du monde de Rugby de 2023 et des jeux Olympiques et Paralympiques de 2024.

Le dispositif Pass’Sport, soutenu de longue date par les sénateurs de notre groupe, en particulier par notre rapporteur, bénéficie en 2023 d’une enveloppe de 100 millions d’euros, comme en 2022.

Néanmoins, nous relevons la sous-consommation des crédits budgétaires, surprenante alors qu’il est urgent d’améliorer la condition physique dégradée de nos jeunes. Il faut donc réfléchir à une extension de l’éligibilité au Pass’Sport.

Je regrette également la baisse de la subvention de l’Agence française de lutte contre le dopage, au regard du taux actuel de l’inflation et à l’heure où les contrôles dans les compétitions sportives devraient se multiplier.

Nous nous inquiétons aussi du financement du sport français, assuré pour une part importante par trois taxes parafiscales abondant l’Agence nationale du sport.

Le rendement total de ces trois taxes a progressé de 9 % depuis 2017, mais la part allant au mouvement sportif a été réduite de moitié. Pour 2023, le produit des trois taxes est évalué à 487,3 millions d’euros, mais seuls 166 millions d’euros seront affectés à l’ANS – et donc au sport –, soit un tiers. Nous proposons de déplafonner ces taxes, comme le réclame depuis des années notre collègue Jean-Jacques Lozach.

Je dirai à présent quelques mots sur le programme 350, « Jeux Olympiques et Paralympiques 2024 ».

J’attends du Gouvernement des précisions sur l’évolution du budget global des JO. Alors qu’il était initialement estimé à 6,6 milliards d’euros, il atteindrait plus de 8 milliards d’euros. Sans argent public, la volonté exprimée par le Président de la République – « Les jeux financent les jeux » – sera-t-elle respectée ?

Enfin, quid de l’avenir du sport français à l’issue des JO ? L’examen au Sénat du projet de loi de programmation des finances publiques pour les années 2023 à 2027 fait craindre un affaiblissement des crédits du sport après 2024. Or les JO ne doivent pas être l’arbre qui cache la forêt.

Le programme 163, « Jeunesse et vie associative », bénéficie pour 2023 de 837 millions d’euros, soit une augmentation de 8,4 % par rapport à 2022.

Ces 65 millions d’euros supplémentaires sont en grande partie destinés au service national universel, dont les crédits augmentent de 30 millions, l’objectif étant que 64 000 jeunes soient concernés en 2023.

Les 140 millions d’euros de crédits dévolus au SNU sont démesurés par rapport à la faible attractivité de ce dispositif auprès des jeunes. Faut-il alors vraiment le maintenir ? Rappelons que l’objectif initial du Gouvernement était que, à l’horizon 2022, 800 000 jeunes effectuent un SNU.

À titre de comparaison, le service civique, qui, lui, suscite un véritable engouement auprès de la jeunesse, ne verra ses crédits augmenter en 2023 que de 20 millions d’euros. La crise sanitaire a révélé l’importance du rôle joué par les jeunes en service civique. Alors, pourquoi ne pas renforcer encore ce dispositif, dont les crédits ne progressent que de 4 %, soit moins que l’inflation ?

Un autre fait est absolument regrettable : la baisse de 10 % des crédits destinés au développement de la vie associative et au soutien du bénévolat. Très affaibli, le secteur avait déjà dû subir au début du quinquennat précédent une baisse drastique des contrats aidés, la suppression de la réserve parlementaire et, en 2020 et en 2021, la crise sanitaire.

Certes, les activités associatives redémarrent progressivement, mais les problèmes auxquels sont confrontées les associations sont encore très importants. Je le vois dans mon département du Pas-de-Calais, où les acteurs associatifs me font part de leurs difficultés, qui vont croître avec la crise économique.

J’ai un autre regret : la baisse des dotations en faveur des métiers de l’animation et celle du nombre de jeunes ciblés par le Bafa et le BAFD, le brevet d’aptitude aux fonctions de directeur. Pourtant, la pénurie d’animateurs formés a des effets négatifs sur les structures de loisirs. Les causes sont multiples : conséquences de la crise sanitaire, coût de la formation, par exemple. Une réflexion doit être engagée sur la prise en charge de cette formation.

Pour conclure, force est de constater que les crédits de la mission « Sport, jeunesse et vie associative » pour 2023 augmentent de façon trop modeste. Ils sont même en diminution si l’on tient compte de la non-reconduction des crédits issus du plan de relance depuis deux ans. Ce sont les actions au profit du sport pour tous et de la vie associative qui pâtiront le plus de ce manque de moyens.

Compte tenu de ces signaux d’alerte, les sénateurs du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain s’associent aux avis de sagesse exprimés par nos deux rapporteurs et s’abstiendront donc sur le vote des crédits de la mission « Sport, jeunesse, vie associative » pour 2023. (Applaudissements sur les travées du groupe SER.)

M. le président. La parole est à M. Pierre Ouzoulias.

M. Pierre Ouzoulias. Monsieur le président, madame la ministre, mesdames les secrétaires d’État, mes chers collègues, une très grande part de ce projet de budget est consacrée à l’accompagnement des jeux Olympiques et Paralympiques de Paris. Pourtant, de fortes incertitudes demeurent sur l’organisation et le financement de dispositifs absolument nécessaires à leur bon déroulement.²

Pour commencer, je tiens à saluer l’esprit de responsabilité des collectivités, qui ont accepté de prendre à leur charge une grande partie des surcoûts de construction de plusieurs équipements.

Pour obtenir les jeux, ses futurs organisateurs avaient pris notamment des engagements très fermes sur la réalisation d’infrastructures de transport, qui devaient permettre une circulation aisée et une consommation de carbone réduite.

À 610 jours de l’ouverture des jeux Olympiques, il faut reconnaître avec honnêteté que ces engagements ne seront définitivement pas tenus.

De toutes les lignes de transport prévues dans le dossier de la candidature parisienne, une seule sera disponible pour les jeux. Il a donc été décidé de mettre en œuvre, dans l’urgence, des transports alternatifs. Ainsi, 1 400 bus et cars spécifiques seront mobilisés, sur des voies réservées, pour les 200 000 personnes accréditées.

À rebours des promesses du comité d’organisation, les jeux de Paris vont donc aggraver la pollution, accroître les embarras liés à la circulation des véhicules et dégrader davantage les conditions de déplacement des usagers des transports publics. Il est à craindre que la vie quotidienne des Franciliens ne pâtisse grandement du déroulement de ces jeux. À l’avenir, c’est l’acceptabilité de ces grandes manifestations qui est menacée.

Les différents sites ont été installés à proximité de lignes que l’État, par l’entremise de la Société du Grand Paris, s’était engagé à livrer avant l’ouverture de ces jeux. Lors de son audition par notre commission, le 19 décembre 2018, M. Castex, alors délégué interministériel aux jeux Olympiques et Paralympiques, nous déclarait : « Je suis peut-être un peu “vieux jeu”, mais lorsqu’un Président de la République, un Premier ministre, quels qu’ils soient, engagent la parole de la France à l’international, spontanément, j’ai tendance à penser qu’il faut l’honorer. »

Force est de reconnaître que cette parole n’a pas été honorée. Mais il y a pire. Par la loi du 21 février 2022 relative à la différenciation, la décentralisation, la déconcentration et portant diverses mesures de simplification de l’action publique locale, vous avez transféré à Île-de-France Mobilités, c’est-à-dire aux collectivités, la compétence des transports des personnes accréditées et, donc, la gestion de 1 400 bus. Comment cet établissement va-t-il trouver les chauffeurs nécessaires, alors qu’il en manque 1 800 en Île-de-France ?

Quel est le coût de ce nouveau service et comment Île-de-France Mobilités va-t-il le financer, alors que cet organisme est proche de la cessation de paiements et que le Gouvernement et la majorité sénatoriale ont refusé, ce mercredi, de lui permettre d’accroître ses ressources financières ?

Vous nous avez expliqué à plusieurs reprises, madame la ministre des sports, que les jeux devaient financer les jeux. Nous constatons aujourd’hui que ce sont les collectivités qui prennent à leur charge les surcoûts et pallient les défaillances.

Les jeux ne peuvent être organisés sans argent public, mais vous avez choisi de maintenir le plafond des taxes qui financent l’Agence nationale du sport.

Il est tout à fait regrettable que ce débat budgétaire ne nous ait pas permis d’apprécier plus justement les conséquences financières des manquements de l’État à ses engagements pris lors de la candidature de Paris. C’est pour cette raison que nous voterons contre les crédits de cette mission. (Applaudissements sur les travées du groupe CRCE.)

M. le président. La parole est à M. Claude Kern. (Applaudissements sur les travées du groupe UC.)

M. Claude Kern. Monsieur le président, madame la ministre, mesdames les secrétaires d’État, mes chers collègues, les crédits de la mission que nous examinons aujourd’hui interpellent à plusieurs égards selon le prisme par lequel nous décidons de les aborder : court terme ou long terme, performances de haut niveau ou sport pour tous, abondement général ou capillarité dans les territoires.

Dans la perspective des jeux Olympiques et Paralympiques, ainsi que des prochaines échéances sportives majeures, le budget général augmente de 5,8 %, ce qui est inédit. C’est bien évidemment une nouvelle réjouissante.

De même, nous nous devons de saluer le retour d’un ministère des sports de plein exercice, dans la perspective des jeux Olympiques et Paralympiques, ce qui constitue un signal fort.

Cependant, et notre enthousiasme trouve là ses limites, nous attendons que l’État poursuive son effort après cette échéance. Car les questions restent nombreuses en termes de cohésion nationale, de dynamisme, d’engagement de la jeunesse, d’insertion, mais aussi de santé. La lecture du projet annuel de performance du programme « Sport » n’apaise nullement les inquiétudes que nous pouvons avoir : les crédits baisseraient de 20 % entre 2023 et 2025.

Une « grande nation sportive », comme se plaît à l’évoquer le Président de la République requiert une vision budgétaire stable, claire et déclinée de telle façon qu’elle permette à l’ensemble des acteurs du monde du sport de s’engager

Or ce budget, en l’état, pèche encore trop par certains aspects, notamment en dynamique de long terme et, a fortiori, dans un contexte inédit d’inflation.

Ainsi, au sein du programme « Sport », l’ANS bénéficie certes de 11 millions d’euros supplémentaires pour mieux structurer sa gouvernance et amplifier son action territoriale, mais les politiques publiques doivent être davantage transversales et associer pleinement toutes les parties prenantes. Le volet territorial de l’Agence doit être dynamisé, car il reste inachevé, deux ans après sa création.

Par ailleurs, l’ANS bénéficiera cette année, en plus de la ligne budgétaire du programme, de 170 millions d’euros de taxes affectées, taxes dont le rendement diminue encore cette année. Il faut agir sur le plafond de ces taxes pour dégager des recettes suffisantes et financer l’ensemble des problématiques qui restent en suspens. À cet égard, nous regrettons votre obstination à ne pas vouloir que « le sport finance le sport » !

Le sport français a besoin de ressources supplémentaires pour assurer sa présence sur la durée dans tous les territoires. Nous connaissons, dans cette enceinte, le rôle massif et crucial joué par collectivités en tant que premiers financeurs publics du sport.

Une nouvelle enveloppe de 100 millions d’euros est dédiée aux équipements sportifs de proximité, dans la continuité des engagements du Président de la République à « mettre le sport au cœur de la Nation », que ce soit dans le cadre des jeux Olympiques et Paralympiques ou dans l’optique d’un enjeu d’héritage.

Mais, concrètement, quand on mesure l’ampleur du chantier, il semble évident qu’il manque un véritable engagement de l’État. Les collectivités ne peuvent supporter seules le coût des adaptations.

On note enfin une faible progression des crédits en faveur du sport pour tous, alors que les clubs souffrent encore. Ils ont besoin de pouvoir anticiper, de se développer, de renforcer l’emploi et la formation des éducateurs et des entraîneurs pour répondre aux attentes et aux besoins des Français.

Il aurait fallu faire des efforts dans ce domaine. À cet égard, on peut s’interroger sur le maillage des maisons sport-santé, même si elles se voient attribuer 4 millions d’euros. Est-ce suffisant pour renverser la dynamique du sport pour tous, qui est carencée ?

En tout état de cause, il faut encore développer la pratique sportive, véritable enjeu de santé publique. Tous ces domaines d’intervention nécessitent à la fois une articulation parfaite entre les politiques menées entre l’État et celles qui le sont par les collectivités, ainsi qu’un choc de décentralisation et de rationalisation.

Au sein du programme « Jeunesse et vie associative », j’insisterai sur les crédits dédiés au soutien à la vie associative, qui n’augmentent pas, alors que le contexte actuel de crise a des effets significatifs sur le tissu associatif.

Certes, on note une sanctuarisation du fonds pour le développement de la vie associative, dont les crédits sont reconduits. Cependant, nous regrettons que l’ensemble des mesures visant à valoriser l’engagement bénévole adoptées lors de l’examen de la loi du 2 mars 2022 visant à démocratiser le sport en France n’ait pas rencontré plus d’écho.

Le SNU et le service civique favorisent-ils réellement chez nos jeunes l’autonomie et le développement de compétences tout en répondant à leurs attentes ? Nous pouvons en douter. Peut-être faudrait-il repenser ce dispositif et le simplifier ?

Enfin, en tant que corapporteur sur les crédits du programme « Jeux Olympiques et Paralympiques 2024 », je ne peux conclure mon propos sans dire un mot sur le budget de cet événement majeur qui nous oblige à bien des égards et qui, en raison de l’inflation, doit être le centre de notre attention afin d’éviter tout dérapage financier. Le Cojop et la Solideo devront y veiller.

Une enveloppe de près de 4 milliards d’euros était prévue pour l’organisation de ces jeux et de 3,7 milliards d’euros pour les infrastructures. Ces montants devront à l’évidence être actualisés. Si nous sommes évidemment conscients du poids des dépenses contraintes, sur lesquelles nous n’avons aucune prise, il est de bonne guerre de pointer une certaine sous-évaluation des dépenses dès le départ, conséquence d’un modèle, celui que vous nous avez présenté, dont l’équilibre était largement perfectible.

Les aspects sécurité, énergie, billetterie et partenariats doivent, à terme, être maîtrisés et équilibrés, et des arbitrages doivent être effectués. Comment abordez-vous cette nécessaire révision budgétaire ? Madame la ministre, il nous faut la plus grande transparence sur ces sujets, car cet événement doit rester festif et faire rayonner la France à l’échelon international. Il ne saurait se transformer en une addition douloureuse pour les Français.

En conclusion, le groupe Union Centriste, au nom duquel j’interviens, votera les crédits de cette mission, tout en soulignant, après les réserves que je viens d’exprimer, que la « grande nation sportive » doit s’envisager comme une véritable course de fond et nécessite un engagement et des apports concrets.

Encore un petit effort, madame la ministre ! (Applaudissements sur les travées du groupe UC.)

M. le président. La parole est à M. Bernard Fialaire. (Applaudissements sur les travées du groupe RDSE.)

M. Bernard Fialaire. Monsieur le ministre, madame la ministre, mesdames les secrétaires d’État, mes chers collègues, nous savons que l’activité physique est un outil indispensable de prévention du surpoids et de l’obésité, mais également de réussite scolaire et d’épanouissement personnel.

Aussi, nous saluons les démarches du Gouvernement visant à encourager les Français, notamment la jeunesse, à prendre goût à l’activité physique, grâce à la généralisation des trente minutes quotidiennes dans toutes les écoles, l’expérimentation de deux heures supplémentaires de sport pour les collégiens et l’extension du Pass’Sport à 800 000 étudiants boursiers à la rentrée 2022.

Le sport, qui permet cet épanouissement personnel physique et psychique, qui développe le goût de l’effort, de la persévérance, le respect des règles, des arbitres, des éducateurs et des adversaires, est un excellent vecteur de fraternité, nécessaire à la cohésion sociale. C’est également un excellent promoteur de l’activité physique.

Aussi, je vous rappelle, madame la ministre, mon interpellation pour la promotion du sport scolaire et universitaire, qui devrait avoir une place prépondérante par rapport au « sport business » et à ses excès.

S’agissant de notre tissu associatif, il continue d’encaisser le choc de la pandémie. Notre collègue du groupe RDSE, Éric Gold, avait déposé une proposition de loi à ce sujet : face aux restrictions d’activités, aux reports ou aux annulations de manifestations sportives et culturelles, aux résiliations d’adhésion, il proposait d’accorder un soutien financier accru aux associations. Ce texte n’a malheureusement pas été adopté.

Notre rapporteur pour avis, Jacques-Bernard Magner, porte à notre attention deux éléments : la stagnation des crédits consacrés au FDVA et la complexité de certains dispositifs de soutien du tissu associatif.

Pour ma part, je prône un soutien accru à la formation dans le domaine de l’animation pour l’accueil collectif des jeunes. Madame la secrétaire d’État à la jeunesse, je vous ai interpellée ce mois-ci par une question écrite au sujet des difficultés de recrutement du secteur. L’animation n’attire plus. Certains territoires ont dû revoir à la baisse leur offre d’accueil collectif.

Je proposais d’assouplir temporairement les règles d’encadrement en prévoyant un animateur pour vingt-cinq enfants par exemple, contre dix-huit actuellement, pour les enfants que l’on considère comme suffisamment autonomes du fait de leur âge. En milieu périscolaire, je proposais d’autoriser un effectif équivalent à une classe, ce qui permettrait à de nombreuses communes de satisfaire à cette exigence.

Je salue le travail fourni grâce à votre plan « Pour un renouveau de l’animation en accueils collectifs de mineurs », qui dégage 5 millions d’euros d’aides pour la formation au Bafa et revalorise le contrat d’engagement éducatif. Ce cap doit être maintenu.

Il faut abattre les cloisons entre l’école, la maison et la rue, agir en synergie sur les temps scolaire et périscolaire pour mieux appréhender globalement l’éducation.

L’école ouverte procède de cette idée en renforçant l’articulation entre l’école et les associations, qu’elles soient sportives ou culturelles, et les communes qui les soutiennent : en intensifiant le lien entre l’école et les familles via les services médico-sociaux des départements ; entre l’école et les régions pour l’orientation et les stages de découverte.

Cette vision d’ensemble doit être le principe directeur de votre action pour que nous puissions voter les crédits de cette mission.