Mme la présidente. Le sous-amendement n° 650, présenté par Mme M. Jourda et M. Bonnecarrère, au nom de la commission, est ainsi libellé :

Amendement n° 350, alinéa 6

Après le mot :

édictée

insérer les mots :

après vérification du droit au séjour

La parole est à M. le rapporteur, pour présenter ce sous-amendement et donner l’avis de la commission sur les amendements en discussion.

M. Philippe Bonnecarrère, rapporteur. Ce sous-amendement vise à consolider la sécurité juridique de l’amendement de M. Retailleau, en introduisant, conformément au souhait du Conseil d’État et à sa jurisprudence, une référence à la vérification préalable du droit au séjour. La commission est favorable à l’amendement n° 350 rectifié, sous réserve de l’adoption de notre sous-amendement.

En revanche, l’avis est défavorable sur l’amendement n° 546 rectifié bis.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Gérald Darmanin, ministre. Avis défavorable sur l’amendement n° 350 rectifié.

Nous ne sommes pas opposés au principe que M. Retailleau pose, mais le dispositif envisagé ne nous semble pas correspondre tout à fait à l’avis du Conseil d’État et à nos discussions antérieures, même si j’ai bien noté qu’il était différent de la mesure prévue à l’amendement n° 348 rectifié.

Le Gouvernement a lui-même déposé un amendement sur cet article – c’est l’amendement n° 612, dont je suis d’ailleurs surpris qu’il ne soit pas en discussion commune –, et sa rédaction nous semble préférable. M. Retailleau retire les protections et laisse le juge faire ; nous conservons les protections, tout en insérant une référence aux menaces pour l’ordre public, afin d’essayer d’être conformes à ce que nous évoquions.

Par ailleurs, le Gouvernement est défavorable à l’amendement n° 546 rectifié bis.

Mme la présidente. Monsieur le ministre, j’attire votre attention sur le fait qu’en cas d’adoption de l’amendement n° 350 rectifié, les autres amendements déposés sur l’article 10 deviendraient sans objet.

M. Gérald Darmanin, ministre. C’est pour cette raison que je regrettais qu’il n’y ait pas de discussion commune.

Mme la présidente. La parole est à M. le rapporteur.

M. Philippe Bonnecarrère, rapporteur. Je souhaitais simplement apporter la précision que vous avez vous-même faite, madame la présidente : si l’amendement n° 350 rectifié est adopté, l’amendement du Gouvernement deviendra sans objet.

Mme la présidente. La parole est à M. Bruno Retailleau, pour explication de vote.

M. Bruno Retailleau. J’accepte volontiers le sous-amendement de la commission, que j’avais d’ailleurs anticipé dans la défense de mon amendement. Comme je l’ai indiqué, le public visé, ce sont des étrangers en situation irrégulière : que l’on vérifie le caractère irrégulier de leur situation me semble être une mesure de bon sens.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 546 rectifié bis.

(Lamendement nest pas adopté.)

Mme la présidente. Je mets aux voix le sous-amendement n° 650.

(Le sous-amendement est adopté.)

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 350 rectifié, modifié.

J’ai été saisie d’une demande de scrutin public émanant du groupe Les Républicains.

Je rappelle que l’avis de la commission est favorable et que celui du Gouvernement est défavorable.

Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l’article 56 du règlement.

Le scrutin est ouvert.

(Le scrutin a lieu.)

Mme la présidente. Personne ne demande plus à voter ?…

Le scrutin est clos.

J’invite Mmes et MM. les secrétaires à constater le résultat du scrutin.

(Mmes et MM. les secrétaires constatent le résultat du scrutin.)

Mme la présidente. Voici, compte tenu de l’ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 31 :

Nombre de votants 342
Nombre de suffrages exprimés 316
Pour l’adoption 204
Contre 112

Le Sénat a adopté.

En conséquence, l’article 10 est ainsi rédigé, et les amendements nos 544 rectifié ter, 110, 612 et 266 n’ont plus d’objet.

Article 10
Dossier législatif : projet de loi pour contrôler l'immigration, améliorer l'intégration
Article additionnel après l'article 10 - Amendement n° 542 rectifié bis

Après l’article 10

Après l’article 10
Dossier législatif : projet de loi pour contrôler l'immigration, améliorer l'intégration
Article additionnel après l'article 10 - Amendements n° 537 rectifié ter et n° 595

Mme la présidente. L’amendement n° 542 rectifié bis, présenté par M. Ravier, est ainsi libellé :

Après l’article 10

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Aux premier et deuxième alinéas de l’article L. 612-1 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile, le mot : « trente » est remplacé par le mot : « quinze ».

La parole est à M. Stéphane Ravier.

M. Stéphane Ravier. Au vu du nombre d’OQTF ordonnées chaque année, soit 124 000 en 2021 selon le Conseil d’État, de l’embolie des tribunaux administratifs qui en résulte et de l’explosion de l’insécurité due à cette immigration irrégulière sous OQTF, je propose de réduire le délai de départ volontaire des OQTF de moitié. En passant ce délai de trente jours à quinze jours, nous envoyons un message de fermeté. Nos compatriotes n’acceptent plus ce délai de départ volontaire ni le délai de recours, beaucoup trop longs, car ils savent que c’est une manière de s’évanouir dans la nature. Les intéressés se passent le mot, à l’aide des associations et de leur communauté sur place, sans oublier évidemment le réseau de la gauche.

La procédure administrative française devient alors une farce pour eux. C’est ainsi que nous sommes passés de 22 % d’exécution des OQTF en 2012, ce qui n’était déjà pas fameux, à 7 % en 2022, ce qui est catastrophique.

Je le répète, nous devons envoyer un message de fermeté et ne pas laisser aux clandestins le temps de se retourner pour organiser le prolongement de leur clandestinité.

C’est pourquoi, mes chers collègues, je vous invite à soutenir cet amendement de bon sens.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Muriel Jourda, rapporteur. La commission ne soutiendra pas votre amendement, monsieur Ravier.

En effet, nous estimons qu’au regard de la difficulté à éloigner aujourd’hui, réduire le délai n’aurait pas grand sens. Il nous paraît préférable de maintenir ce délai de départ à trente jours, en cohérence avec les nouveaux délais qui vont être prévus par la réforme du contentieux, dont nous discuterons un peu plus tard.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Gérald Darmanin, ministre. Même avis.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 542 rectifié bis.

(Lamendement nest pas adopté.)

Article additionnel après l'article 10 - Amendement n° 542 rectifié bis
Dossier législatif : projet de loi pour contrôler l'immigration, améliorer l'intégration
Article additionnel après l'article 10 - Amendement n° 545 rectifié bis

Mme la présidente. Je suis saisie de deux amendements faisant l’objet d’une discussion commune.

L’amendement n° 537 rectifié ter, présenté par M. Ravier, est ainsi libellé :

Après l’article 10

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le second alinéa des articles L. 612-6, L. 612-7 et L. 612-8 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile est supprimé.

La parole est à M. Stéphane Ravier.

M. Stéphane Ravier. L’interdiction de retour sur le territoire français (IRTF) est une décision prise par le préfet à la suite d’une OQTF.

Dans les précédentes versions du Ceseda, les interdictions de retour sur le territoire français n’étaient pas soumises à limitation dans le temps. Je propose de revenir à cette version.

La raison va de soi : par souci de fermeté, le caractère illimité de ces interdictions doit être érigé en principe. Si on ne peut pas accueillir toute la misère du monde, et on ne le peut pas, on ne peut a fortiori pas accueillir toute la misère du monde plusieurs fois !

Avec ces limites, nous nous lions les mains, et nous nous condamnons à recommencer toujours les mêmes procédures. Un client satisfait est un client qui revient, et cela cause de la désespérance au sein de l’administration préfectorale, qui tente par tous les moyens d’assurer ses missions et d’éviter le naufrage national.

Les articles L. 613-7 et L. 613-8 du Ceseda constituent des garanties suffisantes d’abrogation de l’interdiction de retour.

Mme la présidente. L’amendement n° 595, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :

Après l’article 10

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le titre Ier du livre VI du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile est ainsi modifié :

1° Le second alinéa de l’article L. 612-6 est complété par les mots : « , et dix ans au cas de menace grave pour l’ordre public. » ;

2° La section 4 du chapitre III est complétée par un article L. 613-9 ainsi rédigé :

« Art. L. 613-9. – Les motifs de la décision d’interdiction de retour sur le territoire français donnent lieu à un réexamen tous les cinq ans à compter de sa date d’édiction. L’autorité compétente tient compte de l’évolution de la menace pour l’ordre public que constitue la présence de l’intéressé en France, des changements intervenus dans sa situation personnelle et familiale et des garanties de réinsertion professionnelle ou sociale qu’il présente, en vue de prononcer éventuellement l’abrogation de cette décision. L’étranger peut présenter des observations écrites.

« À défaut de notification à l’intéressé d’une décision explicite d’abrogation dans un délai de deux mois, ce réexamen est réputé avoir conduit à une décision implicite de ne pas abroger. Cette décision est susceptible de recours. »

La parole est à M. le ministre.

M. Gérald Darmanin, ministre. La mesure que je propose d’ajouter au texte est assez simple. Il s’agit d’allonger la durée de l’interdiction administrative de territoire (IAT) de cinq ans à dix ans.

Aujourd’hui, lorsque vous expulsez quelqu’un du territoire national, vous lui opposez en même temps un acte administratif que l’on appelle une IAT, dont la durée est aujourd’hui de cinq ans. Elle concerne évidemment les personnes les plus dangereuses, par exemple des radicalisés inscrits au fichier de traitement des signalements pour la prévention de la radicalisation à caractère terroriste (FSPRT).

Nous avons considéré, avec les services de la direction générale de la sécurité intérieure (DGSI) et de la direction des libertés publiques et des affaires juridiques (DLPAJ), dont je salue le travail au quotidien auprès du ministre de l’intérieur, qu’il fallait doubler la durée de cette IAT, tout en respectant le cadre constitutionnel.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Muriel Jourda, rapporteur. Ces deux amendements traduisent une exigence de fermeté. Celui de M. Ravier n’est pas conforme à la directive « retour », contrairement à celui du Gouvernement. Avis défavorable sur le premier et avis favorable sur le second.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement sur l’amendement n° 537 rectifié ter ?

M. Gérald Darmanin, ministre. Avis défavorable.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 537 rectifié ter.

(Lamendement nest pas adopté.)

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 595.

(Lamendement est adopté.)

Article additionnel après l'article 10 - Amendements n° 537 rectifié ter et n° 595
Dossier législatif : projet de loi pour contrôler l'immigration, améliorer l'intégration
Article 11

Mme la présidente. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l’article 10.

L’amendement n° 545 rectifié bis, présenté par M. Ravier, est ainsi libellé :

Après l’article 10

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Au 3° alinéa de l’article L. 721-4 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile, les mots : « , avec l’accord de l’étranger » sont supprimés.

La parole est à M. Stéphane Ravier.

M. Stéphane Ravier. Ce Ceseda a vraiment été rédigé à une période et par un législateur particulièrement bienveillants avec les étrangers. Ce n’est pas un mal en soi, mais c’est difficilement entendable dans la situation actuelle, compte tenu des responsabilités qui sont les nôtres.

Aujourd’hui, l’autorité administrative peut désigner comme pays de renvoi soit le pays dont l’étranger a la nationalité, soit un autre pays avec lequel il y a un accord bilatéral, soit, avec l’accord de l’étranger, tout autre pays dans lequel il est légalement admissible.

Si l’étranger fait l’objet d’un renvoi du territoire national, cela fait suite à une infraction de sa part qui justifie la fermeté de l’État.

Pour rendre ce dispositif encore plus ferme, je souhaite supprimer le consentement de l’étranger sur le choix par l’autorité administrative d’un pays de renvoi dans lequel il serait légalement admissible. L’État a aussi des droits : il doit avoir le champ le plus large possible pour exécuter les décisions d’éloignement.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Muriel Jourda, rapporteur. Une telle disposition serait inconventionnelle. Avis défavorable.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Gérald Darmanin, ministre. Même avis.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 545 rectifié bis.

(Lamendement nest pas adopté.)

Article additionnel après l'article 10 - Amendement n° 545 rectifié bis
Dossier législatif : projet de loi pour contrôler l'immigration, améliorer l'intégration
Article 11 bis (nouveau)

Article 11

Le code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile est ainsi modifié :

1° L’article L. 331-2 est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« En cas de refus caractérisé de se soumettre au relevé des empreintes digitales et à la prise de photographie prévus au 3° de l’article L. 142-1, par l’étranger contrôlé à l’occasion du franchissement d’une frontière extérieure sans remplir les conditions d’entrée prévues à l’article 6 du règlement précité ou à l’article L. 311-1 du présent code, l’officier de police judiciaire ou, sous contrôle de celui-ci, l’agent de police judiciaire peut, sur autorisation du procureur de la République que l’officier de police judiciaire a saisi préalablement, procéder à cette opération sans le consentement de l’intéressé, en présence de son avocat. L’étranger doit avoir été dûment informé des conséquences de son refus. Le recours à la contrainte, qui ne peut concerner qu’un étranger manifestement âgé d’au moins dix-huit ans, doit poursuivre les objectifs du présent article, être strictement proportionné et tenir compte de la vulnérabilité de la personne. L’article L. 821-2 demeure applicable. » ;

2° Après la première phrase de l’article L. 813-10, sont insérées quatre phrases ainsi rédigées : « Lorsque le refus de l’étranger de se soumettre aux opérations de relevé des empreintes digitales et de prise de photographie est caractérisé, l’officier de police judiciaire ou, sous contrôle de celui-ci, l’agent de police judiciaire peut, sur autorisation du procureur de la République que l’officier de police judiciaire a saisi préalablement, procéder à cette opération sans le consentement de l’intéressé, en présence de son avocat. L’étranger doit avoir été dûment informé des conséquences de son refus. Le recours à la contrainte, qui ne peut concerner qu’un étranger manifestement âgé d’au moins dix-huit ans, doit poursuivre les objectifs du présent article, être strictement proportionné et tenir compte de la vulnérabilité de la personne. Les articles L. 822-1 et L. 824-2 demeurent, selon le cas, applicables. »

Mme la présidente. Je suis saisie de deux amendements identiques.

L’amendement n° 291 rectifié est présenté par M. Benarroche, Mme M. Vogel, MM. G. Blanc et Dantec, Mme de Marco, MM. Dossus, Fernique et Gontard, Mme Guhl, MM. Jadot et Mellouli, Mmes Ollivier et Poncet Monge, M. Salmon et Mmes Senée et Souyris.

L’amendement n° 454 est présenté par M. Brossat, Mme Cukierman et les membres du groupe Communiste Républicain Citoyen et Écologiste – Kanaky.

Ces deux amendements sont ainsi libellés :

Supprimer cet article.

La parole est à M. Guy Benarroche, pour présenter l’amendement n° 291 rectifié.

M. Guy Benarroche. L’article 11 du présent projet de loi a pour objet d’autoriser le recours à la coercition pour le relevé des empreintes digitales et la prise de photographies des étrangers en situation irrégulière.

Je rappelle en préambule que les articles L. 821-2, L. 822-1 et L. 824-2 du Ceseda punissent déjà d’un an d’emprisonnement le fait de refuser le relevé de ses empreintes digitales.

Comme le souligne à raison le Syndicat de la magistrature : « Ces dispositions constituent des atteintes légales inédites à plusieurs droits fondamentaux : le principe d’inviolabilité du corps humain, la liberté individuelle, le principe de la dignité de la personne humaine. »

Même si la commission des lois a atténué un peu la portée de l’article, notamment grâce à des amendements du groupe écologiste, en prévoyant l’autorisation préalable du magistrat pour cette coercition, la présence d’un avocat et l’exclusion des mineurs du champ de la mesure, nous considérons que cet article est toujours la marque d’une dérive autoritaire grave. Nous proposons donc sa suppression.

Mme la présidente. La parole est à Mme Evelyne Corbière Naminzo, pour présenter l’amendement n° 454.

Mme Evelyne Corbière Naminzo. La disposition proposée dans le projet de loi et acceptée par la commission des lois est, à nos yeux, problématique sur le plan du respect des droits les plus élémentaires, mais, surtout, sur celui de la conception de l’étranger qu’une telle mesure met en évidence.

Le rapport, de manière volontaire ou non, démontre clairement que le choix du Gouvernement est de pouvoir appliquer le relevé des empreintes digitales et la prise de photographies aux étrangers et étrangères, alors que, dans le droit français, jusqu’alors, cette possibilité était réservée aux personnes soupçonnées d’avoir commis des infractions d’une certaine gravité, et dans le cadre d’une enquête de flagrance. Ainsi ce texte établit-il une présomption de culpabilité à l’égard de tout étranger et de toute étrangère, même si ce dernier ou cette dernière n’est a priori coupable d’aucun délit.

Le Conseil d’État et le Conseil constitutionnel avaient rappelé la nécessité d’encadrer cette disposition pour assurer le respect des libertés publiques. La commission des lois elle-même – une fois n’est pas coutume ! – a tout de même cherché à atténuer la dureté du texte, en soustrayant notamment les mineurs de 13 ans de son champ d’application, et en rappelant la nécessaire présence d’un avocat lors du relevé des empreintes ou de la prise de photographies.

Mes chers collègues, allez jusqu’au bout de cette volonté de protection des droits en supprimant l’article 11. (Applaudissements sur les travées du groupe CRCE-K.)

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Muriel Jourda, rapporteur. En effet, nous étions d’accord avec la possibilité de prise d’empreintes par coercition, mesure proposée par le Gouvernement pour rendre plus efficiente l’identification des étrangers en situation irrégulière.

Nous avons cherché non pas à atténuer le texte, mais à garantir une telle possibilité en tirant toutes les conséquences d’une question prioritaire de constitutionnalité qui avait été soulevée et à laquelle le Conseil constitutionnel a répondu le 23 février dernier.

Monsieur Benarroche, vous avez à juste titre indiqué que vous aviez vous-même fait voter un amendement en ce sens en commission. Je vois que vous avez changé d’avis. Pas nous ! Avis défavorable.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Gérald Darmanin, ministre. Avis défavorable.

La proposition du Gouvernement qu’a modifiée la commission des lois vise évidemment à permettre l’identification des personnes. Sans cela, il ne peut pas y avoir éloignement, parce que l’on perd beaucoup de temps. Nous en avons donc besoin.

Les sanctions pénales prévues n’étaient pas assez dissuasives. C’est la raison pour laquelle nous vous proposons cet article.

Madame Corbière Naminzo, monsieur Benarroche, nous ne sommes pas le seul pays à pouvoir pratiquer une telle coercition : l’Autriche, la République tchèque, l’Allemagne, l’Italie, les Pays-Bas, la Pologne, la Slovaquie, le Royaume-Uni, la Norvège, la Hongrie, la Finlande, la Croatie et l’Estonie l’autorisent. C’est plutôt nous qui sommes l’exception !

Mme la présidente. La parole est à Mme Evelyne Corbière Naminzo, pour explication de vote.

Mme Evelyne Corbière Naminzo. Monsieur le ministre, je vous remercie d’avoir énuméré tous ces pays, mais je vous invite à regarder ce qui se passe outre-mer. Sachez qu’il y a aussi des étrangers qui sont des étrangères à La Réunion. Elles arrivent sur le territoire français parce que de bons Français sont allés les chercher dans leur pays en leur promettant monts et merveilles. Une fois en France, ils les maltraitent et les contraignent à la clandestinité. Or ce sont elles qui se retrouveront dans l’illégalité et seront contrôlées et fichées ! (Applaudissements sur les travées du groupe CRCE-K.)

Mme la présidente. Je mets aux voix les amendements identiques nos 291 rectifié et 454.

(Les amendements ne sont pas adoptés.)

Mme la présidente. L’amendement n° 11 rectifié bis, présenté par Mmes M. Carrère et N. Delattre, MM. Bilhac, Cabanel, Gold, Guérini, Guiol, Laouedj, Roux et Fialaire, Mmes Guillotin et Pantel et M. Masset, est ainsi libellé :

Alinéas 3 et 4, troisième phrase

Après le mot :

contrainte

insérer les mots :

dans la mesure strictement nécessaire

La parole est à M. Ahmed Laouedj.

M. Ahmed Laouedj. L’article 11 permet le relevé des empreintes digitales et la prise de photographies sans son consentement de l’étranger en séjour irrégulier ou contrôlé à l’occasion de son franchissement de la frontière alors qu’il ne satisfait pas aux conditions d’entrée sur le territoire.

Nous ne sommes pas forcément contre un tel dispositif. Cependant, nous considérons que le régime de la prise d’empreintes d’une personne en situation irrégulière ne saurait être plus liberticide que celui d’une personne suspectée d’avoir commis une infraction. Aussi, nous proposons d’introduire dans le régime des étrangers la formule consacrée par le code de procédure pénale, en son article 55-1 alinéa 5, s’agissant de la prise d’empreintes par coercition : « L’agent recourt à la contrainte dans la mesure strictement nécessaire. »

Nous avons déjà déposé un amendement dans cet esprit en commission pour prévoir l’exclusion des personnes manifestement mineures du dispositif de prise d’empreintes par coercition. Il a été adopté, et je propose, par cet amendement, de continuer d’aligner les différents régimes.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Muriel Jourda, rapporteur. Monsieur Laouedj, nous ne nous connaissons pas encore très bien, mais permettez-moi de vous dire que vous chipotez ! (Sourires.)

En effet, vous souhaitez que soient ajoutés les termes « dans la mesure strictement nécessaire », alors que nous avons retenu la formule « strictement proportionné ». Dans ces conditions, je pense pouvoir dire que votre amendement est satisfait. Je vous demande donc de le retirer, faute de quoi l’avis serait défavorable.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Gérald Darmanin, ministre. Même avis.

Mme la présidente. Monsieur Laouedj, l’amendement n° 11 rectifié bis est-il maintenu ?

M. Ahmed Laouedj. Non, madame la présidente. Si je souhaitais personnellement maintenir cet amendement, mon groupe, le RDSE, préfère le retirer. Je suivrai donc la position de mon groupe.

Mme la présidente. L’amendement n° 11 rectifié bis est retiré.

L’amendement n° 13 rectifié bis, présenté par Mmes M. Carrère et N. Delattre, MM. Bilhac, Cabanel, Gold, Guérini, Guiol, Laouedj, Roux, Fialaire et Grosvalet, Mmes Guillotin et Pantel et M. Masset, est ainsi libellé :

Alinéas 3 et 4, avant la dernière phrase

Insérer deux phrases ainsi rédigées :

Cette opération fait l’objet d’un procès-verbal, qui mentionne les raisons pour lesquelles elle constitue l’unique moyen d’identifier la personne ainsi que le jour et l’heure auxquels il y est procédé. Le procès-verbal est transmis au procureur de la République, copie en ayant été remise à l’intéressé.

La parole est à M. Michel Masset.

M. Michel Masset. Cet amendement est dans la même veine. Il s’agit d’aligner le régime des étrangers sur celui qui existe déjà en procédure pénale. Ainsi, nous souhaitons que la prise d’empreintes par coercition fasse l’objet d’un procès-verbal. Il n’est pas excessif de demander cela dès lors qu’un acte coercitif est exercé à l’encontre d’une personne.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Muriel Jourda, rapporteur. En effet, l’établissement d’un procès-verbal va de soi dans ce type de contrôle. Je ne suis pas sûre qu’il faille l’ajouter dans le texte. Avis défavorable.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Gérald Darmanin, ministre. Même avis.

Mme la présidente. Monsieur Masset, l’amendement n° 13 rectifié bis est-il maintenu ?

M. Michel Masset. Oui, madame la présidente.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 13 rectifié bis.

(Lamendement nest pas adopté.)

Mme la présidente. L’amendement n° 271, présenté par MM. Gontard et Benarroche, Mme M. Vogel, MM. G. Blanc, Dantec, Dossus et Fernique, Mme Guhl, M. Jadot, Mme de Marco, M. Mellouli, Mme Ollivier, M. Parigi, Mme Poncet Monge, M. Salmon et Mmes Senée et Souyris, est ainsi libellé :

Alinéa 4

Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée :

Dans le cadre de cette opération, l’officier de police judiciaire ou l’agent de police judiciaire est identifié par son numéro d’immatriculation administrative, sa qualité et son service ou unité d’affectation.

La parole est à M. Jacques Fernique.

M. Jacques Fernique. Depuis la fermeture des frontières intérieures, consécutivement aux attentats de 2015, le rôle de la police aux frontières, notamment à la frontière italienne, s’est considérablement accru, incluant notamment la gestion du flux migratoire en provenance de l’Italie.

Le durcissement constant de la politique migratoire française et la pression des directives assignées à la police aux frontières entraînent de plus en plus d’irrégularités dans le traitement des cas individuels des personnes étrangères, notamment dans l’établissement des décisions de refus d’entrée. Un certain nombre de ces irrégularités ont été documentées.

Il apparaît dès lors de plus en plus indispensable que les agents de la police aux frontières, comme tous les agents de police et gendarmerie nationale, appliquent strictement l’obligation de port visible de leur immatriculation administrative. Conformément à l’arrêté du 24 décembre 2013, les forces de l’ordre sont soumises à l’obligation de porter leur référentiel des identités et de l’organisation (RIO) lors de l’exercice de leurs missions.

Depuis lors, cette mesure n’est que partiellement appliquée, comme l’a notamment relevé la Défenseure des droits. Ainsi, le 11 octobre dernier, le Conseil d’État ordonnait encore au ministère de l’intérieur de veiller à l’application effective de cette obligation pour les forces de l’ordre.

Dans son arrêt, le Conseil d’État juge que les dimensions actuelles du numéro d’identification portées par les forces de l’ordre lors des rassemblements sont « inadaptées ». Il s’agit de « favoriser des relations de confiance entre les forces de sécurité intérieure et la population et d’assurer, dans l’intérêt de tous, l’identification des agents », précise la juridiction, qui « enjoint que ce numéro soit agrandi afin qu’il soit suffisamment lisible, en particulier lorsque les forces de l’ordre interviennent lors de rassemblements ou d’attroupements ». Le Conseil d’État a donné douze mois au ministère de l’intérieur pour se conformer à sa décision.

Cet amendement vise donc à appliquer une telle obligation aux agents de la police aux frontières, dès l’adoption du présent projet de loi, afin de garantir un plus grand respect des droits des personnes migrantes.